Quotients compacts des
groupes ultramétriques de rang un

Fanny Kassel
Résumé.

Soit G𝐺G l’ensemble des 𝐤𝐤\mathbf{k}-points d’un groupe algébrique semi-simple connexe de 𝐤𝐤\mathbf{k}-rang un sur un corps local ultramétrique 𝐤𝐤\mathbf{k}. Nous décrivons tous les sous-groupes discrets de type fini sans torsion de G×G𝐺𝐺G\times\nolinebreak G qui agissent proprement et cocompactement sur G𝐺G par multiplication à gauche et à droite. Nous montrons qu’après une petite déformation dans G×G𝐺𝐺G\times G un tel sous-groupe discret agit encore librement, proprement et cocompactement sur G𝐺G.


Abstract. Let G𝐺G be the set of 𝐤𝐤\mathbf{k}-points of a connected semisimple algebraic group of 𝐤𝐤\mathbf{k}-rank one over a nonarchimedean local field 𝐤𝐤\mathbf{k}. We describe all finitely generated torsion-free discrete subgroups of G×G𝐺𝐺G\times\nolinebreak G acting properly discontinuously and cocompactly on G𝐺G by left and right multiplication. We prove that after a small deformation in G×G𝐺𝐺G\times G such a discrete subgroup keeps acting freely, properly discontinuously, and cocompactly on G𝐺G.

1. Introduction

Soient 𝐤𝐤\mathbf{k} un corps local et G𝐺G l’ensemble des 𝐤𝐤\mathbf{k}-points d’un groupe algébrique semi-simple connexe 𝐆𝐆\mathbf{G} sur 𝐤𝐤\mathbf{k}, de 𝐤𝐤\mathbf{k}-rang un. Nous nous intéressons aux sous-groupes discrets ΓΓ\Gamma de G×G𝐺𝐺G\times G qui agissent librement, proprement et cocompactement sur G𝐺G par multiplication à gauche et à droite. De manière équivalente, ce sont les sous-groupes discrets ΓΓ\Gamma de G×G𝐺𝐺G\times G qui agissent librement, proprement et cocompactement sur l’espace homogène (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G}, où ΔGsubscriptΔ𝐺\Delta_{G} désigne la diagonale de G×G𝐺𝐺G\times G. Pour un tel groupe ΓΓ\Gamma, on dit que le quotient Γ\(G×G)/ΔG\Γ𝐺𝐺subscriptΔ𝐺\Gamma\backslash(G\times G)/\Delta_{G} est une forme de Clifford-Klein compacte, ou plus simplement un quotient compact, de (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G}.

Pour G=PSL2()𝐺subscriptPSL2G=\mathrm{PSL}_{2}(\mathbb{R}), par exemple, les quotients compacts de (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G} ont été largement étudiés par W. M. Goldman [Gol], T. Kobayashi [Ko2], [Ko3], R. S. Kulkarni et F. Raymond [KR], F. Salein [Sa1], [Sa2]. Ils apparaissent naturellement en géométrie : les variétés anti-de Sitter compactes de dimension 3, c’est-à-dire les variétés lorentziennes compactes de dimension 3 de courbure sectionnelle constante égale à 11-1, sont exactement les revêtements finis des quotients compacts de (PSL2()×PSL2())/ΔPSL2()subscriptPSL2subscriptPSL2subscriptΔsubscriptPSL2(\mathrm{PSL}_{2}(\mathbb{R})\times\mathrm{PSL}_{2}(\mathbb{R}))/\Delta_{\mathrm{PSL}_{2}(\mathbb{R})}. Cela résulte de la complétude de ces variétés [Kli] et d’un résultat de finitude du niveau [KR] (cf. l’introduction de [Sa2]). Pour G=SL2()𝐺subscriptSL2G=\mathrm{SL}_{2}(\mathbb{C}), les quotients compacts de (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G} ont également été étudiés par É. Ghys [Ghy] en lien avec les déformations de structures complexes sur les variétés compactes homogènes sous G𝐺G.

Dans cet article, nous nous intéressons au cas d’un corps local 𝐤𝐤\mathbf{k} ultramétrique, c’est-à-dire d’une extension finie de psubscript𝑝\mathbb{Q}_{p} ou du corps 𝔽q((t))subscript𝔽𝑞𝑡\mathbb{F}_{q}((t)) des séries de Laurent formelles à coefficients dans un corps fini 𝔽qsubscript𝔽𝑞\mathbb{F}_{q}. L’une de nos motivations vient de l’étude des quotients compacts de la quadrique

{(x1,x2,x3,x4)𝐤4,x12x22+x32x42=1},formulae-sequencesubscript𝑥1subscript𝑥2subscript𝑥3subscript𝑥4superscript𝐤4superscriptsubscript𝑥12superscriptsubscript𝑥22superscriptsubscript𝑥32superscriptsubscript𝑥421\big{\{}(x_{1},x_{2},x_{3},x_{4})\in\mathbf{k}^{4},\quad x_{1}^{2}-x_{2}^{2}+x_{3}^{2}-x_{4}^{2}=1\big{\}},

qui s’identifie à l’espace homogène (SL2(𝐤)×SL2(𝐤))/ΔSL2(𝐤)subscriptSL2𝐤subscriptSL2𝐤subscriptΔsubscriptSL2𝐤(\mathrm{SL}_{2}(\mathbf{k})\times\mathrm{SL}_{2}(\mathbf{k}))/\Delta_{\mathrm{SL}_{2}(\mathbf{k})} (cf. [Kas], § 5.3).

Pour tout groupe algébrique semi-simple connexe 𝐆𝐆\mathbf{G} sur 𝐤𝐤\mathbf{k}, de 𝐤𝐤\mathbf{k}-rang un, l’espace homogène (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G} admet un quotient compact. En effet, G𝐺G admet un réseau cocompact sans torsion Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} ([Lub], th. A) ; le groupe Γ0×{1}subscriptΓ01\Gamma_{0}\times\nolinebreak\{1\} agit librement, proprement et cocompactement sur (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G}. Les questions suivantes se posent alors naturellement :

  1. (1)

    décrire tous les quotients compacts Γ\(G×G)/ΔG\Γ𝐺𝐺subscriptΔ𝐺\Gamma\backslash(G\times G)/\Delta_{G} ;

  2. (2)

    comprendre le comportement de ces quotients compacts lorsque l’on déforme ΓΓ\Gamma dans G𝐺G; en particulier, déterminer si l’action de ΓΓ\Gamma reste propre et cocompacte ;

  3. (3)

    établir l’existence d’un quotient compact Γ\(G×G)/ΔG\Γ𝐺𝐺subscriptΔ𝐺\Gamma\backslash(G\times G)/\Delta_{G} tel que ΓΓ\Gamma soit Zariski-dense dans G×G𝐺𝐺G\times G.

Dans cet article, nous répondons aux trois questions. Nous obtenons ainsi des analogues ultramétriques de résultats connus pour PSL2()subscriptPSL2\mathrm{PSL}_{2}(\mathbb{R}).

1.1. Énoncé des résultats principaux

Rappelons que le groupe G𝐺G admet une décomposition de Cartan de la forme G=KZ+K𝐺𝐾superscript𝑍𝐾G=KZ^{+}K, où K𝐾K est un sous-groupe compact maximal de G𝐺G et Z+superscript𝑍Z^{+} une chambre de Weyl de l’ensemble des 𝐤𝐤\mathbf{k}-points du centralisateur d’un 𝐤𝐤\mathbf{k}-tore 𝐤𝐤\mathbf{k}-déployé maximal de 𝐆𝐆\mathbf{G} ; à cette décomposition de Cartan est naturellement associée une projection de Cartan μ:G+:𝜇𝐺superscript\mu:G\rightarrow\mathbb{R}^{+} (cf. paragraphe 2.1). Par exemple, si G=SL2(𝐤)𝐺subscriptSL2𝐤G=\mathrm{SL}_{2}(\mathbf{k}), le théorème de la base adaptée induit la décomposition de Cartan G=KZ+K𝐺𝐾superscript𝑍𝐾G=KZ^{+}K, où K=SL2(𝒪)𝐾subscriptSL2𝒪K=\mathrm{SL}_{2}(\mathcal{O}) est l’ensemble des matrices de déterminant un à coefficients dans l’anneau des entiers de 𝐤𝐤\mathbf{k} et Z+superscript𝑍Z^{+} l’ensemble des matrices diagonales diag(a,a1)SL2(𝐤)diag𝑎superscript𝑎1subscriptSL2𝐤\mathrm{diag}(a,a^{-1})\in\mathrm{SL}_{2}(\mathbf{k}) telles que a𝑎a soit de valeur absolue 1absent1\geq 1 ; la projection de Cartan associée μ:G+:𝜇𝐺superscript\mu:G\rightarrow\mathbb{R}^{+} envoie la matrice diag(a,a1)diag𝑎superscript𝑎1\mathrm{diag}(a,a^{-1}) sur 2|ω(a)|2𝜔𝑎2\,|\omega(a)|, où ω𝜔\omega désigne une valuation (additive) fixée de 𝐤𝐤\mathbf{k}.

On sait décrire en fonction de μ𝜇\mu tous les sous-groupes discrets sans torsion ΓΓ\Gamma de G×G𝐺𝐺G\times G qui agissent proprement sur (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G} ([Kas], th. 1.3). Dans cet article, nous établissons un critère pour que le quotient Γ\(G×G)/ΔG\Γ𝐺𝐺subscriptΔ𝐺\Gamma\backslash(G\times G)/\Delta_{G} soit compact (théorème 3.1). Nous obtenons ainsi une description de tous les quotients compacts de (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G} par un groupe ΓΓ\Gamma discret de type fini sans torsion.

Théorème 1.1.

Soient 𝐤𝐤\mathbf{k} un corps local ultramétrique, G𝐺G l’ensemble des 𝐤𝐤\mathbf{k}-points d’un 𝐤𝐤\mathbf{k}-groupe algébrique semi-simple connexe de 𝐤𝐤\mathbf{k}-rang un, ΔGsubscriptΔ𝐺\Delta_{G} la diagonale de G×G𝐺𝐺G\times G et μ:G+:𝜇𝐺superscript\mu:G\rightarrow\mathbb{R}^{+} une projection de Cartan de G𝐺G.À la permutation près des deux facteurs de G×G𝐺𝐺G\times G, les sous-groupes discrets de type fini sans torsion de G×G𝐺𝐺G\times G agissant proprement et cocompactement sur (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G} sont exactement les graphes de la forme

Γ={(γ,ρ(γ)),γΓ0},Γ𝛾𝜌𝛾𝛾subscriptΓ0\Gamma=\big{\{}(\gamma,\rho(\gamma)),\ \gamma\in\Gamma_{0}\big{\}},

Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est un réseau cocompact sans torsion de G𝐺G et ρ:Γ0G:𝜌subscriptΓ0𝐺\rho:\Gamma_{0}\rightarrow G un morphisme de groupes qui est admissible, au sens où pour tout R>0𝑅0R>0 on a μ(ρ(γ))μ(γ)R𝜇𝜌𝛾𝜇𝛾𝑅\mu(\rho(\gamma))\leq\nolinebreak\mu(\gamma)-R pour presque tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0}.

On dit ici qu’une propriété est vraie pour presque tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} si elle est vraie pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} en dehors d’un ensemble fini.

Cette description est spécifique au rang un : au paragraphe 3.4 nous donnons en caractéristique nulle un exemple de quotient compact Γ\(G×G)/ΔG\Γ𝐺𝐺subscriptΔ𝐺\Gamma\backslash(G\times\nolinebreak G)/\Delta_{G}rang𝐤(𝐆)2subscriptrang𝐤𝐆2\mathrm{rang}_{\mathbf{k}}(\mathbf{G})\geq 2 et où ΓΓ\Gamma est le produit de deux sous-groupes infinis de G𝐺G.

Le théorème 1.1 est également valable pour 𝐤=𝐤\mathbf{k}=\mathbb{R} d’après [Ko2], th. 2, et [Ko1], cor. 5.5, ainsi que [Kas], th. 1.3. Les arguments de [Ko1] utilisent la dimension cohomologique de ΓΓ\Gamma. Dans le cas ultramétrique, ces arguments ne conviennent pas ; nous les remplaçons par des raisonnements géométriques sur l’arbre de Bruhat-Tits de G𝐺G.

Nous apportons ensuite une réponse positive à la question (2).

Théorème 1.2.

Soient 𝐤𝐤\mathbf{k} un corps local ultramétrique, G𝐺G l’ensemble des 𝐤𝐤\mathbf{k}-points d’un 𝐤𝐤\mathbf{k}-groupe algébrique semi-simple connexe de 𝐤𝐤\mathbf{k}-rang un et ΓΓ\Gamma un sous-groupe discret de type fini sans torsion de G×G𝐺𝐺G\times G. Si ΓΓ\Gamma agit proprement et cocompactement sur (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G}, alors il existe un voisinage 𝒰𝒰\mathcal{U} de l’inclusion canonique dans Hom(Γ,G×G)HomΓ𝐺𝐺\mathrm{Hom}(\Gamma,G\times G) tel que pour tout φ𝒰𝜑𝒰\varphi\in\mathcal{U}, le groupe φ(Γ)𝜑Γ\varphi(\Gamma) agisse librement, proprement et cocompactement sur (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G}.

On note ici Hom(Γ,G×G)HomΓ𝐺𝐺\mathrm{Hom}(\Gamma,G\times G) l’ensemble des morphismes de groupes de ΓΓ\Gamma dans G×G𝐺𝐺G\times G, muni de la topologie compacte-ouverte. Pour toute partie génératrice finie F𝐹F de ΓΓ\Gamma, une suite (φn)Hom(Γ,G×G)subscript𝜑𝑛HomsuperscriptΓ𝐺𝐺(\varphi_{n})\in\mathrm{Hom}(\Gamma,G\times G)^{\mathbb{N}} converge vers un élément φHom(Γ,G×G)𝜑HomΓ𝐺𝐺\varphi\in\mathrm{Hom}(\Gamma,G\times G) si et seulement si φn(γ)φ(γ)subscript𝜑𝑛𝛾𝜑𝛾\varphi_{n}(\gamma)\rightarrow\varphi(\gamma) pour tout γF𝛾𝐹\gamma\in F.

Le théorème 1.2 est également valable pour 𝐤=𝐤\mathbf{k}=\mathbb{R} et G=PSL2()𝐺subscriptPSL2G=\mathrm{PSL}_{2}(\mathbb{R}) par la complétude des variétés anti-de Sitter compactes [Kli] et par un principe, dû à Ehresmann, de déformation des holonomies de (G,X)𝐺𝑋(G,X)-structures sur les variétés compactes (cf. [Sa1]).

Notons qu’aucun analogue du théorème 1.2 n’est connu pour les autres groupes réels semi-simples de rang un, même pour G=SL2()𝐺subscriptSL2G=\mathrm{SL}_{2}(\mathbb{C}). Le seul résultat connu pour ces groupes est l’existence d’un voisinage du morphisme trivial dans Hom(Γ0,G)HomsubscriptΓ0𝐺\mathrm{Hom}(\Gamma_{0},G) formé de morphismes admissibles ([Ko3], th. 2.4).

Enfin nous répondons positivement à la question (3).

Proposition 1.3.

Soient 𝐤𝐤\mathbf{k} un corps local ultramétrique, G𝐺G l’ensemble des 𝐤𝐤\mathbf{k}-points d’un 𝐤𝐤\mathbf{k}-groupe algébrique semi-simple connexe de 𝐤𝐤\mathbf{k}-rang un et ΔGsubscriptΔ𝐺\Delta_{G} la diagonale de G×G𝐺𝐺G\times G. Il existe un sous-groupe discret ΓΓ\Gamma de G×G𝐺𝐺G\times G qui agit librement, proprement et cocompactement sur (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G} et qui est Zariski-dense dans G×G𝐺𝐺G\times G. On peut choisir ΓΓ\Gamma de sorte qu’aucune de ses deux projections naturelles sur G𝐺G ne soit bornée.

1.2. Stratégie de démonstration

Soient 𝐤𝐤\mathbf{k} un corps local ultramétrique, G𝐺G l’ensemble des 𝐤𝐤\mathbf{k}-points d’un 𝐤𝐤\mathbf{k}-groupe algébrique semi-simple connexe de 𝐤𝐤\mathbf{k}-rang un et Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} un réseau cocompact sans torsion de G𝐺G. Pour démontrer les théorèmes 1.1 et 1.2, nous étudions l’action de G𝐺G sur son arbre de Bruhat-Tits, qui est un arbre simplicial sur lequel G𝐺G agit proprement par isométries, avec un domaine fondamental compact. Nous rappelons la construction et les principales propriétés de cet arbre au paragraphe 2.1.

Soit G=KZ+K𝐺𝐾superscript𝑍𝐾G=KZ^{+}K une décomposition de Cartan de G𝐺G. Pour démontrer le théorème 1.1, nous associons à tout élément gGK𝑔𝐺𝐾g\in G\smallsetminus K un point ζgsuperscriptsubscript𝜁𝑔\zeta_{g}^{-} du bord de l’arbre de Bruhat-Tits de G𝐺G, obtenu à partir d’une décomposition de Cartan de g𝑔g. L’étude des points ζgsuperscriptsubscript𝜁𝑔\zeta_{g}^{-} nous permet de montrer que sous les hypothèses du théorème 1.1, si Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est un sous-groupe discret de type fini sans torsion de G𝐺G et ρ:Γ0G:𝜌subscriptΓ0𝐺\rho:\Gamma_{0}\rightarrow G un morphisme de groupes admissible, et si le graphe

Γ={(γ,ρ(γ)),γΓ0}Γ𝛾𝜌𝛾𝛾subscriptΓ0\Gamma=\big{\{}(\gamma,\rho(\gamma)),\ \gamma\in\Gamma_{0}\big{\}}

agit proprement et cocompactement sur (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G}, alors Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est un réseau cocompact de G𝐺G. Il s’agit du point le plus délicat de la démonstration du théorème 1.1, cette démonstration faisant l’objet de la partie 3.

Quant au théorème 1.2, il découle d’un résultat plus général sur les groupes d’isométries d’arbres réels simpliciaux (proposition 4.1). Plus précisément, pour tout arbre réel simplicial X𝑋X et toute isométrie g𝑔g de X𝑋X, notons

(1.1) λ(g)=infxXd(x,gx)0𝜆𝑔subscriptinfimum𝑥𝑋𝑑𝑥𝑔𝑥0\lambda(g)=\inf_{x\in X}d(x,g\cdot x)\geq 0

la longueur de translation de g𝑔g, où d𝑑d désigne la distance de X𝑋X. L’application λ:Isom(X)+:𝜆Isom𝑋superscript\lambda:\mathrm{Isom}(X)\rightarrow\mathbb{R}^{+} ainsi définie est continue. Par exemple, si X𝑋X est l’arbre de Bruhat-Tits de G=SL2(𝐤)𝐺subscriptSL2𝐤G=\mathrm{SL}_{2}(\mathbf{k}), on a λ(g)=|ω(ag)ω(ag)|𝜆𝑔𝜔subscript𝑎𝑔𝜔subscriptsuperscript𝑎𝑔\lambda(g)=|\omega(a_{g})-\omega(a^{\prime}_{g})| pour tout gG𝑔𝐺g\in\nolinebreak G, où agsubscript𝑎𝑔a_{g} et agsubscriptsuperscript𝑎𝑔a^{\prime}_{g} désignent les deux valeurs propres de g𝑔g et ω𝜔\omega une valuation (additive) fixée sur 𝐤𝐤\mathbf{k}. Pour tout arbre réel simplicial X𝑋X et tout sous-groupe discret sans torsion Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} de Isom(X)Isom𝑋\mathrm{Isom}(X), on a λ(γ)>0𝜆𝛾0\lambda(\gamma)>0 pour tout γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\}. Dans la partie 4, nous montrons que si Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} agit cocompactement sur X𝑋X, alors pour tout arbre réel simplicial Xsuperscript𝑋X^{\prime} et tout morphisme de groupes ρ:Γ0Isom(X):𝜌subscriptΓ0Isomsuperscript𝑋\rho:\Gamma_{0}\rightarrow\mathrm{Isom}(X^{\prime}), la borne supérieure des quotients λ(ρ(γ))/λ(γ)𝜆𝜌𝛾𝜆𝛾\lambda(\rho(\gamma))/\lambda(\gamma), où γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\}, est égale à la plus petite constante de Lipschitz d’une application continue f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow X^{\prime} qui est ρ𝜌\rho-équivariante, au sens où

f(γx)=ρ(γ)f(x)𝑓𝛾𝑥𝜌𝛾𝑓𝑥f(\gamma\cdot x)=\rho(\gamma)\cdot f(x)

pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} et tout xX𝑥𝑋x\in X. Nous montrons que cette borne supérieure est atteinte sur une partie finie F𝐹F de Γ0{1}subscriptΓ01\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\} indépendante de Xsuperscript𝑋X^{\prime} et de ρ𝜌\rho, ce qui généralise un résultat non publié de T. White sur l’outre-espace, dont une preuve a été donnée par S. Francaviglia et A. Martino [FM]. Nous en déduisons le résultat suivant.

Théorème 1.4.

Soient 𝐤𝐤\mathbf{k} un corps local ultramétrique, G𝐺G l’ensemble des 𝐤𝐤\mathbf{k}-points d’un 𝐤𝐤\mathbf{k}-groupe algébrique semi-simple connexe de 𝐤𝐤\mathbf{k}-rang un et Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} un réseau cocompact sans torsion de G𝐺G. Pour tout morphisme de groupes ρ:Γ0G:𝜌subscriptΓ0𝐺\rho:\Gamma_{0}\rightarrow G, notons Cρ0subscript𝐶𝜌0C_{\rho}\geq 0 la borne inférieure des réels t0𝑡0t\geq 0 pour lesquels il existe t0superscript𝑡0t^{\prime}\geq 0 tel que μ(ρ(γ))tμ(γ)+t𝜇𝜌𝛾𝑡𝜇𝛾superscript𝑡\mu(\rho(\gamma))\leq t\mu(\gamma)+t^{\prime} pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0}.

  1. (1)

    Soit F𝐹F le sous-ensemble fini de Γ0{1}subscriptΓ01\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\} formé des éléments γ𝛾\gamma tels que μ(γ)4N𝜇𝛾4𝑁\mu(\gamma)\leq 4N, où N𝑁N désigne le nombre de sommets de Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X. Pour tout morphisme ρ:Γ0G:𝜌subscriptΓ0𝐺\rho:\Gamma_{0}\rightarrow G on a

    Cρ=supγΓ0{1}λ(ρ(γ))λ(γ)=maxγFλ(ρ(γ))λ(γ),subscript𝐶𝜌subscriptsupremum𝛾subscriptΓ01𝜆𝜌𝛾𝜆𝛾subscript𝛾𝐹𝜆𝜌𝛾𝜆𝛾C_{\rho}\ =\ \sup_{\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\}}\frac{\lambda(\rho(\gamma))}{\lambda(\gamma)}\ =\ \max_{\gamma\in F}\,\frac{\lambda(\rho(\gamma))}{\lambda(\gamma)},

    où λ:G+:𝜆𝐺superscript\lambda:G\rightarrow\mathbb{R}^{+} désigne l’application définie par (1.1) pour l’action de G𝐺G sur son arbre de Bruhat-Tits.

  2. (2)

    Un morphisme ρ:Γ0G:𝜌subscriptΓ0𝐺\rho:\Gamma_{0}\rightarrow G est admissible si et seulement si Cρ<1subscript𝐶𝜌1C_{\rho}<1.

L’ensemble F𝐹F ci-dessus est bien fini car l’application μ𝜇\mu est propre et le groupe Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} discret dans G𝐺G. Ainsi, le caractère admissible d’un morphisme ρ:Γ0G:𝜌subscriptΓ0𝐺\rho:\Gamma_{0}\rightarrow G dépend d’un nombre fini de conditions ouvertes, ce qui prouve que l’ensemble des morphismes admissibles est ouvert dans Hom(Γ0,G)HomsubscriptΓ0𝐺\mathrm{Hom}(\Gamma_{0},G) pour la topologie compacte-ouverte. Ceci implique le théorème 1.2 en utilisant une propriété des déformations de réseaux cocompacts sans torsion de G𝐺G (lemme 5.2).

La condition suffisante du point (2) est immédiate sachant que μ𝜇\mu est propre et Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} discret : le morphisme ρ𝜌\rho est admissible dès que Cρ<1subscript𝐶𝜌1C_{\rho}<1. De même, si ρ𝜌\rho est admissible on a l’inégalité large Cρ1subscript𝐶𝜌1C_{\rho}\leq 1. Toute la difficulté du point (2) tient au fait que nous voulons obtenir une inégalité stricte.

1.3. Un résultat complémentaire

Une autre application du théorème 1.4 est la suivante.

Corollaire 1.5.

Soient 𝐤𝐤\mathbf{k} un corps local ultramétrique, G𝐺G l’ensemble des 𝐤𝐤\mathbf{k}-points d’un 𝐤𝐤\mathbf{k}-groupe algébrique semi-simple connexe de 𝐤𝐤\mathbf{k}-rang un et Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} un réseau cocompact sans torsion de G𝐺G. Il n’existe pas de morphisme de groupes admissible ρ:Γ0G:𝜌subscriptΓ0𝐺\rho:\Gamma_{0}\rightarrow G qui soit injectif d’image discrète.

Le corollaire 1.5 est également valable pour 𝐤=𝐤\mathbf{k}=\mathbb{R} et G=PSL2()𝐺subscriptPSL2G=\mathrm{PSL}_{2}(\mathbb{R}) : cela résulte de l’existence, due à W. Thurston [Thu], d’une certaine “distance asymétrique” sur l’espace de Teichmüller de Γ0\\subscriptΓ0\Gamma_{0}\backslash\mathbb{H}, où \mathbb{H} désigne le demi-plan de Poincaré (cf. [Sa2], § 4.1).

Pour démontrer le corollaire 1.5 pour un corps local 𝐤𝐤\mathbf{k} ultramétrique, nous remplaçons l’espace de Teichmüller de Γ0\\subscriptΓ0\Gamma_{0}\backslash\mathbb{H} par l’outre-espace de même rang que le groupe libre Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} (cf. partie 6).

1.4. Plan de l’article

La partie 2 est consacrée à quelques rappels sur les décompositions de Cartan et l’arbre de Bruhat-Tits de G𝐺G d’une part, sur les isométries d’arbres réels simpliciaux d’autre part. Dans la partie 3, nous démontrons le théorème 1.1 en étudiant les points ζgsuperscriptsubscript𝜁𝑔\zeta_{g}^{-} du bord de l’arbre de Bruhat-Tits de G𝐺G mentionnés précédemment. La partie 4 établit un résultat général sur les groupes d’isométries d’arbres réels simpliciaux (proposition 4.1), dont nous déduisons les théorèmes 1.4 puis 1.2 dans la partie 5. Dans la partie 6 nous décrivons le lien entre la proposition 4.1 et l’outre-espace et démontrons le corollaire 1.5. Enfin, la partie 7 est consacrée à la démonstration de la proposition 1.3.

Remerciements

Je remercie vivement Yves Benoist pour de nombreuses discussions, ainsi que Frédéric Paulin et Mladen Bestvina pour leurs indications sur l’outre-espace.

2. Notations et rappels

2.1. Arbre de Bruhat-Tits, décompositions et projections de Cartan

Soit 𝐤𝐤\mathbf{k} un corps local ultramétrique, c’est-à-dire une extension finie de psubscript𝑝\mathbb{Q}_{p} ou le corps 𝔽q((t))subscript𝔽𝑞𝑡\mathbb{F}_{q}((t)) des séries de Laurent formelles à coefficients dans un corps fini 𝔽qsubscript𝔽𝑞\mathbb{F}_{q}. Fixons une valuation (additive) ω𝜔\omega sur 𝐤𝐤\mathbf{k} à valeurs dans \mathbb{Z}.

Nous notons les 𝐤𝐤\mathbf{k}-groupes algébriques par des lettres majuscules grasses (par exemple 𝐆𝐆\mathbf{G}) et leurs 𝐤𝐤\mathbf{k}-points par la même lettre majuscule non grasse (par exemple G𝐺G).

2.1.1. Centralisateurs de tores et sous-groupes compacts ouverts de G𝐺G

Soit 𝐆𝐆\mathbf{G} un 𝐤𝐤\mathbf{k}-groupe algébrique semi-simple connexe de 𝐤𝐤\mathbf{k}-rang un. Fixons un 𝐤𝐤\mathbf{k}-tore 𝐤𝐤\mathbf{k}-déployé maximal 𝐀𝐀\mathbf{A} de 𝐆𝐆\mathbf{G} et notons 𝐙𝐙\mathbf{Z} (resp. 𝐍𝐍\mathbf{N}) son centralisateur (resp. son normalisateur) dans 𝐆𝐆\mathbf{G}. Soit π𝜋\pi un générateur du groupe des 𝐤𝐤\mathbf{k}-caractères de 𝐀𝐀\mathbf{A} et soit απ𝛼𝜋\alpha\in\mathbb{N}\pi une racine restreinte de 𝐀𝐀\mathbf{A} dans 𝐆𝐆\mathbf{G}, c’est-à-dire un poids non trivial de 𝐀𝐀\mathbf{A} dans la représentation adjointe de 𝐆𝐆\mathbf{G}. Quitte à remplacer α𝛼\alpha par α/2𝛼2\alpha/2, on peut supposer que α𝛼\alpha est indivisible, c’est-à-dire que α/2𝛼2\alpha/2 n’est pas une racine. Pour tout 𝐤𝐤\mathbf{k}-caractère χ𝜒\chi de 𝐙𝐙\mathbf{Z}, la restriction de χ𝜒\chi à 𝐀𝐀\mathbf{A} est de la forme nχπsubscript𝑛𝜒𝜋n_{\chi}\pi, où nχsubscript𝑛𝜒n_{\chi}\in\mathbb{Z}. Pour tout zZ𝑧𝑍z\in Z on note ν(z)𝜈𝑧\nu(z) le réel défini par nχν(z)=ω(χ(z))subscript𝑛𝜒𝜈𝑧𝜔𝜒𝑧n_{\chi}\nu(z)=-\omega(\chi(z)) pour tout χ𝜒\chi, et l’on pose

Z+={zZ,ν(z)0}.superscript𝑍formulae-sequence𝑧𝑍𝜈𝑧0Z^{+}=\{z\in Z,\ \nu(z)\geq 0\}.

Le groupe Z𝑍Z agit sur \mathbb{R} par translation selon ν𝜈\nu, et cette action se prolonge (de manière unique à une translation près) en une action affine de N𝑁N sur \mathbb{R}. Notons 𝐔αsubscript𝐔𝛼\mathbf{U}_{\alpha} (resp. 𝐔αsubscript𝐔𝛼\mathbf{U}_{-\alpha}) le 𝐤𝐤\mathbf{k}-sous-groupe unipotent connexe de 𝐆𝐆\mathbf{G} normalisé par 𝐙𝐙\mathbf{Z} d’algèbre de Lie 𝔤α𝔤2αdirect-sumsubscript𝔤𝛼subscript𝔤2𝛼\mathfrak{g}_{\alpha}\oplus\mathfrak{g}_{2\alpha} (resp. 𝔤α𝔤2αdirect-sumsubscript𝔤𝛼subscript𝔤2𝛼\mathfrak{g}_{-\alpha}\oplus\mathfrak{g}_{-2\alpha}), où 𝔤iαsubscript𝔤𝑖𝛼\mathfrak{g}_{i\alpha} désigne le sous-espace vectoriel de l’algèbre de Lie de 𝐆𝐆\mathbf{G} formé des éléments X𝑋X tels que Ad(a)(X)=α(a)iXAd𝑎𝑋𝛼superscript𝑎𝑖𝑋\mathrm{Ad}(a)(X)=\alpha(a)^{i}X pour tout aA𝑎𝐴a\in A ([Bor], prop. 21.9). Pour tout uUα{1}𝑢subscript𝑈𝛼1u\in\nolinebreak U_{\alpha}\smallsetminus\nolinebreak\{1\}, l’ensemble NUαuUα𝑁subscript𝑈𝛼𝑢subscript𝑈𝛼N\cap U_{-\alpha}\,u\,U_{-\alpha} possède un unique élément, qui agit sur \mathbb{R} par la symétrie de centre xusubscript𝑥𝑢x_{u} pour un certain xusubscript𝑥𝑢x_{u}\in\mathbb{R}. Pour tout x𝑥x\in\mathbb{R}, posons

Uα,x={uUα,u=1ouxux};subscript𝑈𝛼𝑥formulae-sequence𝑢subscript𝑈𝛼𝑢1ousubscript𝑥𝑢𝑥U_{\alpha,x}=\{u\in U_{\alpha},\ u=1\ \mathrm{ou}\ x_{u}\leq x\}\ ;

d’après [BT2], c’est un sous-groupe de Uαsubscript𝑈𝛼U_{\alpha}. On définit de même un sous-groupe Uα,xsubscript𝑈𝛼𝑥U_{-\alpha,x} de Uαsubscript𝑈𝛼U_{-\alpha} pour tout x𝑥x\in\mathbb{R}. Posons Nx={nN,nx=x}subscript𝑁𝑥formulae-sequence𝑛𝑁𝑛𝑥𝑥N_{x}=\{n\in N,\ n\cdot x=x\} et notons Kxsubscript𝐾𝑥K_{x} le sous-groupe de G𝐺G engendré par Nxsubscript𝑁𝑥N_{x}, Uα,xsubscript𝑈𝛼𝑥U_{\alpha,x} et Uα,xsubscript𝑈𝛼𝑥U_{-\alpha,x}. Le groupe Kxsubscript𝐾𝑥K_{x} est compact et ouvert dans G𝐺G, et maximal pour ces propriétés.

2.1.2. Arbre de Bruhat-Tits de G𝐺G

On définit une relation d’équivalence sur G×𝐺G\times\mathbb{R} en posant (g,x)(g,x)similar-to𝑔𝑥superscript𝑔superscript𝑥(g,x)\sim(g^{\prime},x^{\prime}) s’il existe un élément nN𝑛𝑁n\in N tel que x=nxsuperscript𝑥𝑛𝑥x^{\prime}=n\cdot x et g1gnKxsuperscript𝑔1superscript𝑔𝑛subscript𝐾𝑥g^{-1}g^{\prime}n\in K_{x}. Notons X𝑋X l’ensemble des classes d’équivalence de G×𝐺G\times\mathbb{R} pour cette relation. D’après [BT1] l’ensemble X𝑋X, muni de la topologie quotient induite par la topologie discrète de G𝐺G et la topologie usuelle de \mathbb{R}, est un arbre simplicial bipartite de valence 3absent3\geq 3, appelé arbre de Bruhat-Tits de G𝐺G. Il ne dépend pas du choix du 𝐤𝐤\mathbf{k}-tore 𝐤𝐤\mathbf{k}-déployé maximal 𝐀𝐀\mathbf{A}. Le groupe G𝐺G agit sur X𝑋X par

g(g,x)¯=(gg,x)¯,𝑔¯superscript𝑔𝑥¯𝑔superscript𝑔𝑥g\cdot\overline{(g^{\prime},x)}=\overline{(gg^{\prime},x)}\,,

où (g,x)¯¯𝑔𝑥\overline{(g,x)} désigne l’image de (g,x)G×𝑔𝑥𝐺(g,x)\in G\times\mathbb{R} dans X𝑋X. C’est une action propre, cocompacte, par automorphismes d’arbre simplicial. Par construction, pour tout gG𝑔𝐺g\in\nolinebreak G et tout x𝑥x\in\mathbb{R}, le fixateur de (g,x)¯¯𝑔𝑥\overline{(g,x)} dans G𝐺G est le sous-groupe compact ouvert gKxg1𝑔subscript𝐾𝑥superscript𝑔1gK_{x}g^{-1}. D’après [BT1], si l’on pose 𝒜0={1}ׯsubscript𝒜0¯1\mathcal{A}_{0}=\overline{\{1\}\times\mathbb{R}}, alors les droites réelles plongées dans X𝑋X sont exactement les ensembles g𝒜0𝑔subscript𝒜0g\cdot\mathcal{A}_{0}, où gG𝑔𝐺g\in G. On munit X𝑋X de la distance d𝑑d pour laquelle le plongement naturel de {g}×𝑔\{g\}\times\mathbb{R} dans X𝑋X est une isométrie pour tout gG𝑔𝐺g\in G. Le groupe G𝐺G agit par isométries pour cette distance, toutes les arêtes de X𝑋X ont la même longueur et les droites g𝒜0𝑔subscript𝒜0g\cdot\mathcal{A}_{0} sont les géodésiques de X𝑋X. Nous renvoyons le lecteur aux textes fondateurs [BT1] et [BT2] pour plus de détails, ainsi qu’à [Rou] pour des explications plus élémentaires et à [Ser], § II.1, pour le cas de G=SL2(𝐤)𝐺subscriptSL2𝐤G=\nolinebreak\mathrm{SL}_{2}(\mathbf{k}).

2.1.3. Décompositions et projections de Cartan

Notons K=Kx0𝐾subscript𝐾subscript𝑥0K=K_{x_{0}} le fixateur dans G𝐺G du sommet x0=(1,0)¯subscript𝑥0¯1.0x_{0}=\overline{(1,0)} de 𝒜0subscript𝒜0\mathcal{A}_{0}. D’après [BT1], le groupe G𝐺G agit transitivement sur l’ensemble des couples (𝒜,𝒞)𝒜𝒞(\mathcal{A},\mathcal{C}), où 𝒜𝒜\mathcal{A} est une droite géodésique de X𝑋X et 𝒞𝒞\mathcal{C} une arête contenue dans 𝒜𝒜\mathcal{A}. On en déduit la décomposition de Cartan G=KZ+K𝐺𝐾superscript𝑍𝐾G=KZ^{+}K : tout élément gG𝑔𝐺g\in G s’écrit g=k1zk2𝑔subscript𝑘1𝑧subscript𝑘2g=k_{1}zk_{2}, où k1,k2Ksubscript𝑘1subscript𝑘2𝐾k_{1},k_{2}\in K et zZ+𝑧superscript𝑍z\in Z^{+}. Si g=k1zk2=k1zk2𝑔subscript𝑘1𝑧subscript𝑘2subscriptsuperscript𝑘1superscript𝑧subscriptsuperscript𝑘2g=k_{1}zk_{2}=k^{\prime}_{1}z^{\prime}k^{\prime}_{2}, où k1,k2Ksubscriptsuperscript𝑘1subscriptsuperscript𝑘2𝐾k^{\prime}_{1},k^{\prime}_{2}\in K et zZ+superscript𝑧superscript𝑍z^{\prime}\in Z^{+}, et si gK𝑔𝐾g\notin K, alors k11k1KZsuperscriptsubscript𝑘11subscriptsuperscript𝑘1𝐾𝑍k_{1}^{-1}k^{\prime}_{1}\in K\cap Z et k2k21KZsubscriptsuperscript𝑘2superscriptsubscript𝑘21𝐾𝑍k^{\prime}_{2}k_{2}^{-1}\in K\cap Z. Posons μ(g)=ν(z)+𝜇𝑔𝜈𝑧superscript\mu(g)=\nu(z)\in\mathbb{R}^{+} ; on a

(2.1) μ(g)=d(x0,gx0),𝜇𝑔𝑑subscript𝑥0𝑔subscript𝑥0\mu(g)=d(x_{0},g\cdot x_{0}),

donc μ(g)𝜇𝑔\mu(g) ne dépend pas de l’écriture de g𝑔g comme produit d’éléments de K𝐾K, Z+superscript𝑍Z^{+} et K𝐾K. L’application μ:G+:𝜇𝐺superscript\mu:\nolinebreak G\rightarrow\nolinebreak\mathbb{R}^{+} ainsi obtenue est continue, propre, bi-K𝐾K-invariante ; son image est l’intersection de +superscript\mathbb{R}^{+} avec un réseau de \mathbb{R}. On dit que μ𝜇\mu est la projection de Cartan associée à la décomposition de Cartan G=KZ+K𝐺𝐾superscript𝑍𝐾G=KZ^{+}K. Lorsque 𝐆𝐆\mathbf{G} est déployé sur 𝐤𝐤\mathbf{k}, on a ν(Z)=ν(A)𝜈𝑍𝜈𝐴\nu(Z)=\nu(A) et G=KA+K𝐺𝐾superscript𝐴𝐾G=KA^{+}K, où A+=AZ+superscript𝐴𝐴superscript𝑍A^{+}=A\cap Z^{+}. Ce n’est pas le cas en général, contrairement à la situation des groupes réels.

2.1.4. Sous-additivité des projections de Cartan

D’après (2.1) on a

(2.2) μ(gg)μ(g)+μ(g)𝜇𝑔superscript𝑔𝜇𝑔𝜇superscript𝑔\mu(gg^{\prime})\,\leq\,\mu(g)+\mu(g^{\prime})

pour tous g,gG𝑔superscript𝑔𝐺g,g^{\prime}\in G et

(2.3) μ(g1)=μ(g)𝜇superscript𝑔1𝜇𝑔\mu(g^{-1})\,=\,\mu(g)

puisque G𝐺G agit sur X𝑋X par isométries. Rappelons que les 𝐤𝐤\mathbf{k}-tores 𝐤𝐤\mathbf{k}-déployés maximaux de 𝐆𝐆\mathbf{G} sont tous conjugués sur 𝐤𝐤\mathbf{k} ([BoT], th. 4.21). D’après (2.2), si 𝐀=g𝐀g1superscript𝐀𝑔𝐀superscript𝑔1\mathbf{A}^{\prime}=g\mathbf{A}g^{-1} (où gG𝑔𝐺g\in G) est un autre 𝐤𝐤\mathbf{k}-tore 𝐤𝐤\mathbf{k}-déployé maximal de 𝐆𝐆\mathbf{G} et si μ:G+:superscript𝜇𝐺superscript\mu^{\prime}:G\rightarrow\mathbb{R}^{+} est une projection de Cartan associée à 𝐀superscript𝐀\mathbf{A}^{\prime}, il existe une constante C>0𝐶0C>0 telle que

|μ(g)μ(g)|C𝜇𝑔superscript𝜇𝑔𝐶|\mu(g)-\mu^{\prime}(g)|\,\leq\,C

pour tout gG𝑔𝐺g\in G. Ainsi, à une constante additive près, l’application μ𝜇\mu ne dépend pas du choix de 𝐀𝐀\mathbf{A}.

2.2. Isométries d’un arbre réel simplicial

Nous considérons ici des arbres simpliciaux au sens de [Ser], déf. 6. Rappelons qu’un arbre réel simplicial, ou \mathbb{R}-arbre simplicial, est un arbre simplicial muni d’une distance pour laquelle l’image de tout chemin injectif est isométrique à un segment réel. Toutes les arêtes n’ont pas nécessairement la même longueur pour cette distance.

Fixons un arbre réel simplicial X𝑋X de valence 2absent2\geq 2, notons d𝑑d la distance sur X𝑋X et Isom(X)Isom𝑋\mathrm{Isom}(X) le groupe des isométries bijectives de X𝑋X envoyant sommet sur sommet et arête sur arête. Cette dernière condition est toujours vérifiée si X𝑋X est de valence 3absent3\geq 3. On munit Isom(X)Isom𝑋\mathrm{Isom}(X) de la topologie pour laquelle les fixateurs (point par point) des parties compactes de X𝑋X forment une base de voisinages compacts ouverts de l’identité. Le groupe Isom(X)Isom𝑋\mathrm{Isom}(X) est localement compact pour cette topologie.

2.2.1. Isométries hyperboliques et elliptiques

Un élément gIsom(X)𝑔Isom𝑋g\in\mathrm{Isom}(X) est sans point fixe dans X𝑋X si et seulement s’il existe une droite géodésique 𝒜gsubscript𝒜𝑔\mathcal{A}_{g}, stable par g𝑔g, sur laquelle g𝑔g agit par une translation non triviale ([Ti1], prop. 3.2, ou [Ser], prop. 25) ; on note alors λ(g)>0𝜆𝑔0\lambda(g)>0 la longueur de cette translation et l’on dit que g𝑔g est hyperbolique, d’axe de translation 𝒜gsubscript𝒜𝑔\mathcal{A}_{g}. La figure 1 illustre l’action de g𝑔g sur X𝑋X dans ce cas. Comme X𝑋X est un arbre, pour tout xX𝑥𝑋x\in X, le projeté prg(x)subscriptpr𝑔𝑥\mathrm{pr}_{g}(x) de x𝑥x sur 𝒜gsubscript𝒜𝑔\mathcal{A}_{g} est bien défini : c’est l’unique point de 𝒜gsubscript𝒜𝑔\mathcal{A}_{g} dont la distance à x𝑥x est minimale. On a

prg(gx)=gprg(x)etd(gx,𝒜g)=d(x,𝒜g).formulae-sequencesubscriptpr𝑔𝑔𝑥𝑔subscriptpr𝑔𝑥et𝑑𝑔𝑥subscript𝒜𝑔𝑑𝑥subscript𝒜𝑔\mathrm{pr}_{g}(g\cdot x)=g\cdot\mathrm{pr}_{g}(x)\quad\quad\mathrm{et}\quad\quad d\big{(}g\cdot x,\mathcal{A}_{g}\big{)}=d\big{(}x,\mathcal{A}_{g}\big{)}.

Les points x𝑥x, prg(x)subscriptpr𝑔𝑥\mathrm{pr}_{g}(x), gprg(x)𝑔subscriptpr𝑔𝑥g\cdot\mathrm{pr}_{g}(x) et gx𝑔𝑥g\cdot x sont alignés dans cet ordre sur une même droite géodésique de X𝑋X, d’où

(2.4) d(x,gx)𝑑𝑥𝑔𝑥\displaystyle d(x,g\cdot x) =\displaystyle= d(x,prg(x))+d(prg(x),gprg(x))+d(gprg(x),gx)𝑑𝑥subscriptpr𝑔𝑥𝑑subscriptpr𝑔𝑥𝑔subscriptpr𝑔𝑥𝑑𝑔subscriptpr𝑔𝑥𝑔𝑥\displaystyle d\big{(}x,\mathrm{pr}_{g}(x)\big{)}+d\big{(}\mathrm{pr}_{g}(x),g\cdot\mathrm{pr}_{g}(x)\big{)}+d\big{(}g\cdot\mathrm{pr}_{g}(x),g\cdot x\big{)}
=\displaystyle= λ(g)+2d(x,𝒜g).𝜆𝑔2𝑑𝑥subscript𝒜𝑔\displaystyle\lambda(g)+2\,d(x,\mathcal{A}_{g}).

En particulier on a

λ(g)=minxXd(x,gx)>0.𝜆𝑔subscript𝑥𝑋𝑑𝑥𝑔𝑥0\lambda(g)\ =\ \min_{x\in X}\,d(x,g\cdot x)>0.
x𝑥xprg(x)subscriptpr𝑔𝑥\mathrm{pr}_{g}(x)gprg(x)𝑔subscriptpr𝑔𝑥g\cdot\mathrm{pr}_{g}(x)gx𝑔𝑥g\cdot x𝒜gsubscript𝒜𝑔\mathcal{A}_{g}
Figure 1. Action d’un élément hyperbolique

Un élément gIsom(X)𝑔Isom𝑋g\in\mathrm{Isom}(X) qui admet un point fixe dans X𝑋X est dit elliptique ; l’ensemble Xgsubscript𝑋𝑔X_{g} de ses points fixes est alors un sous-arbre de X𝑋X. La figure 2 illustre l’action de g𝑔g sur X𝑋X dans ce cas. Si pour tout xX𝑥𝑋x\in X on note prg(x)subscriptpr𝑔𝑥\mathrm{pr}_{g}(x) le projeté de x𝑥x sur Xgsubscript𝑋𝑔X_{g}, alors d(prg(x),x)=d(prg(x),gx)𝑑subscriptpr𝑔𝑥𝑥𝑑subscriptpr𝑔𝑥𝑔𝑥d(\mathrm{pr}_{g}(x),x)=d(\mathrm{pr}_{g}(x),g\cdot x). De plus, l’intersection des segments géodésiques [prg(x),x]subscriptpr𝑔𝑥𝑥[\mathrm{pr}_{g}(x),x] et [prg(x),gx]subscriptpr𝑔𝑥𝑔𝑥[\mathrm{pr}_{g}(x),g\cdot x] est réduite à {prg(x)}subscriptpr𝑔𝑥\{\mathrm{pr}_{g}(x)\}, d’où

(2.5) d(x,gx)=d(x,prg(x))+d(prg(x),gx)=2d(x,Xg).𝑑𝑥𝑔𝑥𝑑𝑥subscriptpr𝑔𝑥𝑑subscriptpr𝑔𝑥𝑔𝑥2𝑑𝑥subscript𝑋𝑔d(x,g\cdot x)=d(x,\mathrm{pr}_{g}(x))+d(\mathrm{pr}_{g}(x),g\cdot x)=2\,d(x,X_{g}).

Par analogie avec le cas hyperbolique, on pose

λ(g)=minxXd(x,gx)=0.𝜆𝑔subscript𝑥𝑋𝑑𝑥𝑔𝑥0\lambda(g)\ =\ \min_{x\in X}\,d(x,g\cdot x)=0.
x𝑥xprg(x)subscriptpr𝑔𝑥\mathrm{pr}_{g}(x)gx𝑔𝑥g\cdot x{{\big{\{}Xgsubscript𝑋𝑔X_{g}
Figure 2. Action d’un élément elliptique

2.2.2. Bord de l’arbre X𝑋X

Comme tout espace hyperbolique au sens de Gromov, l’arbre X𝑋X admet un bord X𝑋\partial X, défini comme l’ensemble des classes d’équivalence de demi-droites géodésiques de X𝑋X pour la relation “être à distance de Hausdorff finie” ou, de manière équivalente ici, “être égales en dehors d’un compact”. Si ξX𝜉𝑋\xi\in\partial X désigne la classe d’une demi-droite géodésique D𝐷D, nous dirons que ξ𝜉\xi est l’extrémité à l’infini de D𝐷D. Fixons un point x0Xsubscript𝑥0𝑋x_{0}\in X et un réel q>1𝑞1q>1. Comme X𝑋X est un arbre, pour tout ξX𝜉𝑋\xi\in\partial X il existe une unique demi-droite géodésique Dx0(ξ)subscript𝐷subscript𝑥0𝜉D_{x_{0}}(\xi) d’extrémités x0Xsubscript𝑥0𝑋x_{0}\in X et ξX𝜉𝑋\xi\in\partial X. Pour tous ξ,ξX𝜉superscript𝜉𝑋\xi,\xi^{\prime}\in\partial X on pose d¯(ξ,ξ)=qr¯𝑑𝜉superscript𝜉superscript𝑞𝑟\underline{d}(\xi,\xi^{\prime})=q^{-r}, où

r=sup{d(x0,x),xDx0(ξ)Dx0(ξ)}[0,+].𝑟supremum𝑑subscript𝑥0𝑥𝑥subscript𝐷subscript𝑥0𝜉subscript𝐷subscript𝑥0superscript𝜉0r=\sup\big{\{}d(x_{0},x),\ x\in D_{x_{0}}(\xi)\cap D_{x_{0}}(\xi^{\prime})\big{\}}\in[0,+\infty].

Ceci définit une distance d¯¯𝑑\underline{d} sur X𝑋\partial X. L’action naturelle de Isom(X)Isom𝑋\mathrm{Isom}(X) sur X𝑋\partial X est continue pour cette distance. Le fixateur de x0subscript𝑥0x_{0} agit sur X𝑋\partial X par isométries. Un élément gIsom(X)𝑔Isom𝑋g\in\mathrm{Isom}(X) est hyperbolique si et seulement s’il agit sur X𝑋\partial X avec exactement deux points fixes, l’un attractif, noté ξg+superscriptsubscript𝜉𝑔\xi_{g}^{+}, et l’autre répulsif, noté ξgsuperscriptsubscript𝜉𝑔\xi_{g}^{-} ; ces points fixes sont les deux extrémités de l’axe de translation 𝒜gsubscript𝒜𝑔\mathcal{A}_{g}. Si gIsom(X)𝑔Isom𝑋g\in\mathrm{Isom}(X) est elliptique et fixe ξX𝜉𝑋\xi\in\partial X, alors g𝑔g fixe (point par point) toute une demi-droite de X𝑋X d’extrémité ξ𝜉\xi.

2.2.3. Groupes discrets sans torsion d’isométries de X𝑋X

Un sous-groupe discret Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} de Isom(X)Isom𝑋\mathrm{Isom}(X) agit librement sur X𝑋X si et seulement s’il est sans torsion. Dans ce cas Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est un groupe libre ([Ser], th. 4) et tous ses éléments non triviaux sont hyperboliques. Plus précisément, pour tout domaine fondamental connexe 𝒟𝒟\mathcal{D} de X𝑋X pour l’action de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0}, si l’on pose

={γΓ0{1},γ𝒟𝒟}formulae-sequence𝛾subscriptΓ01𝛾𝒟𝒟\mathcal{F}=\big{\{}\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\},\quad\gamma\cdot\mathcal{D}\cap\mathcal{D}\neq\emptyset\big{\}}

et si superscript\mathcal{F}^{\prime} désigne une partie de \mathcal{F} telle que \mathcal{F} soit l’union disjointe de superscript\mathcal{F}^{\prime} et de 1superscriptsuperscript1{\mathcal{F}^{\prime}}^{-1}, alors superscript\mathcal{F}^{\prime} est une partie libre génératrice de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} ([Ser], th. 4superscript44^{\prime}). Si Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est de type fini, c’est un groupe de Schottky au sens de [Lub], déf. 1.4. L’union XΓsubscript𝑋ΓX_{\Gamma} des axes de translations 𝒜γsubscript𝒜𝛾\mathcal{A}_{\gamma}, où γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\}, est un sous-arbre de X𝑋X. On dit que l’action de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} sur X𝑋X est minimale si XΓ=Xsubscript𝑋Γ𝑋X_{\Gamma}=X. Lorsque Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est de type fini, son action sur X𝑋X est minimale si et seulement si le graphe Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X est fini ([Bas], prop. 7.9, et [BL], th. 9.7). Rappelons que l’ensemble limite de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} dans X𝑋\partial X est par définition l’adhérence dans X𝑋\partial X de l’ensemble des points fixes ξγ+superscriptsubscript𝜉𝛾\xi_{\gamma}^{+}, où γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\}. Si l’action de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} sur X𝑋X n’est pas minimale, l’ensemble limite de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} dans X𝑋\partial X est un fermé strict de X𝑋\partial X. Ceci nous sera utile dans la démonstration du lemme 3.5.

3. Une condition nécessaire et suffisante de cocompacité

Cette partie est consacrée à la démonstration du théorème 1.1. Dans toute la partie, nous notons 𝐤𝐤\mathbf{k} un corps local ultramétrique, G𝐺G l’ensemble des 𝐤𝐤\mathbf{k}-points d’un 𝐤𝐤\mathbf{k}-groupe algébrique semi-simple connexe de 𝐤𝐤\mathbf{k}-rang un et ΔGsubscriptΔ𝐺\Delta_{G} la diagonale de G×G𝐺𝐺G\times G. Nous fixons une décomposition de Cartan G=KZ+K𝐺𝐾superscript𝑍𝐾G=KZ^{+}K et notons μ:G+:𝜇𝐺superscript\mu:G\rightarrow\mathbb{R}^{+} la projection de Cartan associée.

D’après [Kas], th. 1.3, les sous-groupes discrets sans torsion de G×G𝐺𝐺G\times G agissant proprement sur (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G} sont, à la permutation près des deux facteurs de G×G𝐺𝐺G\times G, les graphes de la forme

Γ={(γ,ρ(γ)),γΓ0},Γ𝛾𝜌𝛾𝛾subscriptΓ0\Gamma=\big{\{}(\gamma,\rho(\gamma)),\ \gamma\in\Gamma_{0}\big{\}},

Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est un sous-groupe discret sans torsion de G𝐺G et ρ:Γ0G:𝜌subscriptΓ0𝐺\rho:\Gamma_{0}\rightarrow G un morphisme de groupes admissible (au sens du théorème 1.1). Pour démontrer le théorème 1.1, il suffit donc d’établir le résultat suivant.

Théorème 3.1.

Soient 𝐤𝐤\mathbf{k} un corps local ultramétrique, G𝐺G l’ensemble des 𝐤𝐤\mathbf{k}-points d’un 𝐤𝐤\mathbf{k}-groupe algébrique semi-simple connexe de 𝐤𝐤\mathbf{k}-rang un et ΔGsubscriptΔ𝐺\Delta_{G} la diagonale de G×G𝐺𝐺G\times G. Soient Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} un sous-groupe discret de type fini sans torsion de G𝐺G et ρ:Γ0G:𝜌subscriptΓ0𝐺\rho:\Gamma_{0}\rightarrow G un morphisme de groupes admissible. Notons

Γ={(γ,ρ(γ)),γΓ0}Γ𝛾𝜌𝛾𝛾subscriptΓ0\Gamma=\big{\{}(\gamma,\rho(\gamma)),\ \gamma\in\Gamma_{0}\big{\}}

le graphe de ρ𝜌\rho. Le quotient Γ\(G×G)/ΔG\Γ𝐺𝐺subscriptΔ𝐺\Gamma\backslash(G\times G)/\Delta_{G} est compact si et seulement si le quotient Γ0\G\subscriptΓ0𝐺\Gamma_{0}\backslash G l’est.

Nous utilisons pour cela l’existence d’un isomorphisme

(𝐆×𝐆)/𝚫𝐆𝐆𝐆subscript𝚫𝐆\displaystyle(\mathbf{G}\times\mathbf{G})/\mathbf{\Delta_{G}} \displaystyle\longrightarrow 𝐆𝐆\displaystyle\ \mathbf{G}
(g,h)𝚫𝐆𝑔subscript𝚫𝐆\displaystyle(g,h)\,\mathbf{\Delta_{G}}\ \, \displaystyle\longmapsto gh1.𝑔superscript1\displaystyle gh^{-1}.

de (𝐆×𝐆)𝐆𝐆(\mathbf{G}\times\mathbf{G})-variétés algébriques sur 𝐤𝐤\mathbf{k}, où 𝐆×𝐆𝐆𝐆\mathbf{G}\times\mathbf{G} agit sur (𝐆×𝐆)/𝚫𝐆𝐆𝐆subscript𝚫𝐆(\mathbf{G}\times\mathbf{G})/\mathbf{\Delta_{G}} par translation à gauche et sur 𝐆𝐆\mathbf{G} par

(g1,g2)g=g1gg21.subscript𝑔1subscript𝑔2𝑔subscript𝑔1𝑔superscriptsubscript𝑔21(g_{1},g_{2})\cdot g\ =\ g_{1}\,g\,g_{2}^{-1}.

Cet isomorphisme induit un isomorphisme de (G×G)𝐺𝐺(G\times G)-ensembles sur les 𝐤𝐤\mathbf{k}-points.

Notons X𝑋X l’arbre de Bruhat-Tits de G𝐺G, muni de la distance d𝑑d définie au paragraphe 2.1.2, et X𝑋\partial X son bord, muni de la distance d¯¯𝑑\underline{d} définie au paragraphe 2.2.2 en prenant par exemple pour q𝑞q le cardinal du corps résiduel de 𝐤𝐤\mathbf{k}. Pour traiter l’implication directe du théorème 3.1, nous introduisons certains points ζgsuperscriptsubscript𝜁𝑔\zeta_{g}^{-} du bord de l’arbre de Bruhat-Tits de G𝐺G, obtenus à partir de la décomposition de Cartan G=KZ+K𝐺𝐾superscript𝑍𝐾G=KZ^{+}K.

3.1. Points de X𝑋\partial X associés à la décomposition de Cartan G=KZ+K𝐺𝐾superscript𝑍𝐾G=KZ^{+}K

Pour tout élément hyperbolique gG𝑔𝐺g\in G, notons ξg+superscriptsubscript𝜉𝑔\xi_{g}^{+} (resp. ξgsuperscriptsubscript𝜉𝑔\xi_{g}^{-}) son point fixe attractif (resp. répulsif) dans X𝑋\partial X. Notons ξZ+superscriptsubscript𝜉superscript𝑍\xi_{Z^{+}}^{-} le point fixe répulsif commun à tous les éléments hyperboliques de Z+superscript𝑍Z^{+}.

Soit gG𝑔𝐺g\in G de décomposition de Cartan g=k1zk2𝑔subscript𝑘1𝑧subscript𝑘2g=k_{1}zk_{2}, où k1,k2Ksubscript𝑘1subscript𝑘2𝐾k_{1},k_{2}\in K et zZ+𝑧superscript𝑍z\in Z^{+}. Si gK𝑔𝐾g\notin K, le point

(3.1) ζg=k21ξZ+Xsuperscriptsubscript𝜁𝑔superscriptsubscript𝑘21superscriptsubscript𝜉superscript𝑍𝑋\zeta_{g}^{-}=k_{2}^{-1}\cdot\xi_{Z^{+}}^{-}\in\partial X

est bien défini, car si g=k1zk2𝑔subscriptsuperscript𝑘1superscript𝑧subscriptsuperscript𝑘2g=k^{\prime}_{1}z^{\prime}k^{\prime}_{2} est une autre décomposition de Cartan de g𝑔g, où k1,k2Ksubscriptsuperscript𝑘1subscriptsuperscript𝑘2𝐾k^{\prime}_{1},k^{\prime}_{2}\in K et zZ+superscript𝑧superscript𝑍z^{\prime}\in Z^{+}, alors k21k21Zsuperscriptsubscriptsuperscript𝑘21superscriptsubscript𝑘21𝑍{k^{\prime}}_{2}^{-1}\in k_{2}^{-1}Z (cf. paragraphe 2.1). Le lemme suivant montre que lorsque g𝑔g est hyperbolique et μ(g)𝜇𝑔\mu(g) grand, le point ζgsuperscriptsubscript𝜁𝑔\zeta_{g}^{-} est proche du point fixe répulsif ξgsuperscriptsubscript𝜉𝑔\xi_{g}^{-}.

Lemme 3.2.

Pour tout élément hyperbolique gG𝑔𝐺g\in G, on a

d¯(ξg,ζg)qμ(g)/2.¯𝑑superscriptsubscript𝜉𝑔superscriptsubscript𝜁𝑔superscript𝑞𝜇𝑔2\underline{d}(\xi_{g}^{-},\zeta_{g}^{-})\,\leq\,q^{-\mu(g)/2}.

Démonstration. Soit gG𝑔𝐺g\in G un élément hyperbolique ; écrivons g=k1zk2𝑔subscript𝑘1𝑧subscript𝑘2g=k_{1}zk_{2}, où k1,k2Ksubscript𝑘1subscript𝑘2𝐾k_{1},k_{2}\in K et zZ+𝑧superscript𝑍z\in Z^{+}. Les points x0subscript𝑥0x_{0}, prg1(x0)subscriptprsuperscript𝑔1subscript𝑥0\mathrm{pr}_{g^{-1}}(x_{0}), g1prg1(x0)superscript𝑔1subscriptprsuperscript𝑔1subscript𝑥0g^{-1}\cdot\mathrm{pr}_{g^{-1}}(x_{0}) et g1x0superscript𝑔1subscript𝑥0g^{-1}\cdot x_{0} sont alignés dans cet ordre, donc g1prg1(x0)Dx0(ξg)superscript𝑔1subscriptprsuperscript𝑔1subscript𝑥0subscript𝐷subscript𝑥0superscriptsubscript𝜉𝑔g^{-1}\cdot\mathrm{pr}_{g^{-1}}(x_{0})\in D_{x_{0}}(\xi_{g}^{-}). D’autre part, comme K𝐾K fixe x0subscript𝑥0x_{0}, on a

g1x0=k21z1x0k21Dx0(ξZ+)=Dx0(ζg),superscript𝑔1subscript𝑥0superscriptsubscript𝑘21superscript𝑧1subscript𝑥0superscriptsubscript𝑘21subscript𝐷subscript𝑥0superscriptsubscript𝜉superscript𝑍subscript𝐷subscript𝑥0superscriptsubscript𝜁𝑔g^{-1}\cdot x_{0}=k_{2}^{-1}z^{-1}\cdot x_{0}\,\in\,k_{2}^{-1}\cdot D_{x_{0}}(\xi_{Z^{+}}^{-})=D_{x_{0}}(\zeta_{g}^{-}),

donc g1prg1(x0)Dx0(ζg)superscript𝑔1subscriptprsuperscript𝑔1subscript𝑥0subscript𝐷subscript𝑥0superscriptsubscript𝜁𝑔g^{-1}\cdot\mathrm{pr}_{g^{-1}}(x_{0})\in D_{x_{0}}(\zeta_{g}^{-}) car X𝑋X est un arbre. On en déduit

d¯(ξg,ζg)qd(x0,g1prg1(x0)).¯𝑑superscriptsubscript𝜉𝑔superscriptsubscript𝜁𝑔superscript𝑞𝑑subscript𝑥0superscript𝑔1subscriptprsuperscript𝑔1subscript𝑥0\underline{d}(\xi_{g}^{-},\zeta_{g}^{-})\leq q^{-d(x_{0},g^{-1}\cdot\mathrm{pr}_{g^{-1}}(x_{0}))}.

Or, d’après (2.1), (2.3) et (2.4) on a

d(x0,g1prg1(x0))μ(g)2,𝑑subscript𝑥0superscript𝑔1subscriptprsuperscript𝑔1subscript𝑥0𝜇𝑔2d\big{(}x_{0},g^{-1}\cdot\mathrm{pr}_{g^{-1}}(x_{0})\big{)}\ \leq\ \frac{\mu(g)}{2},

d’où le résultat. ∎


L’intérêt d’introduire les points ζgsuperscriptsubscript𝜁𝑔\zeta_{g}^{-} est de contrôler la projection de Cartan de certains éléments de G𝐺G, comme dans le lemme suivant.

Lemme 3.3.

Pour tout élément hyperbolique gG𝑔𝐺g\in G et tout réel ε>0𝜀0\varepsilon>0, il existe des constantes C,N0𝐶𝑁0C,N\geq 0 telles que pour tout γGK𝛾𝐺𝐾\gamma\in G\smallsetminus K vérifiant d¯(ξg+,ζγ)ε¯𝑑superscriptsubscript𝜉𝑔superscriptsubscript𝜁𝛾𝜀\underline{d}(\xi_{g}^{+},\zeta_{\gamma}^{-})\geq\varepsilon on ait

μ(γgn)μ(γ)+μ(gn)C𝜇𝛾superscript𝑔𝑛𝜇𝛾𝜇superscript𝑔𝑛𝐶\mu(\gamma g^{n})\geq\mu(\gamma)+\mu(g^{n})-C

pour tout entier n>N𝑛𝑁n>N.

Démonstration. Soient ε>0𝜀0\varepsilon>0 un réel et gG𝑔𝐺g\in G un élément hyperbolique. Posons

s=logqε𝑠subscript𝑞𝜀s=-\log_{q}\varepsilon

et montrons que C=2s𝐶2𝑠C=2s et N=s/λ(g)𝑁𝑠𝜆𝑔N=s/\lambda(g) conviennent. La figure 3 illustre notre raisonnement. Pour tout n1𝑛1n\geq\nolinebreak 1, les points x0subscript𝑥0x_{0}, prg(x0)subscriptpr𝑔subscript𝑥0\mathrm{pr}_{g}(x_{0}) et gnprg(x0)superscript𝑔𝑛subscriptpr𝑔subscript𝑥0g^{n}\cdot\mathrm{pr}_{g}(x_{0}) sont alignés dans cet ordre sur la demi-droite géodésique Dx0(ξg+)subscript𝐷subscript𝑥0superscriptsubscript𝜉𝑔D_{x_{0}}(\xi_{g}^{+}), d’où

(3.2) d(x0,gnprg(x0))d(prg(x0),gnprg(x0))=nλ(g).𝑑subscript𝑥0superscript𝑔𝑛subscriptpr𝑔subscript𝑥0𝑑subscriptpr𝑔subscript𝑥0superscript𝑔𝑛subscriptpr𝑔subscript𝑥0𝑛𝜆𝑔d\big{(}x_{0},g^{n}\cdot\mathrm{pr}_{g}(x_{0})\big{)}\ \geq\ d\big{(}\mathrm{pr}_{g}(x_{0}),g^{n}\cdot\mathrm{pr}_{g}(x_{0})\big{)}\ =\ n\lambda(g).

Soit γGK𝛾𝐺𝐾\gamma\in G\smallsetminus K tel que d¯(ξg+,ζγ)ε¯𝑑superscriptsubscript𝜉𝑔superscriptsubscript𝜁𝛾𝜀\underline{d}(\xi_{g}^{+},\zeta_{\gamma}^{-})\geq\varepsilon. Écrivons γ=k1zk2𝛾subscript𝑘1𝑧subscript𝑘2\gamma=k_{1}zk_{2}, où k1,k2Ksubscript𝑘1subscript𝑘2𝐾k_{1},k_{2}\in K et zZ+𝑧superscript𝑍z\in Z^{+}. L’intersection Dx0(ξg+)Dx0(ζγ)subscript𝐷subscript𝑥0superscriptsubscript𝜉𝑔subscript𝐷subscript𝑥0superscriptsubscript𝜁𝛾D_{x_{0}}(\xi_{g}^{+})\cap D_{x_{0}}(\zeta_{\gamma}^{-}) est un segment géodésique dont l’une des extrémités est x0subscript𝑥0x_{0} ; notons xX𝑥𝑋x\in X son autre extrémité. On a d(x0,x)s𝑑subscript𝑥0𝑥𝑠d(x_{0},x)\leq s par hypothèse. Soit n>s/λ(g)𝑛𝑠𝜆𝑔n>s/\lambda(g) un entier. D’après (3.2) on a

d(x0,gnprg(x0))>d(x0,x),𝑑subscript𝑥0superscript𝑔𝑛subscriptpr𝑔subscript𝑥0𝑑subscript𝑥0𝑥d(x_{0},g^{n}\cdot\mathrm{pr}_{g}(x_{0}))\,>\,d(x_{0},x),

donc les points x0subscript𝑥0x_{0}, x𝑥x et gnx0superscript𝑔𝑛subscript𝑥0g^{n}\cdot x_{0} sont alignés dans cet ordre et par (2.1) on a

(3.3) d(x,gnx0)=μ(gn)d(x0,x).𝑑𝑥superscript𝑔𝑛subscript𝑥0𝜇superscript𝑔𝑛𝑑subscript𝑥0𝑥d(x,g^{n}\cdot x_{0})\ =\ \mu(g^{n})-d(x_{0},x).
x0subscript𝑥0x_{0}prg(x0)subscriptpr𝑔subscript𝑥0\mathrm{pr}_{g}(x_{0})x𝑥xgnprg(x0)superscript𝑔𝑛subscriptpr𝑔subscript𝑥0g^{n}\cdot\mathrm{pr}_{g}(x_{0})ξgsuperscriptsubscript𝜉𝑔\xi_{g}^{-}ζγ=k21ξZ+superscriptsubscript𝜁𝛾superscriptsubscript𝑘21superscriptsubscript𝜉superscript𝑍\zeta_{\gamma}^{-}=k_{2}^{-1}\cdot\xi_{Z^{+}}^{-}γ1x0superscript𝛾1subscript𝑥0\gamma^{-1}\cdot x_{0}gnx0superscript𝑔𝑛subscript𝑥0g^{n}\cdot x_{0}ξg+superscriptsubscript𝜉𝑔\xi_{g}^{+}sabsent𝑠\leq s
Figure 3. Illustration du lemme 3.3

Comme K𝐾K fixe x0subscript𝑥0x_{0}, on a γ1x0=k21z1x0superscript𝛾1subscript𝑥0superscriptsubscript𝑘21superscript𝑧1subscript𝑥0\gamma^{-1}\cdot x_{0}=k_{2}^{-1}z^{-1}\cdot x_{0}, et ce point appartient à k21Dx0(ξZ+)=Dx0(ζγ)superscriptsubscript𝑘21subscript𝐷subscript𝑥0superscriptsubscript𝜉superscript𝑍subscript𝐷subscript𝑥0superscriptsubscript𝜁𝛾k_{2}^{-1}\cdot D_{x_{0}}(\xi_{Z^{+}}^{-})=D_{x_{0}}(\zeta_{\gamma}^{-}). Le point x𝑥x appartient lui aussi à Dx0(ζγ)subscript𝐷subscript𝑥0superscriptsubscript𝜁𝛾D_{x_{0}}(\zeta_{\gamma}^{-}), donc

d(γ1x0,x)=|d(x0,γ1x0)d(x0,x)|.𝑑superscript𝛾1subscript𝑥0𝑥𝑑subscript𝑥0superscript𝛾1subscript𝑥0𝑑subscript𝑥0𝑥d(\gamma^{-1}\cdot x_{0},x)=\big{|}d(x_{0},\gamma^{-1}\cdot x_{0})-d(x_{0},x)\big{|}.

En utilisant (2.1) et (2.3), on obtient

(3.4) d(γ1x0,x)μ(γ)d(x0,x).𝑑superscript𝛾1subscript𝑥0𝑥𝜇𝛾𝑑subscript𝑥0𝑥d(\gamma^{-1}\cdot x_{0},x)\ \geq\ \mu(\gamma)-d(x_{0},x).

Or, x𝑥x est le projeté de gnx0superscript𝑔𝑛subscript𝑥0g^{n}\cdot x_{0} sur Dx0(ζγ)subscript𝐷subscript𝑥0superscriptsubscript𝜁𝛾D_{x_{0}}(\zeta_{\gamma}^{-}), donc les points γ1x0superscript𝛾1subscript𝑥0\gamma^{-1}\cdot x_{0}, x𝑥x et gnx0superscript𝑔𝑛subscript𝑥0g^{n}\cdot x_{0} sont alignés dans cet ordre, d’où

(3.5) d(γ1x0,gnx0)=d(γ1x0,x)+d(x,gnx0).𝑑superscript𝛾1subscript𝑥0superscript𝑔𝑛subscript𝑥0𝑑superscript𝛾1subscript𝑥0𝑥𝑑𝑥superscript𝑔𝑛subscript𝑥0d(\gamma^{-1}\cdot x_{0},g^{n}\cdot x_{0})\ =\ d(\gamma^{-1}\cdot x_{0},x)+d(x,g^{n}\cdot x_{0}).

En utilisant (2.1), (3.3), (3.4), (3.5) et le fait que G𝐺G agit sur X𝑋X par isométries, on trouve

μ(γgn)𝜇𝛾superscript𝑔𝑛\displaystyle\mu(\gamma g^{n}) =\displaystyle= d(x0,γgnx0)𝑑subscript𝑥0𝛾superscript𝑔𝑛subscript𝑥0\displaystyle d(x_{0},\gamma g^{n}\cdot x_{0})
=\displaystyle= d(γ1x0,gnx0)𝑑superscript𝛾1subscript𝑥0superscript𝑔𝑛subscript𝑥0\displaystyle d(\gamma^{-1}\cdot x_{0},g^{n}\cdot x_{0})
\displaystyle\geq μ(γ)+μ(gn)2d(x0,x),𝜇𝛾𝜇superscript𝑔𝑛2𝑑subscript𝑥0𝑥\displaystyle\mu(\gamma)+\mu(g^{n})-2\,d(x_{0},x),

d’où le résultat puisque d(x0,x)s𝑑subscript𝑥0𝑥𝑠d(x_{0},x)\leq s. ∎

3.2. Démonstration de l’implication directe du théorème 3.1

Pour obtenir l’implication directe du théorème 3.1, nous raisonnons par contraposition : il suffit de démontrer la proposition suivante.

Proposition 3.4.

Soient Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} un sous-groupe discret de type fini sans torsion de G𝐺G et ρ:Γ0G:𝜌subscriptΓ0𝐺\rho:\Gamma_{0}\rightarrow G un morphisme de groupes admissible. Si Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} n’est pas cocompact dans G𝐺G, alors pour tout R>0𝑅0R>0 il existe un élément gRGsubscript𝑔𝑅𝐺g_{R}\in G tel que μ(γgRρ(γ)1)R𝜇𝛾subscript𝑔𝑅𝜌superscript𝛾1𝑅\mu(\gamma\,g_{R}\,\rho(\gamma)^{-1})\geq R pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0}.

Pour démontrer la proposition 3.4, nous établissons l’existence d’un élément hyperbolique gG𝑔𝐺g\in G tel que pour presque tout γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\}, le point ζγXsuperscriptsubscript𝜁𝛾𝑋\zeta_{\gamma}^{-}\in\partial X donné par (3.1) soit suffisamment éloigné du point fixe attractif ξg+superscriptsubscript𝜉𝑔\xi_{g}^{+} (lemme 3.5). Nous utilisons ensuite le lemme 3.3.

Lemme 3.5.

Soit Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} un sous-groupe discret de type fini sans torsion de G𝐺G, non cocompact dans G𝐺G. Il existe un élément hyperbolique gG𝑔𝐺g\in G et un réel ε>0𝜀0\varepsilon>\nolinebreak 0 tels que d¯(ξg+,ζγ)ε¯𝑑superscriptsubscript𝜉𝑔superscriptsubscript𝜁𝛾𝜀\underline{d}(\xi_{g}^{+},\zeta_{\gamma}^{-})\geq\varepsilon pour presque tout γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\nolinebreak\Gamma_{0}\smallsetminus\nolinebreak\{1\}.

Démonstration. Comme Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est discret, sans torsion, de type fini et non cocompact dans G𝐺G, son ensemble limite dans X𝑋\partial X est un fermé strict de X𝑋\partial X (cf. paragraphe 2.2.3). Notons 𝒰𝒰\mathcal{U} le complémentaire dans X𝑋\partial X de cet ensemble limite. Soit gG𝑔𝐺g\in G un élément hyperbolique tel que ξg+𝒰superscriptsubscript𝜉𝑔𝒰\xi_{g}^{+}\in\mathcal{U}. Il existe un réel ε>0𝜀0\varepsilon>0 tel que

{ξX,d¯(ξg+,ξ)<2ε}𝒰.formulae-sequence𝜉𝑋¯𝑑superscriptsubscript𝜉𝑔𝜉2𝜀𝒰\big{\{}\xi\in\partial X,\ \underline{d}\big{(}\xi_{g}^{+},\xi\big{)}<2\varepsilon\big{\}}\ \subset\ \mathcal{U}.

Par définition on a alors d¯(ξg+,ξγ)2ε¯𝑑superscriptsubscript𝜉𝑔superscriptsubscript𝜉𝛾2𝜀\underline{d}(\xi_{g}^{+},\xi_{\gamma}^{-})\geq 2\varepsilon pour tout γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\}. Le lemme 3.2 implique

d¯(ξg+,ζγ)d¯(ξg+,ξγ)d¯(ξγ,ζγ) 2εqμ(γ)/2¯𝑑superscriptsubscript𝜉𝑔superscriptsubscript𝜁𝛾¯𝑑superscriptsubscript𝜉𝑔superscriptsubscript𝜉𝛾¯𝑑superscriptsubscript𝜉𝛾superscriptsubscript𝜁𝛾2𝜀superscript𝑞𝜇𝛾2\underline{d}\big{(}\xi_{g}^{+},\zeta_{\gamma}^{-}\big{)}\ \geq\ \underline{d}\big{(}\xi_{g}^{+},\xi_{\gamma}^{-}\big{)}-\underline{d}\big{(}\xi_{\gamma}^{-},\zeta_{\gamma}^{-}\big{)}\ \geq\ 2\varepsilon-q^{-\mu(\gamma)/2}

pour tout γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\}. Or, l’application μ𝜇\mu est propre et le groupe Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} discret dans G𝐺G, donc qμ(γ)/2εsuperscript𝑞𝜇𝛾2𝜀q^{-\mu(\gamma)/2}\leq\varepsilon pour presque tout γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\}. ∎


Nous pouvons à présent démontrer la proposition 3.4.

Démonstration de la proposition 3.4. Supposons Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} non cocompact dans G𝐺G. D’après les lemmes 3.3 et 3.5, il existe un élément hyperbolique gG𝑔𝐺g\in G et des réels C,N0𝐶𝑁0C,N\geq 0 tels que pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} en dehors d’un certain ensemble fini F𝐹F, on ait

(3.6) μ(γgn)μ(γ)+μ(gn)C𝜇𝛾superscript𝑔𝑛𝜇𝛾𝜇superscript𝑔𝑛𝐶\mu(\gamma g^{n})\ \geq\ \mu(\gamma)+\mu(g^{n})-C

pour tout entier n>N𝑛𝑁n>N. Soit R>0𝑅0R>0. Comme ρ𝜌\rho est admissible, on a

(3.7) μ(ρ(γ))μ(γ)RC𝜇𝜌𝛾𝜇𝛾𝑅𝐶\mu(\rho(\gamma))\ \leq\ \mu(\gamma)-R-C

pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} en dehors d’un certain ensemble fini Fsuperscript𝐹F^{\prime}. Posons

R=maxγFF(μ(γ1)+μ(ρ(γ))).superscript𝑅subscript𝛾𝐹superscript𝐹𝜇superscript𝛾1𝜇𝜌𝛾R^{\prime}=\max_{\gamma\in F\cup F^{\prime}}\big{(}\mu(\gamma^{-1})+\mu(\rho(\gamma))\big{)}.

Comme g𝑔g est hyperbolique, la suite (μ(gn))nsubscript𝜇superscript𝑔𝑛𝑛(\mu(g^{n}))_{n\in\mathbb{N}} tend vers l’infini avec n𝑛n d’après (2.4). En particulier, il existe un entier n>N𝑛𝑁n>N tel que μ(gn)R+R𝜇superscript𝑔𝑛𝑅superscript𝑅\mu(g^{n})\geq\nolinebreak R+\nolinebreak R^{\prime}. Fixons un tel n>N𝑛𝑁n>N et montrons que l’élément gR=gnsubscript𝑔𝑅superscript𝑔𝑛g_{R}=g^{n} convient. D’après (2.2), (3.6) et (3.7), pour tout γ(FF)𝛾𝐹superscript𝐹\gamma\notin(F\cup F^{\prime}) on a

μ(γgnρ(γ)1)μ(γgn)μ(ρ(γ))(μ(γ)+μ(gn)C)(μ(γ)RC)R𝜇𝛾superscript𝑔𝑛𝜌superscript𝛾1𝜇𝛾superscript𝑔𝑛𝜇𝜌𝛾𝜇𝛾𝜇superscript𝑔𝑛𝐶𝜇𝛾𝑅𝐶𝑅\mu\big{(}\gamma g^{n}\rho(\gamma)^{-1}\big{)}\geq\mu(\gamma g^{n})-\mu(\rho(\gamma))\geq\big{(}\mu(\gamma)+\mu(g^{n})-C\big{)}-\big{(}\mu(\gamma)-R-C\big{)}\geq R

et pour tout γFF𝛾𝐹superscript𝐹\gamma\in F\cup F^{\prime} on a

μ(γgnρ(γ)1)μ(gn)μ(γ1)μ(ρ(γ))μ(gn)RR.𝜇𝛾superscript𝑔𝑛𝜌superscript𝛾1𝜇superscript𝑔𝑛𝜇superscript𝛾1𝜇𝜌𝛾𝜇superscript𝑔𝑛superscript𝑅𝑅\mu\big{(}\gamma g^{n}\rho(\gamma)^{-1}\big{)}\ \geq\ \mu(g^{n})-\mu(\gamma^{-1})-\mu(\rho(\gamma))\ \geq\ \mu(g^{n})-R^{\prime}\ \geq\ R.

Ceci achève la démonstration de la proposition 3.4. ∎

3.3. Démonstration de l’implication réciproque du théorème 3.1

Pour terminer la démonstration du théorème 3.1 (et donc du théorème 1.1), il suffit d’établir le résultat suivant.

Proposition 3.6.

Soient Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} un réseau cocompact sans torsion de G𝐺G et ρ:Γ0G:𝜌subscriptΓ0𝐺\rho:\nolinebreak\Gamma_{0}\rightarrow G un morphisme de groupes admissible. Il existe une partie compacte 𝒞𝒞\mathcal{C} de G𝐺G telle que

G={γgρ(γ)1,γΓ0,g𝒞}.G=\big{\{}\gamma g\rho(\gamma)^{-1},\quad\gamma\in\Gamma_{0},\ g\in\mathcal{C}\big{\}}.

Démonstration. Par cocompacité de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} dans G𝐺G et continuité de μ𝜇\mu, il existe un réel R>0𝑅0R>0 tel que

G=Γ0{gG,μ(g)R}.𝐺subscriptΓ0formulae-sequence𝑔𝐺𝜇𝑔𝑅G=\Gamma_{0}\cdot\big{\{}g\in G,\ \mu(g)\leq R\big{\}}.

Comme ρ𝜌\rho est admissible, on a

μ(ρ(γ))μ(γ)2R1𝜇𝜌𝛾𝜇𝛾2𝑅1\mu(\rho(\gamma))\ \leq\ \mu(\gamma)-2R-1

pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} en dehors d’un certain ensemble fini F𝐹F. Posons R=maxγFμ(γ)superscript𝑅subscript𝛾𝐹𝜇𝛾R^{\prime}=\max_{\gamma\in F}\mu(\gamma) et montrons que le compact

𝒞={gG,μ(g)R+R}𝒞formulae-sequence𝑔𝐺𝜇𝑔𝑅superscript𝑅\mathcal{C}=\big{\{}g\in G,\ \mu(g)\leq R+R^{\prime}\big{\}}

convient. Pour cela, il suffit d’établir que pour tout élément gG𝑔𝐺g\in G vérifiant μ(g)>R+R𝜇𝑔𝑅superscript𝑅\mu(g)>R+R^{\prime} il existe γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} tel que μ(γgρ(γ)1)μ(g)1𝜇𝛾𝑔𝜌superscript𝛾1𝜇𝑔1\mu(\gamma g\rho(\gamma)^{-1})\leq\mu(g)-1 ; on peut alors conclure par récurrence.

Soit gG𝑔𝐺g\in G tel que μ(g)>R+R𝜇𝑔𝑅superscript𝑅\mu(g)>R+R^{\prime}. Par hypothèse, il existe γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} tel que μ(γg)R𝜇𝛾𝑔𝑅\mu(\gamma g)\leq\nolinebreak R. Montrons que μ(γgρ(γ)1)μ(g)1𝜇𝛾𝑔𝜌superscript𝛾1𝜇𝑔1\mu(\gamma g\rho(\gamma)^{-1})\leq\mu(g)-1. D’après (2.2) on a

μ(γ1)μ(g)μ(γg)>R,𝜇superscript𝛾1𝜇𝑔𝜇𝛾𝑔superscript𝑅\mu(\gamma^{-1})\ \geq\ \mu(g)-\mu(\gamma g)\ >\ R^{\prime},

donc γ1Fsuperscript𝛾1𝐹\gamma^{-1}\notin F, ce qui implique μ(ρ(γ)1)μ(γ1)2R1𝜇𝜌superscript𝛾1𝜇superscript𝛾12𝑅1\mu(\rho(\gamma)^{-1})\leq\mu(\gamma^{-1})-2R-1. En utilisant (2.2) et (2.3), on trouve

μ(γ1)μ(g)+μ(g1γ1)μ(g)+R𝜇superscript𝛾1𝜇𝑔𝜇superscript𝑔1superscript𝛾1𝜇𝑔𝑅\mu(\gamma^{-1})\ \leq\ \mu(g)+\mu(g^{-1}\gamma^{-1})\ \leq\ \mu(g)+R

et

μ(γgρ(γ)1)μ(γg)+μ(ρ(γ)1)μ(γ1)R1μ(g)1.𝜇𝛾𝑔𝜌superscript𝛾1𝜇𝛾𝑔𝜇𝜌superscript𝛾1𝜇superscript𝛾1𝑅1𝜇𝑔1\mu\big{(}\gamma g\rho(\gamma)^{-1}\big{)}\ \leq\ \mu(\gamma g)+\mu\big{(}\rho(\gamma)^{-1}\big{)}\ \leq\ \mu(\gamma^{-1})-R-1\ \leq\ \mu(g)-1.

Ceci achève la démonstration de la proposition 3.6. ∎

3.4. Le cas de rang supérieur

La description donnée par le théorème 1.1 est spécifique au rang un. En effet, voici en caractéristique nulle un exemple de quotient compact Γ\(G×G)/ΔG\Γ𝐺𝐺subscriptΔ𝐺\Gamma\backslash(G\times G)/\Delta_{G}𝐆𝐆\mathbf{G} est de 𝐤𝐤\mathbf{k}-rang 2absent2\geq 2 et où ΓΓ\Gamma est le produit de deux sous-groupes infinis de G𝐺G. Fixons un élément non carré β𝐤𝐤2𝛽𝐤superscript𝐤2\beta\in\mathbf{k}\smallsetminus\mathbf{k}^{2}. Soient Q𝑄Q la forme quadratique sur 𝐤4superscript𝐤4\mathbf{k}^{4} donnée par

Q(x1,y1,x2,y2)=(x12βy12)(x22βy22)𝑄subscript𝑥1subscript𝑦1subscript𝑥2subscript𝑦2superscriptsubscript𝑥12𝛽superscriptsubscript𝑦12superscriptsubscript𝑥22𝛽superscriptsubscript𝑦22Q(x_{1},y_{1},x_{2},y_{2})=(x_{1}^{2}-\beta\,y_{1}^{2})-(x_{2}^{2}-\beta\,y_{2}^{2})

et 𝐆=𝐒𝐎(Q)𝐆𝐒𝐎𝑄\mathbf{G}=\mathbf{SO}(Q) le groupe spécial orthogonal de Q𝑄Q. Notons Q1subscript𝑄1Q_{1} la restriction de Q𝑄Q à 𝐤3×{0}superscript𝐤30\mathbf{k}^{3}\times\{0\} et soit 𝐇1=𝐒𝐎(Q1)subscript𝐇1𝐒𝐎subscript𝑄1\mathbf{H}_{1}=\mathbf{SO}(Q_{1}) le groupe spécial orthogonal de Q1subscript𝑄1Q_{1}, vu comme sous-groupe de 𝐆𝐆\mathbf{G}. Choisissons une racine carrée β𝛽\sqrt{\beta} de β𝛽\beta dans une clôture algébrique de 𝐤𝐤\mathbf{k} et notons σ𝜎\sigma l’élément non trivial du groupe de Galois de l’extension quadratique 𝐤(β)/𝐤𝐤𝛽𝐤\mathbf{k}(\sqrt{\beta})/\mathbf{k}. Soient hh la forme hermitienne sur 𝐤(β)2𝐤superscript𝛽2\mathbf{k}(\sqrt{\beta})^{2} donnée par

h(z1,z2)=z1σ(z1)z2σ(z2)subscript𝑧1subscript𝑧2subscript𝑧1𝜎subscript𝑧1subscript𝑧2𝜎subscript𝑧2h(z_{1},z_{2})=z_{1}\,\sigma(z_{1})-z_{2}\,\sigma(z_{2})

et 𝐇2=𝐔(h)subscript𝐇2𝐔\mathbf{H}_{2}=\mathbf{U}(h) le groupe unitaire de hh. En identifiant 𝐤(β)𝐤𝛽\mathbf{k}(\sqrt{\beta}) à 𝐤2superscript𝐤2\mathbf{k}^{2} par l’application qui à tout x+βy𝑥𝛽𝑦x+\sqrt{\beta}y associe (x,y)𝑥𝑦(x,y), on voit 𝐇2subscript𝐇2\mathbf{H}_{2} comme un sous-groupe de 𝐆𝐆\mathbf{G}. Par un analogue ultramétrique de [Ko1], prop. 4.9, le groupe H1subscript𝐻1H_{1} agit proprement et cocompactement sur G/H2𝐺subscript𝐻2G/H_{2}, donc H1×H2subscript𝐻1subscript𝐻2H_{1}\times H_{2} agit proprement et cocompactement sur (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G}. Si 𝐤𝐤\mathbf{k} est de caractéristique nulle, les groupes H1subscript𝐻1H_{1} et H2subscript𝐻2H_{2} admettent des réseaux cocompacts sans torsion Γ1subscriptΓ1\Gamma_{1} et Γ2subscriptΓ2\Gamma_{2} ([BH], th. A, et [Sel], lem. 8). Le groupe Γ=Γ1×Γ2ΓsubscriptΓ1subscriptΓ2\Gamma=\Gamma_{1}\times\Gamma_{2} agit alors librement, proprement et cocompactement sur (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G}.

4. Longueurs de translation et constantes de Lipschitz

Reprenons les notations du paragraphe 2.2. Le but de cette partie est de démontrer le résultat suivant.

Proposition 4.1.

Soient X𝑋X et Xsuperscript𝑋X^{\prime} deux arbres réels simpliciaux de valence 2absent2\geq\nolinebreak 2. Soit Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} un sous-groupe discret sans torsion de Isom(X)Isom𝑋\mathrm{Isom}(X) tel que le graphe quotient Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X soit fini, et soit ρ:Γ0Isom(X):𝜌subscriptΓ0Isomsuperscript𝑋\rho:\Gamma_{0}\rightarrow\nolinebreak\mathrm{Isom}(X^{\prime}) un morphisme de groupes.

  1. (1)

    Il existe une application affine par morceaux f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow\leavevmode\nobreak\ X^{\prime} qui est ρ𝜌\rho-équivariante, au sens où f(γx)=ρ(γ)f(x)𝑓𝛾𝑥𝜌𝛾𝑓𝑥f(\gamma\cdot x)=\rho(\gamma)\cdot f(x) pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} et tout xX𝑥𝑋x\in X. Une telle application est lipschitzienne.

  2. (2)

    La borne inférieure C0𝐶0C\geq 0 des constantes de Lipschitz de telles applications est atteinte.

  3. (3)

    Fixons un point x0Xsubscript𝑥0𝑋x_{0}\in X et soit F𝐹F le sous-ensemble fini de Γ0{1}subscriptΓ01\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\} formé des éléments γ𝛾\gamma tels que d(x0,γx0)4N𝑑subscript𝑥0𝛾subscript𝑥04𝑁d(x_{0},\gamma\cdot x_{0})\leq 4N, où N1𝑁1N\geq 1 désigne le nombre de sommets du graphe fini Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X. On a

    supγΓ0{1}λ(ρ(γ))λ(γ)=maxγFλ(ρ(γ))λ(γ)=C.subscriptsupremum𝛾subscriptΓ01𝜆𝜌𝛾𝜆𝛾subscript𝛾𝐹𝜆𝜌𝛾𝜆𝛾𝐶\sup_{\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\}}\frac{\lambda\big{(}\rho(\gamma)\big{)}}{\lambda(\gamma)}\ =\ \max_{\gamma\in F}\,\frac{\lambda\big{(}\rho(\gamma)\big{)}}{\lambda(\gamma)}\ =\ C.

Remarquons que l’hypothèse que Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est un sous-groupe discret sans torsion de Isom(X)Isom𝑋\mathrm{Isom}(X) tel que le graphe Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X soit fini est équivalente à l’hypothèse que Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est un groupe libre de type fini agissant sur X𝑋X librement, minimalement, par isométries (cf. paragraphe 2.2.3).

Nous notons ici d𝑑d la distance sur X𝑋X ou Xsuperscript𝑋X^{\prime} et disons qu’une application f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow X^{\prime} est affine par morceaux si pour toute arête e𝑒e de X𝑋X, il existe une constante Ce0subscript𝐶𝑒0C_{e}\geq 0 telle que

(4.1) d(f(x1),f(x2))=Ced(x1,x2)𝑑𝑓subscript𝑥1𝑓subscript𝑥2subscript𝐶𝑒𝑑subscript𝑥1subscript𝑥2d\big{(}f(x_{1}),f(x_{2})\big{)}=C_{e}\,d(x_{1},x_{2})

pour tous x1,x2esubscript𝑥1subscript𝑥2𝑒x_{1},x_{2}\in e. Une telle application est continue.

Remarque 4.2.

Une application f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow X^{\prime} affine par morceaux est entièrement déterminée par les images par f𝑓f des sommets de X𝑋X.

Notons que pour tout γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\}, tout x𝒜γ𝑥subscript𝒜𝛾x\in\mathcal{A}_{\gamma} et toute application ρ𝜌\rho-équivariante et Csuperscript𝐶C^{\prime}-lipschitzienne f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow X^{\prime}, on a

λ(ρ(γ))d(f(x),ρ(γ)f(x))=d(f(x),f(γx))Cd(x,γx)=Cλ(γ).𝜆𝜌𝛾𝑑𝑓𝑥𝜌𝛾𝑓𝑥𝑑𝑓𝑥𝑓𝛾𝑥superscript𝐶𝑑𝑥𝛾𝑥superscript𝐶𝜆𝛾\lambda(\rho(\gamma))\,\leq\,d\big{(}f(x),\rho(\gamma)\cdot f(x)\big{)}\,=\,d\big{(}f(x),f(\gamma\cdot x)\big{)}\,\leq\,C^{\prime}d(x,\gamma\cdot x)\,=\,C^{\prime}\lambda(\gamma).

L’inégalité

(4.2) supγΓ0{1}λ(ρ(γ))λ(γ)C.subscriptsupremum𝛾subscriptΓ01𝜆𝜌𝛾𝜆𝛾𝐶\sup_{\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\}}\frac{\lambda\big{(}\rho(\gamma)\big{)}}{\lambda(\gamma)}\ \leq\ C.

en résulte immédiatement. Le point (3) de la proposition 4.1 affirme que cette inégalité est une égalité et que la borne supérieure dans le terme de gauche est atteinte sur un sous-ensemble fini F𝐹F indépendant de ρ𝜌\rho.

Dans le cas particulier où ρ𝜌\rho est injectif d’image discrète et cocompacte, ce résultat est équivalent à un résultat de T. White obtenu en étudiant une certaine “distance asymétrique” sur l’outre-espace ([FM], prop. 3.15). Nous nous inspirons de la preuve de White, qui nous a été aimablement communiquée par M. Bestvina.

4.1. Applications ρ𝜌\rho-équivariantes affines par morceaux

Le point (1) de la proposition 4.1 est facile.

Démonstration du point (1) de la proposition 4.1. Montrons tout d’abord qu’il existe une application f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow X^{\prime} ρ𝜌\rho-équivariante et affine par morceaux. Comme le graphe Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X est fini, il existe un système fini S𝑆S de représentants de l’ensemble des sommets de X𝑋X modulo l’action de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0}. Pour tout sS𝑠𝑆s\in S, choisissons un sommet ssuperscript𝑠s^{\prime} de Xsuperscript𝑋X^{\prime}. D’après la remarque 4.2, il existe une unique application affine par morceaux f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow X^{\prime} telle que f(γs)=ρ(γ)s𝑓𝛾𝑠𝜌𝛾superscript𝑠f(\gamma\cdot s)=\rho(\gamma)\cdot s^{\prime} pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} et tout sS𝑠𝑆s\in S. Cette application est ρ𝜌\rho-équivariante.

D’autre part, toute application f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow X^{\prime} ρ𝜌\rho-équivariante et affine par morceaux est lipschitzienne. En effet, comme le graphe Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X est fini, il existe un système fini E𝐸E de représentants de l’ensemble des arêtes de X𝑋X modulo l’action de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0}. L’application f𝑓f est lipschitzienne de constante maxeECesubscript𝑒𝐸subscript𝐶𝑒\max_{e\in E}C_{e}, où Cesubscript𝐶𝑒C_{e} est donnée par (4.1). ∎

4.2. Une constante de Lipschitz minimale

Dans le cas particulier où ρ𝜌\rho est injectif d’image discrète et cocompacte, toute application ρ𝜌\rho-équivariante affine par morceaux f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow X^{\prime} induit une application affine par morceaux du graphe fini Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X vers le graphe fini ρ(Γ0)\X\𝜌subscriptΓ0superscript𝑋\rho(\Gamma_{0})\backslash X^{\prime} ; le point (2) de la proposition 4.1 est alors une conséquence immédiate du théorème d’Ascoli.

Le cas général est plus compliqué : un argument supplémentaire est nécessaire pour montrer que l’on peut se ramener à des applications à valeurs dans un compact de Xsuperscript𝑋X^{\prime} et appliquer le théorème d’Ascoli. Nous allons distinguer plusieurs cas selon le nombre de points fixes du groupe ρ(Γ0)𝜌subscriptΓ0\rho(\Gamma_{0}) dans Xsuperscript𝑋\partial X^{\prime}. Commençons par un lemme.

Lemme 4.3.

Soient Xsuperscript𝑋X^{\prime} un arbre réel simplicial, g1,,gnIsom(X)subscript𝑔1subscript𝑔𝑛Isomsuperscript𝑋g_{1},\ldots,g_{n}\in\mathrm{Isom}(X^{\prime}) des isométries de Xsuperscript𝑋X^{\prime} sans point fixe commun dans Xsuperscript𝑋X^{\prime} et R0superscript𝑅0R^{\prime}\geq 0 un réel. Posons

𝒞={xX,d(x,gix)Ri}.𝒞formulae-sequencesuperscript𝑥superscript𝑋𝑑superscript𝑥subscript𝑔𝑖superscript𝑥superscript𝑅for-all𝑖\mathcal{C}=\big{\{}x^{\prime}\in X^{\prime},\quad d(x^{\prime},g_{i}\cdot x^{\prime})\leq R^{\prime}\quad\forall i\big{\}}.
  • Si les isométries gisubscript𝑔𝑖g_{i} n’admettent pas de point fixe commun dans Xsuperscript𝑋\partial X^{\prime}, alors 𝒞𝒞\mathcal{C} est compact.

  • Si les isométries gisubscript𝑔𝑖g_{i} admettent exactement un point fixe commun ξsuperscript𝜉\xi^{\prime} dans Xsuperscript𝑋\partial X^{\prime}, il existe une demi-droite géodésique D𝐷D de Xsuperscript𝑋X^{\prime} d’extrémité ξsuperscript𝜉\xi^{\prime} telle que d(x,D)R/2𝑑superscript𝑥𝐷superscript𝑅2d(x^{\prime},D)\leq R^{\prime}/2 pour tout x𝒞superscript𝑥𝒞x^{\prime}\in\mathcal{C}.

  • Si les isométries gisubscript𝑔𝑖g_{i} admettent deux points fixes communs ξ1subscriptsuperscript𝜉1\xi^{\prime}_{1} et ξ2subscriptsuperscript𝜉2\xi^{\prime}_{2} dans Xsuperscript𝑋\partial X^{\prime}, on a d(x,D)R/2𝑑superscript𝑥𝐷superscript𝑅2d(x^{\prime},D)\leq R^{\prime}/2 pour tout x𝒞superscript𝑥𝒞x^{\prime}\in\mathcal{C}, où D𝐷D désigne la droite géodésique de Xsuperscript𝑋X^{\prime} d’extrémités ξ1subscriptsuperscript𝜉1\xi^{\prime}_{1} et ξ2subscriptsuperscript𝜉2\xi^{\prime}_{2}.

Démonstration. Pour tout i𝑖i, si gisubscript𝑔𝑖g_{i} est hyperbolique, notons Xisubscriptsuperscript𝑋𝑖X^{\prime}_{i} l’axe de translation de gisubscript𝑔𝑖g_{i} dans Xsuperscript𝑋X^{\prime}. Si gisubscript𝑔𝑖g_{i} est elliptique, notons Xisubscriptsuperscript𝑋𝑖X^{\prime}_{i} l’ensemble des points fixes de gisubscript𝑔𝑖g_{i} dans Xsuperscript𝑋X^{\prime} ; c’est un sous-arbre de Xsuperscript𝑋X^{\prime} et les points fixes de gisubscript𝑔𝑖g_{i} dans Xsuperscript𝑋\partial X^{\prime} sont exactement les extrémités à l’infini des demi-droites géodésiques incluses dans Xisubscriptsuperscript𝑋𝑖X^{\prime}_{i}. D’après (2.4) et (2.5), on a d(x,Xi)R/2𝑑superscript𝑥subscriptsuperscript𝑋𝑖superscript𝑅2d(x^{\prime},X^{\prime}_{i})\leq R^{\prime}/2 pour tout x𝒞superscript𝑥𝒞x^{\prime}\in\mathcal{C} et tout 1in1𝑖𝑛1\leq i\leq n.

Supposons que les gisubscript𝑔𝑖g_{i} n’admettent pas de point fixe commun dans Xsuperscript𝑋\partial X^{\prime} et qu’ils soient tous elliptiques. Alors l’intersection des Xisubscriptsuperscript𝑋𝑖X^{\prime}_{i} est vide car les gisubscript𝑔𝑖g_{i} n’admettent pas de point fixe commun dans Xsuperscript𝑋X^{\prime} par hypothèse. Comme Xsuperscript𝑋X^{\prime} est un arbre, il existe deux entiers i1subscript𝑖1i_{1} et i2subscript𝑖2i_{2} tels que Xi1Xi2=subscriptsuperscript𝑋subscript𝑖1subscriptsuperscript𝑋subscript𝑖2X^{\prime}_{i_{1}}\cap X^{\prime}_{i_{2}}=\emptyset. Pour tout x𝒞superscript𝑥𝒞x^{\prime}\in\mathcal{C}, nous avons vu que d(x,Xi)R/2𝑑superscript𝑥subscriptsuperscript𝑋𝑖superscript𝑅2d(x^{\prime},X^{\prime}_{i})\leq R^{\prime}/2 pour tout i𝑖i. On en déduit facilement que d(x,x′′)R/2𝑑superscript𝑥superscript𝑥′′superscript𝑅2d(x^{\prime},x^{\prime\prime})\leq R^{\prime}/2 pour tout x𝒞superscript𝑥𝒞x^{\prime}\in\mathcal{C}, où x′′superscript𝑥′′x^{\prime\prime} désigne le projeté de Xi1subscriptsuperscript𝑋subscript𝑖1X^{\prime}_{i_{1}} sur Xi2subscriptsuperscript𝑋subscript𝑖2X^{\prime}_{i_{2}}. Ainsi, le fermé 𝒞𝒞\mathcal{C} est borné, donc compact.

Supposons que les gisubscript𝑔𝑖g_{i} n’admettent pas de point fixe commun dans Xsuperscript𝑋\partial X^{\prime} et qu’il existe un entier 1i0n1subscript𝑖0𝑛1\leq i_{0}\leq n tel que gi0subscript𝑔subscript𝑖0g_{i_{0}} soit hyperbolique. Alors l’intersection des Xisubscriptsuperscript𝑋𝑖X^{\prime}_{i} est un sous-ensemble convexe fermé de la droite géodésique Xi0subscriptsuperscript𝑋subscript𝑖0X^{\prime}_{i_{0}}. Il ne contient pas de demi-droite géodésique par hypothèse, donc c’est un segment géodésique I𝐼I, défini comme l’intersection de deux sous-demi-droites géodésiques D1subscript𝐷1D_{1} et D2subscript𝐷2D_{2} de Xi0subscriptsuperscript𝑋subscript𝑖0X^{\prime}_{i_{0}}. Comme Xsuperscript𝑋X^{\prime} est un arbre, il existe deux entiers i1subscript𝑖1i_{1} et i2subscript𝑖2i_{2} tels que Xi1Xi0D1subscriptsuperscript𝑋subscript𝑖1subscriptsuperscript𝑋subscript𝑖0subscript𝐷1X^{\prime}_{i_{1}}\cap X^{\prime}_{i_{0}}\subset D_{1} et Xi2Xi0D2subscriptsuperscript𝑋subscript𝑖2subscriptsuperscript𝑋subscript𝑖0subscript𝐷2X^{\prime}_{i_{2}}\cap X^{\prime}_{i_{0}}\subset D_{2}. Pour tout x𝒞superscript𝑥𝒞x^{\prime}\in\nolinebreak\mathcal{C}, nous avons vu que d(x,Xi)R/2𝑑superscript𝑥subscriptsuperscript𝑋𝑖superscript𝑅2d(x^{\prime},X^{\prime}_{i})\leq R^{\prime}/2 pour tout i𝑖i. Si l’on avait d(x,D1)>R/2𝑑superscript𝑥subscript𝐷1superscript𝑅2d(x^{\prime},D_{1})>\nolinebreak R^{\prime}/2, alors le projeté de xsuperscript𝑥x^{\prime} sur Xi1subscriptsuperscript𝑋subscript𝑖1X^{\prime}_{i_{1}} serait l’extrémité dans Xsuperscript𝑋X^{\prime} de la demi-droite D1subscript𝐷1D_{1} et l’on aurait d(x,Xi1)=d(x,D1)>R/2𝑑superscript𝑥subscriptsuperscript𝑋subscript𝑖1𝑑superscript𝑥subscript𝐷1superscript𝑅2d(x^{\prime},X^{\prime}_{i_{1}})=d(x^{\prime},D_{1})>R^{\prime}/2, d’où une contradiction. Par conséquent, on a d(x,D1)R/2𝑑superscript𝑥subscript𝐷1superscript𝑅2d(x^{\prime},D_{1})\leq\nolinebreak R^{\prime}/2 pour tout x𝒞superscript𝑥𝒞x^{\prime}\in\mathcal{C}, et de même d(x,D2)R/2𝑑superscript𝑥subscript𝐷2superscript𝑅2d(x^{\prime},D_{2})\leq R^{\prime}/2 pour tout x𝒞superscript𝑥𝒞x^{\prime}\in\mathcal{C}. Comme Xsuperscript𝑋X^{\prime} est un arbre, on en déduit d(x,I)R/2𝑑superscript𝑥𝐼superscript𝑅2d(x^{\prime},I)\leq R^{\prime}/2 pour tout x𝒞superscript𝑥𝒞x^{\prime}\in\mathcal{C}. Ainsi, le fermé 𝒞𝒞\mathcal{C} est borné, donc compact.

Supposons que les gisubscript𝑔𝑖g_{i} admettent exactement un point fixe commun ξsuperscript𝜉\xi^{\prime} dans Xsuperscript𝑋\partial X^{\prime}. Si tous les gisubscript𝑔𝑖g_{i} étaient elliptiques, il existerait une demi-droite géodésique d’extrémité ξsuperscript𝜉\xi^{\prime} fixée (point par point) par tous les gisubscript𝑔𝑖g_{i}, ce qui contredirait le fait que les gisubscript𝑔𝑖g_{i} n’ont pas de point fixe commun dans Xsuperscript𝑋X^{\prime}. Par conséquent, il existe un entier 1i0n1subscript𝑖0𝑛1\leq i_{0}\leq n tel que gi0subscript𝑔subscript𝑖0g_{i_{0}} soit hyperbolique. L’intersection des Xisubscriptsuperscript𝑋𝑖X^{\prime}_{i} est un sous-ensemble convexe de la droite géodésique Xi0subscriptsuperscript𝑋subscript𝑖0X^{\prime}_{i_{0}} ; comme les gisubscript𝑔𝑖g_{i} admettent ξsuperscript𝜉\xi^{\prime} comme unique point fixe commun dans Xsuperscript𝑋\partial X^{\prime}, cette intersection est une sous-demi-droite géodésique D𝐷D de Xi0subscriptsuperscript𝑋subscript𝑖0X^{\prime}_{i_{0}} d’extrémité ξsuperscript𝜉\xi^{\prime}. Considérons un entier 1in1𝑖𝑛1\leq i\leq n tel que XiXi0=Dsubscriptsuperscript𝑋𝑖subscriptsuperscript𝑋subscript𝑖0𝐷X^{\prime}_{i}\cap X^{\prime}_{i_{0}}=D. Pour tout x𝒞superscript𝑥𝒞x^{\prime}\in\mathcal{C}, nous avons vu que d(x,Xi0)R/2𝑑superscript𝑥subscriptsuperscript𝑋subscript𝑖0superscript𝑅2d(x^{\prime},X^{\prime}_{i_{0}})\leq R^{\prime}/2. Si l’on avait d(x,D)>R/2𝑑superscript𝑥𝐷superscript𝑅2d(x^{\prime},D)>R^{\prime}/2, alors le projeté de xsuperscript𝑥x^{\prime} sur Xisubscriptsuperscript𝑋𝑖X^{\prime}_{i} serait l’extrémité dans Xsuperscript𝑋X^{\prime} de la demi-droite D𝐷D et l’on aurait d(x,Xi)=d(x,D)>R/2𝑑superscript𝑥subscriptsuperscript𝑋𝑖𝑑superscript𝑥𝐷superscript𝑅2d(x^{\prime},X^{\prime}_{i})=d(x^{\prime},D)>R^{\prime}/2, d’où une contradiction. Ainsi, on a d(x,D)R/2𝑑superscript𝑥𝐷superscript𝑅2d(x^{\prime},D)\leq R^{\prime}/2 pour tout x𝒞superscript𝑥𝒞x^{\prime}\in\mathcal{C}.

Supposons que les gisubscript𝑔𝑖g_{i} admettent deux points fixes communs ξ1subscriptsuperscript𝜉1\xi^{\prime}_{1} et ξ2subscriptsuperscript𝜉2\xi^{\prime}_{2} dans Xsuperscript𝑋\partial X^{\prime}. Par le même argument que ci-dessus, il existe un entier 1i0n1subscript𝑖0𝑛1\leq i_{0}\leq n tel que gi0subscript𝑔subscript𝑖0g_{i_{0}} soit hyperbolique. L’axe de translation Xi0subscriptsuperscript𝑋subscript𝑖0X^{\prime}_{i_{0}} de gi0subscript𝑔subscript𝑖0g_{i_{0}} est la droite D𝐷D d’extrémités ξ1subscriptsuperscript𝜉1\xi^{\prime}_{1} et ξ2subscriptsuperscript𝜉2\xi^{\prime}_{2}. D’après ce qui précède, on a d(x,D)R/2𝑑superscript𝑥𝐷superscript𝑅2d(x^{\prime},D)\leq R^{\prime}/2 pour tout x𝒞superscript𝑥𝒞x^{\prime}\in\mathcal{C}. ∎

Nous sommes maintenant en mesure de démontrer le point (2) de la proposition 4.1.

Démonstration du point (2) de la proposition 4.1. Si le groupe ρ(Γ0)𝜌subscriptΓ0\rho(\Gamma_{0}) admet un point fixe xsuperscript𝑥x^{\prime} dans Xsuperscript𝑋X^{\prime}, alors l’application constante f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow X^{\prime} d’image {x}superscript𝑥\{x^{\prime}\} est ρ𝜌\rho-équivariante, affine par morceaux, de constante de Lipschitz nulle donc minimale. Dans tout le reste de la démonstration, nous supposerons donc ρ(Γ0)𝜌subscriptΓ0\rho(\Gamma_{0}) sans point fixe dans Xsuperscript𝑋X^{\prime}. Soit 𝒟𝒟\mathcal{D} un domaine fondamental connexe pour l’action de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} sur X𝑋X. L’ensemble

={γΓ0{1},γ𝒟𝒟}formulae-sequence𝛾subscriptΓ01𝛾𝒟𝒟\mathcal{F}=\big{\{}\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\},\quad\gamma\cdot\mathcal{D}\cap\mathcal{D}\neq\emptyset\big{\}}

est un système générateur fini de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0}. Comme X𝑋X est un arbre, pour tout γ𝛾\gamma\in\mathcal{F} il existe un unique couple (xγ,yγ)subscript𝑥𝛾subscript𝑦𝛾(x_{\gamma},y_{\gamma}) de points de 𝒟𝒟\mathcal{D} tels que γxγ=yγ𝛾subscript𝑥𝛾subscript𝑦𝛾\gamma\cdot x_{\gamma}=y_{\gamma}. La restriction de X𝑋X à 𝒟𝒟\mathcal{D} induit une bijection entre l’ensemble 𝒮𝒮\mathcal{S} des applications ρ𝜌\rho-équivariantes et affines par morceaux f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow X^{\prime} et l’ensemble 𝒮𝒟subscript𝒮𝒟\mathcal{S}_{\mathcal{D}} des applications affines par morceaux f:𝒟X:superscript𝑓𝒟superscript𝑋f^{\prime}:\mathcal{D}\rightarrow X^{\prime} telles que f(yγ)=ρ(γ)f(xγ)superscript𝑓subscript𝑦𝛾𝜌𝛾superscript𝑓subscript𝑥𝛾f^{\prime}(y_{\gamma})=\rho(\gamma)\cdot f^{\prime}(x_{\gamma}) pour tout γ𝛾\gamma\in\mathcal{F}. Cette bijection préserve les constantes de Lipschitz. Fixons un réel C>Csuperscript𝐶𝐶C^{\prime}>C et notons 𝒮𝒟,Csubscript𝒮𝒟superscript𝐶\mathcal{S}_{\mathcal{D},C^{\prime}} l’ensemble des éléments de 𝒮𝒟subscript𝒮𝒟\mathcal{S}_{\mathcal{D}} de constante de Lipschitz Cabsentsuperscript𝐶\leq C^{\prime} ; il est fermé et uniformément équicontinu dans l’ensemble des applications continues de 𝒟𝒟\mathcal{D} dans Xsuperscript𝑋X^{\prime}, muni de la topologie de la convergence uniforme. Pour pouvoir appliquer le théorème d’Ascoli, nous allons nous ramener à un sous-ensemble de 𝒮𝒟,Csubscript𝒮𝒟superscript𝐶\mathcal{S}_{\mathcal{D},C^{\prime}} à valeurs dans un compact de Xsuperscript𝑋X^{\prime}, en distinguant plusieurs cas selon le nombre de points fixes de ρ(Γ0)𝜌subscriptΓ0\rho(\Gamma_{0}) dans Xsuperscript𝑋\partial X^{\prime}. Commençons par remarquer que si l’on pose

R=max{d(x,γx),x𝒟,γ}>0,𝑅𝑑𝑥𝛾𝑥𝑥𝒟𝛾0R\ =\ \max\big{\{}d(x,\gamma\cdot x),\quad x\in\mathcal{D},\ \gamma\in\mathcal{F}\big{\}}>0,

alors pour tout f𝒮𝒟,Csuperscript𝑓subscript𝒮𝒟superscript𝐶f^{\prime}\in\mathcal{S}_{\mathcal{D},C^{\prime}} et tout x𝒟𝑥𝒟x\in\mathcal{D} on a d(f(x),ρ(γ)f(x))CR𝑑superscript𝑓𝑥𝜌𝛾superscript𝑓𝑥superscript𝐶𝑅d(f^{\prime}(x),\rho(\gamma)\cdot f^{\prime}(x))\leq C^{\prime}R pour tout γ𝛾\gamma\in\mathcal{F}.

Si ρ(Γ0)𝜌subscriptΓ0\rho(\Gamma_{0}) n’a pas de point fixe dans Xsuperscript𝑋\partial X^{\prime}, alors 𝒟superscript𝒟\mathcal{D}^{\prime} est compact d’après le lemme 4.3. On peut donc appliquer directement le théorème d’Ascoli, qui affirme que l’ensemble 𝒮𝒟,Csubscript𝒮𝒟superscript𝐶\mathcal{S}_{\mathcal{D},C^{\prime}} est compact pour la topologie de la convergence uniforme. On en déduit l’existence d’un élément f𝒮𝒟,Csuperscript𝑓subscript𝒮𝒟superscript𝐶f^{\prime}\in\mathcal{S}_{\mathcal{D},C^{\prime}}, et donc d’un élément f𝒮𝑓𝒮f\in\mathcal{S}, de constante de Lipschitz C𝐶C minimale.

Supposons que ρ(Γ0)𝜌subscriptΓ0\rho(\Gamma_{0}) admette un unique point fixe ξXsuperscript𝜉superscript𝑋\xi^{\prime}\in\partial X^{\prime}. D’après le lemme 4.3, il existe une demi-droite géodésique D𝐷D de Xsuperscript𝑋X^{\prime} d’extrémité ξsuperscript𝜉\xi^{\prime} telle que d(f(x),D)CR/2𝑑superscript𝑓𝑥𝐷superscript𝐶𝑅2d(f^{\prime}(x),D)\leq C^{\prime}R/2 pour tout f𝒮𝒟,Csuperscript𝑓subscript𝒮𝒟superscript𝐶f^{\prime}\in\mathcal{S}_{\mathcal{D},C^{\prime}} et tout x𝒟𝑥𝒟x\in\mathcal{D}. Fixons une isométrie hyperbolique gIsom(X)𝑔Isomsuperscript𝑋g\in\mathrm{Isom}(X^{\prime}) dont l’axe de translation contient D𝐷D et dont ξsuperscript𝜉\xi^{\prime} est le point fixe répulsif dans Xsuperscript𝑋\partial X^{\prime}. Soit (fn)nsubscriptsubscriptsuperscript𝑓𝑛𝑛(f^{\prime}_{n})_{n\in\mathbb{N}} une suite d’éléments de 𝒮𝒟,Csubscript𝒮𝒟superscript𝐶\mathcal{S}_{\mathcal{D},C^{\prime}} dont la constante de Lipschitz tend vers C𝐶C. Si l’on note x0subscriptsuperscript𝑥0x^{\prime}_{0} l’extrémité de D𝐷D dans Xsuperscript𝑋X^{\prime}, alors pour tout n𝑛n\in\mathbb{N} il existe un entier mnsubscript𝑚𝑛m_{n}\in\mathbb{N} tel que gmnfn(𝒟)superscript𝑔subscript𝑚𝑛subscriptsuperscript𝑓𝑛𝒟g^{m_{n}}\cdot f^{\prime}_{n}(\mathcal{D}) soit inclus dans le compact

𝒟={xX,d(x,x0)λ(g)+CR2}.superscript𝒟formulae-sequencesuperscript𝑥superscript𝑋𝑑superscript𝑥subscriptsuperscript𝑥0𝜆𝑔superscript𝐶𝑅2\mathcal{D}^{\prime}=\Big{\{}x^{\prime}\in X^{\prime},\quad d(x^{\prime},x^{\prime}_{0})\leq\lambda(g)+\frac{C^{\prime}R}{2}\Big{\}}.

Pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0}, la suite (gmnρ(γ)gmn)nsubscriptsuperscript𝑔subscript𝑚𝑛𝜌𝛾superscript𝑔subscript𝑚𝑛𝑛(g^{m_{n}}\rho(\gamma)g^{-m_{n}})_{n\in\mathbb{N}} est bornée : en effet, comme ρ(γ)𝜌𝛾\rho(\gamma) fixe ξXsuperscript𝜉superscript𝑋\xi^{\prime}\in\partial X^{\prime} par hypothèse, il existe une demi-droite Dγsubscript𝐷𝛾D_{\gamma} incluse dans D𝐷D telle que ρ(γ)DγD𝜌𝛾subscript𝐷𝛾𝐷\rho(\gamma)\cdot D_{\gamma}\subset D ; pour tout xDγsuperscript𝑥subscript𝐷𝛾x^{\prime}\in D_{\gamma} on a gmnρ(γ)gmnx=ρ(γ)xsuperscript𝑔subscript𝑚𝑛𝜌𝛾superscript𝑔subscript𝑚𝑛superscript𝑥𝜌𝛾superscript𝑥g^{m_{n}}\rho(\gamma)g^{-m_{n}}\cdot x^{\prime}=\rho(\gamma)\cdot x^{\prime} pour tout n𝑛n\in\mathbb{N}, donc (gmnρ(γ)gmn)nsubscriptsuperscript𝑔subscript𝑚𝑛𝜌𝛾superscript𝑔subscript𝑚𝑛𝑛(g^{m_{n}}\rho(\gamma)g^{-m_{n}})_{n\in\mathbb{N}} est bornée par définition de la topologie sur Isom(X)Isomsuperscript𝑋\mathrm{Isom}(X^{\prime}) (cf. paragraphe 2.2). Quitte à extraire une sous-suite, on peut donc supposer que pour tout γ𝛾\gamma\in\mathcal{F} la suite (gmnρ(γ)gmn)nsubscriptsuperscript𝑔subscript𝑚𝑛𝜌𝛾superscript𝑔subscript𝑚𝑛𝑛(g^{m_{n}}\rho(\gamma)g^{-m_{n}})_{n\in\mathbb{N}} converge. En particulier, il existe un entier N𝑁N\in\mathbb{N} tel que pour tout nN𝑛𝑁n\geq N et tout γ𝛾\gamma\in\mathcal{F}, les isométries gmnρ(γ)gmnsuperscript𝑔subscript𝑚𝑛𝜌𝛾superscript𝑔subscript𝑚𝑛g^{m_{n}}\rho(\gamma)g^{-m_{n}} et gmNρ(γ)gmNsuperscript𝑔subscript𝑚𝑁𝜌𝛾superscript𝑔subscript𝑚𝑁g^{m_{N}}\rho(\gamma)g^{-m_{N}} coïncident sur le compact 𝒟superscript𝒟\mathcal{D}^{\prime}. Par conséquent, pour tout nN𝑛𝑁n\geq N et tout γ𝛾\gamma\in\mathcal{F} on a

(gmnmNfn)(yγ)superscript𝑔subscript𝑚𝑛subscript𝑚𝑁subscriptsuperscript𝑓𝑛subscript𝑦𝛾\displaystyle\big{(}g^{m_{n}-m_{N}}\cdot f^{\prime}_{n}\big{)}(y_{\gamma}) =\displaystyle= gmnmNρ(γ)fn(xγ)superscript𝑔subscript𝑚𝑛subscript𝑚𝑁𝜌𝛾subscriptsuperscript𝑓𝑛subscript𝑥𝛾\displaystyle g^{m_{n}-m_{N}}\rho(\gamma)\cdot f^{\prime}_{n}(x_{\gamma})
=\displaystyle= gmN(gmnρ(γ)gmn)(gmnfn(xγ))superscript𝑔subscript𝑚𝑁superscript𝑔subscript𝑚𝑛𝜌𝛾superscript𝑔subscript𝑚𝑛superscript𝑔subscript𝑚𝑛subscriptsuperscript𝑓𝑛subscript𝑥𝛾\displaystyle g^{-m_{N}}\big{(}g^{m_{n}}\rho(\gamma)g^{-m_{n}}\big{)}\cdot\big{(}g^{m_{n}}\cdot f^{\prime}_{n}(x_{\gamma})\big{)}
=\displaystyle= gmN(gmNρ(γ)gmN)(gmnfn(xγ))superscript𝑔subscript𝑚𝑁superscript𝑔subscript𝑚𝑁𝜌𝛾superscript𝑔subscript𝑚𝑁superscript𝑔subscript𝑚𝑛subscriptsuperscript𝑓𝑛subscript𝑥𝛾\displaystyle g^{-m_{N}}\big{(}g^{m_{N}}\rho(\gamma)g^{-m_{N}}\big{)}\cdot\big{(}g^{m_{n}}\cdot f^{\prime}_{n}(x_{\gamma})\big{)}
=\displaystyle= ρ(γ)(gmnmNfn)(xγ).𝜌𝛾superscript𝑔subscript𝑚𝑛subscript𝑚𝑁subscriptsuperscript𝑓𝑛subscript𝑥𝛾\displaystyle\rho(\gamma)\cdot\big{(}g^{m_{n}-m_{N}}\cdot f^{\prime}_{n}\big{)}(x_{\gamma}).

Comme de plus g𝑔g est une isométrie de Xsuperscript𝑋X^{\prime}, l’application gmnmNfnsuperscript𝑔subscript𝑚𝑛subscript𝑚𝑁subscriptsuperscript𝑓𝑛g^{m_{n}-m_{N}}\cdot f^{\prime}_{n} a même constante de Lipschitz que fnsubscriptsuperscript𝑓𝑛f^{\prime}_{n} ; elle appartient donc à 𝒮𝒟,Csubscript𝒮𝒟superscript𝐶\mathcal{S}_{\mathcal{D},C^{\prime}} pour tout nN𝑛𝑁n\geq N. L’image de gmnmNfnsuperscript𝑔subscript𝑚𝑛subscript𝑚𝑁subscriptsuperscript𝑓𝑛g^{m_{n}-m_{N}}\cdot f^{\prime}_{n} étant incluse dans le compact gmN𝒟superscript𝑔subscript𝑚𝑁superscript𝒟g^{-m_{N}}\cdot\mathcal{D}^{\prime}, on peut appliquer le théorème d’Ascoli, qui affirme que la suite (gmnmNfn)nsubscriptsuperscript𝑔subscript𝑚𝑛subscript𝑚𝑁subscriptsuperscript𝑓𝑛𝑛(g^{m_{n}-m_{N}}\cdot f^{\prime}_{n})_{n\in\mathbb{N}} est d’adhérence compacte dans le fermé 𝒮𝒟,Csubscript𝒮𝒟superscript𝐶\mathcal{S}_{\mathcal{D},C^{\prime}} pour la topologie de la convergence uniforme. En particulier, cette suite admet une sous-suite qui converge vers un certain f𝒮𝒟,Csuperscript𝑓subscript𝒮𝒟superscript𝐶f^{\prime}\in\mathcal{S}_{\mathcal{D},C^{\prime}}. Comme la constante de Lipschitz de fnsubscriptsuperscript𝑓𝑛f^{\prime}_{n} tend vers C𝐶C, celle de gmnmNfnsuperscript𝑔subscript𝑚𝑛subscript𝑚𝑁subscriptsuperscript𝑓𝑛g^{m_{n}-m_{N}}\cdot f^{\prime}_{n} aussi, et fsuperscript𝑓f^{\prime} est de constante de Lipschitz C𝐶C minimale.

Le cas où ρ(Γ0)𝜌subscriptΓ0\rho(\Gamma_{0}) admet deux points fixes ξ1subscriptsuperscript𝜉1\xi^{\prime}_{1} et ξ2subscriptsuperscript𝜉2\xi^{\prime}_{2} dans Xsuperscript𝑋\partial X^{\prime} se traite de manière analogue. Plus précisément, soit D𝐷D la droite géodésique de Xsuperscript𝑋X^{\prime} d’extrémités ξ1subscriptsuperscript𝜉1\xi^{\prime}_{1} et ξ2subscriptsuperscript𝜉2\xi^{\prime}_{2}. D’après le lemme 4.3, on a d(f(x),D)CR/2𝑑superscript𝑓𝑥𝐷superscript𝐶𝑅2d(f^{\prime}(x),D)\leq C^{\prime}R/2 pour tout f𝒮𝒟,Csuperscript𝑓subscript𝒮𝒟superscript𝐶f^{\prime}\in\mathcal{S}_{\mathcal{D},C^{\prime}} et tout x𝒟𝑥𝒟x\in\mathcal{D}. Fixons une isométrie hyperbolique gIsom(X)𝑔Isomsuperscript𝑋g\in\mathrm{Isom}(X^{\prime}) d’axe de translation D𝐷D. Soit (fn)nsubscriptsubscriptsuperscript𝑓𝑛𝑛(f^{\prime}_{n})_{n\in\mathbb{N}} une suite d’éléments de 𝒮𝒟,Csubscript𝒮𝒟superscript𝐶\mathcal{S}_{\mathcal{D},C^{\prime}} dont la constante de Lipschitz tend vers C𝐶C. Si x0subscriptsuperscript𝑥0x^{\prime}_{0} désigne un point quelconque fixé de D𝐷D, alors pour tout n𝑛n\in\mathbb{N} il existe un entier mnsubscript𝑚𝑛m_{n}\in\mathbb{Z} tel que gmnfn(𝒟)superscript𝑔subscript𝑚𝑛subscriptsuperscript𝑓𝑛𝒟g^{m_{n}}\cdot f^{\prime}_{n}(\mathcal{D}) soit inclus dans le compact

𝒟={xX,d(x,x0)λ(g)+CR2}.superscript𝒟formulae-sequencesuperscript𝑥superscript𝑋𝑑superscript𝑥subscriptsuperscript𝑥0𝜆𝑔superscript𝐶𝑅2\mathcal{D}^{\prime}=\Big{\{}x^{\prime}\in X^{\prime},\quad d(x^{\prime},x^{\prime}_{0})\leq\lambda(g)+\frac{C^{\prime}R}{2}\Big{\}}.

Pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0}, la suite (gmnρ(γ)gmn)nsubscriptsuperscript𝑔subscript𝑚𝑛𝜌𝛾superscript𝑔subscript𝑚𝑛𝑛(g^{m_{n}}\rho(\gamma)g^{-m_{n}})_{n\in\mathbb{N}} est bornée : en effet, la droite D𝐷D est (globalement) stable par ρ(γ)𝜌𝛾\rho(\gamma) car ρ(γ)𝜌𝛾\rho(\gamma) fixe ses extrémités ξ1,ξ2Xsubscriptsuperscript𝜉1subscriptsuperscript𝜉2superscript𝑋\xi^{\prime}_{1},\xi^{\prime}_{2}\in\partial X^{\prime} par hypothèse ; pour tout xDsuperscript𝑥𝐷x^{\prime}\in D on a gmnρ(γ)gmnx=ρ(γ)xsuperscript𝑔subscript𝑚𝑛𝜌𝛾superscript𝑔subscript𝑚𝑛superscript𝑥𝜌𝛾superscript𝑥g^{m_{n}}\rho(\gamma)g^{-m_{n}}\cdot x^{\prime}=\rho(\gamma)\cdot x^{\prime} pour tout n𝑛n\in\mathbb{N}, donc (gmnρ(γ)gmn)nsubscriptsuperscript𝑔subscript𝑚𝑛𝜌𝛾superscript𝑔subscript𝑚𝑛𝑛(g^{m_{n}}\rho(\gamma)g^{-m_{n}})_{n\in\mathbb{N}} est bornée par définition de la topologie sur Isom(X)Isomsuperscript𝑋\mathrm{Isom}(X^{\prime}) (cf. paragraphe 2.2). On conclut comme dans le cas où ρ(Γ0)𝜌subscriptΓ0\rho(\Gamma_{0}) n’admet qu’un seul point fixe dans Xsuperscript𝑋\partial X^{\prime}. ∎


Notons que C0𝐶0C\geq 0 est la constante de Lipschitz minimale de toutes les applications lipschitziennes et ρ𝜌\rho-équivariantes de X𝑋X dans Xsuperscript𝑋X^{\prime} (non nécessairement affines par morceaux). En effet, si f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow X^{\prime} est ρ𝜌\rho-équivariante et C𝐶C-lipschitzienne, alors l’application affine par morceaux fa:XX:subscript𝑓𝑎𝑋superscript𝑋f_{a}:X\rightarrow X^{\prime} telle que fa(s)=f(s)subscript𝑓𝑎𝑠𝑓𝑠f_{a}(s)=f(s) pour tout sommet s𝑠s de X𝑋X (donnée par la remarque 4.2) est encore ρ𝜌\rho-équivariante et C𝐶C-lipschitzienne.

4.3. Arêtes f𝑓f-maximales

Fixons désormais deux arbres réels simpliciaux X𝑋X et Xsuperscript𝑋X^{\prime} de valence 2absent2\geq 2, un sous-groupe discret sans torsion Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} de Isom(X)Isom𝑋\mathrm{Isom}(X) tel que le graphe Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X soit fini et un morphisme de groupes ρ:Γ0G:𝜌subscriptΓ0𝐺\rho:\Gamma_{0}\rightarrow G. Soit C0𝐶0C\geq 0 la constante de Lipschitz minimale donnée par le point (2) de la proposition 4.1. Fixons une application ρ𝜌\rho-équivariante, affine par morceaux et C𝐶C-lipschitzienne f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow X^{\prime}.

Nous dirons qu’une arête e𝑒e de X𝑋X est f𝑓f-maximale si la restriction de f𝑓f à e𝑒e est affine de constante C𝐶C. Comme f𝑓f est ρ𝜌\rho-équivariante et comme Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} et ρ(Γ0)𝜌subscriptΓ0\rho(\Gamma_{0}) sont des groupes d’isométries, une arête e𝑒e de X𝑋X est f𝑓f-maximale si et seulement l’arête γe𝛾𝑒\gamma\cdot\nolinebreak e est f𝑓f-maximale pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0}. En particulier, la notion d’arête maximale passe au quotient Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X.

Pour toutes arêtes e1subscript𝑒1e_{1} et e2subscript𝑒2e_{2} de X𝑋X incidentes en un sommet s𝑠s, notons e1fe2subscriptsimilar-to𝑓subscript𝑒1subscript𝑒2e_{1}\sim_{f}e_{2} si f(e1)f(e2)𝑓subscript𝑒1𝑓subscript𝑒2f(e_{1})\cap f(e_{2}) est d’intérieur non vide dans Xsuperscript𝑋X^{\prime}. Ceci définit une relation d’équivalence fsubscriptsimilar-to𝑓\sim_{f} sur l’ensemble des arêtes de X𝑋X d’extrémité s𝑠s. Comme précédemment, cette relation induit une relation d’équivalence fsubscriptsimilar-to𝑓\sim_{f} sur l’ensemble des arêtes de Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X incidentes en s¯¯𝑠\overline{s}, où s¯¯𝑠\overline{s} désigne l’image de s𝑠s dans Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X.

Pour démontrer le point (3) de la proposition 4.1, nous aimerions prouver l’existence d’un lacet de Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X passant au plus deux fois par chaque sommet de Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X et tel que la restriction de f𝑓f aux relevés dans X𝑋X de ce lacet soit affine de constante C𝐶C. Cette dernière condition se traduit par le fait que le lacet est entièrement formé d’arêtes f𝑓f-maximales et que deux arêtes successives appartiennent toujours à des classes d’équivalence différentes pour la relation fsubscriptsimilar-to𝑓\sim_{f}. L’existence d’un tel lacet est assurée si f𝑓f vérifie une certaine condition de minimalité : il suffit que l’ensemble des arêtes f𝑓f-maximales de X𝑋X soit minimal. Avant de démontrer cette existence (lemme 4.5), commençons par établir qu’une condition nécessaire est vérifiée.

Lemme 4.4.

Supposons l’ensemble des arêtes f𝑓f-maximales de X𝑋X minimal. En tout sommet de X𝑋X qui est extrémité d’une arête f𝑓f-maximale, il existe au moins deux classes d’équivalence d’arêtes f𝑓f-maximales pour la relation fsubscriptsimilar-to𝑓\sim_{f}.

Démonstration. Soit s0subscript𝑠0s_{0} un sommet de X𝑋X. Supposons par l’absurde que toutes les arêtes f𝑓f-maximales d’extrémité s0subscript𝑠0s_{0} appartiennent à la même classe d’équivalence pour la relation fsubscriptsimilar-to𝑓\sim_{f} : cela signifie qu’il existe un segment géodésique I𝐼I d’intérieur non vide dans Xsuperscript𝑋X^{\prime}, d’extrémité f(s0)𝑓subscript𝑠0f(s_{0}), qui est contenu dans l’image f(e)𝑓𝑒f(e) de toute arête f𝑓f-maximale e𝑒e d’extrémité s0subscript𝑠0s_{0}. D’après la remarque 4.2, pour tout xIsuperscript𝑥𝐼x^{\prime}\in I il existe une unique application affine par morceaux fx:XX:subscript𝑓superscript𝑥𝑋superscript𝑋f_{x^{\prime}}:X\rightarrow X^{\prime} telle que fx(γs0)=ρ(γ)xsubscript𝑓superscript𝑥𝛾subscript𝑠0𝜌𝛾superscript𝑥f_{x^{\prime}}(\gamma\cdot s_{0})=\rho(\gamma)\cdot x^{\prime} pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} et fx(s)=f(s)subscript𝑓superscript𝑥𝑠𝑓𝑠f_{x^{\prime}}(s)=f(s) pour tout sommet sΓ0s0𝑠subscriptΓ0subscript𝑠0s\notin\Gamma_{0}\cdot s_{0} ; elle est ρ𝜌\rho-équivariante. Montrons que pour xI{f(s0)}superscript𝑥𝐼𝑓subscript𝑠0x^{\prime}\in I\smallsetminus\{f(s_{0})\} suffisamment proche de f(s0)𝑓subscript𝑠0f(s_{0}), l’application fxsubscript𝑓superscript𝑥f_{x^{\prime}} est C𝐶C-lipschitzienne et l’ensemble des arêtes fxsubscript𝑓superscript𝑥f_{x^{\prime}}-maximales est strictement inclus dans l’ensemble des arêtes f𝑓f-maximales, ce qui contredira la minimalité de C𝐶C et de l’ensemble des arêtes f𝑓f-maximales.

Si e𝑒e est une arête de X𝑋X dont les extrémités n’appartiennent pas à l’orbite Γ0s0subscriptΓ0subscript𝑠0\Gamma_{0}\cdot s_{0}, alors la restriction de fxsubscript𝑓superscript𝑥f_{x^{\prime}} à e𝑒e est égale à la restriction de f𝑓f à e𝑒e. En particulier, e𝑒e est fxsubscript𝑓superscript𝑥f_{x^{\prime}}-maximale si et seulement si elle est f𝑓f-maximale.

Soit e𝑒e une arête de X𝑋X d’extrémités s0subscript𝑠0s_{0} et sΓ0s0𝑠subscriptΓ0subscript𝑠0s\notin\Gamma_{0}\cdot s_{0}. La restriction de f𝑓f (resp. de fxsubscript𝑓superscript𝑥f_{x^{\prime}}) à e𝑒e est affine de constante

d(f(s0),f(s))d(s0,s)(resp.d(x,f(s))d(s0,s)).\frac{d(f(s_{0}),f(s))}{d(s_{0},s)}\quad\quad\mathrm{\Big{(}resp.}\quad\frac{d(x^{\prime},f(s))}{d(s_{0},s)}\mathrm{\Big{)}}.

Si e𝑒e n’est pas f𝑓f-maximale, alors e𝑒e n’est pas fxsubscript𝑓superscript𝑥f_{x^{\prime}}-maximale pour xsuperscript𝑥x^{\prime} suffisamment proche de f(s0)𝑓subscript𝑠0f(s_{0}), par continuité de l’application xd(x,f(s))maps-tosuperscript𝑥𝑑superscript𝑥𝑓𝑠x^{\prime}\mapsto d(x^{\prime},f(s)). Si e𝑒e est f𝑓f-maximale, alors pour xI{f(s0)}superscript𝑥𝐼𝑓subscript𝑠0x^{\prime}\in I\smallsetminus\{f(s_{0})\} on a d(x,f(s))<d(f(s0),f(s))𝑑superscript𝑥𝑓𝑠𝑑𝑓subscript𝑠0𝑓𝑠d(x^{\prime},f(s))<d(f(s_{0}),f(s)) donc e𝑒e n’est pas fxsubscript𝑓superscript𝑥f_{x^{\prime}}-maximale.

Soit e𝑒e une arête de X𝑋X d’extrémités s0subscript𝑠0s_{0} et γs0𝛾subscript𝑠0\gamma\cdot s_{0}, où γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\}. La restriction de f𝑓f (resp. de fxsubscript𝑓superscript𝑥f_{x^{\prime}}) à e𝑒e est affine de constante

d(f(s0),ρ(γ)f(s0))d(s0,γs0)(resp.d(x,ρ(γ)x)d(s0,γs0)).\frac{d(f(s_{0}),\rho(\gamma)\cdot f(s_{0}))}{d(s_{0},\gamma\cdot s_{0})}\quad\quad\mathrm{\Big{(}resp.}\quad\frac{d(x^{\prime},\rho(\gamma)\cdot x^{\prime})}{d(s_{0},\gamma\cdot s_{0})}\mathrm{\Big{)}}.

Si e𝑒e n’est pas f𝑓f-maximale, alors e𝑒e n’est pas fxsubscript𝑓superscript𝑥f_{x^{\prime}}-maximale pour xsuperscript𝑥x^{\prime} suffisamment proche de f(s0)𝑓subscript𝑠0f(s_{0}), par continuité de l’application xd(x,ρ(γ)x)maps-tosuperscript𝑥𝑑superscript𝑥𝜌𝛾superscript𝑥x^{\prime}\mapsto d(x^{\prime},\rho(\gamma)\cdot x^{\prime}). Supposons que e𝑒e est f𝑓f-maximale et montrons que e𝑒e n’est pas fxsubscript𝑓superscript𝑥f_{x^{\prime}}-maximale pour xI{f(s0)}superscript𝑥𝐼𝑓subscript𝑠0x^{\prime}\in I\smallsetminus\{f(s_{0})\}. Comme e𝑒e est f𝑓f-maximale, γ1esuperscript𝛾1𝑒\gamma^{-1}\cdot e l’est aussi, donc l’intersection

f(γ1e)f(e)=[ρ(γ)1f(s0),f(s0)][f(s0),ρ(γ)f(s0)]𝑓superscript𝛾1𝑒𝑓𝑒𝜌superscript𝛾1𝑓subscript𝑠0𝑓subscript𝑠0𝑓subscript𝑠0𝜌𝛾𝑓subscript𝑠0f(\gamma^{-1}\cdot e)\cap f(e)\ =\ [\rho(\gamma)^{-1}\cdot f(s_{0}),f(s_{0})]\cap[f(s_{0}),\rho(\gamma)\cdot f(s_{0})]

contient I𝐼I. Si ρ(γ)𝜌𝛾\rho(\gamma) est hyperbolique, alors pour xI{f(s0)}superscript𝑥𝐼𝑓subscript𝑠0x^{\prime}\in I\smallsetminus\{f(s_{0})\} on a, d’après (2.4),

d(x,ρ(γ)x)𝑑superscript𝑥𝜌𝛾superscript𝑥\displaystyle d(x^{\prime},\rho(\gamma)\cdot x^{\prime}) =\displaystyle= λ(ρ(γ))+2d(x,𝒜ρ(γ))𝜆𝜌𝛾2𝑑superscript𝑥subscript𝒜𝜌𝛾\displaystyle\lambda(\rho(\gamma))+2d(x^{\prime},\mathcal{A}_{\rho(\gamma)})
<\displaystyle< λ(ρ(γ))+2d(f(s0),𝒜ρ(γ))𝜆𝜌𝛾2𝑑𝑓subscript𝑠0subscript𝒜𝜌𝛾\displaystyle\lambda(\rho(\gamma))+2d(f(s_{0}),\mathcal{A}_{\rho(\gamma)})
=\displaystyle= d(f(s0),ρ(γ)f(s0)),𝑑𝑓subscript𝑠0𝜌𝛾𝑓subscript𝑠0\displaystyle d(f(s_{0}),\rho(\gamma)\cdot f(s_{0})),

donc e𝑒e n’est pas fxsubscript𝑓superscript𝑥f_{x^{\prime}}-maximale. Si ρ(γ)𝜌𝛾\rho(\gamma) est elliptique et si Xρ(γ)subscriptsuperscript𝑋𝜌𝛾X^{\prime}_{\rho(\gamma)} désigne l’ensemble de ses points fixes dans Xsuperscript𝑋X^{\prime}, alors pour xI{f(s0)}superscript𝑥𝐼𝑓subscript𝑠0x^{\prime}\in I\smallsetminus\{f(s_{0})\} on a, d’après (2.5),

d(x,ρ(γ)x)=2d(x,Xρ(γ))<2d(f(s0),Xρ(γ))=d(f(s0),ρ(γ)f(s0)),𝑑superscript𝑥𝜌𝛾superscript𝑥2𝑑superscript𝑥subscriptsuperscript𝑋𝜌𝛾2𝑑𝑓subscript𝑠0subscriptsuperscript𝑋𝜌𝛾𝑑𝑓subscript𝑠0𝜌𝛾𝑓subscript𝑠0d(x^{\prime},\rho(\gamma)\cdot x^{\prime})=2d(x^{\prime},X^{\prime}_{\rho(\gamma)})<2d(f(s_{0}),X^{\prime}_{\rho(\gamma)})=d(f(s_{0}),\rho(\gamma)\cdot f(s_{0})),

donc e𝑒e n’est pas fxsubscript𝑓superscript𝑥f_{x^{\prime}}-maximale, ce qui termine la démonstration du lemme 4.4. ∎

4.4. Un lacet d’étirement maximal

Démontrons à présent l’existence d’un lacet de Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X passant au plus deux fois par chaque sommet de Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X et tel que la restriction de f𝑓f aux relevés dans X𝑋X de ce lacet soit affine de constante C𝐶C.

Lemme 4.5.

Supposons l’ensemble des arêtes f𝑓f-maximales de X𝑋X minimal. Il existe un élément γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\} dont l’image dans Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X de l’axe de translation 𝒜γsubscript𝒜𝛾\mathcal{A}_{\gamma} est un lacet passant au plus deux fois par chaque sommet de Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X, dont toutes les arêtes sont f𝑓f-maximales et dont deux arêtes consécutives appartiennent toujours à des classes d’équivalence différentes pour la relation fsubscriptsimilar-to𝑓\sim_{f}.

Démonstration. Soit e0subscript𝑒0e_{0} une arête f𝑓f-maximale de X𝑋X, d’extrémités s0subscript𝑠0s_{0} et s1subscript𝑠1s_{1}. Le lemme 4.4 permet de construire par récurrence une suite (sn)nsubscriptsubscript𝑠𝑛𝑛(s_{n})_{n\in\mathbb{N}} de sommets de X𝑋X telle que pour tout n𝑛n\in\mathbb{N}, les sommets snsubscript𝑠𝑛s_{n} et sn+1subscript𝑠𝑛1s_{n+1} soient adjacents, l’arête ensubscript𝑒𝑛e_{n} d’extrémités snsubscript𝑠𝑛s_{n} et sn+1subscript𝑠𝑛1s_{n+1} soit f𝑓f-maximale, et les arêtes ensubscript𝑒𝑛e_{n} et en+1subscript𝑒𝑛1e_{n+1} appartiennent à des classes d’équivalence différentes pour la relation fsubscriptsimilar-to𝑓\sim_{f}. Comme X𝑋X est un arbre, les sommets snsubscript𝑠𝑛s_{n} sont deux à deux distincts et pour tous m<n𝑚𝑛m<n, la réunion des arêtes eisubscript𝑒𝑖e_{i}, où min𝑚𝑖𝑛m\leq i\leq n, est le segment géodésique d’extrémités smsubscript𝑠𝑚s_{m} et snsubscript𝑠𝑛s_{n}, de longueur nm+1𝑛𝑚1n-m+1. Soit N1𝑁1N\geq 1 le nombre de sommets du graphe fini Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X. D’après le principe des tiroirs de Dirichlet, il existe trois entiers

0n1<n2<n32N0subscript𝑛1subscript𝑛2subscript𝑛32𝑁0\leq n_{1}<n_{2}<n_{3}\leq 2N

tels que les sommets sn1subscript𝑠subscript𝑛1s_{n_{1}}, sn2subscript𝑠subscript𝑛2s_{n_{2}} et sn3subscript𝑠subscript𝑛3s_{n_{3}} appartiennent à la même orbite de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0}. Choisissons-les de sorte que l’entier n3n1subscript𝑛3subscript𝑛1n_{3}-n_{1} soit minimal, ce qui assure que l’image du segment géodésique [sn1,sn3]subscript𝑠subscript𝑛1subscript𝑠subscript𝑛3[s_{n_{1}},s_{n_{3}}] dans Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X est un lacet passant au plus deux fois par chaque sommet de Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X. Soient γ1,γ2Γ0{1}subscript𝛾1subscript𝛾2subscriptΓ01\gamma_{1},\gamma_{2}\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\} tels que sn2=γ1sn1subscript𝑠subscript𝑛2subscript𝛾1subscript𝑠subscript𝑛1s_{n_{2}}=\gamma_{1}\cdot s_{n_{1}} et sn3=γ2sn2subscript𝑠subscript𝑛3subscript𝛾2subscript𝑠subscript𝑛2s_{n_{3}}=\gamma_{2}\cdot s_{n_{2}}. La figure 4 illustre notre raisonnement. Pour toute arête e𝑒e de X𝑋X, nous notons e¯¯𝑒\overline{e} son image dans Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X.

e¯n1subscript¯𝑒subscript𝑛1\overline{e}_{n_{1}}e¯n21subscript¯𝑒subscript𝑛21\overline{e}_{n_{2}-1}e¯n31subscript¯𝑒subscript𝑛31\overline{e}_{n_{3}-1}e¯n2subscript¯𝑒subscript𝑛2\overline{e}_{n_{2}}s¯n1+1subscript¯𝑠subscript𝑛11\overline{s}_{n_{1}+1}s¯n21subscript¯𝑠subscript𝑛21\overline{s}_{n_{2}-1}s¯n31subscript¯𝑠subscript𝑛31\overline{s}_{n_{3}-1}s¯n2+1subscript¯𝑠subscript𝑛21\overline{s}_{n_{2}+1}γ1subscript𝛾1\gamma_{1}γ2subscript𝛾2\gamma_{2}s¯n1=s¯n2=s¯n3subscript¯𝑠subscript𝑛1subscript¯𝑠subscript𝑛2subscript¯𝑠subscript𝑛3\overline{s}_{n_{1}}=\overline{s}_{n_{2}}=\overline{s}_{n_{3}}
Figure 4. Illustration du lemme 4.5, dans Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X

Supposons que les arêtes e¯n21subscript¯𝑒subscript𝑛21\overline{e}_{n_{2}-1} et e¯n1subscript¯𝑒subscript𝑛1\overline{e}_{n_{1}} appartiennent à des classes d’équivalence différentes pour la relation fsubscriptsimilar-to𝑓\sim_{f}. Le projeté de sn2subscript𝑠subscript𝑛2s_{n_{2}} sur 𝒜γ1subscript𝒜subscript𝛾1\mathcal{A}_{\gamma_{1}} appartient à la fois aux segments géodésiques [sn1,sn2]subscript𝑠subscript𝑛1subscript𝑠subscript𝑛2[s_{n_{1}},s_{n_{2}}] et [sn2,γ1sn2]subscript𝑠subscript𝑛2subscript𝛾1subscript𝑠subscript𝑛2[s_{n_{2}},\gamma_{1}\cdot s_{n_{2}}] ; comme en21≁fγ1en1subscriptnot-similar-to𝑓subscript𝑒subscript𝑛21subscript𝛾1subscript𝑒subscript𝑛1e_{n_{2}-1}\not\sim_{f}\gamma_{1}\cdot e_{n_{1}} par hypothèse, on a sn2𝒜γ1subscript𝑠subscript𝑛2subscript𝒜subscript𝛾1s_{n_{2}}\in\mathcal{A}_{\gamma_{1}}. Ainsi, l’image de 𝒜γ1subscript𝒜subscript𝛾1\mathcal{A}_{\gamma_{1}} dans Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X est l’union des e¯isubscript¯𝑒𝑖\overline{e}_{i}n1in21subscript𝑛1𝑖subscript𝑛21n_{1}\leq i\leq n_{2}-1 ; c’est un lacet simple de Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X dont toutes les arêtes sont f𝑓f-maximales et dont deux arêtes consécutives appartiennent toujours à des classes d’équivalence différentes pour la relation fsubscriptsimilar-to𝑓\sim_{f}.

De même, si les arêtes e¯n31subscript¯𝑒subscript𝑛31\overline{e}_{n_{3}-1} et e¯n2subscript¯𝑒subscript𝑛2\overline{e}_{n_{2}} appartiennent à des classes d’équivalence différentes pour la relation fsubscriptsimilar-to𝑓\sim_{f}, alors l’image de 𝒜γ2subscript𝒜subscript𝛾2\mathcal{A}_{\gamma_{2}} dans Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X est l’union des e¯isubscript¯𝑒𝑖\overline{e}_{i}n2in31subscript𝑛2𝑖subscript𝑛31n_{2}\leq i\leq n_{3}-1 ; c’est un lacet simple de Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X dont toutes les arêtes sont f𝑓f-maximales et dont deux arêtes consécutives appartiennent toujours à des classes d’équivalence différentes pour la relation fsubscriptsimilar-to𝑓\sim_{f}.

Supposons e¯n21fe¯n1subscriptsimilar-to𝑓subscript¯𝑒subscript𝑛21subscript¯𝑒subscript𝑛1\overline{e}_{n_{2}-1}\sim_{f}\overline{e}_{n_{1}} et e¯n31fe¯n2subscriptsimilar-to𝑓subscript¯𝑒subscript𝑛31subscript¯𝑒subscript𝑛2\overline{e}_{n_{3}-1}\sim_{f}\overline{e}_{n_{2}}. Comme par construction les arêtes e¯n21subscript¯𝑒subscript𝑛21\overline{e}_{n_{2}-1} et e¯n2subscript¯𝑒subscript𝑛2\overline{e}_{n_{2}} appartiennent à des classes d’équivalence différentes pour fsubscriptsimilar-to𝑓\sim_{f}, il en est de même des arêtes e¯n31subscript¯𝑒subscript𝑛31\overline{e}_{n_{3}-1} et e¯n1subscript¯𝑒subscript𝑛1\overline{e}_{n_{1}}. Comme précédemment, l’image de 𝒜γ2γ1subscript𝒜subscript𝛾2subscript𝛾1\mathcal{A}_{\gamma_{2}\gamma_{1}} dans Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X est l’union des e¯isubscript¯𝑒𝑖\overline{e}_{i}n1in31subscript𝑛1𝑖subscript𝑛31n_{1}\leq i\leq n_{3}-1 ; c’est la concaténation de deux lacets simples de Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X, dont toutes les arêtes sont f𝑓f-maximales et dont deux arêtes consécutives appartiennent toujours à des classes d’équivalence différentes pour la relation fsubscriptsimilar-to𝑓\sim_{f}. Ceci achève la démonstration du lemme 4.5. ∎

Nous pouvons à présent démontrer le point (3) de la proposition 4.1.

Démonstration du point (3) de la proposition 4.1. Soit f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow\nolinebreak X^{\prime} une application ρ𝜌\rho-équivariante, affine par morceaux et C𝐶C-lipschitzienne telle que l’ensemble des arêtes f𝑓f-maximales de X𝑋X soit minimal. D’après le lemme 4.5, il existe un élément γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\} dont l’image dans Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X de l’axe de translation 𝒜γsubscript𝒜𝛾\mathcal{A}_{\gamma} est un lacet passant au plus deux fois par chaque sommet de Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X, dont toutes les arêtes sont f𝑓f-maximales et dont deux arêtes consécutives appartiennent toujours à des classes d’équivalence différentes pour la relation fsubscriptsimilar-to𝑓\sim_{f}. Quitte à remplacer γ𝛾\gamma par un conjugué dans Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0}, on peut supposer que 𝒜γsubscript𝒜𝛾\mathcal{A}_{\gamma} rencontre 𝒟𝒟\mathcal{D} ; d’après (2.4) on a alors

d(x0,γx0)=λ(γ)+2d(x0,𝒜γ) 4N,𝑑subscript𝑥0𝛾subscript𝑥0𝜆𝛾2𝑑subscript𝑥0subscript𝒜𝛾4𝑁d(x_{0},\gamma\cdot x_{0})\,=\,\lambda(\gamma)+2d(x_{0},\mathcal{A}_{\gamma})\,\leq\,4N,

i.e. γF𝛾𝐹\gamma\in F. Montrons que

λ(ρ(γ))λ(γ)=C,𝜆𝜌𝛾𝜆𝛾𝐶\frac{\lambda\big{(}\rho(\gamma)\big{)}}{\lambda(\gamma)}\,=\,C,

ce qui suffira, d’après (4.2), à établir le point (3) de la proposition 4.1. Nous distinguons les cas où ρ(γ)𝜌𝛾\rho(\gamma) est hyperbolique ou elliptique.

Supposons ρ(γ)𝜌𝛾\rho(\gamma) hyperbolique et soit s𝑠s un sommet de 𝒜γsubscript𝒜𝛾\mathcal{A}_{\gamma}. Le projeté de f(s)𝑓𝑠f(s) sur 𝒜ρ(γ)subscript𝒜𝜌𝛾\mathcal{A}_{\rho(\gamma)} appartient à la fois aux segments géodésiques [f(s),ρ(γ)1f(s)]=[f(s),f(γ1s)]𝑓𝑠𝜌superscript𝛾1𝑓𝑠𝑓𝑠𝑓superscript𝛾1𝑠[f(s),\rho(\gamma)^{-1}\cdot f(s)]=[f(s),f(\gamma^{-1}\cdot s)] et [f(s),ρ(γ)f(s)]=[f(s),f(γs)]𝑓𝑠𝜌𝛾𝑓𝑠𝑓𝑠𝑓𝛾𝑠[f(s),\rho(\gamma)\cdot f(s)]=[f(s),f(\gamma\cdot s)]. Comme deux arêtes consécutives de 𝒜γsubscript𝒜𝛾\mathcal{A}_{\gamma} appartiennent toujours à des classes d’équivalence différentes pour la relation fsubscriptsimilar-to𝑓\sim_{f}, on en déduit f(s)𝒜ρ(γ)𝑓𝑠subscript𝒜𝜌𝛾f(s)\in\mathcal{A}_{\rho(\gamma)}. Ainsi, on a

d(f(s),f(γs))d(s,γs)=d(f(s),ρ(γ)f(s))d(s,γs)=λ(ρ(γ))λ(γ).𝑑𝑓𝑠𝑓𝛾𝑠𝑑𝑠𝛾𝑠𝑑𝑓𝑠𝜌𝛾𝑓𝑠𝑑𝑠𝛾𝑠𝜆𝜌𝛾𝜆𝛾\frac{d(f(s),f(\gamma\cdot s))}{d(s,\gamma\cdot s)}\ =\ \frac{d(f(s),\rho(\gamma)\cdot f(s))}{d(s,\gamma\cdot s)}\ =\ \frac{\lambda(\rho(\gamma))}{\lambda(\gamma)}.

Comme toutes les arêtes de 𝒜γsubscript𝒜𝛾\mathcal{A}_{\gamma} sont f𝑓f-maximales, ce quotient est égal à C𝐶C.

Supposons ρ(γ)𝜌𝛾\rho(\gamma) elliptique, de sorte que λ(ρ(γ))=0𝜆𝜌𝛾0\lambda(\rho(\gamma))=0, et soit s𝑠s un sommet de 𝒜γsubscript𝒜𝛾\mathcal{A}_{\gamma}. Le projeté de f(s)𝑓𝑠f(s) sur l’ensemble des points fixes de ρ(γ)𝜌𝛾\rho(\gamma) appartient à la fois aux segments géodésiques [f(s),ρ(γ)1f(s)]=[f(s),f(γ1s)]𝑓𝑠𝜌superscript𝛾1𝑓𝑠𝑓𝑠𝑓superscript𝛾1𝑠[f(s),\rho(\gamma)^{-1}\cdot f(s)]=[f(s),f(\gamma^{-1}\cdot s)] et [f(s),ρ(γ)f(s)]=[f(s),f(γs)]𝑓𝑠𝜌𝛾𝑓𝑠𝑓𝑠𝑓𝛾𝑠[f(s),\rho(\gamma)\cdot f(s)]=[f(s),f(\gamma\cdot s)]. Comme deux arêtes consécutives de 𝒜γsubscript𝒜𝛾\mathcal{A}_{\gamma} appartiennent toujours à des classes d’équivalence différentes pour la relation fsubscriptsimilar-to𝑓\sim_{f}, on en déduit que f(s)𝑓𝑠f(s) est un point fixe de ρ(γ)𝜌𝛾\rho(\gamma). Ainsi, on a

f(γs)=ρ(γ)f(s)=f(s),𝑓𝛾𝑠𝜌𝛾𝑓𝑠𝑓𝑠f(\gamma\cdot s)\,=\,\rho(\gamma)\cdot f(s)\,=\,f(s),

donc C=0𝐶0C=0, ce qui termine la démonstration. ∎

5. Déformation des quotients compacts de (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G}

Dans cette partie, nous déduisons les théorèmes 1.4 puis 1.2 de la proposition 4.1 et d’une propriété des déformations de réseaux cocompacts sans torsion de G𝐺G (lemme 5.2).

5.1. Démonstration du théorème 1.4

Soient X𝑋X et Xsuperscript𝑋X^{\prime} deux arbres réels simpliciaux de valence 2absent2\geq 2 et Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} un sous-groupe discret sans torsion de Isom(X)Isom𝑋\mathrm{Isom}(X) tel que le graphe Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X soit fini. Fixons des points x0Xsubscript𝑥0𝑋x_{0}\in X et x0Xsubscriptsuperscript𝑥0superscript𝑋x^{\prime}_{0}\in\nolinebreak X^{\prime}. Nous dirons qu’un morphisme de groupes ρ:Γ0Isom(X):𝜌subscriptΓ0Isomsuperscript𝑋\rho:\Gamma_{0}\rightarrow\mathrm{Isom}(X^{\prime}) est admissible si pour tout R>0𝑅0R>0 on a d(x0,ρ(γ)x0)d(x0,γx0)R𝑑subscriptsuperscript𝑥0𝜌𝛾subscriptsuperscript𝑥0𝑑subscript𝑥0𝛾subscript𝑥0𝑅d(x^{\prime}_{0},\rho(\gamma)\cdot x^{\prime}_{0})\leq d(x_{0},\gamma\cdot x_{0})-R pour presque tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0}. Cette condition ne dépend pas du choix de x0subscript𝑥0x_{0} et x0subscriptsuperscript𝑥0x^{\prime}_{0}. La proposition 4.1 implique le résultat suivant, dont le théorème 1.4 est un cas particulier.

Théorème 5.1.

Soient X𝑋X et Xsuperscript𝑋X^{\prime} deux arbres réels simpliciaux de valence 2absent2\geq 2 et Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} un sous-groupe discret sans torsion de Isom(X)Isom𝑋\mathrm{Isom}(X) tel que le graphe Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X soit fini. Fixons des points x0Xsubscript𝑥0𝑋x_{0}\in X et x0Xsubscriptsuperscript𝑥0superscript𝑋x^{\prime}_{0}\in X^{\prime}. Pour tout morphisme de groupes ρ:Γ0Isom(X):𝜌subscriptΓ0Isomsuperscript𝑋\rho:\Gamma_{0}\rightarrow\mathrm{Isom}(X^{\prime}), notons Cρ0subscript𝐶𝜌0C_{\rho}\geq 0 la borne inférieure des réels t0𝑡0t\geq 0 pour lesquels il existe t0superscript𝑡0t^{\prime}\geq 0 tel que d(x0,ρ(γ)x0)td(x0,γx0)+t𝑑subscriptsuperscript𝑥0𝜌𝛾subscriptsuperscript𝑥0𝑡𝑑subscript𝑥0𝛾subscript𝑥0superscript𝑡d(x^{\prime}_{0},\rho(\gamma)\cdot x^{\prime}_{0})\leq td(x_{0},\gamma\cdot x_{0})+t^{\prime} pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0}.

  1. (1)

    Soit F𝐹F le sous-ensemble fini de Γ0{1}subscriptΓ01\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\} formé des éléments γ𝛾\gamma tels que d(x0,γx0)4N𝑑subscript𝑥0𝛾subscript𝑥04𝑁d(x_{0},\gamma\cdot x_{0})\leq\nolinebreak 4N, où N𝑁N désigne le nombre de sommets de Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X. Pour tout morphisme ρ:Γ0Isom(X):𝜌subscriptΓ0Isomsuperscript𝑋\rho:\Gamma_{0}\rightarrow\mathrm{Isom}(X^{\prime}) on a

    Cρ=supγΓ0{1}λ(ρ(γ))λ(γ)=maxγFλ(ρ(γ))λ(γ).subscript𝐶𝜌subscriptsupremum𝛾subscriptΓ01𝜆𝜌𝛾𝜆𝛾subscript𝛾𝐹𝜆𝜌𝛾𝜆𝛾C_{\rho}\ =\ \sup_{\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\}}\frac{\lambda(\rho(\gamma))}{\lambda(\gamma)}\ =\ \max_{\gamma\in F}\,\frac{\lambda(\rho(\gamma))}{\lambda(\gamma)}.
  2. (2)

    Un morphisme ρ:Γ0Isom(X):𝜌subscriptΓ0Isomsuperscript𝑋\rho:\Gamma_{0}\rightarrow\mathrm{Isom}(X^{\prime}) est admissible si et seulement si Cρ<1subscript𝐶𝜌1C_{\rho}<1.

Comme dans la proposition 4.1, l’hypothèse que Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est un sous-groupe discret sans torsion de Isom(X)Isom𝑋\mathrm{Isom}(X) tel que le graphe Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X soit fini est équivalente à l’hypothèse que Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est un groupe libre de type fini agissant sur X𝑋X librement, minimalement, par isométries (cf. paragraphe 2.2.3).

Démonstration. Soit ρ:Γ0Isom(X):𝜌subscriptΓ0Isomsuperscript𝑋\rho:\Gamma_{0}\rightarrow\mathrm{Isom}(X^{\prime}) un morphisme de groupes. D’après la proposition 4.1, il existe une application ρ𝜌\rho-équivariante affine par morceaux f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow X^{\prime} de constante de Lipschitz C𝐶C minimale. Commençons par remarquer que pour tout γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\} on a

λ(ρ(γ))λ(γ)Cρ.𝜆𝜌𝛾𝜆𝛾subscript𝐶𝜌\frac{\lambda(\rho(\gamma))}{\lambda(\gamma)}\ \leq\ C_{\rho}.

En effet, c’est évident si ρ(γ)𝜌𝛾\rho(\gamma) est elliptique, et si ρ(γ)𝜌𝛾\rho(\gamma) est hyperbolique cela résulte du fait que la suite

(5.1) (d(x0,ρ(γ)nx0)λ(ρ(γ))λ(γ)d(x0,γnx0))n1subscript𝑑subscriptsuperscript𝑥0𝜌superscript𝛾𝑛subscriptsuperscript𝑥0𝜆𝜌𝛾𝜆𝛾𝑑subscript𝑥0superscript𝛾𝑛subscript𝑥0𝑛1\Big{(}d(x^{\prime}_{0},\rho(\gamma)^{n}\cdot x^{\prime}_{0})-\frac{\lambda(\rho(\gamma))}{\lambda(\gamma)}\,d(x_{0},\gamma^{n}\cdot x_{0})\Big{)}_{n\geq 1}

est constante d’après (2.4). D’autre part, pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} on a

d(x0,ρ(γ)x0)𝑑subscriptsuperscript𝑥0𝜌𝛾subscriptsuperscript𝑥0\displaystyle d(x^{\prime}_{0},\rho(\gamma)\cdot x^{\prime}_{0}) \displaystyle\leq d(x0,f(x0))+d(f(x0),ρ(γ)f(x0))+d(ρ(γ)f(x0),ρ(γ)x0)𝑑subscriptsuperscript𝑥0𝑓subscript𝑥0𝑑𝑓subscript𝑥0𝜌𝛾𝑓subscript𝑥0𝑑𝜌𝛾𝑓subscript𝑥0𝜌𝛾subscriptsuperscript𝑥0\displaystyle d\big{(}x^{\prime}_{0},f(x_{0})\big{)}+d\big{(}f(x_{0}),\rho(\gamma)\cdot f(x_{0})\big{)}+d\big{(}\rho(\gamma)\cdot f(x_{0}),\rho(\gamma)\cdot x^{\prime}_{0}\big{)}
=\displaystyle= d(f(x0),f(γx0))+2d(x0,f(x0))𝑑𝑓subscript𝑥0𝑓𝛾subscript𝑥02𝑑subscriptsuperscript𝑥0𝑓subscript𝑥0\displaystyle d\big{(}f(x_{0}),f(\gamma\cdot x_{0})\big{)}+2\,d\big{(}x^{\prime}_{0},f(x_{0})\big{)}
\displaystyle\leq Cd(x0,γx0)+2d(x0,f(x0)),𝐶𝑑subscript𝑥0𝛾subscript𝑥02𝑑subscriptsuperscript𝑥0𝑓subscript𝑥0\displaystyle C\,d(x_{0},\gamma\cdot x_{0})+2\,d\big{(}x^{\prime}_{0},f(x_{0})\big{)},

donc CρCsubscript𝐶𝜌𝐶C_{\rho}\leq C. Ainsi, on a

supγΓ0{1}λ(ρ(γ))λ(γ)CρC.subscriptsupremum𝛾subscriptΓ01𝜆𝜌𝛾𝜆𝛾subscript𝐶𝜌𝐶\sup_{\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\}}\frac{\lambda(\rho(\gamma))}{\lambda(\gamma)}\ \leq\ C_{\rho}\ \leq\ C.

D’après la proposition 4.1, il existe un élément γFsuperscript𝛾𝐹\gamma^{\prime}\in F tel que

(5.2) λ(ρ(γ))λ(γ)=supγΓ0{1}λ(ρ(γ))λ(γ)=Cρ=C,𝜆𝜌superscript𝛾𝜆superscript𝛾subscriptsupremum𝛾subscriptΓ01𝜆𝜌𝛾𝜆𝛾subscript𝐶𝜌𝐶\frac{\lambda(\rho(\gamma^{\prime}))}{\lambda(\gamma^{\prime})}\ =\ \sup_{\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\}}\frac{\lambda(\rho(\gamma))}{\lambda(\gamma)}\ =\ C_{\rho}\ =\ C,

ce qui prouve le point (1) du théorème 5.1. Comme l’application μ𝜇\mu est propre et le groupe Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} discret dans G𝐺G, si Cρ<1subscript𝐶𝜌1C_{\rho}<1 alors ρ𝜌\rho est admissible, et si ρ𝜌\rho est admissible alors Cρ1subscript𝐶𝜌1C_{\rho}\leq 1. D’après (5.2), si Cρ=1subscript𝐶𝜌1C_{\rho}=1 alors λ(ρ(γ))=λ(γ)𝜆𝜌superscript𝛾𝜆superscript𝛾\lambda(\rho(\gamma^{\prime}))=\lambda(\gamma^{\prime}) ; comme la suite donnée par (5.1) est constante pour γ=γ𝛾superscript𝛾\gamma=\gamma^{\prime}, le morphisme ρ𝜌\rho n’est pas admissible. Ceci achève la démonstration du point (2) du théorème 5.1. ∎

Le théorème 1.4 s’obtient à partir du théorème 5.1 en prenant pour X𝑋X et Xsuperscript𝑋X^{\prime} l’arbre de Bruhat-Tits de G𝐺G et pour x0subscript𝑥0x_{0} et x0subscriptsuperscript𝑥0x^{\prime}_{0} le point donné par (2.1).

5.2. Déformation des réseaux cocompacts sans torsion de G𝐺G

Soient 𝐤𝐤\mathbf{k} un corps local ultramétrique et G𝐺G l’ensemble des 𝐤𝐤\mathbf{k}-points d’un 𝐤𝐤\mathbf{k}-groupe algébrique semi-simple connexe de 𝐤𝐤\mathbf{k}-rang un. Il est bien connu que pour tout réseau cocompact sans torsion Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} de G𝐺G, il existe un voisinage 𝒱0subscript𝒱0\mathcal{V}_{0} de l’inclusion canonique dans Hom(Γ0,G)HomsubscriptΓ0𝐺\mathrm{Hom}(\Gamma_{0},G) tel que pour tout σ𝒱0𝜎subscript𝒱0\sigma\in\mathcal{V}_{0}, le groupe σ(Γ0)𝜎subscriptΓ0\sigma(\Gamma_{0}) soit un réseau cocompact sans torsion de G𝐺G ([Lub], prop. 1.7 et th. 2.1). De plus, comme les applications λ𝜆\lambda et μ𝜇\mu sont continues à valeurs discrètes, pour toute partie finie F𝐹F de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} il existe un voisinage 𝒱Fsubscript𝒱𝐹\mathcal{V}_{F} de l’inclusion canonique dans Hom(Γ0,G)HomsubscriptΓ0𝐺\mathrm{Hom}(\Gamma_{0},G) tel que pour tout σ𝒱F𝜎subscript𝒱𝐹\sigma\in\mathcal{V}_{F} on ait λ(σ(γ))=λ(γ)𝜆𝜎𝛾𝜆𝛾\lambda(\sigma(\gamma))=\lambda(\gamma) et μ(σ(γ))=μ(γ)𝜇𝜎𝛾𝜇𝛾\mu(\sigma(\gamma))=\mu(\gamma) pour tout γF𝛾𝐹\gamma\in F.

Dans ce paragraphe, nous remarquons qu’il existe un voisinage 𝒱𝒱\mathcal{V} de l’inclusion canonique dans Hom(Γ0,G)HomsubscriptΓ0𝐺\mathrm{Hom}(\Gamma_{0},G) tel que pour tout σ𝒱𝜎𝒱\sigma\in\mathcal{V} on ait λ(σ(γ))=λ(γ)𝜆𝜎𝛾𝜆𝛾\lambda(\sigma(\gamma))=\lambda(\gamma) et μ(σ(γ))=μ(γ)𝜇𝜎𝛾𝜇𝛾\mu(\sigma(\gamma))=\mu(\gamma) pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0}, sans restriction à une partie finie F𝐹F.

Lemme 5.2.

Soient 𝐤𝐤\mathbf{k} un corps local ultramétrique, G𝐺G l’ensemble des 𝐤𝐤\mathbf{k}-points d’un 𝐤𝐤\mathbf{k}-groupe algébrique semi-simple connexe de 𝐤𝐤\mathbf{k}-rang un et Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} un réseau cocompact sans torsion de G𝐺G. Notons X𝑋X l’arbre de Bruhat-Tits de G𝐺G et x0subscript𝑥0x_{0} le point de X𝑋X donné par (2.1). Pour tout domaine fondamental connexe 𝒟𝒟\mathcal{D} de X𝑋X pour l’action de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0}, contenant x0subscript𝑥0x_{0}, il existe un voisinage 𝒱𝒱\mathcal{V} de l’inclusion canonique dans Hom(Γ0,G)HomsubscriptΓ0𝐺\mathrm{Hom}(\Gamma_{0},G) tel que pour tout σ𝒱𝜎𝒱\sigma\in\mathcal{V},

  • le morphisme σ𝜎\sigma soit injectif ;

  • le groupe σ(Γ0)𝜎subscriptΓ0\sigma(\Gamma_{0}) soit un réseau cocompact sans torsion de G𝐺G ;

  • l’ensemble 𝒟𝒟\mathcal{D} soit un domaine fondamental de X𝑋X pour l’action de σ(Γ0)𝜎subscriptΓ0\sigma(\Gamma_{0}) ;

  • on ait λ(σ(γ))=λ(γ)𝜆𝜎𝛾𝜆𝛾\lambda(\sigma(\gamma))=\lambda(\gamma) et μ(σ(γ))=μ(γ)𝜇𝜎𝛾𝜇𝛾\mu(\sigma(\gamma))=\mu(\gamma) pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0}.

Démonstration. Soit 𝒟𝒟\mathcal{D} un domaine fondamental connexe de X𝑋X pour l’action de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0}, contenant x0subscript𝑥0x_{0}. L’ensemble \mathcal{F} des éléments γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} tels que γ𝒟𝒟𝛾𝒟𝒟\gamma\cdot\mathcal{D}\cap\mathcal{D}\neq\emptyset est fini, donc

𝒟1=γγ𝒟subscript𝒟1subscript𝛾𝛾𝒟\mathcal{D}_{1}=\bigcup_{\gamma\in\mathcal{F}}\gamma\cdot\mathcal{D}

est un compact de X𝑋X. Le fixateur (point par point) de 𝒟1subscript𝒟1\mathcal{D}_{1} dans G𝐺G est un voisinage de 111 dans G𝐺G, en tant qu’intersection des fixateurs des extrémités des arêtes de X𝑋X rencontrant 𝒟1subscript𝒟1\mathcal{D}_{1}. Par conséquent, l’ensemble

𝒱={σHom(Γ0,G),σ(γ)γK𝒟1γ}𝒱formulae-sequence𝜎HomsubscriptΓ0𝐺formulae-sequence𝜎𝛾𝛾subscript𝐾subscript𝒟1for-all𝛾\mathcal{V}=\big{\{}\sigma\in\mathrm{Hom}(\Gamma_{0},G),\quad\sigma(\gamma)\in\gamma\cdot K_{\mathcal{D}_{1}}\quad\forall\gamma\in\mathcal{F}\big{\}}

est un voisinage de l’inclusion canonique dans Hom(Γ0,G)HomsubscriptΓ0𝐺\mathrm{Hom}(\Gamma_{0},G).

Pour voir que 𝒱𝒱\mathcal{V} vérifie les propriétés du lemme 5.2, il suffit de montrer que pour tout σ𝒱𝜎𝒱\sigma\in\mathcal{V} il existe une isométrie bijective σ𝜎\sigma-équivariante fσ:XX:subscript𝑓𝜎𝑋𝑋f_{\sigma}:X\rightarrow X fixant x0subscript𝑥0x_{0}. En effet, si une telle isométrie fσsubscript𝑓𝜎f_{\sigma} existe, alors σ𝜎\sigma est injectif et σ(Γ0)𝜎subscriptΓ0\sigma(\Gamma_{0}) est un réseau cocompact sans torsion de G𝐺G, admettant fσ(𝒟)subscript𝑓𝜎𝒟f_{\sigma}(\mathcal{D}) comme domaine fondamental dans X𝑋X. Pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0}, l’image par fσsubscript𝑓𝜎f_{\sigma} de l’axe de translation 𝒜γsubscript𝒜𝛾\mathcal{A}_{\gamma} de γ𝛾\gamma est l’axe de translation 𝒜σ(γ)subscript𝒜𝜎𝛾\mathcal{A}_{\sigma(\gamma)} de σ(γ)𝜎𝛾\sigma(\gamma), et λ(σ(γ))=λ(γ)𝜆𝜎𝛾𝜆𝛾\lambda(\sigma(\gamma))=\lambda(\gamma). Enfin, comme fσsubscript𝑓𝜎f_{\sigma} est une isométrie σ𝜎\sigma-équivariante fixant x0subscript𝑥0x_{0}, on a

μ(σ(γ))=d(x0,σ(γ)x0)=d(fσ(x0),fσ(γx0))=d(x0,γx0)=μ(γ)𝜇𝜎𝛾𝑑subscript𝑥0𝜎𝛾subscript𝑥0𝑑subscript𝑓𝜎subscript𝑥0subscript𝑓𝜎𝛾subscript𝑥0𝑑subscript𝑥0𝛾subscript𝑥0𝜇𝛾\mu(\sigma(\gamma))=d(x_{0},\sigma(\gamma)\cdot x_{0})=d\big{(}f_{\sigma}(x_{0}),f_{\sigma}(\gamma\cdot x_{0})\big{)}=d(x_{0},\gamma\cdot x_{0})=\mu(\gamma)

pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} d’après (2.1).

Fixons donc un morphisme σ𝒱𝜎𝒱\sigma\in\mathcal{V} et établissons l’existence d’une isométrie bijective σ𝜎\sigma-équivariante fσ:XX:subscript𝑓𝜎𝑋𝑋f_{\sigma}:X\rightarrow X fixant x0subscript𝑥0x_{0}. Pour tout x𝒟𝑥𝒟x\in\mathcal{D} et tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} tels que γx𝒟𝛾𝑥𝒟\gamma\cdot x\in\mathcal{D}, on a σ(γ)x=γx𝜎𝛾𝑥𝛾𝑥\sigma(\gamma)\cdot\nolinebreak x=\gamma\cdot x. Par conséquent, on peut définir une application fσ:XX:subscript𝑓𝜎𝑋𝑋f_{\sigma}:X\rightarrow X en posant fσ(γx)=σ(γ)xsubscript𝑓𝜎𝛾𝑥𝜎𝛾𝑥f_{\sigma}(\gamma\cdot\nolinebreak x)=\sigma(\gamma)\cdot x pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} et tout x𝒟𝑥𝒟x\in\mathcal{D}. Par construction, fσsubscript𝑓𝜎f_{\sigma} est σ𝜎\sigma-équivariante et fixe x0subscript𝑥0x_{0}. Montrons que c’est une isométrie bijective. Comme la restriction de fσsubscript𝑓𝜎f_{\sigma} à 𝒟1subscript𝒟1\mathcal{D}_{1} est l’identité, comme fσsubscript𝑓𝜎f_{\sigma} est σ𝜎\sigma-équivariante et comme Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} et σ(Γ0)𝜎subscriptΓ0\sigma(\Gamma_{0}) agissent sur X𝑋X par isométries, la restriction de fσsubscript𝑓𝜎f_{\sigma} à tout translaté γ𝒟1𝛾subscript𝒟1\gamma\cdot\mathcal{D}_{1}, où γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0}, est une isométrie. Comme les translatés par Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} de l’intérieur de 𝒟1subscript𝒟1\mathcal{D}_{1} recouvrent X𝑋X, on en déduit que fσsubscript𝑓𝜎f_{\sigma} est une isométrie locale. Comme X𝑋X est un arbre, c’est une isométrie globale. Enfin, fσsubscript𝑓𝜎f_{\sigma} est surjective. En effet, la réunion X𝒟subscript𝑋𝒟X_{\mathcal{D}} des translatés par σ(Γ0)𝜎subscriptΓ0\sigma(\Gamma_{0}) de 𝒟𝒟\mathcal{D} est ouverte dans X𝑋X, en tant que réunion des translatés par σ(Γ0)𝜎subscriptΓ0\sigma(\Gamma_{0}) de l’intérieur de 𝒟1subscript𝒟1\mathcal{D}_{1}. Elle est également fermée car toute suite de points de X𝒟subscript𝑋𝒟X_{\mathcal{D}} qui converge dans X𝑋X est contenue à partir d’un certain rang dans une boule de X𝑋X de diamètre rabsent𝑟\leq r, où r>0𝑟0r>0 désigne la distance de 𝒟𝒟\mathcal{D} à X𝒟1𝑋subscript𝒟1X\smallsetminus\mathcal{D}_{1}, donc dans un translaté par σ(Γ0)𝜎subscriptΓ0\sigma(\Gamma_{0}) de 𝒟1subscript𝒟1\mathcal{D}_{1} (car σ(Γ0)𝜎subscriptΓ0\sigma(\Gamma_{0}) agit sur X𝑋X par isométries). Par connexité de X𝑋X, on a X𝒟=Xsubscript𝑋𝒟𝑋X_{\mathcal{D}}=X, et donc

fσ(X)=γΓ0fσ(γ𝒟)=γΓ0σ(γ)fσ(𝒟)=X𝒟=X.subscript𝑓𝜎𝑋subscript𝛾subscriptΓ0subscript𝑓𝜎𝛾𝒟subscript𝛾subscriptΓ0𝜎𝛾subscript𝑓𝜎𝒟subscript𝑋𝒟𝑋f_{\sigma}(X)=\bigcup_{\gamma\in\Gamma_{0}}f_{\sigma}(\gamma\cdot\mathcal{D})=\bigcup_{\gamma\in\Gamma_{0}}\sigma(\gamma)\cdot f_{\sigma}(\mathcal{D})=X_{\mathcal{D}}=X.

Ainsi, fσ:XX:subscript𝑓𝜎𝑋𝑋f_{\sigma}:X\rightarrow X est une isométrie bijective σ𝜎\sigma-équivariante fixant x0subscript𝑥0x_{0}, ce qui termine la démonstration. ∎

Notons que l’existence de déformations non triviales est spécifique au rang un. En effet, si rang𝐤(𝐆)2subscriptrang𝐤𝐆2\mathrm{rang}_{\mathbf{k}}(\mathbf{G})\geq 2 et si par exemple G𝐺G est adjoint sans facteur compact et Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} irréductible, alors tout morphisme φ:Γ0G:𝜑subscriptΓ0𝐺\varphi:\Gamma_{0}\rightarrow G tel que φ(Γ0)𝜑subscriptΓ0\varphi(\Gamma_{0}) soit un réseau cocompact de G𝐺G se prolonge en un automorphisme continu de G𝐺G par le théorème de super-rigidité de Margulis ([Mar], th. 5.6).

5.3. Démonstration du théorème 1.2

Le théorème 1.2 est une conséquence du théorème 1.1, du théorème 1.4 et du lemme 5.2. En effet, soit ΓΓ\Gamma un sous-groupe discret de type fini sans torsion de G×G𝐺𝐺G\times G agissant proprement et cocompactement sur (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G}. D’après le théorème 1.1, il existe un réseau cocompact sans torsion Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} de G𝐺G et un morphisme admissible ρ:Γ0G:𝜌subscriptΓ0𝐺\rho:\Gamma_{0}\rightarrow G tels que

Γ={(γ,ρ(γ)),γΓ0},Γ𝛾𝜌𝛾𝛾subscriptΓ0\Gamma=\big{\{}(\gamma,\rho(\gamma)),\ \gamma\in\Gamma_{0}\big{\}},

à la permutation près des deux facteurs de G×G𝐺𝐺G\times G. Soit X𝑋X l’arbre de Bruhat-Tits de G𝐺G, soit N𝑁N le nombre de sommets du graphe fini Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X et soit F𝐹F l’ensemble des éléments γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\} tels que μ(γ)4N𝜇𝛾4𝑁\mu(\gamma)\leq 4N. Choisissons un domaine fondamental connexe 𝒟𝒟\mathcal{D} de X𝑋X pour l’action de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} : on peut prendre par exemple le domaine de Dirichlet

𝒟={xX,d(x,x0)d(x,γx0)γΓ0}.𝒟formulae-sequence𝑥𝑋formulae-sequence𝑑𝑥subscript𝑥0𝑑𝑥𝛾subscript𝑥0for-all𝛾subscriptΓ0\mathcal{D}=\big{\{}x\in X,\quad d(x,x_{0})\leq d(x,\gamma\cdot x_{0})\quad\forall\gamma\in\Gamma_{0}\big{\}}.

Soit 𝒱𝒱\mathcal{V} le voisinage de l’inclusion canonique dans Hom(Γ0,G)HomsubscriptΓ0𝐺\mathrm{Hom}(\Gamma_{0},G) donné par le lemme 5.2. D’après le théorème 1.4, l’ensemble

𝒲={τHom(Γ0,G),λ(τ(γ))<λ(γ)γF}𝒲formulae-sequence𝜏HomsubscriptΓ0𝐺formulae-sequence𝜆𝜏𝛾𝜆𝛾for-all𝛾𝐹\mathcal{W}=\big{\{}\tau\in\mathrm{Hom}(\Gamma_{0},G),\quad\lambda(\tau(\gamma))<\lambda(\gamma)\quad\forall\gamma\in F\big{\}}

contient ρ𝜌\rho ; c’est donc un voisinage de ρ𝜌\rho dans Hom(Γ0,G)HomsubscriptΓ0𝐺\mathrm{Hom}(\Gamma_{0},G), et 𝒱×𝒲𝒱𝒲\mathcal{V}\times\mathcal{W} est un voisinage de l’inclusion canonique dans Hom(Γ,G×G)HomΓ𝐺𝐺\mathrm{Hom}(\Gamma,G\times G). Soit φ=(σ,τ)𝒱×𝒲𝜑𝜎𝜏𝒱𝒲\varphi=(\sigma,\tau)\in\nolinebreak\mathcal{V}\times\nolinebreak\mathcal{W}. Le groupe

φ(Γ)={(σ(γ),τ(γ)),γΓ0}𝜑Γ𝜎𝛾𝜏𝛾𝛾subscriptΓ0\varphi(\Gamma)=\big{\{}(\sigma(\gamma),\tau(\gamma)),\ \gamma\in\Gamma_{0}\big{\}}

est un graphe par injectivité de σ𝜎\sigma, et σ(Γ0)𝜎subscriptΓ0\sigma(\Gamma_{0}) est un réseau cocompact sans torsion de G𝐺G. Par définition de 𝒱𝒱\mathcal{V} et de 𝒲𝒲\mathcal{W}, le graphe fini σ(Γ0)\X\𝜎subscriptΓ0𝑋\sigma(\Gamma_{0})\backslash X possède N𝑁N sommets, l’ensemble F𝐹F est formé des éléments γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\} tels que μ(σ(γ))4N𝜇𝜎𝛾4𝑁\mu(\sigma(\gamma))\leq 4N, et l’on a λ(τ(γ))<λ(σ(γ))𝜆𝜏𝛾𝜆𝜎𝛾\lambda(\tau(\gamma))<\lambda(\sigma(\gamma)) pour tout γF𝛾𝐹\gamma\in F. D’après le théorème 1.4, le morphisme τσ1:σ(Γ0)G:𝜏superscript𝜎1𝜎subscriptΓ0𝐺\tau\circ\sigma^{-1}:\sigma(\Gamma_{0})\rightarrow G est admissible. D’après le théorème 1.1, le groupe φ(Γ)𝜑Γ\varphi(\Gamma) agit librement, proprement et cocompactement sur (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G}. ∎

6. Lien avec l’outre-espace

Dans le cas particulier où ρ𝜌\rho est injectif d’image discrète et cocompacte, la proposition 4.1 implique l’existence et l’équivalence entre deux définitions différentes d’une même “distance asymétrique” sur l’outre-espace, comme nous le précisons dans cette partie.

Cette distance asymétrique sur l’outre-espace est un analogue de la distance asymétrique de Thurston sur l’espace de Teichmüller, introduite et étudiée en détail dans [Thu] : les classes d’équivalence de structures hyperboliques complètes sur une surface compacte S𝑆S de type fini et de caractéristique d’Euler χ(S)<0𝜒𝑆0\chi(S)<0, munies d’un marquage par le groupe fondamental de S𝑆S, sont remplacées par les classes d’équivalence de graphes métriques connexes munis d’un marquage par un groupe libre de type fini fixé (cf. paragraphe 6.4).

Sur l’outre-espace, cette distance asymétrique a d’abord été étudiée par T. White dans un texte non publié, puis récemment par S. Francaviglia et A. Martino [FM] qui se sont intéressés à une symétrisation de cette distance et à la géométrie correspondante sur l’outre-espace.

6.1. Rappels

Soient n2𝑛2n\geq 2 un entier et nsubscript𝑛\mathcal{R}_{n} un bouquet de n𝑛n cercles d’intersection {c}𝑐\{c\} ; le groupe fondamental π1(n,c)subscript𝜋1subscript𝑛𝑐\pi_{1}(\mathcal{R}_{n},c) est un groupe libre à n𝑛n générateurs que nous noterons 𝔽nsubscript𝔽𝑛\mathbb{F}_{n}. Appelons graphe normalisé marqué de rang n𝑛n tout couple (Y,φ)𝑌𝜑(Y,\varphi)Y𝑌Y est un graphe métrique connexe fini de valence 2absent2\geq 2 dont la somme des longueurs des arêtes vaut un, et où φ:nY:𝜑subscript𝑛𝑌\varphi:\mathcal{R}_{n}\rightarrow Y est une équivalence d’homotopie. L’équivalence d’homotopie φ𝜑\varphi induit un isomorphisme de groupes

φ:𝔽nπ1(Y,φ(c)).:subscript𝜑subscript𝔽𝑛subscript𝜋1𝑌𝜑𝑐\varphi_{\ast}:\mathbb{F}_{n}\longrightarrow\pi_{1}\big{(}Y,\varphi(c)\big{)}.

Pour tous graphes normalisés (Y,φ)𝑌𝜑(Y,\varphi) et (Y,φ)superscript𝑌superscript𝜑(Y^{\prime},\varphi^{\prime}) marqués de rang n𝑛n, nous dirons qu’une application continue f¯:YY:¯𝑓𝑌superscript𝑌\overline{f}:Y\rightarrow Y^{\prime} respecte les marquages φ𝜑\varphi et φsuperscript𝜑\varphi^{\prime} si f¯φ¯𝑓𝜑\overline{f}\circ\varphi est homotope à φsuperscript𝜑\varphi^{\prime}. Notons (Y,φ)(Y,φ)similar-to𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑(Y,\varphi)\sim(Y^{\prime},\varphi^{\prime}) s’il existe une isométrie bijective i:YY:𝑖𝑌superscript𝑌i:Y\rightarrow Y^{\prime} respectant les marquages φ𝜑\varphi et φsuperscript𝜑\varphi^{\prime}. Ceci définit une relation d’équivalence similar-to\sim sur l’ensemble des graphes normalisés marqués de rang n𝑛n. On appelle outre-espace de rang n𝑛n l’ensemble des classes d’équivalence pour cette relation. Cet ensemble a été introduit par M. Culler et K. Vogtmann dans l’article fondateur [CV] ; nous le notons ici OSnsubscriptOS𝑛\mathrm{OS}_{n}. Pour tout graphe normalisé (Y,φ)𝑌𝜑(Y,\varphi) marqué de rang n𝑛n, nous notons [Y,φ]𝑌𝜑[Y,\varphi] la classe de (Y,φ)𝑌𝜑(Y,\varphi) dans OSnsubscriptOS𝑛\mathrm{OS}_{n}.

6.2. Une distance asymétrique sur l’outre-espace

Soient (Y,φ)𝑌𝜑(Y,\varphi) et (Y,φ)superscript𝑌superscript𝜑(Y^{\prime},\varphi^{\prime}) deux graphes normalisés marqués de rang n𝑛n. Notons X𝑋X (resp. Xsuperscript𝑋X^{\prime}) un revêtement universel de Y𝑌Y (resp. de Ysuperscript𝑌Y^{\prime}) : c’est un arbre réel simplicial de valence 2absent2\geq 2. Le groupe fondamental π1(Y,φ(c))subscript𝜋1𝑌𝜑𝑐\pi_{1}(Y,\varphi(c)) (resp. π1(Y,φ(c))subscript𝜋1superscript𝑌superscript𝜑𝑐\pi_{1}(Y^{\prime},\varphi^{\prime}(c))) agit librement, proprement et cocompactement sur X𝑋X (resp. sur Xsuperscript𝑋X^{\prime}), par isométries. Posons Γ0=π1(Y,φ(c))subscriptΓ0subscript𝜋1𝑌𝜑𝑐\Gamma_{0}=\pi_{1}(Y,\varphi(c)) et

ρ=φφ1:Γ0Isom(X).:𝜌subscriptsuperscript𝜑superscriptsubscript𝜑1subscriptΓ0Isomsuperscript𝑋\rho=\varphi^{\prime}_{\ast}\circ\varphi_{\ast}^{-1}\ :\ \Gamma_{0}\longrightarrow\mathrm{Isom}(X^{\prime}).

Toute application continue f¯:YY:¯𝑓𝑌superscript𝑌\overline{f}:Y\rightarrow Y^{\prime} respectant les marquages φ𝜑\varphi et φsuperscript𝜑\varphi^{\prime} se relève en une application continue ρ𝜌\rho-équivariante f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow X^{\prime}, au sens de la proposition 4.1. Réciproquement, toute application continue ρ𝜌\rho-équivariante f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow X^{\prime} induit une application continue f¯:YY:¯𝑓𝑌superscript𝑌\overline{f}:Y\rightarrow Y^{\prime} respectant les marquages φ𝜑\varphi et φsuperscript𝜑\varphi^{\prime}. Par construction, l’application f𝑓f est lipschitzienne si et seulement si f¯¯𝑓\overline{f} l’est, et dans ce cas les deux constantes de Lipschitz sont les mêmes.

D’après la proposition 4.1, il existe une application f¯:YY:¯𝑓𝑌superscript𝑌\overline{f}:Y\rightarrow Y^{\prime} affine par morceaux respectant les marquages φ𝜑\varphi et φsuperscript𝜑\varphi^{\prime}, et la borne inférieure des constantes de Lipschitz de telles applications est atteinte. Cette borne inférieure ne dépend que des classes [Y,φ]𝑌𝜑[Y,\varphi] et [Y,φ]superscript𝑌superscript𝜑[Y^{\prime},\varphi^{\prime}] dans OSnsubscriptOS𝑛\mathrm{OS}_{n} ; notons L([Y,φ],[Y,φ])𝐿𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑L([Y,\varphi],[Y^{\prime},\varphi^{\prime}]) son logarithme.

Lemme 6.1.

L’application L:OSn×OSn:𝐿subscriptOS𝑛subscriptOS𝑛L:\mathrm{OS}_{n}\times\mathrm{OS}_{n}\rightarrow\mathbb{R} est une distance asymétrique sur OSnsubscriptOS𝑛\mathrm{OS}_{n}, au sens où

  1. (1)

    pour tous [Y,φ],[Y,φ]OSn𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑subscriptOS𝑛[Y,\varphi],[Y^{\prime},\varphi^{\prime}]\in\mathrm{OS}_{n} on a

    L([Y,φ],[Y,φ])0,𝐿𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑0L([Y,\varphi],[Y^{\prime},\varphi^{\prime}])\geq 0,

    avec égalité si et seulement si [Y,φ]=[Y,φ]𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑[Y,\varphi]=[Y^{\prime},\varphi^{\prime}] ;

  2. (2)

    pour tous [Y,φ],[Y,φ],[Y′′,φ′′]OSn𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑superscript𝑌′′superscript𝜑′′subscriptOS𝑛[Y,\varphi],[Y^{\prime},\varphi^{\prime}],[Y^{\prime\prime},\varphi^{\prime\prime}]\in\mathrm{OS}_{n} on a

    L([Y,φ],[Y′′,φ′′])L([Y,φ],[Y,φ])+L([Y,φ],[Y′′,φ′′]).𝐿𝑌𝜑superscript𝑌′′superscript𝜑′′𝐿𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑𝐿superscript𝑌superscript𝜑superscript𝑌′′superscript𝜑′′L([Y,\varphi],[Y^{\prime\prime},\varphi^{\prime\prime}])\,\leq\,L([Y,\varphi],[Y^{\prime},\varphi^{\prime}])\,+\,L([Y^{\prime},\varphi^{\prime}],[Y^{\prime\prime},\varphi^{\prime\prime}]).

En général on a L([Y,φ],[Y,φ])L([Y,φ],[Y,φ])𝐿𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑𝐿superscript𝑌superscript𝜑𝑌𝜑L([Y,\varphi],[Y^{\prime},\varphi^{\prime}])\neq L([Y^{\prime},\varphi^{\prime}],[Y,\varphi]), comme nous le verrons ci-dessous.

Démonstration du lemme 6.1. Le point (2) est clair. Prouvons le point (1). Soient (Y,φ)𝑌𝜑(Y,\varphi) et (Y,φ)superscript𝑌superscript𝜑(Y^{\prime},\varphi^{\prime}) deux graphes normalisés marqués de rang n𝑛n et f¯:YY:¯𝑓𝑌superscript𝑌\overline{f}:Y\rightarrow Y^{\prime} une application affine par morceaux respectant les marquages φ𝜑\varphi et φsuperscript𝜑\varphi^{\prime}, de constante de Lipschitz C=expL([X,φ],[X,φ])𝐶𝐿𝑋𝜑superscript𝑋superscript𝜑C=\exp L([X,\varphi],[X^{\prime},\varphi^{\prime}]) minimale.

Remarquons que f¯¯𝑓\overline{f} est surjective. En effet, notons comme ci-dessus X𝑋X (resp. Xsuperscript𝑋X^{\prime}) un revêtement universel de Y𝑌Y (resp. de Ysuperscript𝑌Y^{\prime}) et soit f:XX:𝑓𝑋superscript𝑋f:X\rightarrow X^{\prime} un relevé de f¯¯𝑓\overline{f} ; montrons que f𝑓f est surjective. Fixons un sommet s𝑠s de X𝑋X. Pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\nolinebreak\Gamma_{0}, l’image par f𝑓f du segment géodésique [s,γs]𝑠𝛾𝑠[s,\gamma\cdot s] de X𝑋X contient le segment géodésique [f(s),ρ(γ)f(s)]𝑓𝑠𝜌𝛾𝑓𝑠[f(s),\rho(\gamma)\cdot f(s)] de Xsuperscript𝑋X^{\prime}. Il suffit donc de montrer que les segments géodésiques [f(s),ρ(γ)f(s)]𝑓𝑠𝜌𝛾𝑓𝑠[f(s),\rho(\gamma)\cdot f(s)], où γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0}, recouvrent Xsuperscript𝑋X^{\prime}. Mais s’il existait un point xXsuperscript𝑥superscript𝑋x^{\prime}\in X^{\prime} n’appartenant à aucun segment géodésique [f(s),ρ(γ)f(s)]𝑓𝑠𝜌𝛾𝑓𝑠[f(s),\rho(\gamma)\cdot f(s)], alors toute composante connexe de X{x}superscript𝑋superscript𝑥X^{\prime}\smallsetminus\{x^{\prime}\} ne contenant pas f(s)𝑓𝑠f(s) serait un sous-arbre infini de X𝑋X ne rencontrant pas l’orbite ρ(Γ0)f(s)𝜌subscriptΓ0𝑓𝑠\rho(\Gamma_{0})\cdot f(s), ce qui contredirait le fait que ρ(Γ0)𝜌subscriptΓ0\rho(\Gamma_{0}) agit cocompactement sur Xsuperscript𝑋X^{\prime}.

Notons E𝐸E (resp. Esuperscript𝐸E^{\prime}) l’ensemble des arêtes de Y𝑌Y (resp. de Ysuperscript𝑌Y^{\prime}). Pour toute arête eE𝑒𝐸e\in E (resp. eEsuperscript𝑒superscript𝐸e^{\prime}\in E^{\prime}), notons (e)[0,1]𝑒delimited-[]0.1\ell(e)\in[0,1] (resp. (e)[0,1]superscriptsuperscript𝑒delimited-[]0.1\ell^{\prime}(e^{\prime})\in[0,1]) sa longueur dans Y𝑌Y (resp. dans Ysuperscript𝑌Y^{\prime}). Notons enfin Cesubscript𝐶𝑒C_{e} la constante de Lipschitz de la restriction de f¯¯𝑓\overline{f} à e𝑒e pour tout eE𝑒𝐸e\in E. Comme f¯¯𝑓\overline{f} est surjective on a

(6.1) 1=eE(e)eE(f¯(e))eECe(e)CeE(e)=C.1subscriptsuperscript𝑒𝐸superscriptsuperscript𝑒subscript𝑒𝐸¯𝑓𝑒subscript𝑒𝐸subscript𝐶𝑒𝑒𝐶subscript𝑒𝐸𝑒𝐶1\,=\,\sum_{e^{\prime}\in E}\ell^{\prime}(e^{\prime})\,\leq\,\sum_{e\in E}\ell\big{(}\overline{f}(e)\big{)}\,\leq\,\sum_{e\in E}C_{e}\,\ell(e)\,\leq\,C\sum_{e\in E}\ell(e)\,=\,C.

On en déduit

(6.2) L([X,φ],[X,φ])=logC0.𝐿𝑋𝜑superscript𝑋superscript𝜑𝐶0L([X,\varphi],[X^{\prime},\varphi^{\prime}])=\log C\geq 0.

De plus, si L([X,φ],[X,φ])=0𝐿𝑋𝜑superscript𝑋superscript𝜑0L([X,\varphi],[X^{\prime},\varphi^{\prime}])=0, alors toutes les inégalités dans (6.1) sont des égalités ; on en déduit aisément que f¯¯𝑓\overline{f} est une isométrie bijective, et donc que [X,φ]=[X,φ]𝑋𝜑superscript𝑋superscript𝜑[X,\varphi]=[X^{\prime},\varphi^{\prime}]. Enfin, en considérant l’identité de X𝑋X, on voit que L([X,φ],[X,φ])0𝐿𝑋𝜑𝑋𝜑0L([X,\varphi],[X,\varphi])\leq 0, donc L([X,φ],[X,φ])=0𝐿𝑋𝜑𝑋𝜑0L([X,\varphi],[X,\varphi])=0 par (6.2). ∎


Montrons l’asymétrie sur un exemple pour n=2𝑛2n=2. Comme précédemment, soit 2subscript2\mathcal{R}_{2} un bouquet de deux cercles 𝒞𝒞\mathcal{C} et 𝒞superscript𝒞\mathcal{C}^{\prime} d’intersection {c}𝑐\{c\}. Pour i{1,2}𝑖1.2i\in\{1,2\}, soit Yisubscript𝑌𝑖Y_{i} le graphe donné par la figure 5, où les deux boucles sont de longueur ai]0,1[a_{i}\in]0,1[ et où l’arête du milieu est de longueur 12ai12subscript𝑎𝑖1-2a_{i}. Soit φi:2Yi:subscript𝜑𝑖subscript2subscript𝑌𝑖\varphi_{i}:\mathcal{R}_{2}\rightarrow Y_{i} une équivalence d’homotopie envoyant c𝑐c sur yisubscript𝑦𝑖y_{i}, établissant un homéomorphisme entre 𝒞𝒞\mathcal{C} et le cercle de gauche de Yisubscript𝑌𝑖Y_{i} et envoyant 𝒞superscript𝒞\mathcal{C}^{\prime} sur l’union du segment transverse et du cercle de droite de Yisubscript𝑌𝑖Y_{i}. Pour a1a2subscript𝑎1subscript𝑎2a_{1}\leq a_{2}, un calcul donne

L([Y1,φ1],[Y2,φ2])=log(a2a1)etL([Y2,φ2],[Y1,φ1])=log(1a11a2).formulae-sequence𝐿subscript𝑌1subscript𝜑1subscript𝑌2subscript𝜑2subscript𝑎2subscript𝑎1et𝐿subscript𝑌2subscript𝜑2subscript𝑌1subscript𝜑11subscript𝑎11subscript𝑎2L\big{(}[Y_{1},\varphi_{1}],[Y_{2},\varphi_{2}]\big{)}=\log\Big{(}\frac{a_{2}}{a_{1}}\Big{)}\quad\mathrm{et}\quad L\big{(}[Y_{2},\varphi_{2}],[Y_{1},\varphi_{1}]\big{)}=\log\bigg{(}\frac{1-a_{1}}{1-a_{2}}\bigg{)}.

Ces réels sont différents dès que a2{a1,1a1}subscript𝑎2subscript𝑎1.1subscript𝑎1a_{2}\notin\{a_{1},1-a_{1}\}.

aisubscript𝑎𝑖a_{i}12ai12subscript𝑎𝑖1-2a_{i}aisubscript𝑎𝑖a_{i}yisubscript𝑦𝑖y_{i}
Figure 5. Le graphe Yisubscript𝑌𝑖Y_{i}

6.3. Quotients de longueurs de lacets

Pour tout graphe normalisé (Y,φ)𝑌𝜑(Y,\varphi) marqué de rang n𝑛n et tout γ𝔽n{1}𝛾subscript𝔽𝑛1\gamma\in\mathbb{F}_{n}\smallsetminus\{1\}, la longueur minimale d’un lacet dans la classe d’homotopie libre de φ(γ)π1(Y,φ(c))subscript𝜑𝛾subscript𝜋1𝑌𝜑𝑐\varphi_{\ast}(\gamma)\in\pi_{1}(Y,\varphi(c)) ne dépend que de la classe [Y,φ]𝑌𝜑[Y,\varphi] de (Y,φ)𝑌𝜑(Y,\varphi) dans OSnsubscriptOS𝑛\mathrm{OS}_{n} ; notons-la long[Y,φ](γ)subscriptlong𝑌𝜑𝛾\mathrm{long}_{[Y,\varphi]}(\gamma). Si X𝑋X désigne comme précédemment un revêtement universel de Y𝑌Y, alors long[Y,φ](γ)=λ(φ(γ))subscriptlong𝑌𝜑𝛾𝜆subscript𝜑𝛾\mathrm{long}_{[Y,\varphi]}(\gamma)=\lambda(\varphi_{\ast}(\gamma)) est la longueur de translation de φ(γ)subscript𝜑𝛾\varphi_{\ast}(\gamma) vu comme isométrie de X𝑋X.

Pour tous [Y,φ],[Y,φ]OSn𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑subscriptOS𝑛[Y,\varphi],[Y^{\prime},\varphi^{\prime}]\in\mathrm{OS}_{n}, tout γ𝔽n{1}𝛾subscript𝔽𝑛1\gamma\in\mathbb{F}_{n}\smallsetminus\{1\} et toute application continue f¯:YY:¯𝑓𝑌superscript𝑌\overline{f}:Y\rightarrow Y^{\prime} respectant les marquages φ𝜑\varphi et φsuperscript𝜑\varphi^{\prime}, lipschitzienne de constante C𝐶C minimale, on a

(6.3) long[Y,φ](γ)long[Y,φ](γ)C.subscriptlongsuperscript𝑌superscript𝜑𝛾subscriptlong𝑌𝜑𝛾𝐶\frac{\mathrm{long}_{[Y^{\prime},\varphi^{\prime}]}(\gamma)}{\mathrm{long}_{[Y,\varphi]}(\gamma)}\ \leq\ C.

Posons

K([Y,φ],[Y,φ])=logsupγ𝔽n{1}(long[Y,φ](γ)long[Y,φ](γ)).𝐾𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑subscriptsupremum𝛾subscript𝔽𝑛1subscriptlongsuperscript𝑌superscript𝜑𝛾subscriptlong𝑌𝜑𝛾K\big{(}[Y,\varphi],[Y^{\prime},\varphi^{\prime}]\big{)}=\log\sup_{\gamma\in\mathbb{F}_{n}\smallsetminus\{1\}}\bigg{(}\frac{\mathrm{long}_{[Y^{\prime},\varphi^{\prime}]}(\gamma)}{\mathrm{long}_{[Y,\varphi]}(\gamma)}\bigg{)}.

Les inégalités (6.3) impliquent

K([Y,φ],[Y,φ])L([Y,φ],[Y,φ]).𝐾𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑𝐿𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑K\big{(}[Y,\varphi],[Y^{\prime},\varphi^{\prime}]\big{)}\ \leq\ L\big{(}[Y,\varphi],[Y^{\prime},\varphi^{\prime}]\big{)}.

D’après la proposition 4.1, cette inégalité est en fait une égalité et la borne supérieure K([Y,φ],[Y,φ])𝐾𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑K([Y,\varphi],[Y^{\prime},\varphi^{\prime}]) est atteinte.

Corollaire 6.2.

(T. White, cf. [FM], prop. 3.11)
Pour tous [Y,φ],[Y,φ]OSn𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑subscriptOS𝑛[Y,\varphi],[Y^{\prime},\varphi^{\prime}]\in\nolinebreak\mathrm{OS}_{n} il existe un élément γ𝔽n{1}𝛾subscript𝔽𝑛1\gamma\in\mathbb{F}_{n}\smallsetminus\{1\} tel que

eK([Y,φ],[Y,φ])=long[Y,φ](γ)long[Y,φ](γ)=λ(φ(γ))λ(φ(γ))=eL([Y,φ],[Y,φ]) 1.superscript𝑒𝐾𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑subscriptlongsuperscript𝑌superscript𝜑𝛾subscriptlong𝑌𝜑𝛾𝜆subscriptsuperscript𝜑𝛾𝜆subscript𝜑𝛾superscript𝑒𝐿𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑1e^{K([Y,\varphi],[Y^{\prime},\varphi^{\prime}])}\ =\ \frac{\mathrm{long}_{[Y^{\prime},\varphi^{\prime}]}(\gamma)}{\mathrm{long}_{[Y,\varphi]}(\gamma)}\ =\ \frac{\lambda\big{(}\varphi^{\prime}_{\ast}(\gamma)\big{)}}{\lambda\big{(}\varphi_{\ast}(\gamma)\big{)}}\ =\ e^{L([Y,\varphi],[Y^{\prime},\varphi^{\prime}])}\ \geq\ 1.

En particulier on a K=L𝐾𝐿K=L.

6.4. Lien avec la distance asymétrique de Thurston sur l’espace de
Teichmüller

On a une analogie très forte entre la distance asymétrique K=L𝐾𝐿K=L sur l’outre-espace et la distance asymétrique de Thurston sur l’espace de Teichmüller. Plus précisément, soit S𝑆S une surface compacte de caractéristique d’Euler χ(S)<0𝜒𝑆0\chi(S)<0, et soit 𝒯(S)𝒯𝑆\mathcal{T}(S) l’espace de Teichmüller de S𝑆S, défini comme l’ensemble des classes d’équivalence de structures hyperboliques complètes sur S𝑆S pour la relation “être tirée en arrière par un homéomorphisme de S𝑆S homotope à l’identité”.

Pour toutes structures hyperboliques complètes g𝑔g et hh sur S𝑆S, la borne inférieure des constantes de Lipschitz d’homéomorphismes f¯:(S,g)(S,h):¯𝑓𝑆𝑔𝑆\overline{f}:(S,g)\rightarrow(S,h) homotopes à l’identité ne dépend que des classes de g𝑔g et hh dans 𝒯(S)𝒯𝑆\mathcal{T}(S). Notons L([g],[h])𝐿delimited-[]𝑔delimited-[]L([g],[h]) le logarithme de cette borne inférieure. D’après [Thu], prop. 2.1, l’application L𝐿L est une distance asymétrique sur 𝒯(S)𝒯𝑆\mathcal{T}(S), au sens du lemme 6.1.

Soit x0Ssubscript𝑥0𝑆x_{0}\in S un point-base. Pour toute structure hyperbolique complète g𝑔g sur S𝑆S et tout élément γπ1(S,x0)𝛾subscript𝜋1𝑆subscript𝑥0\gamma\in\pi_{1}(S,x_{0}) non trivial, notons longg(γ)>0subscriptlong𝑔𝛾0\mathrm{long}_{g}(\gamma)>0 la plus petite longueur d’un lacet dans la classe d’homotopie libre de γ𝛾\gamma ; elle est atteinte par l’unique géodésique fermée pour g𝑔g dans la classe d’homotopie libre de γ𝛾\gamma. Ceci définit une application longgsubscriptlong𝑔\mathrm{long}_{g} qui ne dépend que de la classe de g𝑔g dans 𝒯(S)𝒯𝑆\mathcal{T}(S). D’après [Thu], th. 3.1, l’application K:𝒯(S)×𝒯(S):𝐾𝒯𝑆𝒯𝑆K:\mathcal{T}(S)\times\mathcal{T}(S)\rightarrow\mathbb{R} définie par

K([g],[h])=logsupγπ1(S,x0){1}(longh(γ)longg(γ))𝐾delimited-[]𝑔delimited-[]subscriptsupremum𝛾subscript𝜋1𝑆subscript𝑥01subscriptlong𝛾subscriptlong𝑔𝛾K([g],[h])=\log\sup_{\gamma\in\pi_{1}(S,x_{0})\smallsetminus\{1\}}\bigg{(}\frac{\mathrm{long}_{h}(\gamma)}{\mathrm{long}_{g}(\gamma)}\bigg{)}

pour tous [g],[h]𝒯(S)delimited-[]𝑔delimited-[]𝒯𝑆[g],[h]\in\mathcal{T}(S) est une distance asymétrique sur 𝒯(S)𝒯𝑆\mathcal{T}(S).

Comme sur l’outre-espace, on a K=L𝐾𝐿K=L d’après [Thu], th. 8.5. En revanche, dans le cas de l’espace de Teichmüller la borne supérieure K([g],[h])𝐾delimited-[]𝑔delimited-[]K([g],[h]) n’est en général pas atteinte par une géodésique fermée simple, mais par une lamination géodésique mesurée.

6.5. Absence de morphisme admissible injectif d’image discrète

D’après le corollaire 6.2 et le lemme 6.1, on a K([Y,φ],[Y,φ])0𝐾𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑0K([Y,\varphi],[Y^{\prime},\varphi^{\prime}])\geq 0 pour tous [Y,φ],[Y,φ]OSn𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑subscriptOS𝑛[Y,\varphi],[Y^{\prime},\varphi^{\prime}]\in\mathrm{OS}_{n}, et en cas d’égalité on a [Y,φ]=[Y,φ]𝑌𝜑superscript𝑌superscript𝜑[Y,\varphi]=[Y^{\prime},\varphi^{\prime}] donc λ(φ(γ))=λ(φ(γ))𝜆subscriptsuperscript𝜑𝛾𝜆subscript𝜑𝛾\lambda(\varphi^{\prime}_{\ast}(\gamma))=\lambda(\varphi_{\ast}(\gamma)) pour tout γ𝔽n𝛾subscript𝔽𝑛\gamma\in\mathbb{F}_{n}. Nous allons en déduire le résultat suivant, dont le corollaire 1.5 est un cas particulier.

Corollaire 6.3.

Soit X𝑋X un arbre réel simplicial, bipartite de valences n12subscript𝑛12n_{1}\geq 2 et n22subscript𝑛22n_{2}\geq 2, dont toutes les arêtes ont même longueur, et soit Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} un sous-groupe discret sans torsion de Isom(X)Isom𝑋\mathrm{Isom}(X) tel que le graphe Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X soit fini. Il n’existe pas de morphisme de groupes admissible ρ:Γ0Isom(X):𝜌subscriptΓ0Isom𝑋\rho:\Gamma_{0}\rightarrow\nolinebreak\mathrm{Isom}(X) qui soit injectif d’image discrète.

Soient x0,x0Xsubscript𝑥0subscriptsuperscript𝑥0𝑋x_{0},x^{\prime}_{0}\in X. Rappelons qu’un morphisme ρ:Γ0Isom(X):𝜌subscriptΓ0Isom𝑋\rho:\Gamma_{0}\rightarrow\mathrm{Isom}(X) est dit admissible si pour tout R>0𝑅0R>0 on a d(x0,ρ(γ)x0)d(x0,γx0)R𝑑subscriptsuperscript𝑥0𝜌𝛾subscriptsuperscript𝑥0𝑑subscript𝑥0𝛾subscript𝑥0𝑅d(x^{\prime}_{0},\rho(\gamma)\cdot x^{\prime}_{0})\leq d(x_{0},\gamma\cdot x_{0})-R pour presque tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} (cf. paragraphe 5.1). Cette condition ne dépend pas du choix de x0subscript𝑥0x_{0} et x0subscriptsuperscript𝑥0x^{\prime}_{0}.

De même, la positivité de la distance asymétrique de Thurston sur l’espace de Teichmüller (avec la condition d’égalité) implique l’absence de morphisme admissible pour G=PSL2()𝐺subscriptPSL2G=\mathrm{PSL}_{2}(\mathbb{R}) (cf. [Sa2], § 4.1). On n’a pas besoin que la borne supérieure K([g],[h])𝐾delimited-[]𝑔delimited-[]K([g],[h]) soit atteinte par une géodésique fermée simple.

Pour démontrer le corollaire 6.3 nous utilisons le lemme suivant.

Lemme 6.4.

Le nombre d’arêtes d’un graphe connexe fini dont le groupe fondamental est libre de rang n2𝑛2n\geq 2 fixé est une fonction décroissante de la valence moyenne des sommets.

Démonstration. Soit Y𝑌Y un graphe connexe fini dont le groupe fondamental est libre de rang n2𝑛2n\geq 2. Si a𝑎a désigne le nombre d’arêtes, s𝑠s le nombre de sommets et v𝑣v la valence moyenne des sommets de Y𝑌Y, alors 2a=vs2𝑎𝑣𝑠2a=vs. De plus, d’après [Die], th. 1.9.6, on a n=as+1𝑛𝑎𝑠1n=a-s+1, d’où

a=n112v,𝑎𝑛112𝑣a=\frac{n-1}{1-\frac{2}{v}},

ce qui implique le lemme. ∎

Nous pouvons à présent démontrer le corollaire 6.3.

Démonstration du corollaire 6.3. Soit ρ:Γ0Isom(X):𝜌subscriptΓ0Isom𝑋\rho:\Gamma_{0}\rightarrow\mathrm{Isom}(X) un morphisme de groupes injectif d’image discrète. Montrons que ρ𝜌\rho n’est pas admissible.

Les groupes Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} et ρ(Γ0)𝜌subscriptΓ0\rho(\Gamma_{0}) agissent tous deux librement et proprement sur X𝑋X. Les graphes quotients Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X et ρ(Γ0)\X\𝜌subscriptΓ0𝑋\rho(\Gamma_{0})\backslash X sont connexes, bipartites de valences n12subscript𝑛12n_{1}\geq 2 et n22subscript𝑛22n_{2}\geq 2, et leurs groupes fondamentaux, qui s’identifient respectivement à Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} et ρ(Γ0)𝜌subscriptΓ0\rho(\Gamma_{0}), sont libres de même rang. Le graphe Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X est fini mais ρ(Γ0)\X\𝜌subscriptΓ0𝑋\rho(\Gamma_{0})\backslash X ne l’est pas forcément.

Comme Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est sans torsion et comme ρ𝜌\rho est injectif d’image discrète, l’élément ρ(γ)𝜌𝛾\rho(\gamma) est hyperbolique pour tout γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\}. Fixons un élément γΓ0{1}𝛾subscriptΓ01\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\} et un sommet xXsuperscript𝑥𝑋x^{\prime}\in X de l’axe de translation 𝒜ρ(γ)subscript𝒜𝜌𝛾\mathcal{A}_{\rho(\gamma)}. L’image Ysuperscript𝑌Y^{\prime} dans ρ(Γ0)\X\𝜌subscriptΓ0𝑋\rho(\Gamma_{0})\backslash X de l’union des segments géodésiques [x,ρ(γ)x]superscript𝑥𝜌𝛾superscript𝑥[x^{\prime},\rho(\gamma)\cdot x^{\prime}], où γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0}, est un sous-graphe fini connexe de ρ(Γ0)\X\𝜌subscriptΓ0𝑋\rho(\Gamma_{0})\backslash X dont le groupe fondamental s’identifie encore à ρ(Γ0)𝜌subscriptΓ0\rho(\Gamma_{0}). Si ρ(Γ0)\X\𝜌subscriptΓ0𝑋\rho(\Gamma_{0})\backslash X est fini, on voit facilement que Y=ρ(Γ0)\Xsuperscript𝑌\𝜌subscriptΓ0𝑋Y^{\prime}=\rho(\Gamma_{0})\backslash X. Par construction, Ysuperscript𝑌Y^{\prime} est de valence 2absent2\geq 2. De plus, la valence moyenne des sommets de Ysuperscript𝑌Y^{\prime} est inférieure à (n1+n2)/2subscript𝑛1subscript𝑛22(n_{1}+n_{2})/2 : en effet, si l’on note S1subscript𝑆1S_{1} (resp. S2subscript𝑆2S_{2}) l’ensemble des sommets de ρ(Γ0)\X\𝜌subscriptΓ0𝑋\rho(\Gamma_{0})\backslash X de valence n1subscript𝑛1n_{1} (resp. n2subscript𝑛2n_{2}), alors YS1superscript𝑌subscript𝑆1Y^{\prime}\cap S_{1} et YS2superscript𝑌subscript𝑆2Y^{\prime}\cap S_{2} ont même cardinal, et pour tout sYSi𝑠superscript𝑌subscript𝑆𝑖s\in Y^{\prime}\cap S_{i}, la valence de s𝑠s dans Ysuperscript𝑌Y^{\prime} est inférieure à nisubscript𝑛𝑖n_{i}.

Notons m𝑚m (resp. msuperscript𝑚m^{\prime}) le nombre d’arêtes de Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X (resp. de Ysuperscript𝑌Y^{\prime}). D’après le lemme 6.4, on a mm𝑚superscript𝑚m\leq m^{\prime}. Or, toutes les arêtes de X𝑋X ont même longueur par hypothèse. Si l’on note L>0𝐿0L>0 cette longueur et si l’on munit Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X (resp. Ysuperscript𝑌Y^{\prime}) de la distance induite par celle de X𝑋X divisée par mL𝑚𝐿mL (resp. par mLsuperscript𝑚𝐿m^{\prime}L), alors la somme des longueurs des arêtes de Γ0\X\subscriptΓ0𝑋\Gamma_{0}\backslash X (resp. de Ysuperscript𝑌Y^{\prime}) vaut un. D’après le corollaire 6.2, il existe un élément γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} non trivial tel que

1mLλ(ρ(γ))1mLλ(γ).1superscript𝑚𝐿𝜆𝜌𝛾1𝑚𝐿𝜆𝛾\frac{1}{m^{\prime}L}\lambda(\rho(\gamma))\ \geq\ \frac{1}{mL}\lambda(\gamma).

Comme mm𝑚superscript𝑚m\leq m^{\prime}, on en déduit λ(ρ(γ))λ(γ)𝜆𝜌𝛾𝜆𝛾\lambda(\rho(\gamma))\geq\lambda(\gamma). D’après le théorème 5.1, le morphisme ρ𝜌\rho n’est pas admissible. ∎


Le corollaire 1.5 s’obtient à partir du corollaire 6.3 en prenant pour X𝑋X l’arbre de Bruhat-Tits de G𝐺G.

7. Existence de quotients compacts par ΓΓ\Gamma Zariski-dense

Pour démontrer le corollaire 1.3, nous utilisons le résultat suivant, dont l’analogue réel est dû à T. Kobayashi ([Ko3], th. 2.4).

Lemme 7.1.

Soient 𝐤𝐤\mathbf{k} un corps local ultramétrique, G𝐺G l’ensemble des 𝐤𝐤\mathbf{k}-points d’un 𝐤𝐤\mathbf{k}-groupe algébrique semi-simple connexe de 𝐤𝐤\mathbf{k}-rang un et Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} un réseau cocompact sans torsion de G𝐺G. Soient X𝑋X l’arbre de Bruhat-Tits de G𝐺G et 𝒟𝒟\mathcal{D} un domaine fondamental connexe de X𝑋X pour l’action de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0}, contenant dans son intérieur le point x0subscript𝑥0x_{0} donné par (2.1). Posons

={γΓ0{1},γ𝒟𝒟}formulae-sequence𝛾subscriptΓ01𝛾𝒟𝒟\mathcal{F}=\big{\{}\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\},\quad\gamma\cdot\mathcal{D}\cap\mathcal{D}\neq\emptyset\big{\}}

et notons δ>0𝛿0\delta>0 la distance de 𝒟𝒟\mathcal{D} au complémentaire de γγ𝒟subscript𝛾𝛾𝒟\bigcup_{\gamma\in\mathcal{F}}\gamma\cdot\mathcal{D} dans X𝑋X. Alors tout morphisme de groupes ρ:Γ0G:𝜌subscriptΓ0𝐺\rho:\Gamma_{0}\rightarrow G vérifiant μ(ρ(γ))<δ𝜇𝜌𝛾𝛿\mu(\rho(\gamma))<\delta pour tout γ𝛾\gamma\in\mathcal{F} est admissible.

Le raisonnement de Kobayashi se transpose au cas ultramétrique en remplaçant simplement l’espace symétrique G/K𝐺𝐾G/K par l’arbre de Bruhat-Tits de G𝐺G ; nous le reproduisons ici pour la commodité du lecteur.

Démonstration du lemme 7.1. Soit γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0}. Notons n𝑛n la partie entière de d(x0,γx0)/δ𝑑subscript𝑥0𝛾subscript𝑥0𝛿d(x_{0},\gamma\cdot x_{0})/\delta et choisissons une suite (xi)i=1,,n+1subscriptsubscript𝑥𝑖𝑖1𝑛1(x_{i})_{i=1,\ldots,n+1} de points du segment géodésique [x0,γx0]subscript𝑥0𝛾subscript𝑥0[x_{0},\gamma\cdot x_{0}] telle que xn+1=γx0subscript𝑥𝑛1𝛾subscript𝑥0x_{n+1}=\gamma\cdot x_{0} et telle que pour tout 0in0𝑖𝑛0\leq i\leq n on ait d(xi,xi+1)<δ𝑑subscript𝑥𝑖subscript𝑥𝑖1𝛿d(x_{i},x_{i+1})<\delta. Par récurrence, on construit une suite (γi)i=0,,nsubscriptsubscript𝛾𝑖𝑖0𝑛(\gamma_{i})_{i=0,\ldots,n} d’éléments de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} telle que xi+1γ0γi𝒟subscript𝑥𝑖1subscript𝛾0subscript𝛾𝑖𝒟x_{i+1}\in\nolinebreak\gamma_{0}\ldots\gamma_{i}\cdot\mathcal{D} pour tout 0in0𝑖𝑛0\leq i\leq n ; par définition de δ𝛿\delta et comme d(xi,xi+1)<δ𝑑subscript𝑥𝑖subscript𝑥𝑖1𝛿d(x_{i},x_{i+1})<\delta, on a γi{1}subscript𝛾𝑖1\gamma_{i}\in\mathcal{F}\cup\{1\} pour tout i𝑖i. D’autre part, on a xn+1=γx0γ0γn𝒟subscript𝑥𝑛1𝛾subscript𝑥0subscript𝛾0subscript𝛾𝑛𝒟x_{n+1}=\gamma\cdot x_{0}\in\gamma_{0}\ldots\gamma_{n}\cdot\mathcal{D}, donc x0subscript𝑥0x_{0} appartient à la fois à l’intérieur de 𝒟𝒟\mathcal{D} et à (γ1γ0γn)𝒟superscript𝛾1subscript𝛾0subscript𝛾𝑛𝒟(\gamma^{-1}\gamma_{0}\ldots\gamma_{n})\cdot\mathcal{D}. Comme 𝒟𝒟\mathcal{D} est un domaine fondamental de X𝑋X pour Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0}, on a γ1γ0γn=1superscript𝛾1subscript𝛾0subscript𝛾𝑛1\gamma^{-1}\gamma_{0}\ldots\gamma_{n}=1, i.e. γ=γ0γn𝛾subscript𝛾0subscript𝛾𝑛\gamma=\gamma_{0}\ldots\gamma_{n}. Si :Γ0:subscriptsubscriptΓ0\ell_{\mathcal{F}}:\Gamma_{0}\rightarrow\mathbb{N} désigne la longueur des mots associée à \mathcal{F}, on a

(7.1) (γ)n+1d(x0,γx0)δ+1=μ(γ)δ+1.subscript𝛾𝑛1𝑑subscript𝑥0𝛾subscript𝑥0𝛿1𝜇𝛾𝛿1\ell_{\mathcal{F}}(\gamma)\ \leq\ n+1\ \leq\ \frac{d(x_{0},\gamma\cdot x_{0})}{\delta}+1\ =\ \frac{\mu(\gamma)}{\delta}+1.

Soit ρHom(Γ0,G)𝜌HomsubscriptΓ0𝐺\rho\in\mathrm{Hom}(\Gamma_{0},G) tel que

M:=max{μ(ρ(γ)),γ}<δ.assign𝑀𝜇𝜌𝛾𝛾𝛿M:=\max\big{\{}\mu(\rho(\gamma)),\ \gamma\in\mathcal{F}\big{\}}\ <\ \delta.

Pour tout γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} on a, d’après (2.2) et (7.1),

μ(ρ(γ))M(γ)Mδμ(γ)+M.𝜇𝜌𝛾𝑀subscript𝛾𝑀𝛿𝜇𝛾𝑀\mu(\rho(\gamma))\ \leq\ M\cdot\ell_{\mathcal{F}}(\gamma)\ \leq\ \frac{M}{\delta}\mu(\gamma)+M.

Pour tout R>0𝑅0R>0 on a Mδμ(γ)+M>μ(γ)R𝑀𝛿𝜇𝛾𝑀𝜇𝛾𝑅\frac{M}{\delta}\mu(\gamma)+M>\mu(\gamma)-R si et seulement si μ(γ)<M+R1M/δ𝜇𝛾𝑀𝑅1𝑀𝛿\mu(\gamma)<\frac{M+R}{1-M/\delta}. L’ensemble des éléments γΓ0𝛾subscriptΓ0\gamma\in\Gamma_{0} vérifiant cette inégalité est fini car Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est discret dans G𝐺G et l’application μ𝜇\mu est propre. Ainsi, ρ𝜌\rho est admissible. ∎


Nous pouvons à présent démontrer la proposition 1.3.

Démonstration de la proposition 1.3. Notons L>0𝐿0L>0 la longueur commune des arêtes de X𝑋X. En s’inspirant de la démonstration du théorème 2.1 de [Lub], par exemple, on construit facilement un réseau cocompact sans torsion Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} de G𝐺G admettant un domaine fondamental connexe 𝒟𝒟\mathcal{D} dans X𝑋X qui contient dans son intérieur le point x0subscript𝑥0x_{0} donné par (2.1) et tel que, en posant

={γΓ0{1},γ𝒟𝒟},formulae-sequence𝛾subscriptΓ01𝛾𝒟𝒟\mathcal{F}=\big{\{}\gamma\in\Gamma_{0}\smallsetminus\{1\},\quad\gamma\cdot\mathcal{D}\cap\mathcal{D}\neq\emptyset\big{\}},

la distance δ𝛿\delta de 𝒟𝒟\mathcal{D} au complémentaire de γγ𝒟subscript𝛾𝛾𝒟\bigcup_{\gamma\in\mathcal{F}}\gamma\cdot\mathcal{D} dans X𝑋X soit supérieure à 2L2𝐿2L. Soit superscript\mathcal{F}^{\prime} une partie de \mathcal{F} telle que \mathcal{F} soit l’union disjointe de superscript\mathcal{F}^{\prime} et de 1superscriptsuperscript1{\mathcal{F}^{\prime}}^{-1}. Le groupe Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est libre, librement engendré par superscript\mathcal{F}^{\prime}, donc tout morphisme de Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} dans G𝐺G est entièrement déterminé par son image sur superscript\mathcal{F}^{\prime}.

Soient γ1γ2subscript𝛾1subscript𝛾2\gamma_{1}\neq\gamma_{2} deux éléments de superscript\mathcal{F}^{\prime}. Rappelons qu’un élément de G𝐺G est dit régulier si la composante neutre de son centralisateur dans 𝐆𝐆\mathbf{G} est un tore maximal de 𝐆𝐆\mathbf{G}. L’ensemble des éléments réguliers de G𝐺G contient un ouvert de Zariski de G𝐺G ([Bor], th. 12.3). Par conséquent, si l’on note 𝒱𝒱\mathcal{V} le voisinage de l’inclusion canonique dans Hom(Γ0,G)HomsubscriptΓ0𝐺\mathrm{Hom}(\Gamma_{0},G) donné par le lemme 5.2, alors 𝒱γ1𝒱subscript𝛾1\mathcal{V}\cdot\gamma_{1} contient un élément régulier γ1subscriptsuperscript𝛾1\gamma^{\prime}_{1}. Comme δ2L𝛿2𝐿\delta\geq 2L, l’ensemble des éléments gG𝑔𝐺g\in\nolinebreak G tels que 0<λ(g)μ(g)<δ0𝜆𝑔𝜇𝑔𝛿0<\lambda(g)\leq\mu(g)<\delta est un ouvert non vide de G𝐺G ; il contient donc un élément régulier γ1′′subscriptsuperscript𝛾′′1\gamma^{\prime\prime}_{1}. Par un résultat de J. Tits ([Ti2], prop. 4.4), la réunion de tous les sous-groupes stricts de G×G𝐺𝐺G\times G qui contiennent (γ1,γ1′′)subscriptsuperscript𝛾1subscriptsuperscript𝛾′′1(\gamma^{\prime}_{1},\gamma^{\prime\prime}_{1}) et qui sont Zariski-fermés et Zariski-connexes est incluse dans un fermé de Zariski strict F1subscript𝐹1F_{1} de G×G𝐺𝐺G\times G. Comme précédemment, l’ouvert de Zariski (G×G)F1𝐺𝐺subscript𝐹1(G\times G)\smallsetminus F_{1} contient un élément régulier (γ2,γ2′′)subscriptsuperscript𝛾2subscriptsuperscript𝛾′′2(\gamma^{\prime}_{2},\gamma^{\prime\prime}_{2}) tel que γ2𝒱γ2subscriptsuperscript𝛾2𝒱subscript𝛾2\gamma^{\prime}_{2}\in\mathcal{V}\cdot\gamma_{2} et 0<λ(γ2′′)μ(γ2′′)<δ0𝜆subscriptsuperscript𝛾′′2𝜇subscriptsuperscript𝛾′′2𝛿0<\lambda(\gamma^{\prime\prime}_{2})\leq\mu(\gamma^{\prime\prime}_{2})<\delta. Par construction, le groupe engendré par (γ1,γ1′′)subscriptsuperscript𝛾1subscriptsuperscript𝛾′′1(\gamma^{\prime}_{1},\gamma^{\prime\prime}_{1}) et (γ2,γ2′′)subscriptsuperscript𝛾2subscriptsuperscript𝛾′′2(\gamma^{\prime}_{2},\gamma^{\prime\prime}_{2}) est Zariski-dense dans G×G𝐺𝐺G\times G, et sa projection sur chacun des facteurs de G×G𝐺𝐺G\times G est non bornée.

Soit σ:Γ0G:𝜎subscriptΓ0𝐺\sigma:\Gamma_{0}\rightarrow G le morphisme de groupes défini par σ(γi)=γi𝜎subscript𝛾𝑖subscriptsuperscript𝛾𝑖\sigma(\gamma_{i})=\gamma^{\prime}_{i} pour i{1,2}𝑖1.2i\in\{1,2\} et σ(γ)=γ𝜎𝛾𝛾\sigma(\gamma)=\gamma pour γ{γ1,γ2}𝛾superscriptsubscript𝛾1subscript𝛾2\gamma\in\mathcal{F}^{\prime}\smallsetminus\{\gamma_{1},\gamma_{2}\}. Par construction, on a σ𝒱𝜎𝒱\sigma\in\mathcal{V}. Pour tout γ{γ1,γ2}𝛾superscriptsubscript𝛾1subscript𝛾2\gamma\in\mathcal{F}^{\prime}\smallsetminus\{\gamma_{1},\gamma_{2}\}, choisissons un élément gγGsubscript𝑔𝛾𝐺g_{\gamma}\in G tel que μ(gγ)<δ𝜇subscript𝑔𝛾𝛿\mu(g_{\gamma})<\delta. Soit ρ:Γ0G:𝜌subscriptΓ0𝐺\rho:\Gamma_{0}\rightarrow G le morphisme de groupes défini par ρ(γi)=γi′′𝜌subscript𝛾𝑖subscriptsuperscript𝛾′′𝑖\rho(\gamma_{i})=\gamma^{\prime\prime}_{i} pour i{1,2}𝑖1.2i\in\{1,2\} et ρ(γ)=gγ𝜌𝛾subscript𝑔𝛾\rho(\gamma)=g_{\gamma} pour γ{γ1,γ2}𝛾superscriptsubscript𝛾1subscript𝛾2\gamma\in\mathcal{F}^{\prime}\smallsetminus\{\gamma_{1},\gamma_{2}\}. Le groupe

Γ={(σ(γ),ρ(γ)),γΓ0}Γ𝜎𝛾𝜌𝛾𝛾subscriptΓ0\Gamma=\big{\{}(\sigma(\gamma),\rho(\gamma)),\ \gamma\in\Gamma_{0}\big{\}}

est Zariski-dense dans G×G𝐺𝐺G\times G et sa projection sur chacun des facteurs de G×G𝐺𝐺G\times G est non bornée. Comme σ𝒱𝜎𝒱\sigma\in\mathcal{V}, le morphisme σ𝜎\sigma est injectif, le groupe σ(Γ0)𝜎subscriptΓ0\sigma(\Gamma_{0}) est un réseau cocompact sans torsion de G𝐺G de domaine fondamental 𝒟𝒟\mathcal{D} dans X𝑋X et δ𝛿\delta est la distance de 𝒟𝒟\mathcal{D} au complémentaire de γσ(γ)𝒟subscript𝛾𝜎𝛾𝒟\bigcup_{\gamma\in\mathcal{F}}\sigma(\gamma)\cdot\mathcal{D} dans X𝑋X. Par construction on a μ(ρ(γ))<δ𝜇𝜌𝛾𝛿\mu(\rho(\gamma))<\delta pour tout γ𝛾superscript\gamma\in\mathcal{F}^{\prime}, donc le morphisme ρσ1:σ(Γ0)G:𝜌superscript𝜎1𝜎subscriptΓ0𝐺\rho\circ\sigma^{-1}:\sigma(\Gamma_{0})\rightarrow G est admissible d’après le lemme 7.1 et l’inégalité (2.3). Le théorème 1.1 assure que le groupe ΓΓ\Gamma agit librement, proprement et cocompactement sur (G×G)/ΔG𝐺𝐺subscriptΔ𝐺(G\times G)/\Delta_{G}, ce qui termine la démonstration de la proposition 1.3. ∎

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Département de Mathématiques, Bâtiment 425, Faculté des Sciences d’Orsay, Université Paris-Sud 11, 91405 Orsay Cedex, France

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