Sur la conjecture combinatoire de Kashiwara-Vergne

Charles Torossian111UMR 8553 du CNRS, DMA-ENS, 45 rue d’Ulm 75230 Paris cedex 05

Résumé: Nous expliquons dans cet article un lien entre les travaux de Kontsevich sur la quantification formelle des variétés de Poisson et la conjecture combinatoire de Kashiwara-Vergne.

Abstract: We explain a connection between the combinatorial Kashiwara-Vergne conjecture and the Kontsevich formula for quantization of Poisson manifolds.

AMS Classification: 17B, 22E, 53D55

1 Introduction

1.1 La conjecture combinatoire de Kashiwara-Vergne

Soit 𝔤𝔤\mathfrak{g} une algèbre de Lie de dimension finie sur IRIR\mathrm{I\!R}. Notons exp(x)𝑥\exp(x) l’image de x𝔤𝑥𝔤x\in\mathfrak{g} par l’application exponentielle et nous noterons en général Z(x,y)𝑍𝑥𝑦Z(x,y) la série de Campbell-Hausdorff définie par Z(x,y)=log(exp(x)exp(y))𝑍𝑥𝑦𝑥𝑦Z(x,y)=\log(\exp(x)\exp(y)). Dans tout ce qui suit nous travaillons au niveau des séries formelles mais des arguments élémentaires montrent que toutes les séries formelles que nous manipulons sont convergentes dans un voisinage proche de 00.

La conjecture combinatoire de Kashiwara-Vergne [KV] s’énonce de la manière suivante. Il existe des séries F(x,y)𝐹𝑥𝑦F(x,y) et G(x,y)𝐺𝑥𝑦G(x,y) sur 𝔤𝔤direct-sum𝔤𝔤\mathfrak{g}\oplus\mathfrak{g} sans terme constant et à valeurs dans 𝔤𝔤\mathfrak{g} telles que l’on ait

x+ylog(exp(x)exp(y))=(exp(adx)1)F(x,y)+(1exp(ady))G(x,y)𝑥𝑦𝑥𝑦ad𝑥1𝐹𝑥𝑦1ad𝑦𝐺𝑥𝑦x+y-\log(\exp(x)\exp(y))=(\exp(\mathrm{ad}x)-1)F(x,y)+(1-\exp(\mathrm{ad}y))G(x,y) (1)

et telle que l’identité suivante soit vérifiée

tr𝔤(adxxF+adyyG)=12tr𝔤(adxexp(adx)1+adyexp(ady)1adZexp(adZ)11).tsubscript𝑟𝔤ad𝑥subscript𝑥𝐹ad𝑦subscript𝑦𝐺12tsubscript𝑟𝔤ad𝑥ad𝑥1ad𝑦ad𝑦1ad𝑍ad𝑍11{\mathrm{t}r}_{\mathfrak{g}}(\mathrm{ad}x\partial_{x}F+\mathrm{ad}y\partial_{y}G)=\frac{1}{2}{\mathrm{t}r}_{\mathfrak{g}}(\frac{\mathrm{ad}x}{\exp(\mathrm{ad}x)-1}+\frac{\mathrm{ad}y}{\exp(\mathrm{ad}y)-1}-\frac{\mathrm{ad}Z}{\exp(\mathrm{ad}Z)-1}-1). (2)

Cette conjecture combinatoire est démontrée dans l’article de Kashiwara-Vergne [KV] pour les algèbres de Lie résolubles. Elle fut démontrée pour sl(2)sl2\mathrm{sl}(2) par Rouvière [Rou1] et récemment par M. Vergne [Ve] dans le cas quadratique (on rappelle que quadratique veut dire qu’il existe une forme bilinéaire invariante et non dégénérée, mais on ne suppose pas que c’est la forme de Killing!). Il existe une conjecture analogue dans le cas des espaces symétriques [Rou2], [Rou3], [Rou4], [Rou5].

Cette égalité sur les traces peut sembler étrange mais elle est une conséquence naturelle de l’intégration par partie. Expliquons un peu tout ceci ce qui motivera le lecteur. Dans l’article de Kashiwara-Vergne une idée de base est de considérer la déformation naturelle de l’algèbre de Lie 𝔤𝔤\mathfrak{g} qui consiste à déformer le crochet [x,y]𝑥𝑦[x,y] en t[x,y]𝑡𝑥𝑦t[x,y]. Par exemple la série de Campbell-Hausdorff est changée en Zt(x,y)=1tZ(tx,ty)subscript𝑍𝑡𝑥𝑦1𝑡𝑍𝑡𝑥𝑡𝑦Z_{t}(x,y)=\frac{1}{t}Z(tx,ty).

On déduit facilement de l’équation (1) et de la formule de la différentielle de l’application exponentielle que l’on a une équation différentielle de la forme

tZt(x,y)=[x,Ft(x,y))]xZt+[y,Gt(x,y))]yZt\frac{\partial}{\partial t}Z_{t}(x,y)=[x,F_{t}(x,y))]\cdot\partial_{x}Z_{t}+[y,G_{t}(x,y))]\cdot\partial_{y}Z_{t} (3)

où on a noté Ft(x,y)=1tF(tx,ty)subscript𝐹𝑡𝑥𝑦1𝑡𝐹𝑡𝑥𝑡𝑦F_{t}(x,y)=\frac{1}{t}F(tx,ty).

Suite aux travaux de Dixmier-Kirillov-Duflo on apprend que l’analyse sur les groupes et algèbres de Lie ne porte pas sur les fonctions mais sur les demi-densités. On sait aussi depuis Harish-Chandra que l’objectif est de ramener par l’application exponentielle l’analyse sur les groupes à l’analyse sur les algèbres de Lie. Dans ce contexte la racine carrée du jacobien de l’application exponentielle intervient inévitablement. Notons comme à l’habitude par j(x)𝑗𝑥j(x) la fonction det𝔤((1exp(adx)adx)\det_{\mathfrak{g}}(\frac{(1-\exp(-\mathrm{ad}x)}{\mathrm{ad}x}) et par q(x)𝑞𝑥q(x) la fonction det𝔤(sinh(adx/2)adx/2)subscript𝔤ad𝑥2ad𝑥2\det_{\mathfrak{g}}(\frac{\sinh(\mathrm{ad}x/2)}{\mathrm{ad}x/2}). L’écart en ces deux fonctions n’est pas significatif dans cet article.

Il est bien connu que l’on a la formule suivante [KV]

j1/2(tx)tj1/2(tx)=12tr𝔤(adxexp(tadx)11t).superscript𝑗12𝑡𝑥𝑡superscript𝑗12𝑡𝑥12subscripttr𝔤ad𝑥𝑡ad𝑥11𝑡j^{-1/2}(tx)\frac{\partial}{\partial t}j^{1/2}(tx)=\frac{1}{2}\mathrm{tr}_{\mathfrak{g}}(\frac{\mathrm{ad}x}{\exp(t\mathrm{ad}x)-1}-\frac{1}{t}). (4)

On sait aussi depuis longtemps qu’il ne faut pas considérer les distributions comme un module à gauche sur les opérateurs différentiels mais comme un module à droite. Remarquons que ceci est bien connu des analystes algébriques. Un des buts de l’article de Kashiwara-Vergne était de démontrer que le produit de convolution se transporte par l’application exponentielle quand on se restreint à des distributions invariantes. Cette conjecture est démontrée dans sa totalité dans l’article [AST] (qui fait suite à [ADS]) en utilisant les méthodes de Kontsevich. On peut considérer cet article comme une suite naturelle de [AST]. Plus précisément il s’agissait de montrer que si u𝑢u et v𝑣v sont deux distributions invariantes au voisinage de 00 dans 𝔤𝔤\mathfrak{g} vérifiant une certaine condition de support afin d’assurer un sens à la convolution, on avait la formule suivante

u(x)v(y)j1/2(x)j1/2(y)j1/2(Z(x,y))f(Z(x,y))𝑑x𝑑y=u(x)v(y)f(x+y)𝑑x𝑑y𝑢𝑥𝑣𝑦superscript𝑗12𝑥superscript𝑗12𝑦superscript𝑗12𝑍𝑥𝑦𝑓𝑍𝑥𝑦differential-d𝑥differential-d𝑦𝑢𝑥𝑣𝑦𝑓𝑥𝑦differential-d𝑥differential-d𝑦\int u(x)v(y)\frac{j^{1/2}(x)j^{1/2}(y)}{j^{1/2}(Z(x,y))}f(Z(x,y))dxdy=\int u(x)v(y)f(x+y)dxdy (5)

pour f𝑓f une fonction Csuperscript𝐶C^{\infty} dans un voisinage de 00. Cette formule est démontrée dans [AST]. La stratégie initiée dans Kashiwara-Vergne était de tenir compte de la déformation en le paramètre t𝑡t et de démontrer que l’on avait la formule pour tout t𝑡t

u(x)v(y)j1/2(tx)j1/2(ty)j1/2(tZt(x,y))f(Zt(x,y))𝑑x𝑑y=u(x)v(y)f(x+y)𝑑x𝑑y.𝑢𝑥𝑣𝑦superscript𝑗12𝑡𝑥superscript𝑗12𝑡𝑦superscript𝑗12𝑡subscript𝑍𝑡𝑥𝑦𝑓subscript𝑍𝑡𝑥𝑦differential-d𝑥differential-d𝑦𝑢𝑥𝑣𝑦𝑓𝑥𝑦differential-d𝑥differential-d𝑦\int u(x)v(y)\frac{j^{1/2}(tx)j^{1/2}(ty)}{j^{1/2}(tZ_{t}(x,y))}f(Z_{t}(x,y))dxdy=\int u(x)v(y)f(x+y)dxdy. (6)

L’idée est maintenant simple, il suffit de dire que la dépendance en t𝑡t est triviale, c’est à dire que la dérivée par rapport à t𝑡t est nulle.

Calculons cette dérivée comme dans [KV]. Notons D(tx,ty)𝐷𝑡𝑥𝑡𝑦D(tx,ty) la fonction de densité

j1/2(tx)j1/2(ty)j1/2(tZt(x,y)).superscript𝑗12𝑡𝑥superscript𝑗12𝑡𝑦superscript𝑗12𝑡subscript𝑍𝑡𝑥𝑦\frac{j^{1/2}(tx)j^{1/2}(ty)}{j^{1/2}(tZ_{t}(x,y))}.

On peut remplacer j𝑗j par q𝑞q dans cette formule, la fonction de densité reste la même. On a facilement compte tenu des équations (3) et (4)

tD(tx,ty)=12tr𝔤(adxexp(tadx)1+adyexp(tady)1adZt(x,y)exp(tadZt(x,y))11t)D(tx,ty)+𝑡𝐷𝑡𝑥𝑡𝑦limit-from12subscripttr𝔤ad𝑥𝑡ad𝑥1ad𝑦𝑡ad𝑦1adsubscript𝑍𝑡𝑥𝑦𝑡adsubscript𝑍𝑡𝑥𝑦11𝑡𝐷𝑡𝑥𝑡𝑦\frac{\partial}{\partial t}D(tx,ty)=\frac{1}{2}\mathrm{tr}_{\mathfrak{g}}(\frac{\mathrm{ad}x}{\exp(t\mathrm{ad}x)-1}+\frac{\mathrm{ad}y}{\exp(t\mathrm{ad}y)-1}-\frac{\mathrm{ad}Z_{t}(x,y)}{\exp(t\mathrm{ad}Z_{t}(x,y))-1}-\frac{1}{t})D(tx,ty)+
[x,Ft(x,y))]xD(tx,ty)+[y,Gt(x,y))]yD(tx,ty).[x,F_{t}(x,y))]\cdot\partial_{x}D(tx,ty)+[y,G_{t}(x,y))]\cdot\partial_{y}D(tx,ty). (7)

Pour simplifier on va noter

T(x,y)=12tr𝔤(adxexp(adx)1+adyexp(ady)1adZ(x,y)exp(adZ(x,y))11).𝑇𝑥𝑦12subscripttr𝔤ad𝑥ad𝑥1ad𝑦ad𝑦1ad𝑍𝑥𝑦ad𝑍𝑥𝑦11T(x,y)=\frac{1}{2}\mathrm{tr}_{\mathfrak{g}}(\frac{\mathrm{ad}x}{\exp(\mathrm{ad}x)-1}+\frac{\mathrm{ad}y}{\exp(\mathrm{ad}y)-1}-\frac{\mathrm{ad}Z(x,y)}{\exp(\mathrm{ad}Z(x,y))-1}-1). (8)

Par conséquent le terme qui apparaît en (7) est 1tT(tx,ty)1𝑡𝑇𝑡𝑥𝑡𝑦\frac{1}{t}T(tx,ty). Ce calcul se justifie comme suit. Le premier terme résulte de la dérivée par rapport à t𝑡t dans les termes j1/2(t)j^{1/2}(t\cdot) et le second terme résulte de la dérivée en t𝑡t dans Ztsubscript𝑍𝑡Z_{t}. Plus précisément compte tenu de (3) il vient que pour toute fonction ϕitalic-ϕ\phi on a

tϕ(Zt(x,y))=[x,Ft(x,y))]xϕ(Zt(x,y))+[y,Gt(x,y))]yϕ(Zt(x,y)\frac{\partial}{\partial t}\phi(Z_{t}(x,y))=[x,F_{t}(x,y))]\cdot\partial_{x}\phi(Z_{t}(x,y))+[y,G_{t}(x,y))]\cdot\partial_{y}\phi(Z_{t}(x,y) (9)

Le champ de vecteur [x,Ft(x,y))]x+[y,Ft(x,y))]y[x,F_{t}(x,y))]\cdot\partial_{x}+[y,F_{t}(x,y))]\cdot\partial_{y} agit trivialement sur la fonction
j1/2(tx)j1/2(ty)superscript𝑗12𝑡𝑥superscript𝑗12𝑡𝑦j^{1/2}(tx)j^{1/2}(ty) car cette dernière est invariante en chaque variable sous l’action adjointe par conséquent la dérivée du terme en Ztsubscript𝑍𝑡Z_{t} s’écrit bien comme annoncée.

On peut maintenant terminer le calcul de la dérivée dans (6). Il vient

t(D(tx,ty)f(Zt(x,y)))=𝑡𝐷𝑡𝑥𝑡𝑦𝑓subscript𝑍𝑡𝑥𝑦absent\frac{\partial}{\partial t}(D(tx,ty)f(Z_{t}(x,y)))=
[x,Ft(x,y))]x(D(tx,ty)f(Zt(x,y)))+[y,Gt(x,y))]y(D(tx,ty)f(Zt(x,y)))+[x,F_{t}(x,y))]\cdot\partial_{x}(D(tx,ty)f(Z_{t}(x,y)))+[y,G_{t}(x,y))]\cdot\partial_{y}(D(tx,ty)f(Z_{t}(x,y)))+
1tT(tx,ty)D(tx,ty)f(Zt(x,y)).1𝑡𝑇𝑡𝑥𝑡𝑦𝐷𝑡𝑥𝑡𝑦𝑓subscript𝑍𝑡𝑥𝑦\frac{1}{t}T(tx,ty)D(tx,ty)f(Z_{t}(x,y)).

On est donc amené à calculer l’action à droite sur la distribution u(x)v(y)𝑢𝑥𝑣𝑦u(x)v(y) du champ de vecteur [x,Ft(x,y))]x+[y,Ft(x,y))]y[x,F_{t}(x,y))]\cdot\partial_{x}+[y,F_{t}(x,y))]\cdot\partial_{y}. Compte tenu de l’invariance de cette distribution on a

u(x)v(y)([x,Ft(x,y))]x+[y,Ft(x,y))]y)=u(x)v(y)tr𝔤(adxxFt(x,y)+adyyGt(x,y)).u(x)v(y)([x,F_{t}(x,y))]\cdot\partial_{x}+[y,F_{t}(x,y))]\cdot\partial_{y})=-u(x)v(y)\mathrm{tr}_{\mathfrak{g}}(\mathrm{ad}x\partial_{x}F_{t}(x,y)+\mathrm{ad}y\partial_{y}G_{t}(x,y)). (10)

Pour conclure au transport de la convolution dans (5) il suffit de demander que l’on ait

1tT(tx,ty)tr𝔤(adxxFt(x,y)+adyyGt(x,y))=0.1𝑡𝑇𝑡𝑥𝑡𝑦subscripttr𝔤ad𝑥subscript𝑥subscript𝐹𝑡𝑥𝑦ad𝑦subscript𝑦subscript𝐺𝑡𝑥𝑦0\frac{1}{t}T(tx,ty)-\mathrm{tr}_{\mathfrak{g}}(\mathrm{ad}x\partial_{x}F_{t}(x,y)+\mathrm{ad}y\partial_{y}G_{t}(x,y))=0. (11)

La conjecture combinatoire de Kashiwara-Vergne est précisément cette égalité.

1.2 Déformation de Kontsevich et résultats

Dans son article fondamental M. Kontsevich [Ko] introduit pour les variétés de Poisson une déformation formelle. Appliquée au cas du dual d’une algèbre de Lie on retrouve comme déformation de l’algèbre symétrique le star produit de Duflo, à savoir la symétrisation modifiée par l’opérateur (q1/2)superscript𝑞12\partial(q^{1/2}). D’une certaine manière on peut penser que l’on a rien de neuf. Toutefois le point intéressant est que les cœfficients apparaissant dans la formule de Campbell-Hausdorff se calculent à l’aide d’intégrales explicites. Compte tenu de la flexibilité naturelle de ces intégrales et de l’argument d’homotopie expliqué dans Kontsevich et repris dans [ADS], [AST] et [MT], on peut penser qu’il existe une version “à la Kontsevich” de la conjecture combinatoire.

Expliquons notre stratégie dans cette introduction.

En examinant la démonstration de Kashiwara-Vergne on s’aperçoit que le paramètre de déformation crée une dépendance en t𝑡t de la formule de Campbell-Hausdorff notée Ztsubscript𝑍𝑡Z_{t}. L’équation (3) relie la différentielle en t𝑡t de Ztsubscript𝑍𝑡Z_{t} à l’action d’un champ de vecteur. La formule (7) donne la dérivée en t𝑡t de la fonction de densité Dt(x,y)=D(tx,ty)subscript𝐷𝑡𝑥𝑦𝐷𝑡𝑥𝑡𝑦D_{t}(x,y)=D(tx,ty).

D’une certaine manière on pourrait dire que la conjecture de Kashiwara-Vergne est faite pour que l’on ait l’équation

tDt(x,y)=tr𝔤(adxxFt+adyyGt)Dt(x,y)+[x,Ft(x,y))]xDt(x,y)+[y,Gt(x,y))]yDt(x,y)\frac{\partial}{\partial t}D_{t}(x,y)=\mathrm{tr}_{\mathfrak{g}}(\mathrm{ad}x\partial_{x}F_{t}+\mathrm{ad}y\partial_{y}G_{t})D_{t}(x,y)+[x,F_{t}(x,y))]\cdot\partial_{x}D_{t}(x,y)+[y,G_{t}(x,y))]\cdot\partial_{y}D_{t}(x,y) (12)

puisque l’autre équation

tf(Zt(x,y))=[x,Ft(x,y))]xf(Zt(x,y))+[y,Gt(x,y))]yf(Zt(x,y))\frac{\partial}{\partial t}f(Z_{t}(x,y))=[x,F_{t}(x,y))]\cdot\partial_{x}f(Z_{t}(x,y))+[y,G_{t}(x,y))]\cdot\partial_{y}f(Z_{t}(x,y)) (13)

résulte automatiquement de l’équation

tZt(x,y)=[x,Ft(x,y))]xZt(x,y)+[y,Gt(x,y))]yZt(x,y).\frac{\partial}{\partial t}Z_{t}(x,y)=[x,F_{t}(x,y))]\cdot\partial_{x}Z_{t}(x,y)+[y,G_{t}(x,y))]\cdot\partial_{y}Z_{t}(x,y). (14)

Le problème cousin de Kashiwara-Vergne est donc celui-ci. Existe-t-il une autre déformation de la formule de Campbell-Hausdorff telle que les équations (14) et (12) soient vérifiées? On remarquera alors que ce résultat entraîne aussi que l’exponentielle transporte la convolution des distributions invariantes. En effet des équations (14) et (12) on déduit que l’on a

t(Dt(x,y)f(Zt(x,y)))=𝑡subscript𝐷𝑡𝑥𝑦𝑓subscript𝑍𝑡𝑥𝑦absent\frac{\partial}{\partial t}(D_{t}(x,y)f(Z_{t}(x,y)))=
[x,Ft(x,y))]x(Dt(x,y)f(Zt(x,y)))+[y,Gt(x,y))]y(Dt(x,y)f(Zt(x,y)))+[x,F_{t}(x,y))]\cdot\partial_{x}(D_{t}(x,y)f(Z_{t}(x,y)))+[y,G_{t}(x,y))]\cdot\partial_{y}(D_{t}(x,y)f(Z_{t}(x,y)))+
tr𝔤(adxxFt+adyyGt)Dt(x,y)f(Zt(x,y)).subscripttr𝔤ad𝑥subscript𝑥subscript𝐹𝑡ad𝑦subscript𝑦subscript𝐺𝑡subscript𝐷𝑡𝑥𝑦𝑓subscript𝑍𝑡𝑥𝑦\mathrm{tr}_{\mathfrak{g}}(\mathrm{ad}x\partial_{x}F_{t}+\mathrm{ad}y\partial_{y}G_{t})D_{t}(x,y)f(Z_{t}(x,y)). (15)

Comme précédemment, appliquée à des distributions invariantes u(x)v(y)𝑢𝑥𝑣𝑦u(x)v(y) l’équation (10) assurera que le membre de gauche dans (6) sera indépendant de t𝑡t.

On peut maintenant énoncer notre théorème. On note C¯2,0subscript¯𝐶2.0\overline{C}_{2,0} la variété de configuration de deux points aériens dans le demi-plan de Poincaré (on reviendra sur cette variété introduite par Kontsevich dans les paragraphes suivants).

Théorème: Il existe une déformation Zξ(x,y)subscript𝑍𝜉𝑥𝑦Z_{\xi}(x,y) de la formule de Campbell-Hausdorff Z(x,y)𝑍𝑥𝑦Z(x,y) dépendant d’un paramètre ξC¯2,0𝜉subscript¯𝐶2.0\xi\in\overline{C}_{2,0}, une déformation Dξ(x,y)subscript𝐷𝜉𝑥𝑦D_{\xi}(x,y) de la fonction de densité D(x,y)𝐷𝑥𝑦D(x,y). Il existe des 111-formes différentielles en ξ𝜉\xi dépendant de manière analytique de (x,y)𝑥𝑦(x,y) (dans un voisinage de 00) à valeurs dans 𝔤𝔤\mathfrak{g}, on les note ΩF(ξ,x,y)subscriptΩ𝐹𝜉𝑥𝑦\Omega_{F}(\xi,x,y) et ΩG(ξ,x,y)subscriptΩ𝐺𝜉𝑥𝑦\Omega_{G}(\xi,x,y). Les égalités suivantes sont alors vérifiées

dZξ(x,y)=[x,ΩF(ξ,x,y)]xZξ(x,y)+[y,ΩG(ξ,x,y)]yZξ(x,y)𝑑subscript𝑍𝜉𝑥𝑦𝑥subscriptΩ𝐹𝜉𝑥𝑦subscript𝑥subscript𝑍𝜉𝑥𝑦𝑦subscriptΩ𝐺𝜉𝑥𝑦subscript𝑦subscript𝑍𝜉𝑥𝑦dZ_{\xi}(x,y)=[x,\Omega_{F}(\xi,x,y)]\cdot\partial_{x}Z_{\xi}(x,y)+[y,\Omega_{G}(\xi,x,y)]\cdot\partial_{y}Z_{\xi}(x,y)

et

dDξ(x,y)=tr𝔤(adxxΩF(ξ,x,y)+adyyΩG(ξ,x,y))Dξ(x,y)𝑑subscript𝐷𝜉𝑥𝑦subscripttr𝔤ad𝑥subscript𝑥subscriptΩ𝐹𝜉𝑥𝑦ad𝑦subscript𝑦subscriptΩ𝐺𝜉𝑥𝑦subscript𝐷𝜉𝑥𝑦dD_{\xi}(x,y)=\mathrm{tr}_{\mathfrak{g}}(\mathrm{ad}x\partial_{x}\Omega_{F}(\xi,x,y)+\mathrm{ad}y\partial_{y}\Omega_{G}(\xi,x,y))D_{\xi}(x,y)
+[x,ΩF(ξ,x,y)]xDξ(x,y)+[y,ΩG(ξ,x,y)]yDξ(x,y).𝑥subscriptΩ𝐹𝜉𝑥𝑦subscript𝑥subscript𝐷𝜉𝑥𝑦𝑦subscriptΩ𝐺𝜉𝑥𝑦subscript𝑦subscript𝐷𝜉𝑥𝑦+[x,\Omega_{F}(\xi,x,y)]\cdot\partial_{x}D_{\xi}(x,y)+[y,\Omega_{G}(\xi,x,y)]\cdot\partial_{y}D_{\xi}(x,y).

En appliquant ce théorème le long d’un chemin reliant le coin de l’oeil à l’iris (comme dans [ADS]) on retrouve une déformation dépendant d’un paramètre t𝑡t comme dans Kashiwara-Vergne. La conclusion est donc qu’il existe de nombreuses déformations de la formule de Campbell-Hausdorff qui fournissent automatiquement la condition des traces. Malheureusement ces déformations ne se font pas dans la catégorie des algèbres de Lie, c’est à dire que la fonction Zξ(x,y)subscript𝑍𝜉𝑥𝑦Z_{\xi}(x,y) n’est pas la formule de Campbell-Hausdorff d’une algèbre de Lie. En d’autres termes on n’a pas

Zξ(Zξ(x,y),w)=Zξ(x,Zξ(y,w)).subscript𝑍𝜉subscript𝑍𝜉𝑥𝑦𝑤subscript𝑍𝜉𝑥subscript𝑍𝜉𝑦𝑤Z_{\xi}(Z_{\xi}(x,y),w)=Z_{\xi}(x,Z_{\xi}(y,w)).

Comme corollaire de notre théorème on obtient bien évidemment que l’exponentielle transporte la convolution des distributions invariantes (voir [KV], [ADS] et [AST] pour les conséquences en algèbre et en analyse de ce théorème).

2 Rappels sur la quantification de Kontsevich

Dans cette section on va rappeler rapidement la construction de M. Kontsevich pour la quantification formelle des variétés de Poisson lorsqu’on l’applique au cas des structures de Poisson linéaires, c’est à dire dans le cas du dual des algèbres de Lie.

2.1 Espaces de configurations

On note par Cn,msubscript𝐶𝑛𝑚C_{n,m} l’espace des configurations de n𝑛n points distincts dans le demi-plan de Poincaré (ce sont les points aériens) et m𝑚m points distincts sur la droite réelle (ce sont les points terrestres), modulo l’action du groupe az+b𝑎𝑧𝑏az+b (pour aIR+,bIRformulae-sequence𝑎IsuperscriptRabsent𝑏IRa\in\mathrm{I\!R}^{+*},b\in\mathrm{I\!R}). Compte tenu de l’action de ce groupe sur les points réels, on peut identifier deux des points réels aux points 00 et 111 (à condition que l’on ait m2𝑚2m\geq 2, sinon on peut identifier un des points aériens au complexe i𝑖i). Dans son article [Ko] M. Kontsevich construit des compactifications de ces variétés notées C¯n,msubscript¯𝐶𝑛𝑚\overline{C}_{n,m}. Ce sont des variétés à coins de dimension 2n+m22𝑛𝑚22n+m-2. Ces variétés ne sont pas connexes pour m2𝑚2m\geq 2. On notera par C¯n,m+subscriptsuperscript¯𝐶𝑛𝑚\overline{C}^{+}_{n,m} la composante qui contient les configurations où les points terrestres sont ordonnés dans l’ordre croissant (ie on a 1¯<2¯<<m¯¯1¯2¯𝑚\overline{1}<\overline{2}<\cdots<\overline{m}).

Refer to caption
Figure 1: L’oeil de Kontsevich C¯2,0+subscriptsuperscript¯𝐶2.0\overline{C}^{+}_{2,0} et son chemin

2.2 Graphes admissibles

La notion de graphes admissibles est maintenant bien établie dans la littérature. En l’occurrence on notera Gn,2subscript𝐺𝑛.2G_{n,2} les graphes avec n𝑛n points de première espèce et numérotés 1,2n1.2𝑛1,2\cdots n (points aériens) et 222 points de seconde espèce (points terrestres) numérotés 1¯,2¯¯1¯2\overline{1},\overline{2}. Les graphes qui interviennent dans le cas variétés de Poisson, sont des graphes tels que de tout point aérien i𝑖i partent deux arêtes numérotées (eia,eib)superscriptsubscript𝑒𝑖𝑎superscriptsubscript𝑒𝑖𝑏(e_{i}^{a},e_{i}^{b}), mais il n’y a pas d’arêtes qui bouclent et il n’y a pas d’arêtes doubles. On note EΓsubscript𝐸ΓE_{\Gamma} l’ensemble des arêtes du graphe ΓΓ\Gamma.

Refer to caption
Figure 2: Graphe admissible de type Lie

Dans le cas des algèbres de Lie, chaque sommet de première espèce ne peut recevoir qu’au plus une arête: ce sont les graphes pertinents (relevant graphs) et on renvoie le lecteur à l’article [AST] pour une description précise des graphes pertinents qui interviennent dans la formule finale.

Quand on a un produit de Poisson disons α𝛼\alpha sur IRdIsuperscriptR𝑑\mathrm{I\!R}^{d}, on peut alors associer à tout graphe admissible un opérateur bi-différentiel sur IRdIsuperscriptR𝑑\mathrm{I\!R}^{d} comme expliqué dans [Ko]. On notera BΓ(f,g)subscript𝐵Γ𝑓𝑔B_{\Gamma}(f,g) l’opérateur bidifférentiel associé que l’on suppose agir sur les fonctions f𝑓f et g𝑔g. Expliquons par souci de concision la formule. Sur chaque sommet aérien on met le crochet de Poisson et sur les sommets terrestres on met les fonctions f𝑓f et g𝑔g. Chaque arête arrivant sur un sommet dérive la fonction associée au sommet. On multiplie les fonctions ainsi obtenues et on somme sur toutes les possibilités. Concrètement la formule est la suivante. Pour chaque arête e𝑒e, on note par s(e)𝑠𝑒s(e) le point aérien source (départ) et par b(e)𝑏𝑒b(e) le point but (arrivée). Dans la formule ci-dessous I𝐼I décrit l’ensemble les applications de l’ensemble des arêtes EΓsubscript𝐸ΓE_{\Gamma} dans l’ensemble des indices de coordonnées {1,d}1𝑑\{1,\cdots d\}.

BΓ,α(f,g)=I[k=1n(eEΓ,b(e)=kI(e))αI(eka)I(ekb)](eEΓ,b(e)=1¯I(e))f(eEΓ,b(e)=2¯I(e))g.subscript𝐵Γ𝛼𝑓𝑔subscript𝐼delimited-[]superscriptsubscriptproduct𝑘1𝑛subscriptproductformulae-sequence𝑒subscript𝐸Γ𝑏𝑒𝑘subscript𝐼𝑒superscript𝛼𝐼superscriptsubscript𝑒𝑘𝑎𝐼superscriptsubscript𝑒𝑘𝑏subscriptproductformulae-sequence𝑒subscript𝐸Γ𝑏𝑒¯1subscript𝐼𝑒𝑓subscriptproductformulae-sequence𝑒subscript𝐸Γ𝑏𝑒¯2subscript𝐼𝑒𝑔B_{\Gamma,\alpha}(f,g)=\sum_{I}\bigg{[}\prod_{k=1}^{n}\big{(}\prod_{e\in E_{\Gamma},b(e)=k}\partial_{I(e)}\big{)}\alpha^{I(e_{k}^{a})I(e_{k}^{b})}\bigg{]}\big{(}\prod_{e\in E_{\Gamma},b(e)=\overline{1}}\partial_{I(e)}\big{)}f\big{(}\prod_{e\in E_{\Gamma},b(e)=\overline{2}}\partial_{I(e)}\big{)}g.

2.3 Forme d’angles

Soient deux points distincts (p,q)𝑝𝑞(p,q) dans le demi-plan de Poincaré muni de la métrique de Lobachevsky. On note

ϕ(p,q)=12ilog((qp)(q¯p)(qp¯)(q¯p¯)).italic-ϕ𝑝𝑞12𝑖𝑞𝑝¯𝑞𝑝𝑞¯𝑝¯𝑞¯𝑝\phi(p,q)=\frac{1}{2i}\log(\frac{(q-p)(\overline{q}-p)}{(q-\overline{p})(\overline{q}-\overline{p})}). (16)

C’est l’angle entre la géodésique (p,)𝑝(p,\infty) et (p,q)𝑝𝑞(p,q) où l’infini peut être vu comme l’infini sur la droite réelle. Quand on prend comme modèle du demi-plan de Poincaré le disque unité alors l’infini en question est bien-sûr le point manquant sur le cercle unité. Géométriquement la géodésique (p,)𝑝(p,\infty) est tout simplement la demi-droite verticale issue de p𝑝p.

Refer to caption
Figure 3: Fonction d’angle

La fonction d’angle s’étend en une fonction régulière à la compactification C¯2,0subscript¯𝐶2.0\overline{C}_{2,0}. Cette dernière est précisément décrite dans l’article de Kontsevich, c’est le fameux “oeil”(figure [1]). On remarquera, mais c’est tautologique vu la construction des compactifications que lorsque les points p,q𝑝𝑞p,q s’approchent selon un angle θ𝜃\theta, la fonction d’angle vaut précisément cet angle. Lorsque p𝑝p s’approche de l’axe réel, la fonction d’angle est nulle et lorsque c’est q𝑞q qui s’approche de l’axe réel on obtient deux fois l’angle de demi-droite avec l’axe réel.

Refer to caption
Figure 4: Valeur de la fonction d’angle le long de la paupière

Dans [Ko] il est expliqué que l’on peut prendre n’importe qu’elle fonction d’angle pour peu qu’elle vérifie certaines propriétés, mieux encore on peut même préférer une autre forme différentielle [Ko2].

Bref, comme la fonction est régulière sur la compactification, on peut considérer sa différentielle qui est alors une 111-forme sur C¯2,0subscript¯𝐶2.0\overline{C}_{2,0}.

2.4 Poids associé à un graphe

Si ΓΓ\Gamma est un graphe dans Gn,2subscript𝐺𝑛.2G_{n,2}, alors toute arête e𝑒e définit par restriction une fonction d’angle notée ϕesubscriptitalic-ϕ𝑒\phi_{e} sur la variété C¯n,2+subscriptsuperscript¯𝐶𝑛.2\overline{C}^{+}_{n,2}. Le produit ordonné

ΩΓ=eEΓdϕesubscriptΩΓsubscript𝑒subscript𝐸Γ𝑑subscriptitalic-ϕ𝑒\Omega_{\Gamma}=\bigwedge_{e\in E_{\Gamma}}d\phi_{e} (17)

est donc une 2n2𝑛2n-forme sur C¯n,2+subscriptsuperscript¯𝐶𝑛.2\overline{C}^{+}_{n,2} qui est de dimension aussi 2n2𝑛2n. Le poids associé sera donc

wΓ=1(2π)2nC¯n,2+ΩΓ.subscript𝑤Γ1superscript2𝜋2𝑛subscriptsubscriptsuperscript¯𝐶𝑛.2subscriptΩΓw_{\Gamma}=\frac{1}{(2\pi)^{2n}}\int_{\overline{C}^{+}_{n,2}}\Omega_{\Gamma}. (18)

2.5 Formule de Quantification

Dans le cas des structures de Poisson sur IRdIsuperscriptR𝑑\mathrm{I\!R}^{d}, la formule de Kontsevich s’écrit en terme des ingrédients introduits de la façon suivante. Pour f𝑓f et g𝑔g deux fonctions polynomiales sur IRdIsuperscriptR𝑑\mathrm{I\!R}^{d} on a

fhg=fg+n=1n=hnn!ΓGn,2wΓBΓ(f,g)subscript𝑓𝑔𝑓𝑔superscriptsubscript𝑛1𝑛superscript𝑛𝑛subscriptΓsubscript𝐺𝑛.2subscript𝑤Γsubscript𝐵Γ𝑓𝑔f\star_{h}g=fg+\sum_{n=1}^{n=\infty}\frac{h^{n}}{n!}\sum_{\Gamma\in G_{n,2}}w_{\Gamma}B_{\Gamma}(f,g) (19)

avec hh un paramètre formel. Dans le cas des algèbres de Lie l’ordre des opérateurs BΓsubscript𝐵ΓB_{\Gamma} est suffisamment croissant et la formule ci-dessus est en fait une somme finie. En faisant h=11h=1 ce star produit vérifie pour f=x𝑓𝑥f=x et g=y𝑔𝑦g=y la relation souhaitée

xyyx=[x,y]𝑥𝑦𝑦𝑥𝑥𝑦x\star y-y\star x=[x,y]

lorsque l’on prend pour crochet de Poisson la moitié du crochet de Lie.

3 La formule Campbell-Hausdorff

3.1 La formule Campbell-Hausdorff en termes de diagrammes

Comme dans [AST] ou [Ka] la formule de Kontsevich appliquée au cas des algèbres de Lie donne le résultat suivant. Tout graphe admissible pertinent se décompose en produit de graphes simples. Chaque graphe simple est soit de type Lie i.e. un graphe avec une seule racine et sans roue (le graphe est un arbre comme dans la figure [2]) soit un graphe de type roue (ie une roue tentaculaire comme dans la figure [5]).

Dans [AST] on a associé un symbole à chaque graphe, on notera abusivement Γ(x,y)Γ𝑥𝑦\Gamma(x,y) le symbole associé au graphe ΓΓ\Gamma. Par exemple le symbole associé au graphe de la figure[ 2] est Γ(x,y)=[[x,[x,y]],y]Γ𝑥𝑦𝑥𝑥𝑦𝑦\Gamma(x,y)=[[x,[x,y]],y] et le symbole associé au graphe de la figure [5] est tr(adxad[x,y]adyady)trad𝑥ad𝑥𝑦ad𝑦ad𝑦\mathrm{tr}(\mathrm{ad}x\mathrm{ad}[x,y]\mathrm{ad}y\mathrm{ad}y). Le symbole est une fonction polynomiale de 𝔤×𝔤𝔤𝔤\mathfrak{g}\times\mathfrak{g} dans S[𝔤]𝑆delimited-[]𝔤S[\mathfrak{g}].

Lorsque le graphe est simple et de type Lie, alors Γ(x,y)Γ𝑥𝑦\Gamma(x,y) est naturellement un élément de l’algèbre de Lie engendrée par x𝑥x et y𝑦y.

Comme démontré dans [Ka], la formule Campbell-Hausdorff s’écrit pour x𝑥x et y𝑦y dans 𝔤𝔤\mathfrak{g}

Z(x,y)=x+y+ΓwΓΓ(x,y)𝑍𝑥𝑦𝑥𝑦subscriptΓsubscript𝑤ΓΓ𝑥𝑦Z(x,y)=x+y+\sum_{\Gamma}w_{\Gamma}\Gamma(x,y) (20)

où la somme porte sur l’ensemble des graphes “géométriques” simples et de type Lie. Les graphes qui contribuent de manière non triviale dans cette formule n’ont donc qu’une racine et ne possèdent pas de symétries. Par conséquent les graphes numérotés associés à un graphe géométrique sont au nombre de n!2n𝑛superscript2𝑛n!2^{n}. Le terme n!𝑛n! disparaît dans la formule finale car dans la formule de Kontsevich (19) on avait un terme en 1/n!1𝑛1/n! et le terme 2nsuperscript2𝑛2^{n} disparaît aussi car on prend dans le cas des algèbres de Lie pour crochet de Poisson 1212\frac{1}{2} du crochet de Lie. Toutefois le symbole Γ(x,y)Γ𝑥𝑦\Gamma(x,y) est mal défini si le graphe n’est pas numéroté. Pour résoudre ce problème il suffit de remarquer que c’est aussi le cas pour le cœfficient wΓsubscript𝑤Γw_{\Gamma} et que les deux difficultés se compensent.

Refer to caption
Figure 5: Graphe simple de type Roue

3.2 Commentaires

Les symboles Γ(x,y)Γ𝑥𝑦\Gamma(x,y) ne forment pas une base de l’algèbre de Lie libre engendrée par x𝑥x et y𝑦y, par conséquent il y a des redondances dans la formule, mais c’est aussi le cas quand on utilise d’autres formules donnant Campbell-Hausdorff.

La nature des cœfficients wΓsubscript𝑤Γw_{\Gamma} reste mystérieuse. Les termes associés aux produits du genre [x,[x,[x,,[x,y]]]]𝑥𝑥𝑥𝑥𝑦[x,[x,[x,\cdots,[x,y]]]] sont des nombres de Bernoulli comme tout le monde le sait, puisque ces termes calculent la différentielle de l’application exponentielle. C’est aussi le cas pour les cœfficients de Kontsevich comme remarqué dans [Ka]. La différentielle de l’application exponentielle vaut

1exp(adx)adx,1𝑎𝑑𝑥𝑎𝑑𝑥\frac{1-\exp(-adx)}{adx},

il vient que l’on a à l’ordre 111 en y𝑦y

Z(x,y)=x+adx1exp(adx)y.𝑍𝑥𝑦𝑥𝑎𝑑𝑥1𝑎𝑑𝑥𝑦Z(x,y)=x+\frac{adx}{1-\exp(-adx)}\cdot y. (21)

Par ailleurs il n’y a qu’une seule façon d’écrire un terme de type Lie où n’intervient qu’une seule fois y𝑦y. Ce point est essentiel, car il permet de conclure que les cœfficients wΓsubscript𝑤Γw_{\Gamma} sont aussi de Bernoulli. Ce n’est plus le cas pour les autres. On ne peut pas a priori affirmer que les nombres wΓsubscript𝑤Γw_{\Gamma} sont tous rationnels et je ne sais pas si c’est le cas. Quand les graphes sont plus généraux on sait que ces nombres ne sont pas rationnels [Ko2]. La conclusion est que les termes non rationnels se compensent à cause de l’identité de Jacobi. En conséquence on considère une écriture de Campbell-Hausdorff qui a le gros inconvénient de n’être pas a priori une expression rationnelle (bien-sûr la somme peut se réécrire sous forme rationnelle!).

Compte tenu de cette remarque, on voit que la déformation que l’on va proposer est largement différente de celle proposée dans Kashiwara-Vergne, qui restait rationnelle et dans la catégorie des algèbres de Lie.

3.3 Analyse des termes d’ordre 111 dans l’équation de Kashiwara-Vergne

Compte tenu de l’équation

tZt(x,y)=[x,Ft(x,y))]xZt+[y,Gt(x,y))]yZt,\frac{\partial}{\partial t}Z_{t}(x,y)=[x,F_{t}(x,y))]\cdot\partial_{x}Z_{t}+[y,G_{t}(x,y))]\cdot\partial_{y}Z_{t}, (22)

d’où viennent les termes d’ordre 111 en y𝑦y dans la dérivée tZt(x,y)𝑡subscript𝑍𝑡𝑥𝑦\frac{\partial}{\partial t}Z_{t}(x,y)?

Par symétrie Kashiwara-Vergne montrent que l’on peut prendre

F(x,y)=G(y,x)𝐹𝑥𝑦𝐺𝑦𝑥F(x,y)=G(-y,-x). On voit facilement que l’on a F(x,y)=14y+𝐹𝑥𝑦14𝑦F(x,y)=\frac{1}{4}y+\cdots et G(x,y)=14x+𝐺𝑥𝑦14𝑥G(x,y)=-\frac{1}{4}x+\cdots.

Ecrivons pour simplifier à l’ordre 111 en y𝑦y

Z(x,y)=x+adx1exp(adx)y=x+n0bnadn(x)y.𝑍𝑥𝑦𝑥𝑎𝑑𝑥1𝑎𝑑𝑥𝑦𝑥subscript𝑛0subscript𝑏𝑛superscriptad𝑛𝑥𝑦Z(x,y)=x+\frac{adx}{1-\exp(-adx)}\cdot y=x+\sum_{n\geq 0}b_{n}\mathrm{ad}^{n}(x)y. (23)

il vient

tZt(x,y)=n1ntn1bnadn(x)y𝑡subscript𝑍𝑡𝑥𝑦subscript𝑛1𝑛superscript𝑡𝑛1subscript𝑏𝑛superscriptad𝑛𝑥𝑦\frac{\partial}{\partial t}Z_{t}(x,y)=\sum_{n\geq 1}nt^{n-1}b_{n}\mathrm{ad}^{n}(x)y (24)

Or le terme [x,Ft(x,y))]xZt(x,y)[x,F_{t}(x,y))]\cdot\partial_{x}Z_{t}(x,y) contribue (à l’ordre 111 en y𝑦y toujours) comme [x,Ft(x,y))]xx[x,F_{t}(x,y))]\cdot\partial_{x}x c’est à dire [x,Ft(x,y))][x,F_{t}(x,y))] (car le terme en y𝑦y est forcément dans le crochet [x,Ft(x,y))][x,F_{t}(x,y))]). Ecrivons

F(x,y)=dntnadn(x)y𝐹𝑥𝑦subscript𝑑𝑛superscript𝑡𝑛superscriptad𝑛𝑥𝑦F(x,y)=\sum d_{n}t^{n}\mathrm{ad}^{n}(x)y

avec d0=14subscript𝑑014d_{0}=\frac{1}{4}.

Le terme [y,Gt(x,y))]yZt(x,y)[y,G_{t}(x,y))]\cdot\partial_{y}Z_{t}(x,y) contribue comme

[y,14x]ybntnadn(x)y=bntn4adn(x)[x,y].𝑦14𝑥subscript𝑦subscript𝑏𝑛superscript𝑡𝑛superscriptad𝑛𝑥𝑦subscript𝑏𝑛superscript𝑡𝑛4superscriptad𝑛𝑥𝑥𝑦[y,-\frac{1}{4}x]\cdot\partial_{y}\sum b_{n}t^{n}\mathrm{ad}^{n}(x)y=\sum\frac{b_{n}t^{n}}{4}\mathrm{ad}^{n}(x)[x,y].

On en déduit la relation de récurrence

(n+1)bn+1=dn+bn4𝑛1subscript𝑏𝑛1subscript𝑑𝑛subscript𝑏𝑛4(n+1)b_{n+1}=d_{n}+\frac{b_{n}}{4}

avec

b0=1,b1=12,b2=112,b3=0,b4=1720.formulae-sequencesubscript𝑏01formulae-sequencesubscript𝑏112formulae-sequencesubscript𝑏2112formulae-sequencesubscript𝑏30subscript𝑏41720b_{0}=1,b_{1}=\frac{1}{2},b_{2}=\frac{1}{12},b_{3}=0,b_{4}=\frac{1}{720}.

Il vient alors

d0=14,d1=124,d3=148,d4=1180.formulae-sequencesubscript𝑑014formulae-sequencesubscript𝑑1124formulae-sequencesubscript𝑑3148subscript𝑑41180d_{0}=\frac{1}{4},d_{1}=\frac{1}{24},d_{3}=-\frac{1}{48},d_{4}=-\frac{1}{180}.

La situation sera comme on va le voir beaucoup plus directe dans notre formule mais restera quand même dans cet esprit. Remarquons aussi que l’on a pu faire le calcul ci-dessus car il y a unicité dans l’écriture des éléments de type Lie ne contenant qu’une seule fois y𝑦y.

4 Déformation des cœfficients dans Campbell-Hausdorff

L’idée est très simple. Au lieu de déformer le crochet de Lie comme dans Kashiwara-Vergne, on va déformer les cœfficients. Ceci est possible et naturel dans la mesure où ces derniers se calculent grace à des intégrales.

Plus précisément, au lieu de prendre un graphe ΓΓ\Gamma dans Gn,2subscript𝐺𝑛.2G_{n,2} prenons ce même graphe géométrique mais dans Gn+2,0subscript𝐺𝑛2.0G_{n+2,0}. C’est l’argument de base de la déformation homotopique dans Kontsevich. On fixe donc un point ξ𝜉\xi dans C¯2,0+subscriptsuperscript¯𝐶2.0\overline{C}^{+}_{2,0} représentant les points n+1,n+2𝑛1𝑛2n+1,n+2. On peut alors intégrer la forme différentielle associée au nouveau graphe lorsqu’on suppose que le point ξ𝜉\xi est fixe. En terme simple, on intègre selon les n𝑛n premiers points ce qui fait toujours 2n2𝑛2n dimensions. On pose alors wΓ(ξ)subscript𝑤Γ𝜉w_{\Gamma}(\xi) pour le résultat obtenu. Lorsque le point ξ𝜉\xi vaut le point (0,1)0.1(0,1) on retrouve le cœfficient de Kontsevich. La dépendance en ξ𝜉\xi est régulière au sens des variétés à coins et on dispose d’une majoration uniforme en ξ𝜉\xi de ce cœfficient comme dans [ADS].

Refer to caption
Figure 6: Graphe associé à une roue pure dans le demi-plan de Poincaré

Lorsque le point ξ𝜉\xi est sur l’iris de l’oeil c’est à dire que les deux points sont infiniment proche selon un angle donné, on trouve 00. En effet les seuls cœfficients non nuls seraient ceux correspondant à des roues de vélo (figure [6]) avec les rayons dirigées vers le point ξ𝜉\xi, mais Shoikhet [Sh] a montré que ces termes sont aussi nuls dans le cas des algèbres de Lie.

On dispose maintenant comme dans [ADS] d’une produit non associatif

fξg=n,ΓGn,2wΓ(ξ)n!BΓ(f,g)subscript𝜉𝑓𝑔subscript𝑛Γsubscript𝐺𝑛.2subscript𝑤Γ𝜉𝑛subscript𝐵Γ𝑓𝑔f\star_{\xi}g=\sum_{n,\Gamma\in G_{n,2}}\frac{w_{\Gamma}(\xi)}{n!}B_{\Gamma}(f,g) (25)

où on place la fonctions f𝑓f en n+1𝑛1n+1 et la fonction g𝑔g en n+2𝑛2n+2. La formule commence par le produit fg𝑓𝑔fg si l’on admet que pour n=0𝑛0n=0 le poids associé au graphe sans point aérien est 111, mais il est plus commode d’écrire

fξg=fg+n1,ΓGn,2wΓ(ξ)n!BΓ(f,g).subscript𝜉𝑓𝑔𝑓𝑔subscriptformulae-sequence𝑛1Γsubscript𝐺𝑛.2subscript𝑤Γ𝜉𝑛subscript𝐵Γ𝑓𝑔f\star_{\xi}g=fg+\sum_{n\geq 1,\Gamma\in G_{n,2}}\frac{w_{\Gamma}(\xi)}{n!}B_{\Gamma}(f,g). (26)

Par suite on dispose d’une déformation de la formule de Campbell-Hausdorff

Zξ(x,y)=x+y+ΓwΓ(ξ)Γ(x,y)subscript𝑍𝜉𝑥𝑦𝑥𝑦subscriptΓsubscript𝑤Γ𝜉Γ𝑥𝑦Z_{\xi}(x,y)=x+y+\sum_{\Gamma}w_{\Gamma}(\xi)\Gamma(x,y) (27)

où la somme porte sur les graphes simples de type Lie c’est à dire les graphes géométriques avec une seule racine. Dans cette formule on n’a plus besoin de considérer des graphes numérotés. C’est ce que l’on a appelé les graphes géométriques.
Compte tenu des résultats de Shoikhet on a ZξIris(x,y)=x+ysubscript𝑍𝜉Iris𝑥𝑦𝑥𝑦Z_{\xi\in\mathrm{Iris}}(x,y)=x+y et Zξ=(0,1)(x,y)=Z(x,y)subscript𝑍𝜉0.1𝑥𝑦𝑍𝑥𝑦Z_{\xi=(0,1)}(x,y)=Z(x,y).

Le point nouveau ici et c’est plus ou moins l’objet de cet article, c’est que ce nous allons calculer directement la dérivée par rapport à ξ𝜉\xi. C’est naturel et c’est de manière indirecte ce qui fut déjà fait dans [ADS] et [AST]. On va voir qu’il vient une équation différentielle.

4.1 Calcul de la dérivée

Lorsque l’on veut calculer la différentielle de wξsubscript𝑤𝜉w_{\xi} on écrit wνwξsubscript𝑤𝜈subscript𝑤𝜉w_{\nu}-w_{\xi} et on fait tendre ν𝜈\nu vers ξ𝜉\xi, ce qui revient à prendre un chemin infinitésimal dans l’oeil de Kontsevich de ξ𝜉\xi vers ν𝜈\nu. Le raisonnement de base fait de nombreuses fois est donc d’écrire la formule de Stokes comme dans [ADS] mais cette fois sur un chemin infinitésimal.

Les mêmes types de composantes sont à étudier. On ne doit regarder, pour des raisons de dimension (voir [MT] pour une étude plus précise sur le cup-produit), que les regroupements de deux points aériens. En bref le calcul de la dérivée des cœfficients s’obtient en contractant les arêtes.

Toutefois lorsqu’on s’intéresse à la somme partielle

ΓwΓ(ξ)Γ(x,y)subscriptΓsubscript𝑤Γ𝜉Γ𝑥𝑦\sum_{\Gamma}w_{\Gamma}(\xi)\Gamma(x,y)

ΓΓ\Gamma est un graphe simple de type Lie avec n+2𝑛2n+2 sommets aériens dont 222 représentent le point ξ𝜉\xi, il y aura une simplification à cause de l’identité de Jacobi.

Refer to caption
Figure 7: Graphe type obtenu quand un point s’agglutine sur zn+1subscript𝑧𝑛1z_{n+1}

Décrivons les différents termes significatifs qui apparaissent dans le calcul de la dérivée.

  1. 1.

    Lorsque deux points autres que (zn+1,zn+2)=ξsubscript𝑧𝑛1subscript𝑧𝑛2𝜉(z_{n+1},z_{n+2})=\xi se rapprochent, l’identité de Jacobi montre que la contribution de ce terme est nul. On remarquera ici que la nullité est dû à l’identité de Jacobi pour les symboles Γ(x,y)Γ𝑥𝑦\Gamma(x,y).

  2. 2.

    Lorsque un point s’approche de zn+1subscript𝑧𝑛1z_{n+1} on obtient un graphe type comme à la figure [7].

  3. 3.

    Lorsque un point s’approche de zn+2subscript𝑧𝑛2z_{n+2} on obtient une situation analogue.

Remarquons encore une fois qu’il y a d’autres composantes de bord (des points aériens pourraient s’agglutiner sur l’axe réel par exemple). mais celles-ci ne contribuent pas dans la dérivée du cœfficient.

Il faut comprendre maintenant que les arêtes issue de zn+1subscript𝑧𝑛1z_{n+1} ou arrivant sur zn+1subscript𝑧𝑛1z_{n+1} ou zn+2subscript𝑧𝑛2z_{n+2} contribuent pour la forme différentielle totale comme une dérivée sur ξ𝜉\xi. L’arête issue de zn+1subscript𝑧𝑛1z_{n+1} va sur la racine d’un sous graphe de type Lie (et simple forcément). On va noter A𝐴A ce sous-graphe et on note B𝐵B le graphe obtenu en enlevant le sous-graphe A𝐴A et l’arête qui joint zn+1subscript𝑧𝑛1z_{n+1} à A𝐴A (voir figure [8]). La forme associée au graphe type est une (2n2)2𝑛2(2n-2)-forme à valeurs dans les 111-formes en ξ𝜉\xi. On peut donc intégrer cette (2n2)2𝑛2(2n-2)-forme sur les configurations de n1𝑛1n-1 points dans le demi-plan de Poincaré. On note wA,Bx(ξ)superscriptsubscript𝑤𝐴𝐵𝑥𝜉w_{A,B}^{x}(\xi) la 111-forme obtenue après intégration. L’exposant x𝑥x est là pour rappeler qu’un point s’est agglutiné sur zn+1subscript𝑧𝑛1z_{n+1} et qu’il y a une arête du point zn+1subscript𝑧𝑛1z_{n+1} vers la racine de A𝐴A. De manière analogue on laissera un exposant y𝑦y dans le cas où un point s’agglutine sur zn+2subscript𝑧𝑛2z_{n+2}. La proposition clé est la suivante.

Proposition 1.

On a wA,Bx(ξ)=wB(ξ)wAx(ξ)superscriptsubscript𝑤𝐴𝐵𝑥𝜉subscript𝑤𝐵𝜉superscriptsubscript𝑤𝐴𝑥𝜉w_{A,B}^{x}(\xi)=w_{B}(\xi)w_{A}^{x}(\xi).

Preuve: Il faut remarquer d’abord que les graphes A𝐴A et B𝐵B sont indépendants, c’est à dire que les seuls sommets d’intersection sont les points zn+1,zn+2subscript𝑧𝑛1subscript𝑧𝑛2z_{n+1},z_{n+2}. Cela résulte de [AST] sur la nature géométrique des graphes dans le cas des algèbres de Lie.

Maintenant les termes qui contribuent pour la 111-forme en ξ𝜉\xi proviennent soit de A𝐴A soit de B𝐵B. Considérons une contribution issue de B𝐵B, on garde alors une des arêtes arrivant sur zn+1subscript𝑧𝑛1z_{n+1} ou zn+2subscript𝑧𝑛2z_{n+2} comme différentielle en ξ𝜉\xi, ce qui montre qu’il va nous manquer une dimension pour intégrer sur les configurations des sommets de B𝐵B. La conclusion est que pour les configurations des points de B𝐵B on intègre à ξ𝜉\xi constant, ce qui donne wB(ξ)subscript𝑤𝐵𝜉w_{B}(\xi). Ce qui reste est alors le terme wAx(ξ)superscriptsubscript𝑤𝐴𝑥𝜉w_{A}^{x}(\xi) et qui contient toute la partie différentielle en ξ𝜉\xi.\Box

Refer to caption
Figure 8: Le graphe type de la figure [7] se décompose naturellement

Précisons ici que wAx(ξ)superscriptsubscript𝑤𝐴𝑥𝜉w_{A}^{x}(\xi) est bien une 1-forme en ξ𝜉\xi car il y a une arête de zn+1subscript𝑧𝑛1z_{n+1} vers la racine du graphe A𝐴A et que l’on intègre sur les configurations des sommets de A𝐴A.

On regroupe maintenant tous les graphes simples ΓΓ\Gamma qui dégénèrent de la même façon et contribuent comme wA,Bx(ξ)superscriptsubscript𝑤𝐴𝐵𝑥𝜉w_{A,B}^{x}(\xi).

Comment sont-ils obtenus?

Tout simplement en déployant les arêtes de B𝐵B qui arrivent sur zn+1subscript𝑧𝑛1z_{n+1}. En effet si on déployait une arête de A𝐴A arrivant sur zn+1subscript𝑧𝑛1z_{n+1}, soit le graphe obtenu ne serait pas simple (puisqu’il aurait deux racines), soit le graphe aurait une roue ce qui est exclu.

En examinant ce procédé au niveau des symboles, on constate que la contribution dans la somme partielle wA,Bx(ξ)Γ(x,y)superscriptsubscript𝑤𝐴𝐵𝑥𝜉Γ𝑥𝑦\sum w_{A,B}^{x}(\xi)\Gamma(x,y) est précisément

wA,Bx(ξ)[x,A(x,y)]xB(x,y)superscriptsubscript𝑤𝐴𝐵𝑥𝜉𝑥𝐴𝑥𝑦subscript𝑥𝐵𝑥𝑦w_{A,B}^{x}(\xi)[x,A(x,y)]\cdot\partial_{x}B(x,y) (28)

On a un terme analogue portant sur y𝑦y.

Notons ΩF(x,y)subscriptΩ𝐹𝑥𝑦\Omega_{F}(x,y) la 111-forme AwAx(ξ)A(x,y)subscript𝐴superscriptsubscript𝑤𝐴𝑥𝜉𝐴𝑥𝑦\sum_{A}w_{A}^{x}(\xi)A(x,y) la somme portant sur les graphes géométriques de type Lie et de manière analogue ΩG(x,y)=AwAy(ξ)A(x,y)subscriptΩ𝐺𝑥𝑦subscript𝐴superscriptsubscript𝑤𝐴𝑦𝜉𝐴𝑥𝑦\Omega_{G}(x,y)=\sum_{A}w_{A}^{y}(\xi)A(x,y) ( ces séries n’ont donc pas de termes constants).

On peut maintenant énoncer notre premier théorème

Théorème 1.

Les 111-formes ΩFsubscriptΩ𝐹\Omega_{F} et ΩGsubscriptΩ𝐺\Omega_{G} en ξC¯2,0𝜉subscript¯𝐶2.0\xi\in\overline{C}_{2,0} sont données par des séries (de type Lie) convergentes à valeurs dans 𝔤𝔤\mathfrak{g} et vérifient

dZξ(x,y)=[x,ΩF(x,y)]xZξ(x,y)+[y,ΩG(x,y)]yZξ(x,y)𝑑subscript𝑍𝜉𝑥𝑦𝑥subscriptΩ𝐹𝑥𝑦subscript𝑥subscript𝑍𝜉𝑥𝑦𝑦subscriptΩ𝐺𝑥𝑦subscript𝑦subscript𝑍𝜉𝑥𝑦dZ_{\xi}(x,y)=[x,\Omega_{F}(x,y)]\cdot\partial_{x}Z_{\xi}(x,y)+[y,\Omega_{G}(x,y)]\cdot\partial_{y}Z_{\xi}(x,y)

Preuve: Le fait que les séries soient convergentes en x𝑥x et y𝑦y dans un voisinage de 00 résulte comme dans [ADS] ou [AST] de l’estimation des cœfficients (les formes à intégrer sont régulières sur des variétés à bord compactes). Compte tenu de la proposition précédente on a wA,Bx(ξ)=wB(ξ)wAx(ξ)superscriptsubscript𝑤𝐴𝐵𝑥𝜉subscript𝑤𝐵𝜉superscriptsubscript𝑤𝐴𝑥𝜉w_{A,B}^{x}(\xi)=w_{B}(\xi)w_{A}^{x}(\xi), vient alors

A,BwA,Bx(ξ)[x,A(x,y)]xB(x,y)=A,BwB(ξ)wAx(ξ)[x,A(x,y)]xB(x,y)=subscript𝐴𝐵superscriptsubscript𝑤𝐴𝐵𝑥𝜉𝑥𝐴𝑥𝑦subscript𝑥𝐵𝑥𝑦subscript𝐴𝐵subscript𝑤𝐵𝜉superscriptsubscript𝑤𝐴𝑥𝜉𝑥𝐴𝑥𝑦subscript𝑥𝐵𝑥𝑦absent\sum_{A,B}w_{A,B}^{x}(\xi)[x,A(x,y)]\cdot\partial_{x}B(x,y)=\sum_{A,B}w_{B}(\xi)w_{A}^{x}(\xi)[x,A(x,y)]\cdot\partial_{x}B(x,y)=
[x,ΩF]xZξ(x,y).𝑥subscriptΩ𝐹subscript𝑥subscript𝑍𝜉𝑥𝑦[x,\Omega_{F}]\cdot\partial_{x}Z_{\xi}(x,y).

Par symétrie on a le résultat souhaité.\Box

Remarque: Si γ:[0,1]C2,0¯:𝛾maps-todelimited-[]0.1¯subscript𝐶2.0\gamma:[0,1]\mapsto\overline{C_{2,0}} est un chemin reliant le coin de l’oeil à l’iris (cf figure [1]), alors la fonction tZγ(t)(x,y)maps-to𝑡subscript𝑍𝛾𝑡𝑥𝑦t\mapsto Z_{\gamma(t)}(x,y) est une déformation de la formule de Campbell-Hausdorff. Les cœfficients γwAxsubscript𝛾superscriptsubscript𝑤𝐴𝑥\int_{\gamma}w_{A}^{x} vérifie les mêmes majorations que dans [ADS] ce qui explique l’analycité en (x,y)𝑥𝑦(x,y) pour les formes ΩF(x,y)subscriptΩ𝐹𝑥𝑦\Omega_{F}(x,y) et ΩG(x,y)subscriptΩ𝐺𝑥𝑦\Omega_{G}(x,y)

4.2 Commentaires et exemples

4.2.1 Graphe de Bernoulli

Notre but est de faire ξ=(0,1)𝜉0.1\xi=(0,1) dans l’équation différentielle obtenue dans le théorème. On aura alors Zξ=(0,1)(x,y)=Z(x,y)subscript𝑍𝜉0.1𝑥𝑦𝑍𝑥𝑦Z_{\xi=(0,1)}(x,y)=Z(x,y).

Regardons ce que donne le calcul de la différentielle sur les cœfficients qui déforment les nombres de Bernoulli apparaissant dans le calcul à l’ordre 111 en y𝑦y. Rappelons que dans la déformation de Kashiwara-Vergne on avait déformé ces nombres en les multipliant par tnsuperscript𝑡𝑛t^{n}.

La déformation est donnée par le graphe de la figure [9]. On note pour simplifier wn(ξ)subscript𝑤𝑛𝜉w_{n}(\xi) le cœfficient déformé.

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Figure 9: Graphe type Bernoulli déformé

Le long de la paupière supérieure de l’oeil c’est à dire quand le point zn+1subscript𝑧𝑛1z_{n+1} est sur l’axe réel, le cœfficient vérifie une équation différentielle très simple. En effet on a alors wn(ξ)=wn(θ)subscript𝑤𝑛𝜉subscript𝑤𝑛𝜃w_{n}(\xi)=w_{n}(\theta) avec θ𝜃\theta l’angle entre 0¯¯0\overline{0} et zn+2subscript𝑧𝑛2z_{n+2}. La dérivée est donc représentée par le graphe de la figure [10]. En effet toutes les autres contractions d’arêtes vont donner 00 car le point zn+1subscript𝑧𝑛1z_{n+1} reste sur l’axe réel. Seule intervient la contraction de l’arête qui joint znsubscript𝑧𝑛z_{n} à zn+2subscript𝑧𝑛2z_{n+2}.

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Figure 10: Graphe calculant wn(θ)subscriptsuperscript𝑤𝑛𝜃w^{\prime}_{n}(\theta)

Or la partie différentielle en θ𝜃\theta provient de l’arête joignant 0¯¯0\overline{0} et zn+2subscript𝑧𝑛2z_{n+2} et qui représente clairement dθπ𝑑𝜃𝜋\frac{d\theta}{\pi}. Comme on l’a dit le reste des intégrations se fait à θ𝜃\theta fixe, il vient donc

ddθwn(θ)=wn1(θ)dθπ.𝑑𝑑𝜃subscript𝑤𝑛𝜃subscript𝑤𝑛1𝜃𝑑𝜃𝜋\frac{d}{d\theta}w_{n}(\theta)=-w_{n-1}(\theta)\frac{d\theta}{\pi}.

Ceci est conforme au résultat de [Ka] qui montre qu’on a

wn(θ)=(1)nn!bn(θπ)subscript𝑤𝑛𝜃superscript1𝑛𝑛subscript𝑏𝑛𝜃𝜋w_{n}(\theta)=\frac{(-1)^{n}}{n!}b_{n}(\frac{\theta}{\pi})

et il est bien connu les polynômes de Bernoulli bn(θ)subscript𝑏𝑛𝜃b_{n}(\theta) vérifient

bn(θ)=nbn1(θ).superscriptsubscript𝑏𝑛𝜃𝑛subscript𝑏𝑛1𝜃b_{n}^{\prime}(\theta)=nb_{n-1}(\theta).

4.2.2 Contribution d’ordre 111 en y𝑦y au point (0,1)0.1(0,1)

En cherchant les termes d’ordre 111 en y𝑦y dans dZξ(x,y)dsubscript𝑍𝜉𝑥𝑦\mathrm{d}Z_{\xi}(x,y) on trouve alors deux types de contribution représentée par les graphes suivants qui sont clairement les seules façons de dégénérer les graphes associés au nombre de Bernoulli.

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Figure 11: Graphe calculant la dérivée au point (0,1)0.1(0,1) le long de la paupière inférieure
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Figure 12: Graphe calculant la dérivée au point (0,1)0.1(0,1) le long de la paupière supérieure

Le premier (figure [11]) correspond d’après le théorème 1 et la formule (28) à un terme du genre

[x,ad(x)n1y]x(x),𝑥adsuperscript𝑥𝑛1𝑦subscript𝑥𝑥[x,\mathrm{ad}(x)^{n-1}\cdot y]\partial_{x}(x),

c’est la dérivée le long de la paupière inférieure prise au point (0,1)0.1(0,1). On prendra garde que l’arête issue de 0¯¯0\overline{0} ne donne pas 00 car le point zn+1subscript𝑧𝑛1z_{n+1} s’approche de l’axe réel mais pas forcément le long de l’axe réel.

Le deuxième (figure [12]) correspond à une contribution du genre

[y,x]y(ad(x)n1y)𝑦𝑥subscript𝑦adsuperscript𝑥𝑛1𝑦[y,x]\partial_{y}(\mathrm{ad}(x)^{n-1}\cdot y)

qui est la dérivée le long de la paupière supérieure prise au point (0,1)0.1(0,1).

On peut dire la chose suivante. La déformation des cœfficients est la moyenne des déformations le long des paupières. La déformation le long de la paupière supérieure est tout simplement la déformation des nombres de Bernoulli en les polynômes de Bernoulli, l’autre déformation reste encore mystérieuse.

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Figure 13: Graphe de base

Un calcul à la main, montre que si on normalise nos calculs tel que le graphe de la figure [13] corresponde à 11-1, alors la dérivée correspondant au graphe de la figure [14] vaut 1/4141/4.

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Figure 14: Exemple de calcul de la dérivée

Toutefois ce calcul semble montrer que la déformation que nous proposons est différente au point (0,1)0.1(0,1) de celle de Kashiwara-Vergne. En effet la différentielle dZξdsubscript𝑍𝜉\mathrm{d}Z_{\xi} en ce point n’a pas le même développement que dZt(x,y)dtdsubscript𝑍𝑡𝑥𝑦d𝑡\frac{\mathrm{\displaystyle d}{\displaystyle Z_{t}(x,y)}}{\mathrm{\displaystyle d}{\displaystyle t}} pour t=1𝑡1t=1.

4.2.3 Autre exemple de calcul des cœfficients

L’argument d’homotopie infinitésimal que nous avons utilisé pour établir d’équation différentielle vérifiée par la formule Campbell-Hausdorff, est clairement une application de la formule de Stokes. Nous expliquons maintenant une procédure pour calculer certains cœfficients associés à un graphe admissible ΓGn,2Γsubscript𝐺𝑛.2\Gamma\in G_{n,2}. Nous renvoyons le lecteur à un prochain article dans lequel nous développerons cette technique concernant les poids associés à des graphes pertinents.

La procédure est la suivante. Ajoutons une arêtes au graphe. On a donc ajouté un point aérien et une arête. Il y a un écart d’une dimension entre la variété d’intégration et la forme différentielle associée au graphe. Appliquons la formule de Stokes pour ce graphe Γ~~Γ\tilde{\Gamma}. On a alors la formule

C¯n+1,2+dΩΓ~=C¯n+1,2+ΩΓ~.subscriptsubscriptsuperscript¯𝐶𝑛1.2differential-dsubscriptΩ~Γsubscriptsubscriptsuperscript¯𝐶𝑛1.2subscriptΩ~Γ\int_{\overline{C}^{+}_{n+1,2}}\mathrm{d}\Omega_{\tilde{\Gamma}}=\int_{\partial\overline{C}^{+}_{n+1,2}}\Omega_{\tilde{\Gamma}}. (29)

Cela revient à écrire que la somme des cœfficients associés aux graphes obtenus par contraction d’une arête est nulle. On obtient alors en général une relation non triviale entre cœfficients.

Une autre méthode consisterait à ajouter un point terrestre et à déplacer certaines arêtes arrivant sur 0¯¯0\overline{0} par exemple vers ce point. On utilise alors la formule de Stokes, mais on prendra garde qu’il faut dans ce cas bien étudier la contribution de toutes les composantes de bord en particulier celles qui correspondent aux regroupement de point aériens sur l’axe réel (voir [MT] pour plus de détails) et il faut suivre aussi les orientations des faces (voir [AMM] pour des explications détaillées). Illustrons ceci par un exemple donné à la figure [15].

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Figure 15: Utilisation de Stokes dans le calcul des poids

On retrouve alors l’identité 1/6+1/12(1/2)2=016112superscript12201/6+1/12-(1/2)^{2}=0, car le diagramme avec un point aérien et 333 arêtes vaut 1/3!=1/613161/3!=1/6.

4.3 La déformation Zξsubscript𝑍𝜉Z_{\xi} et Campbell-Hausdorff

Comme on l’a annoncé en introduction, notre déformation n’est pas associative en général, c’est à dire que ce n’est pas une formule de Campbell-Hausdorff d’une algèbre de Lie. En effet une expression donnée par des polynômes de Lie qui définit une formule associative est forcément la formule de Campbell-Hausdorff de la structure de Lie déterminée par le terme en [x,y]𝑥𝑦[x,y]. C’est démontré dans [ABM], mais le résultat est sans doute connu depuis longtemps et on peut démontrer ceci par récurrence, en examinant les termes de type Bernoulli. En particulier, il suffit de vérifier dans la formule de Zξsubscript𝑍𝜉Z_{\xi}, que les cœfficients associés aux termes de type Bernoulli, ne vérifient pas les relations escomptées. Comme le long de la paupière, ces cœefficients sont les polynômes de Bernoulli (au signe près), il suffit de constater que la relation w12(θ)=3w2(θ)superscriptsubscript𝑤12𝜃3subscript𝑤2𝜃w_{1}^{2}(\theta)=3w_{2}(\theta) n’est pas vérifiée. Par suite, cette relation n’est pas vérifiée sur un ouvert de la variété C2,0¯¯subscript𝐶2.0\overline{C_{2,0}}.

5 Déformation de la fonction de densité

5.1 Expression en terme de graphes

La fonction de densité est la fonction D(x,y)𝐷𝑥𝑦D(x,y) que nous avons introduite au début de cet article. Comme démontré dans [AST] cette fonction s’exprime simplement en terme de symboles de graphes. On a le résulta suivant

Proposition 2.

La fonction de densité D(x,y)𝐷𝑥𝑦D(x,y) vérifie

A(x,y)=ΓGn,2w1n!wΓΓ(x,y)𝐴𝑥𝑦subscriptΓsuperscriptsubscript𝐺𝑛.2𝑤1𝑛subscript𝑤ΓΓ𝑥𝑦A(x,y)=\sum_{\Gamma\in G_{n,2}^{w}}\frac{1}{n!}w_{\Gamma}\Gamma(x,y)

où la somme porte sur tous les graphes admissibles de type roue, id est sans composante simple de type Lie (par convention la série commence par 1).

Notons que la somme portent sur tous les “produits” de graphes simples de type roue et non pas seulement sur les graphes simples de type roue. Comme on l’a remarqué dans [AST] cela implique que cette fonction est l’exponentielle de

ΓGn,2w,ΓsimplewΓΓ(x,y)subscriptΓsuperscriptsubscript𝐺𝑛.2𝑤Γsimplesubscript𝑤ΓΓ𝑥𝑦\sum_{\Gamma\in G_{n,2}^{w},\Gamma\mathrm{simple}}w_{\Gamma}\Gamma(x,y) (30)

mais où la somme porte uniquement sur les graphes simples géométriques de type roue (figure [5]). Bien sûr cette série est convergente dans un voisinage de 00 en x𝑥x et y𝑦y.

5.2 Déformation de la fonction de densité

Effectuons la même procédure de déformation des cœfficients de type roue que dans le cas Campbell-Hausdorff. On note par analogie Dξ(x,y)subscript𝐷𝜉𝑥𝑦D_{\xi}(x,y) la fonction de densité obtenue par déformation des cœfficients. Il est plus facile de raisonner sur la somme (30) qui représente le log\log formel de la fonction de densité.

On calcule ensuite la différentielle en ξ𝜉\xi comme précédemment.

Seules importent les contractions d’arêtes qui arrivent sur les points représentant ξ𝜉\xi, notre paramètre de déformation. En effet les autres contributions se compensent par Jacobi ou pour des raisons de dimension. Les graphes que l’on traite sont simples et n’ont donc qu’une seule roue. Par conséquent les graphes typiques que l’on obtient par contraction des arêtes sont de deux types. Le premier est comme dans la figure [16], avec A𝐴A un graphe simple de type Lie, une arête joignant zn+1subscript𝑧𝑛1z_{n+1} (resp. zn+2subscript𝑧𝑛2z_{n+2}) au sommet de A𝐴A et B𝐵B un graphe simple de type roue. On note wA,Bxsuperscriptsubscript𝑤𝐴𝐵𝑥w_{A,B}^{x} (resp. wA,Bysuperscriptsubscript𝑤𝐴𝐵𝑦w_{A,B}^{y}) la 111-forme obtenue par intégration sur les configurations contenues dans A𝐴A et B𝐵B. Comme dans la proposition 1 la partie 111-forme en ξ𝜉\xi ne peut provenir que des arêtes de A𝐴A. On a donc encore une fois une situation produit.

La deuxième possibilité consiste en un graphe comme le précédent mais sans le sous-graphe B𝐵B. C’est la cas précédent avec B=𝐵B=\emptyset. Dans ce cas on note wAxsuperscriptsubscript𝑤𝐴𝑥w_{A}^{x} (resp.wAysuperscriptsubscript𝑤𝐴𝑦w_{A}^{y}) la 111-forme obtenue par intégration sur les configurations contenues dans A𝐴A.

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Figure 16: Graphe Type de type roue

Par conséquent les graphes simples qui dégénèrent en ces graphes typiques, sont comme précédemment obtenus par adjonction d’une arête au point zn+1subscript𝑧𝑛1z_{n+1} (resp. zn+2subscript𝑧𝑛2z_{n+2}) soit sur le grapheB𝐵B soit sur le graphe A𝐴A. Toutefois si l’adjonction provient de A𝐴A et si B𝐵B n’est pas vide, le graphe en question n’est pas simple; Par conséquent quand B𝐵B est non vide, l’adjonction provient de B𝐵B. Lorsque B𝐵B est vide l’adjonction vient de A𝐴A. Par regroupement on obtient les contributions portant sur x𝑥x suivantes

A,BwA,Bx(ξ)[x,A(x,y)]xB(x,y)=A,BwAx(ξ)[x,A(x,y)]xwB(ξ)B(x,y)=subscript𝐴𝐵superscriptsubscript𝑤𝐴𝐵𝑥𝜉𝑥𝐴𝑥𝑦subscript𝑥𝐵𝑥𝑦subscript𝐴𝐵superscriptsubscript𝑤𝐴𝑥𝜉𝑥𝐴𝑥𝑦subscript𝑥subscript𝑤𝐵𝜉𝐵𝑥𝑦absent\sum_{A,B}w_{A,B}^{x}(\xi)[x,A(x,y)]\cdot\partial_{x}B(x,y)=\sum_{A,B}w_{A}^{x}(\xi)[x,A(x,y)]\cdot\partial_{x}w_{B}(\xi)B(x,y)=
[x,ΩF(x,y)]x(BwB(ξ)B(x,y))𝑥subscriptΩ𝐹𝑥𝑦subscript𝑥subscript𝐵subscript𝑤𝐵𝜉𝐵𝑥𝑦[x,\Omega_{F}(x,y)]\cdot\partial_{x}(\sum_{B}w_{B}(\xi)B(x,y)) (31)

et

AwAx(ξ)tr(adxxA(x,y)).subscript𝐴superscriptsubscript𝑤𝐴𝑥𝜉trad𝑥subscript𝑥𝐴𝑥𝑦\sum_{A}w_{A}^{x}(\xi)\mathrm{tr}(\mathrm{ad}x\partial_{x}A(x,y)). (32)

On a des contributions analogues portant sur y𝑦y.

En conséquence on retrouve les 111-formes du théorème 1. Il vient maintenant le théorème suivant.

Théorème 2.

La fonction de densité D(x,y)𝐷𝑥𝑦D(x,y) se déforme naturellement en la fonction Dξ(x,y)subscript𝐷𝜉𝑥𝑦D_{\xi}(x,y) vérifiant

dDξ(x,y)=tr𝔤(adxxΩF(x,y)+adyyΩG(x,y))Dξ(x,y)+dsubscript𝐷𝜉𝑥𝑦limit-fromsubscripttr𝔤ad𝑥subscript𝑥subscriptΩ𝐹𝑥𝑦ad𝑦subscript𝑦subscriptΩ𝐺𝑥𝑦subscript𝐷𝜉𝑥𝑦\mathrm{d}D_{\xi}(x,y)=\mathrm{tr}_{\mathfrak{g}}(\mathrm{ad}x\partial_{x}\Omega_{F}(x,y)+\mathrm{ad}y\partial_{y}\Omega_{G}(x,y))D_{\xi}(x,y)+
[x,ΩF(x,y)]xDξ(x,y)+[y,ΩG(x,y)]yDξ(x,y).𝑥subscriptΩ𝐹𝑥𝑦subscript𝑥subscript𝐷𝜉𝑥𝑦𝑦subscriptΩ𝐺𝑥𝑦subscript𝑦subscript𝐷𝜉𝑥𝑦[x,\Omega_{F}(x,y)]\cdot\partial_{x}D_{\xi}(x,y)+[y,\Omega_{G}(x,y)]\cdot\partial_{y}D_{\xi}(x,y).

Preuve: On additionne les contributions précédentes. On remarque alors que l’on a raisonné sur le log\log formel de Dξ(x,y)subscript𝐷𝜉𝑥𝑦D_{\xi}(x,y), par conséquent la somme des contributions s’écrit

dlogDξ(x,y)=tr𝔤(adxxΩF(x,y)+adyyΩG(x,y))dsubscript𝐷𝜉𝑥𝑦subscripttr𝔤ad𝑥subscript𝑥subscriptΩ𝐹𝑥𝑦ad𝑦subscript𝑦subscriptΩ𝐺𝑥𝑦\mathrm{d}\log D_{\xi}(x,y)=\mathrm{tr}_{\mathfrak{g}}(\mathrm{ad}x\partial_{x}\Omega_{F}(x,y)+\mathrm{ad}y\partial_{y}\Omega_{G}(x,y))
[x,ΩF(x,y)]xlogDξ(x,y)+[y,ΩG(x,y)]ylogDξ(x,y).𝑥subscriptΩ𝐹𝑥𝑦subscript𝑥subscript𝐷𝜉𝑥𝑦𝑦subscriptΩ𝐺𝑥𝑦subscript𝑦subscript𝐷𝜉𝑥𝑦[x,\Omega_{F}(x,y)]\cdot\partial_{x}\log D_{\xi}(x,y)+[y,\Omega_{G}(x,y)]\cdot\partial_{y}\log D_{\xi}(x,y).

C’est la formule cherchée car on a

Dξ(x,y)dlogDξ(x,y)=dDξ(x,y).subscript𝐷𝜉𝑥𝑦dsubscript𝐷𝜉𝑥𝑦dsubscript𝐷𝜉𝑥𝑦D_{\xi}(x,y)\mathrm{d}\log D_{\xi}(x,y)=\mathrm{d}D_{\xi}(x,y).

Comme on l’a dit dans l’introduction, nous travaillons au niveau des séries formelles mais on peut justifier la convergence en (x,y)𝑥𝑦(x,y) dans un voisinage de l’origine de 00 sans difficulté comme dans [ADS].\Box

5.3 Conclusion et preuve du théorème principal

Le théorème annoncé en introduction est maintenant démontré grace au théorème 1 et au théorème 2. Notre théorème montre alors, comme dans [KV], que l’on dispose d’une déformation du produit de convolution qui assure que l’équation (5) est vérifiée.

Références

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  • [AMM] D. Arnal, D. Manchon et M. Masmoudi, Choix des signes pour la formalité de Kontsevich, QA/00 03003.
  • [AST] M. Andler, S. Sahi and C. Torossian, Convolution of invariant distributions on Lie groups, e-print,QA/0104100.
  • [Di] G. Dito, Kontsevich star product on the dual of a Lie algebra. Lett. Math. Phys. 4, 48 (1999), no. 4, 307–322.
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  • [Ko2] M. Kontsevich, Operads and motives in deformation quantization. Lett. Math. Phys. 48 (1999), no. 1, 35–72.
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  • [Rou2] F. Rouvière, Espaces symétriques et méthodes de Kashiwara-Vergne. Ann. Sc.Ec. Norm. Sup. 19 (1986), 553–581.
  • [Rou3] F. Rouvière, Invariant analysis and contractions of symmetric spaces I. Compositio Math. 73 (1990), 241–270.
  • [Rou4] F. Rouvière, Invariant analysis and contractions of symmetric spaces II. Compositio Math. 880 (1991), 111–136.
  • [Rou5] F. Rouvière, Fibrés en droite sur un espace symétrique et analyse invariante. Journal of Functional Analysis 124 (1994), 263–291.
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