Exponentielle tronquée et autres contes galoisiens
Résumé.
Nous faisons un tour d’horizon de résultats sur les groupes de Galois de troncatures de séries entières, avec la série exponentielle comme figure de proue. On propose ensuite de nouvelles explorations avec des calculs explicites de groupes de Galois d’approximants de Padé qui semblent jouir, eux aussi, de propriétés intéressantes.
Mots-Clefs: Groupes de Galois. Séries entières. Approximants de Padé.
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Truncated exponential and other tales of Galois groups.
Abstract. We give a survey of results on the Galois group of polynomials obtained by truncation of power series, the main example being the exponential series. We also present some evidence of a new phenomena: Galois groups of Padé approximation polynomials seem to have special properties as well.
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Keywords: Galois groups. Power series. Padé approximation.
Mathematics Subject Classification: 11R32, 12F12.
1. Introduction
Le calcul explicite de groupes de Galois de polynômes à coefficients rationnels est une entreprise passionnante et bien souvent difficile. La résolution du problème de Galois inverse pour le groupe des permutations et son groupe alterné est classique et date de Hilbert, on pourra consulter [JLY02] pour un exposé plus moderne. Une idée différente circulait déjà en 1929 : prendre une série entière à coefficients rationnels, la tronquer à l’ordre et chercher des informations galoisiennes sur le polynôme obtenu. Est-il irréductible ? Son groupe de Galois est-il particulier ? Peut-on le calculer ?
Schur a ouvert la voie avec les articles [Sch29a, Sch29b] qui traitent de la série exponentielle
Pour tout , notons l’exponentielle tronquée à l’ordre par
(1) |
C’est un polynôme en de degré , à coefficients rationnels. Est-il irréductible ? Quel est le groupe de Galois de ? Des calculs explicites menés en PARI/gp pour des petites valeurs de font apparaître une régularité qui aiguisera la curiosité du lecteur. On notera le groupe symétrique d’indice et son sous-groupe alterné formé des permutations paires. Le théorème de Schur est le suivant.
Théorème 1.1.
L’exponentielle tronquée vérifie les propriétés suivantes.
-
(a)
Soit un nombre entier non divisible par . Le groupe de Galois du polynôme est .
-
(b)
Soit un entier naturel. Le groupe de Galois du polynôme est .
C’est bien entendu la raison principale qui pousse à formuler la question classique suivante :
Question 1.2.
Quelles séries entières ont des troncatures qui jouissent de propriétés galoisiennes similaires à celles proposées dans le théorème 1.1?
Un coup d’oeil à la section 2 permet de comprendre que les familles de polynômes orthogonaux sont jusqu’ici des acteurs importants dans cette pièce, mais on verra aussi dans les sections 3 et 4 que les polynômes impliqués dans la construction des approximations de Padé, en lieu et place des simples troncatures, pourrait s’avérer devenir une source d’exemples d’une nouvelle nature.
Ce premier texte de Schur a été suivi rapidement par [Sch30] qui traite de polynômes de Laguerre définis pour tout entier par
(notons que [Sch30] traite aussi de la série exponentielle), puis par [Sch31] qui porte encore sur les polynômes de Laguerre, et aborde de plus les polynômes de Hermite , définis pour tout entier par
Notre objectif ici est double. Nous présentons tout d’abord un tour d’horizon de travaux plus récents sur le même thème dans la section 2. Nous présentons ensuite en section 3 une étude basée sur des calculs menés en PARI/gp et qui indique que d’autres fonctions naturelles, dont certains approximants de Padé, jouissent de propriétés galoisiennes intéressantes, notamment les séries entières associées aux fonctions et . Ces résultats numériques poussent les auteurs à formuler la question suivante :
Question 1.3.
Quelles fonctions ont des approximants de Padé qui jouissent de propriétés galoisiennes particulières ?
Nous concluons cette introduction avec les deux résultats suivants, en réponse partielle à la question 1.3. Le premier, le théorème 1.4, concerne les propriétés galoisiennes des approximants de Padé de la fonction exponentielle. Le second, le théorème 1.5, est nouveau et concerne la série entière associée à la fonction au voisinage de .
Nos premiers résultats numériques, rendus publics dans une première version de ce texte en 2020, portaient à croire que les groupes de Galois des numérateurs et dénominateurs des fractions rationnelles des approximants de Padé de la fonction exponentielle avaient pour groupes de Galois ou . Cette observation a depuis été confirmée partiellement par [CuSh], voici leur théorème (les définitions nécessaires sont rappelées en section 3).
Théorème 1.4.
Soient et les approximants de Padé d’ordre de la série exponentielle.
-
(a)
Pour tout , les polynômes et sont irréductibles et ont pour groupe de Galois .
-
(b)
Supposons que et soient irréductibles. Alors le groupe de Galois de est si et seulement si ( ou pour un entier ). Le groupe de Galois de est si et seulement si pour un entier .
-
(c)
Soit un nombre premier et soit un entier. Les polynômes , , , sont irréductibles sur .
Le dernier résultat que nous mettrons à l’honneur est nouveau et concerne la série entière associée à . Dans ce cas, et contrairement au cas de la série exponentielle, les troncatures de la série ne se comportent pas du tout (dans tous les cas testés) comme ses approximants de Padé. Plus précisément nous montrons l’énoncé suivant. Notons
son approximant de Padé d’ordre .
Théorème 1.5.
Les polynômes vérifient les propriétés suivantes, pour .
-
(a)
a pour racines les valeurs de telles que
-
(b)
définit l’extension cyclotomique réelle .
-
(c)
Le groupe de Galois de est .
Il est intéressant d’ajouter que les premières troncatures de la série entière associée à la fonction ont toutes des groupes de Galois non-abéliens (voir section 4). Le texte se termine avec la section 4, qui détaille la preuve du théorème 1.5. On verra que cette preuve est essentiellement basée sur une relation de récurrence fonctionnelle satisfaite par les approximants de Padé considérés.
2. Tour d’horizon de résultats connexes
Les trois paragraphes suivants présentent trois directions de recherche. La première direction est la méthode des polygones de Newton, de loin la méthode la plus utilisée pour obtenir des résultats. La seconde direction est illustrée par un théorème de Chambert-Loir de type Jentzsch-Szegö. La troisième direction est une conséquence de la finitude des points rationnels sur les courbes de genre (conjecture de Mordell, théorème de Faltings).
2.1. La méthode des polygones de Newton
Coleman (1987, [Col87]) donne une nouvelle preuve du théorème de Schur sur les troncatures de la fonction exponentielle (la formule explicite est rappelée en (1)) en utilisant les polygones de Newton. Il donne en exercice page 188 les cas des polynômes de Hermite et Laguerre. (On pourra aussi consulter [Conr].) Rappelons ce qu’est le polygone de Newton d’un polynôme de degré , où est un nombre premier et la valuation -adique. Quitte à diviser par une puissance de , puis par , on peut supposer que , de sorte que s’écrive
où les coefficients sont dans pour tout et . Considérons l’ensemble des points du plan définis par . Le polygone de Newton de est alors la frontière inférieure de l’enveloppe convexe de cet ensemble . Il s’agit donc d’une ligne brisée, réunion de segments dont les extrémités sont dans .
On peut alors retrouver des informations sur la factorisation d’un polynôme dans par le calcul de son polygone de Newton. Le polygone de Newton du polynôme (dont la formule explicite est rappelée en (1)) pour un choix de nombre premier satisfaisant est de la forme suivante, si on note ses coefficients .
Par le théorème 3.1 page 100 de [Cas86], on déduit que dans , avec et . On dit que le polynôme est pur, de pente . Les travaux mentionnés à présent utilisent cette méthode de manière centrale.
Filaseta et Trifonov (2002, [FiTr02]) démontrent l’irréductibilité des polynômes de Bessel sur , définis pour tout entier par
achevant ainsi la démonstration d’une conjecture de Grosswald prédisant cette propriété. La méthode employée est basée sur les polygones de Newton, et le cœur de la preuve est une quête de nombres premiers vérifiant des conditions particulières.
Filaseta et Lam (2002, [FiLa02]) étudient l’irréductibilité de polynômes de Laguerre généralisés définis pour tout entier et tout nombre rationnel par
où on note pour tout rationnel et tout entier positif. Lorsque le paramètre est fixé et n’est pas un entier négatif, ils montrent l’irréductibilité de ces polynômes sur , sauf pour un nombre fini de valeurs de (dépendant de ). Ils utilisent une méthode proche de celle de Schur, avec en plus un argument basé sur une équation de Thue et un argument basé sur des progressions arithmétiques de nombres premiers.
Hajir (2009, [Haj09]) calcule le groupe de Galois de certains polynômes de Laguerre généralisés, notamment quand le paramètre est un entier négatif (le cas laissé de côté par Filaseta et Lam). Il utilise aussi des polygones de Newton, ainsi que des critères d’irréductibilité de Coleman et de Filaseta.
Akhtari et Saradha (2011, [AkSa11]) donnent une borne explicite à partir de laquelle les polynômes de Hermite et les polynômes de Laguerre (ainsi que certaines généralisations) de degré sont irréductibles ou presque irréductibles (un polynôme presque irréductible étant simplement un polynôme de degré produit d’un facteur linéaire et d’un polynôme de degré ). La méthode employée est naturellement basée sur les polygones de Newton, le théorème des progressions arithmétiques de Dirichlet, et la finitude du nombre de solutions entières des équations de Thue.
Cullinan et Hajir (2014, [CuHa14]) étudient les polynômes de Legendre, définis pour tout entier par
Ils conjecturent notamment que le groupe de Galois de est isomorphe au produit en couronne et obtiennent des résultats partiels dans cette direction. La méthode employée repose sur le critère de Jordan : des informations sur la taille du groupe de Galois d’un polynôme peuvent être obtenues en observant leur polygone de Newton associé à un nombre premier peu ramifié dans le corps de décomposition de . En utilisant des congruences dites de Holt-Schur (voir [CuHa14] pour plus de détails), ils obtiennent aussi des résultats dans le cas de ramification sauvage.
2.2. Un théorème de Chambert-Loir à la Jentzsch-Szegö
Chambert-Loir (2011, [Cha11]) démontre un théorème de type Jentzsch-Szegö pour les séries entières à coefficients dans une extension finite de : le degré du facteur irréductible unitaire de plus grand degré pour une troncature de série entière (dont les coefficients satisfont une condition naturelle très générale) tend vers l’infini. Plus précisément, soit un nombre premier, soit une extension finie de , notons l’anneau des séries formelles en à coefficients dans , et pour tout réel , notons l’ensemble des séries de telles que lorsque . Le théorème de Chambert-Loir est le suivant.
Théorème 2.1.
Soit et pour tout entier naturel , notons sa troncature à l’ordre . Pour tout entier , pour toute sous-suite telle que lorsque , le nombre de facteurs irréductibles unitaires de de degré inférieur ou égal à est . En particulier le degré du plus grand facteur irréductible unitaire de tend vers l’infini lorsque tend vers l’infini.
Ce théorème indique donc que l’existence d’autres exemples de séries entières dont les troncatures sont des polynômes irréductibles est probable.
2.3. Une conséquence de Mordell-Faltings
Cullinan, Hajir et Sell (2009, [CHS09]) obtiennent un résultat sur une sous-famille de polynômes de Jacobi. Les polynômes de Jacobi sont définis pour tout et tout par
où on note pour tout et tout entier positif. Ce sont des polynômes orthogonaux obtenus à partir de la série hypergéométrique . On remarque que les polynômes de Legendre sont un cas particulier des polynômes de Jacobi: . Cullinan, Hajir et Sell s’intéressent plus précisément à la famille de polynômes
(voir [CHS09] page 97 et [CuHa14] page 536 pour les calculs formels sur les expressions de ces polynômes) en utilisant des propriétés de la courbe plane définie par . Ils montrent le résultat suivant.
Théorème 2.2.
Soit un entier naturel. Le polynôme est irréductible sur pour tout , sauf éventuellement pour un nombre fini d’exceptions. De plus, si est impair, le groupe de Galois de est pour tout , sauf éventuellement pour un nombre fini d’exceptions. Si est pair, il existe un ensemble mince de pour lesquels le groupe de Galois de est .
La méthode employée suit celle de Hajir et Wong [HaWo06] et repose sur la Proposition 5.17 de [Mül02], que nous rappelons ici.
Proposition 2.3.
Soit une extension finie de . Soit un polynôme irréductible. Supposons que n’est pas irréductible pour une infinité de valeurs . Alors le corps de décomposition de sur contient un corps contenant tel que n’est pas irréductible sur , de plus le corps est ou bien rationnel, ou bien le corps de fonctions d’une courbe elliptique avec rang de Mordell-Weil non nul.
La stratégie de preuve du théorème 2.2 est donc en fait basée sur le théorème de Faltings (conjecture de Mordell) : une courbe définie sur de genre n’a qu’un nombre fini de points rationnels. On montre que le genre de la courbe (désingularisée) définie par l’équation est supérieur ou égal à dès que , donc cette courbe n’a qu’un nombre fini de points rationnels, on applique alors la contraposée de la Proposition 2.3.
Cullinan (2019, [Cu19]) étudie les polynômes de Laguerre généralisés , où est un entier naturel et est un nombre rationnel, en regardant là aussi les courbes algébriques qu’ils définissent sur . Il conjecture que la jacobienne d’une telle courbe n’a que très peu de points de torsion, est de rang strictement positif sur , n’a pas de multiplication complexe et que ses représentations galoisiennes sont surjectives pour tout nombre premier .
3. Groupes de Galois d’approximants de Padé
En plus d’examiner des troncatures de certains polynômes orthogonaux, nous présentons à présent les premiers résultats, expérimentaux et théoriques, concernant l’arithmétique des approximants de Padé.
3.1. Définition
Soient et deux entiers. Soit une fonction admettant un développement limité en à l’ordre à coefficients rationnels et telle que . L’approximant de Padé ([Pad92]) d’ordre est la fraction rationnelle:
(2) |
vérifiant , et
(3) |
où la notation est liée à l’approximation au voisinage de . Le quotient est unique, et le sont si on impose à la fraction d’être réduite. Dans ce qui suit, les approximations de Padé que nous considèrerons seront dites d’ordre : l’approximation de Padé d’une fonction sera le couple de polynômes à coefficients entiers avec et et tel que
3.2. Résultats numériques
Les calculs sont menés avec la fonction bestapprPade() implémentée dans [PARI/gp]. On présente ici des calculs obtenus en utilisant le script suivant :
t(n) = bestapprPade(f(x+O(x^n)), n\2) gn(n)=my(F=factor(numerator(t(n)))[,1]);F[#F]; [ polgalois(gn(n)) | n <- [n_1...n_2]]
3.2.1. Exponentielle
Commençons par considérer les approximants de Padé de la fonction exponentielle. Les premiers polynômes obtenus sont irréductibles. Par exemple, les cas et donnent
Quelques calculs donnent aussi le tableau suivant, où désigne le groupe de Galois du polynôme :
On constate donc là aussi une alternance de groupes symétriques et de groupes alternés ! Ces premières constatations, proposées dans une première version de ce texte diffusée sur ArXiv, ont motivé un travail récent de Cullinan et Sheel [CuSh]. Ils identifient les approximants de Padé d’ordre de la fonction exponentielle par les formules
Ils démontrent alors le théorème 1.4, répondant ainsi partiellement à la question 1.3 de l’introduction. La preuve repose en bonne partie sur une remarque de Hajir : les approximants de Padé de la fonction exponentielle sont en fait des cas particuliers de polynômes de Laguerre généralisés !
3.2.2. Séries logarithmiques
Plus amusant encore, en considérant les approximants de Padé d’ordre de la série
seuls des groupes hyperoctahédraux (groupes de symétries des hypercubes) apparaissent comme groupes de Galois :
pour certains entiers et , où on note le produit en couronne, et est le groupe cyclique à deux éléments. Dans la suite des approximants de Padé d’ordre de la série
on remarque qu’il y a apparition en alternance des groupes de type et de type .
3.2.3. Fonction
Considérons la fonction définie par
(4) |
Nous sommes dans un cas où les groupes de Galois qui apparaissent lorsque l’on considère les approximations de Padé d’ordre et ceux qui apparaissent lorsque l’on fait la troncature de la série entière obtenue à partir de sont du même type. Ceux-ci sont :
(5) |
où pour , la notation est celle de Butler et McKay [BuMc96] et désigne le m-ième groupe transitif d’ordre . Voir aussi [LMFDB] pour de plus amples informations sur ces groupes. Ceci laisse penser (à ce stade, ce n’est qu’une remarque basée sur des calculs numériques) que les groupes qui apparaissent sont des quotients de groupes de la forme
où est le groupe cyclique d’ordre . On peut donc conclure ce paragraphe avec enthousiasme : il y a de jolies propriétés à découvrir sur cette voie !
3.2.4. Fonction
L’exemple le plus abouti de notre étude concerne la fonction , et fait l’objet de la section 4.
4. Propriétés galoisiennes des approximations de la fonction
Nous regroupons ici des résultats concernant les approximations de la fonction . Le premier paragraphe est une remarque numérique : les troncatures de la série entière définissent des groupes de Galois non-abéliens dans tous les cas calculés. Le second paragraphe présente l’étude des approximants de Padé de cette même fonction, et nous donnons la preuve du théorème principal (le théorème 1.5) : les groupes de Galois obtenus sont abéliens !
4.1. Troncatures
Écrivons le développement limité au voisinage de
Le groupe de Galois de quelques est donné dans le tableau suivant.
Dans tous ces cas explicitement calculés, les groupes de Galois sont toujours soit , soit pour ces polynômes issus de troncatures de la série entière associée, ils sont donc loin d’être abéliens. Nous n’avons pas encore de preuve de cette propriété.
4.2. Approximants de Padé
Pour la fonction au voisinage de , l’approximant de Padé d’ordre vérifie
Un calcul rapide montre, pour , que les polynômes et obtenus ne sont pas toujours irréductibles, mais qu’ils semblent toujours définir des extensions abéliennes ! On peut lister quelques résultats dans le tableau ci-dessous, où désigne le groupe de Galois du polynôme , et le groupe cyclique d’ordre :
Outre le fait que l’on obtient des groupes de Galois abéliens, on remarque que dans tous les cas explicitement calculés, les et jouissent de propriétés de divisibilité semblables à celles des polynômes cyclotomiques :
(6) |
Ce n’est pas un hasard : on va à présent démontrer ces propriétés, ainsi que le caractère cyclotomique des polynômes , comme annoncé dans le théorème 1.5.
Posons , et considérons les approximants de Padé
On démontre ici que pour tout , les numérateurs définissent les corps abéliens réels . Commençons par donner une expression explicite des polynômes et . On fixe et .
Lemme 4.1.
Les numérateurs vérifient la relation de récurrence
(7) |
pour tout entier et sont donnés par l’expression suivante :
(8) |
Les dénominateurs vérifient la relation de récurrence
pour tout entier et sont donnés par l’expression suivante :
(9) |
Démonstration.
Listons les premiers termes , pour
Cela laisse entrevoir la récurrence (7). On tire de (7) une expression explicite de en fonction du discriminant, qui est égal à , et on obtient la forme annoncée en écrivant et d’une part, et et d’autre part. Les expressions pour ces premières valeurs sont justifiées par , et de même et , et on a bien . Ce calcul est de plus compatible avec notre convention pour et .
Il nous suffit donc de vérifier que les polynômes ainsi définis correspondent bien aux approximants de Padé : de fait, par une induction immédiate, est un polynôme de degré , et est de degré .
D’autre part, , de sorte que
Ainsi est bien l’approximant de Padé d’ordre de . ∎
Nous allons maintenant voir que la forme explicite donnée en (8) permet de retrouver les propriétés énoncées dans le théorème 1.5.
Démonstration.
(du théorème 1.5)
- —
- —
-
—
Par ailleurs, soit une racine -ième de l’unité, alors
d’où l’expression de .
-
—
car l’expression de est invariante par . Ceci implique .
On a l’inclusion réciproque : si avec pour un , alors , de sorte que
Ainsi le facteur (normalisé en fixant le terme constant égal à 1) de plus haut degré de est
qui est un polynôme irréductible de degré qui définit et a pour groupe de Galois
C’est la conclusion recherchée.
∎
Références
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