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Note sur les diviseurs élémentaires du régulateur d’Iwasawa
Bernadette Perrin-Riou
Université Paris-Saclay, CNRS, Laboratoire de mathématiques d’Orsay, 91405, Orsay, France.
Abstract
The article revisits a result of [4] concerning the structure
of the image by the Iwasawa regulator map
of the Iwasawa module associated with a semi-stable -adic representation
on an unramified finite extension of and gives a direct proof
based on the results of [7] in the crystalline case
and [8] in the semi-stable case.
Résumé
On reprend les résultats de [4]
concernant la structure de l’image par l’application régulateur d’Iwasawa
du module d’Iwasawa associée à une représentation -adique
semi-stable d’une extension finie non ramifiée de
et on en donne une démonstration directe s’appuyant sur les résultats de [7]
dans le cas cristallin et de [8] dans le cas semi-stable.
Soit un nombre premier impair,
le corps de définition sur des racines -ièmes
de l’unité pour , la réunion des
et le groupe de Galois de .
Rappelons que avec d’ordre premier à p.
Soit le caractère cyclotomique :
et la projection sur .
On fixe un générateur de :
est un générateur de et
.
Notons l’anneau des séries convergentes sur toute boule
pour . Ici, est la valeur absolue sur
normalisée par .
Si est un intervalle de
, on définit les espaces de fonctions analytiques:
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Pour et , on pose
.
On munit de la topologie de convergence uniforme sur l’ensemble
des tels que
pour sous-ensemble fermé de .
Les espaces sont complets.
La réunion des pour munie de la topologie de la limite
inductive est l’anneau de Robba. L’anneau introduit dans [8]
est le sous-espace de formé des éléments d’ordre fini, c’est-à-dire tels qu’il
existe un entier tel que
tend vers pour entre 0 et 1 dans
le domaine de convergence.
Introduisons comme dans [8] les anneaux des polynômes en à coefficients
dans ou .
Ici, est une branche du logarithme, c’est-à-dire n’importe quelle
fonction localement
analytique sur vérifiant
et dont la dérivée en 1 est
1. On munit ces espaces de la topologie induite par la convergence
coefficient par coefficient.
Ces espaces sont munis d’un opérateur induit par .
Soit le pseudo-inverse de caractérisé par
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L’anneau est à diviseurs élémentaires, ce qui signifie que
toute matrice admet une réduction diagonale :
pour toute matrice à coefficients dans , il existe des matrices unimodulaires
et telles que
avec ([2], [3]).
Ainsi, si est un -module de type fini et un sous--module de
de type fini, il existe une base de et des éléments
de vérifiant
et tels que soit un système générateur de .
On note , suite des diviseurs élémentaires définis à une unité près.
La transformée de Mellin-Amice induite par
définit une application :
qui se prolonge en un homomorphisme de
dans dont l’image est .
L’image de de est égale à .
Le groupe permute les avec .
Si est un -module et un caractère de dans
, désigne la composante isotypique de relatif à
et le projecteur associé de dans .
On pose pour ,
pour .
On fixe une unité -adique générateur de .
Cela induit un unique homomorphisme d’anneaux tel que
.
Si est un entier et si , on note ou
plus simplement .
Ainsi, .
On pose
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On a donc , .
Vu comme élément de , on a
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La restriction de à la couronne
est une unité dans
sauf si est de la forme avec .
Dans ce cas, est irréductible et égal à une unité près à .
Soit une extension finie non ramifiée de et l’homomorphisme de Frobenius associé
agissant sur .
Si est un -module de dimension finie sur (c’est-à-dire un
espace vectoriel sur muni d’un opérateur -linéaire) et
si , on définit (resp.
) comme la borne inférieure des réels tels que la suite
tend vers (resp. est
bornée) lorsque tend vers l’infini (avec ).
Cette définition s’étend à en considérant que
.
Soit une représentation -adique semi-stable du groupe de Galois absolu de ,
de dimension finie et soit
le -module filtré associé par la théorie de Fontaine :
c’est donc un -espace vectoriel de dimension muni d’un
opérateur , d’un opérateur nilpotent tel que et
d’une filtration décroissante exhaustive et séparée .
Notons un entier tel que
et un entier tel que
(si , les sauts de la filtration sont donc négatifs ou nuls).
Il est naturel de prendre pour
(resp. ) le plus petit entier vérifiant
(resp. ).
Notons
les poids de la filtration comptés avec multiplicité : on a
et .
Si est un poids de la filtration (,
la dimension de sur est égale au nombre d’entiers tels
que et la dimension de est égale
au nombre d’entiers tels que .
Dans [8], sont associés à
des -modules
contenus dans ,
de rang (-composante par -composante)
et munis d’une action de induite par
(le fait que est relié à une représentation -adique ne sert pas dans ces définitions).
Lorsque l’opérateur est nul sur , est égal à
et donc par la transformée d’Amice isomorphe à
. Dans le cas où est non nul,
que nous ne redéfinissons pas est encore isomorphe
à .
Soit le module d’Iwasawa
associé à : si est un réseau de stable par ,
est la limite projective des groupes de cohomologie tensorisé par .
Le module de torsion de est isomorphe à
et est isomorphe à par la dualité de Tate.
Soit l’homomorphisme de -modules
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défini dans [5] dans le cas cristallin et dans [8]
dans le cas semi-stable.
Les deux théorèmes suivants sont une conséquence de la loi de réciprocité
démontrée par Colmez ([1], voir aussi [6, §5] dans le cas cristallin
et [8, 5.3.6] dans le cas semi-stable) et sont démontrés dans [7, Th. 2.5.2])
(cas cristallin) et dans [8, Th. B2 et Prop. 5.4.5]) :
Théorème 1.
Notons le déterminant de calculé dans
une base du -module
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Alors
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Théorème 2.
Soit . Il existe un unique élément de tel que
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et on a
et
.
Il est facile de vérifier que ne dépend pas de vérifiant
et que
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On a ainsi défini un -morphisme
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Lorsque ,
est nul car isomorphe à et
n’a pas de -torsion.
Proposition 3.
Si ,
l’annulateur du -module est l’idéal engendré par
.
On peut voir cette proposition comme une propriété de "semi-simplicité" de :
l’annulateur n’a que des facteurs simples.
Démonstration.
On déduit du théorème 2
que si , appartient
à l’image de par .
En effet, on a
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et donc par injectivité de ,
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Ainsi, annule .
Montrons maintenant que est l’exposant
de . Pour cela, on travaille composante par composante de
.
Soit un caractère de et
soit un élément de annulant
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En prenant le pgcd de et
de (on utilise une identité de Bezout),
on peut supposer que est
un diviseur de . Notons
le quotient de par .
Soit un élément de . Il existe
tel que
. Par définition de ,
et
. Donc, l’image de est contenue
dans . On a
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d’où l’inclusion
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On en déduit que si est un diviseur irréductible de ,
donc divisant un des pour un entier tel que
, on a nécessairement
, ce qui est impossible
puisque pour un tel . Donc est une unité dans .
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Proposition 4.
Supposons .
Le déterminant de calculé dans des bases de
et de est le -idéal engendré par
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Démonstration.
La proposition se déduit de l’affirmation sur le déterminant de :
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∎
Théorème 5.
On suppose que pour tout entier .
La suite des diviseurs élémentaires des -modules
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est
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chaque terme étant répété fois.
Démonstration.
Vérifions que le résultat est compatible avec la valeur du déterminant.
Le produit des est égal à
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et
est bien égal au déterminant de .
Posons .
Notons la suite des diviseurs élémentaires de
.
Le générateur de son exposant
est égal à . Soit .
Comme les divisent , on peut écrire dans la couronne
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avec des suites décroissantes d’entiers égaux à 0 ou 1 et
des unités dans .
Les sont des unités sur sauf si
pour un entier ; dans ce cas, est égal à une unité près
à qui est -dominant (les zéros sont
les pour racine de l’unité d’ordre ).
Le nombre d’entiers tels que suffit à déterminer
les .
En comparant à la valeur du déterminant, on a (à une unité près)
|
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Les sont donc bien déterminés :
, ainsi que les
(en particulier, ils ne dépendent pas de ).
On en déduit le théorème.
∎
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Références
-
[1]
Pierre Colmez, Théorie d’Iwasawa des représentations de de Rham,
Annals of Math. 148 (1998), 485–571.
-
[2]
Irving Kaplansky, Elementary divisors and modules, Trans. Amer. Math.
Soc. MR 11-155. 66 (1949), 464–491.
-
[3]
Max Larsen, William Lewis, and Thomas Shores, Elementary divisor rings
and finitely presented modules, Trans. Amer. Math. Soc. /S7 (1974),
231–248.
-
[4]
Antonio Lei, David Loeffler, and Sarah Livia Zerbes, Coleman maps and the
-adic regulator, Algebraic and Number Theory 5 (2011),
1095–1131.
-
[5]
Bernadette Perrin-Riou, Théorie d’iwasawa des répresentations p-adiques
sur un corps local (avec un appendice de J.-M. Fontaine), Inventiones
mathematicae 115 (1994), no. 1, 81–150.
-
[6]
, Théorie d’Iwasawa et loi explicite de réciprocité : un remake
d’un article de P. Colmez, Doc. Math. 4 (1999), 215–269.
-
[7]
, Représentations -adiques et normes universelles: I. le cas
cristallin, Journal of the American Mathematical Society 13 (2000),
533–551.
-
[8]
, Théorie d’Iwasawa des représentations -adiques
semi-stables, vol. 84, Mém. Soc. Math. Fr., 2001.