Reconstruction anabélienne du squelette des courbes analytiques

Sylvain Gaulhiac
Résumé

Ce travail met en évidence certains comportements anabéliens des courbes analytiques au sens de la géométrie de Berkovich. Nous montrons que la connaissance du groupe fondamental tempéré de certaines courbes appelées analytiquement anabéliennes détermine leurs squelettes analytiques en tant que graphes. Le fameux demi-plan de Drinfeld en est un exemple. Le groupe fondamental tempéré d’un espace de Berkovich, introduit par André, a permis à Mochizuki de démontrer le premier résultat anabélien en géométrie de Berkovich, concernant les analytifiées de courbes hyperboliques sur ¯psubscript¯𝑝\overline{\mathbb{Q}}_{p}. À cette fin, Mochizuki développe le langage des semi-graphes d’anabélioïdes et des tempéroïdes. Cet article consiste à associer un semi-graphe d’anabélioïdes à une courbe analytique munie d’une triangulation minimale, puis s’inspirer des résultats de Mochizuki afin de retrouver le squelette analytique de la courbe. La nouveauté de ces résultats est que les courbes que nous étudions ne sont plus supposées de nature algébrique.


Mots-clés : Géométrie anabélienne, espaces de Berkovich, groupe fondamental tempéré, courbes analytiques, semi-graphe d’anabélioïdes.

Abstract

Reconstruction of the skeleton of analytic curves. This work brings to light some anabelian behaviours of analytic curves in the context of Berkovich geometry. We show that the knowledge of the tempered fundamental group of some curves called analytically anabelian determines their analytic skeletons as graphs. The famous Drinfeld half-plane is an example of such a curve. The tempered fundamental group of a Berkovich space, introduced by André, enabled Mochizuki to prove the first anabelian result in Berkovich geometry, dealing with analytifications of hyperbolic curves over ¯psubscript¯𝑝\overline{\mathbb{Q}}_{p}. To that end, Mochizuki develops the language of semi-graphs of anabelioids and temperoids. This article consists in associating a semi-graph of anabelioids to a Berkovich curve equipped with a minimal triangulation and in adapting the results of Mochizuki in order to recover the analytic skeleton. The novelty here is that the curves we are interested in are not supposed anymore to be of algebraic nature.


Keywords : Anabelian geometry, Berkovich spaces, tempered fundamental group, analytic curves, semi-graph of anabelioids.

Introduction

Dans la lignée des développements de la géométrie anabélienne dans le cas des courbes hyperboliques, il est loisible de se poser des questions d’inspiration anabélienne dans les espaces des Berkovich, à savoir :

Dans quelle mesure un espace k𝑘k-analytique est-il déterminé par son «  groupe fondamental  »?

Il est possible de définir en théorie de Berkovich plusieurs «  groupes fondamentaux  »  selon que ceux-ci classent les revêtements topologiques, étales finis, ou étales. Néanmoins le groupe fondamental topologique est souvent «  trop petit  » tandis que le groupe fondamental étale a tendance à être «  trop grand  » . Le groupe qui semble au mieux capturer les comportements anabéliens des espaces analytiques sur les corps non archimédiens est le groupe fondamental tempéré, introduit par Yves André dans [And]. Ce groupe classe les revêtements dits tempérés, définis comme les revêtements étales devenant topologiques après un changement de base fini étale, ce qui équivaut à demander que ces revêtements soient quotient d’un revêtement topologique d’un revêtement étale fini. Les revêtements topologiques tout autant que les revêtements étales finis sont des exemples de revêtements tempérés.

C’est Yves André, dans son article [And1], qui obtient pour la première fois des résultats de nature anabélienne en utilisant les espaces de Berkovich. À l’aide du groupe fondamental tempéré, il donne une description de nature géométrique des sous-groupes de Galois locaux Gpsubscript𝐺subscript𝑝G_{\mathbb{Q}_{p}} du groupe de Galois absolu Gsubscript𝐺G_{\mathbb{Q}} dans l’esprit de l’Esquisse d’un programme [Gro] de Grothendieck, puis introduit un avatar p𝑝p-adique du groupe de Grothendieck-Teichmüller GT^^𝐺𝑇\widehat{GT}. À la suite de cet article, ce sont Shinichi Mochizuki puis Emmanuel Lepage qui obtiennent les résultats les plus significatifs de géométrie anabélienne dans les espaces de Berkovich. Leurs résultats relient le groupe fondamental tempéré de l’analytifiée d’une courbe algébrique hyperbolique au graphe dual de sa réduction stable. Si X𝑋X est une courbe hyperbolique définie sur un corps ultramétrique complet k𝑘k algébriquement clos, nous savons que le type d’homotopie de l’analytifiée Xansuperscript𝑋anX^{\mathrm{an}} (au sens des espaces de Berkovich) peut être décrit à partir du modèle stable 𝒳𝒳\mathscr{X} de X𝑋X. Plus précisément, si 𝒳ssubscript𝒳𝑠\mathscr{X}_{s} désigne la fibre spéciale de 𝒳𝒳\mathscr{X}, le graphe dual de la réduction stable, noté 𝔾Xsubscript𝔾𝑋\mathbb{G}_{X}, est le graphe fini dont les sommets correspondent aux composantes irréductibles de 𝒳ssubscript𝒳𝑠\mathscr{X}_{s}, et dont les arêtes entre les sommets correspondent aux nœuds (i.e. aux singularités en les points doubles ordinaires, qui sont les seules singularités de 𝒳ssubscript𝒳𝑠\mathscr{X}_{s} par hypothèse de stabilité) entre les composantes irréductibles (une arête boucle sur le même sommet lorsqu’il s’agit d’un point d’auto-intersection). Notons X¯¯𝑋\overline{X} la compactification normale de X𝑋X. En définissant les cusps de X𝑋X comme l’ensemble des points de X¯¯𝑋\overline{X} n’appartenant pas à X𝑋X, il est possible d’enrichir 𝔾Xsubscript𝔾𝑋\mathbb{G}_{X} en un semi-graphe 𝔾X𝚌superscriptsubscript𝔾𝑋𝚌\mathbb{G}_{X}^{\mathtt{c}}, en ajoutant une arête ouverte (i.e. reliée seulement à un sommet en un bout, ouverte en l’autre bout) pour chaque cusp. Il existe alors un plongement topologique canonique 𝔾X𝚌Xansuperscriptsubscript𝔾𝑋𝚌superscript𝑋an\mathbb{G}_{X}^{\mathtt{c}}\hookrightarrow X^{\mathrm{an}} qui admet une rétraction par déformation Xan𝔾X𝚌superscript𝑋ansuperscriptsubscript𝔾𝑋𝚌X^{\mathrm{an}}\twoheadrightarrow\mathbb{G}_{X}^{\mathtt{c}} topologiquement propre ([Ber444]). L’espace analytique Xansuperscript𝑋anX^{\mathrm{an}} a donc le même type d’homotopie que 𝔾Xsubscript𝔾𝑋\mathbb{G}_{X} (et que 𝔾X𝚌superscriptsubscript𝔾𝑋𝚌\mathbb{G}_{X}^{\mathtt{c}}). Le graphe 𝔾Xsubscript𝔾𝑋\mathbb{G}_{X} ne garde pas la trace des cusps, tandis que ceux-ci jouent un rôle dans le modèle stable. Dans le cas où X𝑋X est la courbe hyperbolique obtenue en retirant 333 points à k1superscriptsubscript𝑘1\mathbb{P}_{k}^{1}, 𝔾Xsubscript𝔾𝑋\mathbb{G}_{X} est réduit à un singleton qui sera un point de type 222 dans Xansuperscript𝑋anX^{\mathrm{an}}, alors que 𝔾X𝚌superscriptsubscript𝔾𝑋𝚌\mathbb{G}_{X}^{\mathtt{c}} est constitué de trois arêtes ouvertes reliées à ce même sommet.

Résultats de Mochizuki et Lepage

Grâce au langage des anabélioïdes, des semi-graphes d’anabélioïdes et des tempéroïdes qu’il introduit en toute généralité dans [Mzk222] et [Mzk333] afin de donner une saveur géométrique aux objets définis catégoriquement telles les catégories galoisiennes, Mochizuki prouve dans [Mzk333] que le groupe fondamental tempéré de l’analytifiée d’une courbe hyperbolique détermine le graphe dual de sa réduction stable :

Théorème 0.1 ([Mzk333], Corollary 3.113113.11).

Si X1subscript𝑋1X_{1} et X2subscript𝑋2X_{2} sont deux courbes hyperboliques sur ¯psubscript¯𝑝\overline{\mathbb{Q}}_{p}, alors tout isomorphisme extérieur φ:π1temp(X1,pan)π1temp(X2,pan):𝜑similar-to-or-equalssuperscriptsubscript𝜋1tempsuperscriptsubscript𝑋1subscript𝑝ansuperscriptsubscript𝜋1tempsuperscriptsubscript𝑋2subscript𝑝an\varphi:\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X_{1,\mathbb{C}_{p}}^{\mathrm{an}})\simeq\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X_{2,\mathbb{C}_{p}}^{\mathrm{an}}) détermine, fonctoriellement en φ𝜑\varphi, un unique isomorphisme de graphes entre les graphes duaux étendus de leurs réductions stables : φ¯:𝔾X1𝚌𝔾X2𝚌:¯𝜑similar-to-or-equalssuperscriptsubscript𝔾subscript𝑋1𝚌superscriptsubscript𝔾subscript𝑋2𝚌\overline{\varphi}:\mathbb{G}_{X_{1}}^{\mathtt{c}}\simeq\mathbb{G}_{X_{2}}^{\mathtt{c}}.

Mochizuki montre plus précisément qu’il est possible de reconstruire le graphe 𝔾Xsubscript𝔾𝑋\mathbb{G}_{X} de la réduction stable d’une courbe hyperbolique X𝑋X à partir d’une (p)superscript𝑝(p^{\prime})-version π1temp,(p)(Xan)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝superscript𝑋an\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,\,(p^{\prime})}(X^{\mathrm{an}}) du groupe fondamental tempéré qui se construit à partir de celui-ci en prenant la limite projective des quotients ayant un sous-groupe distingué sans torsion d’indice fini premier à p𝑝p. Ce groupe classe l’ensemble des revêtements (tempérés) qui deviennent topologiques après un changement de base étale fini de degré premier à p𝑝p. La reconstruction du graphe à partir de ce groupe est la suivante :

  • les sommets de 𝔾Xsubscript𝔾𝑋\mathbb{G}_{X} correspondent aux classes de conjugaison des sous-groupes compacts maximaux de π1temp,(p)(Xan)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝superscript𝑋an\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,\,(p^{\prime})}(X^{\mathrm{an}});

  • les arêtes de 𝔾Xsubscript𝔾𝑋\mathbb{G}_{X} correspondent aux classes de conjugaison des intersections non triviales de deux sous-groupes compacts maximaux de π1temp,(p)(Xan)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝superscript𝑋an\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,\,(p^{\prime})}(X^{\mathrm{an}}).

Quelques années plus tard, en 201020102010, Emmanuel Lepage précise le résultat de Mochizuki en montrant que si le groupe fondamental tempéré détermine en effet le graphe dual de la réduction stable d’une courbe hyperbolique, il le détermine également dans certains cas en tant que graphe métrique, c’est-à-dire que la connaissance du groupe fondamental tempéré permet de retrouver la métrique naturelle qui existe sur le graphe dual 𝔾Xsubscript𝔾𝑋\mathbb{G}_{X} de la réduction stable. Cette métrique est telle que la longueur d’une arête correspondant à un nœud est la largeur de la couronne correspondant à la fibre générique de la complétion formelle en ce nœud. Une condition suffisante assurant un tel résultat de reconstruction métrique est de se restreindre aux courbes dites de Mumford, c’est-à-dire aux courbes algébriques propres dont les composantes irréductibles normalisées de la réduction stable sont isomorphes à 1superscript1\mathbb{P}^{1} (ce qui en théorie de Berkovich équivaut à dire que l’analytifié Xansuperscript𝑋anX^{\mathrm{an}} est localement isomorphe à un ouvert de 1,ansuperscript1an\mathbb{P}^{1,\mathrm{an}}, ou encore que le genre topologique de Xansuperscript𝑋anX^{\mathrm{an}} est le genre de X𝑋X, ou encore que Xansuperscript𝑋anX^{\mathrm{an}} admet une uniformisation par un ouvert de 1,ansuperscript1an\mathbb{P}^{1,\mathrm{an}}, ou encore qu’il n’a pas de point de type 222 de genre >0absent0>0 …).

Théorème 0.2 ([Lep1], Th. 4.124124.12; [Lep2], Th. 121212).

Soient X1subscript𝑋1X_{1} et X2subscript𝑋2X_{2} deux courbes hyperboliques de Mumford sur ¯psubscript¯𝑝\overline{\mathbb{Q}}_{p}, et φ:π1temp(X1an)π1temp(X2an):𝜑similar-to-or-equalssuperscriptsubscript𝜋1tempsuperscriptsubscript𝑋1ansuperscriptsubscript𝜋1tempsuperscriptsubscript𝑋2an\varphi:\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X_{1}^{\mathrm{an}})\simeq\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X_{2}^{\mathrm{an}}) un isomorphisme. Alors l’isomorphisme entre les graphes duaux des réductions stables : φ¯:𝔾X1𝔾X2:¯𝜑similar-to-or-equalssubscript𝔾subscript𝑋1subscript𝔾subscript𝑋2\overline{\varphi}:\mathbb{G}_{X_{1}}\simeq\mathbb{G}_{X_{2}} est un isomorphisme de graphes métriques.

Lepage va plus loin dans son article [Lep3]. En utilisant des techniques de résolution des non-singularités et en prouvant qu’une courbe de Mumford sur ¯psubscript¯𝑝\overline{\mathbb{Q}}_{p} vérifie une telle résolution, il montre que le groupe tempéré de l’analytifiée d’une courbe de Mumford détermine son espace topologique sous-jacent. Il utilise pour cela un homéomorphisme entre l’analytifiée de toute ¯psubscript¯𝑝\overline{\mathbb{Q}}_{p}-courbe propre et lisse et la limite projective des graphes duaux de toutes les réductions semi-stables de la courbe.

Théorème 0.3 ([Lep3], Theorem 3.9393.9).

Soient X1subscript𝑋1X_{1} et X2subscript𝑋2X_{2} deux courbes hyperboliques de Mumford sur ¯psubscript¯𝑝\overline{\mathbb{Q}}_{p}, et φ:π1temp(X1an)π1temp(X2an):𝜑similar-to-or-equalssuperscriptsubscript𝜋1tempsuperscriptsubscript𝑋1ansuperscriptsubscript𝜋1tempsuperscriptsubscript𝑋2an\varphi:\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X_{1}^{\mathrm{an}})\simeq\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X_{2}^{\mathrm{an}}) un isomorphisme. Alors φ𝜑\varphi induit un homéomorphisme entre les analytifiées :

X1anX2an.similar-tosuperscriptsubscript𝑋1ansuperscriptsubscript𝑋2anX_{1}^{\mathrm{an}}\xrightarrow{\sim}X_{2}^{\mathrm{an}}.

Dans le cas des courbes de Tate, il obtient même mieux en montrant, toujours grâce à la résolution des non-singularités, que le groupe fondamental tempéré d’une courbe de Tate épointée détermine l’espace analytique de la courbe de Tate.

Théorème 0.4.

Soient q1,q2¯psubscript𝑞1subscript𝑞2subscript¯𝑝q_{1},q_{2}\in\overline{\mathbb{Q}}_{p}, tels que |q1|<1subscript𝑞11|q_{1}|<1 et |q2|<1subscript𝑞21|q_{2}|<1. Pour i{1,2}𝑖1.2i\in\{1,2\}, posons Ei=𝔾man/qisubscript𝐸𝑖superscriptsubscript𝔾𝑚ansuperscriptsubscript𝑞𝑖E_{i}=\mathbb{G}_{m}^{\mathrm{an}}/q_{i}^{\mathbb{Z}} et Xi=Ei{1}subscript𝑋𝑖subscript𝐸𝑖1X_{i}=E_{i}\setminus\{1\}. Si les groupes tempérés πtemp(X1)superscript𝜋tempsubscript𝑋1\pi^{\mathrm{temp}}(X_{1}) et πtemp(X2)superscript𝜋tempsubscript𝑋2\pi^{\mathrm{temp}}(X_{2}) sont isomorphes, alors il existe σGp=Gal(¯p/p)𝜎subscript𝐺subscript𝑝Galsubscript¯𝑝subscript𝑝\sigma\in G_{\mathbb{Q}_{p}}=\mathrm{Gal}(\overline{\mathbb{Q}}_{p}/\mathbb{Q}_{p}) tel que σ(q1)=q2𝜎subscript𝑞1subscript𝑞2\sigma(q_{1})=q_{2}, et E1subscript𝐸1E_{1} et E2subscript𝐸2E_{2} sont isomorphes en tant qu’espaces psubscript𝑝\mathbb{Q}_{p}-analytiques.

Contenu de l’article

Ces résultats concernent les courbes analytiques de nature algébrique, c’est-à-dire les analytifiées de courbes algébriques. Or, la théorie des espaces analytiques de Berkovich est suffisamment riche pour faire apparaître toutes sortes de courbes qui sont essentiellement de nature analytique, sans provenir directement de courbes algébriques. Les exemples les plus simples mais non moins importants de telles courbes sont les couronnes et les disques analytiques. Si k𝑘k est un corps ultramétrique complet, les couronnes (respectivement les disques) k𝑘k-analytiques sont les espaces k𝑘k-analytiques isomorphes au domaine k𝑘k-analytique de k1,ansuperscriptsubscript𝑘1an\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}} défini par la condition {|T|I}𝑇𝐼\{|T|\in I\} pour un certain intervalle non vide I𝐼I de +×superscriptsubscript\mathbb{R}_{+}^{\times} (resp. de +subscript\mathbb{R}_{+} et contenant 00 et rencontrant +superscriptsubscript\mathbb{R}_{+}^{*}). Dans le sillage des résultats de Mochizuki et de Lepage, il est naturel de se demander si des résultats anabéliens similaires existent pour les courbes k𝑘k-analytiques sans imposer que celles-ci soient de nature algébrique.

Les résultats évoqués ci-dessus faisant apparaître le graphe dual de la réduction stable 𝔾Xsubscript𝔾𝑋\mathbb{G}_{X}, il convient d’en trouver pour les courbes k𝑘k-analytiques un analogue défini uniquement dans le langage de la géométrie analytique sans requérir une quelconque nature algébrique. C’est le squelette analytique qui jouera ce rôle : si X𝑋X est une courbe k𝑘k-analytique quasi-lisse, le squelette analytique de X𝑋X, noté San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X), est défini comme l’ensemble des points de X𝑋X qui n’appartiennent à aucun disque analytique ouvert. Le squelette San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) est alors un semi-graphe localement fini. Remarquons que San(X)=superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X)=\emptyset lorsque X=k1,an𝑋superscriptsubscript𝑘1anX=\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}} et que k1,ansuperscriptsubscript𝑘1an\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}} est l’unique courbe k𝑘k-analytique quasi-lisse, connexe et compacte de squelette analytique vide lorsque k𝑘k est algébriquement clos. Par ailleurs, le squelette analytique est homéomorphe à un cercle pour une courbe de Tate, c’est-à-dire l’analytifiée d’une courbe elliptique à mauvaise réduction. Dès que l’application naturelle π0(San(X))π0(X)subscript𝜋0superscript𝑆an𝑋subscript𝜋0𝑋\pi_{0}(S^{\mathrm{an}}(X))\rightarrow\pi_{0}(X) est surjective, il existe une rétraction par déformation XSan(X)𝑋superscript𝑆an𝑋X\twoheadrightarrow S^{\mathrm{an}}(X) topologiquement propre. En particulier, dans ce cas, X𝑋X a le type d’homotopie de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X).

Lorsque k𝑘k est algébriquement clos, nous appellerons courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique (3.29) toute courbe k𝑘k-analytique X𝑋X, quasi-lisse et connexe, telle que l’ensemble des nœuds (2.16) de son squelette analytique soit non vide et constitué uniquement de noeuds hyperboliques (3.26). Une courbe k𝑘k-analytiquement anabélienne sera alors définie comme une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique vérifiant une condition technique, dite d’ascendance vicinale (3.56), permettant la reconstruction des arêtes ouvertes. L’analytifiée 𝒳ansuperscript𝒳an\mathscr{X}^{\mathrm{an}} d’une k𝑘k-courbe algébrique 𝒳𝒳\mathscr{X} est k𝑘k-analytiquement hyperbolique si et seulement si 𝒳𝒳\mathscr{X} est une courbe hyperbolique, auquel cas 𝒳ansuperscript𝒳an\mathscr{X}^{\mathrm{an}} est k𝑘k-analytiquement anabélienne. Nous montrons dans ce papier le résultat suivant lorsque k𝑘k est un corps non archimédien complet, non trivialement valué et algébriquement clos :


Théorème A : Soient X1subscript𝑋1X_{1} et X2subscript𝑋2X_{2} deux courbes k𝑘k-analytiquement anabéliennes. Tout isomorphisme entre les groupes tempérés : φ:π1temp(X1)π2temp(X2):𝜑similar-tosuperscriptsubscript𝜋1tempsubscript𝑋1superscriptsubscript𝜋2tempsubscript𝑋2\varphi:\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X_{1})\xrightarrow{\sim}\pi_{2}^{\mathrm{temp}}(X_{2}) induit (fonctoriellement en φ𝜑\varphi) un isomorphisme de semi-graphes entre les squelettes analytiques associés : φ¯:San(X1)San(X2).:¯𝜑similar-tosuperscript𝑆ansubscript𝑋1superscript𝑆ansubscript𝑋2\overline{\varphi}:S^{\mathrm{an}}(X_{1})\xrightarrow{\sim}S^{\mathrm{an}}(X_{2}).

Pour certaines courbes anabéliennes, dites à arêtes relativement compactes (cf. 3.42), l’isomorphisme φ𝜑\varphi du théorème ci-dessus peut être remplacé par l’hypothèse moins forte d’un isomorphisme entre les versions premières à p𝑝p, π1temp,(p)(Xi)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝subscript𝑋𝑖\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X_{i}) (cf. 2.47), des groupes tempérés π1temp(Xi)superscriptsubscript𝜋1tempsubscript𝑋𝑖\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X_{i}).

Un exemple intéressant de courbe k𝑘k-analytiquement anabélienne (à arêtes relativement compactes) est celui du demi-plan de Drinfeld, d’un intérêt majeur en théorie des nombres et analogue non archimédien du demi-plan de Poincaré. Soit k0subscript𝑘0k_{0} un corps non-archimédien local de caractéristique positive (i.e. k0subscript𝑘0k_{0} est soit une extension finie de psubscript𝑝\mathbb{Q}_{p}, soit du type 𝔽q((T))subscript𝔽𝑞𝑇\mathbb{F}_{q}((T))) contenu dans le corps ultramétrique complet et algébriquement clos k𝑘k dont la valuation prolonge celle de k0subscript𝑘0k_{0}. Le demi-plan de Drinfeld, noté 𝔇k/k01subscriptsuperscript𝔇1𝑘subscript𝑘0\mathfrak{D}^{1}_{k/k_{0}}, est la courbe k𝑘k-analytique définie en tant qu’ouvert de k1,ansuperscriptsubscript𝑘1an\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}} par :

𝔇k/k01=k1,ank1,an(k0).subscriptsuperscript𝔇1𝑘subscript𝑘0superscriptsubscript𝑘1ansuperscriptsubscript𝑘1ansubscript𝑘0\mathfrak{D}^{1}_{k/k_{0}}=\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}}\setminus\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}}(k_{0}).

Il s’agit d’une courbe k𝑘k-analytiquement anabélienne, non compacte, dont le squelette analytique n’est autre que l’immeuble de Bruhat-Tits de SL2/k0subscriptSL2subscript𝑘0\mathrm{SL}_{2}/k_{0}, noté 𝔅k01subscriptsuperscript𝔅1subscript𝑘0\mathfrak{B}^{1}_{k_{0}}. L’anabélianité du demi-plan de Drinfeld nous permet d’énoncer le résultat suivant :


Proposition B : Pour i{1,2}𝑖1.2i\in\{1,2\}, soit pisubscript𝑝𝑖p_{i} un nombre premier et kisubscript𝑘𝑖k_{i} un corps de nombres pisubscript𝑝𝑖p_{i}-adique, c’est-à-dire une extension finie de pisubscriptsubscript𝑝𝑖\mathbb{Q}_{p_{i}}. Supposons les groupes suivants isomorphes :

π1temp,(p1)(𝔇p1/k11)π1temp,(p2)(𝔇p2/k21),similar-to-or-equalssuperscriptsubscript𝜋1tempsuperscriptsubscript𝑝1subscriptsuperscript𝔇1subscriptsubscript𝑝1subscript𝑘1superscriptsubscript𝜋1tempsuperscriptsubscript𝑝2subscriptsuperscript𝔇1subscriptsubscript𝑝2subscript𝑘2{\pi_{1}^{\mathrm{temp},(p_{1}^{\prime})}(\mathfrak{D}^{1}_{\mathbb{C}_{p_{1}}/k_{1}})\simeq\pi_{1}^{\mathrm{temp},(p_{2}^{\prime})}(\mathfrak{D}^{1}_{\mathbb{C}_{p_{2}}/k_{2}})},

alors p1=p2subscript𝑝1subscript𝑝2p_{1}=p_{2}, et les extensions k1/p1subscript𝑘1subscriptsubscript𝑝1k_{1}/\mathbb{Q}_{p_{1}} et k2/p2subscript𝑘2subscriptsubscript𝑝2k_{2}/\mathbb{Q}_{p_{2}} ont même degré d’inertie : [k1~:𝔽p1]=[k2~:𝔽p2][\widetilde{k_{1}}:\mathbb{F}_{p_{1}}]=[\widetilde{k_{2}}:\mathbb{F}_{p_{2}}], d’où un isomorphisme k1~k2~similar-to-or-equals~subscript𝑘1~subscript𝑘2\widetilde{k_{1}}\simeq\widetilde{k_{2}}.

Certaines courbes k𝑘k-analytiquement anabéliennes peuvent par ailleurs être hyperboliques tout en ayant dans leur squelette analytique des arêtes ouvertes (appelées cusps). La quête de la propriété d’anabélianité parmi les courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques nous amène à définir deux types de cusps privilégiés : les cusps coronaires finis et discaux épointés (3.59). En traitant les cusps coronaires finis à l’aide d’une condition de total déploiement de certains μpsubscript𝜇𝑝\mu_{p}-torseurs (2.36) et les cusps discaux épointés par un résultat de Mochizuki (3.61), nous obtenons finalement le théorème suivant :


Théorème C Soit k𝑘k un corps ultramétrique complet algébriquement clos et non trivialement valué. Alors les trois types de courbes ci-dessous sont k𝑘k-analytiquement anabéliennes :

  • les courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques à arêtes relativement compactes;

  • si k𝑘k est de caractéristique mixte : les courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques dont tous les cusps sont coronaires finis;

  • si k𝑘k est de caractéristique mixte : les courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques dont le squelette analytique est un semi-graphe fini et dont les cusps sont coronaires finis ou discaux épointés.

Ces cas ne traitent néanmoins pas toutes les courbes k𝑘k-analytiques hyperboliques, et nous ne savons pas pour le moment si toutes les courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques sont k𝑘k-analytiquement anabéliennes.


Nous présentons dans §1§1\S 1 le langage des semi-graphes d’anabélioïdes et des tempéroïdes que Mochizuki introduit dans [Mzk333], afin d’énoncer le théorème 1.44 ([Mzk333], Corollary 3.9393.9) selon lequel, sous certaines hypothèses que nous qualifierons de mochizukiennes, un graphe d’anabélioïdes 𝒢𝒢\mathcal{G} est déterminé par le tempéroïde connexe temp(𝒢)superscripttemp𝒢\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}) qui lui est associé.

La partie §2§2\S 2 se concentre sur les courbes k𝑘k-analytiques. Après avoir introduit dans 2.1 quelques notions de base sur les courbes k𝑘k-analytiques, nous définissons dans 2.2 la notion de triangulation, de triangulation généralisée, de squelette et de nœuds d’une courbe k𝑘k-analytique, en nous inspirant très largement de l’étude systématique des courbes analytiques entreprise par A. Ducros dans [Duc]. Cela nous permet d’associer à une courbe k𝑘k-analytique quasi-lisse munie d’une triangulation généralisée S𝑆S des graphe et semi-graphe d’anabélioïdes 𝒢(X,S)superscript𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}^{\natural}(X,S) et 𝒢(X,S)𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}(X,S) que l’on définit à partir des revêtements modérés autour des points de la triangulation. La partie 2.3 est l’occasion de définir les revêtements tempérés ainsi que le groupe fondamental tempéré d’un espace strictement k𝑘k-analytique.

C’est dans ce nouveau cadre analytique que nous transposons, dans §3§3\S 3, les résultats anabéliens de Mochizuki de reconstruction d’un graphe d’anabélioïdes à partir du tempéroïde connexe associé. Nous entreprenons dans 3.1 la description du semi-graphe d’anabéloïdes 𝒢(X,S)𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}(X,S). La description des composantes coronaires découle d’un résultat de Berkovich sur l’aspect kummérien des revêtements modérés des couronnes analytiques, tandis que la description des composantes sommitales, plus délicate, repose sur la trivialité des revêtements modérés des disques ([Ber444]), mais également sur la description des revêtements autour d’un point. Nous introduisons pour cela la courbe résiduelle 𝒞xsubscript𝒞𝑥\mathscr{C}_{x} associée à un point x𝑥x de type 222, ainsi que des résultats assez fins de [Duc] sur les valuations associées aux branches et l’application bijective de l’ensemble des branches issues de x𝑥x sur l’ensemble des points fermés d’un ouvert de Zariski de la courbe résiduelle 𝒞xsubscript𝒞𝑥\mathscr{C}_{x}. La partie 3.2 consiste à comprendre sous quelles contraintes sur la courbe X𝑋X et la triangulation généralisée S𝑆S le graphe d’anabélioïdes 𝒢(X,S)superscript𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}^{\natural}(X,S) vérifie l’ensemble des conditions mochizukiennes. Ces hypothèses étant malaisées à vérifier directement, nous nous servirons d’une remarque de Mochizuki ([Mzk333], Example 2.102102.10) selon laquelle l’ensemble des hypothèses mochizukiennes sont vérifiées sous des conditions plus simples, et notre travail consiste alors à montrer sous quelles contraintes sur X𝑋X et S𝑆S ces conditions sont vérifiées par 𝒢(X,S)superscript𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}^{\natural}(X,S). Ces considérations nous amènent à définir l’ensemble des courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques (3.29), puis k𝑘k-analytiquement anabéliennes (3.56), avant d’énoncer et de prouver nos résultats.


REMERCIEMENTS

Je tiens à exprimer toute ma reconnaissance à Antoine Ducros pour sa disponibilité lors de nos échanges mathématiques et pour ses nombreuses idées et commentaires dont la pertinence a souvent éclairé des points qui m’étaient obscurs. Je tiens également à remercier Emmanuel Lepage dont vient l’idée de départ de cet article et des méthodes mises en œuvre, ainsi que Shinichi Mochizuki qui a pris le temps de répondre consciencieusement à certaines de mes questions.

1 Résultats de Mochizuki

Nous allons présenter le langage des semi-graphes d’anabélioïdes et de tempéroïdes utilisé par Mochizuki dans [Mzk111], [Mzk222] et [Mzk333] .

Commençons par définir un semi-graphe 𝔾𝔾\mathbb{G} qui consiste en une collection de données suivante :

  • un ensemble 𝒱(𝔾)𝒱𝔾\mathcal{V}(\mathbb{G}) dont les éléments sont appelés sommets;

  • un ensemble (𝔾)𝔾\mathcal{E(\mathbb{G})} dont les éléments sont appelés arêtes et consistent en des ensembles de cardinal au plus 222 dont les éléments sont les branches, et tels que si e,e(𝔾)𝑒superscript𝑒𝔾e,e^{\prime}\in\mathcal{E}(\mathbb{G}) : eeee=𝑒superscript𝑒𝑒superscript𝑒e\neq e^{\prime}\Rightarrow e\cap e^{\prime}=\emptyset;

  • une collection ζ(𝔾)𝜁𝔾\zeta(\mathbb{G}) de flèches (ζe)e(𝔾)subscriptsubscript𝜁𝑒𝑒𝔾\left(\zeta_{e}\right)_{e\in\mathcal{E}(\mathbb{G})} avec ζe:e𝒱(𝔾):subscript𝜁𝑒𝑒𝒱𝔾\zeta_{e}:e\rightarrow\mathcal{V}(\mathbb{G})

Si v=ζe(b)𝑣subscript𝜁𝑒𝑏v=\zeta_{e}(b) pour une arête e𝑒e, une branche b𝑏b de e𝑒e et un sommet v𝑣v, on dira que e𝑒e (ou b𝑏b) aboutit à v𝑣v. Un semi-graphe 𝔾𝔾\mathbb{G} sera dit fini (resp. dénombrable) si les deux ensembles 𝒱(𝔾)𝒱𝔾\mathcal{V}(\mathbb{G}) et (𝔾)𝔾\mathcal{E}(\mathbb{G}) sont finis (resp. dénombrables), et localement fini si pour chaque sommet v𝒱(𝔾)𝑣𝒱𝔾v\in\mathcal{V}(\mathbb{G}) l’ensemble des arêtes aboutissant à v𝑣v est fini. On parlera de graphe lorsque toutes les arêtes contiennent deux branches.

Un morphisme entre deux semi-graphes

𝔾={𝒱(𝔾),(𝔾),ζ(𝔾)}𝔾={𝒱(𝔾),(𝔾),ζ(𝔾)}𝔾𝒱𝔾𝔾𝜁𝔾superscript𝔾𝒱superscript𝔾superscript𝔾𝜁superscript𝔾\mathbb{G}=\{\mathcal{V}(\mathbb{G}),\mathcal{E}(\mathbb{G}),\zeta(\mathbb{G})\}\rightarrow\mathbb{G}^{\prime}=\{\mathcal{V}(\mathbb{G}^{\prime}),\mathcal{E}(\mathbb{G}^{\prime}),\zeta(\mathbb{G}^{\prime})\}

est une collection d’applications 𝒱(𝔾)𝒱(𝔾)𝒱𝔾𝒱superscript𝔾\mathcal{V}(\mathbb{G})\rightarrow\mathcal{V}(\mathbb{G}^{\prime}), (𝔾)(𝔾)𝔾superscript𝔾\mathcal{E}(\mathbb{G})\rightarrow\mathcal{E}(\mathbb{G}^{\prime}) qui rend compatibles entre elles les collections ζ(𝔾)𝜁𝔾\zeta(\mathbb{G}) et ζ(𝔾)𝜁superscript𝔾\zeta(\mathbb{G}^{\prime}) et telle que si l’arête e𝑒e de 𝔾𝔾\mathbb{G} est envoyée sur l’arête esuperscript𝑒e^{\prime} de 𝔾superscript𝔾\mathbb{G}^{\prime}, alors on a une injection ee𝑒superscript𝑒e\hookrightarrow e^{\prime}. Une arête de 𝔾𝔾\mathbb{G} ne peut donc pas être envoyée sur une arête de 𝔾superscript𝔾\mathbb{G}^{\prime} qui a un nombre strictement inférieur de branches.

1.1 Le monde des anabélioïdes

Si G𝐺G est un groupe profini, nous noterons (G)𝐺\mathcal{B}(G) la catégorie des ensembles finis sur lesquels G𝐺G opère continûment (i.e. de manière à ce que les stabilisateurs des points soient des sous-groupes ouverts de G𝐺G). Soit 𝔈𝔫𝔰f𝔈𝔫superscript𝔰f\mathfrak{Ens}^{\mathrm{f}} la catégorie des ensembles finis, et

βG:(G)𝔈𝔫𝔰f:superscriptsubscript𝛽𝐺𝐺𝔈𝔫superscript𝔰f\beta_{G}^{*}:\mathcal{B}(G)\rightarrow\mathfrak{Ens}^{\mathrm{f}}

le foncteur « oubli » défini en oubliant l’action de G𝐺G. Le foncteur βGsuperscriptsubscript𝛽𝐺\beta_{G}^{*} est exact (i.e. commute aux colimites finies et limites finies) et conservatif (i.e. un morphisme α𝛼\alpha de (G)𝐺\mathcal{B}(G) est un isomorphisme si et seulement si βG(α)superscriptsubscript𝛽𝐺𝛼\beta_{G}^{*}(\alpha) est un isomorphisme de 𝔈𝔫𝔰f𝔈𝔫superscript𝔰f\mathfrak{Ens}^{\mathrm{f}}).

Rappelons (voir [Cad] ou [SGA111], Exposé 555 pour une exposition détaillée) qu’une catégorie 𝒳𝒳\mathcal{X} est appelée catégorie galoisienne si elle est équivalente à une catégorie de la forme (G)𝐺\mathcal{B}(G) avec G𝐺G un groupe profini.

Grothendieck en donne également une caractérisation ne faisant appel à aucun groupe profini. Plus précisément, en vertu de [SGA111] (Exposé 555, Th. 4.1414.1), une catégorie 𝒳𝒳\mathcal{X} est galoisienne si elle seulement si elle vérifie les conditions suivantes :

  • les limites finies et les colimites finies existent dans 𝒳𝒳\mathcal{X},

  • il existe un foncteur covariant β:𝒳𝔈𝔫𝔰f:superscript𝛽𝒳𝔈𝔫superscript𝔰f\beta^{*}:\mathcal{X}\rightarrow\mathfrak{Ens}^{\mathrm{f}} qui est exact et conservatif,

  • tout morphisme u:XY:𝑢𝑋𝑌u:X\rightarrow Y de 𝒳𝒳\mathcal{X} se factorise par XuYu′′Ysuperscript𝑢𝑋superscript𝑌superscript𝑢′′𝑌X\xrightarrow{u^{\prime}}Y^{\prime}\xrightarrow{u^{\prime\prime}}Yusuperscript𝑢u^{\prime} est un épimorphisme strict et u′′superscript𝑢′′u^{\prime\prime} un monomorphisme qui induit un isomorphisme sur un sommande direct de Y𝑌Y.

Un tel foncteur β:𝒳𝔈𝔫𝔰f:superscript𝛽𝒳𝔈𝔫superscript𝔰f\beta^{*}:\mathcal{X}\rightarrow\mathfrak{Ens}^{\mathrm{f}} exact et conservatif est appelé un foncteur fondamental de la catégorie galoisienne 𝒳𝒳\mathcal{X}. La donnée d’un foncteur fondamental βsuperscript𝛽\beta^{*} permet de construire une équivalence de catégorie entre 𝒳𝒳\mathcal{X} et (π1(𝒳,β))subscript𝜋1𝒳superscript𝛽\mathcal{B}(\pi_{1}(\mathcal{X},\beta^{*})) où le groupe profini π1(𝒳,β)subscript𝜋1𝒳superscript𝛽\pi_{1}(\mathcal{X},\beta^{*}) est défini par :

π1(𝒳,β):=Aut(β),assignsubscript𝜋1𝒳superscript𝛽Autsuperscript𝛽\pi_{1}(\mathcal{X},\beta^{*}):=\mathrm{Aut}(\beta^{*}),

équivalence par laquelle le foncteur βsuperscript𝛽\beta^{*} est identifié à βπ1(𝒳,β)subscriptsuperscript𝛽subscript𝜋1𝒳superscript𝛽\beta^{*}_{\pi_{1}(\mathcal{X},\beta^{*})}.

Le groupe π1(𝒳,β)subscript𝜋1𝒳superscript𝛽\pi_{1}(\mathcal{X},\beta^{*}) est appelé le groupe fondamental de la catégorie galoisienne 𝒳𝒳\mathcal{X} munie du foncteur fondamental βsuperscript𝛽\beta^{*}. Deux foncteurs fondamentaux sont toujours isomorphes, et un tel isomorphisme induit fonctoriellement un isomorphisme de groupes fondamentaux. Par ailleurs, tout automorphisme d’un foncteur fondamental induit un automorphisme intérieur du groupe fondamental. De là, la classe d’isomorphismes de π1(𝒳,β)subscript𝜋1𝒳superscript𝛽\pi_{1}(\mathcal{X},\beta^{*}) ne dépend pas de βsuperscript𝛽\beta^{*}, et nous pouvons considérer le groupe fondamental π1(𝒳)subscript𝜋1𝒳\pi_{1}(\mathcal{X}) de 𝒳𝒳\mathcal{X}, défini à unique isomorphisme extérieur près. C’est un groupe profini. Remarquons qu’une catégorie galoisienne est connexe puisqu’elle possède un objet final, la limite vide.

Afin de développer une intuition plus géométrique et d’être cohérent avec la philosophie anabélienne de Mochizuki nous conserverons la terminologie de [Mzk222] en appelant anabélioïde connexe toute catégorie 𝒳𝒳\mathcal{X} équivalente à une catégorie de la forme (G)𝐺\mathcal{B}(G)G𝐺G est un groupe profini. Ainsi un anabélioïde connexe n’est autre qu’une catégorie galoisienne, mais dont les morphismes sont définis dans l’autre sens.

Définition 1.1.

Si 𝒳𝒳\mathcal{X} et 𝒴𝒴\mathcal{Y} sont des anabélioïdes connexes, un morphisme d’anabélioïdes φ:𝒳𝒴:𝜑𝒳𝒴{\varphi:\mathcal{X}\rightarrow\mathcal{Y}} est défini comme étant un foncteur exact φ:𝒴𝒳:superscript𝜑𝒴𝒳\varphi^{*}:\mathcal{Y}\rightarrow\mathcal{X}. Un isomorphisme d’anabélioïdes entre deux anabélioïdes connexes est un morphisme dont le foncteur correspondant est une équivalence de catégories.

Exemple 1.2.

Si X𝑋X et Y𝑌Y sont soit deux k𝑘k-schémas localement noethériens connexes non vides, soit deux bons espaces k𝑘k-analytiques connexes, la catégorie Covalg(X)superscriptCovalg𝑋\mathrm{Cov}^{\mathrm{alg}}(X) (resp Covalg(Y)superscriptCovalg𝑌\mathrm{Cov}^{\mathrm{alg}}(Y)) des revêtements étales finis de X𝑋X (resp. de Y𝑌Y) est une catégorie galoisienne, donc un anabélioïde connexe. Un morphisme de k𝑘k-schémas (ou d’espaces k𝑘k-analytiques) φ:XY:𝜑𝑋𝑌\varphi:X\rightarrow Y induit par changement de base un foncteur exact φ:Covalg(Y)Covalg(X):superscript𝜑superscriptCovalg𝑌superscriptCovalg𝑋\varphi^{*}:\mathrm{Cov}^{\mathrm{alg}}(Y)\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{alg}}(X), i.e. un morphisme d’anabélioïdes φ:Covalg(X)Covalg(Y):𝜑superscriptCovalg𝑋superscriptCovalg𝑌\varphi:\mathrm{Cov}^{\mathrm{alg}}(X)\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{alg}}(Y), ce qui explique le choix de ce sens des flèches. Le groupe fondamental de l’anabélioïde connexe Covalg(X)superscriptCovalg𝑋\mathrm{Cov}^{\mathrm{alg}}(X) n’est autre que le groupe fondamental algébrique π1alg(X)superscriptsubscript𝜋1alg𝑋\pi_{1}^{\mathrm{alg}}(X). Ainsi :

Covalg(X)(π1alg(X)).similar-to-or-equalssuperscriptCovalg𝑋superscriptsubscript𝜋1alg𝑋\mathrm{Cov}^{\mathrm{alg}}(X)\simeq\mathcal{B}\left(\pi_{1}^{\mathrm{alg}}(X)\right).
Remarque 1.3.

Les catégories galoisiennes sont des exemples de topoi élémentaires (qui ne sont cependant pas des topoi de Grothendieck), et le sens des flèches dans la définition des morphismes d’anabélioïdes connexes coïncide avec la convention pour les morphismes géométriques de topoi élémentaires.

Remarque 1.4.

La catégorie 𝔈𝔫𝔰f𝔈𝔫superscript𝔰f\mathfrak{Ens}^{\mathrm{f}} est l’exemple le plus simple d’anabélioïde connexe (obtenu en appliquant ()\mathcal{B}(\--) au groupe trivial). Cela nous permet de considérer les foncteurs fondamentaux entre catégories galoisiennes comme des « points fondamentaux » des anabélioïdes connexes pensés comme objets géométriques.

Définition 1.5.

Un point de base d’un anabélioïde connexe 𝒳𝒳\mathcal{X} n’est autre qu’un morphisme d’anabélioïdes β:𝔈𝔫𝔰f𝒳:𝛽𝔈𝔫superscript𝔰f𝒳\beta:\mathfrak{Ens}^{\mathrm{f}}\rightarrow\mathcal{X}.

Remarque 1.6.

Si 𝒳𝒳\mathcal{X} est une catégorie galoisienne, un foncteur exact de 𝒳𝒳\mathcal{X} dans 𝔈𝔫𝔰f𝔈𝔫superscript𝔰f\mathfrak{Ens}^{\mathrm{f}} est conservatif, c’est-à-dire que c’est un foncteur fondamental. Par conséquent il existe une correspondance bijective entre les foncteurs fondamentaux de la catégorie galoisienne 𝒳𝒳\mathcal{X} et les points de base de l’anabélioïde connexe 𝒳𝒳\mathcal{X}. Si β𝛽\beta est un point de base de 𝒳𝒳\mathcal{X} (considéré en tant qu’anabélioïde) et βsuperscript𝛽\beta^{*} est le foncteur associé, on définit le groupe fondamental de l’anabélioïde 𝒳𝒳\mathcal{X} muni de β𝛽\beta, noté π1(𝒳,β)subscript𝜋1𝒳𝛽\pi_{1}(\mathcal{X},\beta), comme égal au groupe π1(𝒳,β)subscript𝜋1𝒳superscript𝛽\pi_{1}(\mathcal{X},\beta^{*}). La classe d’isomorphisme de ce groupe étant indépendante du choix du point de base, on pourra considérer π1(𝒳)subscript𝜋1𝒳\pi_{1}(\mathcal{X}) qui sera défini à unique isomorphisme extérieur près.

Remarque 1.7.

Un foncteur qui définit une équivalence de catégories est nécessairement exact, par conséquent un isomorphisme d’anabélioïdes connexes φ:𝒳𝒴:𝜑𝒳𝒴\varphi:\mathcal{X}\rightarrow\mathcal{Y} n’est autre qu’une équivalence de catégories φ:𝒴𝒳:superscript𝜑𝒴𝒳\varphi^{*}:\mathcal{Y}\rightarrow\mathcal{X}.

Définition 1.8.

Une catégorie 𝒳𝒳\mathcal{X} est un anabélioïde si elle est équivalente à une catégorie produit

𝒳I:=iI𝒳i,assignsubscript𝒳𝐼subscriptproduct𝑖𝐼subscript𝒳𝑖\mathcal{X}_{I}:=\prod_{i\in I}\mathcal{X}_{i},

I𝐼I est un ensemble fini et 𝒳isubscript𝒳𝑖\mathcal{X}_{i} est un anabélioïde connexe pour tout iI𝑖𝐼i\in I. En d’autres termes, dans le langage de [SGA111], un anabélioïde est une «  catégorie multi-galoisienne   ». Un morphisme d’anabélioïdes sera défini comme dans le cas connexe, c’est-à-dire comme un foncteur exact dans le sens opposé.

Remarque 1.9.

Les anabéloïdes forment une 222-catégorie. Si φ,ψMor(𝒳,𝒴)𝜑𝜓Mor𝒳𝒴\varphi,\psi\in\mathrm{Mor}(\mathcal{X},\mathcal{Y}) sont des (1)1(1)-morphismes entre deux anabélioïdes 𝒳𝒳\mathcal{X} et 𝒴𝒴\mathcal{Y}, un (2)2(2)-morphisme φψ𝜑𝜓\varphi\to\psi est défini comme une transformation naturelle entre les foncteurs φsuperscript𝜑\varphi^{*} et ψsuperscript𝜓\psi^{*}.

Définition 1.10.

Soit 𝒞𝒞\mathcal{C} une catégorie admettant les colimites finies, possédant ainsi un objet initial 𝟎𝒞subscript0𝒞\mathbf{0}_{\mathcal{C}}.

  1. 1.

    Un objet XOb(𝒞)𝑋Ob𝒞X\in\mathrm{Ob}(\mathcal{C}) différent de 𝟎𝒞subscript0𝒞\mathbf{0}_{\mathcal{C}} est dit connexe lorsqu’il n’existe pas dans 𝒞𝒞\mathcal{C} d’écriture sous forme de coproduit X=X1X2𝑋subscript𝑋1coproductsubscript𝑋2X=X_{1}\coprod X_{2} avec Xi𝟎𝒞subscript𝑋𝑖subscript0𝒞X_{i}\neq\mathbf{0}_{\mathcal{C}} pour i=1,2𝑖1.2i=1,2.

  2. 2.

    Pour tout objet X𝟎𝒞𝑋subscript0𝒞X\neq\mathbf{0}_{\mathcal{C}} de 𝒞𝒞\mathcal{C}, une décomposition de X𝑋X est une écriture de la forme :

    X=αAXα𝑋subscriptcoproduct𝛼𝐴subscript𝑋𝛼X=\coprod_{\alpha\in A}X_{\alpha}

    A𝐴A est un ensemble fini, XαOb(𝒞)subscript𝑋𝛼Ob𝒞X_{\alpha}\in\mathrm{Ob}(\mathcal{C}) et Xα𝟎𝒞subscript𝑋𝛼subscript0𝒞X_{\alpha}\neq\mathbf{0}_{\mathcal{C}}. En particulier l’objet X𝑋X est connexe si et seulement si l’ensemble d’indexation de toute décomposition de X𝑋X est de cardinal 111.

  3. 3.

    Lorsque 𝒞𝒞\mathcal{C} est une catégorie galoisienne, alors (((cf. [Cad],3.2.1)\cite[cite]{[\@@bibref{}{Cad}{}{}]},3.2.1) tout objet X𝟎𝒞𝑋subscript0𝒞X\neq\mathbf{0}_{\mathcal{C}} de 𝒞𝒞\mathcal{C} peut être écrit :

    X=i=1rXi,𝑋superscriptsubscriptcoproduct𝑖1𝑟subscript𝑋𝑖X=\coprod_{i=1}^{r}X_{i},

    où les XiOb(𝒞)subscript𝑋𝑖Ob𝒞X_{i}\in\mathrm{Ob}(\mathcal{C}) sont des objets connexes tous distincts de 𝟎𝒞subscript0𝒞\mathbf{0}_{\mathcal{C}}. Cette décomposition est unique (((à permutations près))), et les Xisubscript𝑋𝑖X_{i} sont appelées les composantes connexes de X𝑋X.

Proposition 1.11.

Si 𝒳I:=iI𝒳iassignsubscript𝒳𝐼subscriptproduct𝑖𝐼subscript𝒳𝑖\mathcal{X}_{I}:=\prod_{i\in I}\mathcal{X}_{i} est l’anabélioïde défini en 1.8, alors tout objet X𝟎𝒳𝑋subscript0subscript𝒳X\neq\mathbf{0}_{\mathcal{\mathcal{X}_{I}}} de 𝒳Isubscript𝒳𝐼\mathcal{X}_{I} admet, à permutations près, une unique décomposition de la forme :

X=j=1sXj,𝑋superscriptsubscriptcoproduct𝑗1𝑠subscript𝑋𝑗X=\coprod_{j=1}^{s}X_{j},

où les XjOb(𝒳)subscript𝑋𝑗Obsubscript𝒳X_{j}\in\mathrm{Ob}(\mathcal{\mathcal{X}_{I}}) sont des objets connexes, tous distincts de 𝟎𝒳subscript0subscript𝒳\mathbf{0}_{\mathcal{\mathcal{X}_{I}}}, et appelés les composantes connexes de X𝑋X.

Démonstration.

En tant que catégorie multi-galoisienne, 𝒳Isubscript𝒳𝐼\mathcal{X}_{I} admet les limites et colimites finies, d’où un objet final (resp. initial) noté 𝟏𝒳Isubscript1subscript𝒳𝐼\mathbf{1}_{\mathcal{X}_{I}} (resp. 𝟎𝒳Isubscript0subscript𝒳𝐼\mathbf{0}_{\mathcal{X}_{I}}), unique à unique isomorphisme près, et défini comme la limite (resp. colimite) vide. Pour iI𝑖𝐼i\in I, notons 𝟎isubscript0𝑖\mathbf{0}_{i} et 𝟏isubscript1𝑖\mathbf{1}_{i} les objets initiaux et finals de l’anabélioïde connexe 𝒳isubscript𝒳𝑖\mathcal{X}_{i}. Si XiOb(𝒳i)subscript𝑋𝑖Obsubscript𝒳𝑖X_{i}\in\mathrm{Ob}(\mathcal{X}_{i}), notons Xi^Ob(𝒳I)^subscript𝑋𝑖Obsubscript𝒳𝐼\widehat{X_{i}}\in\mathrm{Ob}(\mathcal{X}_{I}) défini en prenant le produit de Xisubscript𝑋𝑖X_{i} avec les 𝟎jsubscript0𝑗\mathbf{0}_{j} pour jI{i}𝑗𝐼𝑖j\in I\setminus\{i\}. Si XOb(𝒳I)𝑋Obsubscript𝒳𝐼X\in\mathrm{Ob}(\mathcal{X}_{I}), notons X[i]Ob(𝒳i)𝑋delimited-[]𝑖Obsubscript𝒳𝑖X[i]\in\mathrm{Ob}(\mathcal{X}_{i}) la composante de X𝑋X sur 𝒳isubscript𝒳𝑖\mathcal{X}_{i} selon la décomposition 𝒳I:=iI𝒳i,assignsubscript𝒳𝐼subscriptproduct𝑖𝐼subscript𝒳𝑖\mathcal{X}_{I}:=\prod_{i\in I}\mathcal{X}_{i}, de sorte que X=(X[i])iI𝑋subscript𝑋delimited-[]𝑖𝑖𝐼X=\left(X[i]\right)_{i\in I}. On a alors :

X=iIX[i]^.𝑋subscriptcoproduct𝑖𝐼^𝑋delimited-[]𝑖X=\coprod_{i\in I}\widehat{X[i]}.

Par conséquent un objet X𝑋X de 𝒳Isubscript𝒳𝐼\mathcal{X}_{I} n’est connexe que s’il est de la forme Xi^^subscript𝑋𝑖\widehat{X_{i}} pour un certain iI𝑖𝐼i\in I et XiOb(𝒳i)subscript𝑋𝑖Obsubscript𝒳𝑖X_{i}\in\mathrm{Ob}(\mathcal{X}_{i}) objet connexe. En couplant ces considérations au résultat d’unicité de la décomposition d’un objet non vide (i.e. non initial) d’une catégorie galoisienne en somme finie d’objets connexes (cf. définition 1.10, ou [Cad], 3.2.13213.2.1 pour la preuve), on obtient l’unicité voulue : soit XOb(𝒳I)𝑋Obsubscript𝒳𝐼X\in\mathrm{Ob}(\mathcal{X}_{I}), X𝟎𝒳I𝑋subscript0subscript𝒳𝐼X\neq\mathbf{0}_{\mathcal{X}_{I}}, et IIsuperscript𝐼𝐼I^{\prime}\subset I formé des éléments i𝑖i tels que X[i]𝟎i𝑋delimited-[]𝑖subscript0𝑖X[i]\neq\mathbf{0}_{i}. Pour chaque iI𝑖superscript𝐼i\in I^{\prime}, considérons la décomposition (unique à permutation près des facteurs) de X[i]𝑋delimited-[]𝑖X[i] en ces composantes connexes :

X[i]=jJiXi,j𝑋delimited-[]𝑖subscriptcoproduct𝑗subscript𝐽𝑖subscript𝑋𝑖𝑗X[i]=\coprod_{j\in J_{i}}X_{i,j}

Jisubscript𝐽𝑖J_{i} est un ensemble fini et Xi,jOb(𝒳i)subscript𝑋𝑖𝑗Obsubscript𝒳𝑖X_{i,j}\in\mathrm{Ob}(\mathcal{X}_{i}) est un objet connexe, pour tout jJi𝑗subscript𝐽𝑖j\in J_{i}. Il est alors clair que X𝑋X s’écrit :

X=iIjJiXi,j^,𝑋subscriptcoproduct𝑖superscript𝐼subscriptcoproduct𝑗subscript𝐽𝑖^subscript𝑋𝑖𝑗X=\coprod_{i\in I^{\prime}}\coprod_{j\in J_{i}}\widehat{X_{i,j}},

que tous les Xi,j^^subscript𝑋𝑖𝑗\widehat{X_{i,j}} sont des objets connexes de 𝒳Isubscript𝒳𝐼\mathcal{X}_{I}, et que cette décomposition est unique à permutations près. ∎

Corollaire 1.12.

Si 𝒳Isubscript𝒳𝐼\mathcal{X}_{I} est l’anabélioïde défini en 1.8, alors l’ensemble fini I𝐼I et les anabélioïdes connexes 𝒳isubscript𝒳𝑖\mathcal{X}_{i} (pour iI𝑖𝐼i\in I) sont canoniquement déterminés par l’anabélioïde abstrait 𝒳Isubscript𝒳𝐼\mathcal{X}_{I}. Les 𝒳isubscript𝒳𝑖\mathcal{X}_{i} sont appelées les composantes connexes de l’anabélioïde 𝒳Isubscript𝒳𝐼\mathcal{X}_{I}.

Démonstration.

Notons εi=𝟏i^Ob(𝒳I)subscript𝜀𝑖^subscript1𝑖Obsubscript𝒳𝐼\varepsilon_{i}=\widehat{\mathbf{1}_{i}}\in\mathrm{Ob}(\mathcal{X}_{I}) (rappelons qu’il est défini en prenant le produit de 𝟏isubscript1𝑖\mathbf{1}_{i} avec les 𝟎jsubscript0𝑗\mathbf{0}_{j} pour jI{i}𝑗𝐼𝑖j\in I\setminus\{i\}). Les εisubscript𝜀𝑖\varepsilon_{i} sont des objets connexes de 𝒳Isubscript𝒳𝐼\mathcal{X}_{I}, et l’on obtient la décomposition :

𝟏𝒳I=iIεi.subscript1subscript𝒳𝐼subscriptcoproduct𝑖𝐼subscript𝜀𝑖\mathbf{1}_{\mathcal{X}_{I}}=\coprod_{i\in I}\varepsilon_{i}.

Par la proposition 1.11 précédente, une telle décomposition est unique (à permutations des facteurs près). De là les εisubscript𝜀𝑖\varepsilon_{i} sont entièrement déterminés par 𝒳Isubscript𝒳𝐼\mathcal{X}_{I} en tant que composantes connexes de l’élément final 𝟏𝒳Isubscript1subscript𝒳𝐼\mathbf{1}_{\mathcal{X}_{I}}, de même que l’ensemble I𝐼I. Ainsi, pour chaque iI𝑖𝐼i\in I, l’anabélioïde connexe 𝒳isubscript𝒳𝑖\mathcal{X}_{i} est déterminé tout aussi canoniquement par 𝒳Isubscript𝒳𝐼\mathcal{X}_{I} en tant que sous-catégorie pleine de 𝒳Isubscript𝒳𝐼\mathcal{X}_{I} formée des objets au-dessus de εisubscript𝜀𝑖\varepsilon_{i}. ∎

Soit 𝒳𝒳\mathcal{X} un anabélioïde et SOb(𝒳)𝑆Ob𝒳S\in\mathrm{Ob}(\mathcal{X}). Désignons par 𝒳Ssubscript𝒳𝑆\mathcal{X}_{S} la catégorie des objets de 𝒳𝒳\mathcal{X} au-dessus de S𝑆S, c’est-à-dire la catégorie dont les objets sont les flèches XS𝑋𝑆X\rightarrow S de 𝒳𝒳\mathcal{X}, et dont les flèches entre XS𝑋𝑆X\rightarrow S et XSsuperscript𝑋𝑆X^{\prime}\rightarrow S sont les S𝑆S-morphismes XX𝑋superscript𝑋X\rightarrow X^{\prime}. Soit iS:𝒳𝒳S:superscriptsubscript𝑖𝑆𝒳subscript𝒳𝑆i_{S}^{*}:\mathcal{X}\rightarrow\mathcal{X}_{S} le foncteur défini en prenant le produit fibré avec S𝑆S.

Proposition 1.13 ([Mzk222], Prop. 1.2.11211.2.1).

La catégorie 𝒳Ssubscript𝒳𝑆\mathcal{X}_{S} est un anabélioïde, et le foncteur iSsuperscriptsubscript𝑖𝑆i_{S}^{*} est exact, c’est-à-dire qu’il définit un morphisme d’anabélioïdes iS:𝒳S𝒳:subscript𝑖𝑆subscript𝒳𝑆𝒳{i_{S}:\mathcal{X}_{S}\rightarrow\mathcal{X}}.

Remarque 1.14.

Les composantes connexes de l’anabélioïde 𝒳Ssubscript𝒳𝑆\mathcal{X}_{S} sont ici en bijection avec les composantes connexes de S𝑆S en tant qu’objet de 𝒳𝒳\mathcal{X}. Par conséquent 𝒳Ssubscript𝒳𝑆\mathcal{X}_{S} est un anabélioïde connexe si et seulement si S𝑆S est lui-même un objet connexe.

Définition 1.15.

Un morphisme d’anabélioïdes φ:𝒴𝒳:𝜑𝒴𝒳\varphi:\mathcal{Y}\rightarrow\mathcal{X} est un revêtement fini étale s’il se factorise comme la composée d’un isomorphisme α:𝒴𝒳S:𝛼similar-to𝒴subscript𝒳𝑆\alpha:\mathcal{Y}\xrightarrow{\sim}\mathcal{X}_{S} avec le morphisme iS:𝒳S𝒳:subscript𝑖𝑆subscript𝒳𝑆𝒳i_{S}:\mathcal{X}_{S}\rightarrow\mathcal{X}SOb(𝒳)𝑆Ob𝒳S\in\mathrm{Ob}(\mathcal{X}).

Remarque 1.16.

Un morphisme continu θ:HG:𝜃𝐻𝐺\theta:H\rightarrow G entre deux groupes profinis H𝐻H et G𝐺G induit naturellement un foncteur exact θ:(G)(H):superscript𝜃𝐺𝐻\theta^{*}:\mathcal{B}(G)\rightarrow\mathcal{B}(H), c’est-à-dire un morphisme d’anabélioïdes θ:(H)(G):𝜃𝐻𝐺\theta:\mathcal{B}(H)\rightarrow\mathcal{B}(G). Un tel morphisme est un revêtement fini étale si et seulement si θ𝜃\theta est une injection qui permet d’identifier H𝐻H à un sous-groupe ouvert de G𝐺G. Par ailleurs, tout revêtement fini étale d’anabélioïdes connexes peut être écrit sous cette forme sous un choix approprié des points de base à la source et au but.

Nous allons maintenant définir la notion de semi-graphe d’anabélioïdes introduite par Mochizuki dans [Mzk333], qui est la transcription dans le langage anabélioïdique des semi-graphes de groupes profinis introduits par le même auteur dans [Mzk111]. Nous introduirons ensuite la catégorie des recouvrements finis étales d’un tel semi-graphe qui permettra de définir ses revêtements finis étales.

Définition 1.17.

Un semi-graphe d’anabélioïdes (connexes) 𝒢𝒢\mathcal{G} consiste en une collection de données suivante :

  • un semi-graphe {𝔾,𝒱,}𝔾𝒱\{\mathbb{G},\mathcal{V},\mathcal{E}\};

  • pour chaque sommet v𝒱𝑣𝒱v\in\mathcal{V}, un anabélioïde connexe 𝒢vsubscript𝒢𝑣\mathcal{G}_{v};

  • pour chaque arête e𝑒e\in\mathcal{E}, un anabélioïde connexe 𝒢esubscript𝒢𝑒\mathcal{G}_{e};

  • pour chaque branche b𝑏b d’une arête e𝑒e aboutissant à un sommet v𝑣v, un morphisme d’anabélioïdes b:𝒢e𝒢v:𝑏subscript𝒢𝑒subscript𝒢𝑣b:\mathcal{G}_{e}\rightarrow\mathcal{G}_{v}, c’est-à-dire un foncteur exact b:𝒢v𝒢e:superscript𝑏subscript𝒢𝑣subscript𝒢𝑒b^{*}:\mathcal{G}_{v}\rightarrow\mathcal{G}_{e}.

Nous appellerons anabélioïdes constituants les différents anabélioïdes connexes 𝒢esubscript𝒢𝑒\mathcal{G}_{e} et 𝒢vsubscript𝒢𝑣\mathcal{G}_{v}. Un semi-graphe d’anabélioïdes 𝒢𝒢\mathcal{G} est dit connexe (resp. fini, dénombrable, localement fini) lorsque le semi-graphe sous-jacent 𝔾𝔾\mathbb{G} est connexe (resp. fini, dénombrable, localement fini). Nous parlerons de graphe d’anabélioïdes lorsque 𝔾𝔾\mathbb{G} sera un graphe.

Il y a une notion naturelle de morphisme de semi-graphes d’anabélioïdes : un morphisme entre deux semi-graphes d’anabélioïdes 𝒢𝒢\mathcal{G} et 𝒢superscript𝒢\mathcal{G}^{\prime} est la donnée :

  • d’un morphisme entre les semi-graphes associés : 𝔾𝔾𝔾superscript𝔾\mathbb{G}\rightarrow\mathbb{G}^{\prime},

  • pour chaque sommet v𝑣v (resp. arête e𝑒e) de 𝔾𝔾\mathbb{G} envoyé sur un sommet vsuperscript𝑣v^{\prime} (resp. esuperscript𝑒e^{\prime}) de 𝔾superscript𝔾\mathbb{G}^{\prime}, des morphismes d’anabélioïdes 𝒢v𝒢vsubscript𝒢𝑣subscriptsuperscript𝒢superscript𝑣\mathcal{G}_{v}\rightarrow\mathcal{G}^{\prime}_{v^{\prime}} et 𝒢e𝒢esubscript𝒢𝑒subscriptsuperscript𝒢superscript𝑒\mathcal{G}_{e}\rightarrow\mathcal{G}^{\prime}_{e^{\prime}},

  • un isomorphisme ψbsubscript𝜓𝑏\psi_{b} entre les morphismes d’anabélioïdes composés 𝒢e𝒢v𝒢vsubscript𝒢𝑒subscript𝒢𝑣subscript𝒢superscript𝑣{\mathcal{G}_{e}\rightarrow\mathcal{G}_{v}\rightarrow\mathcal{G}_{v^{\prime}}} et 𝒢e𝒢e𝒢vsubscript𝒢𝑒subscript𝒢superscript𝑒subscript𝒢superscript𝑣\mathcal{G}_{e}\rightarrow\mathcal{G}_{e^{\prime}}\rightarrow\mathcal{G}_{v^{\prime}} (i.e un isomorphisme entre les foncteurs associés et définis dans l’autre sens) dès que be𝑏𝑒b\in e est une branche aboutissant à v𝑣v.

Remarque 1.18.

Les (1)1(1)-morphismes entre 𝒢𝒢\mathcal{G} et 𝒢superscript𝒢\mathcal{G}^{\prime} forment de manière naturelle une catégorie ([Mzk333], 2.4.22422.4.2), de sorte que l’on pourra parler de la 222-catégorie des semi-graphes d’anabélioïdes, notée 𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟\mathfrak{Sanab}. Soit |𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟|𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟|\mathfrak{Sanab}| la 111-catégorie dont les objets coïncident avec ceux de 𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟\mathfrak{Sanab} et dont les morphismes entre deux semi-graphes d’anabélioïdes 𝒢𝒢\mathcal{G} et 𝒢superscript𝒢\mathcal{G}^{\prime} correspondent aux classes d’isomorphismes des 111-morphismes 𝒢𝒢𝒢superscript𝒢\mathcal{G}\to\mathcal{G}^{\prime} dans 𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟\mathfrak{Sanab}. On appellera |𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟|𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟|\mathfrak{Sanab}| la catégorie grossière des semi-graphes d’anabélioïdes.

D’après [Mzk333] 2.4.22422.4.2, si φ:𝒢𝒢:𝜑𝒢superscript𝒢\varphi:\mathcal{G}\to\mathcal{G}^{\prime} est un 111-morphisme localement ouvert entre deux semi-graphes d’anabélioïdes totalement détachés et sommitalement minces (ces notions seront définies dans la section 1.3, voir aussi [Mzk333] 2.2222.2 pour localement ouvert), φ𝜑\varphi n’a aucun 222-automorphisme non trivial dans 𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟\mathfrak{Sanab}. De là, si l’on se restreint aux morphismes localement ouverts entre semi-graphes d’anabélioïdes totalement détachés et sommitalement minces, ces morphismes peuvent être considérés comme de simples morphismes de la catégorie |𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟|𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟|\mathfrak{Sanab}| plutôt que comme des 111-morphismes de la 222-catégorie 𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟\mathfrak{Sanab}. De là, dans ce cadre, le produit fibré 𝒴×𝒳𝒵subscript𝒳𝒴𝒵\mathcal{Y}\times_{\mathcal{X}}\mathcal{Z} de deux semi-graphes d’anabélioïdes 𝒴𝒴\mathcal{Y} et 𝒵𝒵\mathcal{Z} au-dessus d’un troisième 𝒳𝒳\mathcal{X} est bien défini et existe dans la catégorie grossière |𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟|𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟|\mathfrak{Sanab}|. Hors de ce cadre, le produit fibré est à considérer au sens du 222-produit fibré dans la 222-catégorie 𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟\mathfrak{Sanab}. Remarquons néanmoins que les semi-graphes d’anabélioïdes que nous étudierons par la suite vérifieront les hypothèses mochizukiennes (voir section 1.3), en particulier les semi-graphes seront totalement détachés, sommitalement minces, et les morphismes localement ouverts, ce qui nous permettra en pratique de considérer le produit fibré (ou le changement de base) dans |𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟|𝔖𝔞𝔫𝔞𝔟|\mathfrak{Sanab}|.

Définition 1.19.

Soit 𝒢𝒢\mathcal{G} un semi-graphe d’anabélioïdes non vide ayant un nombre fini de composantes connexes.

Définissons la catégorie des recouvrements finis de 𝒢𝒢\mathcal{G}, notée (𝒢),𝒢\mathcal{B}(\mathcal{G}), comme la catégorie dont les objets sont déterminés par la donnée de {Sc,φb}subscript𝑆𝑐subscript𝜑𝑏\{S_{c},\varphi_{b}\} où :

  • pour chaque sommet ou arête c𝑐c, ScOb(𝒢c)subscript𝑆𝑐Obsubscript𝒢𝑐S_{c}\in\mathrm{Ob}(\mathcal{G}_{c}),

  • pour chaque branche b𝑏b d’une arête e𝑒e\in\mathcal{E} aboutissant au sommet v𝒱𝑣𝒱v\in\mathcal{V}, φb:bSvSe:subscript𝜑𝑏similar-tosuperscript𝑏subscript𝑆𝑣subscript𝑆𝑒{\varphi_{b}:b^{*}S_{v}\xrightarrow{\sim}S_{e}} est un isomorphisme dans 𝒢esubscript𝒢𝑒\mathcal{G}_{e},

et dont les morphismes sont obtenus de manière naturelle à partir des morphismes au sein des différents anabélioïdes constituants 𝒢csubscript𝒢𝑐\mathcal{G}_{c} de sorte que ces morphismes soient compatibles avec les différents φbsubscript𝜑𝑏\varphi_{b}.

Proposition 1.20 ([Mzk333]).

La catégorie (𝒢)𝒢\mathcal{B}(\mathcal{G}) des recouvrements finis de 𝒢𝒢\mathcal{G} est un anabélioïde, qui est connexe lorsque le semi-graphe d’anabélioïdes 𝒢𝒢\mathcal{G} est lui-même connexe.

Lorsque 𝒢𝒢\mathcal{G} est connexe, (𝒢)𝒢\mathcal{B}(\mathcal{G}) étant un anabélioïde connexe, il a un groupe fondamental.

Définition 1.21.

Si 𝒢𝒢\mathcal{G} est un semi-graphe d’anabélioïdes connexe, son groupe fondamental, noté π1(𝒢)subscript𝜋1𝒢\pi_{1}(\mathcal{G}), est défini comme égal au groupe fondamental π1((𝒢))subscript𝜋1𝒢\pi_{1}(\mathcal{B}(\mathcal{G})) de l’anabélioïde connexe (𝒢)𝒢\mathcal{B}(\mathcal{G}). Il est défini à unique isomorphisme extérieur près.

Considérons maintenant un semi-graphe d’anabélioïdes 𝒢𝒢\mathcal{G}. Prenons SOb((𝒢))𝑆Ob𝒢S\in\mathrm{Ob}(\mathcal{B}(\mathcal{G})) et considérons le revêtement fini étale d’anabélioïdes iS:(𝒢)S(𝒢):subscript𝑖𝑆subscript𝒢𝑆𝒢i_{S}:\mathcal{B}(\mathcal{G})_{S}\rightarrow\mathcal{B}(\mathcal{G}). Alors les définitions précédentes impliquent que (𝒢)Ssubscript𝒢𝑆\mathcal{B}(\mathcal{G})_{S} est exactement la catégorie des recouvrements finis (i.e. un ()\mathcal{B}(\--)) d’un certain semi-graphe d’anabélioïdes 𝒢superscript𝒢\mathcal{G}^{\prime} équipé d’un morphisme 𝒢𝒢superscript𝒢𝒢\mathcal{G}^{\prime}\rightarrow\mathcal{G} de semi-graphes d’anabélioïdes au-dessus d’un morphisme de semi-graphes 𝔾𝔾superscript𝔾𝔾\mathbb{G}^{\prime}\rightarrow\mathbb{G} qui est propre, c’est-à-dire qui préserve le nombre de branches des arêtes. Remarquons que 𝒢superscript𝒢\mathcal{G}^{\prime} est un semi-graphe connexe dès que 𝒢𝒢\mathcal{G} et S𝑆S sont connexes.

Plus précisément, si v𝑣v est par exemple un sommet de 𝔾𝔾\mathbb{G}, l’ensemble des sommets vsuperscript𝑣v^{\prime} de 𝔾superscript𝔾\mathbb{G}^{\prime} au-dessus de v𝑣v correspond à l’ensemble des composantes connexes de Svsubscript𝑆𝑣S_{v}, et l’anabélioïde connexe 𝒢vsubscriptsuperscript𝒢superscript𝑣\mathcal{G}^{\prime}_{v^{\prime}} est isomorphe à (𝒢v)Svsubscriptsubscript𝒢𝑣subscript𝑆superscript𝑣(\mathcal{G}_{v})_{S_{v^{\prime}}}Svsubscript𝑆superscript𝑣S_{v^{\prime}} est la composante connexe de Svsubscript𝑆𝑣S_{v} correspondant à vsuperscript𝑣v^{\prime}.

Définition 1.22.
  1. 1.

    Si 𝒢𝒢\mathcal{G} est un semi-graphe d’anabélioïdes, un revêtement fini étale de 𝒢𝒢\mathcal{G} est un morphisme de semi-graphes d’anabélioïdes 𝒢𝒢superscript𝒢𝒢\mathcal{G}^{\prime}\rightarrow\mathcal{G} induit par le revêtement fini étale d’anabélioïdes iS:(𝒢)S(𝒢):subscript𝑖𝑆subscript𝒢𝑆𝒢i_{S}:\mathcal{B}(\mathcal{G})_{S}\rightarrow\mathcal{B}(\mathcal{G}) pour un certain SOb((𝒢))𝑆Ob𝒢S\in\mathrm{Ob}(\mathcal{B}(\mathcal{G})).

  2. 2.

    Un morphisme de semi-graphes d’anabélioïdes 𝒢𝒢superscript𝒢𝒢\mathcal{G}^{\prime}\rightarrow\mathcal{G} est dit localement trivial (resp. localement fini étale) si et seulement si les morphismes induits entre chaque anabélioïde constituant sont des isomorphismes (resp. sont finis étales).

1.2 Le monde des tempéroïdes

Nous allons ici décrire le langage des tempéroïdes introduit par Mochizuki dans [Mzk333], qui permettra de définir le groupe fondamental tempéré d’un semi-graphe d’anabélioïdes, analogue dans un contexte beaucoup plus catégorique du groupe fondamental tempéré d’espaces analytiques que nous introduirons dans la suite.

Si ΠΠ\Pi est un groupe topologique, notons temp(Π)superscripttempΠ\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\Pi) la catégorie dont les objets sont les ensembles dénombrables discrets munis d’une action continue (i.e. à stabilisateurs ouverts) de ΠΠ\Pi, et dont les morphismes sont les morphismes de ΠΠ\Pi-ensembles. Un objet T𝑇T de temp(Π)superscripttempΠ\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\Pi) est connexe (au sens des catégories) si et seulement si l’action de ΠΠ\Pi est transitive sur T𝑇T. Soit 𝔈𝔫𝔰dd𝔈𝔫superscript𝔰dd\mathfrak{Ens}^{\mathrm{dd}} la catégorie des ensembles dénombrables discrets.

Définition 1.23.
  1. 1.

    Un groupe topologique ΠΠ\Pi est dit tempéré lorsqu’il peut être écrit comme une limite projective de groupes topologiques discrets dénombrables.

  2. 2.

    Un tempéroïde connexe est défini comme un couple (𝒯,Υ𝒯)𝒯subscriptΥ𝒯(\mathcal{T},\Upsilon_{\mathcal{T}}) où :

    • 𝒯𝒯\mathcal{T} est une catégorie équivalente à temp(Π)superscripttempΠ\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\Pi) pour un certain groupe tempéré ΠΠ\Pi,

    • Υ𝒯subscriptΥ𝒯\Upsilon_{\mathcal{T}} est une classe d’isomorphismes de foncteurs 𝒯𝔈𝔫𝔰dd𝒯𝔈𝔫superscript𝔰dd\mathcal{T}\to\mathfrak{Ens}^{\mathrm{dd}} conservatifs préservant les limites finies et les colimites dénombrables.

    Les foncteurs 𝒯𝔈𝔫𝔰dd𝒯𝔈𝔫superscript𝔰dd\mathcal{T}\to\mathfrak{Ens}^{\mathrm{dd}} dont la classe d’isomorphisme est Υ𝒯subscriptΥ𝒯\Upsilon_{\mathcal{T}} sont appelés les foncteurs fibres de 𝒯𝒯\mathcal{T}.

  3. 3.

    Un tempéroïde est défini comme un couple (𝒯,Υ𝒯)𝒯subscriptΥ𝒯(\mathcal{T},\Upsilon_{\mathcal{T}}) où :

    • 𝒯𝒯\mathcal{T} est une catégorie équivalente à une catégorie produit jJ𝒯j,subscriptproduct𝑗𝐽subscript𝒯𝑗\displaystyle{\prod_{j\in J}\mathcal{T}_{j}},J𝐽J est un ensemble dénombrable et (𝒯j,Υ𝒯j)subscript𝒯𝑗subscriptΥsubscript𝒯𝑗(\mathcal{T}_{j},\Upsilon_{\mathcal{T}_{j}}) est un tempéroïde connexe pour tout jJ𝑗𝐽j\in J.

    • Υ𝒯subscriptΥ𝒯\Upsilon_{\mathcal{T}} est la donnée des classes d’isomorphismes des foncteurs 𝒯𝔈𝔫𝔰dd𝒯𝔈𝔫superscript𝔰dd\mathcal{T}\to\mathfrak{Ens}^{\mathrm{dd}} contenant les foncteurs se factorisant par les foncteurs fibres des 𝒯jsubscript𝒯𝑗\mathcal{T}_{j}, c’est-à-dire les composés :

      𝒯jJ𝒯jπj0𝒯j0βj0𝔈𝔫𝔰ddsimilar-to-or-equals𝒯subscriptproduct𝑗𝐽subscript𝒯𝑗subscript𝜋subscript𝑗0subscript𝒯subscript𝑗0subscript𝛽subscript𝑗0𝔈𝔫superscript𝔰dd\mathcal{T}\simeq\prod_{j\in J}\mathcal{T}_{j}\xrightarrow{\pi_{j_{0}}}\mathcal{T}_{j_{0}}\xrightarrow{\beta_{j_{0}}}\mathfrak{Ens}^{\mathrm{dd}}

      pour j0Jsubscript𝑗0𝐽j_{0}\in J et βj0Υ𝒯j0subscript𝛽subscript𝑗0subscriptΥsubscript𝒯subscript𝑗0\beta_{j_{0}}\in\Upsilon_{\mathcal{T}_{j_{0}}}.

    Les foncteurs 𝒯𝔈𝔫𝔰dd𝒯𝔈𝔫superscript𝔰dd\mathcal{T}\to\mathfrak{Ens}^{\mathrm{dd}} dont la classe d’isomorphisme est dans Υ𝒯subscriptΥ𝒯\Upsilon_{\mathcal{T}} sont appelés les foncteurs fibres de 𝒯𝒯\mathcal{T}.

  4. 4.

    Soient (𝒯1,Υ𝒯1)subscript𝒯1subscriptΥsubscript𝒯1(\mathcal{T}_{1},\Upsilon_{\mathcal{T}_{1}}) et (𝒯2,ΥT2)subscript𝒯2subscriptΥsubscript𝑇2(\mathcal{T}_{2},\Upsilon_{T_{2}}) des tempéroïdes. Un morphisme de tempéroïdes φ:(𝒯1,Υ𝒯1)(𝒯2,ΥT2):𝜑subscript𝒯1subscriptΥsubscript𝒯1subscript𝒯2subscriptΥsubscript𝑇2\varphi:(\mathcal{T}_{1},\Upsilon_{\mathcal{T}_{1}})\to(\mathcal{T}_{2},\Upsilon_{T_{2}}) est défini comme un foncteur φ:𝒯2𝒯1:superscript𝜑subscript𝒯2subscript𝒯1\varphi^{*}:\mathcal{T}_{2}\rightarrow\mathcal{T}_{1} dans le sens opposé qui préserve les colimites dénombrables et les limites finies, et tel que

    Υ𝒯1φΥ𝒯2,subscriptΥsubscript𝒯1superscript𝜑subscriptΥsubscript𝒯2\Upsilon_{\mathcal{T}_{1}}\circ\varphi^{*}\subseteq\Upsilon_{\mathcal{T}_{2}},

    c’est-à-dire qui préserve les foncteurs fibres.

Remarque 1.24.

Soit J𝐽J un ensemble dénombrable et (𝒯j,Υ𝒯j)subscript𝒯𝑗subscriptΥsubscript𝒯𝑗(\mathcal{T}_{j},\Upsilon_{\mathcal{T}_{j}}) un tempéroïde connexe, pour tout jJ𝑗𝐽j\in J. Considérons

𝒯J:=jJ𝒯j.assignsubscript𝒯𝐽subscriptproduct𝑗𝐽subscript𝒯𝑗\mathcal{T}_{J}:=\prod_{j\in J}\mathcal{T}_{j}.

Alors l’ensemble J𝐽J et les différents 𝒯jsubscript𝒯𝑗\mathcal{T}_{j} sont entièrement déterminés par 𝒯Jsubscript𝒯𝐽\mathcal{T}_{J} tout entier. Les différents 𝒯jsubscript𝒯𝑗\mathcal{T}_{j} seront appelés les composantes connexes de 𝒯Jsubscript𝒯𝐽\mathcal{T}_{J}. Ce résultat se montre comme dans 1.11 et 1.12, et découle de l’unicité de la décomposition en objets connexes de l’objet initial 𝟏𝒯Jsubscript1subscript𝒯𝐽\mathbf{1}_{\mathcal{T}_{J}} de 𝒯Jsubscript𝒯𝐽\mathcal{T}_{J}.

Remarque 1.25.

Tout groupe profini est tempéré. Si ΠΠ\Pi est un groupe tempéré, alors sa topologie admet une base de sous-groupes ouverts distingués, et tout sous-groupe ouvert de ΠΠ\Pi est fermé et d’indice dénombrable. Si HΠ𝐻ΠH\subseteq\Pi est un sous-groupe, alors l’ensemble Π/HΠ𝐻\Pi/H muni de l’action à gauche de ΠΠ\Pi définit un objet de temp(Π)superscripttempΠ\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\Pi) si et seulement si H𝐻H est ouvert dans ΠΠ\Pi. Par ailleurs temp(Π)superscripttempΠ\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\Pi) est naturellement un tempéroïde connexe dont les foncteurs fibres sont définis comme l’ensemble des foncteurs isomorphes au foncteur oubli

βΠoubli:temp(Π)𝔈𝔫𝔰dd.:superscriptsubscript𝛽ΠoublisuperscripttempΠ𝔈𝔫superscript𝔰dd\beta_{\Pi}^{\mathrm{oubli}}:\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\Pi)\to\mathfrak{Ens}^{\mathrm{dd}}.

Soit ΥΠoublisuperscriptsubscriptΥΠoubli\Upsilon_{\Pi}^{\mathrm{oubli}} la classe d’isomorphisme de ces foncteurs fibres.


La définition que donne Mochizuki dans son article initial [Mzk333] d’un tempéroïde connexe 𝒯𝒯\mathcal{T} ne fait pas intervenir la classe d’isomorphisme de foncteurs fibres Υ𝒯subscriptΥ𝒯\Upsilon_{\mathcal{T}}. Néanmoins, une telle définition est insuffisante pour définir correctement le groupe fondamental d’un tempéroïde connexe. Afin de pallier cet écueil Mochizuki introduit dans les corrections [Mzk333] la notion de Galois-dénombrable (Galois-countable), qui pour les groupes topologiques considérés est une condition d’existence d’une base dénombrable. Lorsque tous les groupes, tempéroïdes et semi-graphes d’anabélioïdes sont Galois-dénombrables, tous les résultats structuraux 3.2323.2 jusqu’à 3.9393.9 de [Mzk333] restent vrai et le groupe fondamental tempéré est correctement défini. Néanmoins, dans notre cadre des courbes analytiques développé dans la partie 2, il n’est pas clair que les groupes tempérés (au sens de [And], voir 2.3) soient Galois-dénombrables. Cette condition de Galois-dénombrabilité peut cependant être contournée par la donnée d’une classe de foncteurs fibres, et notre cadre des semi-graphes d’anabélioïdes des courbes analytiques munies d’une triangulation fera naturellement apparaître une classe de foncteurs fibres géométriques (cf. 1.36).


En pensant aux tempéroïdes connexes comme à des analogues d’anabélioïdes connexes, stables par coproduits dénombrables et où les groupes prodiscret remplacent les groupes profinis, nous aimerions être capables de définir le «  groupe fondamental  » d’un tempéroïde connexe. La proposition suivante le permet :

Proposition 1.26 ([Mzk333], Prop. 3.2).

Soient Π1subscriptΠ1\Pi_{1} et Π2subscriptΠ2\Pi_{2} deux groupes tempérés. Alors il y a une bijection naturelle entre les classes d’isomorphismes de morphismes de tempéroïdes connexes (temp(Π1),ΥΠ1oubli)(temp(Π2),ΥΠ2oubli)superscripttempsubscriptΠ1superscriptsubscriptΥsubscriptΠ1oublisuperscripttempsubscriptΠ2superscriptsubscriptΥsubscriptΠ2oubli(\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\Pi_{1}),\Upsilon_{\Pi_{1}}^{\mathrm{oubli}})\rightarrow(\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\Pi_{2}),\Upsilon_{\Pi_{2}}^{\mathrm{oubli}}) et l’ensemble des homorphismes continus extérieurs Π1Π2subscriptΠ1subscriptΠ2\Pi_{1}\rightarrow\Pi_{2} (i.e. l’ensemble des orbites de l’action de Π2subscriptΠ2\Pi_{2} par conjugaison à droite sur l’ensemble Hom(Π1Π2)HomsubscriptΠ1subscriptΠ2\mathrm{Hom}(\Pi_{1}\rightarrow\Pi_{2}) des homomorphismes continus de Π1subscriptΠ1\Pi_{1} dans Π2subscriptΠ2\Pi_{2}).

Remarque 1.27.

Deux morphismes de tempéroïdes φ,ψ:(𝒯1,Υ𝒯1)(𝒯2,Υ𝒯2):𝜑𝜓subscript𝒯1subscriptΥsubscript𝒯1subscript𝒯2subscriptΥsubscript𝒯2\varphi,\psi:(\mathcal{T}_{1},\Upsilon_{\mathcal{T}_{1}})\rightarrow(\mathcal{T}_{2},\Upsilon_{\mathcal{T}_{2}}) sont dits isomorphes si les foncteurs associés φ,ψ:𝒯2𝒯1:superscript𝜑superscript𝜓subscript𝒯2subscript𝒯1\varphi^{*},\psi^{*}:\mathcal{T}_{2}\rightarrow\mathcal{T}_{1} sont isomorphes, c’est-à-dire s’il existe une transformation naturelle entre φ𝜑\varphi et ψ𝜓\psi dont tous les morphismes induits sont des isomorphismes.

Définition 1.28 (Groupe fondamental tempéré d’un tempéroïde connexe).

La proposition précédente permet d’affirmer que si (𝒯,Υ𝒯)𝒯subscriptΥ𝒯(\mathcal{T},\Upsilon_{\mathcal{T}}) est un tempéroïde connexe, alors tous les groupes tempérés ΠΠ\Pi tels que (𝒯,Υ𝒯)𝒯subscriptΥ𝒯(\mathcal{T},\Upsilon_{\mathcal{T}}) soit isomorphe à (temp(Π),ΥΠoubli)superscripttempΠsuperscriptsubscriptΥΠoubli(\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\Pi),\Upsilon_{\Pi}^{\mathrm{oubli}}) sont isomorphes entre eux (de façon canonique modulo les automorphismes intérieurs). Cela permet ainsi de définir le groupe fondamental tempéré de (𝒯,Υ𝒯)𝒯subscriptΥ𝒯(\mathcal{T},\Upsilon_{\mathcal{T}}), noté

π1temp(𝒯),superscriptsubscript𝜋1temp𝒯\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{T}),

comme étant égal au groupe ΠΠ\Pi défini à unique isomorphisme extérieur près. Il s’agit donc d’un groupe tempéré, et l’on a ΠAut(υ𝒯)similar-to-or-equalsΠAutsubscript𝜐𝒯\Pi\simeq\mathrm{Aut}(\upsilon_{\mathcal{T}}) dès que υ𝒯subscript𝜐𝒯\upsilon_{\mathcal{T}} est un foncteur fibre de 𝒯𝒯\mathcal{T}.

Nous allons maintenant introduire la notion de revêtement étale d’un tempéroïde, qui se définit de manière très analogue à celle de revêtement étale fini d’un anabélioïde.

Proposition 1.29.

Soit (𝒯,Υ𝒯)𝒯subscriptΥ𝒯(\mathcal{T},\Upsilon_{\mathcal{T}}) un tempéroïde et TOb(𝒯)𝑇Ob𝒯T\in\mathrm{Ob}(\mathcal{T}). Soit 𝒯Tsubscript𝒯𝑇\mathcal{T}_{T} la catégorie des objets de 𝒯𝒯\mathcal{T} au-dessus de T𝑇T, et Υ𝒯TsubscriptΥsubscript𝒯𝑇\Upsilon_{\mathcal{T}_{T}} l’ensemble des classes d’isomorphisme des foncteurs 𝒯T𝔈𝔫𝔰ddsubscript𝒯𝑇𝔈𝔫superscript𝔰dd\mathcal{T}_{T}\to\mathfrak{Ens}^{\mathrm{dd}} contenant ceux qui se factorisent par les foncteurs fibres de 𝒯𝒯\mathcal{T} le long du foncteur canonique 𝒯T𝒯subscript𝒯𝑇𝒯\mathcal{T}_{T}\to\mathcal{T} obtenu en oubliant la structure au-dessus de T𝑇T. Alors (𝒯T,Υ𝒯T)subscript𝒯𝑇subscriptΥsubscript𝒯𝑇(\mathcal{T}_{T},\Upsilon_{\mathcal{T}_{T}}) est un tempéroïde dont les composantes connexes correspondent aux composantes connexes de T𝑇T en tant qu’objet de 𝒯𝒯\mathcal{T}. De plus, le foncteur iT:𝒯𝒯T:superscriptsubscript𝑖𝑇𝒯subscript𝒯𝑇i_{T}^{*}:\mathcal{T}\rightarrow\mathcal{T}_{T} défini en prenant le produit avec T𝑇T commute avec les limites finies et les colimites dénombrables et définit donc un morphisme de tempéroïdes :

iT:(𝒯T,Υ𝒯T)(𝒯,Υ𝒯):subscript𝑖𝑇subscript𝒯𝑇subscriptΥsubscript𝒯𝑇𝒯subscriptΥ𝒯i_{T}:(\mathcal{T}_{T},\Upsilon_{\mathcal{T}_{T}})\rightarrow(\mathcal{T},\Upsilon_{\mathcal{T}})
Définition 1.30.

Un morphisme de tempéroïdes connexes φ:(𝒰,Υ𝒰)(𝒯,Υ𝒯):𝜑𝒰subscriptΥ𝒰𝒯subscriptΥ𝒯\varphi:(\mathcal{U},\Upsilon_{\mathcal{U}})\rightarrow(\mathcal{T},\Upsilon_{\mathcal{T}}) est un revêtement étale s’il se factorise comme le composé d’un isomorphisme α:(𝒰,Υ𝒰)(𝒯T,Υ𝒯T):𝛼similar-to𝒰subscriptΥ𝒰subscript𝒯𝑇subscriptΥsubscript𝒯𝑇\alpha:(\mathcal{U},\Upsilon_{\mathcal{U}})\xrightarrow{\sim}(\mathcal{T}_{T},\Upsilon_{\mathcal{T}_{T}}) avec le morphisme iT:(𝒯T,Υ𝒯T)(𝒯,Υ𝒯):subscript𝑖𝑇subscript𝒯𝑇subscriptΥsubscript𝒯𝑇𝒯subscriptΥ𝒯i_{T}:(\mathcal{T}_{T},\Upsilon_{\mathcal{T}_{T}})\rightarrow(\mathcal{T},\Upsilon_{\mathcal{T}})TOb(𝒯)𝑇Ob𝒯T\in\mathrm{Ob}(\mathcal{T}).

Si 𝒳𝒳\mathcal{X} est une catégorie, nous noterons 𝒳superscript𝒳top\mathcal{X}^{\top} la catégorie formée à partir de 𝒳𝒳\mathcal{X} dont les objets sont tous les coproduits dénombrables «  formels   » arbitraires d’objets de 𝒳𝒳\mathcal{X}. Si I𝐼I et J𝐽J sont deux ensembles dénombrables d’indices, les morphismes sont définis de manière naturelle par :

Hom𝒳(iIAi,jJBj):=iIjJHom𝒳(Ai,Bj)assignsubscriptHomsuperscript𝒳topsubscriptcoproduct𝑖𝐼subscript𝐴𝑖subscriptcoproduct𝑗𝐽subscript𝐵𝑗subscriptproduct𝑖𝐼subscriptcoproduct𝑗𝐽subscriptHom𝒳subscript𝐴𝑖subscript𝐵𝑗\mathrm{Hom}_{\mathcal{X}^{\top}}(\coprod_{i\in I}A_{i},\coprod_{j\in J}B_{j}):=\prod_{i\in I}\coprod_{j\in J}\mathrm{Hom}_{\mathcal{X}}(A_{i},B_{j})
Remarque 1.31.

Soit 𝒳𝒳\mathcal{X} est un anabélioïde connexe muni d’un point de base β𝛽\beta défini par un foncteur fondamental β:𝒳𝔈𝔫𝔰f:superscript𝛽𝒳𝔈𝔫superscript𝔰f\beta^{*}:\mathcal{X}\to\mathfrak{Ens}^{\mathrm{f}}. Ce foncteur se prolonge naturellement en un foncteur : β:𝒳𝔈𝔫𝔰dd:superscript𝛽absenttopsuperscript𝒳top𝔈𝔫superscript𝔰dd\beta^{*\top}:\mathcal{X}^{\top}\to\mathfrak{Ens}^{\mathrm{dd}}. Alors 𝒳superscript𝒳top\mathcal{X}^{\top} est naturellement un tempéroïde connexe dont les foncteurs fibres sont définis comme les foncteurs de 𝒳superscript𝒳top\mathcal{X}^{\top} à 𝔈𝔫𝔰dd𝔈𝔫superscript𝔰dd\mathfrak{Ens}^{\mathrm{dd}} isomorphes à βsuperscript𝛽absenttop\beta^{*\top}. On appellera ce tempéroïde la tempérification de 𝒳𝒳\mathcal{X}. En particulier, si G𝐺G est un groupe profini, on a une équivalence de catégories (G)temp(G)similar-to-or-equalssuperscript𝐺topsuperscripttemp𝐺\mathcal{B}(G)^{\top}\simeq\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(G).

Définition 1.32.

Soit 𝒢𝒢\mathcal{G} un semi-graphe non vide d’anabélioïdes.

Définissons la catégorie des recouvrements de 𝒢𝒢\mathcal{G}, notée

cov(𝒢),superscriptcov𝒢\mathcal{B}^{\mathrm{cov}}(\mathcal{G}),

comme la catégorie dont les objets sont déterminés par la donnée de {Sc,φb}subscript𝑆𝑐subscript𝜑𝑏\{S_{c},\varphi_{b}\} où :

  • pour chaque sommet ou arête c𝑐c, ScOb(𝒢c)subscript𝑆𝑐Obsuperscriptsubscript𝒢𝑐topS_{c}\in\mathrm{Ob}(\mathcal{G}_{c}^{\top}),

  • pour chaque branche b𝑏b d’une arête e𝑒e\in\mathcal{E} aboutissant au sommet v𝒱𝑣𝒱v\in\mathcal{V}, φb:bSvSe:subscript𝜑𝑏similar-tosuperscript𝑏subscript𝑆𝑣subscript𝑆𝑒{\varphi_{b}:b^{*}S_{v}\xrightarrow{\sim}S_{e}} est un isomorphisme dans 𝒢esuperscriptsubscript𝒢𝑒top\mathcal{G}_{e}^{\top},

et dont les morphismes sont obtenus de manière naturelle à partir des morphismes au sein des 𝒢csuperscriptsubscript𝒢𝑐top\mathcal{G}_{c}^{\top} de sorte que ces morphismes soient compatibles avec les différents φbsubscript𝜑𝑏\varphi_{b}.

Remarque 1.33.

Nous avons implicitement utilisés dans la définition précédente le fait que les foncteurs b:𝒢v𝒢e:superscript𝑏subscript𝒢𝑣subscript𝒢𝑒b^{*}:\mathcal{G}_{v}\rightarrow\mathcal{G}_{e} se prolongent tout naturellement en des foncteurs : b:𝒢v𝒢e:superscript𝑏absenttopsuperscriptsubscript𝒢𝑣topsuperscriptsubscript𝒢𝑒topb^{*\top}:\mathcal{G}_{v}^{\top}\rightarrow\mathcal{G}_{e}^{\top}.

Considérons maintenant un semi-graphe d’anabélioïdes 𝒢𝒢\mathcal{G}. Si SOb(cov(𝒢))𝑆Obsuperscriptcov𝒢S\in\mathrm{Ob}(\mathcal{B}^{\mathrm{cov}}(\mathcal{G})), les définitions précédentes impliquent que la catégorie cov(𝒢)Ssuperscriptcovsubscript𝒢𝑆\mathcal{B}^{\mathrm{cov}}(\mathcal{G})_{S} au-dessus de S𝑆S est exactement la catégorie des recouvrements (i.e. un cov())\mathcal{B}^{\mathrm{cov}}(\--)) d’un certain semi-graphe d’anabélioïdes 𝒢superscript𝒢\mathcal{G}^{\prime} équipé d’un morphisme 𝒢𝒢superscript𝒢𝒢\mathcal{G}^{\prime}\rightarrow\mathcal{G} de semi-graphes d’anabélioïdes. Remarquons que 𝒢superscript𝒢\mathcal{G}^{\prime} est connexe dès que S𝑆S est connexe.

Définition 1.34.

Si 𝒢𝒢\mathcal{G} est un semi-graphe d’anabélioïdes, un revêtement étale de 𝒢𝒢\mathcal{G} est un morphisme de semi-graphes d’anabélioïdes 𝒢𝒢superscript𝒢𝒢\mathcal{G}^{\prime}\rightarrow\mathcal{G} induit comme dans ce qui précède par un certain SOb(cov(𝒢))𝑆Obsuperscriptcov𝒢S\in\mathrm{Ob}(\mathcal{B}^{\mathrm{cov}}(\mathcal{G})).

Par analogie avec le monde des revêtements finis de semi-graphes d’anabélioïdes nous aimerions pouvoir dire que cov(𝒢)superscriptcov𝒢\mathcal{B}^{\mathrm{cov}}(\mathcal{G}) est un tempéroïde connexe dès que 𝒢𝒢\mathcal{G} est connexe. Or cela est faux généralement, et afin d’avoir des résultats similaires nous allons avoir besoin d’introduire une certaine catégorie de revêtements étales qui contiendra à la fois les revêtements finis et les revêtements étales triviaux (isomorphes à un coproduit dénombrable de copies de la base), et à laquelle il sera suffisant de se restreindre.

Si 𝒢𝒢\mathcal{G} est un semi-graphe d’anabélioïdes, nous allons définir la catégorie des recouvrements tempérés temp(𝒢)superscripttemp𝒢\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}) de 𝒢𝒢\mathcal{G} qui sera une sous-catégorie pleine de cov(𝒢)superscriptcov𝒢\mathcal{B}^{\mathrm{cov}}(\mathcal{G}) contenant les recouvrements finis (𝒢)𝒢\mathcal{B}(\mathcal{G}). On aura ainsi des injections pleines :

(𝒢)temp(𝒢)cov(𝒢)𝒢superscripttemp𝒢superscriptcov𝒢\mathcal{B}(\mathcal{G})\hookrightarrow\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G})\hookrightarrow\mathcal{B}^{\mathrm{cov}}(\mathcal{G})
Définition 1.35 (Revêtements tempérés).

Un recouvrement étale {Sv,φe}cov(𝒢)subscript𝑆𝑣subscript𝜑𝑒superscriptcov𝒢\{S_{v},\varphi_{e}\}\in\mathcal{B}^{\mathrm{cov}}(\mathcal{G}) est dit tempéré si le revêtement étale de semi-graphes d’anabélioïdes 𝒢𝒢superscript𝒢𝒢\mathcal{G}^{\prime}\rightarrow\mathcal{G} auquel il donne lieu est tel qu’il existe un revêtement étale fini 𝒢′′𝒢superscript𝒢′′𝒢\mathcal{G}^{\prime\prime}\rightarrow\mathcal{G} avec la propriété que pour chaque sommet ou arête c𝑐c de 𝔾𝔾\mathbb{G}, la restriction de 𝒢′′𝒢superscript𝒢′′𝒢\mathcal{G}^{\prime\prime}\rightarrow\mathcal{G} à 𝒢csubscript𝒢𝑐\mathcal{G}_{c} trivialise la restriction de 𝒢𝒢superscript𝒢𝒢\mathcal{G}^{\prime}\rightarrow\mathcal{G} à 𝒢csubscript𝒢𝑐\mathcal{G}_{c}. Cela revient à dire que par le changement de base 𝒢c′′𝒢csubscriptsuperscript𝒢′′𝑐subscript𝒢𝑐\mathcal{G}^{\prime\prime}_{c}\rightarrow\mathcal{G}_{c} le revêtement 𝒢c𝒢csubscriptsuperscript𝒢𝑐subscript𝒢𝑐\mathcal{G}^{\prime}_{c}\rightarrow\mathcal{G}_{c} est trivial, c’est-à-dire isomorphe au coproduit d’un nombre dénombrable de copies de 𝒢c′′subscriptsuperscript𝒢′′𝑐\mathcal{G}^{\prime\prime}_{c}.

Un tel revêtement étale 𝒢𝒢superscript𝒢𝒢\mathcal{G}^{\prime}\rightarrow\mathcal{G} induit par un recouvrement tempéré sera appelé revêtement tempéré du semi-graphe d’anabélioïdes 𝒢𝒢\mathcal{G}. La catégorie des recouvrements tempérés sera notée

temp(𝒢).superscripttemp𝒢\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}).

Soit 𝒢𝒢\mathcal{G} est un semi-graphe d’anabélioïdes. Si c𝑐c est une composante (sommet ou arête) du semi-graphe sous-jacent 𝔾𝔾\mathbb{G}, tout foncteur fondamental βcsubscriptsuperscript𝛽𝑐\beta^{*}_{c} de 𝒢csubscript𝒢𝑐\mathcal{G}_{c} se prolonge en un foncteur βc:𝒢c𝔈𝔫𝔰dd:superscriptsubscript𝛽𝑐absenttopsuperscriptsubscript𝒢𝑐top𝔈𝔫superscript𝔰dd\beta_{c}^{*\top}:\mathcal{G}_{c}^{\top}\to\mathfrak{Ens}^{\mathrm{dd}} conservatif et préservant les limites finies et colimites dénombrables

Définition 1.36.

Un foncteur fibre géométrique de temp(𝒢)superscripttemp𝒢\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}) dans 𝔈𝔫𝔰dd𝔈𝔫superscript𝔰dd\mathfrak{Ens}^{\mathrm{dd}} est défini comme un foncteur composé

temp(𝒢)𝒢cβc𝔈𝔫𝔰dd,superscripttemp𝒢superscriptsubscript𝒢𝑐topsuperscriptsubscript𝛽𝑐absenttop𝔈𝔫superscript𝔰dd\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G})\to\mathcal{G}_{c}^{\top}\xrightarrow{\beta_{c}^{*\top}}\mathfrak{Ens}^{\mathrm{dd}},

c𝑐c est une composante de 𝔾𝔾\mathbb{G} et βcsubscript𝛽𝑐\beta_{c} un point de base de 𝒢csubscript𝒢𝑐\mathcal{G}_{c}. Lorsque 𝒢𝒢\mathcal{G} est connexe, tous les foncteurs fibres géométriques sont isomorphes.

Soit Υ𝒢ge´osubscriptsuperscriptΥg´eo𝒢\Upsilon^{\mathrm{g\acute{e}o}}_{\mathcal{G}} l’ensemble des foncteurs de temp(𝒢)superscripttemp𝒢\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}) dans 𝔈𝔫𝔰dd𝔈𝔫superscript𝔰dd\mathfrak{Ens}^{\mathrm{dd}} isomorphes à un foncteur fibre géométrique.


Le prochain résultat, de [Mzk333], nous montre que les revêtements tempérés sont suffisants dans la théorie des tempéroïdes, et assez riches pour pouvoir définir sous certaines hypothèses le groupe fondamental tempéré d’un semi-graphe d’anabélioïdes.

Proposition 1.37 (Groupe tempéré d’un semi-graphe d’anabélioïdes).

Soient 𝒢𝒢\mathcal{G} et 𝒢superscript𝒢\mathcal{G}^{\prime} des semi-graphes d’anabélioïdes connexes, quasi-cohérents, totalement élevés, totalement détachés et sommitalement minces (ces notions seront définies dans la suite) . Alors :

  1. 1.

    La catégorie temp(𝒢)superscripttemp𝒢\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}) munie de la classe d’isomorphisme de foncteurs fibres Υ𝒢ge´osuperscriptsubscriptΥ𝒢g´eo\Upsilon_{\mathcal{G}}^{\mathrm{g\acute{e}o}} est un tempéroïde connexe, ce qui permet de définir le groupe fondamental tempéré du semi-graphe 𝒢𝒢\mathcal{G}, noté

    π1temp(𝒢),superscriptsubscript𝜋1temp𝒢\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}),

    comme égal au groupe fondamental tempéré π1temp(temp(𝒢))superscriptsubscript𝜋1tempsuperscripttemp𝒢\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G})) du tempéroïde connexe (temp(𝒢),Υ𝒢ge´o)superscripttemp𝒢superscriptsubscriptΥ𝒢g´eo(\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}),\Upsilon_{\mathcal{G}}^{\mathrm{g\acute{e}o}}). On a donc une équivalence de catégories :

    temp(π1temp(𝒢))temp(𝒢).superscripttempsuperscriptsubscript𝜋1temp𝒢superscripttemp𝒢\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}))\approx\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}).
  2. 2.

    L’injection pleine (𝒢)temp(𝒢)𝒢superscripttemp𝒢\mathcal{B}(\mathcal{G})\hookrightarrow\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}) induit une injection de groupes topologiques

    π1temp(𝒢)π1(𝒢).superscriptsubscript𝜋1temp𝒢subscript𝜋1𝒢{\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G})\hookrightarrow\pi_{1}(\mathcal{G})}.
  3. 3.

    Tout morphisme de semi-graphes d’anabélioïdes 𝒢𝒢superscript𝒢𝒢\mathcal{G}^{\prime}\rightarrow\mathcal{G} induit un morphisme de tempéroïdes connexes temp(𝒢)temp(𝒢)superscripttempsuperscript𝒢superscripttemp𝒢\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}^{\prime})\rightarrow\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}). Par ailleurs si 𝒢𝒢superscript𝒢𝒢\mathcal{G}^{\prime}\rightarrow\mathcal{G} est un revêtement tempéré et si 𝒢𝒢\mathcal{G} est cohérent, alors le morphisme induit temp(𝒢)temp(𝒢)superscripttempsuperscript𝒢superscripttemp𝒢\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}^{\prime})\rightarrow\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}) est un revêtement étale.

Remarque 1.38.

Soit 𝒢𝒢\mathcal{G} un semi-graphe d’anabélioïdes connexe, quasi-cohérent, totalement élevé, totalement détaché et sommitalement mince. Supposons également que chaque arête aboutit au moins à un sommet. Soit (𝒢i𝒢)iIsubscriptsubscript𝒢𝑖𝒢𝑖𝐼(\mathcal{G}_{i}\rightarrow\mathcal{G})_{i\in I} une famille de revêtements étales finis galoisiens de 𝒢𝒢\mathcal{G} qui est cofinale (c’est-à-dire telle que si pour chaque iI𝑖𝐼i\in I 𝒢i𝒢subscript𝒢𝑖𝒢\mathcal{G}_{i}\rightarrow\mathcal{G} est induit par un certain SiOb((𝒢))subscript𝑆𝑖Ob𝒢S_{i}\in\mathrm{Ob}(\mathcal{B}(\mathcal{G})), alors la famille (Si)iIsubscriptsubscript𝑆𝑖𝑖𝐼(S_{i})_{i\in I} est cofinale dans (𝒢)𝒢\mathcal{B}(\mathcal{G})). Nous savons alors que le groupe profini π1(𝒢)subscript𝜋1𝒢\pi_{1}(\mathcal{G}) peut être construit comme la limite projective :

π1(𝒢)=limiIGal(𝒢i/𝒢).subscript𝜋1𝒢subscriptprojective-limit𝑖𝐼Galsubscript𝒢𝑖𝒢\pi_{1}(\mathcal{G})=\varprojlim_{i\in I}\mathrm{Gal}(\mathcal{G}_{i}/\mathcal{G}).

Pour tout iI𝑖𝐼i\in I notons 𝒢~i𝒢isubscript~𝒢𝑖subscript𝒢𝑖\widetilde{\mathcal{G}}_{i}\rightarrow\mathcal{G}_{i} le «  revêtement universel   » de 𝒢isubscript𝒢𝑖\mathcal{G}_{i}, i.e. le revêtement étale localement trivial de 𝒢isubscript𝒢𝑖\mathcal{G}_{i} dont le semi-graphe sous-jacent correspond au revêtement universel du semi-graphe 𝔾isubscript𝔾𝑖\mathbb{G}_{i} correspondant à 𝒢isubscript𝒢𝑖\mathcal{G}_{i}. Le groupe Ti:=Aut𝒢i(𝒢~i)assignsubscript𝑇𝑖subscriptAutsubscript𝒢𝑖subscript~𝒢𝑖T_{i}:=\mathrm{Aut}_{\mathcal{G}_{i}}(\widetilde{\mathcal{G}}_{i}) est alors un groupe libre discret. Par ailleurs 𝒢~i𝒢subscript~𝒢𝑖𝒢\widetilde{\mathcal{G}}_{i}\rightarrow\mathcal{G} est un revêtement tempéré galoisien, dont le groupe de Galois s’insère dans une suite exacte :

{1}TiGal(𝒢~i/𝒢)Gal(𝒢i/𝒢){1}.1subscript𝑇𝑖Galsubscript~𝒢𝑖𝒢Galsubscript𝒢𝑖𝒢1\{1\}\longrightarrow T_{i}\longrightarrow\mathrm{Gal}(\widetilde{\mathcal{G}}_{i}/\mathcal{G})\longrightarrow\mathrm{Gal}(\mathcal{G}_{i}/\mathcal{G})\longrightarrow\{1\}.

La famille (Gal(𝒢~i/𝒢))iIsubscriptGalsubscript~𝒢𝑖𝒢𝑖𝐼(\mathrm{Gal}(\widetilde{\mathcal{G}}_{i}/\mathcal{G}))_{i\in I} est un système projectif, et le groupe tempéré de 𝒢𝒢\mathcal{G} peut être décrit de la manière suivante :

π1temp(𝒢)=limiIGal(𝒢~i/𝒢).superscriptsubscript𝜋1temp𝒢subscriptprojective-limit𝑖𝐼Galsubscript~𝒢𝑖𝒢\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G})=\varprojlim_{i\in I}\mathrm{Gal}(\widetilde{\mathcal{G}}_{i}/\mathcal{G}).

1.3 Hypothèses mochizukiennes

Avant d’énoncer le résultat fondamental sur les semi-graphes d’anabélïoides dont nous nous servirons dans la suite, nous allons tout d’abord avoir besoin de définir certaines notions que l’on qualifiera de mochizukiennes.

Si 𝒢𝒢\mathcal{G} est un semi-graphe d’anabélïoides, notons πvsubscript𝜋𝑣\pi_{v} et πbsubscript𝜋𝑏\pi_{b} (ou πesubscript𝜋𝑒\pi_{e}) les groupes fondamentaux des anabélioïdes connexes 𝒢vsubscript𝒢𝑣\mathcal{G}_{v} et 𝒢esubscript𝒢𝑒\mathcal{G}_{e} dont on choisit des points de bases, pour chaque sommet v𝑣v et chaque branche b𝑏b d’une arête e𝑒e aboutissant à v𝑣v. La branche b𝑏b définit un morphisme de groupes (extérieur) b:πbπv:subscript𝑏subscript𝜋𝑏subscript𝜋𝑣b_{*}:\pi_{b}\rightarrow\pi_{v}. On dira que 𝒢𝒢\mathcal{G} est de type injectif lorsque tous les morphismes de ce type sont injectifs. Si 𝒢𝒢\mathcal{G} est de type injectif, nous continuerons à noter πbsubscript𝜋𝑏\pi_{b} l’image de πbsubscript𝜋𝑏\pi_{b} dans πvsubscript𝜋𝑣\pi_{v} par bsubscript𝑏b_{*}, celle-ci étant définie à conjugaison près dans πvsubscript𝜋𝑣\pi_{v}.

Définition 1.39.

Soit 𝒢𝒢\mathcal{G} un semi-graphe d’anabélioïdes de type injectif. Un approximateur de 𝒢𝒢\mathcal{G} sera défini comme un morphisme de semi-graphes d’anabélioïdes 𝒢𝒢𝒢superscript𝒢{\mathcal{G}\rightarrow\mathcal{G}^{\prime}} au-dessus d’un même semi-graphe 𝔾𝔾\mathbb{G} tel que 𝒢superscript𝒢\mathcal{G}^{\prime} est de type injectif et :

  1. 1.

    il existe un entier N1𝑁1N\geqslant 1 tel que pour tout sommet v𝑣v de 𝔾𝔾\mathbb{G} le groupe πvsubscriptsuperscript𝜋𝑣\pi^{\prime}_{v} soit fini de cardinal Nabsent𝑁\leqslant N;

  2. 2.

    si c𝑐c est une arête ou un sommet de 𝔾𝔾\mathbb{G}, alors le morphisme de groupes πcπcsubscript𝜋𝑐superscriptsubscript𝜋𝑐\pi_{c}\rightarrow\pi_{c}^{\prime} induit par le morphisme d’anabélioïdes 𝒢c𝒢csubscript𝒢𝑐subscriptsuperscript𝒢𝑐\mathcal{G}_{c}\rightarrow\mathcal{G}^{\prime}_{c} est surjectif.

Définition 1.40.

Un groupe profini G𝐺G est dit mince lorsque le centralisateur ZG(H)subscript𝑍𝐺𝐻Z_{G}(H) de tout sous-groupe ouvert H𝐻H de G𝐺G est trivial.

Remarque 1.41.

Un groupe profini G𝐺G est mince si et seulement si le centre de tout sous-groupe ouvert est trivial. En effet la nécessité de cette condition est évidente, tandis que l’autre sens se montre comme suit : si HG𝐻𝐺H\subseteq G est un sous-groupe ouvert et hZG(H)subscript𝑍𝐺𝐻h\in Z_{G}(H), alors le sous-groupe Hsuperscript𝐻H^{\prime} engendré par H𝐻H et hh est ouvert et hh est dans son centre, donc trivial par hypothèse.

Définition 1.42.

Soit 𝒢𝒢\mathcal{G} un semi-graphe d’anabélioïdes de type injectif de semi-graphe sous-jacent 𝔾𝔾\mathbb{G}.

  1. 1.

    𝒢𝒢\mathcal{G} est dit totalement détaché lorsque, pour tout sommet v𝑣v auquel une branche b𝑏b aboutit, πvsubscript𝜋𝑣\pi_{v} est d’ordre infini et pour tout gπv𝑔subscript𝜋𝑣g\in\pi_{v}:

    • i)

      l’intersection πbg.πb.g1formulae-sequencesubscript𝜋𝑏𝑔subscript𝜋𝑏superscript𝑔1\pi_{b}\cap g.\pi_{b}.g^{-1} est triviale dans πvsubscript𝜋𝑣\pi_{v} si gπb𝑔subscript𝜋𝑏g\notin\pi_{b}

    • ii)

      l’intersection πbg.πb.g1formulae-sequencesubscript𝜋𝑏𝑔subscript𝜋superscript𝑏superscript𝑔1\pi_{b}\cap g.\pi_{b^{\prime}}.g^{-1} est triviale dans πvsubscript𝜋𝑣\pi_{v} si bsuperscript𝑏b^{\prime} est une branche différente de b𝑏b aboutissant à v𝑣v.

  2. 2.

    𝒢𝒢\mathcal{G} est dit totalement élevé si pour tout sommet v𝑣v de 𝔾𝔾\mathbb{G} et pour tout entier M1𝑀1M\geqslant 1 il existe un approximateur 𝒢𝒢𝒢superscript𝒢{\mathcal{G}\rightarrow\mathcal{G}^{\prime}} et un sous-groupe NMπvsubscript𝑁𝑀subscriptsuperscript𝜋𝑣N_{M}\subseteq\pi^{\prime}_{v} d’ordre Mabsent𝑀\geqslant M tel que dans πvsubscriptsuperscript𝜋𝑣\pi^{\prime}_{v} l’intersection NMπbsubscript𝑁𝑀subscriptsuperscript𝜋𝑏N_{M}\cap\pi^{\prime}_{b} soit triviale pour toute branche b𝑏b aboutissant à v𝑣v.

  3. 3.

    𝒢𝒢\mathcal{G} est dit sommitalement mince si pour tout sommet v𝑣v de 𝔾𝔾\mathbb{G} l’anabélioïde connexe 𝒢vsubscript𝒢𝑣\mathcal{G}_{v} est mince, c’est-à-dire si πvsubscript𝜋𝑣\pi_{v} est un groupe mince.

Les définitions précédentes étant de nature locale, nous allons donner une dernière définition de nature plus globale, celle que quasi-cohérence.

Définition 1.43.

Un semi-graphe d’anabélioïdes 𝒢𝒢\mathcal{G} de type injectif sera dit quasi-cohérent lorsque pour tout entier r1𝑟1r\geqslant 1 et toute collection de revêtements finis étales (c𝒢c)csubscriptsubscript𝑐subscript𝒢𝑐𝑐(\mathcal{H}_{c}\rightarrow\mathcal{G}_{c})_{c} de degrés rabsent𝑟\leqslant r (où c𝑐c décrit toutes les composantes du graphe 𝔾𝔾\mathbb{G}, ie. l’ensemble des arêtes et des sommets), il existe un approximateur 𝒢𝒢𝒢superscript𝒢{\mathcal{G}\rightarrow\mathcal{G}^{\prime}} tel que, pour toute composante c𝑐c de 𝔾𝔾\mathbb{G}, le tiré en arrière à 𝒢csubscript𝒢𝑐\mathcal{G}_{c} du «  revêtement universel   » c𝒢csubscriptsuperscript𝑐subscriptsuperscript𝒢𝑐\mathcal{H}^{\prime}_{c}\rightarrow\mathcal{G}^{\prime}_{c} de 𝒢csubscriptsuperscript𝒢𝑐\mathcal{G}^{\prime}_{c} (ie. le revêtement fini étale déterminé par le sous-groupe trivial de 𝒢csubscriptsuperscript𝒢𝑐\mathcal{G}^{\prime}_{c}) trivialise c𝒢csubscript𝑐subscript𝒢𝑐\mathcal{H}_{c}\rightarrow\mathcal{G}_{c}.

𝒢𝒢\mathcal{G} sera dit cohérent s’il est quasi-cohérent et que, pour chaque composante c𝑐c de 𝔾𝔾\mathbb{G}, le groupe profini πcsubscript𝜋𝑐\pi_{c} est topologiquement finiment engendré.

1.4 Reconstruction du semi-graphe sous-jacent d’un tempéroïde

Nous allons énoncer un résultat de Mochizuki, fondamental dans la suite de ce texte, qui justifie l’usage que l’on fait des semi-graphes d’anabélioïdes. Il faut le voir comme une version faible de [Mzk333] , Corollary 3.9.
Mochizuki définit les morphismes quasi-géométriques de tempéroïdes puis énonce un résultat général important qui donne sous certaines hypothèses une correspondance entre les morphismes localement ouverts de semi-graphes d’anabéloïdes et les morphismes quasi-géométriques des tempéroïdes correspondants. Il n’est cependant pas nécessaire ici de définir les morphismes quasi-géométriques car nous utiliserons une version plus faible de son résultat. En effet, en remarquant que tout isomorphisme de tempéroïdes est quasi-géométrique, on obtient le résultat suivant :

Théorème 1.44 (Reconstruction du semi-graphe d’anabélioïdes sous-jacent, [Mzk333] (Corollary 3.9)).

Soient 𝒢𝒢\mathcal{G} et \mathcal{H} des graphes d’anabélioïdes connexes, de type injectif, quasi-cohérents, totalement élevés, totalement détachés et sommitalement minces. Alors en appliquant "temp()""superscripttemp""\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\--)" on obtient une bijection naturelle entre les isomorphismes de semi-graphes d’anabélioïdes 𝒢similar-to𝒢\mathcal{G}\xrightarrow{\sim}\mathcal{H} et les isomorphismes de tempéroïdes connexes

(temp(𝒢),Υ𝒢ge´o)(temp(),Υge´o).similar-tosuperscripttemp𝒢subscriptsuperscriptΥg´eo𝒢superscripttempsubscriptsuperscriptΥg´eo(\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}),\Upsilon^{\mathrm{g\acute{e}o}}_{\mathcal{G}})\xrightarrow{\sim}(\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{H}),\Upsilon^{\mathrm{g\acute{e}o}}_{\mathcal{H}}).

2 Courbes analytiques et semi-graphes d’anabélioïdes associés

2.1 Courbes k𝑘k-analytiques

Soit k𝑘k un corps non archimédien complet algébriquement clos. Le corps résiduel k~~𝑘\widetilde{k} peut être a priori de caractéristique nulle. Désignons par p𝑝p l’exposant caractéristique de k~~𝑘\widetilde{k}, i.e. sa caractéristique si elle est non nulle et 111 sinon. Nous travaillerons dans la suite avec la notion d’espace analytique au sens de Berkovich introduite dans le livre fondateur [Ber111]. En particulier un espace de Berkovich sera localement compact et localement connexe par arcs.

Nous désignerons par courbe k𝑘k-analytique tout espace k𝑘k-analytique séparé dont toutes les composantes connexes sont de dimension k𝑘k-analytique égale à 111. D’après [Ber444] nous savons que les courbes k𝑘k-analytiques ont localement l’allure d’ «  arbres réel   » et sont localement simplement connexes, ce qui nous permettra d’y appliquer la théorie du groupe fondamental topologique et du revêtement universel. Si X𝑋X est une courbe k𝑘k-analytique, en reprenant les définitions de [Ber111] ou [Duc], nous parlerons des points de type 111, 222, 333 ou 444. Pour i{1,2,3,4}𝑖1.2.3.4i\in\{1,2,3,4\} notons X[i]subscript𝑋delimited-[]𝑖X_{[i]} l’ensemble des points de x𝑥x de type i𝑖i. Alors X[1],X[2],X[3]subscript𝑋delimited-[]1subscript𝑋delimited-[]2subscript𝑋delimited-[]3X_{[1]},X_{[2]},X_{[3]} et X[4]subscript𝑋delimited-[]4X_{[4]} forment une partition de X𝑋X. Notons également X[0]subscript𝑋delimited-[]0X_{[0]} l’ensemble des points rigides de X𝑋X. Nous avons X[1]=X[0]subscript𝑋delimited-[]1subscript𝑋delimited-[]0X_{[1]}=X_{[0]} puisque k𝑘k est supposé algébriquement clos.

  1. 1.

    Droites k𝑘k-analytiques affine et projective

    • La droite affine k𝑘k-analytique, 𝔸k1,ansuperscriptsubscript𝔸𝑘1an\mathbb{A}_{k}^{1,\mathrm{an}}, est la courbe k𝑘k-analytique connexe, sans bord et lisse dont les points sont les semi-normes multiplicatives sur l’anneau de polynômes k[T]𝑘delimited-[]𝑇k[T] qui étendent la norme de k𝑘k. Elle est recouverte par les domaines affinoïdes de la forme :

      B(0,r)=(k{r1T})B0𝑟𝑘superscript𝑟1𝑇\mathrm{B}(0,r)=\mathcal{M}\left(k\{r^{-1}T\}\right)

      définis par la condition |T|r𝑇𝑟|T|\leqslant r (voir [Ber111] pour la définition de domaine affinoïde, de k{r1T}𝑘superscript𝑟1𝑇k\{r^{-1}T\} et du spectre analytique (𝒜)𝒜\mathcal{M}(\mathcal{A}) d’une k𝑘k-algèbre de Banach 𝒜𝒜\mathcal{A}).

    • La droite projective k𝑘k-analytique, k1,ansuperscriptsubscript𝑘1an\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}}, est la courbe k𝑘k-analytique propre (compacte et sans bord), connexe et lisse dont les points sont les semi-normes multiplicatives x𝑥x sur l’anneau des polynômes k[T0,T1]𝑘subscript𝑇0subscript𝑇1k[T_{0},T_{1}] vérifiant |Ti(x)|0subscript𝑇𝑖𝑥0|T_{i}(x)|\neq 0 pour au moins un i{0,1}𝑖0.1i\in\{0,1\}, modulo la relation d’équivalence qui identifie deux semi-normes x1subscript𝑥1x_{1} et x2subscript𝑥2x_{2} si et seulement s’il existe δ+𝛿superscriptsubscript\delta\in\mathbb{R}_{+}^{*} tel que l’on ait |P(x1)|=δn|P(x2)|𝑃subscript𝑥1superscript𝛿𝑛𝑃subscript𝑥2|P(x_{1})|=\delta^{n}|P(x_{2})| pour tout polynôme homogène Pk[T0,T1]𝑃𝑘subscript𝑇0subscript𝑇1P\in k[T_{0},T_{1}] de degré n𝑛n.

      Soit {}\{\infty\} le point de k1,ansuperscriptsubscript𝑘1an\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}} défini par la relation : |T0(x)|=0subscript𝑇0𝑥0|T_{0}(x)|=0. On a un isomorphisme d’espaces k𝑘k-analytiques

      ρ:k1,an{}𝔸k1,an:𝜌similar-tosuperscriptsubscript𝑘1ansuperscriptsubscript𝔸𝑘1an\rho:\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}}\setminus\{\infty\}\xrightarrow{\sim}\mathbb{A}_{k}^{1,\mathrm{an}}

      donné par : |T(ρ(x))|=|T1(x)|/|T2(x)|𝑇𝜌𝑥subscript𝑇1𝑥subscript𝑇2𝑥|T(\rho(x))|=|T_{1}(x)|/|T_{2}(x)| pour tout xk1,an{}𝑥superscriptsubscript𝑘1anx\in\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}}\setminus\{\infty\}.

      En reprenant les notations de [Duc], pour tout couple (a,r)k×+𝑎𝑟𝑘subscript(a,r)\in k\times\mathbb{R}_{+}, notons ηa,rsubscript𝜂𝑎𝑟\eta_{a,r} le point de k1,an{}superscriptsubscript𝑘1an\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}}\setminus\{\infty\} (identifié à 𝔸k1,ansuperscriptsubscript𝔸𝑘1an\mathbb{A}_{k}^{1,\mathrm{an}}) défini par :

      |P(ηa,r)|=max0ir(|αi|ri)dès queP=i=0rαi(Ta)i𝑃subscript𝜂𝑎𝑟subscriptmax0𝑖𝑟subscript𝛼𝑖superscript𝑟𝑖dès que𝑃superscriptsubscript𝑖0𝑟subscript𝛼𝑖superscript𝑇𝑎𝑖|P(\eta_{a,r})|=\mathrm{max}_{0\leqslant i\leqslant r}(|\alpha_{i}|r^{i})\;\;\text{d\`{e}s que}\;\;P=\sum_{i=0}^{r}\alpha_{i}(T-a)^{i}

      Comme k𝑘k est algébriquement clos, points rigides et points de type 111 coïncident, et correspondent aux « évaluations » en ak𝑎𝑘a\in k, ηa,0subscript𝜂𝑎.0\eta_{a,0}, données par |P(ηa,0)|=|P(a)|k𝑃subscript𝜂𝑎.0subscript𝑃𝑎𝑘|P(\eta_{a,0})|=|P(a)|_{k}. Si r0𝑟0r\neq 0, ηa,rsubscript𝜂𝑎𝑟\eta_{a,r} est de type 222 si et seulement si r|k|𝑟superscript𝑘r\in|k^{*}|, dans le cas contraire il est de type 333. Il existe également des points de type 444 dès que k𝑘k n’est pas sphériquement clos, ce qui est le cas par exemple pour k=p𝑘subscript𝑝k=\mathbb{C}_{p}.

    Il existe une métrique naturelle sur l’ensemble des points de type 222 et 333 de k1,ansuperscriptsubscript𝑘1an\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}}, invariante sous le groupe des automorphismes (k𝑘k-analytiques) de k1,ansuperscriptsubscript𝑘1an\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}}. Elle est définie par la formule suivante :

    d(ηa,r,ηa,r)={logp(|aa|r)+logp(|aa|r)si |aa|max(r,r);|logp(rr)|si |aa|max(r,r)𝑑subscript𝜂𝑎𝑟subscript𝜂superscript𝑎superscript𝑟casessubscript𝑝𝑎superscript𝑎𝑟subscript𝑝𝑎superscript𝑎superscript𝑟si 𝑎superscript𝑎𝑟superscript𝑟subscript𝑝𝑟superscript𝑟si 𝑎superscript𝑎𝑟superscript𝑟d(\eta_{a,r},\eta_{a^{\prime},r^{\prime}})=\left\{\begin{array}[]{ll}\log_{p}\left(\frac{|a-a^{\prime}|}{r}\right)+\log_{p}\left(\frac{|a-a^{\prime}|}{r^{\prime}}\right)&\hbox{si }|a-a^{\prime}|\geqslant\max(r,r^{\prime});\\ |\log_{p}\left(\frac{r}{r^{\prime}}\right)|&\hbox{si }|a-a^{\prime}|\leqslant\max(r,r^{\prime})\end{array}\right.
  2. 2.

    Disques et couronnes k𝑘k-analytiques

Si I=[a,b]𝐼𝑎𝑏I=[a,b] est un intervalle compact de +superscriptsubscript\mathbb{R}_{+}^{*}, notons 𝒞(I)𝒞𝐼\mathcal{C}(I) la courbe k𝑘k-analytique associée à l’algèbre affinoïde

k{b1T,aU}/(TU=1).𝑘superscript𝑏1𝑇𝑎𝑈𝑇𝑈1k\{b^{-1}T,aU\}/(TU=1).

Si IJ𝐼𝐽I\subset J sont des intervalles compacts de +superscriptsubscript\mathbb{R}_{+}^{*}, il y a un morphisme naturel 𝒞(I)𝒞(J)𝒞𝐼𝒞𝐽\mathcal{C}(I)\rightarrow\mathcal{C}(J) qui identifie 𝒞(I)𝒞𝐼\mathcal{C}(I) à un domaine analytique de 𝒞(J)𝒞𝐽\mathcal{C}(J). Si I𝐼I est un intervalle arbitraire de +superscriptsubscript\mathbb{R}_{+}^{*}, on définit

𝒞(I)=limJI𝒞(J)𝔾man𝒞𝐼subscriptinjective-limit𝐽𝐼𝒞𝐽superscriptsubscript𝔾𝑚an\mathcal{C}(I)=\varinjlim_{J\subset I}\mathcal{C}(J)\subset\mathbb{G}_{m}^{\mathrm{an}}

J𝐽J décrit les intervalles compacts de +superscriptsubscript\mathbb{R}_{+}^{*}. Il aurait été possible et équivalent de définir 𝒞(I)𝒞𝐼\mathcal{C}(I) comme le domaine analytique de 𝔸k1,ansuperscriptsubscript𝔸𝑘1an\mathbb{A}_{k}^{1,\mathrm{an}} défini par la condition TIdelimited-∣∣𝑇𝐼\mid T\mid\in I. Une couronne désignera une courbe k𝑘k-analytique isomorphe à 𝒞(I)𝒞𝐼\mathcal{C}(I) pour un certain intervalle I𝐼I de +superscriptsubscript\mathbb{R}_{+}^{*}. Les couronnes sont en particulier des courbes quasi-lisses (nous utilisons ici la terminologie de [Duc18]), lisses dans le cas ouvert.

Définition 2.1 (Module d’une couronne k𝑘k-analytique).

Si I𝐼I est un intervalle de +superscriptsubscript\mathbb{R}_{+}^{*}, le module de la couronne 𝒞(I)𝒞𝐼\mathcal{C}(I) est défini comme la quantité :

Mod(𝒞(I))=supIinfI.Mod𝒞𝐼supremum𝐼infimum𝐼\mathrm{Mod}(\mathcal{C}(I))=\frac{\sup I}{\inf I}.

Le module d’une couronne k𝑘k-analytique 𝒞𝒞\mathcal{C}, noté Mod(𝒞)Mod𝒞\mathrm{Mod}(\mathcal{C}), est défini comme le module de 𝒞(I)𝒞𝐼\mathcal{C}(I) pour tout intervalle I𝐼I de +superscriptsubscript\mathbb{R}_{+}^{*} tel que l’on ait un isomorphisme 𝒞𝒞(I)similar-to-or-equals𝒞𝒞𝐼\mathcal{C}\simeq\mathcal{C}(I). Par cohérence avec la définition donnée de la métrique sur k,[2,3]1,ansubscriptsuperscript1an𝑘delimited-[]2.3\mathbb{P}^{1,\mathrm{an}}_{k,[2,3]}, la longueur d’une couronne 𝒞𝒞\mathcal{C} sera définie comme : (𝒞)=logp(Mod(𝒞))𝒞subscript𝑝Mod𝒞\ell(\mathcal{C})=\log_{p}\left(\mathrm{Mod}(\mathcal{C})\right).

Si r,r+𝑟superscript𝑟superscriptsubscriptr,r^{\prime}\in\mathbb{R}_{+}^{*} et a,ak𝑎superscript𝑎𝑘a,a^{\prime}\in k vérifient |aa|max(r,r)𝑎superscript𝑎𝑟superscript𝑟|a-a^{\prime}|\leqslant\max(r,r^{\prime}), alors d(ηa,r,ηa,r)=|logp(rr)|𝑑subscript𝜂𝑎𝑟subscript𝜂superscript𝑎superscript𝑟subscript𝑝𝑟superscript𝑟d(\eta_{a,r},\eta_{a^{\prime},r^{\prime}})=|\log_{p}\left(\frac{r}{r^{\prime}}\right)| correspond au module de l’unique couronne ouverte dont le bord est constitué des deux points ηa,rsubscript𝜂𝑎𝑟\eta_{a,r} et ηa,r=ηa,rsubscript𝜂superscript𝑎superscript𝑟subscript𝜂𝑎superscript𝑟\eta_{a^{\prime},r^{\prime}}=\eta_{a,r^{\prime}}.

Remarque 2.2.

Si I𝐼I et J𝐽J sont deux intervalles de +superscriptsubscript\mathbb{R}_{+}^{*}, les couronnes 𝒞(I)𝒞𝐼\mathcal{C}(I) et 𝒞(J)𝒞𝐽\mathcal{C}(J) sont isomorphes si et seulement si J|k×|I±1𝐽superscript𝑘superscript𝐼plus-or-minus1J\in\sqrt{|k^{\times}|}I^{\pm 1}. Par conséquent la définition ci-dessus du module d’une couronne ne dépend pas a posteriori du choix de l’intervalle I𝐼I.

Nous appellerons disque toute courbe k𝑘k-analytique isomorphe au domaine analytique de 𝔸k1,ansuperscriptsubscript𝔸𝑘1an\mathbb{A}_{k}^{1,\mathrm{an}} définit par les conditions T<rdelimited-∣∣𝑇𝑟\mid T\mid<r ou Trdelimited-∣∣𝑇𝑟\mid T\mid\leqslant r pour un certain r+𝑟superscriptsubscriptr\in\mathbb{R}_{+}^{*}. Les disques sont en particulier des courbes quasi-lisses, lisses dans le cas ouvert.

Définition 2.3 (Revêtement étale modéré d’un espace analytique et groupe fondamental modéré).
  • Soit φ:YX:𝜑𝑌𝑋\varphi:Y\rightarrow X un morphisme étale entre deux espaces analytiques. Si yY𝑦𝑌y\in Y, φ𝜑\varphi est dit modéré en y𝑦y si l’entier [L:(φ(y))]delimited-[]:𝐿𝜑𝑦{[L:\mathscr{H}(\varphi(y))]} est premier à p𝑝p, où L𝐿L est une clôture galoisienne de (y)𝑦\mathscr{H}(y). On dit que φ𝜑\varphi est modéré s’il l’est en tout point yY𝑦𝑌y\in Y.

    Un tel morphisme modéré est un revêtement modéré de X lorsque X𝑋X est recouvert par des ouverts U𝑈U avec φ1(U)=Yjsuperscript𝜑1𝑈coproductsubscript𝑌𝑗\varphi^{-1}(U)=\coprod Y_{j} et chaque YjUsubscript𝑌𝑗𝑈Y_{j}\to U est fini étale (voir la notion de covering space de [DJg]).

    Nous noterons Covt(X)superscriptCovt𝑋\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(X) la catégorie des revêtements modérés finis de X𝑋X.

  • Lorsque X𝑋X est connexe Covt(X)superscriptCovt𝑋\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(X) est une catégorie galoisienne (et a fortiori un anabélioïde connexe) dont nous noterons π1t(X)superscriptsubscript𝜋1t𝑋\pi_{1}^{\mathrm{t}}(X) le groupe fondamental et qui sera appelé le groupe fondamental modéré de X𝑋X. En particulier la catégorie Covt(X)superscriptCovt𝑋\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(X) sera équivalente à la catégorie (π1t(X))superscriptsubscript𝜋1t𝑋\mathcal{B}(\pi_{1}^{\mathrm{t}}(X)) des ensembles finis munis d’une action continue de π1t(X)superscriptsubscript𝜋1t𝑋\pi_{1}^{\mathrm{t}}(X).

Remarque 2.4.

Cette définition de morphisme modéré est légèrement différente de la notion de «  tame morphism   » que Berkovich introduit dans [Ber222] en imposant seulement que p𝑝p soit premier avec [(y):(φ(y))]delimited-[]:𝑦𝜑𝑦{[\mathscr{H}(y):\mathscr{H}(\varphi(y))]}. Notre nouvelle définition a l’avantage d’être plus maniable. Attention à ne pas penser qu’être modéré pour φ𝜑\varphi en yY𝑦𝑌y\in Y signifierait que l’extension (y)/(φ(y))𝑦𝜑𝑦\mathscr{H}(y)/\mathscr{H}(\varphi(y)) devrait être modérément ramifiée. Une telle définition serait moins restrictive (puisque (y)/(φ(y))𝑦𝜑𝑦\mathscr{H}(y)/\mathscr{H}(\varphi(y)) est automatiquement modérément ramifiée dès que [(y):(φ(y))]delimited-[]:𝑦𝜑𝑦{[\mathscr{H}(y):\mathscr{H}(\varphi(y))]} est premier avec p𝑝p, ce qui est en particulier le cas lorsque p𝑝p est premier avec [L:(φ(y))]delimited-[]:𝐿𝜑𝑦{[L:\mathscr{H}(\varphi(y))]}).

Si x𝑥x est un point d’une courbe analytique X𝑋X, l’ensemble des branches de X𝑋X en x𝑥x est défini par :

br(X,x)=limUπ0(U{x})br𝑋𝑥subscriptprojective-limit𝑈subscript𝜋0𝑈𝑥\mathrm{br}(X,x)=\varprojlim_{U}\pi_{0}(U\setminus\{x\})

U𝑈U décrit l’ensemble des voisinages ouverts de x𝑥x. Si V𝑉V est un voisinage ouvert de x𝑥x, b(V)𝑏𝑉b(V) est défini comme l’image de b𝑏b dans π0(V{x})subscript𝜋0𝑉𝑥\pi_{0}(V\setminus\{x\}). Une section de b𝑏b est un b(V)𝑏𝑉b(V) pour un certain voisinage ouvert V𝑉V de x𝑥x.

Définition 2.5 (Degré d’un morphisme fini et plat).

Soit φ:YX:𝜑𝑌𝑋\varphi:Y\rightarrow X un morphisme fini et plat entre espaces k𝑘k-analytiques, et xX𝑥𝑋x\in X.

  • Si U𝑈U est un domaine affinoïde de X𝑋X contenant x𝑥x, son image réciproque φ1(U)superscript𝜑1𝑈\varphi^{-1}(U) est un domaine affinoïde de Y𝑌Y dont l’algèbre des fonctions est un 𝒪U(U)subscript𝒪𝑈𝑈\mathscr{O}_{U}(U)-module fini et localement libre; si U𝑈U est connexe le rang de ce module est bien défini et ne dépend pas du choix de U𝑈U. On l’appellera le degré de φ𝜑\varphi au-dessus de x𝑥x, et on le notera degxφsubscriptdegree𝑥𝜑\deg_{x}\varphi. La fonction xdegxφ𝑥subscriptdegree𝑥𝜑x\rightarrow\deg_{x}\varphi est localement constante sur X𝑋X, ce qui permet sans ambiguïté de définir degφdegree𝜑\deg\varphi dès que X𝑋X est supposé connexe et non vide.

  • Supposons que X𝑋X et Y𝑌Y sont des courbes k𝑘k-analytiques, et soit abr(X,x)𝑎br𝑋𝑥a\in\mathrm{br}(X,x). Comme φ𝜑\varphi induit une application naturelle φ:br(Y,y)br(X,x):𝜑br𝑌𝑦br𝑋𝑥\varphi:\mathrm{br}(Y,y)\rightarrow\mathrm{br}(X,x), il est loisible de considérer l’ensemble φ1(a)br(Y,y)superscript𝜑1𝑎br𝑌𝑦\varphi^{-1}(a)\subset\mathrm{br}(Y,y). Si bφ1(a)𝑏superscript𝜑1𝑎b\in\varphi^{-1}(a), considérons un voisinage ouvert V𝑉V de x𝑥x dans X𝑋X qui est un arbre tel que φ1(V)superscript𝜑1𝑉\varphi^{-1}(V) soit une réunion disjointe (finie) d’arbres qui sépare les antécédents de x𝑥x. Soit W𝑊W la composante connexe de φ1(a(V))superscript𝜑1𝑎𝑉\varphi^{-1}(a(V)) correspondant à b𝑏b. Le morphisme Wa(V)𝑊𝑎𝑉W\rightarrow a(V) est alors fini et plat, et son degré ne dépend pas du choix de U𝑈U. On le note alors : deg(ba)degree𝑏𝑎\deg(b\rightarrow a).

Remarque 2.6.

Lorsque X𝑋X est un bon espace (i.e. que chaque point de X𝑋X possède un voisinnage k𝑘k-affinoïde), alors Y𝑌Y l’est aussi, et dans ce cas degxφsubscriptdegree𝑥𝜑\deg_{x}\varphi n’est rien d’autre que le rang du 𝒪X,xsubscript𝒪𝑋𝑥\mathscr{O}_{X,x}-module libre yφ1(x)𝒪Y,ysubscriptproduct𝑦superscript𝜑1𝑥subscript𝒪𝑌𝑦\displaystyle{\prod_{y\in\varphi^{-1}(x)}\mathscr{O}_{Y,y}} . C’est le cas en particulier dès que X𝑋X est une courbe k𝑘k-analytique en vertu de la proposition 3.3.73373.3.7 de [Duc] selon laquelle toute courbe k𝑘k-analytique est un bon espace.

Un morphisme φ:YX:𝜑𝑌𝑋\varphi:Y\rightarrow X entre deux espaces k𝑘k-analytiques est dit totalement déployé en xim(φ)𝑥im𝜑x\in\mathrm{im}(\varphi) si pour tout yφ1({x})𝑦superscript𝜑1𝑥y\in\varphi^{-1}(\{x\}), le morphisme (x)(y)𝑥𝑦\mathscr{H}(x)\rightarrow\mathscr{H}(y) est un isomorphisme. Lorsque φ𝜑\varphi est de degré n𝑛n, φ𝜑\varphi est totalement déployé en x𝑥x si et seulement si la fibre φ1({x})superscript𝜑1𝑥\varphi^{-1}(\{x\}) est de cardinal n𝑛n, ce qui revient à dire que φ𝜑\varphi est localement au voisinage de x𝑥x un revêtement topologique (cf. [And], III.1.2.11211.2.1).

2.2 Squelette, triangulation et noeuds d’une courbe k𝑘k-analytique

Définition 2.7.

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytique quasi-lisse :

  1. 1.

    Le squelette analytique de X𝑋X, noté San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X), est défini comme l’ensemble des points de X𝑋X qui n’appartiennent à aucun disque analytique ouvert.

  2. 2.

    Un voisinage totalement découpé autour de xX[2,3]𝑥subscript𝑋delimited-[]2.3x\in X_{[2,3]} est un voisinage ouvert U𝑈U de x𝑥x tel que l’application br(X,x)π0(U{x})br𝑋𝑥subscript𝜋0𝑈𝑥\mathrm{br}(X,x)\rightarrow\pi_{0}(U\setminus\{x\}) soit bijective et que toute composante connexe de U{x}𝑈𝑥U\setminus\{x\} soit une couronne ou un disque.

Si π0(San)π0(X)subscript𝜋0superscript𝑆ansubscript𝜋0𝑋\pi_{0}(S^{\mathrm{an}})\rightarrow\pi_{0}(X) est surjective, alors d’après les théorèmes 1.6.1316131.6.13 et 5.1.1151115.1.11 de [Duc] nous savons qu’il existe une rétraction par déformation rX:XSan(X):subscript𝑟𝑋𝑋superscript𝑆an𝑋r_{X}:X\rightarrow S^{\mathrm{an}}(X). En particulier X𝑋X a le type d’homotopie de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X).

Remarque 2.8.

Un point x𝑥x de type 222 ou 333 d’une courbe k𝑘k-analytique quasi-lisse X𝑋X admet toujours un voisinage totalement découpé :

  • Si xX[3]𝑥subscript𝑋delimited-[]3x\in X_{[3]}, x𝑥x admet un voisinage ouvert totalement découpé Z𝑍Z qui est une couronne telle que xSan(Z)𝑥superscript𝑆an𝑍x\in S^{\mathrm{an}}(Z) et dont l’adhérence dans X𝑋X est un arbre compact. En outre Z𝑍Z est de type ],[]*,*[ si xanX𝑥superscriptan𝑋x\notin\partial^{\mathrm{an}}X, de type ],]]*,*] (avec anZ={x}superscriptan𝑍𝑥\partial^{\mathrm{an}}Z=\{x\}) si xanX𝑥superscriptan𝑋x\in\partial^{\mathrm{an}}X et x𝑥x n’est pas un point isolé, et Z={x}𝑍𝑥Z=\{x\} lorsque x𝑥x est un point isolé de X𝑋X (cf. [Duc], Théorème 4.3.54354.3.5).

  • Si xX[2]𝑥subscript𝑋delimited-[]2x\in X_{[2]}, un voisinage U𝑈U de x𝑥x totalement découpé peut être choisi tel que son adhérence est un arbre compact et que U{x}𝑈𝑥U\setminus\{x\} est réunion disjointe de disques et d’un nombre fini de couronnes. Cela peut être vu comme une conséquence observée par Berkovich du théorème de réduction semi-stable. Néanmoins, nous nous servirons plutôt de [Duc] où l’auteur propose un cheminement «  dans l’autre sens   » , c’est-à-dire en partant de l’étude locale pour arriver au théorème de réduction stable. La remarque ci-dessus découle alors de [Duc], Théorème 4.5.4.

Remarque 2.9.

Dans [Duc] l’auteur utilise le terme de «  graphe   » même lorsqu’une arête est «  ouverte   » au sens où elle ne contient qu’une branche. Néanmoins, dans ce texte, afin d’être cohérent avec le langage de Mochizuki, nous différencierons un graphe (toutes les arêtes ont 222 branches) d’un semi-graphe (les arêtes peuvent avoir également 00 ou 111 branche). D’après [Duc], Théorème 5.1.11, le squelette analytique San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) d’une courbe analytique quasi-lisse X𝑋X est un semi-graphe localement fini contenu dans X[2,3]subscript𝑋delimited-[]2.3X_{[2,3]} et qui contient le bord analytique de X𝑋X. Si San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) rencontre chaque composante connexe de X𝑋X, alors c’est un semi-graphe analytiquement admissible dans le sens de [Duc], c’est-à-dire que c’est un sous-semi-graphe fermé de X𝑋X dont toute composante connexe du complémentaire est un disque relativement compact dans X𝑋X.

Définition 2.10 (Squelette tronqué).

Soit X𝑋X est une courbe k𝑘k-analytique quasi-lisse. Nous savons que San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) est un semi-graphe (cf. remarque 2.9 ci-dessus). Notons San(X)superscript𝑆ansuperscript𝑋S^{\mathrm{an}}(X)^{\natural}, appelé le squelette analytique tronqué de X𝑋X, le plus grand sous-graphe de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X). Il est obtenu à partir de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) en retirant les arêtes qui ont strictement moins de deux branches aboutissant à des sommets.

Une interprétation du squelette tronqué en terme de composantes relativement connexe sera donnée dans la suite de ce texte. Cette définition est cohérente avec celle de squelette tronqué d’une triangulation que nous donnons en 2.19.

Définition 2.11.

Si X𝑋X est une couronne k𝑘k-analytique, un domaine analytique Y𝑌Y de X𝑋X est une sous-couronne de X𝑋X s’il peut être défini comme l’image réciproque selon la rétraction rX:XSan(X):subscript𝑟𝑋𝑋superscript𝑆an𝑋r_{X}:X\rightarrow S^{\mathrm{an}}(X) d’un sous-intervalle non vide J𝐽J de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X). On a dans ce cas San(Y)=Jsuperscript𝑆an𝑌𝐽S^{\mathrm{an}}(Y)=J.

Remarque 2.12.

Il y a un homéomorphisme naturel San(𝒞(I))Isuperscript𝑆an𝒞𝐼𝐼S^{\mathrm{an}}(\mathcal{C}(I))\approx I dès que I𝐼I est un intervalle de +superscriptsubscript\mathbb{R}_{+}^{*}. En particulier si 𝒞𝒞\mathcal{C} est une couronne San(𝒞)superscript𝑆an𝒞S^{\mathrm{an}}(\mathcal{C}) admet une compactification topologique canonique S^an(𝒞)superscript^𝑆an𝒞\widehat{S}^{\mathrm{an}}(\mathcal{C}) dont les éléments n’appartenant pas à 𝒞𝒞\mathcal{C} sont appelés les bouts de 𝒞𝒞\mathcal{C}.

Définition 2.13 (Triangulation).

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytique quasi-lisse. Nous appellerons triangulation de X𝑋X tout sous-ensemble SX[2,3]𝑆subscript𝑋delimited-[]2.3S\subset X_{[2,3]} discret et fermé dans X𝑋X tel que toute composante connexe de XS𝑋𝑆X\setminus S soit un disque relativement compact ou une couronne k𝑘k-analytique.

Remarque 2.14.

Attention, notre définition de triangulation diffère de celle que Ducros donne dans [Duc] dans la mesure où celui-ci exige que les composantes connexes de XS𝑋𝑆X\setminus S soient relativement compactes. L’écart que nous prenons vis-à-vis de cette définition en autorisant les couronnes qui apparaissent parmi ces composantes à ne pas être relativement compactes nous permettra notamment de traiter le cas des courbes non compactes. Ducros autorise également des points rigides dans sa définition de triangulation, tandis que nous nous restreignons ici aux triangulations constituées uniquement de points de type 222 ou 333. Cette restriction permettra une bonne description des composantes sommitales du graphe d’anabélioïdes que l’on associera à une triangulation (voir 3.1.5). Remarquons que dans le cas où X𝑋X est une courbe k𝑘k-analytique compacte, squelette et squelette tronqué coïncident.

Remarque 2.15.

Si X𝑋X est strictement k𝑘k-analytique et si la valuation sur k𝑘k n’est pas triviale, alors X𝑋X possède au moins une triangulation constituée uniquement de points de type 222 ([Duc], Théorème 5.1.14).

Définition 2.16 (Nœuds d’un sous-semi-graphe).

Soit ΛΛ\Lambda un sous-semi-graphe localement fini de X𝑋X. Si xΛ𝑥Λx\in\Lambda, le genre de x𝑥x, noté g(x)𝑔𝑥g(x), est défini comme égal à 00 si x𝑥x est de type 1,31.31,3 ou 444, et comme étant le genre de la courbe résiduelle 𝒞xsubscript𝒞𝑥\mathscr{C}_{x} (que nous définirons dans la section 3.1.4) si x𝑥x est de type 222. En reprenant les notations de [Duc] nous dirons qu’un point xΛ𝑥Λx\in\Lambda est un nœud de ΛΛ\Lambda s’il satisfait l’une au moins des conditions suivantes :

  1. 1.

    x𝑥x est un sommet topologique de ΛΛ\Lambda de valence 3absent3\geqslant 3

  2. 2.

    xanX𝑥superscriptan𝑋x\in\partial^{\mathrm{an}}X

  3. 3.

    g(x)>0𝑔𝑥0g(x)>0

Remarque 2.17.

Nous savons d’après [Duc] (4.2.11.2421124.2.11.2) que si xX[3]𝑥subscript𝑋delimited-[]3x\in X_{[3]}, il y a au plus deux branches de X𝑋X issues de x𝑥x, avec égalité si et seulement si x𝑥x est intérieur. Il est possible également que br(X,x)br𝑋𝑥\mathrm{br}(X,x) soit vide, cela se produit si et seulement si x𝑥x est un point isolé de X𝑋X. Si xΛ𝑥Λx\in\Lambda, on en déduit que x𝑥x est un nœud de ΛΛ\Lambda si et seulement si xanX𝑥superscriptan𝑋x\in\partial^{\mathrm{an}}X.

Remarque 2.18.

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytique connexe, quasi-lisse, non vide et San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) son squelette dont on note ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X} l’ensemble des nœuds. Lorsque ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X} est non vide, les composantes connexes relativement compactes de XΣX𝑋subscriptΣ𝑋X\setminus\Sigma_{X} sont des couronnes ou des disques (ce n’est plus le cas cependant lorsque ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X} est vide, par exemple pour une courbe de Tate). Si les composantes connexes non relativement compactes de XΣX𝑋subscriptΣ𝑋X\setminus\Sigma_{X} sont des couronnes, alors ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X} est une triangulation de X𝑋X. En revanche il se peut que certaines composantes non relativement compactes ne soient pas des couronnes, auquel cas ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X} ne constitue pas une triangulation de X𝑋X. Cela se produit typiquement lorsqu’on enlève un point x𝑥x de type 444 à une courbe k𝑘k-analytique Y𝑌Y quasi-lisse de squelette analytique non vide. Si r𝑟r désigne la rétraction canonique de Y𝑌Y sur San(Y)superscript𝑆an𝑌S^{\mathrm{an}}(Y), enlever x𝑥x revient à rajouter l’arête ouverte ]x,r(x)]]x,r(x)] : San(Y{x})=San(Y)]x,r(x)]S^{\mathrm{an}}(Y\setminus\{x\})=S^{\mathrm{an}}(Y)\cup\;]x,r(x)]. Or r1(]x,r(x)])r^{-1}(]x,r(x)]) n’a aucune raison d’être une couronne. Cela nous amène à définir la notion de triangulation généralisée :

Définition 2.19 (Triangulation généralisée et squelettes associés).
  1. 1.

    Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytique quasi-lisse. Nous appellerons triangulation généralisée de X𝑋X tout sous-ensemble SX[2,3]𝑆subscript𝑋delimited-[]2.3S\subset X_{[2,3]} discret et fermé dans X𝑋X tel que toute composante connexe relativement compacte de XS𝑋𝑆X\setminus S soit un disque ou une couronne et tel que toute composante connexe non relativement compacte 𝒞𝒞\mathcal{C} de XS𝑋𝑆X\setminus S s’écrive rX1(San(𝒞))superscriptsubscript𝑟𝑋1superscript𝑆an𝒞r_{X}^{-1}(S^{\mathrm{an}}(\mathcal{C})) où le squelette analytique San(𝒞)superscript𝑆an𝒞S^{\mathrm{an}}(\mathcal{C}) est un intervalle tracé sur X[2,3]subscript𝑋delimited-[]2.3X_{[2,3]} constitué de points intérieurs de genre nul.

  2. 2.

    Si S𝑆S est une triangulation généralisée de X𝑋X, la réunion ΓsuperscriptΓ\Gamma^{\natural} de S𝑆S et des squelettes des composantes connexes de XS𝑋𝑆X\setminus S qui sont des couronnes relativement compactes est un sous-graphe localement fini et analytiquement admissible de X𝑋X tracé sur X[2,3]subscript𝑋delimited-[]2.3X_{[2,3]}. Le graphe ΓsuperscriptΓ\Gamma^{\natural} sera alors appelé le squelette tronqué de la triangulation S𝑆S.

  3. 3.

    Si S𝑆S est une triangulation généralisée de X𝑋X, la réunion ΓΓ\Gamma de S𝑆S et des squelettes des composantes connexes de XS𝑋𝑆X\setminus S qui ne sont pas des disques est un semi-graphe localement fini tracé sur X[2,3]subscript𝑋delimited-[]2.3X_{[2,3]}. Le semi-graphe ΓΓ\Gamma sera alors appelé le squelette de la triangulation généralisée S𝑆S. Il est obtenu à partir du squelette tronqué ΓsuperscriptΓ\Gamma^{\natural}, qui est un graphe, en ajoutant des arêtes ouvertes qui sont exactement les squelettes analytiques des composantes connexes non relativement compactes de XS𝑋𝑆X\setminus S.

Remarque 2.20.

Toute triangulation de X𝑋X est un cas particulier de triangulation généralisée, et ces deux notions coïncident dans le cas où X𝑋X est compacte. Avec les notations précédentes, ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X} constitue toujours une triangulation généralisée de X𝑋X, de squelette San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X). Réciproquement, si S𝑆S est une triangulation généralisée de X𝑋X et que ΓΓ\Gamma et ΓsuperscriptΓ\Gamma^{\natural} désignent les squelette et squelette tronqué, alors S𝑆S contient tous les noeuds de ΓΓ\Gamma ([Duc], Théorème 5.1.1451145.1.14). En revanche il se peut qu’un nœud s𝑠s de ΓΓ\Gamma ne soit pas un nœud de ΓsuperscriptΓ\Gamma^{\natural}, cela se produit lorsque s𝑠s est dans l’intérieur de X𝑋X, de genre 00, que s𝑠s est de valence 222 dans ΓsuperscriptΓ\Gamma^{\natural} tout en étant un sommet de valence >2absent2>2 dans ΓΓ\Gamma, autrement dit si parmi les composantes connexes de XS𝑋𝑆X\setminus S issues de s𝑠s il y en a exactement deux qui sont des couronnes relativement compactes, et au moins une qui est non relativement compacte.

Remarque 2.21.

Un point de ΓsuperscriptΓ\Gamma^{\natural} qui est unibranche dans ΓΓ\Gamma est un nœud de ΓΓ\Gamma si et seulement s’il est soit de genre strictement positif, soit appartient au bord analytique anXsuperscriptan𝑋\partial^{\mathrm{an}}X de X𝑋X. Cette définition diffère légèrement de celle de [Duc], cet écart nous permettant simplement d’alléger par la suite certains énoncés et d’affirmer qu’une triangulation généralisée non réduite à un singleton d’une courbe k𝑘k-analytique est minimale si et seulement si elle est constituée exactement des nœuds de son squelette, comme nous le montre la proposition suivante.

Proposition 2.22 (Points superflus d’une triangulation généralisée, cf. [Duc], 5.1.1651165.1.16 pour le cas compact).

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytique quasi-lisse et S𝑆S une triangulation généralisée de X𝑋X dont on note ΓΓ\Gamma le squelette. Soit sS𝑠𝑆s\in S et Σ=S{s}Σ𝑆𝑠\Sigma=S\setminus\{s\}, notons Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} la composante connexe de ΓΣΓΣ\Gamma\setminus\Sigma contenant s𝑠s. Le sous-ensemble S{s}𝑆𝑠S\setminus\{s\} est une triangulation généralisée si et seulement si les trois conditions suivantes sont satisfaites :

  • i)

    sanX𝑠superscriptan𝑋s\not\in\partial^{\mathrm{an}}X

  • ii)

    g(s)=0𝑔𝑠0g(s)=0

  • iii)

    Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est un intervalle ouvert ou bien un intervalle semi-ouvert d’extrémité s𝑠s.

Si S𝑆S est une triangulation généralisée de X𝑋X de squelette ΓΓ\Gamma, nous savons d’une part que S𝑆S contient tous les nœuds de ΓΓ\Gamma, d’autre part que ΓΓ\Gamma contient le squelette analytique San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) de X𝑋X. Par conséquent toute triangulation généralisée de X𝑋X contient les nœuds de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X). Voici un résultat de minimalité de triangulation pour les courbes compactes :

Proposition 2.23 ([Duc], 5.4.1254125.4.12).

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytique quasi-lisse, connexe et compacte. Soit ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X} l’ensemble (potentiellement vide) des nœuds de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X). Trois cas sont possibles :

  1. 1.

    ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X} est non vide : ce cas se présente si et seulement si X𝑋X possède une plus petite triangulation, auquel cas cette triangulation coïncide avec ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X}. Si |k×|{1}superscript𝑘1|k^{\times}|\neq\{1\} et si X𝑋X est strictement k𝑘k-analytique, alors ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X} est une triangulation de type 222.

  2. 2.

    San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) est non vide mais ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X} est vide : cela se produit si et seulement si X𝑋X est une courbe de Tate, i.e. isomorphe à un quotient de la forme 𝔾man/qsuperscriptsubscript𝔾mansuperscript𝑞\mathbb{G}_{\mathrm{m}}^{\mathrm{an}}/{q^{\mathbb{Z}}} pour un certain qk𝑞superscript𝑘q\in k^{*} vérifiant |q|<1𝑞1|q|<1 (cela n’est possible que lorsque k𝑘k est non trivialement valué). Dans ce cas San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) est un cercle, et les triangulations minimales de X𝑋X sont les singletons {x}𝑥\{x\} avec xSan(X)𝑥superscript𝑆an𝑋x\in S^{\mathrm{an}}(X). X𝑋X possède donc une infinité de triangulations minimales, dont une infinité sont de type 222.

  3. 3.

    San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) est vide : cela se présente si et seulement si Xk1,ansimilar-to-or-equals𝑋superscriptsubscript𝑘1anX\simeq\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}}. Dans ce cas les triangulations minimales sont les singletons {x}𝑥\{x\} avec xX[2,3]𝑥subscript𝑋delimited-[]2.3x\in X_{[2,3]}. La courbe X𝑋X possède donc une infinité de triangulations minimales, dont une infinité sont de type 222 dès que |k×|{1}superscript𝑘1|k^{\times}|\neq\{1\}.

2.2.1 Semi-graphe d’anabélioïdes d’une triangulation généralisée

Nous allons maintenant associer à une triangulation généralisée un graphe d’anabélioïdes. Fixons pour la suite de cette partie une courbe k𝑘k-analytique X𝑋X connexe, quasi-lisse et non vide munie d’une triangulation généralisée SX[2,3]𝑆subscript𝑋delimited-[]2.3S\subset X_{[2,3]}. Commençons par lui associer un graphe (resp. semi-graphe) qui n’est autre que l’analogue du squelette tronqué (resp. squelette) de la triangulation généralisée S.

Notons 𝒞(X,S)superscript𝒞𝑋𝑆\mathcal{C}^{\natural}(X,S) (respectivement 𝒞(X,S)superscript𝒞𝑋𝑆\mathcal{C}^{\infty}(X,S)) l’ensemble des composantes connexes de XS𝑋𝑆X\setminus S qui sont des couronnes relativement compactes (respectivement des composantes non relativement compactes) et 𝒟(X,S)𝒟𝑋𝑆\mathcal{D}(X,S) l’ensemble des composantes connexes de XS𝑋𝑆X\setminus S qui sont des disques. Si 𝒞𝒞(X,S)𝒞superscript𝒞𝑋𝑆\mathcal{C}\in\mathcal{C}^{\natural}(X,S), l’inclusion San(𝒞)Xsuperscript𝑆an𝒞𝑋S^{\mathrm{an}}(\mathcal{C})\hookrightarrow X s’étend à la compactification naturelle S^an(𝒞)superscript^𝑆an𝒞\widehat{S}^{\mathrm{an}}(\mathcal{C}) (cf. 2.12) en une application ζ𝒞:S^an(𝒞)X:subscript𝜁𝒞superscript^𝑆an𝒞𝑋\zeta_{\mathcal{C}}:\widehat{S}^{\mathrm{an}}(\mathcal{C})\rightarrow X (mais celle-ci n’est pas forcément injective, en particulier si la couronne 𝒞𝒞\mathcal{C} «  boucle sur elle-même   », i.e. si S^an(𝒞)superscript^𝑆an𝒞\widehat{S}^{\mathrm{an}}(\mathcal{C}) est homéomorphe à un cercle).

Définition 2.24.
  1. 1.

    Le graphe localement fini associé à la triangulation généralisée S𝑆S, noté 𝔾(X,S)superscript𝔾𝑋𝑆\mathbb{G}^{\natural}(X,S), est défini par :

    • ses sommets correspondent aux éléments de S𝑆S;

    • ses arêtes correspondent aux éléments de 𝒞(X,S)superscript𝒞𝑋𝑆\mathcal{C}^{\natural}(X,S) : si e𝑒e est une arête nous désignerons par 𝒞esubscript𝒞𝑒\mathcal{C}_{e} la couronne associée, e𝑒e étant alors définie comme l’ensemble constitué des deux bouts de 𝒞esubscript𝒞𝑒\mathcal{C}_{e};

    • les branches (au sens des semi-graphes) d’une arête e𝑒e correspondent aux bouts (au sens k𝑘k-analytique) de 𝒞esubscript𝒞𝑒\mathcal{C}_{e}, et une branche b𝑏b de e𝑒e aboutit à ζ𝒞e(b)subscript𝜁subscript𝒞𝑒𝑏\zeta_{\mathcal{C}_{e}}(b).

  2. 2.

    Le semi-graphe localement fini associé à la triangulation généralisée S𝑆S, noté 𝔾(X,S)𝔾𝑋𝑆\mathbb{G}(X,S), est défini par :

    • ses sommets et ses arêtes fermées (c’est-à-dire contenant deux branches) correspondent exactement à ceux de 𝔾(X,S)superscript𝔾𝑋𝑆\mathbb{G}^{\natural}(X,S);

    • ses arêtes ouvertes (contenant une seule branche) correspondent aux éléments de 𝒞(X,S)superscript𝒞𝑋𝑆\mathcal{C}^{\infty}(X,S), i.e. aux arêtes non relativement compactes : si e𝑒e est une telle arête nous désignerons par 𝒞esubscript𝒞𝑒\mathcal{C}_{e} la composante associée, e𝑒e étant alors définie comme le singleton constitué de l’unique bout de 𝒞esubscript𝒞𝑒\mathcal{C}_{e} correspondant à son bord topologique dans X𝑋X;

    • l’unique branche d’une arête ouverte e𝑒e correspondant à une composante 𝒞esubscript𝒞𝑒\mathcal{C}_{e} aboutit au sommet de S𝑆S qui correspond au bord topologique de 𝒞esubscript𝒞𝑒\mathcal{C}_{e} dans X𝑋X.

Si sS𝑠𝑆s\in S, définissons 𝖢𝗈𝗆𝗉(X,S,s)𝖢𝗈𝗆𝗉𝑋𝑆𝑠\mathsf{Comp}(X,S,s) comme l’image de l’application naturelle : br(X,s)π0(XS)br𝑋𝑠subscript𝜋0𝑋𝑆\mathrm{br}(X,s)\rightarrow\pi_{0}(X\setminus S). Soit (X~,s~)~𝑋~𝑠(\widetilde{X},\widetilde{s}) le revêtement topologique universel de (X,s)𝑋𝑠(X,s), et S~X~~𝑆~𝑋\widetilde{S}\subset\widetilde{X} l’ensemble des préimages des éléments de S𝑆S. Définissons :

𝒞(X,S,s)=(𝒞(X,S)𝒞(X,S))𝖢𝗈𝗆𝗉(X,S,s)𝒞𝑋𝑆𝑠superscript𝒞𝑋𝑆superscript𝒞𝑋𝑆𝖢𝗈𝗆𝗉𝑋𝑆𝑠\displaystyle\mathcal{C}(X,S,s)=\left(\mathcal{C}^{\natural}(X,S)\cup\mathcal{C}^{\infty}(X,S)\right)\cap\mathsf{Comp}(X,S,s)
𝒟(X,S,s)=𝒟(X,S)𝖢𝗈𝗆𝗉(X,S,s)𝒟𝑋𝑆𝑠𝒟𝑋𝑆𝖢𝗈𝗆𝗉𝑋𝑆𝑠\displaystyle\mathcal{D}(X,S,s)=\mathcal{D}(X,S)\cap\mathsf{Comp}(X,S,s)
St(X,S,s)={s~}T𝖢𝗈𝗆𝗉(X~,S~,s~)T:  « l’étoile en s de la triangulation généralisée S »St𝑋𝑆𝑠~𝑠subscriptsquare-union𝑇𝖢𝗈𝗆𝗉~𝑋~𝑆~𝑠𝑇:  « l’étoile en s de la triangulation généralisée S »\displaystyle\mathrm{St}(X,S,s)=\{\widetilde{s}\}\cup\bigsqcup_{T\in\mathsf{Comp}(\widetilde{X},\widetilde{S},\widetilde{s})}T\;\;\;\;\text{: \;\guillemotleft\;l'\'{e}toile en $s$ de la triangulation g\'{e}n\'{e}ralis\'{e}e\;$S$ \guillemotright}
Définition 2.25 (Graphe d’anabélioïdes associé à une triangulation généralisée).

Le graphe 𝔾(X,S)superscript𝔾𝑋𝑆\mathbb{G}^{\natural}(X,S) (resp. le semi-graphe 𝔾(X,S)𝔾𝑋𝑆\mathbb{G}(X,S)) peut être enrichi en un graphe d’anabélioïdes (resp. semi-graphe d’anabélioïdes) que l’on notera

𝒢(X,S)(resp.𝒢(X,S))superscript𝒢𝑋𝑆resp.𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}^{\natural}(X,S)\;\;(\text{resp.}\;\;\mathcal{G}(X,S))

et qui sera défini par :

  • si sS𝑠𝑆s\in S est un sommet, 𝒢s=Covt(St(X,S,s))subscript𝒢𝑠superscriptCovtSt𝑋𝑆𝑠\mathcal{G}_{s}=\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathrm{St}(X,S,s))

  • si e𝒞(X,S)𝒞(X,S)𝑒superscript𝒞𝑋𝑆superscript𝒞𝑋𝑆e\in\mathcal{C}^{\natural}(X,S)\cup\mathcal{C}^{\infty}(X,S) est une arête, 𝒢e=Covt(𝒞e)subscript𝒢𝑒superscriptCovtsubscript𝒞𝑒\mathcal{G}_{e}=\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{C}_{e})

  • si b𝑏b est une branche de e𝑒e aboutissant à s𝑠s, alors

    b:Covt(𝒞e)Covt(St(X,S,s)):𝑏superscriptCovtsubscript𝒞𝑒superscriptCovtSt𝑋𝑆𝑠b:\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{C}_{e})\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathrm{St}(X,S,s))

    est défini par le foncteur exact b:Covt(St(X,S,s))Covt(𝒞e):superscript𝑏superscriptCovtSt𝑋𝑆𝑠superscriptCovtsubscript𝒞𝑒b^{*}:\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathrm{St}(X,S,s))\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{C}_{e}) induit naturellement par l’unique plongement 𝒞eSt(X,S,s)subscript𝒞𝑒St𝑋𝑆𝑠\mathcal{C}_{e}\hookrightarrow\mathrm{St}(X,S,s) qui relève à X~~𝑋\widetilde{X} le plongement naturel 𝒞eXsubscript𝒞𝑒𝑋\mathcal{C}_{e}\hookrightarrow X et selon lequel le relevé de la branche b𝑏b aboutit à s~~𝑠\widetilde{s}.

Remarque 2.26.

Le graphe 𝔾(X,S)superscript𝔾𝑋𝑆\mathbb{G}^{\natural}(X,S) prend en compte uniquement les couronnes relativement compactes (i.e. les éléments de 𝒞(X,S)superscript𝒞𝑋𝑆\mathcal{C}^{\natural}(X,S)) parmi les arêtes qui apparaissent comme composantes connexes de XS𝑋𝑆X\setminus S. Néanmoins la situation est différente pour le graphe d’anabélioïdes 𝒢(X,S)superscript𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}^{\natural}(X,S), dont 𝔾(X,S)superscript𝔾𝑋𝑆\mathbb{G}^{\natural}(X,S) est le graphe sous-jacent : la définition même de l’anabélioïde connexe associé à un sommet permet de garder une trace des composantes non relativement compactes (i.e. des éléments de 𝒞(X,S)superscript𝒞𝑋𝑆\mathcal{C}^{\infty}(X,S)) issues de ce sommet.

Remarque 2.27.

Le passage par le revêtement topologique universel dans la définition de l’étoile St(X,S,s)St𝑋𝑆𝑠\mathrm{St}(X,S,s) implique que si une couronne 𝒞e𝒞(X,S,s)subscript𝒞𝑒𝒞𝑋𝑆𝑠\mathcal{C}_{e}\in\mathcal{C}(X,S,s) «  boucle sur e𝑒e   » (ses deux bouts sont constitués du sommet s𝑠s), elle apparaît deux fois dans St(X,S,s)St𝑋𝑆𝑠\mathrm{St}(X,S,s) via ses deux branches. Sans un tel recours au revêtement universel le graphe d’anabélioïdes 𝒢(X,S)superscript𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}^{\natural}(X,S) ne saurait être totalement détaché. La compatibilité de 𝒢(X,S)superscript𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}^{\natural}(X,S) avec les hypothèses mochizukiennes sera investi dans la section 3.2.

2.2.2 Revêtements de Kummer, μsubscript𝜇\mu_{\ell}-torseurs et cochaînes harmoniques

Si X𝑋X est un espace k𝑘k-analytique et si superscript\ell\in\mathbb{N}^{*} est un entier inversible dans k𝑘k, la suite exacte de Kummer sur Xe´tsubscript𝑋´etX_{\mathrm{\acute{e}t}}

1μl𝔾mzz𝔾m11subscript𝜇𝑙subscript𝔾𝑚maps-to𝑧superscript𝑧subscript𝔾𝑚11\longrightarrow\mu_{l}\longrightarrow\mathbb{G}_{m}\overset{z\mapsto z^{\ell}}{\longrightarrow}\mathbb{G}_{m}\longrightarrow 1

induit une injection

𝒪X(X)×/(𝒪X(X)×)𝜄H1(Xe´t,μ)subscript𝒪𝑋superscript𝑋superscriptsubscript𝒪𝑋superscript𝑋𝜄superscriptH1subscript𝑋´etsubscript𝜇\mathscr{O}_{X}(X)^{\times}/(\mathscr{O}_{X}(X)^{\times})^{\ell}\overset{\iota}{\hookrightarrow}\mathrm{H}^{1}(X_{\mathrm{\acute{e}t}},\mu_{\ell})

dont on notera on notera 𝖪𝗎𝗆(X)subscript𝖪𝗎𝗆𝑋\mathsf{Kum}_{\ell}(X) l’image. Nous savons d’après [Ber222] que tout faisceau étale localement constant sur Xe´tsubscript𝑋´etX_{\mathrm{\acute{e}t}} est représentable, ce qui est en particulier le cas de tout μsubscript𝜇\mu_{\ell}-torseur. Par conséquent H1(Xe´t,μ)superscriptH1subscript𝑋´etsubscript𝜇\mathrm{H}^{1}(X_{\mathrm{\acute{e}t}},\mu_{\ell}) classe tous les μsubscript𝜇\mu_{\ell}-torseurs étales analytiques sur X𝑋X à isomorphisme près. Si f𝒪X(X)×𝑓subscript𝒪𝑋superscript𝑋f\in\mathscr{O}_{X}(X)^{\times} son image (f)𝑓(f) dans H1(Xe´t,μ)superscriptH1subscript𝑋´etsubscript𝜇\mathrm{H}^{1}(X_{\mathrm{\acute{e}t}},\mu_{\ell}) par ι𝜄\iota correspond à (𝒪X[T]/(Tf))subscript𝒪𝑋delimited-[]𝑇superscript𝑇𝑓\mathscr{M}(\mathscr{O}_{X}[T]/(T^{\ell}-f)). Les éléments de 𝖪𝗎𝗆(X)subscript𝖪𝗎𝗆𝑋\mathsf{Kum}_{\ell}(X) vus comme μsubscript𝜇\mu_{\ell}-torseurs étales analytiques seront appelés les μsubscript𝜇\mu_{\ell}-torseurs de Kummer.

Exemple 2.28.

Si I𝐼I est un intervalle non vide de +superscriptsubscript\mathbb{R}_{+}^{*}, la fonction Tsuperscript𝑇T^{\ell} induit un revêtement fini et plat (en fait étale modéré) 𝒞(I)𝒞(I)𝒞𝐼𝒞superscript𝐼\mathcal{C}(I)\rightarrow\mathcal{C}(I^{\ell}) qui permet d’identifier 𝒞(I)𝒞𝐼\mathcal{C}(I) au μsubscript𝜇\mu_{\ell}-torseur de Kummer (𝒪𝒞(I)[T]/(TS))subscript𝒪𝒞superscript𝐼delimited-[]𝑇superscript𝑇𝑆\mathscr{M}(\mathscr{O}_{\mathcal{C}(I^{\ell})}[T]/(T^{\ell}-S)), où S𝑆S est la coordonnée standard de 𝒞(I)𝒞superscript𝐼\mathcal{C}(I^{\ell}).

Proposition 2.29 ([Duc], 3.6.3036303.6.30 et 3.6.3136313.6.31).

Soit X𝑋X une k𝑘k-couronne :

  1. 1.

    Si Y𝑌Y est une sous-couronne de X𝑋X (voir définition 2.11), l’injection de Y𝑌Y dans X𝑋X induit un isomorphisme de groupes : 𝖪𝗎𝗆(X)𝖪𝗎𝗆(Y)subscript𝖪𝗎𝗆𝑋subscript𝖪𝗎𝗆𝑌\mathsf{Kum}_{\ell}(X)\rightarrow\mathsf{Kum}_{\ell}(Y)

  2. 2.

    Comme k×superscript𝑘k^{\times} est \ell-divisible (puisque k𝑘k est supposé algébriquement clos), 𝖪𝗎𝗆(X)subscript𝖪𝗎𝗆𝑋\mathsf{Kum}_{\ell}(X) est isomorphe à /\mathbb{Z}/\ell\mathbb{Z}. Cet isomorphisme est non canonique mais le devient dès que l’on fixe une orientation de X𝑋X.

  3. 3.

    Toute composante connexe d’un μsubscript𝜇\mu_{\ell}-torseur de Kummer de X𝑋X est une couronne.

Définition 2.30 (Cochaînes harmoniques sur un semi-graphe localement fini).

Soit ΓΓ\Gamma un semi-graphe localement fini et A𝐴A un groupe abélien. Une A𝐴A-cochaîne harmonique sur ΓΓ\Gamma est une application : c:{arêtes orientées de Γ}A:𝑐arêtes orientées de Γ𝐴c:\{\text{ar\^{e}tes orient\'{e}es de }\Gamma\}\rightarrow A satisfaisant les deux propriétés suivantes :

  1. 1.

    si e𝑒e et esuperscript𝑒e^{\prime} correspondent à la même arête munie de ses deux orientations distinctes : c(e)=c(e)𝑐superscript𝑒𝑐𝑒c(e^{\prime})=-c(e).

  2. 2.

    si x𝑥x est un sommet de ΓΓ\Gamma :

    arêtes orientées vers ec(e)=0A.subscriptarêtes orientées vers 𝑒𝑐𝑒subscript0𝐴\sum_{\text{ar\^{e}tes orient\'{e}es vers }e}c(e)=0_{A}.

L’ensemble des A𝐴A-cochaînes harmoniques de ΓΓ\Gamma forme un groupe abélien noté Harm(Γ,A)HarmΓ𝐴\mathrm{Harm}(\Gamma,A).

Lemme 2.31.

Soit ΓΓ\Gamma un semi-graphe connexe, et e𝑒e, esuperscript𝑒e^{\prime} et e′′superscript𝑒′′e^{\prime\prime} trois arêtes ouvertes distinctes de ΓΓ\Gamma, orientées vers le sommet auquel elles aboutissent. Soit A𝐴A un groupe commutatif et (a,a)A2𝑎superscript𝑎superscript𝐴2(a,a^{\prime})\in A^{2}. Alors il existe au moins un élément cHarm(Γ,A)𝑐HarmΓ𝐴c\in\mathrm{Harm}(\Gamma,A) tel que c(e)=a,c(e)=aformulae-sequence𝑐𝑒𝑎𝑐superscript𝑒superscript𝑎c(e)=a,c(e^{\prime})=a^{\prime} et c(e′′)=(a+a)𝑐superscript𝑒′′𝑎superscript𝑎c(e^{\prime\prime})=-(a+a^{\prime}). On peut par ailleurs imposer c(f)=0𝑐𝑓0c(f)=0 pour toute autre arête ouverte f𝑓f de ΓΓ\Gamma.

Démonstration.

Soient x,x𝑥superscript𝑥x,x^{\prime} et y𝑦y les sommets auxquels aboutissent e,e𝑒superscript𝑒e,e^{\prime} et e′′superscript𝑒′′e^{\prime\prime} (x,x𝑥superscript𝑥x,x^{\prime} et y𝑦y ne sont pas forcément distincts). Il existe des suites finies (x=x1,,xr=y)formulae-sequence𝑥subscript𝑥1subscript𝑥𝑟𝑦(x=x_{1},\ldots,x_{r}=y) et (x=x1,,xs=y)formulae-sequencesuperscript𝑥subscriptsuperscript𝑥1subscriptsuperscript𝑥𝑠𝑦(x^{\prime}=x^{\prime}_{1},\ldots,x^{\prime}_{s}=y) de sommets de ΓΓ\Gamma distincts et consécutifs, de telle sorte qu’il existe des arêtes orientées eisubscript𝑒𝑖e_{i} (resp. ejsubscriptsuperscript𝑒𝑗e^{\prime}_{j}) de ΓΓ\Gamma reliant xisubscript𝑥𝑖x_{i} à xi+1subscript𝑥𝑖1x_{i+1} (resp. xjsubscriptsuperscript𝑥𝑗x^{\prime}_{j} à xj+1subscriptsuperscript𝑥𝑗1x^{\prime}_{j+1}) et orientées vers xi+1subscript𝑥𝑖1x_{i+1} (resp. xj+1subscriptsuperscript𝑥𝑗1x^{\prime}_{j+1}). Soit c𝑐c (resp. csuperscript𝑐c^{\prime}) Harm(Γ,A)absentHarmΓ𝐴\in\mathrm{Harm}(\Gamma,A) défini par c(e)=c(ei)=c(e′′)=a𝑐𝑒𝑐subscript𝑒𝑖𝑐superscript𝑒′′𝑎c(e)=c(e_{i})=-c(e^{\prime\prime})=a pour tout i=1r1𝑖1𝑟1i=1\ldots r-1 et nul sur les autres arêtes (resp. c(e)=c(ej)=c(e′′)=asuperscript𝑐superscript𝑒superscript𝑐subscriptsuperscript𝑒𝑗superscript𝑐superscript𝑒′′superscript𝑎c^{\prime}(e^{\prime})=c^{\prime}(e^{\prime}_{j})=-c^{\prime}(e^{\prime\prime})=a^{\prime} pour tout j=1s1𝑗1𝑠1j=1\ldots s-1 et nul sur les autres arêtes). Alors la cochaîne harmonique c+cHarm(Γ,A)𝑐superscript𝑐HarmΓ𝐴c+c^{\prime}\in\mathrm{Harm}(\Gamma,A) vérifie les propriétés requises. ∎

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytique, π𝜋\pi le morphisme du site étale Xe´tsubscript𝑋´etX_{\mathrm{\acute{e}t}} vers le site topologique Xtopsubscript𝑋topX_{\mathrm{top}} et \ell un entier premier à p𝑝p. La suite spectrale

Hp(Xtop,Rqπμ)Hp+q(Xe´t,μ)superscriptH𝑝subscript𝑋topsuperscriptR𝑞subscript𝜋subscript𝜇superscriptH𝑝𝑞subscript𝑋´etsubscript𝜇\mathrm{H}^{p}(X_{\mathrm{top}},\mathrm{R}^{q}\pi_{*}\mu_{\ell})\Rightarrow\mathrm{H}^{p+q}(X_{\mathrm{\acute{e}t}},\mu_{\ell})

induit la suite exacte :

0H1(Xtop,μ)H1(Xe´t,μ)H0(Xtop,R1πμ)0.0superscriptH1subscript𝑋topsubscript𝜇superscriptH1subscript𝑋´etsubscript𝜇superscriptH0subscript𝑋topsuperscriptR1subscript𝜋subscript𝜇00\rightarrow\mathrm{H}^{1}(X_{\mathrm{top}},\mu_{\ell})\rightarrow\mathrm{H}^{1}(X_{\mathrm{\acute{e}t}},\mu_{\ell})\rightarrow\mathrm{H}^{0}(X_{\mathrm{top}},\mathrm{R}^{1}\pi_{*}\mu_{\ell})\rightarrow 0. (1)

Par ailleurs, si la courbe X𝑋X est supposée lisse (i.e. quasi-lisse et sans bord), si S𝑆S est une triangulation généralisée de X𝑋X de squelette ΓΓ\Gamma, comme k𝑘k est algébriquement clos on a la suite exacte suivante (cf. [Duc], 5.2.45245.2.4) :

0xS𝕁xH0(Xtop,R1πμ)Harm(Γ,/)0,0subscriptproduct𝑥𝑆subscript𝕁𝑥superscriptH0subscript𝑋topsuperscriptR1subscript𝜋subscript𝜇HarmΓ00\rightarrow\prod_{x\in S}\mathbb{J}_{x}\rightarrow\mathrm{H}^{0}(X_{\mathrm{top}},\mathrm{R}^{1}\pi_{*}\mu_{\ell})\rightarrow\mathrm{Harm}(\Gamma,\mathbb{Z}/\ell\mathbb{Z})\rightarrow 0, (2)

où le groupe 𝕁xsubscript𝕁𝑥\mathbb{J}_{x} est défini comme suit :

  • si x𝑥x est de type 333 alors 𝕁xsubscript𝕁𝑥\mathbb{J}_{x} est trivial;

  • si x𝑥x est de type 222 alors 𝕁x=𝒥(k~)subscriptsubscript𝕁𝑥𝒥~𝑘\mathbb{J}_{x}=_{\ell}\mathscr{J}(\widetilde{k}) est le groupe de \ell-torsion des k~~𝑘\widetilde{k}-points de la jacobienne de la courbe résiduelle 𝒞xsubscript𝒞𝑥\mathscr{C}_{x} (cf. 3.1.4).

Remarque 2.32.

Ducros obtient la suite exacte 2 dans [Duc], 5.2.45245.2.4 en se plaçant dans le cadre d’une vraie triangulation. Néanmoins, son raisonnement reste valable dans notre cadre des triangulations généralisées. En effet, on remarque qu’une telle suite exacte appliquée à une rabotée Xsuperscript𝑋X^{\circ} de X𝑋X (voir la définition 3.3, S𝑆S est alors une vraie triangulation de Xsuperscript𝑋X^{\circ}) ne dépend pas du choix de Xsuperscript𝑋X^{\circ} : deux rabotées différentes donneront deux suites exactes isomorphes, ce qui permet d’étendre de telles suites exactes à X𝑋X tout entier.

Quelque soit le type du point x𝑥x, le groupe 𝕁xsubscript𝕁𝑥\mathbb{J}_{x} est isomorphe (non canoniquement en général) à (/)2g(x)superscript2𝑔𝑥(\mathbb{Z}/\ell\mathbb{Z})^{2g(x)}. La combinaison des deux suites exactes 1 et 2 et le fait que ΓΓ\Gamma soit homotope à X𝑋X mène au résultat suivant :

Proposition 2.33.

On a le diagramme suivant, dont la ligne et la colonne sont exactes :

00\textstyle{0\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces}H1(Γtop,μ)superscriptH1subscriptΓtopsubscript𝜇\textstyle{\mathrm{H}^{1}(\Gamma_{\mathrm{top}},\mu_{\ell})\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces}H1(Xe´t,μ)superscriptH1subscript𝑋´etsubscript𝜇\textstyle{\mathrm{H}^{1}(X_{\mathrm{\acute{e}t}},\mu_{\ell})\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces}00\textstyle{0\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces}xS𝕁xsubscriptproduct𝑥𝑆subscript𝕁𝑥\textstyle{\prod_{x\in S}\mathbb{J}_{x}\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces}H0(Xtop,R1πμ)superscriptH0subscript𝑋topsuperscriptR1subscript𝜋subscript𝜇\textstyle{\mathrm{H}^{0}(X_{\mathrm{top}},\mathrm{R}^{1}\pi_{*}\mu_{\ell})\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces}Harm(Γ,/)HarmΓ\textstyle{\mathrm{Harm}(\Gamma,\mathbb{Z}/\ell\mathbb{Z})\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces}00\textstyle{0}00\textstyle{0}

2.2.3 Revêtements sauvages et condition de déploiement

Supposons dans cette sous-section que k𝑘k est de caractéristique nulle et p>0𝑝0p>0, où p𝑝p désigne la caractéristique résiduelle de k𝑘k. Supposons la norme |||\cdot| sur k𝑘k normalisée de telle sorte que |p|=p1𝑝superscript𝑝1|p|=p^{-1}.

Lemme 2.34.

Soient ξ𝜉\xi et ξsuperscript𝜉\xi^{\prime} deux racines p𝑝p-ièmes de l’unité distinctes dans k𝑘k (supposé algébriquement clos). Alors |ξξ|=p1p1𝜉superscript𝜉superscript𝑝1𝑝1|\xi-\xi^{\prime}|=p^{-\frac{1}{p-1}}.

Démonstration.

Soit Φp=Xp1X1=i=0p1Xi=ξμpXξ[X]subscriptΦ𝑝superscript𝑋𝑝1𝑋1superscriptsubscript𝑖0𝑝1superscript𝑋𝑖subscriptproduct𝜉subscriptsuperscript𝜇𝑝𝑋𝜉delimited-[]𝑋\displaystyle{\Phi_{p}=\frac{X^{p}-1}{X-1}=\sum_{i=0}^{p-1}X^{i}=\prod_{\xi\in\mu^{\prime}_{p}}X-\xi\in\mathbb{Q}[X]} le p𝑝p-ième polynôme cyclotomique, où μpsuperscriptsubscript𝜇𝑝\mu_{p}^{\prime} désigne l’ensemble des p1𝑝1p-1 racines primitives p𝑝p-ièmes de l’unité dans k𝑘k. L’évaluation en 111 donne : p=ξμp1ξ.𝑝subscriptproduct𝜉subscriptsuperscript𝜇𝑝1𝜉p=\prod_{\xi\in\mu^{\prime}_{p}}1-\xi. Pour ξ𝜉\xi décrivant μpsubscriptsuperscript𝜇𝑝\mu^{\prime}_{p} tous les 1ξ1𝜉1-\xi ont la même norme en tant que conjuguées par Gal(k/)Gal𝑘\mathrm{Gal}(k/\mathbb{Q}). De là on déduit que |1ξ|=p1p11𝜉superscript𝑝1𝑝1|1-\xi|=p^{-\frac{1}{p-1}}, puis on obtient le résultat en remarquant que la multiplication par n’importe quelle racine p𝑝p-ième de l’unité est une isométrie de k𝑘k. ∎

La proposition suivante, donnant les ensembles de déploiement du μphsubscript𝜇superscript𝑝\mu_{p^{h}}-torseur donné par la fonction 1+Tphsuperscript𝑝1𝑇\sqrt[p^{h}]{1+T}, sera importante dans la suite du texte.

Proposition 2.35.

Si hsuperscripth\in\mathbb{N}^{*}, le revêtement étale 𝔾manzzph𝔾manmaps-to𝑧superscript𝑧superscript𝑝superscriptsubscript𝔾𝑚ansuperscriptsubscript𝔾𝑚an\mathbb{G}_{m}^{\mathrm{an}}\xrightarrow{z\mapsto z^{p^{h}}}\mathbb{G}_{m}^{\mathrm{an}} est totalement déployé au-dessus du point ηz0,rsubscript𝜂subscript𝑧0𝑟\eta_{z_{0},r} vérifiant r<|z0|=:αr<|z_{0}|=:\alpha si et seulement si : r<αphpp1𝑟𝛼superscript𝑝𝑝𝑝1r<\alpha p^{-h-\frac{p}{p-1}}. Plus précisément, l’image réciproque de ηz0,rsubscript𝜂subscript𝑧0𝑟\eta_{z_{0},r} contient :

  • un seul élément quand r[αppp1,α];𝑟𝛼superscript𝑝𝑝𝑝1𝛼r\in[\alpha p^{-\frac{p}{p-1}},\alpha];

  • pisuperscript𝑝𝑖p^{i} éléments quand r[αpipp1,αpi1p1[,r\in[\alpha p^{-i-\frac{p}{p-1}},\alpha p^{-i-\frac{1}{p-1}}[, avec 1ih11𝑖11\leqslant i\leqslant h-1;

  • phsuperscript𝑝p^{h} éléments quand r[0,αph1p1[.r\in[0,\alpha p^{-h-\frac{1}{p-1}}[.

Démonstration.

Soit f:𝔾man𝔾man:𝑓superscriptsubscript𝔾𝑚ansuperscriptsubscript𝔾𝑚anf:\mathbb{G}_{m}^{\mathrm{an}}\rightarrow\mathbb{G}_{m}^{\mathrm{an}} le revêtement donné par f(z)=zp𝑓𝑧superscript𝑧𝑝f(z)=z^{p}. Soit z1ksubscript𝑧1superscript𝑘z_{1}\in k^{*} et ρ+𝜌subscript\rho\in\mathbb{R}_{+} vérifiant ρ<|z1|𝜌subscript𝑧1\rho<|z_{1}| (de telle sorte que ηz1,ρ]0,[\eta_{z_{1},\rho}\notin]0,\infty[).

Afin de calculer f(ηz1,ρ)𝑓subscript𝜂subscript𝑧1𝜌f(\eta_{z_{1},\rho}), remarquons que pour tout polynôme Pk[T]𝑃𝑘delimited-[]𝑇P\in k[T] :

|P(f(ηz1,ρ))|𝑃𝑓subscript𝜂subscript𝑧1𝜌\displaystyle|P\left(f(\eta_{z_{1},\rho})\right)| =|(Pf)(ηz1,ρ)|=|P(Tp)(ηz1,ρ)|absent𝑃𝑓subscript𝜂subscript𝑧1𝜌𝑃superscript𝑇𝑝subscript𝜂subscript𝑧1𝜌\displaystyle=|(P\circ f)(\eta_{z_{1},\rho})|=|P(T^{p})(\eta_{z_{1},\rho})|
=supxB(z1,ρ)|Pf(x)|absentsubscriptsupremum𝑥Bsubscript𝑧1𝜌𝑃𝑓𝑥\displaystyle=\sup_{x\in\mathrm{B}(z_{1},\rho)}|P\circ f(x)|
=supyf(B(z1,ρ))|P(y)|absentsubscriptsupremum𝑦𝑓Bsubscript𝑧1𝜌𝑃𝑦\displaystyle=\sup_{y\in f(\mathrm{B}(z_{1},\rho))}|P(y)|

Comme k𝑘k est algébriquement clos, il existe ρ^>0^𝜌0\widehat{\rho}>0 tel que f(B(z1,ρ))=B(z1p,ρ^)𝑓Bsubscript𝑧1𝜌Bsuperscriptsubscriptz1p^𝜌f(\mathrm{B}(z_{1},\rho))=\mathrm{B(z_{1}^{p},\widehat{\rho}\,)}, d’où l’on obtient f(ηz1,ρ)=ηz1p,ρ^𝑓subscript𝜂subscript𝑧1𝜌subscript𝜂superscriptsubscript𝑧1𝑝^𝜌f(\eta_{z_{1},\rho})=\eta_{z_{1}^{p},\widehat{\rho}}.

Afin de calculer ρ^^𝜌\widehat{\rho}, remarquons que ρ^=|(Tz1p)(f(ηz1,ρ))|=|(Tpz1p)(ηz1,ρ)|^𝜌𝑇superscriptsubscript𝑧1𝑝𝑓subscript𝜂subscript𝑧1𝜌superscript𝑇𝑝superscriptsubscript𝑧1𝑝subscript𝜂subscript𝑧1𝜌\widehat{\rho}=|(T-z_{1}^{p})(f(\eta_{z_{1},\rho}))|=|(T^{p}-z_{1}^{p})(\eta_{z_{1},\rho})|, et :

Tpz1p=i=1p(pi)z1pi(Tz1)i=i=1pγi(Tz1)i,superscript𝑇𝑝superscriptsubscript𝑧1𝑝superscriptsubscript𝑖1𝑝binomial𝑝𝑖superscriptsubscript𝑧1𝑝𝑖superscript𝑇subscript𝑧1𝑖superscriptsubscript𝑖1𝑝subscript𝛾𝑖superscript𝑇subscript𝑧1𝑖T^{p}-z_{1}^{p}=\sum_{i=1}^{p}\binom{p}{i}z_{1}^{p-i}(T-z_{1})^{i}=\sum_{i=1}^{p}\gamma_{i}(T-z_{1})^{i},

où l’on pose γi=(pi)z1pisubscript𝛾𝑖binomial𝑝𝑖superscriptsubscript𝑧1𝑝𝑖\gamma_{i}=\binom{p}{i}z_{1}^{p-i}, avec :

|γi|={1si i=pp1|z1|pisi 1ip1subscript𝛾𝑖cases1si 𝑖𝑝superscript𝑝1superscriptsubscript𝑧1𝑝𝑖si 1𝑖𝑝1|\gamma_{i}|=\left\{\begin{array}[]{ll}1&\hbox{si }i=p\\ p^{-1}|z_{1}|^{p-i}&\hbox{si }1\leqslant i\leqslant p-1\end{array}\right.

Ainsi ρ^=|(Tz1p)(f(ηz1,ρ))|=max1ip{|γi|ρi}=max{ρp,(p1ρi|z1|pi)1ip1}^𝜌𝑇superscriptsubscript𝑧1𝑝𝑓subscript𝜂subscript𝑧1𝜌subscript1𝑖𝑝subscript𝛾𝑖superscript𝜌𝑖superscript𝜌𝑝subscriptsuperscript𝑝1superscript𝜌𝑖superscriptsubscript𝑧1𝑝𝑖1𝑖𝑝1\widehat{\rho}=|(T-z_{1}^{p})(f(\eta_{z_{1},\rho}))|=\max_{1\leqslant i\leqslant p}\{|\gamma_{i}|\rho^{i}\}=\max\{\rho^{p},\left(p^{-1}\rho^{i}|z_{1}|^{p-i}\right)_{1\leqslant i\leqslant p-1}\}. Puisque l’on a supposé ρ<|z1|𝜌subscript𝑧1\rho<|z_{1}|, alors on obtient ρ^=max{ρp,p1ρ|z1|p1}^𝜌superscript𝜌𝑝superscript𝑝1𝜌superscriptsubscript𝑧1𝑝1\widehat{\rho}=\max\{\rho^{p},p^{-1}\rho|z_{1}|^{p-1}\}, soit :

ρ^={p1ρ|z1|p1si ρ|z1|p1p1ρpsi ρ|z1|p1p1^𝜌casessuperscript𝑝1𝜌superscriptsubscript𝑧1𝑝1si 𝜌subscript𝑧1superscript𝑝1𝑝1superscript𝜌𝑝si 𝜌subscript𝑧1superscript𝑝1𝑝1\widehat{\rho}=\left\{\begin{array}[]{ll}p^{-1}\rho|z_{1}|^{p-1}&\hbox{si }\rho\leqslant|z_{1}|p^{-\frac{1}{p-1}}\\ \rho^{p}&\hbox{si }\rho\geqslant|z_{1}|p^{-\frac{1}{p-1}}\end{array}\right.

De là :

f(ηz1,ρ)={ηz1p,p1ρ|z1|p1si ρ|z1|p1p1ηz1p,ρpsi ρ|z1|p1p1𝑓subscript𝜂subscript𝑧1𝜌casessubscript𝜂superscriptsubscript𝑧1𝑝superscript𝑝1𝜌superscriptsubscript𝑧1𝑝1si 𝜌subscript𝑧1superscript𝑝1𝑝1subscript𝜂superscriptsubscript𝑧1𝑝superscript𝜌𝑝si 𝜌subscript𝑧1superscript𝑝1𝑝1f(\eta_{z_{1},\rho})=\left\{\begin{array}[]{ll}\eta_{z_{1}^{p},p^{-1}\rho|z_{1}|^{p-1}}&\hbox{si }\rho\leqslant|z_{1}|p^{-\frac{1}{p-1}}\\ \eta_{z_{1}^{p},\rho^{p}}&\hbox{si }\rho\geqslant|z_{1}|p^{-\frac{1}{p-1}}\end{array}\right.

Cherchons maintenant les préimages par f𝑓f de ηz0,rsubscript𝜂subscript𝑧0𝑟\eta_{z_{0},r}, où 0r<α:=|z0|0𝑟𝛼assignsubscript𝑧00\leqslant r<\alpha:=|z_{0}|. Posons :

r~={rpαp1psi rαppp1r1psi rαppp1~𝑟cases𝑟𝑝superscript𝛼𝑝1𝑝si 𝑟𝛼superscript𝑝𝑝𝑝1superscript𝑟1𝑝si 𝑟𝛼superscript𝑝𝑝𝑝1\widetilde{r}=\left\{\begin{array}[]{ll}rp\alpha^{-\frac{p-1}{p}}&\hbox{si }r\leqslant\alpha p^{-\frac{p}{p-1}}\\ r^{\frac{1}{p}}&\hbox{si }r\geqslant\alpha p^{-\frac{p}{p-1}}\end{array}\right.

D’après ce qui précède, si z0~~subscript𝑧0\widetilde{z_{0}} désigne une racine p𝑝p-ième de z0subscript𝑧0z_{0}, alors :

ηz0~,r~f1({ηz0,r}),subscript𝜂~subscript𝑧0~𝑟superscript𝑓1subscript𝜂subscript𝑧0𝑟\eta_{\widetilde{z_{0}},\widetilde{r}}\in f^{-1}\left(\{\eta_{z_{0},r}\}\right),

et f1({ηz0,r})superscript𝑓1subscript𝜂subscript𝑧0𝑟f^{-1}\left(\{\eta_{z_{0},r}\}\right) est constituée de tous les conjugués ηξz0~,r~subscript𝜂𝜉~subscript𝑧0~𝑟\eta_{\xi\widetilde{z_{0}},\widetilde{r}} de ηz0~,r~subscript𝜂~subscript𝑧0~𝑟\eta_{\widetilde{z_{0}},\widetilde{r}} pour ξμp𝜉subscript𝜇𝑝\xi\in\mu_{p}. De là :

f1({ηz0,r})={{ηξz0~,rpαp1p}ξμpsi rαppp1{ηξz0~,r1p}ξμpsi rαppp1superscript𝑓1subscript𝜂subscript𝑧0𝑟casessubscriptsubscript𝜂𝜉~subscript𝑧0𝑟𝑝superscript𝛼𝑝1𝑝𝜉subscript𝜇𝑝si 𝑟𝛼superscript𝑝𝑝𝑝1subscriptsubscript𝜂𝜉~subscript𝑧0superscript𝑟1𝑝𝜉subscript𝜇𝑝si 𝑟𝛼superscript𝑝𝑝𝑝1f^{-1}\left(\{\eta_{z_{0},r}\}\right)=\left\{\begin{array}[]{ll}\{\eta_{\xi\widetilde{z_{0}},rp\alpha^{-\frac{p-1}{p}}}\}_{\xi\in\mu_{p}}&\hbox{si }r\leqslant\alpha p^{-\frac{p}{p-1}}\\ \{\eta_{\xi\widetilde{z_{0}},r^{\frac{1}{p}}}\}_{\xi\in\mu_{p}}&\hbox{si }r\geqslant\alpha p^{-\frac{p}{p-1}}\end{array}\right.

Puisque |z0~|=α1p~subscript𝑧0superscript𝛼1𝑝|\widetilde{z_{0}}|=\alpha^{\frac{1}{p}}, on a |ξz0~ξz0~|=α1pp1p1𝜉~subscript𝑧0superscript𝜉~subscript𝑧0superscript𝛼1𝑝superscript𝑝1𝑝1|\xi\widetilde{z_{0}}-\xi^{\prime}\widetilde{z_{0}}|=\alpha^{\frac{1}{p}}p^{-\frac{1}{p-1}} dès que ξξμp𝜉superscript𝜉subscript𝜇𝑝\xi\neq\xi^{\prime}\in\mu_{p}, d’après le lemme 2.34. On en déduit que f1({ηz0,r})superscript𝑓1subscript𝜂subscript𝑧0𝑟f^{-1}\left(\{\eta_{z_{0},r}\}\right) a un unique élément si rαppp1𝑟𝛼superscript𝑝𝑝𝑝1r\geqslant\alpha p^{-\frac{p}{p-1}}, p𝑝p sinon.

Dans le cas général, avec h11h\geqslant 1, un raisonnement par récurrence sur hh permet de conclure.

Refer to caption
Figure 1: Revêtement 𝔾manzzph𝔾manmaps-to𝑧superscript𝑧superscript𝑝superscriptsubscript𝔾𝑚ansuperscriptsubscript𝔾𝑚an\mathbb{G}_{m}^{\mathrm{an}}\xrightarrow{z\mapsto z^{p^{h}}}\mathbb{G}_{m}^{\mathrm{an}} avec p=3𝑝3p=3, h=22h=2 et z0=1subscript𝑧01z_{0}=1.
Corollaire 2.36.

Soit 𝒞𝒞\mathcal{C} une couronne k𝑘k-analytique ouverte de module fini, que l’on peut supposer être un domaine analytique de k1,ansuperscriptsubscript𝑘1an\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}}. Soit San(𝒞)=]x,y[S^{\mathrm{an}}(\mathcal{C})=]x,y[ son squelette analytique, avec x,yk1,an𝑥𝑦superscriptsubscript𝑘1anx,y\in\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}}, et hsuperscripth\in\mathbb{N}^{*}. Si (𝒞)>h1𝒞1\ell(\mathcal{C})>h-1 et y0San(𝒞)[2]subscript𝑦0superscript𝑆ansubscript𝒞delimited-[]2y_{0}\in S^{\mathrm{an}}(\mathcal{C})_{[2]} est tel que

ε:=d(y0,y)<min(pp1,(𝒞)(h1)),assign𝜀𝑑subscript𝑦0𝑦𝑝𝑝1𝒞1\varepsilon:=d(y_{0},y)<\min\left(\frac{p}{p-1},\ell(\mathcal{C})-(h-1)\right),

il existe un μphsubscript𝜇superscript𝑝\mu_{p^{h}}-torseur analytique fH1(𝒞,μph)𝑓superscript𝐻1𝒞subscript𝜇superscript𝑝f\in H^{1}(\mathcal{C},\mu_{p^{h}}) tel que :

  • l’ensemble des points de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) en lesquels f𝑓f n’a qu’un seul antécédent est [y0,y[[y_{0},y[, en particulier f𝑓f est non déployé au dessus de [y0,y[[y_{0},y[,

  • f𝑓f est totalement déployé sur un voisinage ouvert de l’extrémité donnée par x𝑥x; plus précisément f𝑓f est totalement déployée au-dessus de r1(]x,y1[)\displaystyle{r^{-1}\left(\,]x,y_{1}[\,\right)}y1]x,y0][2]y_{1}\in]x,y_{0}]_{[2]} est tel que d(y1,y0)=h1𝑑subscript𝑦1subscript𝑦01d(y_{1},y_{0})=h-1.

Remarque 2.37.

Avec les notations ci-dessus, si f𝑓f correspond au torseur YX𝑌𝑋Y\to X, l’unique antécédent de y0subscript𝑦0y_{0} est un «  point de branchement   » de San(Y)superscript𝑆an𝑌S^{\mathrm{an}}(Y), c’est-à-dire que c’est un nœud de San(Y)superscript𝑆an𝑌S^{\mathrm{an}}(Y). La condition d(y0,y)<pp1𝑑subscript𝑦0𝑦𝑝𝑝1d(y_{0},y)<\frac{p}{p-1} implique que l’on peut prendre y0subscript𝑦0y_{0} arbitrairement proche de y𝑦y.

Démonstration.

Si I𝐼I désigne un intervalle de +superscriptsubscript\mathbb{R}_{+}^{*}, notons 𝒞(I)subscript𝒞𝐼\mathcal{C}_{(I)} le domaine analytique de 𝔸k1,ansuperscriptsubscript𝔸𝑘1an\mathbb{A}_{k}^{1,\mathrm{an}} défini par la condition T1Idelimited-∣∣𝑇1𝐼\mid T-1\mid\in I, c’est une couronne. Par ailleurs si J𝐽J est un autre intervalle de +superscriptsubscript\mathbb{R}_{+}^{*}, 𝒞(I)subscript𝒞𝐼\mathcal{C}_{(I)} et 𝒞(J)subscript𝒞𝐽\mathcal{C}_{(J)} sont isomorphes si et seulement si J|k×|±1𝐽superscriptsuperscript𝑘plus-or-minus1J\in|k^{\times}|^{\pm 1}. Par conséquent la couronne 𝒞𝒞\mathcal{C} est isomorphe à 𝒞(I)subscript𝒞𝐼\mathcal{C}_{(I)} pour un intervalle ouvert I]0,1[I\varsubsetneq]0,1[ vérifiant supI1supremum𝐼1\sup I\neq 1, infI0infimum𝐼0\inf I\neq 0 (car 𝒞𝒞\mathcal{C} est supposée de longueur finie), et tel que via cet isomorphisme le bout x𝑥x corresponde à infIinfimum𝐼\inf I.

Posons :

{r1=pεpp1r2=r1Mod(𝒞)casessubscript𝑟1superscript𝑝𝜀𝑝𝑝1subscript𝑟2subscript𝑟1Mod𝒞\left\{\begin{array}[]{l}r_{1}=p^{\;\varepsilon-\frac{p}{p-1}}\\ r_{2}=\frac{r_{1}}{\mathrm{Mod}(\mathcal{C})}\end{array}\right.

On a alors

r1]ppp1,min{1,Mod(𝒞)p(h1)pp1}[(supI)|k×|,subscript𝑟1superscript𝑝𝑝𝑝11Mod𝒞superscript𝑝1𝑝𝑝1supremum𝐼superscript𝑘r_{1}\in\left]p^{-\frac{p}{p-1}},\min\{1,\mathrm{Mod}(\mathcal{C})p^{-(h-1)-\frac{p}{p-1}}\}\right[\cap(\sup I)\cdot|k^{\times}|,

et

0<r2<p(h1)pp1<ppp1<r1<1.0subscript𝑟2superscript𝑝1𝑝𝑝1superscript𝑝𝑝𝑝1subscript𝑟110<r_{2}<p^{-(h-1)-\frac{p}{p-1}}<p^{-\frac{p}{p-1}}<r_{1}<1.

Ainsi, par construction, 𝒞𝒞\mathcal{C} est isomorphe à la couronne 𝒞(]r2,r1[)\mathcal{C}_{(\,]r_{2},r_{1}[\,)}, d’où un isomorphisme

ψ:𝒞𝒞(]r2,r1[)\psi:\mathcal{C}\xrightarrow{\sim}\mathcal{C}_{(\,]r_{2},r_{1}[\,)}

qui identifie y0,xsubscript𝑦0𝑥y_{0},x et y𝑦y respectivement à η1,ppp1,η1,r2subscript𝜂1superscript𝑝𝑝𝑝1subscript𝜂1subscript𝑟2\eta_{1,p^{-\frac{p}{p-1}}},\eta_{1,r_{2}} et η1,r1subscript𝜂1subscript𝑟1\eta_{1,r_{1}}. Notons r𝑟r la rétraction de 𝒞(]r2,r1[)\mathcal{C}_{(\,]r_{2},r_{1}[\,)} sur son squelette analytique ]η1,r2,η1,r1[]\eta_{1,r_{2}},\eta_{1,r_{1}}[.

La proposition 2.35 nous indique que le μphsubscript𝜇superscript𝑝\mu_{p^{h}}-torseur f:𝔾manzzph𝔾man:𝑓maps-to𝑧superscript𝑧superscript𝑝superscriptsubscript𝔾𝑚ansuperscriptsubscript𝔾𝑚anf:\mathbb{G}_{m}^{\mathrm{an}}\xrightarrow{z\mapsto z^{p^{h}}}\mathbb{G}_{m}^{\mathrm{an}} vu comme revêtement de 𝒞]r2,r1[\mathcal{C}_{]r_{2},r_{1}[} (on le restreint à f1(𝒞]r2,r1[)f^{-1}(\mathcal{C}_{]r_{2},r_{1}[})) est :

  • totalement déployé au-dessus de r1(]η1,r2,η1,p(h1)pp1[)r^{-1}\left(]\eta_{1,r_{2}},\eta_{1,p^{-(h-1)-\frac{p}{p-1}}}[\right)

  • non déployé avec un seul antécédent au-dessus de [η1,ppp1,η1,r1[,[\eta_{1,p^{-\frac{p}{p-1}}},\eta_{1,r_{1}}[,

ce qui permet de conclure. ∎

2.3 Groupe fondamental tempéré d’une courbe analytique

Soit K𝐾K un corps valué non archimédien complet et p𝑝p l’exposant caractéristique de son corps résiduel. Soit X𝑋X un espace strictement K𝐾K-analytique quasi-lisse et connexe muni d’un point géométrique xX𝑥𝑋x\in X (i.e. un point défini sur une extension complète et algébriquement close de K𝐾K). Nous allons définir les revêtements tempérés de X𝑋X ainsi que le groupe fondamental tempéré π1temp(X,x)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x) de X𝑋X en x𝑥x, notions introduites par Yves André dans [And] . Ce dernier se place dans le cadre d’un sous-corps complet K𝐾K de psubscript𝑝\mathbb{C}_{p} (en désignant par psubscript𝑝\mathbb{C}_{p} la complétion d’une clôture algébrique fixée ¯psubscript¯𝑝\overline{\mathbb{Q}}_{p} de psubscript𝑝\mathbb{Q}_{p}). Or ces définitions s’étendent verbatim à tout corps non archimédien, ce que nous nous permettrons de faire librement dans la suite.

Rappelons que De Jong définit dans [DJg] un revêtement étale d’espaces K𝐾K-analytiques YX𝑌𝑋Y\rightarrow X comme étant localement sur la base X𝑋X une union disjointe de revêtements étales finis. Les revêtements topologiques (lorsque ces revêtements étales finis sont des isomorphismes) sont en particulier des revêtements étales, mais de nombreux revêtements étales ne donnent lieu à aucun revêtement topologique.

Les revêtements topologiques de l’espace K𝐾K-analytique pointé (X,x)𝑋𝑥(X,x) sont classés par le groupe fondamental topologique classique π1top(X,x)superscriptsubscript𝜋1top𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{top}}(X,x), tandis que De Jong définit dans [DJg] le groupe fondamental de X𝑋X en x𝑥x, π1e´t(X,x)superscriptsubscript𝜋1´et𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{\acute{e}t}}(X,x), qui classe les revêtements étales de X𝑋X, et dont π1top(X,x)superscriptsubscript𝜋1top𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{top}}(X,x) est un quotient discret. Son complété profini, le groupe fondamental algébrique π1alg(X,x)superscriptsubscript𝜋1alg𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{alg}}(X,x), classe les revêtements finis étales. Ce dernier est l’analogue du groupe fondamental classique de la géométrie algébrique, coïncidant avec celui-ci pour l’analytifiée d’une courbe algébrique. En revanche, sur les corps algébriquement clos de caractéristique nulle, ce groupe ne porte aucun phénomène anabélien pour les courbes analytiques de nature algébrique.

Les autres groupes ont en pratique un comportement très éloigné de ce qui advient en géométrie complexe :

  • π1top(X,x)superscriptsubscript𝜋1top𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{top}}(X,x) est «  trop petit   » , par exemple π1top(p1,an{0,1,}),x)={1}\pi_{1}^{\mathrm{top}}(\mathbb{P}_{\mathbb{C}_{p}}^{1,\mathrm{an}}\setminus\{0,1,\infty\}),x)=\{1\};

  • π1e´t(X,x)superscriptsubscript𝜋1´et𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{\acute{e}t}}(X,x) est «  trop grand   », par exemple π1e´t(p1,an,x)superscriptsubscript𝜋1´etsuperscriptsubscriptsubscript𝑝1an𝑥\pi_{1}^{\mathrm{\acute{e}t}}(\mathbb{P}_{\mathbb{C}_{p}}^{1,\mathrm{an}},x) admet des groupes linéaires de la forme SLn(p)subscriptSL𝑛subscript𝑝\mathrm{SL}_{n}(\mathbb{Q}_{p}) comme quotients ([DJg], Proposition 7.4747.4).

C’est pour remédier à ce «  défaut   » qu’Yves André introduit dans [And] la notion de revêtement tempéré, qui capture à la fois la théorie des revêtements topologiques et finis étales tout en offrant des comportements raisonnables qui s’apparentent à ce que l’on connaît en géométrie complexe :

Définition 2.38.
  1. 1.

    Un revêtement tempéré d’un espace strictement K𝐾K-analytique X𝑋X connexe non vide sera défini comme un revêtement étale (au sens de [DJg])φ:YX:𝜑𝑌𝑋\varphi:Y\rightarrow X qui devient topologique après un changement de base selon un revêtement étale fini, autrement dit qui est facteur du revêtement topologique d’un revêtement étale fini de X𝑋X, i.e. s’il existe un diagramme commutatif suivant

    Z𝑍\textstyle{Z\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces}ψ𝜓\scriptstyle{\psi}W𝑊\textstyle{W\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces}χ𝜒\scriptstyle{\chi}Y𝑌\textstyle{Y\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces\ignorespaces}φ𝜑\scriptstyle{\varphi}X𝑋\textstyle{X}

    χ𝜒\chi est un revêtement étale fini et ψ𝜓\psi un revêtement topologique.

  2. 2.

    Soit Covtemp(X)superscriptCovtemp𝑋\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp}}(X) la catégorie des revêtements tempérés de X𝑋X. Si xX𝑥𝑋x\in X est un point géométrique, soit

    Fx:Covtemp(X)Set:subscript𝐹𝑥superscriptCovtemp𝑋SetF_{x}:\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp}}(X)\to\mathrm{Set}

    le foncteur fibre en x𝑥x qui associe à un revêtement YX𝑌𝑋Y\to X la fibre Yxsubscript𝑌𝑥Y_{x} en x𝑥x. Le groupe fondamental tempéré pointé en x𝑥x est défini comme le groupe d’automorphismes du fonceur fibre en x𝑥x :

    π1temp(X,x):=Aut(Fx).assignsuperscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥Autsubscript𝐹𝑥\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x):=\mathrm{Aut}(F_{x}).

    Le groupe π1temp(X,x)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x) devient un groupe topologique en considérant l’ensemble des sous-groupes stabilisateurs (StabFx(Y)(y))YCovtemp(X),yFx(Y)subscriptsubscriptStabsubscript𝐹𝑥𝑌𝑦formulae-sequence𝑌superscriptCovtemp𝑋𝑦subscript𝐹𝑥𝑌(\mathrm{Stab}_{F_{x}(Y)}(y))_{Y\in\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp}}(X),\;y\in F_{x}(Y)} comme base d’ouverts. C’est alors un groupe topologique prodiscret.


    Si x𝑥x et xsuperscript𝑥x^{\prime} sont deux points géométriques distincts, les foncteurs fibre Fxsubscript𝐹𝑥F_{x} et Fxsubscript𝐹superscript𝑥F_{x^{\prime}} sont (non canoniquement) isomorphes, et tout automorphisme de Fxsubscript𝐹𝑥F_{x} induit un automorphisme intérieur de π1temp(X,x)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x). Ainsi, on peut considérer le groupe fondamental tempéré π1temp(X)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X) de X𝑋X, défini à unique isomorphisme extérieur près.

Remarque 2.39.

Il y a équivalence de catégories entre la catégorie des sommes directes de revêtements tempérés de X𝑋X et la catégorie des π1temp(X,x)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x)-ensembles discrets sur lesquels π1temp(X,x)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x) agit à gauche continûment.

La classe d’isomorphisme de π1temp(X,x)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x) ne dépend pas du point géométrique x𝑥x considéré, de sorte que l’on pourra parler du groupe fondamental tempéré π1temp(X)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X) de X𝑋X, défini à unique isomorphisme extérieur près.

Remarque 2.40.

Une somme directe de revêtements tempérés n’est pas toujours un revêtement tempéré. Supposons que (Hi)isubscriptsubscript𝐻𝑖𝑖(H_{i})_{i\in\mathbb{N}} soit une suite décroissante de sous-groupes ouverts de π1temp(X,x)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x) telle que l’intersection iHisubscript𝑖subscript𝐻𝑖\bigcap_{i\in\mathbb{N}}H_{i} ne soit pas ouverte dans π1temp(X,x)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x). Soit XiXsubscript𝑋𝑖𝑋X_{i}\to X le revêtement tempéré de X𝑋X correspondant au π1temp(X,x)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x)-ensemble π1temp(X,x)/Hisuperscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥subscript𝐻𝑖\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x)/H_{i}. Le revêtement étale φ:iXiX:𝜑subscriptsquare-union𝑖subscript𝑋𝑖𝑋\varphi:\bigsqcup_{i\in\mathbb{N}}X_{i}\to X, correspondant au π1temp(X,x)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x)-ensemble discret iπ1temp(X,x)/Hisubscriptsquare-union𝑖superscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥subscript𝐻𝑖\bigsqcup_{i\in\mathbb{N}}\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x)/H_{i}, n’est en revanche pas tempéré puisque les degrés [(y):(φ(y))]delimited-[]:𝑦𝜑𝑦[\mathscr{H}(y):\mathscr{H}(\varphi(y))] ne sont pas bornés lorsque y𝑦y parcourt iXisubscriptsquare-union𝑖subscript𝑋𝑖\bigsqcup_{i\in\mathbb{N}}X_{i}.

Remarque 2.41.

Comme toute composante connexe d’un bon espace K𝐾K-analytique est dénombrable à l’infini, un revêtement étale φ:YX:𝜑𝑌𝑋\varphi:Y\to X avec Y𝑌Y connexe est tempéré si et seulement s’il s’insère dans un diagramme commutatif similaire à celui ci-dessus avec ψ𝜓\psi un revêtement topologique à fibres dénombrables. C’est le cas de tout revêtement tempéré galoisien.

Si (Y,y)𝑌𝑦(Y,y) est un revêtement étale fini galoisien géométriquement pointé de (X,x)𝑋𝑥(X,x), alors le revêtement universel pointé ψ:(Y~,y~)(Y,y):𝜓~𝑌~𝑦𝑌𝑦\psi:(\widetilde{Y},\widetilde{y})\rightarrow(Y,y) reste un revêtement étale galoisien de X𝑋X de groupe de Galois ΔY:=Gal(Y~/X)assignsubscriptΔ𝑌Gal~𝑌𝑋\Delta_{Y}:=\mathrm{Gal}(\widetilde{Y}/X) s’insérant dans une suite exacte :

{1}π1top(Y,y)ΔYGal(Y/X){1}1superscriptsubscript𝜋1top𝑌𝑦subscriptΔ𝑌Gal𝑌𝑋1\{1\}\longrightarrow\pi_{1}^{\mathrm{top}}(Y,{y})\longrightarrow\Delta_{Y}\longrightarrow\mathrm{Gal}(Y/X)\longrightarrow\{1\}

Tout morphisme (Y2,y2)(Y1,y1)subscript𝑌2subscript𝑦2subscript𝑌1subscript𝑦1(Y_{2},y_{2})\rightarrow(Y_{1},y_{1}) de revêtements finis étales galoisiens géométriquement pointés de (X,x)𝑋𝑥(X,x) induit un morphismes de groupes : ΔY2ΔY1subscriptΔsubscript𝑌2subscriptΔsubscript𝑌1\Delta_{Y_{2}}\rightarrow\Delta_{Y_{1}}.

Proposition 2.42 ([And]).

Soit X𝑋X un espace strictement K𝐾K-analytique connexe et xX𝑥𝑋x\in X un point géométrique. Alors on a l’égalité :

π1temp(X,x)=limiIΔYi,superscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥subscriptprojective-limit𝑖𝐼subscriptΔsubscript𝑌𝑖\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x)=\varprojlim_{i\in I}\Delta_{Y_{i}},

dès que (Yi,yi)iIsubscriptsubscript𝑌𝑖subscript𝑦𝑖𝑖𝐼(Y_{i},y_{i})_{i\in I} est un système projectif cofinal de revêtements finis étales galoisiens géométriquement pointés au-dessus de (X,x)𝑋𝑥(X,x). L’ensemble d’indexation I𝐼I n’est a priori pas dénombrable en général (mais il l’est par exemple dès que X𝑋X est de nature algébrique et K𝐾K de caractéristique nulle).

Remarque 2.43.

Lorsque que les espaces K𝐾K-analytiques considérés ci-dessus sont des courbes, le groupe π1top(Y,y)superscriptsubscript𝜋1top𝑌𝑦\pi_{1}^{\mathrm{top}}(Y,{y}) est un groupe libre discret. Cela découle du fait qu’une courbe K𝐾K-analytique a le type d’homotopie d’un graphe.

Le groupe fondamental tempéré π1temp(X)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X) est par ailleurs un groupe tempéré (au sens de la section 1.2). La catégorie Covtemp(X)superscriptCovtemp𝑋\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp}}(X) des revêtements tempérés de X𝑋X munie de la classe d’isomorphisme ΥXsubscriptΥ𝑋\Upsilon_{X} des foncteurs Covtemp(X)𝔈𝔫𝔰ddsuperscriptCovtemp𝑋𝔈𝔫superscript𝔰dd\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp}}(X)\to\mathfrak{Ens}^{\mathrm{dd}} contenant les foncteurs fibres Fxsubscript𝐹𝑥F_{x} au-dessus des points géométriques est un tempéroïde connexe isomorphe à (temp(π1temp(X)),Υπ1temp(X)oubli)superscripttempsuperscriptsubscript𝜋1temp𝑋superscriptsubscriptΥsuperscriptsubscript𝜋1temp𝑋oubli(\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X)),\Upsilon_{\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X)}^{\mathrm{oubli}}).

Décrivons quelques propriétés du groupe fondamental tempéré :

Proposition 2.44 ([And], 2.1.62162.1.6).

Soit X𝑋X un bon espace K𝐾K-analytique connexe quasi-lisse, et x𝑥x un point géométrique :

  1. 1.

    Le morphisme naturel π1temp(X,x)π1top(X,x)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥superscriptsubscript𝜋1top𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x)\to\pi_{1}^{\mathrm{top}}(X,x) est surjectif (le groupe tempéré peut donc avoir une infinité de quotients discrets).

  2. 2.

    Le morphisme naturel π1temp(X,x)π1alg(X,x)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥superscriptsubscript𝜋1alg𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x)\to\pi_{1}^{\mathrm{alg}}(X,x) est d’image dense, π1alg(X,x)superscriptsubscript𝜋1alg𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{alg}}(X,x) peut être identifié à la complétion profinie de π1temp(X,x)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x).

  3. 3.

    Si X𝑋X est une courbe k𝑘k-analytique, le morphisme π1temp(X,x)π1alg(X,x)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥superscriptsubscript𝜋1alg𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X,x)\to\pi_{1}^{\mathrm{alg}}(X,x) est injectif.

Le deuxième point montre que le groupe tempéré n’est pas «  trop petit   », tandis que le troisième point indique qu’il n’est pas non plus «  trop grand   » lorsque X𝑋X est une courbe.

Remarque 2.45.

Nous savons que la droite affine psubscript𝑝\mathbb{C}_{p}-analytique est algébriquement simplement connexe : π1alg(𝔸p1,an)={0}superscriptsubscript𝜋1algsuperscriptsubscript𝔸subscript𝑝1an0\pi_{1}^{\mathrm{alg}}(\mathbb{A}_{\mathbb{C}_{p}}^{1,\mathrm{an}})=\{0\} (cela découle du caractère simplement connexe de droite affine algébrique 𝔸p1superscriptsubscript𝔸subscript𝑝1\mathbb{A}_{\mathbb{C}_{p}}^{1} et de l’équivalence entre les revêtements étales finis de 𝔸p1superscriptsubscript𝔸subscript𝑝1\mathbb{A}_{\mathbb{C}_{p}}^{1} et ceux de 𝔸p1,ansuperscriptsubscript𝔸subscript𝑝1an\mathbb{A}_{\mathbb{C}_{p}}^{1,\mathrm{an}}). On déduit du troisième point de la proposition 2.44 que le groupe tempéré de la droite affine est trivial : π1temp(𝔸p1,an)={0}superscriptsubscript𝜋1tempsuperscriptsubscript𝔸subscript𝑝1an0\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(\mathbb{A}_{\mathbb{C}_{p}}^{1,\mathrm{an}})=\{0\}. Cela prouve le caractère non tempéré du revêtement étale donné par le logarithme log:Dp(0,1)𝔸p1,an:logsubscript𝐷subscript𝑝superscript0.1superscriptsubscript𝔸subscript𝑝1an\mathrm{log:}\;D_{\mathbb{C}_{p}}(0,1)^{\circ}\to\mathbb{A}_{\mathbb{C}_{p}}^{1,\mathrm{an}}.

Dans le cas d’un revêtement étale galoisien, la propriété d’être de nature topologique ou tempérée peut se lire directement sur son groupe de Galois, comme le montre la proposition suivante :

Proposition 2.46 ([And], 2.1.92192.1.9).

Soit X𝑋X un espace strictement K𝐾K-analytique connexe et Y𝑌Y un revêtement étale galoisien de X𝑋X de groupe de Galois G𝐺G.

  1. 1.

    Si G𝐺G est sans torsion, Y𝑌Y est un revêtement topologique de X𝑋X;

  2. 2.

    si G𝐺G est virtuellement sans torsion (i.e. s’il contient au moins un sous-groupe d’indice fini qui est sans torsion), alors Y𝑌Y est un revêtement tempéré de X𝑋X, et plus précisément un revêtement topologique d’un revêtement fini étale galoisien de X𝑋X.

Définition 2.47 (Revêtements tempérés modérés).

Notons Covtemp,(p)(X)superscriptCovtempsuperscript𝑝𝑋\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X) la sous-catégorie pleine de Covtemp(X)superscriptCovtemp𝑋\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp}}(X) constituée des revêtements tempérés qui sont quotients d’un revêtement topologique d’un revêtement galoisien fini de degré premier à p𝑝p. Si xX𝑥𝑋x\in X est un point géométrique, notons π1temp,(p)(X,x)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝𝑋𝑥\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X,x) le groupe d’automorphismes du foncteur fibre en x𝑥x :

Fx(p):Covtemp,(p)(X)Ens:superscriptsubscriptF𝑥superscript𝑝superscriptCovtempsuperscript𝑝𝑋Ens\mathrm{F}_{x}^{\,(p^{\prime})}:\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X)\to\mathrm{Ens}

qui à un revêtement YX𝑌𝑋Y\to X associe la fibre Yxsubscript𝑌𝑥Y_{x} au-dessus de x𝑥x. La classe d’isomorphisme de π1temp(X,x),(p)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋𝑥superscript𝑝\pi_{1}^{\mathrm{temp}(X,x),\,(p^{\prime})} ne dépend pas du point géométrique x𝑥x considéré, de sorte que l’on pourra considérer le groupe π1temp(X),(p)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋superscript𝑝\pi_{1}^{\mathrm{temp}(X),\,(p^{\prime})}, défini à unique isomorphisme extérieur près, appelé le groupe fondamental tempéré modéré de X𝑋X.

Remarque 2.48.

Munissons Covtemp,(p)(X)superscriptCovtempsuperscript𝑝𝑋\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X) de la classe d’isomorphisme ΥX(p)superscriptsubscriptΥ𝑋superscript𝑝\Upsilon_{X}^{\,(p^{\prime})} des foncteurs Covtemp,(p)(X)𝔈𝔫𝔰ddsuperscriptCovtempsuperscript𝑝𝑋𝔈𝔫superscript𝔰dd\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X)\to\mathfrak{Ens}^{\mathrm{dd}} contenant les foncteurs fibres Fx(p)superscriptsubscript𝐹𝑥superscript𝑝F_{x}^{\,(p^{\prime})} au dessus des points géométriques (ils sont tous isomorphes). Alors (Covtemp,(p)(X),ΥX(p))superscriptCovtempsuperscript𝑝𝑋superscriptsubscriptΥ𝑋superscript𝑝(\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X),\Upsilon_{X}^{\,(p^{\prime})}) est un tempéroïde connexe dont π1temp,(p)(X)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝𝑋\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X) est le groupe tempéré, de sorte que l’on a un isomorphisme de tempéroïdes connexe :

(Covtemp,(p)(X),ΥX(p))(temp(π1temp,(p)(X)),Υπ1temp,(p)(X)oubli).similar-to-or-equalssuperscriptCovtempsuperscript𝑝𝑋superscriptsubscriptΥ𝑋superscript𝑝superscripttempsuperscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝𝑋subscriptsuperscriptΥoublisuperscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝𝑋\left(\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X),\Upsilon_{X}^{\,(p^{\prime})}\right)\simeq\left(\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X)),\Upsilon^{\mathrm{oubli}}_{\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X)}\right).
Remarque 2.49.

Lorsque X𝑋X est une courbe K𝐾K-analytique, le groupe π1temp,(p)(X)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝𝑋\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X) peut se construire directement à partir de π1temp(X)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X) : en effet, π1temp,(p)(X)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝𝑋\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X) n’est autre la limite projective des quotients de π1temp(X)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X) qui ont un sous-groupe distingué sans torsion d’indice fini premier à p𝑝p. Ce résultat est en revanche faux en dimension supérieure, lorsque les groupes topologiques fondamentaux des espaces k𝑘k-analytiques ne sont plus libres.

3 Géométrie anabélienne dans les courbes analytiques

Dans toute la suite du texte, fixons un corps k𝑘k ultramétrique complet non trivialement valué, algébriquement clos, et p𝑝p l’exposant caractéristique de k~~𝑘\widetilde{k}. Fixons un système de racines primitives l’unité, de sorte que l’on ait des isomorphismes naturels : μn(k)/nsimilar-to-or-equalssubscript𝜇𝑛𝑘𝑛\mu_{n}(k)\simeq\mathbb{Z}/n\mathbb{Z} et limnμn(k)=^subscriptprojective-limit𝑛superscriptsubscript𝜇𝑛𝑘^\displaystyle{\varprojlim_{n\in\mathbb{N}^{*}}\mu_{n}(k)=\widehat{\mathbb{Z}}} (plutôt que de parler de ^(1)^1\widehat{\mathbb{Z}}(1)).

3.1 Description du graphe d’anabélioïdes d’une triangulation généralisée

3.1.1 Comportement des composantes coronaires dans le cas d’une vraie triangulation

Nous appellerons kummérien tout revêtement étale fini φ:𝒞𝒞:𝜑superscript𝒞𝒞\varphi:\mathcal{C}^{\prime}\rightarrow\mathcal{C} entre deux couronnes k𝑘k-analytiques tel qu’il existe un certain entier \ell premier à p𝑝p permettant de considérer 𝒞superscript𝒞\mathcal{C}^{\prime} comme un μsubscript𝜇\mu_{\ell}-torseur de Kummer de 𝒞𝒞\mathcal{C} via φ𝜑\varphi. Rappelons que le choix d’une orientation de 𝒞𝒞\mathcal{C} permet d’exhiber un isomorphisme canonique : 𝖪𝗎𝗆(𝒞)/similar-tosubscript𝖪𝗎𝗆𝒞\mathsf{Kum}_{\ell}(\mathcal{C})\xrightarrow{\sim}\mathbb{Z}/\ell\mathbb{Z}.

Soit ^(p)superscript^superscript𝑝\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})} le complété pro-psuperscript𝑝p^{\prime}-fini de \mathbb{Z}, égal à q{p}qsubscriptproduct𝑞𝑝subscript𝑞\displaystyle{\prod_{q\in\mathbb{P}\setminus\{p\}}\mathbb{Z}_{q}}.

Proposition 3.1 (Description du groupe fondamental modéré des disques et des couronnes, [Ber222], Théorèmes 6.3.26326.3.2 et 6.3.56356.3.5).
  1. 1.

    Tout revêtement fini modéré d’un disque est trivial. De là, si 𝒟𝒟\mathcal{D} est un disque k𝑘k-analytique, alors π1t(𝒟)={1}superscriptsubscript𝜋1t𝒟1\pi_{1}^{\mathrm{t}}(\mathcal{D})=\{1\};

  2. 2.

    Tout revêtement fini galoisien modéré d’une couronne de type 𝒞(I)𝒞𝐼\mathcal{C}(I) avec I𝐼I intervalle compact de +superscriptsubscript\mathbb{R}_{+}^{*} est kummérien. De là, si 𝒞𝒞\mathcal{C} est une telle couronne k𝑘k-analytique, alors π1t(𝒞)=^(p)superscriptsubscript𝜋1t𝒞superscript^superscript𝑝{\pi_{1}^{\mathrm{t}}(\mathcal{C})=\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}}.

Si 𝒞𝒞superscript𝒞𝒞\mathcal{C}^{\prime}\rightarrow\mathcal{C} est un plongement de couronnes k𝑘k-analytiques compactes permettant de considérer 𝒞superscript𝒞\mathcal{C}^{\prime} comme une sous-couronne de 𝒞𝒞\mathcal{C}, alors comme on a d’une part pour tout entier \ell premier à p𝑝p un isomorphisme 𝖪𝗎𝗆(𝒞)𝖪𝗎𝗆(𝒞)similar-to-or-equalssubscript𝖪𝗎𝗆superscript𝒞subscript𝖪𝗎𝗆𝒞\mathsf{Kum}_{\ell}(\mathcal{C}^{\prime})\simeq\mathsf{Kum}_{\ell}(\mathcal{C}) (voir Proposition 2.29) et que de l’autre tout revêtement galoisien modéré de 𝒞𝒞\mathcal{C} ou 𝒞superscript𝒞\mathcal{C}^{\prime} est kummérien, alors le foncteur naturel associé Covt(𝒞)Covt(𝒞)superscriptCovtsuperscript𝒞superscriptCovt𝒞\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{C}^{\prime})\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{C}) est une équivalence de catégories. Par conséquent, pour n’importe quelle couronne k𝑘k-analytique 𝒞𝒞\mathcal{C} (en particulier pour toute couronne ouverte) l’on a :

π1t(𝒞)=^(p).superscriptsubscript𝜋1t𝒞superscript^superscript𝑝\pi_{1}^{\mathrm{t}}(\mathcal{C})=\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}.

Si S𝑆S est une triangulation généralisée de X𝑋X, les composantes 𝒢esubscript𝒢𝑒\mathcal{G}_{e} du graphe d’anabélioïdes 𝒢(X,S)𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}(X,S) données par les arêtes correspondant à des couronnes, sont donc isomorphes (en tant qu’anabélioïdes connexes) à (^(p)).superscript^superscript𝑝\mathcal{B}(\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}).

Remarque 3.2.

En reprenant le raisonnement précédent restreint aux μsubscript𝜇\mu_{\ell}-torseurs on obtient pour toute couronne 𝒞𝒞\mathcal{C} l’isomorphisme :

H1(𝒞e´t,μ)𝖪𝗎𝗆(𝒞)/.similar-to-or-equalssuperscriptH1subscript𝒞´etsubscript𝜇subscript𝖪𝗎𝗆𝒞similar-to-or-equals\mathrm{H}^{1}(\mathcal{C}_{\mathrm{\acute{e}t}},\mu_{\ell})\simeq\mathsf{Kum}_{\ell}(\mathcal{C})\simeq\mathbb{Z}/\ell\mathbb{Z}.

3.1.2 Triangulation généralisée et rabotée d’une courbe

Expliquons pourquoi la description du semi-graphe d’anabélioïdes 𝒢(X,S)𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}(X,S) associé à une triangulation généralisée S𝑆S d’une courbe k𝑘k-analytique X𝑋X peut se ramener, quitte à restreindre X𝑋X en une courbe que l’on appellera une rabotée de X𝑋X, à supposer que S𝑆S est une vraie triangulation de X𝑋X. Reprenons l’exemple esquissé à la remarque 2.18 : celui d’une courbe k𝑘k-analytique Y𝑌Y quasi-lisse de squelette analytique non vide, à laquelle on enlève un point x𝑥x de type 444. Enlever x𝑥x revient à rajouter l’arête ouverte ]x,r(x)]]x,r(x)] : San(Y{x})=San(Y)]x,r(x)]S^{\mathrm{an}}(Y\setminus\{x\})=S^{\mathrm{an}}(Y)\cup\;]x,r(x)]. Or r1(]x,r(x)])r^{-1}(]x,r(x)]) n’a aucune raison d’être une couronne. Néanmoins, tout point x~]x,r(x)]\widetilde{x}\in]x,r(x)] est de type 222 ou 333, et r1(]x~,r(x)])r^{-1}(]\widetilde{x},r(x)]) a le bon goût d’être une couronne k𝑘k-analytique d’après [Duc] (5.1.12.3511235.1.12.3). Cela nous amène à définir la notion de rabotée d’une courbe.

Définition 3.3 (Rabotée d’une courbe).

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytique connexe quasi-lisse dont S𝑆S est une triangulation généralisée non vide de squelette ΓΓ\Gamma. Notons r𝑟r la rétraction canonique de X𝑋X sur ΓΓ\Gamma. Soit \mathscr{I} l’ensemble (éventuellement vide) des composantes connexes de ΓSΓ𝑆\Gamma\setminus S non relativement compactes dans ΓΓ\Gamma dont la préimage par r𝑟r n’est pas une couronne k𝑘k-analytique. Il existe une famille (xI)Isubscriptsubscript𝑥𝐼𝐼(x_{I})_{I\in\mathscr{I}} de S𝑆S telle que I𝐼I est un intervalle ouvert non relativement compact aboutissant à xIsubscript𝑥𝐼x_{I}, pour tout I𝐼I\in\mathscr{I}. Une rabotée de X𝑋X relativement à S𝑆S sera définie comme une courbe k𝑘k-analytique Xsuperscript𝑋X^{\circ} obtenue à partir de X𝑋X en ne gardant de chaque r1(I)superscript𝑟1𝐼r^{-1}\left(I\right) que les couronnes r1(]xI,xI~[)r^{-1}\left(\;]x_{I},\widetilde{x_{I}}[\;\right) :

Xsuperscript𝑋\displaystyle X^{\circ} =(XIr1(I))Ir1(]xI,xI~[)\displaystyle=\left(X\setminus\bigcup_{I\in\mathscr{I}}r^{-1}\left(I\right)\right)\cup\bigcup_{I\in\mathscr{I}}r^{-1}\left(\;]x_{I},\widetilde{x_{I}}[\;\right)
=XIr1(I]xI,xI~[),\displaystyle=X\setminus\bigcup_{I\in\mathscr{I}}r^{-1}\left(I\;\setminus\;]x_{I},\widetilde{x_{I}}[\;\right),

(xI~)Isubscript~subscript𝑥𝐼𝐼(\widetilde{x_{I}})_{I\in\mathscr{I}} est une collection de points de ΓΓ\Gamma vérifiant xI~I~subscript𝑥𝐼𝐼\widetilde{x_{I}}\in I pour tout I𝐼I\in\mathscr{I}.

Si l’ensemble ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X} des nœuds du squelette analytique San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) est non vide, on désignera par rabotée de X𝑋X toute rabotée de X𝑋X relativement à la triangulation généralisée ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X}.

Remarque 3.4.

La courbe X𝑋X est une rabotée d’elle-même si et seulement si S𝑆S constitue une triangulation de X𝑋X. La notion de rabotée n’est donc utile que dans le cas contraire. Remarquons qu’une rabotée Xsuperscript𝑋X^{\circ} de X𝑋X relativement à S𝑆S contient toujours S𝑆S en tant qu’ensemble des sommets du squelette de la triangulation de Xsuperscript𝑋X^{\circ} définie par S𝑆S, et que la donnée d’une rabotée de X𝑋X est équivalente au choix de la famille (xI~)Isubscript~subscript𝑥𝐼𝐼\left(\widetilde{x_{I}}\right)_{I\in\mathscr{I}}.

Proposition 3.5.

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytique connexe quasi-lisse munie d’une triangulation généralisée S𝑆S non vide de squelette ΓΓ\Gamma. Notons Xsuperscript𝑋X^{\circ} une rabotée de X𝑋X relativement à S𝑆S. Alors les deux semi-graphes d’anabélioïdes 𝒢(X,S)𝒢superscript𝑋𝑆\mathcal{G}(X^{\circ},S) et 𝒢(X,S)𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}(X,S) sont isomorphes. Ainsi, tous les groupes des arêtes (que celles-ci soient ouvertes ou fermées) sont isomorphes à ^(p)superscript^superscript𝑝\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}.

Démonstration.

L’application r()maps-to𝑟\mathcal{I}\mapsto r(\mathcal{I}) établit une bijection entre les composantes connexes de XS𝑋𝑆X\setminus S qui ne sont ni des disques ni des couronnes, et l’ensemble \mathscr{I} (cf. définition 3.3) des composantes connexes de ΓSΓ𝑆\Gamma\setminus S non relativement compactes dans ΓΓ\Gamma dont la préimage par r𝑟r n’est pas une couronne. Soit (xI~)Isubscript~subscript𝑥𝐼𝐼(\widetilde{x_{I}})_{I\in\mathscr{I}} la famille de ΓΓ\Gamma permettant de définir Xsuperscript𝑋X^{\circ}. Eu égard à la construction de 𝒢(X,S)𝒢superscript𝑋𝑆\mathcal{G}(X^{\circ},S) et 𝒢(X,S)𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}(X,S), il suffit de montrer que pour toute arête ouverte e𝑒e de 𝒢(X,S)𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}(X,S) (telle que la composante esubscript𝑒\mathcal{I}_{e} corresponde à Iesubscript𝐼𝑒I_{e}\in\mathscr{I}), le foncteur Covt(e)Covt(r1(]xIe,xIe~[))\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{I}_{e})\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}\left(r^{-1}\left(\;]x_{I_{e}},\widetilde{x_{I_{e}}}[\;\right)\right) induit naturellement par l’injection r1(]xIe,xIe~[)er^{-1}\left(\;]x_{I_{e}},\widetilde{x_{I_{e}}}[\;\right)\hookrightarrow\mathcal{I}_{e} est une équivalence de catégories. Comme r1(]xIe,xIe~[)r^{-1}\left(\;]x_{I_{e}},\widetilde{x_{I_{e}}}[\;\right) est une couronne et que tout revêtement galoisien modéré d’une couronne est kummérien, on a

π1t(r1(]xIe,xIe~[))=^(p).\pi_{1}^{\mathrm{t}}\left(r^{-1}(\;]x_{I_{e}},\widetilde{x_{I_{e}}}[\;)\right)=\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}.

Soit (Jk=]xIe,yk[)k\left(J_{k}=]x_{I_{e}},y_{k}[\right)_{k\in\mathbb{N}} une suite exhaustive de sous-intervalles emboités de Iesubscript𝐼𝑒I_{e}, avec JkJk+1subscript𝐽𝑘subscript𝐽𝑘1J_{k}\subseteq J_{k+1}. Pour tout k𝑘k\in\mathbb{N}, notons 𝒞k=r1(Jk)subscript𝒞𝑘superscript𝑟1subscript𝐽𝑘\mathcal{C}_{k}=r^{-1}(J_{k}) : c’est une couronne k𝑘k-analytique. Remarquons que 𝒞ksubscript𝒞𝑘\mathcal{C}_{k} est une sous-couronne de 𝒞ksubscript𝒞superscript𝑘\mathcal{C}_{k^{\prime}} dès que k<k𝑘superscript𝑘k<k^{\prime}, d’où l’équivalence de catégories Covt(𝒞k)Covt(𝒞k)similar-tosuperscriptCovtsubscript𝒞𝑘superscriptCovtsuperscriptsubscript𝒞𝑘\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{C}_{k})\xrightarrow{\sim}\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{C}_{k}^{\prime}). Comme chaque Covt(𝒞k)superscriptCovtsubscript𝒞𝑘\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{C}_{k}) est équivalente à (^(p))superscript^superscript𝑝\mathcal{B}\left(\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}\right) et que l’on a :

e=limk𝒞k,subscript𝑒subscriptinjective-limit𝑘subscript𝒞𝑘\mathcal{I}_{e}=\varinjlim_{k\in\mathbb{N}}\mathcal{C}_{k},

alors on obtient en passant à la limite inductive Covt(e)(^(p))similar-to-or-equalssuperscriptCovtsubscript𝑒superscript^superscript𝑝\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{I}_{e})\simeq\mathcal{B}\left(\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}\right), d’où l’équivalence souhaitée Covt(e)Covt(r1(]xIe,xIe~[))\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{I}_{e})\xrightarrow{\sim}\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}\left(r^{-1}\left(\;]x_{I_{e}},\widetilde{x_{I_{e}}}[\;\right)\right).

La proposition précédente nous indique qu’étudier le semi-graphe d’anabélioïdes d’une courbe munie d’une triangulation généralisée revient à étudier le semi-graphe d’anabélioïde d’une courbe munie d’une vraie triangulation. Par conséquent, toutes les arêtes de 𝒢(X,S)𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}(X,S) se comportent comme si elles étaient associées à de vraies couronnes en ce qu’elles ont chacun pour groupe associé ^(p)superscript^superscript𝑝\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}. Il est ainsi justifiable d’appeler composantes coronaires d’une triangulation généralisée toutes les arêtes (ou les composantes associées aux arêtes) de son semi-graphe d’anabélioïdes.

Remarque 3.6.

On peut montrer que le morphisme π1temp(X)π1temp(X)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑋superscriptsubscript𝜋1temp𝑋\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X^{\circ})\rightarrow\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X) induit par le plongement XXsuperscript𝑋𝑋X^{\circ}\hookrightarrow X induit un isomorphisme de groupes :

π1temp,(p)(X)π1temp,(p)(X).similar-tosuperscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝superscript𝑋superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝𝑋\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X^{\circ})\xrightarrow{\sim}\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X).

Ainsi, une courbe et sa rabotée sont indistinguables sous le prisme des revêtements (tempérés) modérés. En revanche ils n’auront plus du tout les mêmes p𝑝p-revêtements, et le morphisme π1temp(X)π1temp(X)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑋superscriptsubscript𝜋1temp𝑋\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X^{\circ})\rightarrow\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X) n’a aucune chance d’être un isomorphisme dès que XXsuperscript𝑋𝑋{X}^{\circ}\varsubsetneq X.

3.1.3 Germes d’espaces k𝑘k-analytiques

Commençons par rappeler la définition de la catégorie des germes d’espaces k𝑘k-analytiques :

Un germe k𝑘k-analytique est une paire (X,S)𝑋𝑆(X,S)X𝑋X est un espace k𝑘k-analytique et S𝑆S un sous-espace de l’espace topologique sous-jacent |X|𝑋|X|. Si xX𝑥𝑋x\in X, le germe (X,{x})𝑋𝑥(X,\{x\}) est simplement noté (X,x)𝑋𝑥(X,x). Soit k𝑘k-𝒢𝒢\mathscr{G} la catégorie dont les objets sont les germes d’espaces k𝑘k-analytiques et les morphismes entre deux germes (Y,T)𝑌𝑇(Y,T) et (X,S)𝑋𝑆(X,S) sont les morphismes d’espaces analytiques φ:YX:𝜑𝑌𝑋\varphi:Y\to X tels que φ(T)S𝜑𝑇𝑆\varphi(T)\subseteq S. La catégorie des germes k𝑘k-analytiques, notée k𝑘k-𝐺𝑒𝑟𝑚𝐺𝑒𝑟𝑚\mathit{Germ}, est définie comme la localisée de la catégorie k𝑘k-𝒢𝒢\mathscr{G} par la famille des morphismes φ:(Y,T)(X,S):𝜑𝑌𝑇𝑋𝑆\varphi:(Y,T)\to(X,S) induisant un isomorphisme de Y𝑌Y vers un voisinage ouvert de S𝑆S dans X𝑋X. Cette famille admet un «  calcul des fractions à droite   », se sorte que dans cette catégorie l’ensemble des morphismes Homk𝐺𝑒𝑟𝑚((Y,T),(X,S))subscriptHom𝑘𝐺𝑒𝑟𝑚𝑌𝑇𝑋𝑆\mathrm{Hom}_{k-\mathit{Germ}}((Y,T),(X,S)) correspond à la limite inductive de l’ensemble des morphismes k𝑘k-analytiques φ:𝒱X:𝜑𝒱𝑋\varphi:\mathscr{V}\to X𝒱𝒱\mathscr{V} décrit les voisinages ouverts de T𝑇T dans Y𝑌Y, et φ(T)S𝜑𝑇𝑆\varphi(T)\subseteq S. Un tel morphisme k𝑘k-analytique φ:𝒱X:𝜑𝒱𝑋\varphi:\mathscr{V}\to X correspondant à un morphisme de germes ψ:(Y,T)(X,S):𝜓𝑌𝑇𝑋𝑆\psi:(Y,T)\to(X,S) est un représentant de ψ𝜓\psi. Tout morphisme de germes k𝑘k-analytiques admet un représentant, et un morphisme ψ:(Y,T)(X,S):𝜓𝑌𝑇𝑋𝑆\psi:(Y,T)\to(X,S) est un isomorphisme dans k𝑘k-𝐺𝑒𝑟𝑚𝐺𝑒𝑟𝑚\mathit{Germ} si et seulement s’il admet un représentant induisant un isomorphisme k𝑘k-analytique entre des voisinages ouverts de T𝑇T et S𝑆S.


Définition 3.7.

Un morphisme de germes k𝑘k-analytiques ψ:(Y,T)(X,x):𝜓𝑌𝑇𝑋𝑥\psi:(Y,T)\rightarrow(X,x) sera appelé un revêtement modéré fini (resp. revêtement fini étale) de (X,x)𝑋𝑥(X,x) s’il admet au moins un représentant φ:𝒱X:𝜑𝒱𝑋\varphi:\mathscr{V}\to X tel que 𝒱φ(𝒱)𝒱𝜑𝒱\mathscr{V}\to\varphi(\mathscr{V}) est un revêtement modéré fini ((resp. fini étale) d’espaces k𝑘k-analytiques, et T=φ1(x)𝑇superscript𝜑1𝑥T=\varphi^{-1}(x). Nous noterons par la suite Covt((X,x))superscriptCovt𝑋𝑥\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}((X,x)) (resp. Covfe´t((X,x))superscriptCovf´et𝑋𝑥\mathrm{Cov}^{\mathrm{f\acute{e}t}}((X,x))) les catégories respectives de ces revêtements du germe (X,x)𝑋𝑥(X,x).

Si X𝑋X désigne notre courbe k𝑘k-analytique quasi-lisse de départ, S𝑆S une triangulation généralisée et sS𝑠𝑆s\in S, remarquons que l’on a, au sens 222-catégorique :

Covt((X,s)):=limUCovt(U)assignsuperscriptCovt𝑋𝑠subscriptinjective-limit𝑈superscriptCovt𝑈\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}((X,s)):=\varinjlim_{U}\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U)

U𝑈U décrit l’ensemble des voisinages ouverts de s𝑠s.

Si 𝒞𝒞(X,S)𝒞𝒞𝑋𝑆\mathcal{C}\in\mathcal{C}(X,S) et 𝒟𝒟(X,S)𝒟𝒟𝑋𝑆\mathcal{D}\in\mathcal{D}(X,S), définissons de même :

Covt(𝒞(X,s))superscriptCovt𝒞𝑋𝑠\displaystyle\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{C}\cap(X,s)) :=limUCovt(𝒞U)assignabsentsubscriptinjective-limit𝑈superscriptCovt𝒞𝑈\displaystyle:=\varinjlim_{U}\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{C}\cap U)
Covt(𝒟(X,s))superscriptCovt𝒟𝑋𝑠\displaystyle\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{D}\cap(X,s)) :=limUCovt(𝒟U).assignabsentsubscriptinjective-limit𝑈superscriptCovt𝒟𝑈\displaystyle:=\varinjlim_{U}\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{D}\cap U).

La proposition suivante signifie que les comportements locaux des revêtements modérés autour de s𝑠s sont équivalents aux produits d’extensions finies du corps résiduel complété (s)𝑠\mathscr{H}(s) dominées par une extension galoisienne de degré premier à p𝑝p.

Proposition 3.8.

Le foncteur naturel Covt((X,s))Covt((s))superscriptCovt𝑋𝑠superscriptCovt𝑠\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}((X,s))\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathscr{H}(s)) est une équivalence de catégories, où Covt((s))superscriptCovt𝑠\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathscr{H}(s)) désigne la catégorie des schémas finis étales au-dessus de Spec((s))Spec𝑠\mathrm{Spec}(\mathscr{H}(s)) dominés par un revêtement galoisien de degré premier à p𝑝p.

Démonstration.

Cela découle directement du théorème 3.4.13413.4.1 de [Ber222] qui nous indique que le foncteur naturel Covfe´t((X,s))Covfe´t((s))superscriptCovf´et𝑋𝑠superscriptCovf´et𝑠\mathrm{Cov}^{\mathrm{f\acute{e}t}}((X,s))\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{f\acute{e}t}}(\mathscr{H}(s)) est une équivalence de catégories, où Covfe´t((s))superscriptCovf´et𝑠\mathrm{Cov}^{\mathrm{f\acute{e}t}}(\mathscr{H}(s)) désigne la catégorie des schémas finis étales au-dessus de Spec((s))Spec𝑠\mathrm{Spec}(\mathscr{H}(s)). ∎

Lemme 3.9.

Considérons deux domaines analytiques U1subscript𝑈1U_{1} et U2subscript𝑈2U_{2} de XS𝑋𝑆X\setminus S qui sont des couronnes k𝑘k-analytiques aboutissant à s𝑠s, avec U1U2subscript𝑈1subscript𝑈2U_{1}\subseteq U_{2}. Alors le plongement U1U2subscript𝑈1subscript𝑈2{U_{1}\hookrightarrow U_{2}} induit une équivalence de catégories : Covt(U2)Covt(U1)similar-tosuperscriptCovtsubscript𝑈2superscriptCovtsubscript𝑈1\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U_{2})\xrightarrow{\sim}\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U_{1}).

Démonstration.

De manière générale, il se peut qu’une couronne analytique U1subscript𝑈1U_{1} contenue dans une deuxième couronne analytique U2subscript𝑈2U_{2} ne soit pas une sous-couronne de cette dernière (voir définition 2.11)). Les domaines analytiques de k1,ansuperscriptsubscript𝑘1an\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}} donnés par les conditions |Tp|]0,1p[{|T-p|\in]0,\frac{1}{p}[} et |T|]0,1[{|T|\in]0,1[} en sont des exemples. Néanmoins, U1subscript𝑈1U_{1} est une sous-couronne de U2subscript𝑈2U_{2} dès que l’intersection des squelettes San(U1)San(U2)superscript𝑆ansubscript𝑈1superscript𝑆ansubscript𝑈2S^{\mathrm{an}}(U_{1})\cap S^{\mathrm{an}}(U_{2}) est non vide. Or, dans le cadre de ce lemme, l’inclusion U1U2subscript𝑈1subscript𝑈2U_{1}\subseteq U_{2} et le fait que U1subscript𝑈1U_{1} et U2subscript𝑈2U_{2} aient un bout en commun impliquent qu’il existe x1,x2subscript𝑥1subscript𝑥2x_{1},x_{2} et yX𝑦𝑋y\in X tels que San(U1)=]s,x1[S^{\mathrm{an}}(U_{1})=]s,x_{1}[, San(U2)=]s,x2[S^{\mathrm{an}}(U_{2})=]s,x_{2}[ et San(U1)San(U2)=]s,y[S^{\mathrm{an}}(U_{1})\cap S^{\mathrm{an}}(U_{2})=]s,y[\neq\emptyset. Ainsi U1subscript𝑈1U_{1} est une sous-couronne de U2subscript𝑈2U_{2}. D’après la proposition 2.29 combinée au caractère kummérien des revêtements modérés d’une couronne, on a l’équivalence Covt(U1)Covt(U2)similar-tosuperscriptCovtsubscript𝑈1superscriptCovtsubscript𝑈2{\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U_{1})\xrightarrow{\sim}\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U_{2})}.

Lemme 3.10.

Pour toute composante T𝖢𝗈𝗆𝗉(X,S,s)𝑇𝖢𝗈𝗆𝗉𝑋𝑆𝑠T\in\mathsf{Comp}(X,S,s) la catégorie Covt(T(X,s))superscriptCovt𝑇𝑋𝑠\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(T\cap(X,s)) est équivalente à la catégorie (^(p))superscript^superscript𝑝\mathcal{B}(\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}) des ^(p)superscript^superscript𝑝\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}-ensembles finis, et si T𝒞(X,S,s)𝑇𝒞𝑋𝑆𝑠T\in\mathcal{C}(X,S,s) le foncteur de restriction Covt(T)Covt(T(X,s))superscriptCovt𝑇superscriptCovt𝑇𝑋𝑠\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(T)\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(T\cap(X,s)) est une équivalence de catégorie.

Démonstration.

D’après la sous-section 3.1.2 on peut supposer que S𝑆S est une vraie triangulation de X𝑋X. Soit T𝖢𝗈𝗆𝗉(X,S,s)𝑇𝖢𝗈𝗆𝗉𝑋𝑆𝑠T\in\mathsf{Comp}(X,S,s), et soit (Ui)isubscriptsubscript𝑈𝑖𝑖(U_{i})_{i} une base de voisinages ouverts de s𝑠s telle que chaque UiTsubscript𝑈𝑖𝑇U_{i}\cap T soit une couronne (une telle base d’ouverts existe toujours). Si UiUjsubscript𝑈𝑖subscript𝑈𝑗U_{i}\subset U_{j} alors UiTUjTsubscript𝑈𝑖𝑇subscript𝑈𝑗𝑇U_{i}\cap T\rightarrow U_{j}\cap T est un plongement de couronnes, d’où l’on déduit d’après le lemme 3.9 précédent que le foncteur de restriction Covt(UjT)Covt(UiT)superscriptCovtsubscript𝑈𝑗𝑇superscriptCovtsubscript𝑈𝑖𝑇\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U_{j}\cap T)\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U_{i}\cap T) est une équivalence de catégories. Par ailleurs ces équivalences sont compatibles avec l’identification des Covt(UiT)superscriptCovtsubscript𝑈𝑖𝑇\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U_{i}\cap T) à (^(p))superscript^superscript𝑝\mathcal{B}(\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}). On obtient donc en passant à la limite inductive que Covt((X,s)T)superscriptCovt𝑋𝑠𝑇\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}((X,s)\cap T) est elle-même équivalente à (^(p))superscript^superscript𝑝\mathcal{B}(\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}), ainsi que l’équivalence lorsque T𝑇T est une couronne. ∎

Proposition 3.11.

Soit (X,S={s})𝑋𝑆𝑠(X,S=\{s\}) une courbe k𝑘k-analytique connexe quasi-lisse munie d’une triangulation possédant un unique sommet, et dont le squelette ne contient aucune arête qui boucle sur s𝑠s :

  1. 1.

    Soit U𝑈U un voisinage ouvert de s𝑠s totalement découpé autour de s𝑠s. Alors le foncteur naturel Covt(X)Covt(U)superscriptCovt𝑋superscriptCovt𝑈\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(X)\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U) induit par l’injection UX𝑈𝑋U\hookrightarrow X est pleinement fidèle et son image essentielle est constituée des objets de Covt(U)superscriptCovt𝑈\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U) qui sont triviaux sur tout disque de 𝖢𝗈𝗆𝗉(X,S,s)𝖢𝗈𝗆𝗉𝑋𝑆𝑠\mathsf{Comp}(X,S,s), i.e. dont l’image par le foncteur de restriction Covt(U)Covt(𝒟U)superscriptCovt𝑈superscriptCovt𝒟𝑈\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U)\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{D}\cap U) est triviale pour tout 𝒟𝒟(X,S)𝒟𝒟𝑋𝑆\mathcal{D}\in\mathcal{D}(X,S).

  2. 2.

    Le foncteur de restriction Covt(X)Covt((X,s))superscriptCovt𝑋superscriptCovt𝑋𝑠\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(X)\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}((X,s)) est pleinement fidèle et son image essentielle est constituée des objets de Covt((X,s))superscriptCovt𝑋𝑠\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}((X,s)) qui sont triviaux sur tout disque de 𝖢𝗈𝗆𝗉(X,S,s)𝖢𝗈𝗆𝗉𝑋𝑆𝑠\mathsf{Comp}(X,S,s), i.e. dont l’image par le foncteur de restriction Covt((X,s))Covt(𝒟(X,s))superscriptCovt𝑋𝑠superscriptCovt𝒟𝑋𝑠\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}((X,s))\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{D}\cap(X,s)) est triviale pour tout 𝒟𝒟(X,S)𝒟𝒟𝑋𝑆\mathcal{D}\in\mathcal{D}(X,S).

Démonstration.
  1. 1.

    Considérons le recouvrement ouvert de X𝑋X suivant : 𝒰:=U(T)T𝖢𝗈𝗆𝗉(X,S,s)assign𝒰𝑈subscript𝑇𝑇𝖢𝗈𝗆𝗉𝑋𝑆𝑠\mathcal{U}:=U\cup(T)_{T\in\mathsf{Comp}(X,S,s)}.

    Une donnée de descente sur 𝒰𝒰\mathcal{U} consiste en la donnée de (YU,(YT,φT)T)subscript𝑌𝑈subscriptsubscript𝑌𝑇subscript𝜑𝑇𝑇(Y_{U},(Y_{T},\varphi_{T})_{T})YUCovt(U)subscript𝑌𝑈superscriptCovt𝑈Y_{U}\in\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U), YTCovt(T)subscript𝑌𝑇superscriptCovt𝑇Y_{T}\in\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(T) et pour toute composante T𝖢𝗈𝗆𝗉(X,S,s)𝑇𝖢𝗈𝗆𝗉𝑋𝑆𝑠T\in\mathsf{Comp}(X,S,s) un isomorphisme

    φT:YU UTYT UT.:subscript𝜑𝑇similar-tosubscript𝑌𝑈subscript 𝑈𝑇subscript𝑌𝑇subscript 𝑈𝑇\varphi_{T}:\mathchoice{{Y_{U}\,\smash{\vrule height=5.46666pt,depth=1.62633pt}}_{\,U\cap T}}{{Y_{U}\,\smash{\vrule height=5.46666pt,depth=1.62633pt}}_{\,U\cap T}}{{Y_{U}\,\smash{\vrule height=3.82666pt,depth=1.16167pt}}_{\,U\cap T}}{{Y_{U}\,\smash{\vrule height=2.73332pt,depth=1.16167pt}}_{\,U\cap T}}\xrightarrow{\sim}\mathchoice{{Y_{T}\,\smash{\vrule height=5.46666pt,depth=1.62633pt}}_{\,U\cap T}}{{Y_{T}\,\smash{\vrule height=5.46666pt,depth=1.62633pt}}_{\,U\cap T}}{{Y_{T}\,\smash{\vrule height=3.82666pt,depth=1.16167pt}}_{\,U\cap T}}{{Y_{T}\,\smash{\vrule height=2.73332pt,depth=1.16167pt}}_{\,U\cap T}}.

    Les conditions usuelles sur les 111-cocycles sont ici tautologiques puisque l’intersection de trois des composantes ouvertes de 𝒰𝒰\mathcal{U} est automatiquement vide. Par descente topologique nous savons que la catégorie Covt(X)superscriptCovt𝑋\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(X) est équivalente à la catégorie des données de descente sur 𝒰𝒰\mathcal{U}. Comme par ailleurs le foncteur de restriction Covt(T)Covt(UT)superscriptCovt𝑇superscriptCovt𝑈𝑇\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(T)\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U\cap T) est toujours pleinement fidèle (si T𝑇T est un disque cela découle de la trivialité de tout revêtement modéré sur T𝑇T, et si T𝑇T est une couronne cela découle du lemme 3.9), alors le foncteur Covt(X)Covt(U)superscriptCovt𝑋superscriptCovt𝑈\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(X)\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U) est pleinement fidèle.

    Son image essentielle consiste en la donnée des éléments de Covt(U)superscriptCovt𝑈\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U) dont l’image par le foncteur de restriction Covt(U)Covt(UT)superscriptCovt𝑈superscriptCovt𝑈𝑇\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U)\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U\cap T) est dans l’image essentielle de Covt(T)Covt(UT)superscriptCovt𝑇superscriptCovt𝑈𝑇\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(T)\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U\cap T) pour toute composante T𝖢𝗈𝗆𝗉(X,S,s)𝑇𝖢𝗈𝗆𝗉𝑋𝑆𝑠T\in\mathsf{Comp}(X,S,s). Or nous savons d’après 3.9 que si T𝑇T est une couronne ce dernier foncteur est une équivalence de catégories et que si T𝑇T est un disque tout revêtement modéré de T𝑇T est trivial, de là l’on déduit le résultat.

  2. 2.

    Soit (Ui)isubscriptsubscript𝑈𝑖𝑖(U_{i})_{i} la famille de voisinages ouverts de s𝑠s totalement découpés autour de s𝑠s. Nous savons que cette famille forme une base de voisinages ouverts de s𝑠s. Par le premier point démontré ci-dessus l’on sait que si UiUjsubscript𝑈𝑖subscript𝑈𝑗U_{i}\subset U_{j} le foncteur Covt(Uj)Covt(Ui)superscriptCovtsubscript𝑈𝑗superscriptCovtsubscript𝑈𝑖\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U_{j})\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U_{i}) est pleinement fidèle. En passant à la limite inductive on obtient que tous les foncteurs Covt(Uj)Covt((X,s))superscriptCovtsubscript𝑈𝑗superscriptCovt𝑋𝑠\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U_{j})\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}((X,s)) sont pleinement fidèles. Comme les Covt(X)Covt(Ui)superscriptCovt𝑋superscriptCovtsubscript𝑈𝑖\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(X)\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U_{i}) sont eux-mêmes pleinement fidèles d’après le premier point, alors par transitivité le foncteur Covt(X)Covt((X,s))superscriptCovt𝑋superscriptCovt𝑋𝑠\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(X)\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}((X,s)) est lui-même pleinement fidèle.

    Cherchons son image essentielle. Si ZCovt((X,s))𝑍superscriptCovt𝑋𝑠Z\in\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}((X,s)) est dans l’image essentielle, alors il découle de la trivialité de tout revêtement modéré d’un disque que sa restriction à 𝒟(X,s)𝒟𝑋𝑠\mathcal{D}\cap(X,s) est triviale pour tout 𝒟𝒟(X,S)𝒟𝒟𝑋𝑆\mathcal{D}\in\mathcal{D}(X,S). Soit réciproquement YCovt((X,s))𝑌superscriptCovt𝑋𝑠Y\in\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}((X,s)) tel que sa restriction à 𝒟(X,s)𝒟𝑋𝑠\mathcal{D}\cap(X,s) soit triviale pour tout 𝒟𝒟(X,S)𝒟𝒟𝑋𝑆\mathcal{D}\in\mathcal{D}(X,S). Il en existe alors un représentant YiCovt(Ui)subscript𝑌𝑖superscriptCovtsubscript𝑈𝑖Y_{i}\in\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U_{i}) pour un certain voisinage Uisubscript𝑈𝑖U_{i} totalement découpé autour de s𝑠s. Si 𝒟Ui𝒟subscript𝑈𝑖\mathcal{D}\cap U_{i} est un disque, alors la restriction de Yisubscript𝑌𝑖Y_{i} à 𝒟Ui𝒟subscript𝑈𝑖\mathcal{D}\cap U_{i} est automatiquement triviale, et si 𝒟Ui𝒟subscript𝑈𝑖\mathcal{D}\cap U_{i} est une couronne nous savons d’après le lemme 3.10 que le foncteur de restriction Covt(𝒟Ui)Covt(𝒟(X,s))superscriptCovt𝒟subscript𝑈𝑖superscriptCovt𝒟𝑋𝑠\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{D}\cap U_{i})\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{D}\cap(X,s)) est une équivalence de catégorie, donc la restriction de Yisubscript𝑌𝑖Y_{i} à 𝒟Ui𝒟subscript𝑈𝑖\mathcal{D}\cap U_{i} est également triviale. Par le premier point de la proposition cela nous indique que Yisubscript𝑌𝑖Y_{i} est dans l’image essentielle de Covt(X)Covt(Ui)superscriptCovt𝑋superscriptCovtsubscript𝑈𝑖\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(X)\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(U_{i}), ce qui nous permet de conclure que Y𝑌Y est bien dans l’image essentielle de Covt(X)Covt((X,s))superscriptCovt𝑋superscriptCovt𝑋𝑠\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(X)\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}((X,s)), ce qui termine la preuve.

3.1.4 Courbe résiduelle, valuation associée à une branche et groupe d’inertie modérée autour d’un point de type 2

Supposons que x𝑥x est un point de type 222 de X𝑋X. Alors le corps résiduel (x)~~𝑥\widetilde{\mathscr{H}(x)} est une extension de k~~𝑘\widetilde{k} de type fini et de degré de transcendance 111. Ainsi (x)~~𝑥\widetilde{\mathscr{H}(x)} est de la forme k~(𝒞x)~𝑘subscript𝒞𝑥\widetilde{k}(\mathscr{C}_{x})𝒞xsubscript𝒞𝑥\mathscr{C}_{x} est une k~~𝑘\widetilde{k}-courbe projective, lisse et intègre qui est uniquement déterminée par x𝑥x et que l’on appellera la courbe résiduelle en x𝑥x. Rappelons que le genre de x𝑥x, noté g(x)𝑔𝑥g(x), est défini comme le genre de la courbe résiduelle 𝒞xsubscript𝒞𝑥\mathscr{C}_{x} lorsque x𝑥x est de type 222 (il est égal à 00 sinon). L’espace (topologique) de Zariski-Riemann (x)~/k~subscript~𝑥~𝑘\mathbb{P}_{\widetilde{\mathscr{H}(x)}/\widetilde{k}} des valuations sur (x)~~𝑥\widetilde{\mathscr{H}(x)} triviales sur k~~𝑘\widetilde{k} est alors homéomorphe à l’espace topologique sous-jacent au schéma 𝒞xsubscript𝒞𝑥\mathscr{C}_{x} : au point générique correspond la valuation triviale et à chaque point fermé correspond une valuation discrète.

Dans [Duc], (4.2.6)426(4.2.6), l’auteur associe à chaque branche bbr(X,x)𝑏br𝑋𝑥b\in\mathrm{br}(X,x) une valuation .b\langle.\rangle_{b} sur (x)~~𝑥\widetilde{\mathscr{H}(x)} triviale sur k~~𝑘\widetilde{k}, ie. un élément de (x)~/k~subscript~𝑥~𝑘\mathbb{P}_{\widetilde{\mathscr{H}(x)}/\widetilde{k}}. En composant .b\langle.\rangle_{b} avec la valuation |.|x|.|_{x} définie naturellement sur (x)𝑥\mathscr{H}(x) l’on obtient une valuation |.|b|.|_{b} sur (x)𝑥\mathscr{H}(x) qui raffine par construction |.|x|.|_{x} et coïncide avec celle-ci sur k𝑘k.

En notant .0\langle.\rangle_{0} la valuation triviale sur (x)~~𝑥\widetilde{\mathscr{H}(x)}, Ducros déduit de la théorie de la réduction de Temkin ([Tem]) que l’application b.bb\mapsto\langle.\rangle_{b} établit une injection

br(X,x)(x)~/k~{.0}\mathrm{br}(X,x)\hookrightarrow\mathbb{P}_{\widetilde{\mathscr{H}(x)}/\widetilde{k}}\setminus\{\langle.\rangle_{0}\}

dont l’image est de complémentaire fini, et qui est bijective si et seulement si x𝑥x appartient à l’intérieur analytique de X𝑋X. La réunion de l’image et de la valuation triviale correspond à la réduction de Temkin du germe (X,x)𝑋𝑥(X,x).

Remarque 3.12.

Ducros établit en fait un résultat un peu plus général en faisant usage de valuations graduées. Néanmoins, comme x𝑥x est de type 222, nous n’en avons pas besoin dans ce texte, et toutes les valuations considérées sont des valuations classiques.

Puisque x𝑥x est de type 222, ce dernier résultat se reformule comme suit : l’application qui à une branche b𝑏b associe la valuation .b\langle.\rangle_{b} sur (x)~=k~(𝒞x)~𝑥~𝑘subscript𝒞𝑥\widetilde{\mathscr{H}(x)}=\widetilde{k}(\mathscr{C}_{x}) induit une injection dont l’image est de complémentaire fini de br(X,x)br𝑋𝑥\mathrm{br}(X,x) dans l’ensemble k~(𝒞x)/k~{.0}\mathbb{P}_{\widetilde{k}(\mathscr{C}_{x})/\widetilde{k}}\setminus\{\langle.\rangle_{0}\}. Comme ce dernier s’identifie à l’ensemble des points fermés de 𝒞xsubscript𝒞𝑥\mathscr{C}_{x}, cela revient à une bijection entre br(X,x)br𝑋𝑥\mathrm{br}(X,x) et l’ensemble des points fermés d’un ouvert de Zariski 𝒰xsubscript𝒰𝑥\mathscr{U}_{x} de 𝒞xsubscript𝒞𝑥\mathscr{C}_{x}, égal à 𝒞xsubscript𝒞𝑥\mathscr{C}_{x} tout entier si et seulement si x𝑥x est dans l’intérieur analytique de X𝑋X.

Soit bbr(X,x)𝑏br𝑋𝑥b\in\mathrm{br}(X,x) une branche issue de x𝑥x. Dans [Duc] l’auteur définit l’anneau associé à b𝑏b, noté 𝒪X(b)subscript𝒪𝑋𝑏\mathscr{O}_{X}(b), par la limite inductive :

𝒪X(b)=limV𝒪X(V)subscript𝒪𝑋𝑏subscriptinjective-limit𝑉subscript𝒪𝑋𝑉\mathscr{O}_{X}(b)=\varinjlim_{V}\mathscr{O}_{X}(V)

V𝑉V décrit l’ensemble des sections de b𝑏b. Il existe un morphisme naturel de 𝒪X,xsubscript𝒪𝑋𝑥\mathscr{O}_{X,x} dans 𝒪X(b)subscript𝒪𝑋𝑏\mathscr{O}_{X}(b). En tant que courbe quasi-lisse notre courbe X𝑋X est normale. En conséquence l’anneau local 𝒪X,xsubscript𝒪𝑋𝑥\mathscr{O}_{X,x} est artinien et intègre, c’est donc un corps qui coïncide alors avec son corps résiduel κ(x)𝜅𝑥\kappa(x). Par ailleurs toute section Z𝑍Z de b𝑏b est un espace non vide, connexe et normal, par conséquent 𝒪X(Z)subscript𝒪𝑋𝑍\mathscr{O}_{X}(Z) est intègre, et par passage à la limite on en déduit que 𝒪X(b)subscript𝒪𝑋𝑏\mathscr{O}_{X}(b) lui-même est intègre. Le corps κ(x)𝜅𝑥\kappa(x) coïncidant avec 𝒪X,xsubscript𝒪𝑋𝑥\mathscr{O}_{X,x}, il se plonge dans 𝒪X(b)subscript𝒪𝑋𝑏\mathscr{O}_{X}(b).

Définition 3.13.

Notons 𝒪X(b)sepsubscript𝒪𝑋subscript𝑏sep\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}} la fermeture intégrale séparable de κ(x)𝜅𝑥\kappa(x) dans l’anneau 𝒪X(b)subscript𝒪𝑋𝑏\mathscr{O}_{X}(b); c’est un corps naturellement muni d’une valuation prolongeant la valuation |.|b|.|_{b} sur κ(x)𝜅𝑥\kappa(x) (qui est elle-même la restriction à κ(x)𝜅𝑥\kappa(x) de la valuation |.|b|.|_{b} définie sur (x)𝑥\mathscr{H}(x), κ(x)𝜅𝑥\kappa(x) étant dense dans (x)𝑥\mathscr{H}(x) car X𝑋X est un bon espace) que nous continuerons à noter |.|b|.|_{b} et qui jouit de la propriété suivante :

Proposition 3.14 ([Duc08], Proposition 3.6363.6 ; [Duc], Théorème 4.2.1942194.2.19).

Le corps valué (𝒪X(b)sep,|.|b)(\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}},|.|_{b}) est le hensélisé de (κ(x),|.|b)(\kappa(x),|.|_{b}).

En tant que hensélisé (𝒪X(b)sep,|.|b)(\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}},|.|_{b}) est une extension immédiate de (κ(x),|.|b)(\kappa(x),|.|_{b}), i.e. ces deux corps valués ont même groupe de valeurs et même corps résiduel :

  • groupe des valeurs : Si l’on note 𝒞esubscript𝒞𝑒\mathcal{C}_{e} la couronne correspondant à l’arête e𝑒e associée à la branche b𝑏b, le Théorème 4.3.54354.3.5 de [Duc] nous indique qu’il existe une fonction λκ(x)=𝒪X,x𝜆𝜅𝑥subscript𝒪𝑋𝑥\lambda\in\kappa(x)=\mathscr{O}_{X,x} définie sur 𝒞esubscript𝒞𝑒\mathcal{C}_{e}, qui en est une fonction coordonnée, telle que |λ|bsubscript𝜆𝑏|\lambda|_{b} soit infiniment proche de 111 inférieurement, et telle que :

    |κ(x)×|b=|𝒪X(b)sep×|b=|k×||λ|bsubscript𝜅superscript𝑥𝑏subscriptsubscript𝒪𝑋superscriptsubscript𝑏sep𝑏direct-sumsuperscript𝑘superscriptsubscript𝜆𝑏|\kappa(x)^{\times}|_{b}=|\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}}^{\times}|_{b}=|k^{\times}|\oplus|\lambda|_{b}^{\mathbb{Z}}
  • corps résiduel : Les corps résiduels associés κ(x)~bsubscript~𝜅𝑥𝑏\widetilde{\kappa(x)}_{b} et 𝒪X(b)sep~~subscript𝒪𝑋subscript𝑏sep\widetilde{\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}}} sont égaux à k~~𝑘\widetilde{k}, et sont en particulier algébriquement clos.

Notons 𝒪X(b)sepssubscript𝒪𝑋superscriptsubscript𝑏seps\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}}^{\mathrm{s}} une clôture séparable du corps 𝒪X(b)sepsubscript𝒪𝑋subscript𝑏sep\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}}. Comme 𝒪X(b)sepsubscript𝒪𝑋subscript𝑏sep\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}} est hensélien la valuation sur 𝒪X(b)sepsubscript𝒪𝑋subscript𝑏sep\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}} se prolonge en une unique valuation sur 𝒪X(b)sepssubscript𝒪𝑋superscriptsubscript𝑏seps\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}}^{\mathrm{s}} encore notée |.|b|.|_{b}. Notons bsubscript𝑏\mathcal{I}_{b} et 𝒲bsubscript𝒲𝑏\mathcal{W}_{b} les groupes d’inertie et de ramification de l’extension de corps valués 𝒪X(b)seps/𝒪X(b)sepsubscript𝒪𝑋superscriptsubscript𝑏sepssubscript𝒪𝑋subscript𝑏sep\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}}^{\mathrm{s}}/\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}}, et bt=b/𝒲bsuperscriptsubscript𝑏tsubscript𝑏subscript𝒲𝑏\mathcal{I}_{b}^{\mathrm{t}}=\mathcal{I}_{b}/\mathcal{W}_{b} son groupe d’inertie modérée. Nous savons alors que l’on dispose de l’isomorphisme suivant :

bt=Hom(|𝒪X(b)seps×|b/|𝒪X(b)sep×|b,𝒪X(b)sep~×)superscriptsubscript𝑏tHomsubscriptsubscript𝒪𝑋superscriptsubscript𝑏seps𝑏subscriptsubscript𝒪𝑋superscriptsubscript𝑏sep𝑏superscript~subscript𝒪𝑋subscript𝑏sep\mathcal{I}_{b}^{\mathrm{t}}=\mathrm{Hom}(|\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}}^{\mathrm{s}\;\times}|_{b}/|\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}}^{\times}|_{b},\widetilde{\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}}}^{\times})

que l’on peut récrire de la manière suivante sachant que |𝒪X(b)sep×|b=|k×||λ|bsubscriptsubscript𝒪𝑋superscriptsubscript𝑏sep𝑏direct-sumsuperscript𝑘superscriptsubscript𝜆𝑏|\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}}^{\times}|_{b}=|k^{\times}|\oplus|\lambda|_{b}^{\mathbb{Z}} et que |k×|superscript𝑘|k^{\times}| est divisible :

bt=Hom(|λ|b/|λ|b,k~×)=Hom(/,k~×),superscriptsubscript𝑏tHomsuperscriptsubscript𝜆𝑏superscriptsubscript𝜆𝑏superscript~𝑘Homsuperscript~𝑘\mathcal{I}_{b}^{\mathrm{t}}=\mathrm{Hom}(|\lambda|_{b}^{\mathbb{Q}}/|\lambda|_{b}^{\mathbb{Z}},\widetilde{k}^{\times})=\mathrm{Hom}(\mathbb{Q}/\mathbb{Z},\widetilde{k}^{\times}),

et comme k~~𝑘\widetilde{k} est algébriquement clos de caractéristique p𝑝p on obtient : bt^(p)similar-to-or-equalssuperscriptsubscript𝑏tsuperscript^superscript𝑝\mathcal{I}_{b}^{\mathrm{t}}\simeq\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}.

Si κ(x)bs𝜅superscriptsubscript𝑥𝑏s{\kappa(x)_{b}^{\mathrm{s}}} désigne une clôture séparable de κ(x)b𝜅subscript𝑥𝑏{\kappa(x)_{b}} munie d’une valuation (encore notée |.|b|.|_{b}) prolongeant |.|b|.|_{b} sur κ(x)b𝜅subscript𝑥𝑏\kappa(x)_{b}), notons κ(x)btsuperscriptsubscript𝜅subscript𝑥𝑏t\mathcal{I}_{\kappa(x)_{b}}^{\mathrm{t}} le groupe d’inertie modérée de l’extension κ(x)bs/κ(x)b𝜅superscriptsubscript𝑥𝑏s𝜅subscript𝑥𝑏{\kappa(x)_{b}^{\mathrm{s}}}/{\kappa(x)_{b}}. Comme 𝒪X(b)sepsubscript𝒪𝑋subscript𝑏sep\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}} est le hensélisé de κ(x)b𝜅subscript𝑥𝑏\kappa(x)_{b} nous avons l’égalité des groupes d’inertie modérée :

bt=κ(x)bt^(p)superscriptsubscript𝑏tsuperscriptsubscript𝜅subscript𝑥𝑏tsimilar-to-or-equalssuperscript^superscript𝑝\mathcal{I}_{b}^{\mathrm{t}}=\mathcal{I}_{\kappa(x)_{b}}^{\mathrm{t}}\simeq\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}
Remarque 3.15.

Pour tout entier n𝑛n premier à p𝑝p, le seul quotient d’ordre n𝑛n de ^(p)superscript^superscript𝑝\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})} correspond à l’extension de 𝒪X(b)sepsubscript𝒪𝑋subscript𝑏sep\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}} obtenue en extrayant une racine n𝑛n-ième d’un élément de norme |.|b|.|_{b} égale à |λ|bsubscript𝜆𝑏|\lambda|_{b}.

3.1.5 Comportement des composantes sommitales

Proposition 3.16 ([Duc], Théorème 4.3.1343134.3.13).

Supposons que φ:YX:𝜑𝑌𝑋\varphi:Y\rightarrow X est un morphisme étale entre deux courbes k𝑘k-analytiques quasi-lisses, yY[2]𝑦subscript𝑌delimited-[]2y\in Y_{[2]} et xX[2]𝑥subscript𝑋delimited-[]2x\in X_{[2]} son image. Soit bbr(Y,y)𝑏br𝑌𝑦b\in\mathrm{br}(Y,y) d’image abr(X,x)𝑎br𝑋𝑥a\in\mathrm{br}(X,x). Soient 𝒞ysubscript𝒞𝑦\mathscr{C}_{y} et 𝒞xsubscript𝒞𝑥\mathscr{C}_{x} les courbes résiduelles de y𝑦y et x𝑥x, et 𝒬𝒬\mathscr{Q} (resp. 𝒫𝒫\mathscr{P}) le point fermé de 𝒞ysubscript𝒞𝑦\mathscr{C}_{y} (resp. 𝒞xsubscript𝒞𝑥\mathscr{C}_{x}) correspondant à b𝑏b (resp. a𝑎a) par la bijection précédente. Alors 𝒫𝒫\mathscr{P} est l’image de 𝒬𝒬\mathscr{Q} par 𝒞y𝒞xsubscript𝒞𝑦subscript𝒞𝑥\mathscr{C}_{y}\rightarrow\mathscr{C}_{x}, et en notant e𝑒e l’indice de ramification en 𝒬𝒬\mathscr{Q}, on a : e=deg(ba)𝑒degree𝑏𝑎e=\deg(b\rightarrow a).

Remarque 3.17.

En reprenant les notations de la proposition précédente, comme xX[2]𝑥subscript𝑋delimited-[]2x\in X_{[2]} nous savons que le groupe |(x)×|/|k×|superscript𝑥superscript𝑘|\mathscr{H}(x)^{\times}|/|k^{\times}| est fini, et comme k𝑘k est algébriquement clos |k×|superscript𝑘|k^{\times}| est divisible, d’où |k×|=|(x)×|superscript𝑘superscript𝑥|k^{\times}|=|\mathcal{H}(x)^{\times}| et |(x)×|superscript𝑥|\mathcal{H}(x)^{\times}| est divisible. Par ailleurs comme le corps (x)𝑥\mathscr{H}(x) est stable (cf [Duc], Théorème 4.3.1443144.3.14) nous avons l’égalité :

[(y):(x)]=[(y)~:(x)~][|(y)×|:|(x)×|][\mathscr{H}(y):\mathscr{H}(x)]=[\widetilde{\mathscr{H}(y)}:\widetilde{\mathscr{H}(x)}]\cdot[|\mathscr{H}(y)^{\times}|:|\mathscr{H}(x)^{\times}|]

Ainsi

[(y):(x)]=[(y)~:(x)~]=[k~(𝒞y):k~(𝒞x)]=deg(𝒞y𝒞x),[\mathscr{H}(y):\mathscr{H}(x)]=[\widetilde{\mathscr{H}(y)}:\widetilde{\mathscr{H}(x)}]=[\widetilde{k}(\mathscr{C}_{y}):\widetilde{k}(\mathscr{C}_{x})]=\deg(\mathscr{C}_{y}\rightarrow\mathscr{C}_{x}),

en particulier lorsque φ𝜑\varphi est galoisien alors φ𝜑\varphi est modéré en y𝑦y si et seulement si le morphisme 𝒞y𝒞xsubscript𝒞𝑦subscript𝒞𝑥\mathscr{C}_{y}\rightarrow\mathscr{C}_{x} induit par φ𝜑\varphi en y𝑦y est de degré premier à p𝑝p.

En combinant la remarque précédente avec les propositions 3.11 et 3.16 nous en déduisons naturellement un résultat dont nous nous servirons par la suite pour étudier le comportement local de 𝒢(X,S)𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}(X,S) :

Corollaire 3.18 (Allure locale de Covt(X)superscriptCovt𝑋\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(X)).

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytique connexe quasi-lisse munie d’une triangulation généralisée ayant un unique sommet s𝑠s, de type 222, et dont le squelette ne contient aucune arête qui boucle sur s𝑠s. Soit 𝒰ssubscript𝒰𝑠\mathscr{U}_{s} le sous-schéma ouvert de 𝒞ssubscript𝒞𝑠\mathscr{C}_{s} associé à s𝑠s, tel que l’on ait une bijection entre br(X,s)br𝑋𝑠\mathrm{br}(X,s) et les points fermés de 𝒰ssubscript𝒰𝑠\mathscr{U}_{s}. Soit 𝒟s𝒰ssubscript𝒟𝑠subscript𝒰𝑠\mathscr{D}_{s}\subset\mathscr{U}_{s} le sous-schéma ouvert correspondant aux éléments de 𝒟(X,s)𝒟𝑋𝑠\mathcal{D}(X,s). Alors la catégorie Covt(X)superscriptCovt𝑋\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(X) est équivalente à la catégorie des revêtements finis de 𝒰ssubscript𝒰𝑠\mathscr{U}_{s} dominés par des revêtements galoisiens modérément ramifiés de degré premier à p𝑝p et étales au-dessus de 𝒟ssubscript𝒟𝑠\mathscr{D}_{s}.

Définition 3.19.

Soit 𝒞𝒞\mathscr{C} une courbe propre, normale et intègre au-dessus de k~~𝑘\widetilde{k}. Soit 𝒟𝒞𝒟𝒞\mathscr{D}\subset\mathscr{C} une sous-courbe ouverte (éventuellement égale à 𝒞𝒞\mathscr{C}) et 𝒴𝒟𝒴𝒟\mathscr{Y}\rightarrow\mathscr{D} un revêtement fini étale connexe de 𝒟𝒟\mathscr{D}. On dit que 𝒴𝒴\mathscr{Y} est modérément ramifié le long de 𝒞𝒟𝒞𝒟\mathscr{C}\setminus\mathscr{D} lorsque les valuations définies par les points fermés de 𝒞𝒟𝒞𝒟\mathscr{C}\setminus\mathscr{D} sont toutes modérément ramifiées dans l’extension k~(𝒞)/k~(𝒟)~𝑘𝒞~𝑘𝒟\widetilde{k}(\mathscr{C})/\widetilde{k}(\mathscr{D}).

Notons Covtame(𝒟)superscriptCovtame𝒟\mathrm{Cov}^{\mathrm{tame}}(\mathscr{D}) la catégorie des revêtements finis étales de 𝒟𝒟\mathscr{D} modérément ramifiés le long de 𝒞𝒟𝒞𝒟\mathscr{C}\setminus\mathscr{D}. C’est une catégorie galoisienne dont nous noterons π1tame(𝒟)superscriptsubscript𝜋1tame𝒟\pi_{1}^{\mathrm{tame}}(\mathscr{D}) le groupe fondamental, défini à isomorphismes intérieurs près. Notons qu’il ne dépend que de 𝒟𝒟\mathscr{D}, car 𝒞𝒞\mathscr{C} se retrouve à partir de 𝒟𝒟\mathscr{D} comme égal à sa compactification normale.

Rappelons que si G𝐺G est un groupe et p𝑝p un nombre premier, la psuperscript𝑝p^{\prime}-complétion profinie de G𝐺G, notée G(p)superscript𝐺superscript𝑝G^{\,(p^{\prime})}, est le groupe profini défini comme la limite inverse du système projectif des quotients finis G/N𝐺𝑁G/NN𝑁N décrit l’ensemble des sous-groupes distingués de G𝐺G d’indice premier à p𝑝p. Lorsque G𝐺G est lui-même profini G(p)superscript𝐺superscript𝑝G^{\,(p^{\prime})} sera appelé le psuperscript𝑝p^{\prime}-quotient maximal de G𝐺G.

Remarque 3.20.

Reprenons les notations de la définition 3.19. Notons π1(𝒟)subscript𝜋1𝒟\pi_{1}(\mathscr{D}) le groupe fondamental étale de 𝒟𝒟\mathscr{D}. En remarquant que toute extension de corps valués dominée par une extension galoisienne de degré premier à p est automatiquement modérément ramifiée on obtient l’isomorphisme :

π1(𝒟)tame,(p)=π1(𝒟)(p)subscript𝜋1superscript𝒟tamesuperscript𝑝subscript𝜋1superscript𝒟superscript𝑝\pi_{1}(\mathscr{D})^{\mathrm{tame},{\,(p^{\prime})}}=\pi_{1}(\mathscr{D})^{\,(p^{\prime})}
Proposition 3.21 (Grothendieck).

Soit 𝒞𝒞\mathscr{C} une courbe propre, normale et intègre de genre g𝑔g au-dessus d’un corps algébriquement clos de caractéristique p>0𝑝0p>0. Soit 𝒟𝒞𝒟𝒞\mathscr{D}\subset\mathscr{C} une sous-courbe ouverte (éventuellement égale à 𝒞𝒞\mathscr{C}) et n0𝑛0n\geqslant 0 le nombre de points fermés de 𝒞𝒟𝒞𝒟\mathscr{C}\setminus\mathscr{D}. Alors π1(𝒟)(p)subscript𝜋1superscript𝒟superscript𝑝\pi_{1}(\mathscr{D})^{\,(p^{\prime})} est isomorphe à la psuperscript𝑝p^{\prime}-complétion profinie de Πg,nsubscriptΠ𝑔𝑛\Pi_{g,n}Πg,nsubscriptΠ𝑔𝑛\Pi_{g,n} est le groupe fondamental (topologique) du complémentaire de n𝑛n points sur une surface de Riemann sur \mathbb{C} de genre g𝑔g, défini par la formule :

Πg,n:=a1,b1,,ag,bg,γ1,,γn|[a1,b1][ag,bg]γ1γn=1assignsubscriptΠ𝑔𝑛inner-productsubscript𝑎1subscript𝑏1subscript𝑎𝑔subscript𝑏𝑔subscript𝛾1subscript𝛾𝑛subscript𝑎1subscript𝑏1subscript𝑎𝑔subscript𝑏𝑔subscript𝛾1subscript𝛾𝑛1\Pi_{g,n}:=\langle a_{1},b_{1},\ldots,a_{g},b_{g},\gamma_{1},\ldots,\gamma_{n}\,\,|\,\,[a_{1},b_{1}]\ldots[a_{g},b_{g}]\gamma_{1}\ldots\gamma_{n}=1\rangle
Définition 3.22.

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytique quasi-lisse munie d’une triangulation généralisée S𝑆S de squelette ΓΓ\Gamma. Si sS𝑠𝑆s\in S, définissons la valence généralisée en s𝑠s comme l’entier

ns=valΓ(s)+n~s,subscript𝑛𝑠subscriptvalΓ𝑠subscript~𝑛𝑠n_{s}=\mathrm{val}_{\Gamma}(s)+\widetilde{n}_{s}\in\mathbb{N},

où  valΓ(s)subscriptvalΓ𝑠\mathrm{val}_{\Gamma}(s) désigne la valence de s𝑠s dans le semi-graphe ΓΓ\Gamma, et n~ssubscript~𝑛𝑠\widetilde{n}_{s} est le cardinal du complémentaire de l’image de br(X,s)𝒞s(k~)br𝑋𝑠subscript𝒞𝑠~𝑘\mathrm{br}(X,s)\hookrightarrow\mathscr{C}_{s}(\widetilde{k}) (cf. 3.1.4) dans 𝒞s(k~)subscript𝒞𝑠~𝑘\mathscr{C}_{s}(\widetilde{k}) :

n~s=(𝒞s(k~)br(X,s)).subscript~𝑛𝑠subscript𝒞𝑠~𝑘br𝑋𝑠\widetilde{n}_{s}=\sharp(\mathscr{C}_{s}(\widetilde{k})\setminus\mathrm{br}(X,s)).
Corollaire 3.23 (Allure locale de 𝒢(X,S)𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}(X,S)).

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytique quasi-lisse munie d’une triangulation généralisée S𝑆S. Si sS𝑠𝑆s\in S est un point de type 222 de valence généralisée nssubscript𝑛𝑠n_{s}, notons 𝒞ssubscript𝒞𝑠\mathscr{C}_{s} la courbe résiduelle en s𝑠s, g(s)𝑔𝑠g(s) son genre (qui est par définition le genre du point s𝑠s), et 𝒟ssubscript𝒟𝑠\mathscr{D}_{s} le sous-schéma ouvert correspondant aux disques, i.e. aux éléments de 𝒟(X,S,s)𝒟𝑋𝑆𝑠\mathcal{D}(X,S,s). Alors nssubscript𝑛𝑠n_{s} n’est autre que le cardinal de 𝒞s(k~)𝒟s(k~)subscript𝒞𝑠~𝑘subscript𝒟𝑠~𝑘\mathscr{C}_{s}(\widetilde{k})\setminus\mathscr{D}_{s}(\widetilde{k}), et le groupe fondamental de la composante sommitale en s𝑠s de 𝒢(X,S)𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}(X,S) est :

πs=π1(𝒟s)(p)Πg(s),ns(p)subscript𝜋𝑠subscript𝜋1superscriptsubscript𝒟𝑠superscript𝑝similar-to-or-equalssuperscriptsubscriptΠ𝑔𝑠subscript𝑛𝑠superscript𝑝\pi_{s}=\pi_{1}(\mathscr{D}_{s})^{\,(p^{\prime})}\simeq\Pi_{g(s),n_{s}}^{\,(p^{\prime})}
Démonstration.

Puisque l’étoile St(X,S,s)St𝑋𝑆𝑠\mathrm{St}(X,S,s) est définie sur un revêtement topologique universel pointé (X~,s~)~𝑋~𝑠(\widetilde{X},\widetilde{s}) de (X,s)𝑋𝑠(X,s), St(X,S,s)St𝑋𝑆𝑠\mathrm{St}(X,S,s) est une courbe k𝑘k-analytique quasi-lisse dont {s~}~𝑠\{\widetilde{s}\} constitue une triangulation généralisée et dont le squelette ne contient aucune arête qui boucle sur s~~𝑠\widetilde{s}. Par ailleurs, on a g(s)=g(s~)𝑔𝑠𝑔~𝑠g(s)=g(\widetilde{s}) et ns=ns~subscript𝑛𝑠subscript𝑛~𝑠n_{s}=n_{\widetilde{s}}. Cela permet d’appliquer le corollaire 3.18 à l’étoile St(X,S,s)St𝑋𝑆𝑠\mathrm{St}(X,S,s), puis de conclure par la proposition 3.21 couplée à la remarque 3.20. ∎

3.2 Compatibilité avec les hypothèses mochizukiennes

3.2.1 Simplification des hypothèses

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytique quasi-lisse connexe munie d’une triangulation généralisée S𝑆S de squelette ΓΓ\Gamma. Nous voudrions savoir à quelles conditions sur S𝑆S le graphe d’anabélioïdes 𝒢(X,S)superscript𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}^{\natural}(X,S) construit plus haut vérifie l’ensemble des hypothèses que nous appellerons mochizukiennes permettant d’appliquer le théorème de reconstruction 1.44, à savoir : de type injectif, quasi-cohérent, totalement élevé, totalement détaché et sommitalement mince. D’après 3.1.2 on peut sans perte de généralité supposer que S𝑆S est une vraie triangulation de X𝑋X. Supposons 𝒢(X,S)superscript𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}^{\natural}(X,S) connexe et non réduit à un sommet.

Vérifions tout d’abord que les hypothèses mochizukiennes sur 𝒢(X,S)superscript𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}^{\natural}(X,S) excluent l’appartenance à S𝑆S de «  points superflus   » (cf. 2.22). Supposons que sS𝑠𝑆s\in S est tel que g(s)=0𝑔𝑠0g(s)=0 et sanX𝑠superscriptan𝑋s\not\in\partial^{\mathrm{an}}X. Notons alors Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} la composante connexe de Γ{S{s}}Γ𝑆𝑠\Gamma\setminus\{S\setminus\{s\}\} contenant s𝑠s, et distinguons les deux cas donnés par la proposition 2.22:

  • Cas où Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est un intervalle ouvert :

    Dans ce cas St(X,S,s)St𝑋𝑆𝑠\mathrm{St}(X,S,s) est une couronne de squelette analytique Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0}. Si b𝑏b (associée à une arête e𝑒e) est une branche aboutissant à s𝑠s, alors le morphisme b:πbπs:subscript𝑏subscript𝜋𝑏subscript𝜋𝑠b_{*}:\pi_{b}\rightarrow\pi_{s} correspond au foncteur ιb:Covt(St(X,S,s))Covt(𝒞e):subscript𝜄𝑏superscriptCovtSt𝑋𝑆𝑠superscriptCovtsubscript𝒞𝑒\iota_{b}:\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathrm{St}(X,S,s))\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{C}_{e}) induit naturellement par l’e plongement naturel 𝒞eSt(X,S,s)subscript𝒞𝑒St𝑋𝑆𝑠\mathcal{C}_{e}\hookrightarrow\mathrm{St}(X,S,s). Comme il s’agit d’un bon plongement alors ιbsubscript𝜄𝑏\iota_{b} est une équivalence de catégorie, par conséquent bsubscript𝑏b_{*} correspond au morphisme identité ^(p)^(p)superscript^superscript𝑝superscript^superscript𝑝\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}\rightarrow\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}, ce qui exclut la possibilité pour 𝒢(X,S)superscript𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}^{\natural}(X,S) d’être totalement détaché.

  • Cas où Γ0subscriptΓ0\Gamma_{0} est un intervalle semi-ouvert d’extrémité s𝑠s :

    Dans ce cas St(X,S,s)St𝑋𝑆𝑠\mathrm{St}(X,S,s) est un disque k𝑘k-analytique (cf. [Duc], 5.1.16.2). Ainsi le morphisme b:πbπs:subscript𝑏subscript𝜋𝑏subscript𝜋𝑠b_{*}:\pi_{b}\rightarrow\pi_{s} correspondant au foncteur ιb:Covt(St(X,S,s))Covt(𝒞e):subscript𝜄𝑏superscriptCovtSt𝑋𝑆𝑠superscriptCovtsubscript𝒞𝑒\iota_{b}:\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathrm{St}(X,S,s))\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{C}_{e}) induit naturellement par le plongement naturel 𝒞eSt(X,S,s)subscript𝒞𝑒St𝑋𝑆𝑠\mathcal{C}_{e}\hookrightarrow\mathrm{St}(X,S,s) n’est autre que le morphisme trivial ^(p){1}superscript^superscript𝑝1\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}\rightarrow\{1\}, ce qui interdit à 𝒢(X,S)superscript𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}^{\natural}(X,S) d’être de type injectif.

De là nous en déduisons qu’une triangulation généralisée S𝑆S sur X𝑋X vérifiant les hypothèses mochizukiennes sera automatiquement «  minimale   » (i.e. ne contenant aucun point superflu) et constituée des nœuds de son squelette. Par ailleurs, une triangulation généralisée S𝑆S de X𝑋X vérifiant les hypothèses mochizukiennes ne contient nul point de type 333. En effet, supposons que sS𝑠𝑆s\in S est un nœud de type 333 de son squelette. Alors sanX𝑠superscriptan𝑋s\in\partial^{\mathrm{an}}X et nous savons que s𝑠s admet un voisinage ouvert qui est une couronne Z𝑍Z de type ],]]*,*]. Ainsi St(X,S,s)St𝑋𝑆𝑠\mathrm{St}(X,S,s) est elle-même une couronne de type ],]]*,*]. Si b𝑏b (associée à une arête e𝑒e) est la branche aboutissant à s𝑠s, le plongement 𝒞eSt(X,S,s)subscript𝒞𝑒St𝑋𝑆𝑠\mathcal{C}_{e}\hookrightarrow\mathrm{St}(X,S,s) est un bon plongement, ainsi le foncteur induit ιb:Covt(St(X,S,s))Covt(𝒞e):subscript𝜄𝑏superscriptCovtSt𝑋𝑆𝑠superscriptCovtsubscript𝒞𝑒\iota_{b}:\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathrm{St}(X,S,s))\rightarrow\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{C}_{e}) est une équivalence de catégorie, donc le morphisme b:πbπs:subscript𝑏subscript𝜋𝑏subscript𝜋𝑠b_{*}:\pi_{b}\rightarrow\pi_{s} correspond à l’isomorphisme ^(p)^(p)superscript^superscript𝑝superscript^superscript𝑝\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}\rightarrow\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}, ce qui exclut la possibilité pour 𝒢(X,S)superscript𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}^{\natural}(X,S) d’être totalement détaché. Nous allons donc seulement considérer dans la suite des triangulations généralisées constituées de points de type 222 qui sont les nœuds du squelette qu’elles constituent.

Il reste à montrer que si une triangulation S𝑆S de squelette ΓΓ\Gamma est exactement constituée des nœuds de ΓΓ\Gamma, alors le graphe d’anabélioïdes associé, 𝒢(X,S)superscript𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}^{\natural}(X,S), vérifie sous certaines hypothèses à préciser l’ensemble des conditions mochizukiennes. Eu égard à l’ingratitude des définitions de ces hypothèses la tâche semble malaisée, mais elle se simplifie en combinant la proposition 3.18 à la remarque suivante de Mochizuki :

Proposition 3.24 ([Mzk333], Example 2.10).

Soit ΣΣ\Sigma un ensemble non vide de nombres premiers contenant au moins un entier différent de p𝑝p. Soit 𝒢𝒢\mathcal{G} un semi-graphe d’anabélioïdes tel que, pour chaque sommet v𝑣v, πvsubscript𝜋𝑣\pi_{v} est le pro-ΣΣ\Sigma quotient maximal du groupe fondamental d’une surface de Riemann hyperbolique, et tel que les différents morphismes πbπvsubscript𝜋𝑏subscript𝜋𝑣\pi_{b}\hookrightarrow\pi_{v} correspondent aux inclusions des groupes d’inertie des «cusps» de la courbe hyperbolique. Alors 𝒢𝒢\mathcal{G} est cohérent, totalement élevé, totalement détaché et sommitalement mince.

Remarque 3.25.

Nous n’allons pas prouver ici la proposition 3.24, mais observer que la minceur sommitale est une conséquence du corollaire 1.3.41341.3.4 de [Nak]. En effet si n>0𝑛0n>0 le groupe Πg,n(p)superscriptsubscriptΠ𝑔𝑛superscript𝑝\Pi_{g,n}^{\,(p^{\prime})} associé à un point sS𝑠𝑆s\in S est un pro-psuperscript𝑝p^{\prime} groupe libre de rang 2g+n12𝑔𝑛12g+n-1. Or Nakamura nous dit exactement que les psuperscript𝑝p^{\prime}-complétions des groupes libres de rang 2absent2\geqslant 2 ou des groupes du type Πg,0subscriptΠ𝑔.0\Pi_{g,0} avec g2𝑔2g\geqslant 2 ont un centre trivial. Par ailleurs si H𝐻H est un sous-groupe ouvert de Πg,n(p)superscriptsubscriptΠ𝑔𝑛superscript𝑝\Pi_{g,n}^{\,(p^{\prime})} nous savons que H𝐻H est le groupe π1tame,(p)(s)superscriptsubscript𝜋1tamesuperscript𝑝subscript𝑠\pi_{1}^{\mathrm{tame},\,(p^{\prime})}(\mathscr{H}_{s}) correspondant à un revêtement étale de degré premier à p𝑝p (et donc modérément ramifié le long de 𝒞s𝒰ssubscript𝒞𝑠subscript𝒰𝑠\mathscr{C}_{s}\setminus\mathscr{U}_{s}) de 𝒰ssubscript𝒰𝑠\mathscr{U}_{s}. Or la formule de Riemann-Hurwitz nous assure que le genre de ssubscript𝑠\mathscr{H}_{s} ne peut pas être strictement plus petit que celui de 𝒰ssubscript𝒰𝑠\mathscr{U}_{s}, la courbe ssubscript𝑠\mathscr{H}_{s} reste donc hyperbolique et ainsi H𝐻H est du type Πg,n(p)superscriptsubscriptΠsuperscript𝑔superscript𝑛superscript𝑝\Pi_{g^{\prime},n^{\prime}}^{\,(p^{\prime})} avec 2g+n>22superscript𝑔superscript𝑛22g^{\prime}+n^{\prime}>2. Par conséquent H𝐻H est également de centre trivial, et cela est vrai pour tout sous-groupe H𝐻H ouvert dans Πg,n(p)=πssuperscriptsubscriptΠ𝑔𝑛superscript𝑝subscript𝜋𝑠\Pi_{g,n}^{\,(p^{\prime})}=\pi_{s}, ce qui signifie exactement que πssubscript𝜋𝑠\pi_{s} est mince.

En reprenant les notations de la proposition 3.21, rappelons que la courbe 𝒟𝒟\mathscr{D} est dite hyperbolique lorsque : 2g+n>22𝑔𝑛22g+n>2. De la même manière une surface de Riemann hyperbolique est définie comme le complémentaire de n0𝑛0n\geqslant 0 points d’une surface de Riemann compacte de genre g𝑔g telle que 2g+n>22𝑔𝑛22g+n>2, i.e. lorsqu’on est dans l’un des cas suivants :

  • i)\mathit{i)}

    g=0𝑔0g=0 et n3𝑛3n\geqslant 3

  • 𝑖𝑖)\mathit{ii)}

    g=1𝑔1g=1 et n1𝑛1n\geqslant 1

  • 𝑖𝑖𝑖)\mathit{iii)}

    g2𝑔2g\geqslant 2

Cela nous mène naturellement aux définitions suivantes :

Définition 3.26 (Nœuds hyperboliques).

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytique connexe quasi-lisse munie d’une triangulation généralisée S𝑆S uniquement constituée des nœuds de son squelette ΓΓ\Gamma. Soit sS𝑠𝑆s\in S, rappelons que la valence généralisée en s𝑠s est définie comme l’entier

ns=valΓ(s)+n~ssubscript𝑛𝑠subscriptvalΓ𝑠subscript~𝑛𝑠n_{s}=\mathrm{val}_{\Gamma}(s)+\widetilde{n}_{s}\in\mathbb{N}

où  valΓ(s)subscriptvalΓ𝑠\mathrm{val}_{\Gamma}(s) désigne la valence de s𝑠s dans le semi-graphe ΓΓ\Gamma, et n~ssubscript~𝑛𝑠\widetilde{n}_{s} est le cardinal du complémentaire de l’image de br(X,s)𝒞s(k~)br𝑋𝑠subscript𝒞𝑠~𝑘\mathrm{br}(X,s)\hookrightarrow\mathscr{C}_{s}(\widetilde{k}) (cf. 3.1.4) dans 𝒞s(k~)subscript𝒞𝑠~𝑘\mathscr{C}_{s}(\widetilde{k}) :

n~s=(𝒞s(k~)br(X,s)).subscript~𝑛𝑠subscript𝒞𝑠~𝑘br𝑋𝑠\widetilde{n}_{s}=\sharp(\mathscr{C}_{s}(\widetilde{k})\setminus\mathrm{br}(X,s)).

Le nœud s𝑠s est dit nœud hyperbolique lorsque :    2g(s)+ns>2.2𝑔𝑠subscript𝑛𝑠2\;\;\;2g(s)+n_{s}>2.

Remarque 3.27.

Soit 𝒰ssubscript𝒰𝑠\mathscr{U}_{s} l’ouvert de Zariski de 𝒞ssubscript𝒞𝑠\mathscr{C}_{s} tel que br(X,s)𝒞s(k~)br𝑋𝑠subscript𝒞𝑠~𝑘\mathrm{br}(X,s)\hookrightarrow\mathscr{C}_{s}(\widetilde{k}) établisse une bijection entre br(X,s)br𝑋𝑠\mathrm{br}(X,s) et 𝒰s(k~)subscript𝒰𝑠~𝑘\mathscr{U}_{s}(\widetilde{k}), et 𝒟s𝒰ssubscript𝒟𝑠subscript𝒰𝑠\mathscr{D}_{s}\subset\mathscr{U}_{s} le sous-ouvert de Zariski tel que les branches discales (i.e. associées aux éléments de 𝒟(X,S,s)𝒟𝑋𝑆𝑠\mathcal{D}(X,S,s)) correspondent exactement à 𝒟s(k~)subscript𝒟𝑠~𝑘\mathscr{D}_{s}(\widetilde{k}). Alors on a :

valΓ(s)=(𝒰s(k~)𝒟s(k~))subscriptvalΓ𝑠subscript𝒰𝑠~𝑘subscript𝒟𝑠~𝑘\displaystyle\mathrm{val}_{\Gamma}(s)=\sharp(\mathscr{U}_{s}(\widetilde{k})\setminus\mathscr{D}_{s}(\widetilde{k}))
n~s=(𝒞s(k~)𝒰s(k~))subscript~𝑛𝑠subscript𝒞𝑠~𝑘subscript𝒰𝑠~𝑘\displaystyle\widetilde{n}_{s}=\sharp(\mathscr{C}_{s}(\widetilde{k})\setminus\mathscr{U}_{s}(\widetilde{k}))
ns=(𝒞s(k~)𝒟s(k~))subscript𝑛𝑠subscript𝒞𝑠~𝑘subscript𝒟𝑠~𝑘\displaystyle n_{s}=\sharp(\mathscr{C}_{s}(\widetilde{k})\setminus\mathscr{D}_{s}(\widetilde{k}))

Par ailleurs, n~s>0subscript~𝑛𝑠0\widetilde{n}_{s}>0 si et seulement si sanX𝑠superscriptan𝑋s\in\partial^{\mathrm{an}}X.

Remarque 3.28.

Avec les définitions précédentes, un nœud s𝑠s de X𝑋X non isolé dans ΓΓ\Gamma (i.e. valΓ(s)0subscriptvalΓ𝑠0\mathrm{val}_{\Gamma}(s)\neq 0) est non hyperbolique seulement dans la situation où s𝑠s est unibranche dans ΓΓ\Gamma, de genre 00 et sur le bord analytique de X𝑋X mais qu’il ne « manque qu’une branche », c’est-à-dire n~s=1subscript~𝑛𝑠1\widetilde{n}_{s}=1. C’est le cas par exemple d’une couronne compacte : son bord analytique est constitué de deux nœuds qui forment une triangulation mais qui sont deux nœuds non hyperboliques. Par ailleurs un nœud de type 333 ne peut jamais être hyperbolique. En effet, si s𝑠s est un tel nœud, nous savons que s𝑠s admet un voisinage ouvert qui est une couronne Z𝑍Z de type ],]]*,*] avec {s}=anZ𝑠superscriptan𝑍\{s\}=\partial^{\mathrm{an}}Z, ce qui donne ns=2subscript𝑛𝑠2n_{s}=2, et ainsi 2g(s)+ns=22𝑔𝑠subscript𝑛𝑠22g(s)+n_{s}=2, d’où l’obstruction à l’hyperbolicité.

3.2.2 Courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques

Définition 3.29 (Courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques).

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytique connexe quasi-lisse. Nous dirons que X𝑋X est une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique lorsque l’ensemble des nœuds de son squelette analytique San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) est non vide et uniquement constitué de nœuds hyperboliques.

Proposition 3.30.

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique dont on note ΣXSan(X)subscriptΣ𝑋superscript𝑆an𝑋\Sigma_{X}\subset S^{\mathrm{an}}(X) l’ensemble non vide des nœuds du squelette analytique (automatiquement de squelette San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X)). Alors le graphe d’anabélioïdes 𝒢(X,ΣX)superscript𝒢𝑋subscriptΣ𝑋\mathcal{G}^{\natural}(X,\Sigma_{X}) vérifie l’ensemble des hypothèses mochizukiennes, à savoir : de type injectif, quasi-cohérent, totalement élevé, totalement détaché et sommitalement mince.

Démonstration.

D’après la proposition 3.24, afin de montrer ce résultat il suffit de montrer que notre graphe d’anabélioïdes 𝒢(X,ΣX)superscript𝒢𝑋subscriptΣ𝑋\mathcal{G}^{\natural}(X,\Sigma_{X}) vérifie les hypothèses prescrites dans la proposition sus-citée, en prenant Σ={p}Σ𝑝\Sigma=\mathbb{P}\setminus\{p\} (auquel cas le pro-ΣΣ\Sigma quotient maximal ne sera rien d’autre que le psuperscript𝑝p^{\prime}-quotient maximal) :

  • Pour tout sΣX𝑠subscriptΣ𝑋s\in\Sigma_{X}, πssubscript𝜋𝑠\pi_{s} est le psuperscript𝑝p^{\prime}-quotient maximal du groupe fondamental d’une surface de Riemann hyperbolique :

    D’après le corollaire 3.23 nous savons que πssubscript𝜋𝑠\pi_{s} est le psuperscript𝑝p^{\prime}-quotient maximal de Πg(s),nssubscriptΠ𝑔𝑠subscript𝑛𝑠\Pi_{g(s),n_{s}}. Puisque s𝑠s est par hypothèse un nœud hyperbolique nous savons que 2g(s)+ns>22𝑔𝑠subscript𝑛𝑠2{2g(s)+n_{s}>2}, c’est-à-dire que Πg(s),nssubscriptΠ𝑔𝑠subscript𝑛𝑠\Pi_{g(s),n_{s}} est le groupe fondamental d’une surface de Riemann hyperbolique (de genre g(s)𝑔𝑠g(s) avec nssubscript𝑛𝑠n_{s} points manquants).

  • Les morphismes πbbπssubscript𝑏subscript𝜋𝑏subscript𝜋𝑠\pi_{b}\xrightarrow{b_{*}}\pi_{s} correspondent aux inclusions des groupes d’inertie des «cusps» :

    Reprenons ici les notations 𝒪X(b)sepsubscript𝒪𝑋subscript𝑏sep\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}} et btsuperscriptsubscript𝑏t\mathcal{I}_{b}^{\mathrm{t}} de la partie 3.1.4. Soit 𝒜𝒜\mathcal{A} une 𝒪X(b)sepsubscript𝒪𝑋subscript𝑏sep\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}}-algèbre finie modérément ramifiée, i.e. 𝒜𝒜\mathcal{A} définit un btsuperscriptsubscript𝑏t\mathcal{I}_{b}^{\mathrm{t}}-ensemble fini, autrement dit un objet de (bt)superscriptsubscript𝑏t\mathcal{B}(\mathcal{I}_{b}^{\mathrm{t}}). Via la tensorisation par 𝒪X(b)subscript𝒪𝑋𝑏\mathscr{O}_{X}(b) au-dessus de 𝒪X(b)sepsubscript𝒪𝑋subscript𝑏sep\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}}, 𝒜𝒜\mathcal{A} définit un revêtement étale fini de 𝒞esubscript𝒞𝑒\mathcal{C}_{e} qui est modéré. Réciproquement, tout revêtement modéré Y𝑌Y de 𝒞esubscript𝒞𝑒\mathcal{C}_{e} provient d’un revêtement modéré de X𝑋X tout entier. Cela découle du caractère kummérien des revêtements modérés des couronnes (3.1) couplé à la proposition 2.33 pour un choix idoine de \ell\in\mathbb{N} premier à p𝑝p. Un tel revêtement fourni une 𝒪X(b)sepsubscript𝒪𝑋subscript𝑏sep\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}}-algèbre modérément ramifiée : cela découle par exemple de la Proposition 4.2.2042204.2.20 de [Duc] selon laquelle une branche abr(Y,y)𝑎br𝑌𝑦a\in\mathrm{br}(Y,y) au-dessus de b𝑏b induit une extension de corps 𝒪Y(a)sep/𝒪X(b)sepsubscript𝒪𝑌subscript𝑎sepsubscript𝒪𝑋subscript𝑏sep\mathscr{O}_{Y}(a)_{\mathrm{sep}}/\mathscr{O}_{X}(b)_{\mathrm{sep}} finie de degré deg(ab)degree𝑎𝑏\deg(a\rightarrow b).

    Ceci définit une équivalence de catégories (bt)τCovt(𝒞e)superscript𝜏superscriptsubscript𝑏tsuperscriptCovtsubscript𝒞𝑒\mathcal{B}(\mathcal{I}_{b}^{\mathrm{t}})\xrightarrow{\tau^{*}}\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathcal{C}_{e}) qui induit un isomorphisme de groupes : πb𝜏bt𝜏subscript𝜋𝑏superscriptsubscript𝑏t\pi_{b}\xrightarrow{\tau}\mathcal{I}_{b}^{\mathrm{t}} (nous savions déjà d’après les parties 3.1.1 et 3.1.4 que ces groupes sont tous deux isomorphes à ^(p)superscript^superscript𝑝\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}). Comme bt=κ(s)btsuperscriptsubscript𝑏tsuperscriptsubscript𝜅subscript𝑠𝑏t\mathcal{I}_{b}^{\mathrm{t}}=\mathcal{I}_{\kappa(s)_{b}}^{\mathrm{t}}, τ𝜏\tau correspond à un isomorphisme πbκ(s)btsimilar-tosubscript𝜋𝑏superscriptsubscript𝜅subscript𝑠𝑏t\pi_{b}\xrightarrow{\sim}\mathcal{I}_{\kappa(s)_{b}}^{\mathrm{t}}.

    Le corps résiduel de κ(s)~=(s)~=k~(𝒞s)~𝜅𝑠~𝑠~𝑘subscript𝒞𝑠\widetilde{\kappa(s)}=\widetilde{\mathscr{H}(s)}=\widetilde{k}(\mathscr{C}_{s}) muni de .b\langle.\rangle_{b} n’est autre que k~~𝑘\widetilde{k} qui est algébriquement clos. Par conséquent, en reprenant les raisonnements précédents on obtient l’égalité :

    κ(s)~bt=^(p),superscriptsubscriptsubscript~𝜅𝑠𝑏tsuperscript^superscript𝑝\mathcal{I}_{\widetilde{\kappa(s)}_{b}}^{\mathrm{t}}=\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})},

    κ(s)~btsuperscriptsubscriptsubscript~𝜅𝑠𝑏t\mathcal{I}_{\widetilde{\kappa(s)}_{b}}^{\mathrm{t}} désigne le groupe d’inertie modérée de κ(s)~~𝜅𝑠\widetilde{\kappa(s)} munie de .b\langle.\rangle_{b} (où l’on a préalablement fixé une clôture séparable de κ(s)~~𝜅𝑠\widetilde{\kappa(s)} munie d’une valuation prolongeant .b\langle.\rangle_{b} sur κ(s)~~𝜅𝑠\widetilde{\kappa(s)}). On en déduit que le morphisme naturel κ(s)bt𝜂κ(s)~bt𝜂superscriptsubscript𝜅subscript𝑠𝑏tsuperscriptsubscriptsubscript~𝜅𝑠𝑏t\mathcal{I}_{\kappa(s)_{b}}^{\mathrm{t}}\xrightarrow{\eta}\mathcal{I}_{\widetilde{\kappa(s)}_{b}}^{\mathrm{t}} est un isomorphisme. Notons 𝒫𝒫\mathscr{P} le point de 𝒞ssubscript𝒞𝑠\mathscr{C}_{s} correspondant à b𝑏b. Le groupe κ(s)~btsuperscriptsubscriptsubscript~𝜅𝑠𝑏t\mathcal{I}_{\widetilde{\kappa(s)}_{b}}^{\mathrm{t}} correspond alors au groupe d’inertie modérée 𝒫tsuperscriptsubscript𝒫t\mathcal{I}_{\mathscr{P}}^{\mathrm{t}} du point 𝒫𝒫\mathscr{P}, qui se plonge dans πssubscript𝜋𝑠\pi_{s}. Par ailleurs on a le diagramme commutatif suivant :

    κ(s)btsuperscriptsubscript𝜅subscript𝑠𝑏t{\mathcal{I}_{\kappa(s)_{b}}^{\mathrm{t}}}πbsubscript𝜋𝑏{\pi_{b}}𝒫tπssuperscriptsubscript𝒫tsubscript𝜋𝑠{\mathcal{I}_{\mathscr{P}}^{\mathrm{t}}\subset\pi_{s}}η𝜂\scriptstyle{\eta}τ𝜏\scriptstyle{\tau}bsubscript𝑏\scriptstyle{b_{*}}

    τ𝜏\tau et η𝜂\eta sont les isomorphismes naturels invoqués plus haut. En conséquence bsubscript𝑏b_{*} correspond bien au plongement du groupe d’inertie du cusp 𝒫𝒫\mathscr{P} dans πssubscript𝜋𝑠\pi_{s}.

Remarque 3.31.

Soit S={s}𝑆𝑠S=\{s\} une triangulation réduite à un singleton d’une courbe k𝑘k-analytique X𝑋X quasi-lisse connexe dont le squelette n’admet aucune arête qui boucle sur s𝑠s. Dans ce cas 𝒢(X,S)superscript𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}^{\natural}(X,S) n’est rien d’autre que l’anabélioïde connexe (πs)subscript𝜋𝑠\mathcal{B}(\pi_{s}). Comme le graphe sous-jacent n’est constitué que d’un sommet et qu’il n’y a aucune branche, alors 𝒢(X,S)superscript𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}^{\natural}(X,S) est automatiquement de type injectif, totalement élevé, totalement détaché et quasi-cohérent. D’après [Nak], 1.3.41341.3.4, le groupe πssubscript𝜋𝑠\pi_{s} n’est mince que si le comportement en s𝑠s est hyperbolique, ce qui correspond à 2g(s)+ns>22𝑔𝑠subscript𝑛𝑠22g(s)+n_{s}>2. On retrouve ainsi un cas particulier de la proposition 3.24.

  1. 1.

    Exemples de courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques compactes

    Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytique connexe quasi-lisse, compacte et non vide. Notons ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X} l’ensemble des nœuds de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X). Nous savons que San(X)=superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X)=\emptyset si et seulement si X=k1,an𝑋superscriptsubscript𝑘1anX=\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}} (k𝑘k est supposé algébriquement clos), dans ce cas a fortiori ΣX=subscriptΣ𝑋\Sigma_{X}=\emptyset. Si San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X)\neq\emptyset, alors ΣX=subscriptΣ𝑋\Sigma_{X}=\emptyset si et seulement si X𝑋X est une courbe de Tate (cf. 2.23), auquel cas San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) est un cercle. Dans ces deux cas X𝑋X n’est à l’évidence pas k𝑘k-analytiquement hyperbolique. Exclure ces deux cas revient à supposer que ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X}\neq\emptyset. Alors deux cas se présentent :

    1. (a)

      si San(X)={s}superscript𝑆an𝑋𝑠S^{\mathrm{an}}(X)=\{s\} est un singleton, alors X𝑋X est k𝑘k-analytiquement hyperbolique si et seulement si s𝑠s est un nœud hyperbolique, ce qui est le cas dès que s𝑠s vérifie g(s)2𝑔𝑠2g(s)\geqslant 2 ou {g(s)=1\{g(s)=1 et sanX}s\in\partial^{\mathrm{an}}X\}. Un disque n’est jamais k𝑘k-analytiquement anabélien;

    2. (b)

      si San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) contient au moins une arête et X𝑋X n’est pas une courbe de Tate, alors X𝑋X est k𝑘k-analytiquement hyperbolique dès que ses points unibranches sont de genre >0absent0>0, ceci permet d’éviter les nœuds non hyperboliques décrits au 3.28.

  2. 2.

    Courbes marquées comme exemples de courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques non compactes

    Définition 3.32.

    Une courbe k𝑘k-analytique marquée est définie comme une courbe k𝑘k-analytique Y𝑌Y de la forme Y=X𝖤𝑌𝑋𝖤Y=X\setminus\mathsf{E}(X,𝖤)𝑋𝖤(X,\mathsf{E}) est la donnée d’une courbe k𝑘k-analytique non vide X𝑋X, quasi-lisse et connexe, et d’un sous-ensemble 𝖤X𝖤𝑋\mathsf{E}\subset X fermé et discret de points rigides de X𝑋X.

    Soit Y=X𝖤𝑌𝑋𝖤Y=X\setminus\mathsf{E} une courbe marquée. Comme les éléments de 𝖤𝖤\mathsf{E} en tant que points rigides sont des points unibranches de X𝑋X par quasi-lissité, la courbe Y𝑌Y reste connexe, quasi-lisse, mais ne jouit pas de la compacité dès que 𝖤𝖤\mathsf{E}\neq\emptyset, même lorsque X𝑋X est elle-même compacte. Nous allons étudier les nœuds de San(Y)superscript𝑆an𝑌S^{\mathrm{an}}(Y), et notamment les conditions d’hyperbolicité de ces derniers.

    Si San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) est non vide : Nous savons que c’est un sous-graphe analytiquement admissible de X𝑋X, et l’on note r𝑟r la rétraction canonique de X𝑋X sur San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X). Remarquons que l’on a :

    San(Y)=San(X)x𝖤]x,r(x)].S^{\mathrm{an}}(Y)=S^{\mathrm{an}}(X)\cup\bigcup_{x\in\mathsf{E}}]x,r(x)].

    Notons ΣYsubscriptΣ𝑌\Sigma_{Y} l’ensemble des nœuds de San(Y)superscript𝑆an𝑌S^{\mathrm{an}}(Y), et ΣYsuperscriptsubscriptΣ𝑌bottom\Sigma_{Y}^{\bot}, l’ensemble des sommets pluribranches (de valence 3absent3\geqslant 3) de San(Y)San(X)superscript𝑆an𝑌superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(Y)\setminus S^{\mathrm{an}}(X). De tels points apparaissent lorsque deux points de 𝖤𝖤\mathsf{E} sont sur le même disque de XΣX𝑋subscriptΣ𝑋X\setminus\Sigma_{X} : si tΣY𝑡superscriptsubscriptΣ𝑌bottomt\in\Sigma_{Y}^{\bot}, il existe x1,x2𝖤subscript𝑥1subscript𝑥2𝖤x_{1},x_{2}\in\mathsf{E} tels que r(x1)=r(x2):=r0𝑟subscript𝑥1𝑟subscript𝑥2assignsubscript𝑟0r(x_{1})=r(x_{2}):=r_{0}, avec

    ]x1,r(x1)]]x2,r(x2)]=[t,r0].]x_{1},r(x_{1})]\cap]x_{2},r(x_{2})]=[t,r_{0}].

    Tous les éléments de ΣYsuperscriptsubscriptΣ𝑌bottom\Sigma_{Y}^{\bot} sont des nœuds hyperboliques de San(Y)superscript𝑆an𝑌S^{\mathrm{an}}(Y) puisqu’ils sont pluribranches.

    Par ailleurs ΣYsubscriptΣ𝑌\Sigma_{Y} peut être décrit par :

    ΣY=ΣXx𝖤{r(x)}ΣY.subscriptΣ𝑌subscriptΣ𝑋subscript𝑥𝖤𝑟𝑥superscriptsubscriptΣ𝑌bottom\Sigma_{Y}=\Sigma_{X}\cup\bigcup_{x\in\mathsf{E}}\{r(x)\}\cup\Sigma_{Y}^{\bot}.

    Soit x𝖤𝑥𝖤x\in\mathsf{E}, alors xSan(X)𝑥superscript𝑆an𝑋x\notin S^{\mathrm{an}}(X) puisque ce dernier n’est constitué que de points de type 222 ou 333 et que x𝑥x est rigide. Alors ]x,r(x)]]x,r(x)] définit une branche de r(x)𝑟𝑥r(x) dans San(Y)superscript𝑆an𝑌S^{\mathrm{an}}(Y) qui n’est pas dans San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X). Par conséquent :

    valSan(Y)(r(x))>valSan(X)(r(x)).subscriptvalsuperscript𝑆an𝑌𝑟𝑥subscriptvalsuperscript𝑆an𝑋𝑟𝑥{\mathrm{val}_{S^{\mathrm{an}}(Y)}(r(x))>\mathrm{val}_{S^{\mathrm{an}}(X)}(r(x))}.

    Supposons que San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) n’est pas réduit à un singleton. Si r(x)𝑟𝑥r(x) est de valence 222 en tant que point de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X), cela implique que valSan(Y)(r(x))3subscriptvalsuperscript𝑆an𝑌𝑟𝑥3{\mathrm{val}_{S^{\mathrm{an}}(Y)}(r(x))\geqslant 3}, ce qui fait de r(x)𝑟𝑥r(x) un nœud hyperbolique de San(Y)superscript𝑆an𝑌S^{\mathrm{an}}(Y).

    Si maintenant r(x)𝑟𝑥r(x) est un point unibranche de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X), nous savons que c’est un nœud de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) qui est de genre 1absent1\geqslant 1 ou sur le bord analytique de X𝑋X. Ainsi r(x)𝑟𝑥r(x) reste un nœud de San(Y)superscript𝑆an𝑌S^{\mathrm{an}}(Y). On a au pire des cas (lorsque le nœud est non hyperbolique): 2g(r(x))+valSan(X)(r(x))+nr(x)~22𝑔𝑟𝑥subscriptvalsuperscript𝑆an𝑋𝑟𝑥~subscript𝑛𝑟𝑥22g(r(x))+\mathrm{val}_{S^{\mathrm{an}}(X)}(r(x))+\widetilde{n_{r(x)}}\geqslant 2. Par conséquent :

    2g(r(x))+valSan(Y)(r(x))+nr(x)~>2,2𝑔𝑟𝑥subscriptvalsuperscript𝑆an𝑌𝑟𝑥~subscript𝑛𝑟𝑥22g(r(x))+\mathrm{val}_{S^{\mathrm{an}}(Y)}(r(x))+\widetilde{n_{r(x)}}>2,

    ce qui fait de r(x)𝑟𝑥r(x) un nœud hyperbolique de San(Y)superscript𝑆an𝑌S^{\mathrm{an}}(Y).

    Si on suppose que San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) est réduit à un singleton {s}𝑠\{s\}, alors tous les points de 𝖤𝖤\mathsf{E} se rétractent sur s𝑠s, c’est-à-dire que pour tout x𝖤𝑥𝖤x\in\mathsf{E}, r(x)=s𝑟𝑥𝑠r(x)=s. Si s𝑠s est un nœud hyperbolique dans San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X), il le reste dans San(Y)superscript𝑆an𝑌S^{\mathrm{an}}(Y). Si g(s)1𝑔𝑠1g(s)\geqslant 1 et 𝖤𝖤\mathsf{E}\neq\emptyset, alors s𝑠s est un nœud hyperbolique de San(Y)superscript𝑆an𝑌S^{\mathrm{an}}(Y) par l’inégalité valSan(Y)(s)>valSan(X)(s)subscriptvalsuperscript𝑆an𝑌𝑠subscriptvalsuperscript𝑆an𝑋𝑠{\mathrm{val}_{S^{\mathrm{an}}(Y)}(s)>\mathrm{val}_{S^{\mathrm{an}}(X)}(s)}. En revanche, lorsque g(s)=0𝑔𝑠0g(s)=0, le nœud s𝑠s de San(Y)superscript𝑆an𝑌S^{\mathrm{an}}(Y) n’a a priori plus aucune raison d’être hyperbolique. Il le sera dès que ns~2~subscript𝑛𝑠2\widetilde{n_{s}}\geqslant 2, ou dès que san(X)𝑠superscriptan𝑋s\in\partial^{\mathrm{an}}(X), que Card(𝖤)2Card𝖤2\mathrm{Card}(\mathsf{E})\geqslant 2 et que les points de 𝖤𝖤\mathsf{E} sont « suffisamment éloignés » au sens où il existe x1,x2𝖤subscript𝑥1subscript𝑥2𝖤x_{1},x_{2}\in\mathsf{E} tels que ]x1,s]]x2,s]={s}]x_{1},s]\cap]x_{2},s]=\{s\} (i.e. x1subscript𝑥1x_{1} et x2subscript𝑥2x_{2} ne sont pas dans le même disque de X{s}𝑋𝑠X\setminus\{s\}).


    Si San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) est vide : Lorsque X𝑋X est compact cela correspond à X=k1,an𝑋superscriptsubscript𝑘1anX=\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}}. Dans tous les cas San(Y)superscript𝑆an𝑌S^{\mathrm{an}}(Y) est l’enveloppe convexe de 𝖤𝖤\mathsf{E}, et ΣYsubscriptΣ𝑌\Sigma_{Y} correspond exactement aux sommets pluribranches de cette enveloppe convexe, c’est-à-dire que ΣYsubscriptΣ𝑌\Sigma_{Y} est non vide si et seulement si Card(𝖤)3Card𝖤3\mathrm{Card}(\mathsf{E})\geqslant 3, auquel cas tous les éléments de ΣYsubscriptΣ𝑌\Sigma_{Y} sont des nœuds hyperboliques.

    Remarque 3.33.

    Nous savons que ΣYsubscriptΣ𝑌\Sigma_{Y} est une triangulation de X𝑋X tout autant que de Y𝑌Y, avec pour cette dernière des composantes non relativement compactes qui apparaissent. Soit e𝖤𝑒𝖤e\in\mathsf{E} et V𝑉V la composante connexe de XΣY𝑋subscriptΣ𝑌X\setminus\Sigma_{Y} contenant e𝑒e. Nous savons que V𝑉V est un disque k𝑘k-analytique ouvert ([Duc], 5.5.35535.5.3). Si l’on se place maintenant dans Y𝑌Y, la composante connexe de YΣY𝑌subscriptΣ𝑌Y\setminus\Sigma_{Y} correspondante est exactement V{e}𝑉𝑒V\setminus\{e\}. Ce n’est ainsi plus un disque, mais une couronne k𝑘k-analytique 𝒞esubscript𝒞𝑒\mathcal{C}_{e} non relativement compacte dans Y𝑌Y, c’est-à-dire un élément de 𝒞(Y,ΣY)superscript𝒞𝑌subscriptΣ𝑌\mathcal{C}^{\infty}(Y,\Sigma_{Y}). Lorsque X𝑋X est compacte il est facile de voir que l’application e𝒞emaps-to𝑒subscript𝒞𝑒e\mapsto\mathcal{C}_{e} établit une bijection entre 𝖤𝖤\mathsf{E} et 𝒞(Y,ΣY)superscript𝒞𝑌subscriptΣ𝑌\mathcal{C}^{\infty}(Y,\Sigma_{Y}).

    Conclusion : Une courbe marquée Y=X𝖤𝑌𝑋𝖤Y=X\setminus\mathsf{E} avec X𝑋X compacte sera alors k𝑘k-analytiquement hyperbolique dès que l’on est dans l’un des cas suivants :

    1. (a)

      X𝑋X est elle-même une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique;

    2. (b)

      X𝑋X est une courbe de Tate et 𝖤𝖤\mathsf{E}\neq\emptyset;

    3. (c)

      X=k1,an𝑋superscriptsubscript𝑘1anX=\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}} et Card(𝖤)3Card𝖤3\mathrm{Card}(\mathsf{E})\geqslant 3;

    4. (d)

      San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) est réduit à un nœud non hyperbolique {s}𝑠\{s\}, et l’une des conditions suivantes est vérifiée :

      • g(s)=1𝑔𝑠1g(s)=1 et 𝖤𝖤\mathsf{E}\neq\emptyset,

      • san(X)𝑠superscriptan𝑋s\in\partial^{\mathrm{an}}(X), Card(𝖤)2Card𝖤2\mathrm{Card}(\mathsf{E})\geqslant 2, x1,x2𝖤,]x1,s]]x2,s]={s}\exists\;x_{1},x_{2}\in\mathsf{E},\;]x_{1},s]\cap]x_{2},s]=\{s\}.

    Exemple 3.34.

    Le cas d’une courbe elliptique. Soit 𝒳𝒳\mathscr{X} une courbe elliptique sur k𝑘k munie de son élément neutre e𝒳(k)𝑒𝒳𝑘e\in\mathscr{X}(k). Si 𝒳𝒳\mathscr{X} est à mauvaise réduction, San(𝒳an)superscript𝑆ansuperscript𝒳anS^{\mathrm{an}}(\mathscr{X}^{\mathrm{an}}) est un cercle ne contenant pas le point rigide e𝑒e. Si 𝒳𝒳\mathscr{X} est à bonne réduction, son squelette est constitué d’un unique nœud de genre 111. Dans les deux cas, 𝒴=𝒳an{e}𝒴superscript𝒳an𝑒\mathscr{Y}=\mathscr{X}^{\mathrm{an}}\setminus\{e\} définit une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique. Cela permet d’associer de manière canonique une courbe marquée k𝑘k-analytiquement hyperbolique à toute courbe elliptique sur k𝑘k.

  3. 3.

    Le demi-plan de Drinfeld

    Voici un exemple important de courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique n’ayant aucune nature algébrique. Soit k0subscript𝑘0k_{0} un corps non-archimédien local de caractéristique p>0𝑝0p>0 (i.e. k0subscript𝑘0k_{0} est soit une extension finie de psubscript𝑝\mathbb{Q}_{p}, soit du type 𝔽q((T))subscript𝔽𝑞𝑇\mathbb{F}_{q}((T))q𝑞q est une puissance de p𝑝p) contenu dans le corps k𝑘k non archimédien, complet et algébriquement clos dont la valuation prolonge celle de k0subscript𝑘0k_{0}.

    Le demi-plan de Drinfeld, noté 𝔇k/k01subscriptsuperscript𝔇1𝑘subscript𝑘0\mathfrak{D}^{1}_{k/k_{0}}, est la courbe k𝑘k-analytique analogue non archimédien du demi-plan de Poincaré, définie en tant qu’ouvert de k1,ansuperscriptsubscript𝑘1an\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}} par :

    𝔇k/k01=k1,ank1,an(k0).subscriptsuperscript𝔇1𝑘subscript𝑘0superscriptsubscript𝑘1ansuperscriptsubscript𝑘1ansubscript𝑘0\mathfrak{D}^{1}_{k/k_{0}}=\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}}\setminus\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}}(k_{0}).

    Le demi-plan de Drinfeld 𝔇k/k01subscriptsuperscript𝔇1𝑘subscript𝑘0\mathfrak{D}^{1}_{k/k_{0}} est une courbe k𝑘k-analytiquement anabélienne non compacte et sans bord. En effet, son squelette analytique ainsi que l’ensemble de ses nœuds peuvent être décrits par :

    {San(𝔇k/k01)={enveloppe convexe de k1,an(k0)}k1,an(k0)={ηa,r}ak0,r+Σ𝔇k/k01={ηa,r}ak0,r|k0|casessuperscript𝑆ansubscriptsuperscript𝔇1𝑘subscript𝑘0enveloppe convexe de superscriptsubscript𝑘1ansubscript𝑘0superscriptsubscript𝑘1ansubscript𝑘0subscriptsubscript𝜂𝑎𝑟formulae-sequence𝑎subscript𝑘0𝑟superscriptsubscriptmissing-subexpressionsubscriptΣsubscriptsuperscript𝔇1𝑘subscript𝑘0subscriptsubscript𝜂𝑎𝑟formulae-sequence𝑎subscript𝑘0𝑟superscriptsubscript𝑘0\left\{\begin{array}[]{l}S^{\mathrm{an}}(\mathfrak{D}^{1}_{k/k_{0}})=\{\text{enveloppe convexe de }\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}}(k_{0})\}\setminus\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}}(k_{0})=\{\eta_{a,r}\}_{\;a\in k_{0},\;r\in\mathbb{R}_{+}^{*}}\\ \\ \Sigma_{\mathfrak{D}^{1}_{k/k_{0}}}=\{\eta_{a,r}\}_{\;a\in k_{0},\;r\in|k_{0}^{*}|}\end{array}\right.

    Ainsi, dans San(𝔇k/k01)superscript𝑆ansubscriptsuperscript𝔇1𝑘subscript𝑘0S^{\mathrm{an}}(\mathfrak{D}^{1}_{k/k_{0}}), tous les nœuds sont de valence q+1𝑞1q+1 (donc hyperboliques) où q𝑞q désigne le cardinal du corps fini k0~~subscript𝑘0\widetilde{k_{0}}. Par ailleurs San(𝔇k/k01)superscript𝑆ansubscriptsuperscript𝔇1𝑘subscript𝑘0S^{\mathrm{an}}(\mathfrak{D}^{1}_{k/k_{0}}) n’est pas seulement un semi-graphe, mais un vrai graphe (toutes les arêtes sont «  fermées   ») infini, de là l’égalité avec le squelette tronqué :

    San(𝔇k/k01)=San(𝔇k/k01).superscript𝑆ansubscriptsuperscript𝔇1𝑘subscript𝑘0superscript𝑆ansuperscriptsubscriptsuperscript𝔇1𝑘subscript𝑘0S^{\mathrm{an}}(\mathfrak{D}^{1}_{k/k_{0}})=S^{\mathrm{an}}(\mathfrak{D}^{1}_{k/k_{0}})^{\natural}.

    Berkovich montre dans [Ber444] que le groupe Autk(𝔇k/k01)subscriptAut𝑘subscriptsuperscript𝔇1𝑘subscript𝑘0\mathrm{Aut}_{k}(\mathfrak{D}^{1}_{k/k_{0}}) des automorphismes k𝑘k-analytiques de 𝔇k/k01subscriptsuperscript𝔇1𝑘subscript𝑘0\mathfrak{D}^{1}_{k/k_{0}} coïncide avec PGL2(k0)subscriptPGL2subscript𝑘0\mathrm{PGL}_{2}(k_{0}), et Alon étend dans [Al] ce résultat à un produit fini : si k1,,krksubscript𝑘1subscript𝑘𝑟𝑘k_{1},\ldots,k_{r}\subset k sont des sous-extensions de k𝑘k qui sont des corps non-archimédiens locaux pour la valuation induite par celle de k𝑘k, et si M={σ𝔖r,kσ(i)=ki,1ir}𝑀formulae-sequence𝜎subscript𝔖𝑟subscript𝑘𝜎𝑖subscript𝑘𝑖.1𝑖𝑟M=\{\sigma\in\mathfrak{S}_{r},k_{\sigma(i)}=k_{i},1\leqslant i\leqslant r\}, alors :

    Autk(i=1r𝔇k/ki1)=Mi=1rPGL2(ki).subscriptAut𝑘superscriptsubscriptproduct𝑖1𝑟subscriptsuperscript𝔇1𝑘subscript𝑘𝑖left-normal-factor-semidirect-product𝑀superscriptsubscriptproduct𝑖1𝑟subscriptPGL2subscript𝑘𝑖\mathrm{Aut}_{k}\left(\prod_{i=1}^{r}\mathfrak{D}^{1}_{k/k_{i}}\right)=M\ltimes\prod_{i=1}^{r}\mathrm{PGL}_{2}(k_{i}).
    Remarque 3.35.

    Le squelette San(𝔇k/k01)superscript𝑆ansubscriptsuperscript𝔇1𝑘subscript𝑘0S^{\mathrm{an}}(\mathfrak{D}^{1}_{k/k_{0}}) n’est autre que l’immeuble de Bruhat-Tits de SL2/k0subscriptSL2subscript𝑘0\mathrm{SL}_{2}/k_{0}, noté 𝔅k01subscriptsuperscript𝔅1subscript𝑘0\mathfrak{B}^{1}_{k_{0}}. On s’en rend facilement compte en considérant 𝔅k01subscriptsuperscript𝔅1subscript𝑘0\mathfrak{B}^{1}_{k_{0}} selon sa description en termes de normes : considérons le k0subscript𝑘0k_{0}-espace vectoriel

    V=i=01k0Tik[T0,T1],𝑉superscriptsubscriptdirect-sum𝑖01subscript𝑘0subscript𝑇𝑖𝑘subscript𝑇0subscript𝑇1V=\bigoplus_{i=0}^{1}k_{0}T_{i}\subset k[T_{0},T_{1}],

    alors 𝔅k01subscriptsuperscript𝔅1subscript𝑘0\mathfrak{B}^{1}_{k_{0}} est défini comme l’ensemble des normes sur V𝑉V modulo la relation qui identifie deux normes ρ1,ρ2subscript𝜌1subscript𝜌2\rho_{1},\rho_{2} si et seulement si celles-ci sont homothétiques, c’est-à-dire s’il existe c+𝑐superscriptsubscriptc\in\mathbb{R}_{+}^{*} tel que ρ1=c.ρ2formulae-sequencesubscript𝜌1𝑐subscript𝜌2\rho_{1}=c.\rho_{2}.

3.3 Reconstruction du squelette

3.3.1 Tempéroïde connexe associé à 𝒢(𝐗,𝐒)𝒢𝐗𝐒\mathbf{\mathcal{G}(X,S)}

Proposition 3.36.

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytique quasi-lisse connexe munie d’une triangulation généralisée S𝑆S non vide. On a une équivalence de catégories (donc un isomorphisme d’anabélioïdes connexes) :

Covt(X)(𝒢(X,S))similar-tosuperscriptCovt𝑋𝒢𝑋𝑆\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(X)\xrightarrow{\sim}\mathcal{B}(\mathcal{G}(X,S))
Démonstration.

Remarquons tout d’abord que 𝒰(𝒳,𝒮):=(St(X,S,si))siSassign𝒰𝒳𝒮subscriptSt𝑋𝑆subscript𝑠𝑖subscript𝑠𝑖𝑆\mathcal{U(X,S)}:=(\mathrm{St}(X,S,s_{i}))_{s_{i}\in S} est un recouvrement de X𝑋X pour la topologie étale sur le site Xe´tsubscript𝑋´etX_{\mathrm{\acute{e}t}}, puisqu’un revêtement (universel) topologique est étale. Notons Ui,j:=St(X,S,si)×XSt(X,S,sj)assignsubscript𝑈𝑖𝑗subscript𝑋St𝑋𝑆subscript𝑠𝑖St𝑋𝑆subscript𝑠𝑗U_{i,j}:=\mathrm{St}(X,S,s_{i})\times_{X}\mathrm{St}(X,S,s_{j}).

Remarquons que si (si,sj)subscript𝑠𝑖subscript𝑠𝑗(s_{i},s_{j}) est un couple d’éléments distincts de S𝑆S, alors :

  • Ui,j=St(X,S,si)×XSt(X,S,sj)e𝒞esubscript𝑈𝑖𝑗subscript𝑋St𝑋𝑆subscript𝑠𝑖St𝑋𝑆subscript𝑠𝑗similar-to-or-equalssubscriptsquare-union𝑒subscript𝒞𝑒\displaystyle{U_{i,j}=\mathrm{St}(X,S,s_{i})\times_{X}\mathrm{St}(X,S,s_{j})\simeq\bigsqcup_{e}\mathcal{C}_{e}}, où e𝑒e décrit l’ensemble des arêtes de 𝔾(X,S)𝔾𝑋𝑆\mathbb{G}(X,S) ayant deux branches aboutissant en sisubscript𝑠𝑖s_{i} et en sjsubscript𝑠𝑗s_{j}.

  • Ui,i=St(X,S,si)×XSt(X,S,si)St(X,S,si)e𝒞esubscript𝑈𝑖𝑖subscript𝑋St𝑋𝑆subscript𝑠𝑖St𝑋𝑆subscript𝑠𝑖similar-to-or-equalsSt𝑋𝑆subscript𝑠𝑖subscriptsquare-union𝑒subscript𝒞𝑒\displaystyle{U_{i,i}=\mathrm{St}(X,S,s_{i})}\times_{X}\mathrm{St}(X,S,s_{i})\simeq\mathrm{St}(X,S,s_{i})\bigsqcup_{e}\mathcal{C}_{e}, où e𝑒e décrit l’ensemble des arêtes de 𝔾(X,S)𝔾𝑋𝑆\mathbb{G}(X,S) ayant deux branches aboutissant toutes deux en sisubscript𝑠𝑖s_{i}.

Une donnée de descente sur 𝒰(𝒳,𝒮)𝒰𝒳𝒮\mathcal{U(X,S)} est la donnée pour tout siSsubscript𝑠𝑖𝑆s_{i}\in S d’un YsiCovt(St(X,S,si))subscript𝑌subscript𝑠𝑖superscriptCovtSt𝑋𝑆subscript𝑠𝑖Y_{s_{i}}\in\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(\mathrm{St}(X,S,s_{i})) et d’une famille d’isomorphismes (φj,i)j,sjSsubscriptsubscript𝜑𝑗𝑖𝑗subscript𝑠𝑗𝑆(\varphi_{j,i})_{j,\;s_{j}\in S} avec

φi,j:Ysi×St(X,S,si)Ui,jYsj×St(X,S,sj)Ui,j,:subscript𝜑𝑖𝑗similar-tosubscriptSt𝑋𝑆subscript𝑠𝑖subscript𝑌subscript𝑠𝑖subscript𝑈𝑖𝑗subscriptSt𝑋𝑆subscript𝑠𝑗subscript𝑌subscript𝑠𝑗subscript𝑈𝑖𝑗\varphi_{i,j}:Y_{s_{i}}\times_{\mathrm{St}(X,S,s_{i})}U_{i,j}\xrightarrow{\sim}Y_{s_{j}}\times_{\mathrm{St}(X,S,s_{j})}U_{i,j}, (3)

telle que chaque φi,isubscript𝜑𝑖𝑖\varphi_{i,i} se restreigne à l’identité sur la diagonale de Ui,isubscript𝑈𝑖𝑖U_{i,i}. Cette dernière contrainte provient de la conditions sur les cocycles φi,i=φi,iφi,isubscript𝜑𝑖𝑖subscript𝜑𝑖𝑖subscript𝜑𝑖𝑖\varphi_{i,i}=\varphi_{i,i}\circ\varphi_{i,i}. Les autres conditions de cocycles sont ici tautologiques puisqu’avec des notations évidentes Ui,j,k=subscript𝑈𝑖𝑗𝑘U_{i,j,k}=\emptyset dès que les indices i,j𝑖𝑗i,j et k𝑘k ne sont pas tous égaux.


Il reste à remarquer que les conditions de l’équation (3) et la contrainte sur φi,isubscript𝜑𝑖𝑖\varphi_{i,i} correspondent exactement aux «  conditions de recollement   » permettant de définir les objets de la catégorie (𝒢(X,S))𝒢𝑋𝑆\mathcal{B}(\mathcal{G}(X,S)), d’où l’on déduit une équivalence de catégories entre (𝒢(X,S))𝒢𝑋𝑆\mathcal{B}(\mathcal{G}(X,S)) et la catégorie des données de descente sur 𝒰(X,S)𝒰𝑋𝑆\mathcal{U}(X,S). D’autre part, par descente étale, la catégorie Covt(X)superscriptCovt𝑋\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(X) est elle-aussi équivalente à la catégorie des données de descente sur 𝒰(X,S)𝒰𝑋𝑆\mathcal{U}(X,S), ce qui donne par transitivité le résultat escompté.

Corollaire 3.37.

Sous les mêmes hypothèses on a une équivalence de catégories

Covtemp,(p)(X)temp(𝒢(X,S)),similar-tosuperscriptCovtempsuperscript𝑝𝑋superscripttemp𝒢𝑋𝑆\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X)\xrightarrow{\sim}\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}(X,S)),

qui induit un isomorphisme de tempéroïdes connexes :

(Covtemp,(p)(X),ΥX(p))(temp(𝒢(X,S)),Υ𝒢(X,S)ge´o).similar-tosuperscriptCovtempsuperscript𝑝𝑋superscriptsubscriptΥ𝑋superscript𝑝superscripttemp𝒢𝑋𝑆superscriptsubscriptΥ𝒢𝑋𝑆g´eo\left(\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X),\Upsilon_{X}^{\,(p^{\prime})}\right)\xrightarrow{\sim}\left(\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}(X,S)),\Upsilon_{\mathcal{G}(X,S)}^{\mathrm{g\acute{e}o}}\right).
Démonstration.

D’après la proposition précédente on peut identifier les anabélioïdes connexes Covt(X)superscriptCovt𝑋\mathrm{Cov}^{\mathrm{t}}(X) et (𝒢(X,S))𝒢𝑋𝑆\mathcal{B}(\mathcal{G}(X,S)). Sous cette identification l’ensemble des systèmes projectifs cofinaux de revêtements finis étales galoisiens de 𝒢(X,S)𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}(X,S) correspond à l’ensemble des systèmes projectifs cofinaux de revêtements galoisiens finis de X𝑋X de degré premier à p𝑝p (donc modérés). Par ailleurs, si 𝒢isubscript𝒢𝑖\mathcal{G}_{i} est un revêtement fini étale galoisien de 𝒢(X,S)𝒢𝑋𝑆\mathcal{G}(X,S) correspondant au revêtement Yisubscript𝑌𝑖Y_{i} de X𝑋X selon l’équivalence de la proposition précédente, on a par définition du semi-graphe 𝔾isubscript𝔾𝑖\mathbb{G}_{i} sous-jacent à 𝒢isubscript𝒢𝑖\mathcal{G}_{i} un isomorphisme de semi-graphes entre San(Yi)superscript𝑆ansubscript𝑌𝑖S^{\mathrm{an}}(Y_{i}) et 𝔾isubscript𝔾𝑖\mathbb{G}_{i}. En reprenant les notations de la remarque 1.38 et de la proposition 2.42, on a un isomorphisme entre les groupes Ti:=Gal(𝒢~i/𝒢i)assignsubscript𝑇𝑖Galsubscript~𝒢𝑖subscript𝒢𝑖T_{i}:=\mathrm{Gal}(\widetilde{\mathcal{G}}_{i}/\mathcal{G}_{i}) et π1top(Yi)superscriptsubscript𝜋1topsubscript𝑌𝑖\pi_{1}^{\mathrm{top}}(Y_{i}) (qui sont des groupes libres discrets) ainsi qu’entre les groupes Gal(𝒢i/𝒢(X,S))Galsubscript𝒢𝑖𝒢𝑋𝑆\mathrm{Gal}(\mathcal{G}_{i}/\mathcal{G}(X,S)) et Gal(Yi/X)Galsubscript𝑌𝑖𝑋\mathrm{Gal}(Y_{i}/X). De plus ces isomorphismes sont fonctoriels en Yisubscript𝑌𝑖Y_{i}. De là on obtient un isomorphisme :

Gal(𝒢~i/𝒢(X,S))Δi,similar-to-or-equalsGalsubscript~𝒢𝑖𝒢𝑋𝑆subscriptΔ𝑖\mathrm{Gal}(\widetilde{\mathcal{G}}_{i}/\mathcal{G}(X,S))\simeq\Delta_{i},

qui induit en vertu de la remarque 1.38 et de la proposition 2.42 un isomorphisme :

π1temp(𝒢(X,S))π1temp,(p)(X).similar-to-or-equalssuperscriptsubscript𝜋1temp𝒢𝑋𝑆superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝𝑋\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}(X,S))\simeq\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X).

Remarque 3.38.

Si X𝑋X est une courbe k𝑘k-analytique quasi-lisse et connexe munie d’une triangulation généralisée S𝑆S, alors on a une équivalence de catégories suivante : temp(𝒢(X,S))temp(𝒢(X,S))similar-to-or-equalssuperscripttemp𝒢𝑋𝑆superscripttempsuperscript𝒢𝑋𝑆\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}(X,S))\simeq\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}^{\natural}(X,S)). En effet, selon le même raisonnement que ce qui précède on montre que temp(𝒢(X,S))superscripttempsuperscript𝒢𝑋𝑆\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}^{\natural}(X,S)) est elle aussi équivalente à Covtemp,(p)(X)superscriptCovtempsuperscript𝑝𝑋\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X).

3.3.2 Reconstruction du squelette tronqué

Théorème 3.39.

Soient X1subscript𝑋1X_{1} et X2subscript𝑋2X_{2} deux courbes k𝑘k-analytiques quasi-lisses et connexes munies respectivement de triangulations généralisées S1subscript𝑆1S_{1} et S2subscript𝑆2S_{2} non vides de squelettes tronqués Γ1superscriptsubscriptΓ1\Gamma_{1}^{\natural} et Γ2superscriptsubscriptΓ2\Gamma_{2}^{\natural} dont les graphes d’anabélioïdes vérifient tous deux l’ensemble des hypothèses mochizukiennes. Supposons qu’il existe un isomorphisme entre les groupes tempérés modérés :

φ:π1temp,(p)(X1)π2temp,(p)(X2).:𝜑similar-tosuperscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝subscript𝑋1superscriptsubscript𝜋2tempsuperscript𝑝subscript𝑋2\varphi:\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X_{1})\xrightarrow{\sim}\pi_{2}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X_{2}).

Alors φ𝜑\varphi induit un isomorphisme de graphes entre les squelettes tronqués associés :

Γ1Γ2.similar-tosuperscriptsubscriptΓ1superscriptsubscriptΓ2\Gamma_{1}^{\natural}\xrightarrow{\sim}\Gamma_{2}^{\natural}.
Remarque 3.40.

Comme les groupes π1temp,(p)(Xi)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝subscript𝑋𝑖\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X_{i}) peuvent se reconstruire directement à partir des π1temp(Xi)superscriptsubscript𝜋1tempsubscript𝑋𝑖\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X_{i}) (cf. remarque 2.49), tout isomorphisme entre π1temp(X1)superscriptsubscript𝜋1tempsubscript𝑋1\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X_{1}) et π1temp(X2)superscriptsubscript𝜋1tempsubscript𝑋2\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X_{2}) induit un isomorphisme entre π1temp,(p)(X1)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝subscript𝑋1\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X_{1}) et π1temp,(p)(X2)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝subscript𝑋2\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X_{2}). Ainsi, par le théorème ci-dessus, tout isomorphisme entre les π1temp(Xi)superscriptsubscript𝜋1tempsubscript𝑋𝑖\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X_{i}) induit un isomorphisme de graphes entre les squelettes tronqués.

Démonstration.

Puisque les équivalences de catégories Covtemp,(p)(Xi)temp(π1temp,(p)(Xi))similar-to-or-equalssuperscriptCovtempsuperscript𝑝subscript𝑋𝑖superscripttempsuperscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝subscript𝑋𝑖\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X_{i})\simeq\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X_{i})) et temp(π1temp,(p)(X2))temp(π1temp,(p)(X1))similar-to-or-equalssuperscripttempsuperscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝subscript𝑋2superscripttempsuperscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝subscript𝑋1\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X_{2}))\simeq\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X_{1})) induisent des isomorphismes entre les différents tempéroïdes connexes correspondant, alors φ𝜑\varphi induit un isomorphisme de tempéroïdes connexes

(Covtemp,(p)(X1),ΥX1(p))(Covtemp,(p)(X2),ΥX2(p)).similar-tosuperscriptCovtempsuperscript𝑝subscript𝑋1superscriptsubscriptΥsubscript𝑋1superscript𝑝superscriptCovtempsuperscript𝑝subscript𝑋2superscriptsubscriptΥsubscript𝑋2superscript𝑝\left(\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X_{1}),\Upsilon_{X_{1}}^{\,(p^{\prime})}\right)\xrightarrow{\sim}\left(\mathrm{Cov}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X_{2}),\Upsilon_{X_{2}}^{\,(p^{\prime})}\right).

Par le corollaire 3.37 couplé à la remarque 3.38 on déduit l’isomorphisme de tempéroïdes connexes :

(temp(𝒢(X1,S1)),Υ𝒢(X1,S1)ge´o)(temp(𝒢(X2,S2)),Υ𝒢(X2,S2)ge´o).similar-tosuperscripttempsuperscript𝒢subscript𝑋1subscript𝑆1subscriptsuperscriptΥg´eosuperscript𝒢subscript𝑋1subscript𝑆1superscripttempsuperscript𝒢subscript𝑋2subscript𝑆2subscriptsuperscriptΥg´eosuperscript𝒢subscript𝑋2subscript𝑆2\left(\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}^{\natural}(X_{1},S_{1})),\Upsilon^{\mathrm{g\acute{e}o}}_{\mathcal{G}^{\natural}(X_{1},S_{1})}\right)\xrightarrow{\sim}\left(\mathcal{B}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}^{\natural}(X_{2},S_{2})),\Upsilon^{\mathrm{g\acute{e}o}}_{\mathcal{G}^{\natural}(X_{2},S_{2})}\right).

En ayant montré au 3.30 que les 𝒢(Xi,Si)superscript𝒢subscript𝑋𝑖subscript𝑆𝑖\mathcal{G}^{\natural}(X_{i},S_{i}) sont quasi-cohérents, totalement élevés, totalement détachés et sommitalement minces, alors on déduit du théorème 1.44 un isomorphisme de graphes d’anabélioïdes:

𝒢(X1,S1)𝒢(X2,S2),similar-tosuperscript𝒢subscript𝑋1subscript𝑆1superscript𝒢subscript𝑋2subscript𝑆2\mathcal{G}^{\natural}(X_{1},S_{1})\xrightarrow{\sim}\mathcal{G}^{\natural}(X_{2},S_{2}),

qui induit en particulier un isomorphisme de graphes : 𝔾(X1,S1)𝔾(X2,S2),similar-tosuperscript𝔾subscript𝑋1subscript𝑆1superscript𝔾subscript𝑋2subscript𝑆2\mathbb{G}^{\natural}(X_{1},S_{1})\xrightarrow{\sim}\mathbb{G}^{\natural}(X_{2},S_{2}), i.e. un isomorphisme de graphes entre les squelettes tronqués : Γ1Γ2.similar-tosuperscriptsubscriptΓ1superscriptsubscriptΓ2\Gamma_{1}^{\natural}\xrightarrow{\sim}\Gamma_{2}^{\natural}.

Corollaire 3.41.

Soient X1subscript𝑋1X_{1} et X2subscript𝑋2X_{2} deux courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques dont on note ΣX1subscriptΣsubscript𝑋1\Sigma_{X_{1}} et ΣX2subscriptΣsubscript𝑋2\Sigma_{X_{2}} les ensembles de nœuds des squelettes respectifs. Supposons qu’il existe un isomorphisme entre les groupes tempérés modérés :

φ:π1temp,(p)(X1)π2temp,(p)(X2).:𝜑similar-tosuperscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝subscript𝑋1superscriptsubscript𝜋2tempsuperscript𝑝subscript𝑋2\varphi:\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X_{1})\xrightarrow{\sim}\pi_{2}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X_{2}).

Alors φ𝜑\varphi induit un isomorphisme de graphes entre les squelettes analytiques tronqués :

San(X1)San(X2).similar-tosuperscript𝑆ansuperscriptsubscript𝑋1superscript𝑆ansuperscriptsubscript𝑋2S^{\mathrm{an}}(X_{1})^{\natural}\xrightarrow{\sim}S^{\mathrm{an}}(X_{2})^{\natural}.
Démonstration.

Nous savons d’après le corollaire 3.30 que les graphes d’anabélioïdes 𝒢(X1,ΣX1)superscript𝒢subscript𝑋1subscriptΣsubscript𝑋1\mathcal{G}^{\natural}(X_{1},\Sigma_{X_{1}}) et 𝒢(X2,ΣX2)superscript𝒢subscript𝑋2subscriptΣsubscript𝑋2\mathcal{G}^{\natural}(X_{2},\Sigma_{X_{2}}) vérifient tous deux l’ensemble des hypothèses mochizukiennes. Il suffit donc de leur appliquer le théorème 3.39 ci-dessus pour obtenir le résultat escompté. ∎

Définition 3.42 (Courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques à arêtes relativement compactes).

Une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique sera dite à arêtes relativement compactes lorsque toutes les composantes connexes de XΣX𝑋subscriptΣ𝑋X\setminus\Sigma_{X} sont relativement compactes dans X𝑋X, ce qui revient à dire que 𝒞(X,ΣX)=superscript𝒞𝑋subscriptΣ𝑋\mathcal{C}^{\infty}(X,\Sigma_{X})=\emptyset, ou bien que San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) est un vrai graphe, ou que San(X)=San(X)superscript𝑆an𝑋superscript𝑆ansuperscript𝑋S^{\mathrm{an}}(X)=S^{\mathrm{an}}(X)^{\natural}.

Exemple 3.43.

Toute courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique compacte est à arêtes relativement compactes. Si k0subscript𝑘0k_{0} est un corps local contenu dans k𝑘k, le demi-plan de Drinfeld 𝔇k/k01subscriptsuperscript𝔇1𝑘subscript𝑘0\mathfrak{D}^{1}_{k/k_{0}} est également à arêtes relativement compactes.

Le résultat suivant met en évidence le comportement «  anabélien   » de telles courbes :

Théorème 3.44.

Soient X1subscript𝑋1X_{1} et X2subscript𝑋2X_{2} deux courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques à arêtes relativement compactes. Supposons qu’il existe un isomorphisme entre les groupes tempérés modérés :

φ:π1temp,(p)(X1)π2temp,(p)(X2).:𝜑similar-tosuperscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝subscript𝑋1superscriptsubscript𝜋2tempsuperscript𝑝subscript𝑋2\varphi:\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X_{1})\xrightarrow{\sim}\pi_{2}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X_{2}).

Alors φ𝜑\varphi induit (fonctoriellement en φ𝜑\varphi) un isomorphisme de graphes entre les squelettes analytiques associés : San(X1)San(X2)similar-tosuperscript𝑆ansubscript𝑋1superscript𝑆ansubscript𝑋2S^{\mathrm{an}}(X_{1})\xrightarrow{\sim}S^{\mathrm{an}}(X_{2}).

Démonstration.

Ce résultat se déduit directement du corollaire 3.41 et de la caractérisation des courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques en terme de l’égalité entre squelette et squelette tronqué. ∎

Proposition 3.45.

Pour i{1,2}𝑖1.2i\in\{1,2\}, soit pisubscript𝑝𝑖p_{i} un nombre premier et kisubscript𝑘𝑖k_{i} un corps de nombres pisubscript𝑝𝑖p_{i}-adique, c’est-à-dire une extension finie de pisubscriptsubscript𝑝𝑖\mathbb{Q}_{p_{i}}. Supposons les groupes tempérés modérés isomorphes :

π1temp,(p1)(𝔇p1/k11)π1temp,(p2)(𝔇p2/k21),similar-to-or-equalssuperscriptsubscript𝜋1tempsuperscriptsubscript𝑝1subscriptsuperscript𝔇1subscriptsubscript𝑝1subscript𝑘1superscriptsubscript𝜋1tempsuperscriptsubscript𝑝2subscriptsuperscript𝔇1subscriptsubscript𝑝2subscript𝑘2{\pi_{1}^{\mathrm{temp},(p_{1})^{\prime}}(\mathfrak{D}^{1}_{\mathbb{C}_{p_{1}}/k_{1}})\simeq\pi_{1}^{\mathrm{temp},(p_{2})^{\prime}}(\mathfrak{D}^{1}_{\mathbb{C}_{p_{2}}/k_{2}})},

alors p1=p2subscript𝑝1subscript𝑝2p_{1}=p_{2}, et les extensions k1/p1subscript𝑘1subscriptsubscript𝑝1k_{1}/\mathbb{Q}_{p_{1}} et k2/p2subscript𝑘2subscriptsubscript𝑝2k_{2}/\mathbb{Q}_{p_{2}} ont même degré d’inertie : [k1~:𝔽p1]=[k2~:𝔽p2][\widetilde{k_{1}}:\mathbb{F}_{p_{1}}]=[\widetilde{k_{2}}:\mathbb{F}_{p_{2}}], d’où un isomorphisme k1~k2~similar-to-or-equals~subscript𝑘1~subscript𝑘2\widetilde{k_{1}}\simeq\widetilde{k_{2}}.

Démonstration.

Nous savons que 𝔇pi/ki1subscriptsuperscript𝔇1subscriptsubscript𝑝𝑖subscript𝑘𝑖\mathfrak{D}^{1}_{\mathbb{C}_{p_{i}}/k_{i}} est une courbe pisubscriptsubscript𝑝𝑖\mathbb{C}_{p_{i}}-analytiquement hyperbolique à arêtes relativement compactes. Par conséquent, le théorème 3.44 permet d’affirmer que le groupe π1temp,(p)(𝔇pi/ki1)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝subscriptsuperscript𝔇1subscriptsubscript𝑝𝑖subscript𝑘𝑖\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(\mathfrak{D}^{1}_{\mathbb{C}_{p_{i}}/k_{i}}) détermine la classe d’isomorphisme du semi-graphe San(𝔇pi/ki1)=𝔅ki1superscript𝑆ansubscriptsuperscript𝔇1subscriptsubscript𝑝𝑖subscript𝑘𝑖subscriptsuperscript𝔅1subscript𝑘𝑖S^{\mathrm{an}}(\mathfrak{D}^{1}_{\mathbb{C}_{p_{i}}/k_{i}})=\mathfrak{B}^{1}_{k_{i}} (on n’utilise pas ici la fonctorialité de φφ¯maps-to𝜑¯𝜑\varphi\mapsto\overline{\varphi} du théorème 3.44). Or tous les sommets de 𝔅ki1subscriptsuperscript𝔅1subscript𝑘𝑖\mathfrak{B}^{1}_{k_{i}} ont une valence égale à qi+1subscript𝑞𝑖1q_{i}+1, où qi=pifisubscript𝑞𝑖superscriptsubscript𝑝𝑖subscript𝑓𝑖q_{i}=p_{i}^{f_{i}} est le cardinal de ki~~subscript𝑘𝑖\widetilde{k_{i}} et fi=[ki~:𝔽pi]f_{i}=[\widetilde{k_{i}}:\mathbb{F}_{p_{i}}] est le degré d’inertie de ki/pisubscript𝑘𝑖subscriptsubscript𝑝𝑖k_{i}/\mathbb{Q}_{p_{i}}. Ainsi on en déduit q1=q2subscript𝑞1subscript𝑞2q_{1}=q_{2}, puis p1=p2subscript𝑝1subscript𝑝2p_{1}=p_{2} et enfin f1=f2subscript𝑓1subscript𝑓2f_{1}=f_{2} en calculant lnqi/lnpisubscript𝑞𝑖subscript𝑝𝑖\ln q_{i}/\ln p_{i}. ∎

3.3.3 Reconstruction des arêtes ouvertes

Nous venons de montrer que l’on peut retrouver le squelette analytique tronqué d’une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique à partir de son groupe tempéré, ce qui correspond au squelette tout entier dans les cas où les courbes en question sont à arêtes relativement compactes. Peut-on retrouver de manière générale tout le squelette d’une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique à partir de son groupe tempéré ? En nous inspirant de ce que fait Mochizuki dans [Mzk333], nous allons définir les courbes k𝑘k-analytiquement anabéliennes comme l’ensemble des courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques vérifiant une condition technique dite d’ascendance vicinale, que nous énoncerons, puis nous montrerons comment ces techniques de reconstruction au niveau de tous les revêtement étales finis (sans se restreindre aux revêtements modérés) d’une courbe k𝑘k-analytiquement anabélienne permettent de retrouver à partir du groupe tempéré de la courbe les arêtes ouvertes du squelette qui faisaient défaut dans le squelette tronqué.

Lemme 3.46.

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique, et X𝑓X𝑓superscript𝑋𝑋X^{\prime}\xrightarrow{f}X un revêtement fini étale connexe. Alors Xsuperscript𝑋X^{\prime} est une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique. De plus f1(ΣX)ΣXsuperscript𝑓1subscriptΣ𝑋subscriptΣsuperscript𝑋f^{-1}(\Sigma_{X})\subseteq\Sigma_{X^{\prime}}, et ΣXsubscriptΣsuperscript𝑋\Sigma_{X^{\prime}} est une triangulation de Xsuperscript𝑋X^{\prime} dès que ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X} est une triangulation de X𝑋X.

Démonstration.

Le revêtement f:XX:𝑓superscript𝑋𝑋f:X^{\prime}\rightarrow X est fini et plat et ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X} et ΣXsubscriptΣsuperscript𝑋\Sigma_{X^{\prime}} sont respectivement l’ensemble des nœuds de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) et de San(X)superscript𝑆ansuperscript𝑋S^{\mathrm{an}}(X^{\prime}), ainsi l’on déduit directement de [Duc] (Proposition 6.2.56256.2.5) que f1(ΣX)ΣXsuperscript𝑓1subscriptΣ𝑋subscriptΣsuperscript𝑋f^{-1}(\Sigma_{X})\subseteq\Sigma_{X^{\prime}}. En particulier ΣXsubscriptΣsuperscript𝑋\Sigma_{X^{\prime}} est non vide.

Soit sΣXsuperscript𝑠subscriptΣsuperscript𝑋s^{\prime}\in\Sigma_{X^{\prime}}, supposons qu’il existe sΣX𝑠subscriptΣ𝑋s\in\Sigma_{X} tel que sf1({s})superscript𝑠superscript𝑓1𝑠s^{\prime}\in f^{-1}(\{s\}). En reprenant les notations de la définition 3.26, l’hyperbolicité de s𝑠s se traduit par : 2g(s)+valSan(X)(s)+n~s>22𝑔𝑠subscriptvalsuperscript𝑆an𝑋𝑠subscript~𝑛𝑠22g(s)+\mathrm{val}_{S^{\mathrm{an}}(X)}(s)+\widetilde{n}_{s}>2. Or f𝑓f est fini, ainsi sanX𝑠superscriptan𝑋s\in\partial^{\mathrm{an}}X implique sanXsuperscript𝑠superscriptansuperscript𝑋s^{\prime}\in\partial^{\mathrm{an}}X^{\prime}, c’est-à-dire n~s>0subscript~𝑛superscript𝑠0\widetilde{n}_{s^{\prime}}>0 dès que n~s>0subscript~𝑛𝑠0\widetilde{n}_{s}>0. Par ailleurs valSan(X)(s)valSan(X)(s)subscriptvalsuperscript𝑆ansuperscript𝑋superscript𝑠subscriptvalsuperscript𝑆an𝑋𝑠\mathrm{val}_{S^{\mathrm{an}}(X^{\prime})}(s^{\prime})\geqslant\mathrm{val}_{S^{\mathrm{an}}(X)}(s), et la formule de Riemann-Hurwitz permet d’affirmer que g(s)g(s)𝑔superscript𝑠𝑔𝑠g(s^{\prime})\geqslant g(s). On en déduit que ssuperscript𝑠s^{\prime} est un nœud hyperbolique. Supposons que sf1(ΣX)superscript𝑠superscript𝑓1subscriptΣ𝑋s^{\prime}\notin f^{-1}(\Sigma_{X}). Cela implique que san(X)superscript𝑠superscriptansuperscript𝑋s^{\prime}\notin\partial^{\mathrm{an}}(X^{\prime}), car dans le cas contraire la finitude de f𝑓f entraînerait f(s)an(X)𝑓superscript𝑠superscriptan𝑋f(s^{\prime})\in\partial^{\mathrm{an}}(X) et de là f(s)ΣX𝑓superscript𝑠subscriptΣ𝑋f(s^{\prime})\in\Sigma_{X}, ce qui n’est pas le cas. Par conséquent n~s=0subscript~𝑛superscript𝑠0\widetilde{n}_{s^{\prime}}=0. On a aussi valSan(X)(s)1subscriptvalsuperscript𝑆ansuperscript𝑋superscript𝑠1\mathrm{val}_{S^{\mathrm{an}}(X^{\prime})}(s^{\prime})\geqslant 1 car si cette dernière était nulle, par connexité de San(X)superscript𝑆ansuperscript𝑋S^{\mathrm{an}}(X^{\prime}), on aurait ΣX={s}subscriptΣsuperscript𝑋superscript𝑠\Sigma_{X^{\prime}}=\{s^{\prime}\}, et comme ΣXf1(ΣX)subscriptΣsuperscript𝑋superscript𝑓1subscriptΣ𝑋\Sigma_{X^{\prime}}\cap f^{-1}(\Sigma_{X})\neq\emptyset cela donnerait sf1(ΣX)superscript𝑠superscript𝑓1subscriptΣ𝑋s^{\prime}\in f^{-1}(\Sigma_{X}). Si ssuperscript𝑠s^{\prime} est unibranché dans San(X)superscript𝑆ansuperscript𝑋S^{\mathrm{an}}(X^{\prime}) ou de valence égale à 222, alors en tant que nœud de San(X)superscript𝑆ansuperscript𝑋S^{\mathrm{an}}(X^{\prime}) il doit vérifier g(s)>0𝑔superscript𝑠0g(s^{\prime})>0, d’où l’hyperbolicité de s𝑠s (si valSan(X)(s)3subscriptvalsuperscript𝑆ansuperscript𝑋superscript𝑠3\mathrm{val}_{S^{\mathrm{an}}(X^{\prime})}(s^{\prime})\geqslant 3 le nœud ssuperscript𝑠s^{\prime} est automatiquement hyperbolique). On en déduit que Xsuperscript𝑋X^{\prime} est une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique. ∎

Soient X1subscript𝑋1X_{1} et X2subscript𝑋2X_{2} deux courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques. Pour i{1,2}𝑖1.2i\in\{1,2\}, notons Δi:=π1temp(Xi)assignsubscriptΔ𝑖superscriptsubscript𝜋1tempsubscript𝑋𝑖{\Delta_{i}:=\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X_{i})}, et supposons donné un isomorphisme φ:Δ1Δ2:𝜑similar-tosubscriptΔ1subscriptΔ2\varphi:\Delta_{1}\xrightarrow{\sim}\Delta_{2}. Soient Δ1Δ1superscriptsubscriptΔ1subscriptΔ1\Delta_{1}^{\prime}\subseteq\Delta_{1} et Δ2Δ2superscriptsubscriptΔ2subscriptΔ2\Delta_{2}^{\prime}\subseteq\Delta_{2} deux sous-groupes ouverts d’indice fini se correspondant via φ𝜑\varphi, et XifiXisubscript𝑓𝑖subscriptsuperscript𝑋𝑖subscript𝑋𝑖X^{\prime}_{i}\xrightarrow{f_{i}}X_{i} les revêtements finis étales connexes associés (en particulier on a l’égalité Δi=π1temp(Xi)superscriptsubscriptΔ𝑖superscriptsubscript𝜋1tempsuperscriptsubscript𝑋𝑖\Delta_{i}^{\prime}=\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X_{i}^{\prime})).

Corollaire 3.47.

Les techniques de reconstruction du corollaire 3.41 s’appliquent aux sous-groupes Δ1superscriptsubscriptΔ1\Delta_{1}^{\prime} et Δ2superscriptsubscriptΔ2\Delta_{2}^{\prime} se correspondant via φ𝜑\varphi, c’est-à-dire que l’isomorphisme φ:π1temp(X1)π2temp(X2):𝜑similar-tosuperscriptsubscript𝜋1tempsubscript𝑋1superscriptsubscript𝜋2tempsubscript𝑋2\varphi:\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X_{1})\xrightarrow{\sim}\pi_{2}^{\mathrm{temp}}(X_{2}) induit un isomorphisme de graphes d’anabélioïdes 𝒢(X1,ΣX1)𝒢(X2,ΣX2)similar-tosuperscript𝒢superscriptsubscript𝑋1subscriptΣsuperscriptsubscript𝑋1superscript𝒢superscriptsubscript𝑋2subscriptΣsuperscriptsubscript𝑋2\mathcal{G}^{\natural}(X_{1}^{\prime},\Sigma_{X_{1}^{\prime}})\xrightarrow{\sim}\mathcal{G}^{\natural}(X_{2}^{\prime},\Sigma_{X_{2}^{\prime}}), donc en particulier un isomorphisme de graphes :

San(X1)San(X2).similar-tosuperscript𝑆ansuperscriptsuperscriptsubscript𝑋1superscript𝑆ansuperscriptsuperscriptsubscript𝑋2S^{\mathrm{an}}(X_{1}^{\prime})^{\natural}\xrightarrow{\sim}S^{\mathrm{an}}(X_{2}^{\prime})^{\natural}.
Définition 3.48.

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique et ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X} l’ensemble non vide des nœuds de son squelette analytique. Après l’identification donnée par l’isomorphisme π1temp(𝒢(X,ΣX))π1temp,(p)(X)similar-to-or-equalssuperscriptsubscript𝜋1temp𝒢𝑋subscriptΣ𝑋superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝𝑋\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(\mathcal{G}(X,\Sigma_{X}))\simeq\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X), nous dirons qu’un sous-groupe compact de π1temp,(p)(X)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝𝑋\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X) est un :

  • sous-groupe vicinal s’il est de la forme πesubscript𝜋𝑒\pi_{e} pour une arête e𝑒e fermée, c’est-à-dire associée à une couronne relativement compacte,

  • sous-groupe cuspidal s’il est de la forme πesubscript𝜋𝑒\pi_{e} pour e𝑒e une arête ouverte, en particulier c’est le groupe associé à une couronne non relativement compacte dès que ΣXsubscriptΣ𝑋\Sigma_{X} forme une vraie triangulation de X𝑋X.

L’étude menée des composantes coronaires nous permet d’affirmer que les sous-groupes vicinaux tout autant que cuspidaux sont isomorphes à ^(p)superscript^superscript𝑝\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}.

Remarque 3.49.

D’après [Mzk333] (théorème 3.7373.7), nous savons que les sous-groupes compacts maximaux de π1temp,(p)(X)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝𝑋\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X) correspondent exactement aux sous-groupes sommitaux, c’est-à-dire de la forme πvsubscript𝜋𝑣\pi_{v} pour vΣX𝑣subscriptΣ𝑋v\in\Sigma_{X}, et que les sous-groupes vicinaux sont exactement les intersections non triviales de deux sous-groupes compacts maximaux. Un sous-groupe cuspidal n’est en revanche contenu que dans un seul sous-groupe compact maximal de π1temp,(p)(X)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑝𝑋\pi_{1}^{\mathrm{temp},\,(p^{\prime})}(X). Par conséquent, un sous-groupe ne peut être à la fois vicinal et cuspidal.

Définition 3.50.

Si G𝐺G est un groupe et HG𝐻𝐺H\subseteq G un sous-groupe, le commensurateur de H𝐻H dans G𝐺G, noté CG(H)subscript𝐶𝐺𝐻C_{G}(H), est le sous-groupe de G𝐺G défini par :

CG(H):={gG(gHg1H)est d’indice fini dansHet dansgHg1}.assignsubscript𝐶𝐺𝐻conditional-set𝑔𝐺𝑔𝐻superscript𝑔1𝐻est d’indice fini dans𝐻et dans𝑔𝐻superscript𝑔1C_{G}(H):=\{g\in G\mid(gHg^{-1}\cap H)\;\text{est d'indice fini dans}\;H\;\text{et dans}\;gHg^{-1}\}.

On dira que H𝐻H est commensurément terminal dans G𝐺G lorsque CG(H)=Hsubscript𝐶𝐺𝐻𝐻C_{G}(H)=H.

Remarque 3.51.

La terminalité commensurable est préservée par restriction du groupe total : si G𝜄G𝜄superscript𝐺𝐺G^{\prime}\xhookrightarrow{\iota}G est une injection de groupes et HGsuperscript𝐻superscript𝐺H^{\prime}\subseteq G^{\prime} un sous-groupe, alors Hsuperscript𝐻H^{\prime} est commensurément terminal dans Gsuperscript𝐺G^{\prime} dès que ι(H)𝜄superscript𝐻\iota(H^{\prime}) est commensurément terminal dans G𝐺G. Cela découle directement des définitions.

Lemme 3.52.

Si G𝐺G est un groupe dont H𝐻H est un sous-groupe commensurément terminal, alors H𝐻H est uniquement déterminé par n’importe lequel de ses sous-groupes d’indice fini.

Démonstration.

Deux sous-groupes A𝐴A et B𝐵B de G𝐺G sont dits commensurables si les deux indices [A:AB]delimited-[]:𝐴𝐴𝐵[A:A\cap B] et [B:AB]delimited-[]:𝐵𝐴𝐵[B:A\cap B] sont finis. Il s’agit d’une relation d’équivalence sur l’ensemble des sous-groupes de G𝐺G, notée similar-to\sim. La symétrie et la réflexivité étant évidentes, la transitivité se montre comme suit : si A,B𝐴𝐵A,B et C𝐶C sont trois sous-groupes de G𝐺G vérifiant ABsimilar-to𝐴𝐵A\sim B et BCsimilar-to𝐵𝐶B\sim C, alors :

[A:AC][A:ABC]\displaystyle[A:A\cap C]\leqslant[A:A\cap B\cap C] =[A:AB][AB:ABC]\displaystyle=[A:A\cap B]\cdot[A\cap B:A\cap B\cap C]
[A:AB][B:BC]<+,\displaystyle\leqslant[A:A\cap B]\cdot[B:B\cap C]<+\infty,

et l’on a également [C:AC]delimited-[]:𝐶𝐴𝐶[C:A\cap C] par symétrie, d’où ACsimilar-to𝐴𝐶A\sim C. Par ailleurs cette relation d’équivalence est stable par automorphisme de G𝐺G, et gCG(A)𝑔subscript𝐶𝐺𝐴g\in C_{G}(A) si et seulement si AgAg1similar-to𝐴𝑔𝐴superscript𝑔1A\sim gAg^{-1}. De là, si ABsimilar-to𝐴𝐵A\sim B, alors :

gCG(A)AgAg1BAgAg1gBg1BgBg1gCG(B).𝑔subscript𝐶𝐺𝐴similar-to𝐴𝑔𝐴superscript𝑔1similar-to𝐵𝐴similar-to𝑔𝐴superscript𝑔1similar-to𝑔𝐵superscript𝑔1similar-to𝐵𝑔𝐵superscript𝑔1𝑔subscript𝐶𝐺𝐵\displaystyle g\in C_{G}(A)\Leftrightarrow A\sim gAg^{-1}\Leftrightarrow B\sim A\sim gAg^{-1}\sim gBg^{-1}\Leftrightarrow B\sim gBg^{-1}\Leftrightarrow g\in C_{G}(B).

Ainsi deux groupes commensurables ont même commensurateur.

Revenons au sous-groupe commensurément terminal H𝐻H de G𝐺G, et soit V𝑉V un sous-groupe d’indice fini de H𝐻H. On a HVsimilar-to𝐻𝑉H\sim V, par conséquent H=CG(H)=CG(V)𝐻subscript𝐶𝐺𝐻subscript𝐶𝐺𝑉H=C_{G}(H)=C_{G}(V).

Lemme 3.53.

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique. Notons Δ:=π1temp(X)assignΔsuperscriptsubscript𝜋1temp𝑋\Delta:=\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X). Alors tout sous-groupe cuspidal de Δ(p)superscriptΔsuperscript𝑝\Delta^{\,(p^{\prime})} est commensurément terminal dans Δ(p)superscriptΔsuperscript𝑝\Delta^{\,(p^{\prime})}. Un sous-groupe cuspidal étant compact, il est dès lors (d’après le lemme 3.52 précédent) uniquement déterminé par n’importe lequel de ses sous-groupes ouverts.

Démonstration.

Soit πxΔ(p)subscript𝜋𝑥superscriptΔsuperscript𝑝\pi_{x}\subset\Delta^{\,(p^{\prime})} un sous-groupe cuspidal associé à un cusp x𝑥x aboutissant à sΣX𝑠subscriptΣ𝑋s\in\Sigma_{X}. En notant Δ^(p)superscript^Δsuperscript𝑝\widehat{\Delta}^{\,(p^{\prime})} le complété pro-psuperscript𝑝p^{\prime} fini de ΔΔ\Delta, on a Δ^(p)=π1t(X)superscript^Δsuperscript𝑝superscriptsubscript𝜋1t𝑋\widehat{\Delta}^{\,(p^{\prime})}=\pi_{1}^{\mathrm{t}}(X) (groupe fondamental modéré profini de X𝑋X) et une injection Δ(p)Δ^(p)superscriptΔsuperscript𝑝superscript^Δsuperscript𝑝\Delta^{\,(p^{\prime})}\hookrightarrow\widehat{\Delta}^{\,(p^{\prime})} donnée par la proposition 1.37. D’après la remarque 3.51, il suffit de montrer que πxsubscript𝜋𝑥\pi_{x} est commensurément terminal dans Δ^(p)superscript^Δsuperscript𝑝\widehat{\Delta}^{\,(p^{\prime})}, cela impliquera qu’il l’est également dans Δ(p)superscriptΔsuperscript𝑝\Delta^{\,(p^{\prime})}. Supposons par l’absurde que πxsubscript𝜋𝑥\pi_{x} n’est pas commensurément terminal dans Δ^(p)superscript^Δsuperscript𝑝\widehat{\Delta}^{\,(p^{\prime})}, c’est-à-dire qu’il existe un élément σΔ^(p)𝜎superscript^Δsuperscript𝑝\sigma\in\widehat{\Delta}^{\,(p^{\prime})} n’appartenant pas à πxsubscript𝜋𝑥\pi_{x} et tel que πxπxσsubscript𝜋𝑥superscriptsubscript𝜋𝑥𝜎\pi_{x}\cap\pi_{x}^{\sigma} soit d’indice fini et donc ouvert dans πxsubscript𝜋𝑥\pi_{x} et πxσsuperscriptsubscript𝜋𝑥𝜎\pi_{x}^{\sigma} (où l’on note πxσ:=σπxσ1assignsuperscriptsubscript𝜋𝑥𝜎𝜎subscript𝜋𝑥superscript𝜎1\pi_{x}^{\sigma}:=\sigma\pi_{x}\sigma^{-1}). Puisque πxsubscript𝜋𝑥\pi_{x} et πxσsuperscriptsubscript𝜋𝑥𝜎\pi_{x}^{\sigma} sont compacts, leurs topologies profinies sont celles induite par la topologie profinie de Δ^(p)superscript^Δsuperscript𝑝\widehat{\Delta}^{\,(p^{\prime})}, et comme les sous-groupes ouverts distingués de Δ^(p)superscript^Δsuperscript𝑝\widehat{\Delta}^{\,(p^{\prime})} forment une base d’ouverts, il existe un sous-groupe ouvert distingué 𝒰Δ^(p)𝒰superscript^Δsuperscript𝑝\mathcal{U}\triangleleft\widehat{\Delta}^{\,(p^{\prime})} vérifiant :

πx𝒰πxπxσetπxσ𝒰πxπxσformulae-sequencesubscript𝜋𝑥𝒰subscript𝜋𝑥superscriptsubscript𝜋𝑥𝜎etsuperscriptsubscript𝜋𝑥𝜎𝒰subscript𝜋𝑥superscriptsubscript𝜋𝑥𝜎\pi_{x}\cap\mathcal{U}\subseteq\pi_{x}\cap\pi_{x}^{\sigma}\,\,\,\,\,\,\,\text{et}\,\,\,\,\,\,\,\pi_{x}^{\sigma}\cap\mathcal{U}\subseteq\pi_{x}\cap\pi_{x}^{\sigma}

De là on obtient : πx𝒰=πxπxσ𝒰=πxσ𝒰=(πx𝒰)σsubscript𝜋𝑥𝒰subscript𝜋𝑥superscriptsubscript𝜋𝑥𝜎𝒰superscriptsubscript𝜋𝑥𝜎𝒰superscriptsubscript𝜋𝑥𝒰𝜎\;\;\;\;\pi_{x}\cap\mathcal{U}=\pi_{x}\cap\pi_{x}^{\sigma}\cap\mathcal{U}=\pi_{x}^{\sigma}\cap\mathcal{U}=(\pi_{x}\cap\mathcal{U})^{\sigma}.

Soit Z𝑓X𝑓𝑍𝑋Z\xrightarrow{f}X le revêtement fini modéré connexe et galoisien donné par 𝒰𝒰\mathcal{U}, de sorte que 𝒰=π1t(Z)𝒰superscriptsubscript𝜋1t𝑍\mathcal{U}=\pi_{1}^{\mathrm{t}}(Z). Soit z𝑧z un cusp de Z𝑍Z (i.e. une composante associée à une arête ouverte de San(Z)superscript𝑆an𝑍S^{\mathrm{an}}(Z)) au-dessus de x𝑥x tel que zσzsuperscript𝑧𝜎𝑧z^{\sigma}\neq z (cela est possible quitte à prendre 𝒰𝒰\mathcal{U} suffisamment petit, car σπx𝜎subscript𝜋𝑥\sigma\notin\pi_{x}). Les groupes πz:=πx𝒰assignsubscript𝜋𝑧subscript𝜋𝑥𝒰\pi_{z}:=\pi_{x}\cap\mathcal{U} et πzσ:=(πx𝒰)σassignsubscript𝜋superscript𝑧𝜎superscriptsubscript𝜋𝑥𝒰𝜎\pi_{z^{\sigma}}:=(\pi_{x}\cap\mathcal{U})^{\sigma} sont les groupes d’inertie de z𝑧z et zσsuperscript𝑧𝜎z^{\sigma}, et l’on a πz=πzσsubscript𝜋𝑧subscript𝜋superscript𝑧𝜎\pi_{z}=\pi_{z^{\sigma}}. On peut supposer, qui à restreindre à nouveau 𝒰𝒰\mathcal{U}, que Z𝑍Z admet un autre cusp zsuperscript𝑧z^{\prime} au-dessus de x𝑥x, distinct de z𝑧z et zσsuperscript𝑧𝜎z^{\sigma}.

Soit san(Z)𝑠superscriptan𝑍s\in\partial^{\mathrm{an}}(Z). Comme Z𝑍Z est quasi-lisse en s𝑠s, il existe une courbe k𝑘k-analytique lisse Yssubscript𝑌𝑠Y_{s} et un voisinage Vssubscript𝑉𝑠V_{s} de s𝑠s dans Z𝑍Z tel que Vssubscript𝑉𝑠V_{s} s’identifie à un domaine analytique fermé de Yssubscript𝑌𝑠Y_{s}. Fixons un voisinage affinoïde Wssubscript𝑊𝑠W_{s} de s𝑠s dans Yssubscript𝑌𝑠Y_{s}; l’intersection Ts:=VsWsassignsubscript𝑇𝑠subscript𝑉𝑠subscript𝑊𝑠{T_{s}:=V_{s}\cap W_{s}} s’identifie à un voisinage analytique compact de s𝑠s dans Z𝑍Z. Quitte à restreindre chacun des Wssubscript𝑊𝑠W_{s}, pour s𝑠s parcourant an(Z)superscriptan𝑍\partial^{\mathrm{an}}(Z), on peut supposer que les Tssubscript𝑇𝑠T_{s} sont disjoints dans Z𝑍Z. Soit Z+superscript𝑍Z^{+} la courbe k𝑘k-analytique obtenue en recollant Wscoproductsubscript𝑊𝑠\coprod W_{s} et Z𝑍Z le long de Tscoproductsubscript𝑇𝑠\coprod T_{s}. On peut par ailleurs restreindre Z+superscript𝑍Z^{+} de manière à ce que sous l’injection San(Z)San(Z+)superscript𝑆an𝑍superscript𝑆ansuperscript𝑍S^{\mathrm{an}}(Z)\hookrightarrow S^{\mathrm{an}}(Z^{+}) les arêtes ouvertes de Z𝑍Z (i.e. les cusps de Z𝑍Z) restent des arêtes ouvertes de San(Z+)superscript𝑆ansuperscript𝑍S^{\mathrm{an}}(Z^{+}).


Fixons un entier 22\ell\geqslant 2 premier à p𝑝p. Comme la courbe Z+superscript𝑍Z^{+} est lisse, le diagramme 2.33 nous permet d’exhiber un morphisme de groupes surjectif :

H1(Ze´t+,μ)θ𝖧𝖺𝗋𝗆(San(Z+),/).\mathrm{H}^{1}(Z^{+}_{\mathrm{\acute{e}t}},\mu_{\ell})\xrightarrow{\qquad\theta\qquad}\mathsf{Harm}(S^{\mathrm{an}}(Z^{+}),\mathbb{Z}/\ell\mathbb{Z}).

Soient ez,ezσsubscript𝑒𝑧subscript𝑒superscript𝑧𝜎e_{z},e_{z^{\sigma}} et ezsubscript𝑒superscript𝑧e_{z^{\prime}} les arêtes ouvertes de San(Z+)superscript𝑆ansuperscript𝑍S^{\mathrm{an}}(Z^{+}) correspondant aux cusps z,zσ𝑧superscript𝑧𝜎z,z^{\sigma} et zsuperscript𝑧z^{\prime} de Z𝑍Z, et orientées vers le sommet auquel elles aboutissent. Le lemme 2.31 permet d’exhiber une cochaîne harmonique cHarm(San(Z+),/)𝑐Harmsuperscript𝑆ansuperscript𝑍c\in\mathrm{Harm}(S^{\mathrm{an}}(Z^{+}),\mathbb{Z}/\ell\mathbb{Z}) telle que c(ez)c(ezσ)𝑐subscript𝑒𝑧𝑐subscript𝑒superscript𝑧𝜎c(e_{z})\neq c(e_{z^{\sigma}}). Soit hH1(Ze´t,μ)superscriptH1subscript𝑍´etsubscript𝜇h\in\mathrm{H}^{1}(Z_{\mathrm{\acute{e}t}},\mu_{\ell}) la restriction à Z𝑍Z d’un élément de θ1({c})superscript𝜃1𝑐\theta^{-1}(\{c\}) vu comme une classe d’isomorphisme de μsubscript𝜇\mu_{\ell}-torseurs analytiques sur Z+superscript𝑍Z^{+}. Nous savons que hh définit (à isomorphisme près) un revêtement modéré de Z𝑍Z. Or θ(h)(ez)θ(h)(ezσ)𝜃subscript𝑒𝑧𝜃subscript𝑒superscript𝑧𝜎\theta(h)(e_{z})\neq\theta(h)(e_{z^{\sigma}}) contredit l’égalité des groupes d’inertie πz=πzσsubscript𝜋𝑧subscript𝜋superscript𝑧𝜎\pi_{z}=\pi_{z^{\sigma}}, d’où la commensurabilité terminale de tout sous-groupe cuspidal dans Δ^(p)superscript^Δsuperscript𝑝\widehat{\Delta}^{\,(p^{\prime})} et donc dans Δ(p)superscriptΔsuperscript𝑝\Delta^{\,(p^{\prime})}.

Par ailleurs tout sous-groupe cuspidal étant compact, ses sous-groupes ouverts sont d’indice fini. Il suffit dès lors d’appliquer le lemme 3.52 précédent pour obtenir qu’un sous-groupe cuspidal est uniquement déterminé par n’importe lequel de ses sous-groupes ouverts. ∎

Remarque 3.54.

Soit ΔΔ=π1temp(X)superscriptΔΔsuperscriptsubscript𝜋1temp𝑋\Delta^{\prime}\subseteq\Delta=\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X) un sous-groupe ouvert d’indice fini, et XXsuperscript𝑋𝑋X^{\prime}\to X le revêtement fini défini par ce sous-groupe. Soit 𝒞superscript𝒞\mathcal{C}^{\prime} une couronne de Xsuperscript𝑋X^{\prime} correspondant à une arête fermée esuperscript𝑒e^{\prime} de San(X)superscript𝑆ansuperscript𝑋S^{\mathrm{an}}(X^{\prime}) s’envoyant sur une couronne 𝒞𝒞\mathcal{C} de X𝑋X correspondant à une arête e𝑒e fermée ou ouverte de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X). Quitte à identifier 𝒞𝒞\mathcal{C} (resp. 𝒞superscript𝒞\mathcal{C}^{\prime}) au domaine analytique de k1,ansuperscriptsubscript𝑘1an\mathbb{P}_{k}^{1,\mathrm{an}} défini par la condition |T|I𝑇𝐼|T|\in I (resp. |T|J𝑇𝐽|T|\in J) avec I𝐼I (resp. J𝐽J) un intervalle de +subscriptsuperscript\mathbb{R}^{*}_{+}, le morphisme envoyant 𝒞𝒞\mathcal{C} sur 𝒞superscript𝒞\mathcal{C}^{\prime} est défini par une fonction analytique f𝑓f inversible sur 𝒞superscript𝒞\mathcal{C}^{\prime} s’écrivant f=iaiTi𝑓subscript𝑖subscript𝑎𝑖superscript𝑇𝑖f=\sum_{i\in\mathbb{Z}}a_{i}T^{i} et telle qu’il existe j{0}𝑗0j\in\mathbb{Z}\setminus\{0\} vérifiant |aj|rj>|ai|riconditionalsubscript𝑎𝑗ketsuperscript𝑟𝑗subscript𝑎𝑖superscript𝑟𝑖|a_{j}|r^{j}>|a_{i}|r^{i} pour tout rJ𝑟𝐽r\in J et i{j}𝑖𝑗i\in\mathbb{Z}\setminus\{j\}. Le morphisme 𝒞𝒞superscript𝒞𝒞\mathcal{C}^{\prime}\rightarrow\mathcal{C} est alors fini et plat de degré |j|𝑗|j| (cf. [Duc], 3.6.83683.6.8). Si 𝒞𝒞superscript𝒞𝒞\mathcal{C}^{\prime}\rightarrow\mathcal{C} est modéré, le morphisme de groupes injectif πeπesubscript𝜋superscript𝑒subscript𝜋𝑒\pi_{e^{\prime}}\hookrightarrow\pi_{e} qu’il induit identifie πesubscript𝜋superscript𝑒\pi_{e^{\prime}} à l’unique sous-groupe d’indice |j|𝑗|j| de πe=^(p)subscript𝜋𝑒superscript^superscript𝑝\pi_{e}=\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}, à savoir |j|^(p)𝑗superscript^superscript𝑝|j|\widehat{\mathbb{Z}}^{\,(p^{\prime})}, qui est ouvert.

Lemme 3.55.

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique. Notons Δ:=π1temp(X)assignΔsuperscriptsubscript𝜋1temp𝑋\Delta:=\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X). Si ΔΔsuperscriptΔΔ\Delta^{\prime}\subseteq\Delta est un sous-groupe ouvert d’indice fini induisant un morphisme ι:Δ(p)Δ(p):𝜄superscriptΔsuperscript𝑝superscriptΔsuperscript𝑝\iota:\Delta^{\prime\,(p^{\prime})}\rightarrow\Delta^{\,(p^{\prime})}, alors l’image selon ι𝜄\iota de tout sous-groupe vicinal de Δ(p)superscriptΔsuperscript𝑝\Delta^{\prime\,(p^{\prime})} est soit triviale, soit un sous-groupe ouvert d’un sous-groupe vicinal de Δ(p)superscriptΔsuperscript𝑝\Delta^{\,(p^{\prime})}, soit un sous-groupe ouvert d’un sous-groupe cuspidal de Δ(p)superscriptΔsuperscript𝑝\Delta^{\,(p^{\prime})}, ces cas étant mutuellement exclusifs.

Démonstration.

Le sous-groupe ΔΔsuperscriptΔΔ\Delta^{\prime}\subseteq\Delta définit un revêtement fini étale connexe X𝑓X𝑓superscript𝑋𝑋X^{\prime}\xrightarrow{f}X envoyant San(X)superscript𝑆ansuperscript𝑋S^{\mathrm{an}}(X^{\prime}) sur San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X). Comme f1(ΣX)ΣXsuperscript𝑓1subscriptΣ𝑋subscriptΣsuperscript𝑋f^{-1}(\Sigma_{X})\subseteq\Sigma_{X^{\prime}} (cf. lemme 3.46), l’image d’une arête fermée de San(X)superscript𝑆ansuperscript𝑋S^{\mathrm{an}}(X^{\prime}) est soit hors du squelette de X𝑋X (auquel cas l’image du sous-groupe vicinal associé est triviale), soit contenue dans une arête fermée, soit dans une arête ouverte de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) (d’après la remarque précédente 3.54), d’où les cas possibles.

Lorsque l’image est non triviale, le fait qu’un sous-groupe vicinal de Δ(p)superscriptΔsuperscript𝑝\Delta^{\prime\,(p^{\prime})} ne puisse s’envoyer à la fois sur des sous-groupes de sous-groupes vicinaux et cuspidaux de Δ(p)superscriptΔsuperscript𝑝\Delta^{\,(p^{\prime})} résulte directement du caractère totalement détaché du semi-graphe d’anabélioïdes 𝒢(X,ΣX).𝒢𝑋subscriptΣ𝑋\mathcal{G}(X,\Sigma_{X}).

Définition 3.56 (Courbes k𝑘k-analytiquement anabéliennes).

Une courbe k𝑘k-analytique non vide X𝑋X, connexe, quasi-lisse et de groupe tempéré noté Δ:=π1temp(X)assignΔsuperscriptsubscript𝜋1temp𝑋\Delta:=\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X) sera dite k𝑘k-analytiquement anabélienne lorsqu’elle est k𝑘k-analytiquement hyperbolique et qu’elle vérifie la condition suivante que l’on appellera propriété d’ascendance vicinale :


  • Tout sous-groupe cuspidal de Δ(p)superscriptΔsuperscript𝑝\Delta^{\,(p^{\prime})} admet un sous-groupe ouvert qui n’est autre que l’image d’un sous-groupe vicinal de Δ(p)superscriptΔsuperscript𝑝\Delta^{\prime\,(p^{\prime})} par le morphisme naturel ι:Δ(p)Δ(p):𝜄superscriptΔsuperscript𝑝superscriptΔsuperscript𝑝\iota:\Delta^{\prime\,(p^{\prime})}\rightarrow\Delta^{\,(p^{\prime})} induit par l’injection d’un certain sous-groupe ouvert ΔΔsuperscriptΔΔ\Delta^{\prime}\subseteq\Delta d’indice fini.

Théorème 3.57.

Soit X1subscript𝑋1X_{1} et X2subscript𝑋2X_{2} deux courbes k𝑘k-analytiquement anabéliennes. Supposons qu’il existe un isomorphisme entre les groupes tempérés :

φ:π1temp(X1)π2temp(X2).:𝜑similar-tosuperscriptsubscript𝜋1tempsubscript𝑋1superscriptsubscript𝜋2tempsubscript𝑋2{\varphi:\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X_{1})\xrightarrow{\sim}\pi_{2}^{\mathrm{temp}}(X_{2})}.

Alors φ𝜑\varphi induit un isomorphisme de semi-graphes φ¯:San(X1)San(X2),:¯𝜑similar-tosuperscript𝑆ansubscript𝑋1superscript𝑆ansubscript𝑋2\bar{\varphi}:S^{\mathrm{an}}(X_{1})\xrightarrow{\sim}S^{\mathrm{an}}(X_{2}), fonctoriel en φ𝜑\varphi.

Démonstration.

Pour i{1,2}𝑖1.2i\in\{1,2\}, notons ΣXisubscriptΣsubscript𝑋𝑖\Sigma_{X_{i}} l’ensemble (non vide) des nœuds du squelette analytique de Xisubscript𝑋𝑖X_{i}, et Δi=πitemp(Xi)subscriptΔ𝑖superscriptsubscript𝜋𝑖tempsubscript𝑋𝑖\Delta_{i}=\pi_{i}^{\mathrm{temp}}(X_{i}). Le corollaire 3.41 fournit un isomorphisme de graphes entre les squelettes tronqués :

φ~:San(X1)San(X2).:~𝜑similar-tosuperscript𝑆ansuperscriptsubscript𝑋1superscript𝑆ansuperscriptsubscript𝑋2\widetilde{\varphi}:S^{\mathrm{an}}(X_{1})^{\natural}\xrightarrow{\sim}S^{\mathrm{an}}(X_{2})^{\natural}.

Afin d’obtenir l’isomorphisme voulu entre les squelettes (non tronqués), il reste à montrer que la donnée de φ𝜑\varphi permet de retrouver les arêtes ouvertes, c’est-à-dire d’établir une bijection entre 𝒞(X1,ΣX1)superscript𝒞subscript𝑋1subscriptΣsubscript𝑋1\mathcal{C}^{\infty}(X_{1},\Sigma_{X_{1}}) et 𝒞(X2,ΣX2)superscript𝒞subscript𝑋2subscriptΣsubscript𝑋2\mathcal{C}^{\infty}(X_{2},\Sigma_{X_{2}}) compatible avec φ~~𝜑\widetilde{\varphi}.

Considérons une arête ouverte x1𝒞(X1,ΣX1)subscript𝑥1superscript𝒞subscript𝑋1subscriptΣsubscript𝑋1x_{1}\in\mathcal{C}^{\infty}(X_{1},\Sigma_{X_{1}}) de sous-groupe cuspidal associé πx1Δ1(p)subscript𝜋subscript𝑥1superscriptsubscriptΔ1superscript𝑝\pi_{x_{1}}\subset\Delta_{1}^{\,(p^{\prime})}. D’après la propriété d’ascendance vicinale dont jouit X1subscript𝑋1X_{1}, il est loisible de considérer un sous-groupe ouvert d’indice fini Δ1Δ1subscriptsuperscriptΔ1subscriptΔ1\Delta^{\prime}_{1}\subseteq\Delta_{1} tel que πx1subscript𝜋subscript𝑥1\pi_{x_{1}} admette un sous-groupe ouvert qui est l’image d’un sous-groupe vicinal πe1superscriptsubscript𝜋subscript𝑒1\pi_{e_{1}}^{\prime} de Δ1(p)superscriptsubscriptsuperscriptΔ1superscript𝑝{\Delta^{\prime}_{1}}^{\,(p^{\prime})} par le morphisme naturel ι1:Δ1(p)Δ1(p):subscript𝜄1superscriptsubscriptsuperscriptΔ1superscript𝑝superscriptsubscriptΔ1superscript𝑝\iota_{1}:{\Delta^{\prime}_{1}}^{\,(p^{\prime})}\rightarrow\Delta_{1}^{\,(p^{\prime})}. Considérons alors les groupes Δ2subscriptsuperscriptΔ2\Delta^{\prime}_{2} et π2Δ2(p)subscriptsuperscript𝜋2superscriptsubscriptsuperscriptΔ2superscript𝑝\pi^{\prime}_{2}\subseteq{\Delta^{\prime}_{2}}^{\,(p^{\prime})} associés par φ𝜑\varphi à Δ1subscriptsuperscriptΔ1\Delta^{\prime}_{1} et πe1Δ1(p)subscriptsuperscript𝜋subscript𝑒1superscriptsubscriptsuperscriptΔ1superscript𝑝\pi^{\prime}_{e_{1}}\subseteq{\Delta^{\prime}_{1}}^{\,(p^{\prime})}. Le lemme 3.55 nous permet alors d’affirmer que π2superscriptsubscript𝜋2\pi_{2}^{\prime} est un sous-groupe vicinal de Δ2(p)superscriptsubscriptsuperscriptΔ2superscript𝑝{\Delta^{\prime}_{2}}^{\,(p^{\prime})}, dont l’image par le morphisme ι2:Δ2(p)Δ2(p):subscript𝜄2superscriptsubscriptsuperscriptΔ2superscript𝑝superscriptsubscriptΔ2superscript𝑝\iota_{2}:{\Delta^{\prime}_{2}}^{\,(p^{\prime})}\rightarrow\Delta_{2}^{\,(p^{\prime})} est un sous-groupe ouvert d’un sous-groupe cuspidal πx2subscript𝜋subscript𝑥2\pi_{x_{2}} de Δ2(p)superscriptsubscriptΔ2superscript𝑝\Delta_{2}^{\,(p^{\prime})} pour un certain x2𝒞(X2,ΣX2)subscript𝑥2superscript𝒞subscript𝑋2subscriptΣsubscript𝑋2x_{2}\in\mathcal{C}^{\infty}(X_{2},\Sigma_{X_{2}}). Or, en sa qualité de commensurément terminal (voir lemme 3.53), πx2subscript𝜋subscript𝑥2\pi_{x_{2}} est entièrement déterminé par ce sous-groupe ouvert. D’autre part x2subscript𝑥2x_{2} est entièrement déterminé par πx2subscript𝜋subscript𝑥2\pi_{x_{2}} puisque la propriété dont jouit 𝒢(X2,ΣX2)superscript𝒢subscript𝑋2subscriptΣsubscript𝑋2\mathcal{G}^{\natural}(X_{2},\Sigma_{X_{2}}) d’être totalement détaché implique qu’une arête ouverte est entièrement déterminée par la classe de conjugaison de son sous-groupe cuspidal. Par ailleurs cette manière d’associer x2subscript𝑥2x_{2} à x1subscript𝑥1x_{1} ne dépend pas du choix du sous-groupe ouvert Δ1Δ1subscriptsuperscriptΔ1subscriptΔ1\Delta^{\prime}_{1}\subseteq\Delta_{1} vérifiant les propriétés requises : si Δ1′′superscriptsubscriptΔ1′′\Delta_{1}^{\prime\prime} est un autre sous-groupe ouvert d’indice fini de Δ1subscriptΔ1\Delta_{1} permettant d’associer x2′′𝒞(X2,ΣX2)superscriptsubscript𝑥2′′superscript𝒞subscript𝑋2subscriptΣsubscript𝑋2x_{2}^{\prime\prime}\in\mathcal{C}^{\infty}(X_{2},\Sigma_{X_{2}}) à x1subscript𝑥1x_{1}, alors l’intersection Δ1Δ1′′subscriptsuperscriptΔ1subscriptsuperscriptΔ′′1\Delta^{\prime}_{1}\cap\Delta^{\prime\prime}_{1} est un sous-groupe ouvert de Δ1subscriptΔ1\Delta_{1} d’indice fini permettant d’associer à x1subscript𝑥1x_{1} un élément x2′′′𝒞(X2,ΣX2)superscriptsubscript𝑥2′′′superscript𝒞subscript𝑋2subscriptΣsubscript𝑋2x_{2}^{\prime\prime\prime}\in\mathcal{C}^{\infty}(X_{2},\Sigma_{X_{2}}), qui par le corollaire 3.47 doit être égal à x2subscript𝑥2x_{2} tout autant qu’à x2′′superscriptsubscript𝑥2′′x_{2}^{\prime\prime}, d’où l’égalité x2=x2′′subscript𝑥2superscriptsubscript𝑥2′′x_{2}=x_{2}^{\prime\prime}.

Par conséquent x1x2maps-tosubscript𝑥1subscript𝑥2x_{1}\mapsto x_{2} est bien défini et induit une bijection 𝒞(X1,ΣX1)𝒞(X2,ΣX2)similar-tosuperscript𝒞subscript𝑋1subscriptΣsubscript𝑋1superscript𝒞subscript𝑋2subscriptΣsubscript𝑋2\mathcal{C}^{\infty}(X_{1},\Sigma_{X_{1}})\xrightarrow{\sim}\mathcal{C}^{\infty}(X_{2},\Sigma_{X_{2}}) compatible avec φ~~𝜑\widetilde{\varphi}, d’où le résultat escompté. ∎

Remarque 3.58.

La propriété d’ascendance vicinale fait appel à un sous groupe ouvert d’indice fini ΔΔsuperscriptΔΔ\Delta^{\prime}\subseteq\Delta associé à un revêtement étale X𝑓X𝑓superscript𝑋𝑋X^{\prime}\xrightarrow{f}X. Or, puisqu’il s’agit d’un sous-groupe de Δ=π1temp(X)Δsuperscriptsubscript𝜋1temp𝑋\Delta=\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X) et non de π1temp(X)(p)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑋superscript𝑝\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X)^{\,(p^{\prime})}, le morphisme f𝑓f n’a aucune raison d’être modéré. De là, c’est bien le groupe tempéré total π1temp(X)superscriptsubscript𝜋1temp𝑋\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X) qui détermine le squelette analytique San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) (d’après le théorème précédent), tandis que le groupe tempéré premier à p𝑝p, à savoir π1temp(X)(p)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑋superscript𝑝\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X)^{\,(p^{\prime})}, ne détermine que le squelette tronqué San(X)superscript𝑆ansuperscript𝑋S^{\mathrm{an}}(X)^{\natural}. Par ailleurs, il n’y aucun espoir que le groupe π1temp(X)(p)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑋superscript𝑝\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X)^{\,(p^{\prime})} premier à p𝑝p puisse déterminer tout le squelette analytique San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) dès que la courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique X𝑋X n’est pas à arêtes relativement compactes. En effet, considérons une composante connexe \mathcal{E} de XΣX𝑋subscriptΣ𝑋X\setminus\Sigma_{X} associée à une arête non relativement compacte (arête ouverte), et Y=X𝑌𝑋Y=X\setminus\mathcal{E} la courbe obtenue à partir de X𝑋X par ablation de \mathcal{E}. Une telle ablation rajoute du bord, de telle sorte que Y𝑌Y reste une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique. Par ailleurs il y a égalité des groupes tempérés premier à p𝑝p : π1temp(X)(p)=π1temp(Y)(p)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑋superscript𝑝superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑌superscript𝑝\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X)^{\,(p^{\prime})}=\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(Y)^{\,(p^{\prime})}, cela découle du théorème de rigidité 4.3.44344.3.4 de [Ber222] appliqué à l’immersion YX𝑌𝑋Y\hookrightarrow X ainsi que de la description des revêtement modérés d’une couronne et de l’expression de \mathcal{E} comme limite inductive de couronnes. En revanche les deux squelettes analytiques sont différents en tant que semi-graphes en ce que San(Y)superscript𝑆an𝑌S^{\mathrm{an}}(Y) est obtenu à partir de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) par ablation de l’arête ouverte associée à \mathcal{E}, d’où l’impossibilité de retrouver San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) à partir de π1temp(X)(p)superscriptsubscript𝜋1tempsuperscript𝑋superscript𝑝\pi_{1}^{\mathrm{temp}}(X)^{\,(p^{\prime})}.

3.3.4 Exemples de courbes k𝑘k-analytiquement anabéliennes :

Les courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques à arêtes relativement compactes (3.42) sont des exemples de courbes k𝑘k-analytiquement anabéliennes. De là, les courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques compactes tout autant que le demi-plan de Drinfeld sont des courbes k𝑘k-analytiquement anabéliennes. Ce ne sont cependant pas les seuls exemples de telles courbes, comme le montrent les résultats suivants.

Définition 3.59 (Cusps coronaires finis et discaux épointés).

Soit X𝑋X une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique. Un cusp tel que la composante connexe de XΣX𝑋subscriptΣ𝑋X\setminus\Sigma_{X} qu’il définit est une vraie couronne sera dit :

  • coronaire fini dès que la couronne associée est de module fini;

  • discal épointé dès que la couronne associée est isomorphe à un disque k𝑘k-analytique privé d’un point rigide (la couronne associée est alors de module infini).

Le corps k𝑘k sera dit de carctéristique mixte lorsque car(k)=0car𝑘0\mathrm{car}(k)=0 et car(k~)>0car~𝑘0\mathrm{car}(\widetilde{k})>0.

Proposition 3.60.

Si k𝑘k est de caractéristique mixte, alors toute courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique dont tous les cusps sont coronaires finis est k𝑘k-analytiquement anabélienne.

Démonstration.

Soit X𝑋X une telle courbe, et (ei)iIsubscriptsubscript𝑒𝑖𝑖𝐼(e_{i})_{i\in I} l’ensemble des cusps de X𝑋X, vus comme arêtes ouvertes de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X). Par hypothèse, pour chaque iI𝑖𝐼i\in I, la composante connexe de XΣX𝑋subscriptΣ𝑋X\setminus\Sigma_{X} déterminée par eisubscript𝑒𝑖e_{i} est une couronne de module fini que l’on note 𝒞isubscript𝒞𝑖\mathcal{C}_{i}. Soit xisubscript𝑥𝑖x_{i} le sommet de San(X)superscript𝑆an𝑋S^{\mathrm{an}}(X) auquel 𝒞isubscript𝒞𝑖\mathcal{C}_{i} aboutit. Le corollaire 2.36 assure l’existence d’un μpsubscript𝜇𝑝\mu_{p}-torseur Yisubscript𝑌𝑖Y_{i} de 𝒞isubscript𝒞𝑖\mathcal{C}_{i} et d’un point ziSan(𝒞i)subscript𝑧𝑖superscript𝑆ansubscript𝒞𝑖z_{i}\in S^{\mathrm{an}}(\mathcal{C}_{i}) tel que Yisubscript𝑌𝑖Y_{i} est totalement déployé au-dessus de l’ouvert r1(]zi,xi[)r^{-1}\left(\,]z_{i},x_{i}[\,\right) et non déployé avec un seul antécédent au-dessus du complémentaire de ]zi,xi[]z_{i},x_{i}[ dans San(𝒞i)superscript𝑆ansubscript𝒞𝑖S^{\mathrm{an}}(\mathcal{C}_{i}) (r𝑟r désigne ici la rétraction canonique de X𝑋X sur son squelette analytique). Soit Xsuperscript𝑋X^{\prime} l’ouvert de X𝑋X défini par :

X=XiIr1(San(𝒞i)]zi,xi[)=r1(San(X))iIr1(]zi,xi[).X^{\prime}=X\setminus\bigcup_{i\in I}r^{-1}\left(S^{\mathrm{an}}(\mathcal{C}_{i})\setminus\,]z_{i},x_{i}[\,\right)=r^{-1}\left(S^{\mathrm{an}}(X)^{\natural}\right)\cup\bigcup_{i\in I}r^{-1}\left(\,]z_{i},x_{i}[\,\right).

Soit Y𝑌Y le revêtement fini étale de X𝑋X obtenu en recollant chacun des Yisubscript𝑌𝑖Y_{i} au revêtement trivial de Xsuperscript𝑋X^{\prime} à p𝑝p feuillets le long des r1(]zi,xi[)r^{-1}\left(\,]z_{i},x_{i}[\,\right). Notons yiYsubscript𝑦𝑖𝑌y_{i}\in Y l’unique point au-dessus de zisubscript𝑧𝑖z_{i}, c’est un nœud de Xsuperscript𝑋X^{\prime}. Si x~iYsubscript~𝑥𝑖𝑌\widetilde{x}_{i}\in Y désigne l’un des p𝑝p antécédents de xisubscript𝑥𝑖x_{i}, alors ]yi,x~i[]y_{i},\widetilde{x}_{i}[ définit une arête fermée de San(X)superscript𝑆ansuperscript𝑋S^{\mathrm{an}}(X^{\prime}), dont le sous-groupe vicinal associé s’envoie sur un sous-groupe ouvert du sous-groupe cuspidal πeisubscript𝜋subscript𝑒𝑖\pi_{e_{i}}, et ce pour chaque iI𝑖𝐼i\in I. Par conséquent le revêtement Xsuperscript𝑋X^{\prime} assure que X𝑋X vérifie la propriété d’ascendance vicinale, d’où le résultat. On vient même de montrer par cette preuve que X𝑋X vérifie une propriété plus forte d’ «  ascendance vicinale simultanée   » en ce que l’on peut trouver un revêtement étale fini, Xsuperscript𝑋X^{\prime}, permettant l’ascendance vicinale de tous les cusps simultanément. ∎

Proposition 3.61.

Si 𝒳𝒳\mathscr{X} est une k𝑘k-courbe hyperbolique et k𝑘k est de caractéristique mixte, la courbe k𝑘k-analytique 𝒳ansuperscript𝒳an\mathscr{X}^{\mathrm{an}} est k𝑘k-analytiquement anabélienne.

Démonstration.

Cela est une reformulation directe de la propriété (iv) apparaissant dans la preuve du résultat 3.113113.11 de [Mzk333]. ∎

Remarquons qu’en vertu de la proposition ci-dessus, toute courbe marquée Y=X𝖤𝑌𝑋𝖤Y=X\setminus\mathsf{E} k𝑘k-analytiquement hyperbolique avec X𝑋X compacte est k𝑘k-analytiquement anabélienne.

Exemple 3.62.

Le cas d’une courbe elliptique. Nous avons vu dans l’exemple 3.34 une manière canonique d’associer à une k𝑘k-courbe elliptique 𝒳𝒳\mathscr{X} une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique : il s’agit de 𝒴=𝒳an{e}𝒴superscript𝒳an𝑒\mathscr{Y}=\mathscr{X}^{\mathrm{an}}\setminus\{e\}, où e𝒳(k)𝑒𝒳𝑘e\in\mathscr{X}(k) est l’élément neutre de 𝒳𝒳\mathscr{X}. Or, par ce qui précède, une telle courbe 𝒴𝒴\mathscr{Y} est k𝑘k-analytiquement anabélienne. Cela permet d’associer de manière canonique une courbe k𝑘k-analytiquement anabélienne à toute courbe elliptique sur k𝑘k.

Corollaire 3.63.

Toute courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique dont le squelette analytique est un semi-graphe fini et dont les cusps sont uniquement coronaires finis ou discaux épointés est k𝑘k-analytiquement anabélienne dès que k𝑘k est de caractéristique mixte.

Démonstration.

Soit X𝑋X une telle courbe. En reprenant verbatim le raisonnement de la preuve de la proposition 3.60, il est possible de construire un revêtement fini étale Xsuperscript𝑋X^{\prime} de X𝑋X assurant l’ascendance vicinale de tout cusp coronaire fini de X𝑋X. De là, quitte à prolonger tous les cusps coronaires finis en des cusps discaux épointés, on peut supposer dans le reste de la preuve que tous les cusps de X𝑋X sont discaux épointés. Remarquons que même si des cusps coronaires finis apparaissent dans Xsuperscript𝑋X^{\prime}, cela ne pose aucun problème en ce que l’ascendance vicinale des cusps ne doit pas nécessairement être «  simultanée   ».

Soit (ϖi)iIsubscriptsubscriptitalic-ϖ𝑖𝑖𝐼\left(\varpi_{i}\right)_{i\in I} l’ensemble (fini) des cusps discaux épointés, chacun associés à une couronne 𝒞isubscript𝒞𝑖\mathcal{C}_{i} s’incarnant comme un disque 𝒟isubscript𝒟𝑖\mathcal{D}_{i} privé d’un point rigide xisubscript𝑥𝑖x_{i}. Soit X¯¯𝑋\overline{X} la courbe k𝑘k-analytique obtenue à partir de X𝑋X :

  • en prolongeant chaque 𝒞isubscript𝒞𝑖\mathcal{C}_{i} à 𝒟isubscript𝒟𝑖\mathcal{D}_{i}, pour tout iI𝑖𝐼i\in I;

  • pour chaque xanX𝑥superscriptan𝑋x\in\partial^{\mathrm{an}}X, en prolongeant en des disques (𝒟x,j)1jn~xsubscriptsubscript𝒟𝑥𝑗1𝑗subscript~𝑛𝑥\left(\mathcal{D}_{x,j}\right)_{1\leqslant j\leqslant\widetilde{n}_{x}} les n~xsubscript~𝑛𝑥\widetilde{n}_{x} branches issues de x𝑥x manquant à X𝑋X en raison de l’appartenance de x𝑥x à son bord.

En sa qualité de compacte et sans bord, X¯¯𝑋\overline{X} est algébrisable : il existe une k𝑘k-courbe projective lisse 𝒳¯¯𝒳\overline{\mathscr{X}} telle que X¯=𝒳¯an¯𝑋superscript¯𝒳an\overline{X}=\overline{\mathscr{X}}^{\mathrm{an}}. Notons 𝒳=𝒳¯{(xi)iI}𝒳¯𝒳subscriptsubscript𝑥𝑖𝑖𝐼\mathscr{X}=\overline{\mathscr{X}}\setminus\{\left(x_{i}\right)_{i\in I}\} : on a San(X)=San(𝒳an)superscript𝑆an𝑋superscript𝑆ansuperscript𝒳anS^{\mathrm{an}}(X)=S^{\mathrm{an}}(\mathscr{X}^{\mathrm{an}}), 𝒳𝒳\mathscr{X} est une k𝑘k-courbe hyperbolique, et X𝑋X s’identifie à un domaine analytique fermé de 𝒳ansuperscript𝒳an\mathscr{X}^{\mathrm{an}}. Si iI𝑖𝐼i\in I, en considérant ϖisubscriptitalic-ϖ𝑖\varpi_{i} comme un cusp discal épointé de 𝒳ansuperscript𝒳an\mathscr{X}^{\mathrm{an}} qui est une courbe k𝑘k-analytiquement anabélienne d’après 3.61, il existe un revêtement fini étale Yisubscript𝑌𝑖Y_{i} de 𝒳ansuperscript𝒳an\mathscr{X}^{\mathrm{an}} et une arête fermée de San(Y)superscript𝑆an𝑌S^{\mathrm{an}}(Y) dont le sous-groupe vicinal associé est naturellement envoyé sur un sous-groupe ouvert du sous-groupe cuspidal πϖisubscript𝜋subscriptitalic-ϖ𝑖\pi_{\varpi_{i}}. Ainsi, la considération des revêtements Yi×𝒳anXsubscriptsuperscript𝒳ansubscript𝑌𝑖𝑋Y_{i}\times_{\mathscr{X}^{\mathrm{an}}}X permet de conclure que X𝑋X vérifie la propriété d’ascendance vicinale, d’où son anabélianité. ∎


Récapitulons les résultats obtenus en donnant une liste des courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques que l’on sait être anabéliennes :

Théorème 3.64.

Soit k𝑘k un corps non archimédien complet algébriquement clos et non trivialement valué. Alors les trois types de courbes ci-dessous sont k𝑘k-analytiquement anabéliennes :

  • les courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques à arêtes relativement compactes (ex : le demi-plan de Drinfeld);

  • si k𝑘k est de caractéristique mixte : les courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques dont tous les cusps sont coronaires finis;

  • si k𝑘k est de caractéristique mixte : les courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques dont le squelette analytique est un semi-graphe fini et dont les cusps sont coronaires finis ou discaux épointés.

Remarque 3.65.

Dans la preuve de l’ascendance vicinale des analytifiées des k𝑘k-courbes hyperboliques donnée par Mochizuki dans [Mzk333], le morphisme que l’auteur utilise (associé à un sous-groupe ouvert ΔΔsuperscriptΔΔ\Delta^{\prime}\subseteq\Delta permettant l’ascendance vicinale d’un sous-groupe cuspidal de Δ(p)superscriptΔsuperscript𝑝\Delta^{\,(p^{\prime})}), qui n’est pas du tout modéré, est donné par la «  multiplication par p𝑝p au niveau de la Jacobienne   ». Dans le cas des cusps coronaires finis, nous montrons la propriété d’ascendance vicinale en prenant une «  racine p𝑝p-ième   » d’une fonction coordonnée sur une couronne. Il serait tentant de généraliser des constructions similaires à toute courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique X𝑋X. Il faudrait typiquement pouvoir fabriquer un revêtement étale fini de X𝑋X ayant au-dessus d’un point de type 222 fixé un antécédent tel que l’extension résiduelle correspondante soit inséparable, ou montrer qu’une courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique admet une fonction globale inversible, puis prendre le revêtement donné par sa «  racine p𝑝p-ième   ». Or la possibilité d’une telle construction ne semble pour l’instant pas évidente à l’auteur, mais il n’est pas exclu que toute courbe k𝑘k-analytiquement hyperbolique soit k𝑘k-analytiquement anabélienne.

Les courbes k𝑘k-analytiquement hyperboliques dont on ne connaît pour l’instant pas l’éventuel caractère k𝑘k-analytiquement anabélien sont de deux types :

  • celles qui ont des cusps autres que coronaires finis ou discaux épointés;

  • celles dont les cusps sont uniquement coronaires finis ou discaux épointés, qui ont au moins un cusp discal épointé mais dont le squelette analytique est un semi-graphe infini.

Références

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