Nombre de classes des tores de multiplication complexe et bornes inférieures pour les orbites Galoisiennes de points spéciaux. 111Ullmo : Université de Paris-Sud, Bat 425, 91405, Orsay Cedex France, e-mail : ullmo@math.u-psud.fr ; Yafaev : University College London, Department of Mathematics, 25 Gordon street, WC1H OAH, London, United Kingdom, e-mail : yafaev@math.ucl.ac.uk 2000 Mathematics Subject Classification : 11G18 222To appear in Bulletin de la SMF

Emmanuel Ullmo    Andrei Yafaev


1 Introduction

Ce papier est motivé par la conjecture d’André-Oort dont voici l’énoncé.

Conjecture 1.1 (André-Oort)

Soit S𝑆S une varieté de Shimura et soit ΣSΣ𝑆\Sigma\subset S un ensemble de points spéciaux. Alors les composantes irréductibles de l’adhérence de Zariski de ΣΣ\Sigma sont des sous-variétés spéciales de S𝑆S.

Cette conjecture a été récemment démontrée par Klingler et les deux auteurs [27], [14] en admettant l’hypothèse de Riemann généralisée. La strategie consistait à combiner des méthodes galoisiennes et géométriques d’Edixhoven avec des techniques ergodiques de Clozel-Ullmo. Très récemment, Jonathan Pila a mis en place une stratégie faisant intervenir des idées issues de la logique pour attaquer la conjecture d’André-Oort [19], [21]. Cette nouvelle approche a déjà permi [20] de démontrer la conjecture d’André-Oort pour des produits de courbes modulaires de manière inconditionnelle. Qu’on adopte la stratégie d’Edixhoven ou celle de Pila, un des ingrédients majeurs est une borne inférieure suffisamment forte pour la taille des orbites sous Galois des points spéciaux des variétés de Shimura.

Il est à noter que la stratégie de Pila nécessite des meilleures bornes que celles requises par la méthode d’Edixhoven. La minoration de la taille des orbites sous Galois des points spéciaux obtenue dans [27] dépend de la validité de l’hypothèse de Riemann généralisée et est insuffisante pour les applications à la méthode de Pila. Notons que l’on ne sait pas à ce jour que sur l’espace de module 𝔸gsubscript𝔸𝑔{\mathbb{A}}_{g} des variétés abéliennes principalement polarisées de dimension g4𝑔4g\geq 4 il n’y a qu’un nombre fini de points correspondants à des variétés abéliennes à multiplication complexe définies sur des extensions de {\mathbb{Q}} de degré borné.

Le but principal de cet article est d’obtenir des minorations pour la taille des orbites sous Galois de point spéciaux utilisables dans la stratégie de Pila. Nous obtenons en toute généralité ces bornes sous l’hypothèse de Riemann généralisée et dans certains cas de manière inconditionnelle. Notons aussi qu’il n’est pas évident de prévoir exactement le type de bornes nécessaire pour la méthode de Pila mais nous pensons que celles que nous obtenons sont difficilement améliorables qualitativement et probablement adaptées aux applications en vue.

Un point spécial x𝑥x d’une variété de Shimura définit un tore algébrique T𝑇T sur {\mathbb{Q}} et un corps de nombres E=E(x,T)𝐸𝐸𝑥𝑇E=E(x,T), le corps reflex. Le corps E𝐸E est un corps CM. On dispose alors d’un morphisme de tores algébriques sur {\mathbb{Q}} dit de réciprocité

r=rx,T:RE:=ResE/𝔾m,ET.:𝑟subscript𝑟𝑥𝑇assignsubscript𝑅𝐸subscriptRes𝐸subscript𝔾𝑚𝐸𝑇r=r_{x,T}:R_{E}:={\rm Res}_{E/{\mathbb{Q}}}{\mathbb{G}}_{m,E}\rightarrow T.

Soit M𝑀M un tore algébrique sur {\mathbb{Q}}. Soit KMmsuperscriptsubscript𝐾𝑀𝑚K_{M}^{m} le sous-groupe compact ouvert maximal de M(𝔸f)𝑀subscript𝔸𝑓M({\mathbb{A}}_{f}). Le groupe de classes hMsubscript𝑀h_{M} de M𝑀M est par définition le groupe fini

hM=M()\M(𝔸f)/KMm.subscript𝑀\𝑀𝑀subscript𝔸𝑓subscriptsuperscript𝐾𝑚𝑀h_{M}=M({\mathbb{Q}})\backslash M({\mathbb{A}}_{f})/K^{m}_{M}.

Le morphisme de réciprocité r𝑟r induit au niveau des groupes de classes une application r¯:hREhT:¯𝑟subscriptsubscript𝑅𝐸subscript𝑇\overline{r}:h_{R_{E}}\rightarrow h_{T} et l’orbite sous Galois du point spécial x𝑥x est minorée par le cardinal de l’image de r¯¯𝑟\overline{r}. Minorer la taille de l’orbite sous Galois de x𝑥x revient donc à minorer le cardinal de l’image de r¯¯𝑟\overline{r}.

La stratégie suivie dans ce papier est d’abord de minorer la taille du groupe de classes de T𝑇T puis de borner la taille du conoyau de r¯¯𝑟\overline{r}. Les bornes obtenues pour la taille de hTsubscript𝑇h_{T} sont inconditionnelles et ont la forme voulue. Nous pouvons minorer le conoyau de r¯¯𝑟\overline{r} quand le noyau de r𝑟r est connexe de manière inconditionelle et obtenir les bornes voulues pour l’orbite de Galois de x𝑥x dans ce cas. Nous donnons des critères assurant la connexité du noyau de r𝑟r dans la section 4. Par exemple ce noyau est toujours connexe si x𝑥x est un point spécial de 𝔸gsubscript𝔸𝑔{\mathbb{A}}_{g} pour g3𝑔3g\leq 3 ou si x𝑥x est “Galois générique ” pour g𝑔g arbitraire.

Quand le noyau de r𝑟r n’est pas connexe, l’estimation du conoyau de r¯¯𝑟\overline{r} semble être un problème sérieux de géométrie algébrique et de cohomologie galoisienne que nous n’avons pas su résoudre sans l’hypothèse de Riemann généralisée.

Précisons un peu la nature des résultats obtenus. Soit M𝑀M un tore algébrique sur {\mathbb{Q}} de dimension d𝑑d. Soit L𝐿L le corps de décomposition de M𝑀M et DLsubscript𝐷𝐿D_{L} la valeur absolue de son discriminant. Notre but est de donner une borne inférieure pour hMsubscript𝑀h_{M} en fonction de DLsubscript𝐷𝐿D_{L}. Soit X(M)superscript𝑋𝑀X^{*}(M) le groupe de caractères de M𝑀M et χMsubscript𝜒𝑀\chi_{M} le caractère de la représentation d’Artin correspondante de G=Gal(L/)𝐺Gal𝐿G={\rm Gal}(L/{\mathbb{Q}}). On considère la fonction L𝐿L d’Artin associée que l’on dénote L(s,M)𝐿𝑠𝑀L(s,M) et ρMsubscript𝜌𝑀\rho_{M} son quasi-résidu dont la définition est donnée à la section 2.1.2.

On définit ensuite le quasi-discriminant DMsubscript𝐷𝑀D_{M} de M𝑀M. Il est défini comme le rapport entre deux mesures de Haar sur M(𝔸)𝑀𝔸M({\mathbb{A}}). La proposition 3.1 donne une formule fermée qui relie DMsubscript𝐷𝑀D_{M} au conducteur d’Artin a(M)𝑎𝑀a(M) du module Galoisien X(M)tensor-productsuperscript𝑋𝑀X^{*}(M)\otimes{\mathbb{Q}} et au cardinal du groupe des composantes du modèle de Néron de type fini de M𝑀M sur {\mathbb{Z}}. Shyr [25] montre la formule:

hMRM=wMτMρMDM1/2subscript𝑀subscript𝑅𝑀subscript𝑤𝑀subscript𝜏𝑀subscript𝜌𝑀superscriptsubscript𝐷𝑀12h_{M}R_{M}=w_{M}\tau_{M}\rho_{M}D_{M}^{1/2} (1)

wMsubscript𝑤𝑀w_{M} est la taille du ‘groupe des unités de M𝑀M’, RMsubscript𝑅𝑀R_{M} le régulateur de M𝑀M et τMsubscript𝜏𝑀\tau_{M} le nombre de Tamagawa. Il est à noter que dans le cas du tore M=ResF/𝔾mF𝑀subscriptRes𝐹subscript𝔾𝑚𝐹M={\rm Res}_{F/{\mathbb{Q}}}{\mathbb{G}}_{mF}F𝐹F est un corps de nombres, on retrouve la formule classique pour le nombre de classes de l’anneau des entiers de F𝐹F .

En explicitant et en évaluant les invariants arithmétiques de M𝑀M intervenant dans la formule de Shyr (1) on montre que

hMRMDLμmuch-greater-thansubscript𝑀subscript𝑅𝑀superscriptsubscript𝐷𝐿𝜇h_{M}R_{M}\gg D_{L}^{\mu} (2)

où les constantes ne dépendent que de d𝑑d et sont explicites en fonction de d𝑑d. La forme précise du résultat est donnée dans le théorème 2.3. Une fois la formule fermée pour DMsubscript𝐷𝑀D_{M} obtenue les résultats principaux sont une minoration de la forme voulue pour le conducteur d’Artin a(M)𝑎𝑀a(M) (proposition 3.2) et une estimation de type Brauer-Siegel pour le quasi-résidu ρMsubscript𝜌𝑀\rho_{M} (proposition 2.1). Il est à noter que dans le cas où M𝑀M est un tore de multiplication complexe T𝑇T le régulateur RTsubscript𝑅𝑇R_{T} est trivial et nous obtenons une minoration de hTsubscript𝑇h_{T}.

On applique ensuite notre formule pour hTsubscript𝑇h_{T} au problème de minoration des orbites Galoisiennes des points spéciaux dans les variétés de Shimura.

Soit (G,X)𝐺𝑋(G,X) une donnée de Shimura, K𝐾K un sous-groupe compact ouvert de G(𝔸f)𝐺subscript𝔸𝑓G({\mathbb{A}}_{f}) et ShK(G,X):=G()\(X×G(𝔸f)/K)assignsubscriptSh𝐾𝐺𝑋\𝐺𝑋𝐺subscript𝔸𝑓𝐾{\rm Sh}_{K}(G,X):=G({\mathbb{Q}})\backslash(X\times G({\mathbb{A}}_{f})/K) la variété de Shimura associée. On peut sans perte de généralité supposer que G𝐺G est semisimple de type adjoint.

Soit x=(h,1)¯𝑥¯.1x=\overline{(h,1)} un point spécial. Alors le groupe de Mumford-Tate T𝑇T de hh est un tore de multiplication complexe. Soit KTsubscript𝐾𝑇K_{T} le sous-groupe compact ouvert T(𝔸f)K𝑇subscript𝔸𝑓𝐾T({\mathbb{A}}_{f})\cap K de T(𝔸f)𝑇subscript𝔸𝑓T({\mathbb{A}}_{f}). On dispose donc d’un morphisme de réciprocité

r:ResE/𝔾m,ET:𝑟subscriptRes𝐸subscript𝔾𝑚𝐸𝑇r\colon{\rm Res}_{E/{\mathbb{Q}}}{\mathbb{G}}_{m,E}\longrightarrow T

où comme précédemment E𝐸E désigne le corps reflex de (T,{x})𝑇𝑥(T,\{x\}). L’orbite Galoisienne O(x)𝑂𝑥O(x) de x=(h,1)¯𝑥¯.1x=\overline{(h,1)} a pour taille le cardinal de l’image de r((E𝔸f))𝑟superscripttensor-product𝐸subscript𝔸𝑓r((E\otimes{\mathbb{A}}_{f})^{*}) dans T()\T(𝔸f)/KT\𝑇𝑇subscript𝔸𝑓subscript𝐾𝑇T({\mathbb{Q}})\backslash T({\mathbb{A}}_{f})/K_{T}. On démontre alors dans la section 5.1 que

|O(x)|Bi(T)|KTm/KT||Im(r¯)|much-greater-than𝑂𝑥superscript𝐵𝑖𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚subscript𝐾𝑇𝐼𝑚¯𝑟|O(x)|\gg B^{i(T)}|K_{T}^{m}/K_{T}||Im(\overline{r})|

Im(r¯)𝐼𝑚¯𝑟Im(\overline{r}) désigne l’image de r((E𝔸f))𝑟superscripttensor-product𝐸subscript𝔸𝑓r((E\otimes{\mathbb{A}}_{f})^{*}) dans T()\T(𝔸f)/KTm\𝑇𝑇subscript𝔸𝑓superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚T({\mathbb{Q}})\backslash T({\mathbb{A}}_{f})/K_{T}^{m}, B𝐵B est une constante ne dépendant que de la variété de Shimura ShK(G,X)subscriptSh𝐾𝐺𝑋{\rm Sh}_{K}(G,X) et i(T)𝑖𝑇i(T) est le cardinal de l’ensemble des nombres premiers p𝑝p tels que la projection de KTsubscript𝐾𝑇K_{T} dans T(p)𝑇subscript𝑝T({\mathbb{Q}}_{p}) n’est pas égale à KT,pmsuperscriptsubscript𝐾𝑇𝑝𝑚K_{T,p}^{m}.

Quand le point spécial x𝑥x varie dans ShK(G,X)subscriptSh𝐾𝐺𝑋{\rm Sh}_{K}(G,X) parmi les points tels que rxsubscript𝑟𝑥r_{x} est à noyau connexe, un résultat de Clozel et du premier auteur [6] assure que le conoyau de r¯¯𝑟\overline{r} est uniformément borné. On obtient dans ce cas en utilisant l’équation (2) une minoration satisfaisante de |O(x)|𝑂𝑥|O(x)| sous la forme

|O(x)|Bi(T)|KTm/KT|DLμmuch-greater-than𝑂𝑥superscript𝐵𝑖𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚subscript𝐾𝑇superscriptsubscript𝐷𝐿𝜇|O(x)|\gg B^{i(T)}|K_{T}^{m}/K_{T}|D_{L}^{\mu} (3)

pour un μ𝜇\mu explicite. C’est par exemple le cas pour pour un point du module des variétés abéliennes principalement polarisées correspondant à une variété abélienne simple de dimension g𝑔g pour g3𝑔3g\leq 3 ou pour un point à multiplication complexe “général du point de vue Galoisien” pour g𝑔g arbitraire. Les résultats principaux que nous obtenons dans cette direction sont donnés dans la section 5.2.

Un argument simple montre que le nombre de composantes connexes du noyau de rxsubscript𝑟𝑥r_{x} est uniformément borné quand x𝑥x varie parmi les points spéciaux de ShK(G,X)subscriptSh𝐾𝐺𝑋{\rm Sh}_{K}(G,X). On en déduit que l’image de r¯¯𝑟\overline{r} contient l’image de l’élevation à la puissance n𝑛n de hTsubscript𝑇h_{T} dans hTsubscript𝑇h_{T} pour n𝑛n uniformément borné.

En utilisant l’hypothèse de Riemann généralisée on montre dans la section 6 une minoration de l’orbite sous Galois de x𝑥x de la forme voulue

|O(x)|Bi(T)|KTm/KT|DLμ.much-greater-than𝑂𝑥superscript𝐵𝑖𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚subscript𝐾𝑇superscriptsubscript𝐷𝐿𝜇|O(x)|\gg B^{i(T)}|K_{T}^{m}/K_{T}|D_{L}^{\mu}. (4)

Ce résultat est indépendant des parties précédentes.

Finalement, il est à noter que Tsimerman (voir [26]) a obtenu des résultats comparables aux notres simultanément.

2 Préliminaires

2.1 Formule de classes généralisée.

Nous rappelons dans cette partie une formule due à Ono [17] et [18] et Shyr [25] donnant le nombre de classes d’un tore algébrique T𝑇T sur {\mathbb{Q}} qui généralise la formule classique de Dedekind pour le nombre de classes de l’anneau des entiers d’un corps de nombres. On définit et on estime le quasi-résidu ρTsubscript𝜌𝑇\rho_{T} de T𝑇T qui intervient dans cette formule. On énonce un des résultats principaux que nous avons en vue qui donne une minoration du produit du nombre de classes de hTsubscript𝑇h_{T} de T𝑇T par le régulateur RTsubscript𝑅𝑇R_{T} (théorème 2.3). Dans les applications à la multiplication complexe que nous avons en vue le régulateur RTsubscript𝑅𝑇R_{T} sera toujours égal à 111 de sorte que l’on aura dans ce cas une minoration du nombre de classes hTsubscript𝑇h_{T}.

2.1.1 Nombre de classes des tores.

On note 𝔸𝔸{\mathbb{A}} (resp. 𝔸fsubscript𝔸𝑓{\mathbb{A}}_{f}) l’anneau des adèles (resp. des adèles finis) de {\mathbb{Q}}. Soit G𝐺G un groupe algébrique sur {\mathbb{Q}}. Soit K𝐾K un sous-groupe compact ouvert de G(𝔸f)𝐺subscript𝔸𝑓G({\mathbb{A}}_{f}), le nombre de classe hG(K)subscript𝐺𝐾h_{G}(K) de G𝐺G relativement à K𝐾K est défini comme le cardinal de l’ensemble fini G()\G(𝔸f)/K\𝐺𝐺subscript𝔸𝑓𝐾G({\mathbb{Q}})\backslash G({\mathbb{A}}_{f})/K ([22] thm. 5.1).

Si T𝑇T est un tore sur {\mathbb{Q}}, et p𝑝p est premier on note KT,pmsuperscriptsubscript𝐾𝑇𝑝𝑚K_{T,p}^{m} l’unique sous-groupe compact ouvert maximal de T(p)𝑇subscript𝑝T({\mathbb{Q}}_{p}). Alors KTm:=pKT,pmassignsuperscriptsubscript𝐾𝑇𝑚subscriptproduct𝑝superscriptsubscript𝐾𝑇𝑝𝑚K_{T}^{m}:=\prod_{p}K_{T,p}^{m} est l’unique sous-groupe compact ouvert maximal de T(𝔸f)𝑇subscript𝔸𝑓T({\mathbb{A}}_{f}). Le nombre de classe hTsubscript𝑇h_{T} de T𝑇T est défini comme

hT:=hT(KTm).assignsubscript𝑇subscript𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚h_{T}:=h_{T}(K_{T}^{m}). (5)

On note KT,msuperscriptsubscript𝐾𝑇𝑚K_{T,\infty}^{m} le sous-groupe compact maximal de T()𝑇T({\mathbb{R}}). Le groupe T()KT,mKTm𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚T({\mathbb{Q}})\cap K_{T,\infty}^{m}K_{T}^{m} est alors fini et on note

wT=|T()KT,mKTm|.subscript𝑤𝑇𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚w_{T}=|T({\mathbb{Q}})\cap K_{T,\infty}^{m}K_{T}^{m}|. (6)

2.1.2 Fonction L𝐿L d’Artin de T𝑇T et estimations de ρTsubscript𝜌𝑇\rho_{T}.

Soit T𝑇T un tore algébrique sur {\mathbb{Q}}, on note X(T)superscript𝑋𝑇X^{*}(T) le {\mathbb{Z}}-module libre Hom(T¯,𝔾m,¯)Homsubscript𝑇¯subscript𝔾𝑚¯{\rm Hom}(T_{\overline{{\mathbb{Q}}}},{\mathbb{G}}_{m,\overline{{\mathbb{Q}}}}) des caractères de T𝑇T. Pour toute extension E𝐸E de {\mathbb{Q}} on note X(T)Esuperscript𝑋subscript𝑇𝐸X^{*}(T)_{E} le sous-module de X(T)superscript𝑋𝑇X^{*}(T) formé des caractères qui sont rationnels sur E𝐸E. Soit L𝐿L un corps de décomposition de T𝑇T et G=Gal(L/)𝐺Gal𝐿G={\rm Gal}(L/{\mathbb{Q}}) le groupe de Galois de L𝐿L sur {\mathbb{Q}}. Le groupe G𝐺G agit sur X(T)superscript𝑋𝑇X^{*}(T) et on note χTsubscript𝜒𝑇\chi_{T} le caractère de cette représentation.

On note L(s,T)=L(s,χT)𝐿𝑠𝑇𝐿𝑠subscript𝜒𝑇L(s,T)=L(s,\chi_{T}) la fonction L𝐿L d’Artin défini par le G𝐺G-module X(T)tensor-productsuperscript𝑋𝑇X^{*}(T)\otimes{\mathbb{C}}. On dispose d’un produit Eulérien L(s,T)=pLp(s,T)𝐿𝑠𝑇subscriptproduct𝑝subscript𝐿𝑝𝑠𝑇L(s,T)=\prod_{p}L_{p}(s,T), avec pour tout nombre premier p𝑝p

Lp(s,T)=det(1psFrob𝔭|X(T)I𝔭)1.subscript𝐿𝑝𝑠𝑇superscript1conditionalsuperscript𝑝𝑠𝐹𝑟𝑜subscript𝑏𝔭superscript𝑋superscript𝑇subscript𝐼𝔭1L_{p}(s,T)=\det(1-p^{-s}Frob_{\mathfrak{p}}|X^{*}(T)^{I_{\mathfrak{p}}})^{-1}.

Dans cette somme portant sur les nombres premiers p𝑝p, 𝔭𝔭\mathfrak{p} désigne une place arbitraire de L𝐿L au dessus de p𝑝p, I𝔭G𝔭subscript𝐼𝔭subscript𝐺𝔭I_{\mathfrak{p}}\subset G_{\mathfrak{p}} désigne le sous-groupe d’inertie du groupe de décomposition G𝔭=Gal(L𝔭/p)subscript𝐺𝔭Galsubscript𝐿𝔭subscript𝑝G_{\mathfrak{p}}={\rm Gal}(L_{\mathfrak{p}}/{\mathbb{Q}}_{p}) et Frob𝔭G𝔭/I𝔭𝐹𝑟𝑜subscript𝑏𝔭subscript𝐺𝔭subscript𝐼𝔭Frob_{\mathfrak{p}}\in G_{\mathfrak{p}}/I_{\mathfrak{p}} est le Frobenius en 𝔭𝔭\mathfrak{p}.

Soit hh le nombre de classes de conjugaison de G𝐺G et χ1,,χhsubscript𝜒1subscript𝜒\chi_{1},\dots,\chi_{h} les caractères des représentations irréductibles de G𝐺G. On suppose que χ1subscript𝜒1\chi_{1} est le caractère de la représentation triviale. Par la théorie des fonctions L𝐿L d’Artin [2] [3], si on a la décomposition χT=i=1hmiχisubscript𝜒𝑇superscriptsubscript𝑖1subscript𝑚𝑖subscript𝜒𝑖\chi_{T}=\sum_{i=1}^{h}m_{i}\chi_{i} alors

L(s,T)=ζ(s)m1j=2hL(s,χj)mj𝐿𝑠𝑇𝜁superscript𝑠subscript𝑚1superscriptsubscriptproduct𝑗2𝐿superscript𝑠subscript𝜒𝑗subscript𝑚𝑗L(s,T)=\zeta(s)^{m_{1}}\prod_{j=2}^{h}L(s,\chi_{j})^{m_{j}}

avec ζ(s)𝜁𝑠\zeta(s) la fonction zeta de Riemann et L(s,χi)𝐿𝑠subscript𝜒𝑖L(s,\chi_{i}) la fonction L𝐿L d’Artin de χisubscript𝜒𝑖\chi_{i}. Dans cette situation

ρT=lims1(s1)m1L(s,T)=i=2hL(1,χj)mjsubscript𝜌𝑇subscript𝑠1superscript𝑠1subscript𝑚1𝐿𝑠𝑇superscriptsubscriptproduct𝑖2𝐿superscript1subscript𝜒𝑗subscript𝑚𝑗\rho_{T}=\lim_{s\rightarrow 1}(s-1)^{m_{1}}L(s,T)=\prod_{i=2}^{h}L(1,\chi_{j})^{m_{j}} (7)

est fini et non nul.

Soit H𝐻H un sous-groupe de G𝐺G et χHsubscript𝜒𝐻\chi_{H} le caractère d’une représentation de H𝐻H. On note χHsuperscriptsubscript𝜒𝐻\chi_{H}^{*} le caractère de G𝐺G induit de χHsubscript𝜒𝐻\chi_{H}. Par définition, on a donc

χH(α)=1|H|gGχH(gαg1)superscriptsubscript𝜒𝐻𝛼1𝐻subscript𝑔𝐺subscriptsuperscript𝜒𝐻𝑔𝛼superscript𝑔1\chi_{H}^{*}(\alpha)=\frac{1}{|H|}\sum_{g\in G}\chi^{\prime}_{H}(g\alpha g^{-1})

χHsubscriptsuperscript𝜒𝐻\chi^{\prime}_{H} désignant l’extension de χHsubscript𝜒𝐻\chi_{H} à G𝐺G nulle en dehors de H𝐻H.

Soit H1,,Hrsubscript𝐻1subscript𝐻𝑟H_{1},\dots,H_{r}, un système de représentants des sous-groupes cycliques de G𝐺G à conjugaison près. On note 𝟏Hisubscript1subscript𝐻𝑖{\bf 1}_{H_{i}} le caractère de la représentation triviale de Hisubscript𝐻𝑖H_{i}. Par la théorie d’Artin, ([17] 1.5.3) il existe des entiers naturels (m,λi,νi)𝑚subscript𝜆𝑖subscript𝜈𝑖(m,\lambda_{i},\nu_{i}) premiers entre eux dans leur ensemble qui sont déterminés par le G𝐺G-module X(T)superscript𝑋𝑇X^{*}(T) tels que

mχT+i=1rλi𝟏Hi=i=1rνi𝟏Hi.𝑚subscript𝜒𝑇superscriptsubscript𝑖1𝑟subscript𝜆𝑖superscriptsubscript1subscript𝐻𝑖superscriptsubscript𝑖1𝑟subscript𝜈𝑖superscriptsubscript1subscript𝐻𝑖m\chi_{T}+\sum_{i=1}^{r}\lambda_{i}{\bf 1}_{H_{i}}^{*}=\sum_{i=1}^{r}\nu_{i}{\bf 1}_{H_{i}}^{*}. (8)

Soit Fisubscript𝐹𝑖F_{i} les sous-corps de L𝐿L correspondants à Hisubscript𝐻𝑖H_{i} par la théorie de Galois on en déduit une isogénie ([17] thm. 1.5.1)

Tm×i=1r(ResFi/𝔾m)λii=1r(ResFi/𝔾m)νi.similar-to-or-equalssuperscript𝑇𝑚superscriptsubscriptproduct𝑖1𝑟superscriptsubscriptRessubscript𝐹𝑖subscript𝔾𝑚subscript𝜆𝑖superscriptsubscriptproduct𝑖1𝑟superscriptsubscriptRessubscript𝐹𝑖subscript𝔾𝑚subscript𝜈𝑖T^{m}\times\prod_{i=1}^{r}({\rm Res}_{F_{i}/{\mathbb{Q}}}{\mathbb{G}}_{m})^{\lambda_{i}}\simeq\prod_{i=1}^{r}({\rm Res}_{F_{i}/{\mathbb{Q}}}{\mathbb{G}}_{m})^{\nu_{i}}. (9)

On on aura besoin de l’énoncé suivant de type Brauer-Siegel concernant la taille de ρTsubscript𝜌𝑇\rho_{T}.

Proposition 2.1

Soit d𝑑d un entier et ϵitalic-ϵ\epsilon un réel positif. Soit T𝑇T un tore algébrique sur {\mathbb{Q}} de dimension d𝑑d. Soit L𝐿L le corps de décomposition de T𝑇T et DLsubscript𝐷𝐿D_{L} la valeur absolue du discriminant de L𝐿L. Il existe des constantes c1=c1(d,ϵ)subscript𝑐1subscript𝑐1𝑑italic-ϵc_{1}=c_{1}(d,\epsilon) et c2=c2(d,ϵ)subscript𝑐2subscript𝑐2𝑑italic-ϵc_{2}=c_{2}(d,\epsilon) (dépendants uniquement de d𝑑d et ϵitalic-ϵ\epsilon) telles que

c1DLϵρTc2DLϵ.subscript𝑐1superscriptsubscript𝐷𝐿italic-ϵsubscript𝜌𝑇subscript𝑐2superscriptsubscript𝐷𝐿italic-ϵc_{1}D_{L}^{-\epsilon}\leq\rho_{T}\leq c_{2}D_{L}^{\epsilon}. (10)

Preuve. On déduit de l’équation (9) l’ égalité de fonctions L𝐿L

L(s,T)mi=1rζFi(s)λi=i=1rζFi(s)νi𝐿superscript𝑠𝑇𝑚superscriptsubscriptproduct𝑖1𝑟subscript𝜁subscript𝐹𝑖superscript𝑠subscript𝜆𝑖superscriptsubscriptproduct𝑖1𝑟subscript𝜁subscript𝐹𝑖superscript𝑠subscript𝜈𝑖L(s,T)^{m}\prod_{i=1}^{r}\zeta_{F_{i}}(s)^{\lambda_{i}}=\prod_{i=1}^{r}\zeta_{F_{i}}(s)^{\nu_{i}}

où l’on note ζE(s)subscript𝜁𝐸𝑠\zeta_{E}(s) la fonction zêta d’un corps de nombres E𝐸E. Pour tout i{1,,r}𝑖1𝑟i\in\{1,\dots,r\}, ζFi(s)subscript𝜁subscript𝐹𝑖𝑠\zeta_{F_{i}}(s) a un pôle simple de résidu noté ρFisubscript𝜌subscript𝐹𝑖\rho_{F_{i}}. Soit m1subscript𝑚1m_{1} l’ordre du pôle en s=1𝑠1s=1 de L(s,T)𝐿𝑠𝑇L(s,T). On trouve que

mm1=i=1r(νiλi)𝑚subscript𝑚1superscriptsubscript𝑖1𝑟subscript𝜈𝑖subscript𝜆𝑖mm_{1}=\sum_{i=1}^{r}(\nu_{i}-\lambda_{i})

et

ρTm=i=1rρFiνiλi.superscriptsubscript𝜌𝑇𝑚superscriptsubscriptproduct𝑖1𝑟superscriptsubscript𝜌subscript𝐹𝑖subscript𝜈𝑖subscript𝜆𝑖\rho_{T}^{m}=\prod_{i=1}^{r}\rho_{F_{i}}^{\nu_{i}-\lambda_{i}}.

Quand T𝑇T varie parmi les tores de dimension d𝑑d, il n’y a qu’un nombre fini de possibilités pour le groupe de Galois G𝐺G comme groupe abstrait. Quand G𝐺G est fixé, il n’y a qu’un nombre fini de possibilités à isomorphismes près pour X(T)tensor-productsuperscript𝑋𝑇X^{*}(T)\otimes{\mathbb{Q}} comme G𝐺G-module. Comme les entiers m,λi,νi𝑚subscript𝜆𝑖subscript𝜈𝑖m,\lambda_{i},\nu_{i} ne dépendent que du G𝐺G-module X(T)tensor-productsuperscript𝑋𝑇X^{*}(T)\otimes{\mathbb{Q}}, ils sont bornés quand T𝑇T parcourt l’ensemble des tores algébriques sur {\mathbb{Q}} de dimension d𝑑d.

On est donc ramené au lemme suivant.

Lemme 2.2

Soit d𝑑d un entier et ϵitalic-ϵ\epsilon un réel positif. Soit L𝐿L une extension galoisiennne de {\mathbb{Q}} de degré d𝑑d et soit E𝐸E une sous-extension de L𝐿L. Il existe des constantes c1=c1(d,ϵ)subscriptsuperscript𝑐1subscriptsuperscript𝑐1𝑑italic-ϵc^{\prime}_{1}=c^{\prime}_{1}(d,\epsilon) et c2=c2(d,ϵ)subscriptsuperscript𝑐2subscriptsuperscript𝑐2𝑑italic-ϵc^{\prime}_{2}=c^{\prime}_{2}(d,\epsilon) (ne dépendants que de d𝑑d et ϵitalic-ϵ\epsilon) telles que

c1DLϵρEc2DLϵ.subscriptsuperscript𝑐1superscriptsubscript𝐷𝐿italic-ϵsubscript𝜌𝐸subscriptsuperscript𝑐2superscriptsubscript𝐷𝐿italic-ϵc^{\prime}_{1}D_{L}^{-\epsilon}\leq\rho_{E}\leq c^{\prime}_{2}D_{L}^{\epsilon}.

D’après ([16] XVI-1) lemme 1, on sait que ρEDEϵmuch-less-thansubscript𝜌𝐸superscriptsubscript𝐷𝐸italic-ϵ\rho_{E}\ll D_{E}^{\epsilon}. On a par ailleurs la relation DL=DE[L:E]NE/(DL/E)subscript𝐷𝐿superscriptsubscript𝐷𝐸delimited-[]:𝐿𝐸subscript𝑁𝐸subscript𝐷𝐿𝐸D_{L}=D_{E}^{[L:E]}N_{E/{\mathbb{Q}}}(D_{L/E})DL/Esubscript𝐷𝐿𝐸D_{L/E} désigne le discriminant relatif et NE/subscript𝑁𝐸N_{E/{\mathbb{Q}}} la norme de E𝐸E à {\mathbb{Q}}. Ceci démontre la majoration du lemme.

Pour la minoration, on utilise ([16] XVI-2) théorème 2 qui assure que

ρEρLDLϵ2much-greater-thansubscript𝜌𝐸subscript𝜌𝐿superscriptsubscript𝐷𝐿italic-ϵ2\rho_{E}\gg\rho_{L}D_{L}^{-\frac{\epsilon}{2}}

et ([16] XVI-2) théorème 1 qui assure que

ρLDLϵ2.much-greater-thansubscript𝜌𝐿superscriptsubscript𝐷𝐿italic-ϵ2\rho_{L}\gg D_{L}^{-\frac{\epsilon}{2}}.

2.1.3 Mesures de Haar sur T(𝔸)𝑇𝔸T({\mathbb{A}}) et le quasi-discriminant DTsubscript𝐷𝑇D_{T}.

Soit T𝑇T un tore algébrique sur {\mathbb{Q}} de rang r𝑟r. Soit v𝑣v une place de {\mathbb{Q}} et rvsubscript𝑟𝑣r_{v} le rang de X(T)vsuperscript𝑋subscript𝑇subscript𝑣X^{*}(T)_{{\mathbb{Q}}_{v}}. Soit χv,1,,χv,rvsubscript𝜒𝑣.1subscript𝜒𝑣subscript𝑟𝑣\chi_{v,1},\dots,\chi_{v,r_{v}} une {\mathbb{Z}}-base de X(T)vsuperscript𝑋subscript𝑇subscript𝑣X^{*}(T)_{{\mathbb{Q}}_{v}} et

πv:T(v)(+×)rv:subscript𝜋𝑣𝑇subscript𝑣superscriptsuperscriptsubscriptsubscript𝑟𝑣\pi_{v}:T({\mathbb{Q}}_{v})\rightarrow({\mathbb{R}}_{+}^{\times})^{r_{v}}
xπv(x)=(|χv,i(x)|v)1irv.maps-to𝑥subscript𝜋𝑣𝑥subscriptsubscriptsubscript𝜒𝑣𝑖𝑥𝑣1𝑖subscript𝑟𝑣x\mapsto\pi_{v}(x)=(|\chi_{v,i}(x)|_{v})_{1\leq i\leq r_{v}}.

Pour v=𝑣v=\infty, πsubscript𝜋\pi_{\infty} induit un isomorphisme π¯:T()/KT,m(+×)r:¯subscript𝜋similar-to-or-equals𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚superscriptsuperscriptsubscriptsubscript𝑟\overline{\pi_{\infty}}:T({\mathbb{R}})/K_{T,\infty}^{m}\simeq({\mathbb{R}}_{+}^{\times})^{r_{\infty}}. On note

dt:=π¯(i=1rdtiti)assign𝑑subscript𝑡superscript¯subscript𝜋superscriptsubscript𝑖1subscript𝑟𝑑subscript𝑡𝑖subscript𝑡𝑖dt_{\infty}:=\overline{\pi_{\infty}}^{*}(\wedge_{i=1}^{r_{\infty}}\frac{dt_{i}}{t_{i}})

et νsubscript𝜈\nu_{\infty} la mesure de Haar sur T()𝑇T({\mathbb{R}}) amalgamant dt𝑑subscript𝑡dt_{\infty} et la mesure de Haar normalisée sur KT,msuperscriptsubscript𝐾𝑇𝑚K_{T,\infty}^{m}.

Pour v=p𝑣𝑝v=p fini, πpsubscript𝜋𝑝\pi_{p} induit un isomorphisme πp¯:T(p)/KT,pmrp:¯subscript𝜋𝑝similar-to-or-equals𝑇subscript𝑝superscriptsubscript𝐾𝑇𝑝𝑚superscriptsubscript𝑟𝑝\overline{\pi_{p}}:T({\mathbb{Q}}_{p})/K_{T,p}^{m}\simeq{\mathbb{Z}}^{r_{p}}. On note dtp𝑑subscript𝑡𝑝dt_{p} le pull-back par πp¯¯subscript𝜋𝑝\overline{\pi_{p}} de la mesure discrète sur rpsuperscriptsubscript𝑟𝑝{\mathbb{Z}}^{r_{p}} et νpsubscript𝜈𝑝\nu_{p} la mesure de Haar sur T(p)𝑇subscript𝑝T({\mathbb{Q}}_{p}) amalgamant dtp𝑑subscript𝑡𝑝dt_{p} et la mesure de Haar normalisée sur KT,pmsuperscriptsubscript𝐾𝑇𝑝𝑚K_{T,p}^{m}. On obtient ainsi une mesure de Haar

νT:=vΣνvassignsubscript𝜈𝑇subscriptproduct𝑣subscriptΣsubscript𝜈𝑣\nu_{T}:=\prod_{v\in\Sigma_{{\mathbb{Q}}}}\nu_{v} (11)

sur T(𝔸)𝑇𝔸T({\mathbb{A}}).

Soit ω𝜔\omega une forme différentielle {\mathbb{Q}}-rationelle non nulle de degré maximal sur T𝑇T. Pour tout vΣ𝑣subscriptΣv\in\Sigma_{{\mathbb{Q}}}, ω𝜔\omega induit une mesure de Haar |ωv|subscript𝜔𝑣|\omega_{v}| sur T(v)𝑇subscript𝑣T({\mathbb{Q}}_{v}). On sait alors que

|ωT|:=|ω|pΣ,fLp(1,T)|ωp|assignsubscript𝜔𝑇subscript𝜔subscriptproduct𝑝subscriptΣ𝑓subscript𝐿𝑝1𝑇subscript𝜔𝑝|\omega_{T}|:=|\omega_{\infty}|\prod_{p\in\Sigma_{{\mathbb{Q}},f}}L_{p}(1,T)|\omega_{p}| (12)

définit une mesure de Haar dite de Tamagawa sur T(𝔸)𝑇𝔸T({\mathbb{A}}) indépendante du choix de ω𝜔\omega.

Il existe alors une constante positive cTsubscript𝑐𝑇c_{T} telle que |ωT|=cTνTsubscript𝜔𝑇subscript𝑐𝑇subscript𝜈𝑇|\omega_{T}|=c_{T}\nu_{T}. On appelle alors le quasi-discriminant de T𝑇T le nombre

DT:=1cT2.assignsubscript𝐷𝑇1superscriptsubscript𝑐𝑇2D_{T}:=\frac{1}{c_{T}^{2}}. (13)

2.1.4 Formule de classes d’un tore algébrique.

Soit T𝑇T un tore sur {\mathbb{Q}}, Shyr [25] montre la formule de classes suivante:

hTRT=wTτTρTDT12.subscript𝑇subscript𝑅𝑇subscript𝑤𝑇subscript𝜏𝑇subscript𝜌𝑇superscriptsubscript𝐷𝑇12h_{T}R_{T}=w_{T}\tau_{T}\rho_{T}D_{T}^{\frac{1}{2}}. (14)

Dans cette formule RTsubscript𝑅𝑇R_{T} est le régulateur de T𝑇T défini comme le covolume de l’image du réseau des unités T()KTm𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚T({\mathbb{Q}})\cap K_{T}^{m} dans rrsuperscriptsubscript𝑟𝑟{\mathbb{R}}^{r_{\infty}-r} ([17], p. 131) et τTsubscript𝜏𝑇\tau_{T} est le nombre de Tamagawa de T𝑇T ( [17], 3.5).

Quand T=ResF/𝔾m,F𝑇subscriptRes𝐹subscript𝔾𝑚𝐹T={\rm Res}_{F/{\mathbb{Q}}}{\mathbb{G}}_{m,F} pour un corps de nombres F𝐹F, on vérifie que hT=hFsubscript𝑇subscript𝐹h_{T}=h_{F} est le nombre de classes de F𝐹F, RT=RFsubscript𝑅𝑇subscript𝑅𝐹R_{T}=R_{F} est le régulateur de F𝐹F, wT=wFsubscript𝑤𝑇subscript𝑤𝐹w_{T}=w_{F} le nombre de racines de l’unité de F𝐹F, ρT=ρFsubscript𝜌𝑇subscript𝜌𝐹\rho_{T}=\rho_{F} est le résidu en 111 de la fonction zêta du corps F𝐹F. Soit r𝑟r (resp. s𝑠s) le nombre de places réelles (resp. complexes à conjugaison complexe près) de F𝐹F et DFsubscript𝐷𝐹D_{F} la valeur absolue du discriminant de F𝐹F. Alors DT=DF22r(2π)2ssubscript𝐷𝑇subscript𝐷𝐹superscript22𝑟superscript2𝜋2𝑠D_{T}=\frac{D_{F}}{2^{2r}(2\pi)^{2s}}. Comme dans cette situation τT=1subscript𝜏𝑇1\tau_{T}=1, on retrouve la formule classique de la théorie des nombres:

hFRF=2r(2π)swFρFDF12.subscript𝐹subscript𝑅𝐹superscript2𝑟superscript2𝜋𝑠subscript𝑤𝐹subscript𝜌𝐹superscriptsubscript𝐷𝐹12h_{F}R_{F}=2^{-r}(2\pi)^{-s}w_{F}\rho_{F}D_{F}^{\frac{1}{2}}.

2.1.5 Minoration du nombre de classes d’un tore algébrique.

Nous pouvons maintenant énoncer un des résultats principaux que nous avons en vue.

Théorème 2.3

Soit d𝑑d un entier positif. Il existe des constantes positives λ(d)𝜆𝑑\lambda(d) et B(d)𝐵𝑑B(d) telles que pour tout tore algébrique T𝑇T sur {\mathbb{Q}} de dimension d𝑑d et tout ϵ>0italic-ϵ0\epsilon>0, il existe une constante positive c(d,ϵ)𝑐𝑑italic-ϵc(d,\epsilon) telle que

hTRTc(d,ϵ)B(d)i(L)DLλ(d)2ϵ.subscript𝑇subscript𝑅𝑇𝑐𝑑italic-ϵ𝐵superscript𝑑𝑖𝐿superscriptsubscript𝐷𝐿𝜆𝑑2italic-ϵh_{T}R_{T}\geq c(d,\epsilon)B(d)^{i(L)}D_{L}^{\frac{\lambda(d)}{2}-\epsilon}. (15)

Dans cette équation L𝐿L désigne le corps de décomposition de T𝑇T, DLsubscript𝐷𝐿D_{L} désigne la valeur absolue du discriminant de L𝐿L et i(L)𝑖𝐿i(L) désigne le nombre de nombres premiers divisant DLsubscript𝐷𝐿D_{L}.

Si le régulateur RTsubscript𝑅𝑇R_{T} est trivial on obtient une minoration de hTsubscript𝑇h_{T}. On verra que c’est le cas pour les tores associés à la multiplication complexe. La constante λ(d)𝜆𝑑\lambda(d) est explicitée dans la définition 3.4. Elle est facilement calculable pour d𝑑d fixé et on pourrait l’étudier quand d𝑑d varie. Un calcul à la main donne par exemple λ(1)=1𝜆11\lambda(1)=1, λ(2)=λ(3)=25𝜆2𝜆325\lambda(2)=\lambda(3)=\frac{2}{5}, λ(4)=λ(5)=411𝜆4𝜆5411\lambda(4)=\lambda(5)=\frac{4}{11} et λ(6)=λ(7)=15𝜆6𝜆715\lambda(6)=\lambda(7)=\frac{1}{5}. Un test de parité simple dans la définition de λ(n)𝜆𝑛\lambda(n) montre que pour tout n𝑛n\in{\mathbb{N}}, λ(2n)=λ(2n+1)𝜆2𝑛𝜆2𝑛1\lambda(2n)=\lambda(2n+1).

La preuve du théorème sera donnée dans la section 3.4 et sera une conséquence simple d’estimations sur les invariants wT,τT,ρTsubscript𝑤𝑇subscript𝜏𝑇subscript𝜌𝑇w_{T},\tau_{T},\rho_{T} et DTsubscript𝐷𝑇D_{T} intervenant dans la formule de Shyr (14).

2.2 Modèles entiers des tores

2.2.1 Conducteurs d’Artin

Soit p𝑝p un nombre premier et K𝐾K une extension finie de psubscript𝑝{\mathbb{Q}}_{p}. On note OKsubscript𝑂𝐾O_{K} son anneau d’entiers, mKsubscript𝑚𝐾m_{K} l’idéal maximal de OKsubscript𝑂𝐾O_{K} et κK=𝔽qsubscript𝜅𝐾subscript𝔽𝑞\kappa_{K}={\mathbb{F}}_{q} son corps résiduel. On note OKhssuperscriptsubscript𝑂𝐾𝑠O_{K}^{hs} le hensélisé stricte de OKsubscript𝑂𝐾O_{K} et Khssuperscript𝐾𝑠K^{hs} le corps des fractions de OKhssuperscriptsubscript𝑂𝐾𝑠O_{K}^{hs}. Soit π𝜋\pi une uniformisante de OKsubscript𝑂𝐾O_{K}, on normalise la valuation v𝑣v de K𝐾K de sorte que v(π)=1𝑣𝜋1v(\pi)=1. La valeur absolue associée est alors |α|=qv(α)𝛼superscript𝑞𝑣𝛼|\alpha|=q^{-v(\alpha)}.

Soit L𝐿L une extension finie galoisienne de K𝐾K. On note G=Gal(L/K)𝐺Gal𝐿𝐾G={\rm Gal}(L/K) le groupe de Galois de L𝐿L sur K𝐾K. Soit

Δ1:=GΔ0Δ1assignsubscriptΔ1𝐺superset-ofsubscriptΔ0superset-ofsubscriptΔ1superset-of\Delta_{-1}:=G\supset\Delta_{0}\supset\Delta_{1}\supset\dots

la filtration décroissante de ramification avec Δ0=IsubscriptΔ0𝐼\Delta_{0}=I le sous-groupe d’inertie et Δ1subscriptΔ1\Delta_{1} le sous-groupe d’inertie sauvage. On note gi=|Δi|subscript𝑔𝑖subscriptΔ𝑖g_{i}=|\Delta_{i}|.

Soit V𝑉V une représentation linéaire complexe de dimension finie de G𝐺G, le conducteur d’Artin a(V)𝑎𝑉a(V) de V𝑉V est défini ([24] VI-2) par

a(V):=i0gig0dim(V/VΔi).assign𝑎𝑉subscript𝑖0subscript𝑔𝑖subscript𝑔0dimension𝑉superscript𝑉subscriptΔ𝑖a(V):=\sum_{i\geq 0}\frac{g_{i}}{g_{0}}\dim(V/V^{\Delta_{i}}). (16)

Quand V𝑉V est modérément ramifié a(V)=dim(V/VI)𝑎𝑉dimension𝑉superscript𝑉𝐼a(V)=\dim(V/V^{I}) et a(V)=0𝑎𝑉0a(V)=0 quand V𝑉V est non ramifié.

2.2.2 Modèles entiers des tores

On fixe encore un nombre premier p𝑝p et une extension finie K𝐾K de psubscript𝑝{\mathbb{Q}}_{p}. Soit T𝑇T un tore sur K𝐾K de dimension d𝑑d. Il existe un modèle T¯¯𝑇\underline{T} de T𝑇T sur OKsubscript𝑂𝐾O_{K} de type fini et lisse sur OKsubscript𝑂𝐾O_{K} tel que T¯(OKhs)¯𝑇superscriptsubscript𝑂𝐾𝑠\underline{T}(O_{K}^{hs}) est le sous-groupe maximal borné de T(Khs)𝑇superscript𝐾𝑠T(K^{hs}). On dira que T¯¯𝑇\underline{T} est le modèle de Néron-Raynaud de type fini de T𝑇T. Dans cette situation T¯(OK)¯𝑇subscript𝑂𝐾\underline{T}(O_{K}) est le sous-groupe compact maximal de T(K)𝑇𝐾T(K).

Le modèle de Néron-Raynaud T¯NRsuperscript¯𝑇𝑁𝑅\underline{T}^{NR} défini dans [4] est un modèle lisse de T𝑇T sur OKsubscript𝑂𝐾O_{K} tel que T¯NR(OKhs)=T(Khs)superscript¯𝑇𝑁𝑅superscriptsubscript𝑂𝐾𝑠𝑇superscript𝐾𝑠\underline{T}^{NR}(O_{K}^{hs})=T(K^{hs}). Ce modèle est localement de type fini sur OKsubscript𝑂𝐾O_{K}.

Les composantes de l’élément neutre de T¯¯𝑇\underline{T} et T¯NRsuperscript¯𝑇𝑁𝑅\underline{T}^{NR} coïncident. On note T¯0superscript¯𝑇0\underline{T}^{0} la composante de l’élément neutre de T¯¯𝑇\underline{T} et ϕ(T¯):=T¯/T¯0assignitalic-ϕ¯𝑇¯𝑇superscript¯𝑇0\phi(\underline{T}):=\underline{T}/\underline{T}^{0} le groupe des composantes connexes de T¯¯𝑇\underline{T}. Alors ϕ(T¯)italic-ϕ¯𝑇\phi(\underline{T}) est un schéma en groupe fini étale et est déterminé par le G𝐺G-module ϕ(T¯)(¯p)italic-ϕ¯𝑇subscript¯𝑝\phi(\underline{T})(\overline{{\mathbb{Q}}}_{p}).

Soit L𝐿L le corps de décomposition de T𝑇T. Soit

R:=ResL/KTL=ResL/K𝔾m,Ldassign𝑅subscriptRes𝐿𝐾subscript𝑇𝐿subscriptRes𝐿𝐾superscriptsubscript𝔾𝑚𝐿𝑑R:={\rm Res}_{L/K}T_{L}={\rm Res}_{L/K}{\mathbb{G}}_{m,L}^{d}

alors

R¯=ResOL/OK𝔾m,OLd.¯𝑅subscriptRessubscript𝑂𝐿subscript𝑂𝐾superscriptsubscript𝔾𝑚subscript𝑂𝐿𝑑\underline{R}={\rm Res}_{O_{L}/O_{K}}{\mathbb{G}}_{m,O_{L}}^{d}.

Le tore T𝑇T se plonge canoniquement dans R𝑅R.

Soit TOKsubscript𝑇subscript𝑂𝐾T_{O_{K}} la fermeture schématique de T𝑇T dans R¯¯𝑅\underline{R}, alors T¯¯𝑇\underline{T} s’obtient à partir de TOKsubscript𝑇subscript𝑂𝐾T_{O_{K}} par un procédé de lissage décrit dans [4], voir aussi ([5] section 3). Si l’extension L𝐿L de K𝐾K est modérément ramifiée par le théorème 4.2 de [8], TOKsubscript𝑇subscript𝑂𝐾T_{O_{K}} est lisse et coïncide donc avec T¯¯𝑇\underline{T}.

On aura besoin du résultat suivant dans la suite.

Proposition 2.4

Il existe une constante Φ=Φ(d)ΦΦ𝑑\Phi=\Phi(d) (ne dépendant que de d𝑑d) telle que pour tout tore T𝑇T de dimension au plus d𝑑d sur K𝐾K

|ϕ(T¯)|Φ(d).italic-ϕ¯𝑇Φ𝑑|\phi(\underline{T})|\leq\Phi(d). (17)

Comme le modèle de Néron-Raynaud (de type fini ou non) commute au changement de base non ramifié, on peut pour calculer |ϕ(T¯)|italic-ϕ¯𝑇|\phi(\underline{T})| supposer que K=Khs𝐾superscript𝐾𝑠K=K^{hs}. Si L𝐿L est le corps de décomposition de T𝑇T, alors G=Gal(L/K)=I𝐺Gal𝐿𝐾𝐼G={\rm Gal}(L/K)=I est le groupe d’inertie.

Soit Tssubscript𝑇𝑠T_{s} le sous-tore déployé maximal de T𝑇T et Tasubscript𝑇𝑎T_{a} le tore quotient anisotrope T/Ts𝑇subscript𝑇𝑠T/T_{s}. D’après [5] lemme 11.2, en passant aux modèles de Néron-Raynaud de type fini sur OKsubscript𝑂𝐾O_{K}, on obtient une suite exacte courte

1Ts¯T¯Ta¯0.1¯subscript𝑇𝑠¯𝑇¯subscript𝑇𝑎01\rightarrow\underline{T_{s}}\rightarrow\underline{T}\rightarrow\underline{T_{a}}\rightarrow 0.
Lemme 2.5

On a l’égalité ϕ(T¯)=ϕ(T¯a)italic-ϕ¯𝑇italic-ϕsubscript¯𝑇𝑎\phi(\underline{T})=\phi(\underline{T}_{a}).

Preuve. Comme T¯s=𝔾m,OKdsubscript¯𝑇𝑠superscriptsubscript𝔾𝑚subscript𝑂𝐾superscript𝑑\underline{T}_{s}={\mathbb{G}}_{m,O_{K}}^{d^{\prime}} pour un certain ddsuperscript𝑑𝑑d^{\prime}\leq d, T¯ssubscript¯𝑇𝑠\underline{T}_{s} est connexe et la suite exacte précédente induit une suite exacte courte

1Ts¯0T¯0Ta¯00.1superscript¯subscript𝑇𝑠0superscript¯𝑇0superscript¯subscript𝑇𝑎001\rightarrow\underline{T_{s}}^{0}\rightarrow\underline{T}^{0}\rightarrow\underline{T_{a}}^{0}\rightarrow 0.

Le lemme s’obtient alors par une application du lemme du serpent.

On peut donc supposer que T𝑇T est anisotrope sur K𝐾K. Alors X(T)I=0superscript𝑋superscript𝑇𝐼0X^{*}(T)^{I}=0 et par [29] cor. 2.19 on en déduit que |ϕ(T¯)|=|H1(I,X(T))|italic-ϕ¯𝑇superscript𝐻1𝐼superscript𝑋𝑇|\phi(\underline{T})|=|H^{1}(I,X^{*}(T))|. Comme T𝑇T est de dimension d1dsubscript𝑑1𝑑d_{1}\leq d, et L𝐿L est le corps de décomposition de K𝐾K, I=Gal(L/K)𝐼Gal𝐿𝐾I={\rm Gal}(L/K) agit fidèlement sur X(T)=d1superscript𝑋𝑇superscriptsubscript𝑑1X^{*}(T)={\mathbb{Z}}^{d_{1}}. Le nombre de sous-groupes finis de GLd1,subscriptGLsubscript𝑑1{\rm GL}_{d_{1},{\mathbb{Z}}} à conjugaison près est fini. Il existe donc qu’un nombre fini de possibilités pour |H1(I,X(T))|superscript𝐻1𝐼superscript𝑋𝑇|H^{1}(I,X^{*}(T))|. Ceci termine la preuve de la proposition 2.4.

2.2.3 Mesure de Haar et conducteur d’Artin

On garde les notations de la section précédente. On note ω(T¯)𝜔¯𝑇\omega(\underline{T}) la puissance extérieure maximale de l’espace des 111-formes différentielles sur T¯¯𝑇\underline{T}. C’est un OKsubscript𝑂𝐾O_{K}-module libre de rang 111 et on choisit un générateur ω𝜔{\omega} de ω(T¯)𝜔¯𝑇\omega(\underline{T}). La mesure de Haar |ω|𝜔|{\omega}| associée sur T(K)𝑇𝐾T(K) est indépendante du choix de ω𝜔\omega.

Fixons un isomorphisme ϕ:TL𝔾m,Ld:italic-ϕsubscript𝑇𝐿superscriptsubscript𝔾𝑚𝐿𝑑\phi:T_{L}\rightarrow{\mathbb{G}}_{m,L}^{d}. Le modèle de Néron-Raynaud de type fini de 𝔾m,Ldsuperscriptsubscript𝔾𝑚𝐿𝑑{\mathbb{G}}_{m,L}^{d} est 𝔾m,OLdsuperscriptsubscript𝔾𝑚subscript𝑂𝐿𝑑{\mathbb{G}}_{m,O_{L}}^{d}. Soit ω0subscript𝜔0{\omega_{0}} un générateur de ϕ(ω(𝔾m,OLd))superscriptitalic-ϕ𝜔superscriptsubscript𝔾𝑚subscript𝑂𝐿𝑑\phi^{*}(\omega({\mathbb{G}}_{m,O_{L}}^{d})) et |ω0|subscript𝜔0|\omega_{0}| la mesure de Haar sur T(L)𝑇𝐿T(L) associée.

Soit a(T)𝑎𝑇a(T) le conducteur d’Artin de la représentation X(T)tensor-productsuperscript𝑋𝑇X^{*}(T)\otimes{\mathbb{Q}} de Gal(L/K)Gal𝐿𝐾{\rm Gal}(L/K). Gross et Gan ([12] sections 4-5 ) montrent qu’il existe une classe ΘOK/OK×2Θsubscript𝑂𝐾superscriptsubscript𝑂𝐾absent2\Theta\in O_{K}/O_{K}^{\times 2} telle que

v(Θ)=a(T)𝑣Θ𝑎𝑇v(\Theta)=a(T)

et telle que ω0Θsubscript𝜔0Θ\frac{{\omega_{0}}}{\sqrt{\Theta}} soit rationnelle sur K𝐾K. Par le théorème 7.3 de [12] on a

|ω|=|ω0||Θ|𝜔subscript𝜔0Θ|{\omega}|=\frac{{|\omega_{0}}|}{|\sqrt{\Theta}|} (18)

La proposition 4.7 de [13] montre alors que

T¯0(OF)Lp(1,T)|ω¯|=1.subscriptsuperscript¯𝑇0subscript𝑂𝐹subscript𝐿𝑝1𝑇¯𝜔1\int_{\underline{T}^{0}(O_{F})}L_{p}(1,T)|\underline{\omega}|=1. (19)

Le résultat de Gross est en fait beaucoup plus général. Il s’applique à un groupe réductif arbitraire sur K𝐾K et aux modèles entiers sur OKsubscript𝑂𝐾O_{K} donnés par la théorie de Bruhat-Tits. Dans le cas d’un tore, ces modèles coïncident avec les modèles de Néron-Raynaud de type fini. Dans les notations de [13] le motif M𝑀M qui apparaît est juste X(T)superscript𝑋𝑇X^{*}(T) pour un tore de sorte que l’on a la relation det(1F|M(1)I)=det(1Fp|X(T)I)=Lp(1,T)11conditional𝐹superscript𝑀superscript1𝐼1conditional𝐹𝑝superscript𝑋superscript𝑇𝐼subscript𝐿𝑝superscript1𝑇1\det(1-F|M^{\vee}(1)^{I})=\det(1-\frac{F}{p}|X^{*}(T)^{I})=L_{p}(1,T)^{-1}.

3 Le quasi-discriminant DTsubscript𝐷𝑇D_{T}.

Soit T𝑇T un tore sur {\mathbb{Q}} de dimension d𝑑d. Soit L𝐿L le corps de décomposition de T𝑇T. Le but de cette partie est de donner une formule fermée pour le quasi-discriminant DTsubscript𝐷𝑇D_{T} de T𝑇T et de comparer DTsubscript𝐷𝑇D_{T} à la valeur absolue du discriminant DLsubscript𝐷𝐿D_{L} de L𝐿L.

Soit T¯¯𝑇\underline{T} le modèle de Néron-Raynaud de type fini de T𝑇T sur {\mathbb{Z}}. Pour tout nombre premier p𝑝p, T¯p:=T¯passignsubscript¯𝑇𝑝subscript¯𝑇subscript𝑝\underline{T}_{p}:=\underline{T}_{{\mathbb{Z}}_{p}} est le modèle de Néron-Raynaud de type fini de Tpsubscript𝑇subscript𝑝T_{{\mathbb{Q}}_{p}} sur psubscript𝑝{\mathbb{Z}}_{p} décrit dans la section 2.2.2. Soit ϕT,p:=ϕ(T¯p)assignsubscriptitalic-ϕ𝑇𝑝italic-ϕsubscript¯𝑇𝑝\phi_{T,p}:=\phi(\underline{T}_{p}) le groupe des composantes de T¯psubscript¯𝑇𝑝\underline{T}_{p}. On note a(T)𝑎𝑇a(T) le conducteur d’Artin de X(T)tensor-productsuperscript𝑋𝑇X^{*}(T)\otimes{\mathbb{Q}}. Donc a(T)=ppap(T)𝑎𝑇subscriptproduct𝑝superscript𝑝subscript𝑎𝑝𝑇a(T)=\prod_{p}p^{a_{p}(T)}ap(T)subscript𝑎𝑝𝑇a_{p}(T) est le conducteur d’Artin de X(Tp)tensor-productsuperscript𝑋subscript𝑇subscript𝑝X^{*}(T_{{\mathbb{Q}}_{p}})\otimes{\mathbb{Q}}.

Soit 𝕊:=Res/𝔾m,assign𝕊subscriptRessubscript𝔾𝑚{\mathbb{S}}:={\rm Res}_{{\mathbb{C}}/{\mathbb{R}}}{\mathbb{G}}_{m,{\mathbb{C}}} le tore de Deligne. On a une décomposition en produit direct sous la forme

T=𝔾m,a×𝕊b×SO(2)csubscript𝑇superscriptsubscript𝔾𝑚𝑎superscript𝕊𝑏𝑆𝑂superscriptsubscript2𝑐T_{{\mathbb{R}}}={\mathbb{G}}_{m,{\mathbb{R}}}^{a}\times{\mathbb{S}}^{b}\times SO(2)_{{\mathbb{R}}}^{c} (20)

avec dim(T)=a+2b+cdimension𝑇𝑎2𝑏𝑐\dim(T)=a+2b+c ([28], p. 106).

3.1 Une formule fermée pour DTsubscript𝐷𝑇D_{T}

Le but de cette section est de montrer la formule fermée suivante pour le quasi-discriminant DTsubscript𝐷𝑇D_{T} de T𝑇T.

Proposition 3.1

On a

DT=a(T)22a(2π)2b+2cp|ϕT,p(𝔽p)|2subscript𝐷𝑇𝑎𝑇superscript22𝑎superscript2𝜋2𝑏2𝑐subscriptproduct𝑝superscriptsubscriptitalic-ϕ𝑇𝑝subscript𝔽𝑝2D_{T}=\frac{a(T)}{2^{2a}(2\pi)^{2b+2c}\prod_{p}|\phi_{T,p}({\mathbb{F}}_{p})|^{2}} (21)

Preuve. Soit ω(T¯)𝜔¯𝑇\omega(\underline{T}) la puissance extérieure maximale de l’espace des 111-formes différentielles invariantes sur T¯¯𝑇\underline{T}. Alors ω(T¯)𝜔¯𝑇\omega(\underline{T}) est un {\mathbb{Z}}-module libre de rang 111 dont on fixe un générateur ω𝜔\omega.

Soit L𝐿L le corps de décomposition de T𝑇T. Fixons un isomorphisme ϕ:TL𝔾m,Ld:italic-ϕsubscript𝑇𝐿superscriptsubscript𝔾𝑚𝐿𝑑\phi:T_{L}\rightarrow{\mathbb{G}}_{m,L}^{d}. Soit α0subscript𝛼0\alpha_{0} un générateur du {\mathbb{Z}}-module libre de rang 111 ω(𝔾m,d)𝜔superscriptsubscript𝔾𝑚𝑑\omega({\mathbb{G}}_{m,{\mathbb{Z}}}^{d}) et ω0:=ϕα0assignsubscript𝜔0superscriptitalic-ϕsubscript𝛼0\omega_{0}:=\phi^{*}\alpha_{0}. D’après [12] cor. 3.7, il existe D/2𝐷superscriptsuperscriptabsent2D\in{\mathbb{Q}}^{*}/{\mathbb{Q}}^{*2} tel que ω0Dsubscript𝜔0𝐷\frac{\omega_{0}}{\sqrt{D}} est rationnel sur {\mathbb{Q}}.

On peut fixer un représentant D𝐷D dans superscript{\mathbb{Q}}^{*} de la manière suivante. Pour tout nombre premier p𝑝p, on note ωpsubscript𝜔𝑝\omega_{p} et ω0,psubscript𝜔0𝑝\omega_{0,p} les différentielles invariantes sur Tpsubscript𝑇subscript𝑝T_{{\mathbb{Q}}_{p}} induites par ω𝜔\omega et ω0subscript𝜔0\omega_{0}. D’après les résultats de la section 2.2.3, il existe Θpp/p2subscriptΘ𝑝subscript𝑝superscriptsubscript𝑝absent2\Theta_{p}\in{\mathbb{Q}}_{p}/{\mathbb{Q}}_{p}^{*2}, vérifant vp(Θp)=a(X(Tp))subscript𝑣𝑝subscriptΘ𝑝𝑎superscript𝑋subscript𝑇subscript𝑝v_{p}(\Theta_{p})=a(X^{*}(T_{{\mathbb{Q}}_{p}})), tel que

ω0,pΘpsubscript𝜔0𝑝subscriptΘ𝑝\frac{\omega_{0,p}}{\sqrt{\Theta_{p}}} (22)

soit rationnel sur psubscript𝑝{\mathbb{Q}}_{p} et tel que

|ωp|=|ω0,p||Θp|.subscript𝜔𝑝subscript𝜔0𝑝subscriptΘ𝑝|\omega_{p}|=\frac{|\omega_{0,p}|}{|\sqrt{\Theta_{p}}|}.

Comme ω0,pDsubscript𝜔0𝑝𝐷\frac{\omega_{0,p}}{\sqrt{D}} et ω0,pΘpsubscript𝜔0𝑝subscriptΘ𝑝\frac{\omega_{0,p}}{\sqrt{\Theta_{p}}} sont deux formes différentielles invariantes rationnelles sur Tpsubscript𝑇subscript𝑝T_{{\mathbb{Q}}_{p}} on voit que vp(D)vp(Θp)subscript𝑣𝑝𝐷subscript𝑣𝑝subscriptΘ𝑝v_{p}(D)-v_{p}(\Theta_{p}) est pair. En changeant D𝐷D en Dp2k𝐷superscript𝑝2𝑘Dp^{2k} pour un k𝑘k convenable, on peut supposer que

vp(D)=vp(Θp)=a(X(Tp)).subscript𝑣𝑝𝐷subscript𝑣𝑝subscriptΘ𝑝𝑎superscript𝑋subscript𝑇subscript𝑝v_{p}(D)=v_{p}(\Theta_{p})=a(X^{*}(T_{{\mathbb{Q}}_{p}})).

On peut donc en notant ap=a(X(Tp))subscript𝑎𝑝𝑎superscript𝑋subscript𝑇subscript𝑝a_{p}=a(X^{*}(T_{{\mathbb{Q}}_{p}})) choisir D𝐷D au signe près sous la forme

D=ϵ(T)ppap=ϵ(T)a(T)𝐷italic-ϵ𝑇subscriptproduct𝑝superscript𝑝subscript𝑎𝑝italic-ϵ𝑇𝑎𝑇D=\epsilon(T)\prod_{p}p^{a_{p}}=\epsilon(T)a(T)

avec ϵ(T)=±1italic-ϵ𝑇plus-or-minus1\epsilon(T)=\pm 1.

On suppose dans la suite que D𝐷D est ainsi normalisé. Le signe ϵ(T)italic-ϵ𝑇\epsilon(T) dépend de Tsubscript𝑇T_{{\mathbb{R}}}. Un calcul direct utilisant la décomposition (20) de Tsubscript𝑇T_{{\mathbb{R}}} montre que ib+cω0,superscript𝑖𝑏𝑐subscript𝜔0i^{b+c}\omega_{0,\infty} est rationnelle sur Tsubscript𝑇T_{{\mathbb{R}}}. Comme la forme différentielle ω0,ϵ(T)subscript𝜔0italic-ϵ𝑇\frac{\omega_{0,\infty}}{\sqrt{\epsilon(T)}} est aussi rationnelle sur Tsubscript𝑇T_{{\mathbb{R}}}, on en déduit que ϵ(T)=(1)b+citalic-ϵ𝑇superscript1𝑏𝑐\epsilon(T)=(-1)^{b+c}.

Un choix normalisé de D𝐷D est donc

D=(1)b+ca(T).𝐷superscript1𝑏𝑐𝑎𝑇D=(-1)^{b+c}a(T).

Soit νT=νpνpsubscript𝜈𝑇subscript𝜈subscriptproduct𝑝subscript𝜈𝑝\nu_{T}=\nu_{\infty}\prod_{p}\nu_{p} la mesure de Haar sur T(𝔸f)𝑇subscript𝔸𝑓T({\mathbb{A}}_{f}) définie dans la section 2.1.3. En utilisant la forme invariante {\mathbb{Q}}-rationelle ω0Dsubscript𝜔0𝐷\frac{\omega_{0}}{\sqrt{D}} dans la définition de |ωT|subscript𝜔𝑇|\omega_{T}| et l’équation (22), on trouve

|ωT|=|ω0,|a(T)p|ωp|Lp(1,T)subscript𝜔𝑇subscript𝜔0𝑎𝑇subscriptproduct𝑝subscript𝜔𝑝subscript𝐿𝑝1𝑇|\omega_{T}|=\frac{|\omega_{0,\infty}|}{\sqrt{a(T)}}\prod_{p}|\omega_{p}|L_{p}(1,T)

et par définition

νT=DT|ωT|.subscript𝜈𝑇subscript𝐷𝑇subscript𝜔𝑇\nu_{T}=\sqrt{D_{T}}|\omega_{T}|.

Un calcul simple aux places réelles utilisant la décomposition (20) de Tsubscript𝑇T_{{\mathbb{R}}} montre que

|ω0,|=2a(2π)c+bνT,.subscript𝜔0superscript2𝑎superscript2𝜋𝑐𝑏subscript𝜈𝑇|\omega_{0,\infty}|=2^{a}(2\pi)^{c+b}\nu_{T,\infty}.

Fixons un compact Usubscript𝑈U_{\infty} de T()𝑇T({\mathbb{R}}) d’intérieur non vide et suffisamment régulier. Alors

U×pKT,pm|ωT|=12a(2π)b+cDTU|ω0,|=U|ω0,|a(T)pKT,pm|ωT,p|Lp(T,1).subscriptsubscript𝑈subscriptproduct𝑝superscriptsubscript𝐾𝑇𝑝𝑚subscript𝜔𝑇1superscript2𝑎superscript2𝜋𝑏𝑐subscript𝐷𝑇subscriptsubscript𝑈subscript𝜔0subscriptsubscript𝑈subscript𝜔0𝑎𝑇subscriptproduct𝑝subscriptsuperscriptsubscript𝐾𝑇𝑝𝑚subscript𝜔𝑇𝑝subscript𝐿𝑝𝑇.1\int_{U_{\infty}\times\prod_{p}K_{T,p}^{m}}|\omega_{T}|=\frac{1}{2^{a}(2\pi)^{b+c}\sqrt{D_{T}}}\int_{U_{\infty}}|\omega_{0,\infty}|=\int_{U_{\infty}}\frac{|\omega_{0,\infty}|}{\sqrt{a(T)}}\prod_{p}\int_{K_{T,p}^{m}}|\omega_{T,p}|L_{p}(T,1).

Par définition du modèle de Néron-Raynaud de type fini de T𝑇T, T¯p(p)=KT,pmsubscript¯𝑇𝑝subscript𝑝superscriptsubscript𝐾𝑇𝑝𝑚\underline{T}_{p}({\mathbb{Z}}_{p})=K_{T,p}^{m} pour tout premier p𝑝p.

On en déduit que

KT,pm|ωT,p|Lp(T,1)=|ϕT,p(𝔽p)|T¯p0(p)|ωT,p|Lp(T,1)=|ϕT,p(𝔽p)|subscriptsuperscriptsubscript𝐾𝑇𝑝𝑚subscript𝜔𝑇𝑝subscript𝐿𝑝𝑇.1subscriptitalic-ϕ𝑇𝑝subscript𝔽𝑝subscriptsuperscriptsubscript¯𝑇𝑝0subscript𝑝subscript𝜔𝑇𝑝subscript𝐿𝑝𝑇.1subscriptitalic-ϕ𝑇𝑝subscript𝔽𝑝\int_{K_{T,p}^{m}}|\omega_{T,p}|L_{p}(T,1)=|\phi_{T,p}({\mathbb{F}}_{p})|\int_{\underline{T}_{p}^{0}({\mathbb{Z}}_{p})}|\omega_{T,p}|L_{p}(T,1)=|\phi_{T,p}({\mathbb{F}}_{p})|

en utilisant l’équation (19). Ceci termine la preuve de la proposition 3.1

3.2 Minoration de a(T)𝑎𝑇a(T) et de DTsubscript𝐷𝑇D_{T}.

On conserve les notations de la section 3. Le but de cette partie est de montrer les minorations suivantes du conducteur d’Artin a(T)𝑎𝑇a(T) et du quasi-discriminant DTsubscript𝐷𝑇D_{T} de T𝑇T.

Proposition 3.2

Soit d𝑑d un entier positif. Il existe de constantes c(d)𝑐𝑑c(d), c(d)superscript𝑐𝑑c^{\prime}(d), A(d)𝐴𝑑A(d) et λ(d)𝜆𝑑\lambda(d) strictement positives telles que pour tout tore T𝑇T sur {\mathbb{Q}} de dimension d𝑑d dont le corps de décomposition est L𝐿L, on a

a(T)c(d)DLλ(d).𝑎𝑇𝑐𝑑superscriptsubscript𝐷𝐿𝜆𝑑a(T)\geq c(d)D_{L}^{\lambda(d)}. (23)

et

DTc(d)A(d)i(L)DLλ(d).subscript𝐷𝑇superscript𝑐𝑑𝐴superscript𝑑𝑖𝐿superscriptsubscript𝐷𝐿𝜆𝑑D_{T}\geq c^{\prime}(d)A(d)^{i(L)}D_{L}^{\lambda(d)}. (24)

Dans cette dernière équation i(L)𝑖𝐿i(L) désigne le nombre de nombres premiers divisant DLsubscript𝐷𝐿D_{L}.

La minoration de DTsubscript𝐷𝑇D_{T} est une conséquence de la minoration de a(T)𝑎𝑇a(T), de la formule fermée pour DTsubscript𝐷𝑇D_{T} donnée à la proposition 3.1 et de la majoration du cardinal du groupe des composantes du modèle de Néron T¯¯𝑇\underline{T} de T𝑇T obtenue à la proposition 2.4. On peut prendre A(d)=1Φ(d)2𝐴𝑑1Φsuperscript𝑑2A(d)=\frac{1}{\Phi(d)^{2}} (avec les notations de 2.4) et c(d)=c(d)(2π)2dsuperscript𝑐𝑑𝑐𝑑superscript2𝜋2𝑑c^{\prime}(d)=\frac{c(d)}{(2\pi)^{2d}}.

Les constantes λ(d)𝜆𝑑\lambda(d) et c(d)𝑐𝑑c(d) sont explicitées dans les définitions 3.4 et 3.6.

On utilisera essentiellement le lemme élémentaire suivant.

Lemme 3.3

Soit X𝑋X un {\mathbb{Q}}-vectoriel de dimension d𝑑d muni d’une action fidèle ρ𝜌\rho d’un groupe cyclique I=/n𝐼𝑛I={\mathbb{Z}}/n{\mathbb{Z}} pour un entier n=pnp𝑛productsuperscript𝑝subscript𝑛𝑝n=\prod p^{n_{p}}. Soit ϕ(x)italic-ϕ𝑥\phi(x) la fonction indicatrice d’Euler. Le nombre nρsubscript𝑛𝜌n_{\rho} de caractère non triviaux de I𝐼I intervenant dans Xtensor-product𝑋X\otimes{\mathbb{C}} vérifie

nρp|nϕ(pnp)ϵ(n)subscript𝑛𝜌subscriptconditional𝑝𝑛italic-ϕsuperscript𝑝subscript𝑛𝑝italic-ϵ𝑛n_{\rho}\geq\sum_{p|n}\phi(p^{n_{p}})-\epsilon(n)

avec ϵ(n)=0italic-ϵ𝑛0\epsilon(n)=0 si n21subscript𝑛21n_{2}\neq 1 ou n=2𝑛2n=2 et ϵ(n)=1italic-ϵ𝑛1\epsilon(n)=1 sinon. En particulier p|nϕ(pnp)ϵ(n)dsubscriptconditional𝑝𝑛italic-ϕsuperscript𝑝subscript𝑛𝑝italic-ϵ𝑛𝑑\sum_{p|n}\phi(p^{n_{p}})-\epsilon(n)\leq d.

Preuve. Soit σ𝜎\sigma un générateur de I𝐼I. Alors ρ(σ)𝜌𝜎\rho(\sigma) est diagonalisable dans Xtensor-product𝑋X\otimes{\mathbb{C}}. Les valeurs propres de σ𝜎\sigma sont des racines n𝑛n-ièmes de l’unité. Soit d1,d2,,drsubscript𝑑1subscript𝑑2subscript𝑑𝑟d_{1},d_{2},\dots,d_{r} les ordres des valeurs propres de σ𝜎\sigma. Comme l’action est fidèle les disubscript𝑑𝑖d_{i} ne sont pas égaux à 111. Si (x1,,xs)subscript𝑥1subscript𝑥𝑠(x_{1},\dots,x_{s}) est un s𝑠s-tuple d’entiers on note p(x1,,xs)𝑝subscript𝑥1subscript𝑥𝑠p(x_{1},\dots,x_{s}) le plus petit commun multiple des xisubscript𝑥𝑖x_{i}. Comme σ𝜎\sigma est d’ordre n𝑛n, on a p(d1,,dr)=n𝑝subscript𝑑1subscript𝑑𝑟𝑛p(d_{1},\dots,d_{r})=n. Si σ𝜎\sigma admet une valeur propre d’ordre disubscript𝑑𝑖d_{i}, l’irréductibilité des polynômes cyclotomiques sur {\mathbb{Q}} montre que σ𝜎\sigma admet toutes les racines primitives disubscript𝑑𝑖d_{i}-ième de l’unité comme valeurs propres. Comme les valeurs propres de σ𝜎\sigma déterminent des caractères de I𝐼I intervenant dans Xtensor-product𝑋X\otimes{\mathbb{C}}, on en déduit que

nρi=1rϕ(di).subscript𝑛𝜌superscriptsubscript𝑖1𝑟italic-ϕsubscript𝑑𝑖n_{\rho}\geq\sum_{i=1}^{r}\phi(d_{i}).

Il suffit donc de minorer le second membre de cette inégalité par

p|nϕ(pnp)ϵ(n)subscriptconditional𝑝𝑛italic-ϕsuperscript𝑝subscript𝑛𝑝italic-ϵ𝑛\sum_{p|n}\phi(p^{n_{p}})-\epsilon(n)

quand (d1,,dr)subscript𝑑1subscript𝑑𝑟(d_{1},\dots,d_{r}) varie parmi les diviseurs de n𝑛n tels que p(d1,,dr)=n𝑝subscript𝑑1subscript𝑑𝑟𝑛p(d_{1},\dots,d_{r})=n.

On note vpsubscript𝑣𝑝v_{p} la valuation p𝑝p-adique normalisée sur {\mathbb{Q}}. Pour tout nombre premier p𝑝p divisant n𝑛n, il existe un entier i{1,,r}𝑖1𝑟i\in\{1,\dots,r\} tel que vp(di)=vp(n)subscript𝑣𝑝subscript𝑑𝑖subscript𝑣𝑝𝑛v_{p}(d_{i})=v_{p}(n). En divisant les entiers disubscript𝑑𝑖d_{i} convenablement, on peut supposer que pour tout p𝑝p divisant n𝑛n et pour tout i{1,,r}𝑖1𝑟i\in\{1,\dots,r\}, vp(di)=vp(n)subscript𝑣𝑝subscript𝑑𝑖subscript𝑣𝑝𝑛v_{p}(d_{i})=v_{p}(n) ou vp(di)=0subscript𝑣𝑝subscript𝑑𝑖0v_{p}(d_{i})=0 et qu’il existe un indice i𝑖i tel que vp(di)=vp(n)subscript𝑣𝑝subscript𝑑𝑖subscript𝑣𝑝𝑛v_{p}(d_{i})=v_{p}(n). On obtient alors le résultat en remarquant que si a𝑎a et b𝑏b sont des entiers premiers entre eux ϕ(ab)=ϕ(a)ϕ(b)ϕ(a)+ϕ(b)italic-ϕ𝑎𝑏italic-ϕ𝑎italic-ϕ𝑏italic-ϕ𝑎italic-ϕ𝑏\phi(ab)=\phi(a)\phi(b)\geq\phi(a)+\phi(b) dès que min(a,b)3𝑎𝑏3\min(a,b)\geq 3 et que si a𝑎a est impair ϕ(2a)=ϕ(a)=ϕ(a)+ϕ(2)1italic-ϕ2𝑎italic-ϕ𝑎italic-ϕ𝑎italic-ϕ21\phi(2a)=\phi(a)=\phi(a)+\phi(2)-1.

Définition 3.4

On définit les fonctions sur superscript{\mathbb{N}}^{*},

ψ(s):=max{n=pnp|p|nϕ(pnp)ϵ(n)s}assign𝜓𝑠𝑛productsuperscript𝑝subscript𝑛𝑝conditionalsubscriptconditional𝑝𝑛italic-ϕsuperscript𝑝subscript𝑛𝑝italic-ϵ𝑛𝑠\psi(s):=\max\{n=\prod p^{n_{p}}\in{\mathbb{N}}|\ \sum_{p|n}\phi(p^{n_{p}})-\epsilon(n)\leq s\}

et

λ(s):=minn=pnpψ(s)p|nϕ(pnp)ϵ(n)n1.assign𝜆𝑠subscript𝑛productsuperscript𝑝subscript𝑛𝑝𝜓𝑠subscriptconditional𝑝𝑛italic-ϕsuperscript𝑝subscript𝑛𝑝italic-ϵ𝑛𝑛1\lambda(s):=\min_{n=\prod p^{n_{p}}\leq\psi(s)}\frac{\sum_{p|n}\phi(p^{n_{p}})-\epsilon(n)}{n-1}. (25)
Lemme 3.5

Soit T𝑇T un tore sur {\mathbb{Q}} de dimension d𝑑d, L𝐿L son corps de décomposition et RL:=ResL/𝔾m,Lassignsubscript𝑅𝐿subscriptRes𝐿subscript𝔾𝑚𝐿R_{L}:={\rm Res}_{L/{\mathbb{Q}}}{\mathbb{G}}_{m,L}. Soit 𝔭𝔭\mathfrak{p} une place de L𝐿L divisant un premier p𝑝p. On suppose l’extension locale L𝔭/psubscript𝐿𝔭subscript𝑝L_{\mathfrak{p}}/{\mathbb{Q}}_{p} modérément ramifiée. On note D𝔭subscript𝐷𝔭D_{\mathfrak{p}} et I𝔭subscript𝐼𝔭I_{\mathfrak{p}} le groupe de décomposition et le groupe d’inertie en 𝔭𝔭\mathfrak{p}. Soit ap(T)subscript𝑎𝑝𝑇a_{p}(T) et ap(RL)subscript𝑎𝑝subscript𝑅𝐿a_{p}(R_{L}) les conducteurs d’Artin des D𝔭subscript𝐷𝔭D_{\mathfrak{p}}-modules X(Tp)superscript𝑋subscript𝑇subscript𝑝X^{*}(T_{{\mathbb{Q}}_{p}}) et X(RL,p)superscript𝑋subscript𝑅𝐿subscript𝑝X^{*}(R_{L,{\mathbb{Q}}_{p}}) respectivement. Alors

ap(T)λ(d)ap(RL).subscript𝑎𝑝𝑇𝜆𝑑subscript𝑎𝑝subscript𝑅𝐿a_{p}(T)\geq\lambda(d)a_{p}(R_{L}). (26)

Preuve. Soit χTsubscript𝜒𝑇\chi_{T} le caractère du I𝔭subscript𝐼𝔭I_{\mathfrak{p}}-modules X(Tp)tensor-productsuperscript𝑋subscript𝑇subscript𝑝X^{*}(T_{{\mathbb{Q}}_{p}})\otimes{\mathbb{C}} et χRsubscript𝜒𝑅\chi_{R} celui de X(RL,p)tensor-productsuperscript𝑋subscript𝑅𝐿subscript𝑝X^{*}(R_{L,{\mathbb{Q}}_{p}})\otimes{\mathbb{C}}. Soit aI𝔭subscript𝑎subscript𝐼𝔭a_{I_{\mathfrak{p}}} le caractère de la représentation d’Artin de I𝔭subscript𝐼𝔭I_{\mathfrak{p}}. Si on note <,>I𝔭subscriptsubscript𝐼𝔭<\ ,\ >_{I_{\mathfrak{p}}} le produit scalaire hermitien canonique sur l’espace des fonctions centrales sur I𝔭subscript𝐼𝔭I_{\mathfrak{p}}, alors d’après Serre ([24], VI-2),

ap(T)=<χT,aI𝔭>I𝔭, et ap(RL)=<χR,aI𝔭>I𝔭.a_{p}(T)=<\chi_{T},a_{I_{\mathfrak{p}}}>_{I_{\mathfrak{p}}},\ \ \mbox{ et }a_{p}(R_{L})=<\chi_{R},a_{I_{\mathfrak{p}}}>_{I_{\mathfrak{p}}}.

Comme l’extension L𝔭/psubscript𝐿𝔭subscript𝑝L_{\mathfrak{p}}/{\mathbb{Q}}_{p} est modérément ramifiée le groupe d’inertie I𝔭subscript𝐼𝔭I_{\mathfrak{p}} est cyclique d’ordre e𝔭subscript𝑒𝔭e_{\mathfrak{p}}. Comme L𝐿L est le corps de décomposition de T𝑇T, Gal(L/)𝐺𝑎𝑙𝐿Gal(L/{\mathbb{Q}}) agit fidèlement sur X(T)superscript𝑋𝑇X^{*}(T). Comme I𝔭subscript𝐼𝔭I_{\mathfrak{p}} est un sous-groupe de Gal(L/)𝐺𝑎𝑙𝐿Gal(L/{\mathbb{Q}}), il agit aussi fidèlement sur X(T)superscript𝑋𝑇X^{*}(T). Dans cette situation aI𝔭subscript𝑎subscript𝐼𝔭a_{I_{\mathfrak{p}}} est le caractère de la représentation d’augmentation de I𝔭subscript𝐼𝔭I_{\mathfrak{p}} ([24], prop. 2, p. 108). Par définition aI𝔭subscript𝑎subscript𝐼𝔭a_{I_{\mathfrak{p}}} est donc la somme des caractères non triviaux de I𝔭=/e𝔭subscript𝐼𝔭subscript𝑒𝔭I_{\mathfrak{p}}={\mathbb{Z}}/e_{\mathfrak{p}}{\mathbb{Z}}.

On en déduit que ap(T)subscript𝑎𝑝𝑇a_{p}(T) est minoré par le nombre de caractères distincts non triviaux de I𝔭subscript𝐼𝔭I_{\mathfrak{p}} apparaissant dans X(T)tensor-productsuperscript𝑋𝑇X^{*}(T)\otimes{\mathbb{C}}. Le résultat est alors une application du lemme 3.3 et du fait que ap(RL)=e𝔭1subscript𝑎𝑝subscript𝑅𝐿subscript𝑒𝔭1a_{p}(R_{L})=e_{\mathfrak{p}}-1.

Définition 3.6

Soit s𝑠s un entier, on note α(s)𝛼𝑠\alpha(s) l’ordre maximal d’un sous-groupe fini de GLs()subscriptGL𝑠{\rm GL}_{s}({\mathbb{Q}}).

On définit alors

c(s)=ps+11pα(s)2.𝑐𝑠subscriptproduct𝑝𝑠11superscript𝑝𝛼superscript𝑠2c(s)=\prod_{p\leq s+1}\frac{1}{p^{\alpha(s)^{2}}}. (27)

Des bornes très précises sur α(s)𝛼𝑠\alpha(s) sont données dans [11] et [10].

On peut maintenant démontrer la proposition 3.2 avec les constantes λ(d)𝜆𝑑\lambda(d) et c(d)𝑐𝑑c(d) de 3.4 et 3.6. D’après [24] VI-3, on a

a(T)=ppap(T) et a(RL)=ppap(RL).𝑎𝑇subscriptproduct𝑝superscript𝑝subscript𝑎𝑝𝑇 et 𝑎subscript𝑅𝐿subscriptproduct𝑝superscript𝑝subscript𝑎𝑝subscript𝑅𝐿a(T)=\prod_{p}p^{a_{p}(T)}\mbox{ et }a(R_{L})=\prod_{p}p^{a_{p}(R_{L})}.

Si p>d+1𝑝𝑑1p>d+1, soit 𝔭𝔭\mathfrak{p} une place de L𝐿L au dessus de p𝑝p. Le groupe d’inertie I𝔭subscript𝐼𝔭I_{\mathfrak{p}} agit fidèlement dans X(T)superscript𝑋𝑇X^{*}(T) car L𝐿L est le corps de décomposition de T𝑇T. Le lemme 3.3 assure qu’il n’y a pas de sous-groupes cycliques d’ordre p𝑝p dans I𝔭subscript𝐼𝔭I_{\mathfrak{p}}. La ramification en 𝔭𝔭\mathfrak{p} est donc modérée et par le lemme 3.5

pap(T)(pap(RL))λ(d)superscript𝑝subscript𝑎𝑝𝑇superscriptsuperscript𝑝subscript𝑎𝑝subscript𝑅𝐿𝜆𝑑p^{a_{p}(T)}\geq(p^{a_{p}(R_{L})})^{\lambda(d)}

Soit p𝑝p un nombre premier plus petit que d+1𝑑1d+1. Comme L𝐿L est le corps de décomposition de T𝑇T, le groupe de Galois G𝐺G agit fidèlement dans X(T)superscript𝑋𝑇X^{*}(T). En particulier dim(X(RL))=[L:]=|G|α(d)\dim(X^{*}(R_{L}))=[L:{\mathbb{Q}}]=|G|\leq\alpha(d) et une majoration simple du conducteur d’Artin utilisant la définition donne ap(RL)α(d)2subscript𝑎𝑝subscript𝑅𝐿𝛼superscript𝑑2a_{p}(R_{L})\leq\alpha(d)^{2}.

Comme ap(T)0subscript𝑎𝑝𝑇0a_{p}(T)\geq 0 et λ(d)1𝜆𝑑1\lambda(d)\leq 1 on obtient

pap(T)1pα(d)2(pap(RL))λ(d).superscript𝑝subscript𝑎𝑝𝑇1superscript𝑝𝛼superscript𝑑2superscriptsuperscript𝑝subscript𝑎𝑝subscript𝑅𝐿𝜆𝑑p^{a_{p}(T)}\geq\frac{1}{p^{\alpha(d)^{2}}}(p^{a_{p}(R_{L})})^{\lambda(d)}.

Comme DL=a(RL)subscript𝐷𝐿𝑎subscript𝑅𝐿D_{L}=a(R_{L}), on finit la preuve de la proposition 3.2 en combinant les résultats obtenus pour les différents nombres premiers p𝑝p.

3.3 Les invariants cohomologiques de T𝑇T.

On garde les notations précédentes, en particulier T𝑇T est un tore sur {\mathbb{Q}} de dimension fixée r𝑟r. Le but de cette partie est de donner des bornes uniformes pour la taille du nombre de Tamagawa τTsubscript𝜏𝑇\tau_{T} de T𝑇T . Les bornes que nous avons en vue seront des conséquences immédiates de l’interprétation cohomologique de cette quantité.

On utilise les notations de l’appendice de Kottwitz et Shelstad [15] concernant la dualité de Tate-Nakayama. On note donc pour tout tore S𝑆S sur {\mathbb{Q}}

Hi(𝔸,S):=Hi(,S(𝔸¯))assignsuperscript𝐻𝑖𝔸𝑆superscript𝐻𝑖𝑆¯𝔸H^{i}({\mathbb{A}},S):=H^{i}({\mathbb{Q}},S(\overline{{\mathbb{A}}}))
Hi(𝔸/,S):=Hi(,S(𝔸¯)/S(¯))assignsuperscript𝐻𝑖𝔸𝑆superscript𝐻𝑖𝑆¯𝔸𝑆¯H^{i}({\mathbb{A}}/{\mathbb{Q}},S):=H^{i}({\mathbb{Q}},S(\overline{{\mathbb{A}}})/S(\overline{{\mathbb{Q}}}))

et keri(,S)𝑘𝑒superscript𝑟𝑖𝑆ker^{i}({\mathbb{Q}},S) le noyau de l’application naturelle Hi(,S)Hi(𝔸,S)superscript𝐻𝑖𝑆superscript𝐻𝑖𝔸𝑆H^{i}({\mathbb{Q}},S)\rightarrow H^{i}({\mathbb{A}},S). On note H~i(.,.)\tilde{H}^{i}(.,.) les groupe de cohomologie modifiés à la Tate correspondants.

3.3.1 Estimation de τTsubscript𝜏𝑇\tau_{T}.

Le but de cette partie est de montrer l’estimation de τTsubscript𝜏𝑇\tau_{T} suivante.

Proposition 3.7

Il existe des constantes positives c1(r)subscript𝑐1𝑟c_{1}(r), et c2(r)subscript𝑐2𝑟c_{2}(r) ne dépendant que de r𝑟r telles que pour tout tore T𝑇T sur {\mathbb{Q}} de dimension r𝑟r:

c1(r)τTc2(r).subscript𝑐1𝑟subscript𝜏𝑇subscript𝑐2𝑟c_{1}(r)\leq\tau_{T}\leq c_{2}(r). (28)

D’après le résultat principal de Ono [18] on a

τT=|H1(,X(T))||ker1(,T)|.subscript𝜏𝑇superscript𝐻1superscript𝑋𝑇𝑘𝑒superscript𝑟1𝑇\tau_{T}=\frac{|H^{1}({\mathbb{Q}},X^{*}(T))|}{|ker^{1}({\mathbb{Q}},T)|}. (29)

On a H1(,X(T))=H1(,r)superscript𝐻1superscript𝑋𝑇superscript𝐻1superscript𝑟H^{1}({\mathbb{Q}},X^{*}(T))=H^{1}({\mathbb{Q}},{\mathbb{Z}}^{r}) et Gal(¯/)Gal¯{\rm Gal}(\overline{{\mathbb{Q}}}/{\mathbb{Q}}) opère via un sous-groupe fini G𝐺G de GLr()subscriptGL𝑟{\rm GL}_{r}({\mathbb{Z}}). En utilisant la suite d’inflation-restriction ([24] VII-6), on vérifie que H1(,r)=H1(G,r)superscript𝐻1superscript𝑟superscript𝐻1𝐺superscript𝑟H^{1}({\mathbb{Q}},{\mathbb{Z}}^{r})=H^{1}(G,{\mathbb{Z}}^{r}). A r𝑟r fixé, il n’y a, à isomophisme près, qu’un nombre fini de choix pour G𝐺G. On en déduit une borne uniforme pour |H1(,X(T))|superscript𝐻1superscript𝑋𝑇|H^{1}({\mathbb{Q}},X^{*}(T))| en fonction de r𝑟r.

Par ailleurs, un calcul de cohomologie Galoisienne utilisant la dualité de Nakayama-Tate ([18] 2.2–2.3) montre que ker1(,T)𝑘𝑒superscript𝑟1𝑇ker^{1}({\mathbb{Q}},T) est un quotient de H2(,X(T))superscript𝐻2superscript𝑋𝑇H^{2}({\mathbb{Q}},X^{*}(T)). Comme précédemment on vérifie que H2(,X(T))=H2(G,r)superscript𝐻2superscript𝑋𝑇superscript𝐻2𝐺superscript𝑟H^{2}({\mathbb{Q}},X^{*}(T))=H^{2}(G,{\mathbb{Z}}^{r}) pour un sous-goupe G𝐺G de GLn()subscriptGL𝑛{\rm GL}_{n}({\mathbb{Z}}). On en déduit que |ker1(,T)|𝑘𝑒superscript𝑟1𝑇|ker^{1}({\mathbb{Q}},T)| est aussi uniformément borné en fonction de r𝑟r. Ceci termine la preuve de la proposition au vu de l’expression de τTsubscript𝜏𝑇\tau_{T} dans l’équation (29).

3.4 Preuve du théorème 2.3

Il s’agit juste de collecter les résultats des parties précédentes en partant de la formule de classe de Shyr pour T𝑇T donnée à l’équation (14):

hTRT=wTτTρTDT12.subscript𝑇subscript𝑅𝑇subscript𝑤𝑇subscript𝜏𝑇subscript𝜌𝑇superscriptsubscript𝐷𝑇12h_{T}R_{T}=w_{T}\tau_{T}\rho_{T}D_{T}^{\frac{1}{2}}.

On remarque que w(T)1𝑤𝑇1w(T)\geq 1 car c’est un entier. On pourrait borner w(T)𝑤𝑇w(T) en fonction de d𝑑d mais nous n’en n’auront pas d’usages. Les minorations de ρ(T)𝜌𝑇\rho(T) (prop. 2.1), de DTsubscript𝐷𝑇D_{T} (prop. 3.2) et de τTsubscript𝜏𝑇\tau_{T} (prop. 3.7) permettent de finir la minoration de hTRTsubscript𝑇subscript𝑅𝑇h_{T}R_{T} recherchée au théorème 2.3.

4 Connexité du noyau des morphismes de réciprocités.

4.1 Corps de multiplication complexe et types CM.

Soit E𝐸E un corps CM de degré 2g2𝑔2g sur {\mathbb{Q}}. Soit F𝐹F son sous-corps totalement réel maximal. On note Ecsuperscript𝐸𝑐E^{c} (resp. Fcsuperscript𝐹𝑐F^{c} ) la clôture Galoisienne de E𝐸E (resp. F𝐹F) et ρAut(Ec/)𝜌Autsuperscript𝐸𝑐\rho\in{\rm Aut}(E^{c}/{\mathbb{Q}}) la conjugaison complexe. On pose

J=Hom(E,¯)=Gal(Ec/E)\Gal(Ec/)𝐽Hom𝐸¯\Galsuperscript𝐸𝑐𝐸Galsuperscript𝐸𝑐J={\rm Hom}(E,\overline{{\mathbb{Q}}})={\rm Gal}(E^{c}/E)\backslash{\rm Gal}(E^{c}/{\mathbb{Q}})

et on fixe un type CM ΣJΣ𝐽\Sigma\subset J de sorte que

J=ΣΣρ et ΣΣρ=.𝐽ΣsuperscriptΣ𝜌 et ΣsuperscriptΣ𝜌J=\Sigma\cup\Sigma^{\rho}\mbox{ et }\Sigma\cap\Sigma^{\rho}=\emptyset.

On notera contrairement aux parties précédentes 𝔤:=Gal(Ec/)assign𝔤Galsuperscript𝐸𝑐\mathfrak{g}:={\rm Gal}(E^{c}/{\mathbb{Q}}) réservant la lettre G𝐺G pour les groupes réductifs intervenants dans la suite. Le groupe de Galois 𝔤𝔤\mathfrak{g} opère à droite transitivement et fidèlement sur J𝐽J. On indexe les éléments de ΣΣ\Sigma par les indices {1,,g}1𝑔\{1,\dots,g\} et ceux de ΣρsuperscriptΣ𝜌\Sigma^{\rho} par les indices {1,,g}1𝑔\{-1,\dots,-g\} avec la convention que k.ρ=kformulae-sequence𝑘𝜌𝑘k.\rho=-k pour tout k{1,,g}𝑘1𝑔k\in\{1,\dots,g\}. Soit Cg:=(/2)gSgassignsubscript𝐶𝑔right-normal-factor-semidirect-productsuperscript2𝑔subscript𝑆𝑔C_{g}:=({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{g}\rtimes S_{g} le centralisateur de ρ𝜌\rho dans SJ=S2gsubscript𝑆𝐽subscript𝑆2𝑔S_{J}=S_{2g}. Par convention Cgsubscript𝐶𝑔C_{g} et Sgsubscript𝑆𝑔S_{g} opèrent à droite sur J𝐽J par permutation. Pour σSg𝜎subscript𝑆𝑔\sigma\in S_{g} et tout k{1,,g}𝑘1𝑔k\in\{1,\dots,g\} on a k.σ=σ1(k)formulae-sequence𝑘𝜎superscript𝜎1𝑘k.\sigma=\sigma^{-1}(k) et (k).σ=σ1(k)formulae-sequence𝑘𝜎superscript𝜎1𝑘(-k).\sigma=-\sigma^{-1}(k).

On dispose du résultat suivant de Dodson ([7] 1.1).

Proposition 4.1

(a) On a une suite exacte

1(/2)v𝔤𝔤01.1superscript2𝑣𝔤subscript𝔤011\rightarrow({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{v}\rightarrow\mathfrak{g}\rightarrow\mathfrak{g}_{0}\rightarrow 1.

Dans cette suite (/2)vsuperscript2𝑣({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{v} est identifié au sous-groupe Gal(Ec/Fc)Galsuperscript𝐸𝑐superscript𝐹𝑐{\rm Gal}(E^{c}/F^{c}) de 𝔤𝔤\mathfrak{g} et 𝔤0:=Gal(Fc/)assignsubscript𝔤0Galsuperscript𝐹𝑐\mathfrak{g}_{0}:={\rm Gal}(F^{c}/{\mathbb{Q}}). On a toujours v1𝑣1v\geq 1 car le groupe engendré par ρ𝜌\rho est un sous-groupe de (/2)vsuperscript2𝑣({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{v}.

(b) Le groupe 𝔤𝔤\mathfrak{g} muni de son action sur J𝐽J s’identifie à un sous-groupe de Cgsubscript𝐶𝑔C_{g}. Le groupe 𝔤0subscript𝔤0\mathfrak{g}_{0} s’identifie à un sous-groupe de Sgsubscript𝑆𝑔S_{g}, il agit transitivement sur {1,,g}1𝑔\{1,\dots,g\} et il agit sur le sous-groupe (/2)v(/2)gsuperscript2𝑣superscript2𝑔({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{v}\subset({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{g} de Cgsubscript𝐶𝑔C_{g} par permutation des coordonnées.

(c) On peut écrire

𝔤=σ𝔤0(/2)v(s(σ),σ)Cg𝔤subscript𝜎subscript𝔤0superscript2𝑣𝑠𝜎𝜎subscript𝐶𝑔\mathfrak{g}=\cup_{\sigma\in\mathfrak{g}_{0}}({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{v}(s(\sigma),\sigma)\subset C_{g} (30)

(s(σ),σ)𝑠𝜎𝜎(s(\sigma),\sigma) est un relévement arbitraire de σ𝜎\sigma. Soit j:(/2)g(/2)g/(/2)v:𝑗superscript2𝑔superscript2𝑔superscript2𝑣j:({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{g}\rightarrow({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{g}/({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{v} la surjection canonique. Alors js:𝔤0(/2)g/(/2)v:𝑗𝑠subscript𝔤0superscript2𝑔superscript2𝑣js:\mathfrak{g}_{0}\rightarrow({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{g}/({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{v} est un 111-cocycle.

On note 𝔥=Gal(Ec/E)𝔥Galsuperscript𝐸𝑐𝐸\mathfrak{h}={\rm Gal}(E^{c}/E) et on pose

Σ~:={α𝔤,𝔥αΣ}=i=1g𝔥αi.assign~Σformulae-sequence𝛼𝔤𝔥𝛼Σsuperscriptsubscriptsquare-union𝑖1𝑔𝔥subscript𝛼𝑖\tilde{\Sigma}:=\{\alpha\in\mathfrak{g},\mathfrak{h}\alpha\in\Sigma\}=\sqcup_{i=1}^{g}\mathfrak{h}\alpha_{i}.

On rappelle que le type CM ΣΣ\Sigma est dit primitif si il ne provient pas d’un type CM sur un sous-corps CM stricte de E𝐸E. Si ΣΣ\Sigma est primitif alors

𝔥={α𝔤,αΣ~=Σ~}.𝔥formulae-sequence𝛼𝔤𝛼~Σ~Σ\mathfrak{h}=\{\alpha\in\mathfrak{g},\alpha\tilde{\Sigma}=\tilde{\Sigma}\}.

Soit

𝔥:={α𝔤,Σ~α=Σ~}:={α𝔤,αΣ~=Σ~}assignsuperscript𝔥formulae-sequence𝛼𝔤~Σ𝛼~Σassignformulae-sequence𝛼𝔤𝛼~superscriptΣ~superscriptΣ\mathfrak{h}^{\prime}:=\{\alpha\in\mathfrak{g},\tilde{\Sigma}\alpha=\tilde{\Sigma}\}:=\{\alpha\in\mathfrak{g},\alpha\tilde{\Sigma^{\prime}}=\tilde{\Sigma^{\prime}}\}

avec Σ~:=Σ~1={x1,xΣ~}assignsuperscript~Σsuperscript~Σ1superscript𝑥1𝑥~Σ\tilde{\Sigma}^{\prime}:=\tilde{\Sigma}^{-1}=\{x^{-1},\ x\in\tilde{\Sigma}\}. Soit Esuperscript𝐸E^{\prime} le sous-corps de Ecsuperscript𝐸𝑐E^{c} attaché à 𝔥superscript𝔥\mathfrak{h}^{\prime} par la correspondance de Galois. Alors Esuperscript𝐸E^{\prime} est le corps reflex de (E,Σ)𝐸Σ(E,\Sigma), c’est un corps CM. On pose [E:]:=2g[E^{\prime}:{\mathbb{Q}}]:=2g^{\prime}. Soit ΣsuperscriptΣ\Sigma^{\prime} l’image de Σ~~superscriptΣ\tilde{\Sigma^{\prime}} dans

Hom(E,¯)=𝔥\𝔤.Homsuperscript𝐸¯\superscript𝔥𝔤{\rm Hom}(E^{\prime},\overline{{\mathbb{Q}}})=\mathfrak{h}^{\prime}\backslash\mathfrak{g}.

Alors ΣsuperscriptΣ\Sigma^{\prime} est un type CM primitif sur Esuperscript𝐸E^{\prime}. On dit que (E,Σ)superscript𝐸superscriptΣ(E^{\prime},\Sigma^{\prime}) est le dual de (E,Σ)𝐸Σ(E,\Sigma). Si (E,Σ)𝐸Σ(E,\Sigma) est primitif, alors (E,Σ)𝐸Σ(E,\Sigma) est le dual de (E,Σ)superscript𝐸superscriptΣ(E^{\prime},\Sigma^{\prime}).

Dans la description (30) de 𝔤𝔤\mathfrak{g} comme sous-groupe de Cgsubscript𝐶𝑔C_{g}, le fixateur de ΣΣ\Sigma est le sous-groupe des éléments de la forme (1,σ)1𝜎(1,\sigma) de 𝔤𝔤\mathfrak{g}. Soit

𝔤Σ:={σ𝔤0,s(σ)(/2)v}.assignsubscript𝔤Σformulae-sequence𝜎subscript𝔤0𝑠𝜎superscript2𝑣\mathfrak{g}_{\Sigma}:=\{\sigma\in\mathfrak{g}_{0},\ s(\sigma)\in({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{v}\}.

Alors 𝔥={(1,σ),σ𝔤Σ}superscript𝔥1𝜎𝜎subscript𝔤Σ\mathfrak{h}^{\prime}=\{(1,\sigma),\ \sigma\in\mathfrak{g}_{\Sigma}\} En particulier on a

[E:]=2g=2v[𝔤0:𝔤Σ].[E^{\prime}:{\mathbb{Q}}]=2g^{\prime}=2^{v}[\mathfrak{g}_{0}:\mathfrak{g}_{\Sigma}].
Remarque 4.2

Si on change le type CM ΣΣ\Sigma en Σ.bformulae-sequenceΣ𝑏\Sigma.b pour b(/2)g𝑏superscript2𝑔b\in({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{g} cela revient à conjuguer 𝔤𝔤\mathfrak{g} dans S2gsubscript𝑆2𝑔S_{2g} par b𝑏b. On change alors la section s(σ)𝑠𝜎s(\sigma) par multiplication par le cobord bσ(b)(/2)v𝑏𝜎𝑏superscript2𝑣b\sigma(b)({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{v} dans la description de 𝔤𝔤\mathfrak{g} comme sous-groupe de Cgsubscript𝐶𝑔C_{g} de la proposition 4.1–c.

On utilisera le résultat suivant de Dodson ([7] 2.1.2).

Proposition 4.3

Soit E𝐸E un corps CM de degré 2g2𝑔2g sur {\mathbb{Q}}. Le cocycle js:𝔤0(/2)g/(/2)v:𝑗𝑠subscript𝔤0superscript2𝑔superscript2𝑣js:\mathfrak{g}_{0}\rightarrow({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{g}/({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{v} de 4.1–c est trivial si et seulement si il existe un type CM, Σ1subscriptΣ1\Sigma_{1} sur E𝐸E dont le corps reflex E1subscript𝐸1E_{1} est de degré 2vsuperscript2𝑣2^{v} sur {\mathbb{Q}}.

Remarquer que la nullité du cocycle js𝑗𝑠js est indépendante du choix d’un type CM ΣΣ\Sigma au vu de la remarque précédente. Noter que dans ce cas l’image de js𝑗𝑠js dans H2(𝔤0,(/2)v)=Ext1(𝔤0,(/2)v)superscript𝐻2subscript𝔤0superscript2𝑣𝐸𝑥superscript𝑡1subscript𝔤0superscript2𝑣H^{2}(\mathfrak{g}_{0},({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{v})=Ext^{1}(\mathfrak{g}_{0},({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{v}) est nul. La suite exacte de la proposition 4.1-a est alors scindée. Nous utiliserons la proposition précédente dans le cas suivant

Lemme 4.4

Soit E𝐸E un corps CM de degré 2g2𝑔2g contenant un corps quadratique imaginaire Esuperscript𝐸E^{\prime}. Alors v=1𝑣1v=1 et le cocycle js𝑗𝑠js est trivial.

Dans cette situation E=FE𝐸𝐹superscript𝐸E=FE^{\prime} et Ec=FcEsuperscript𝐸𝑐superscript𝐹𝑐superscript𝐸E^{c}=F^{c}E^{\prime} donc [Ec:Fc]=2[E^{c}:F^{c}]=2 et v=1𝑣1v=1. Soit ΣsuperscriptΣ\Sigma^{\prime} un type CM sur Esuperscript𝐸E^{\prime} et ΣΣ\Sigma son extension à E𝐸E. Avec les notations précédentes Σ~=𝔥=Σ~1~Σ𝔥superscript~Σ1\tilde{\Sigma}=\mathfrak{h}=\tilde{\Sigma}^{-1}. On en déduit que Esuperscript𝐸E^{\prime} est le corps reflex de (E,Σ)𝐸Σ(E,\Sigma) et que le cocycle js𝑗𝑠js est trivial, d’après la proposition 4.3.

4.2 Tores de multiplication complexe, le cas du groupe symplectique.

Fixons la forme bilinéaire alternée ψgsubscript𝜓𝑔\psi_{g} de matrice

Jg=(01g1g0)subscript𝐽𝑔matrix0subscript1𝑔subscript1𝑔0J_{g}=\left(\matrix{0&-1_{g}\cr 1_{g}&0\cr}\right)

sur 2gsuperscript2𝑔{\mathbb{Q}}^{2g} et notons G=GSp2g𝐺subscriptGSp2𝑔G={\rm GSp}_{2g} le groupe de similitudes symplectiques associé. On garde les notations de la section précédente concernant le corps de multiplication complexe E𝐸E. On peut trouver un élément ιE𝜄𝐸\iota\in E tel que ιρ=ιsuperscript𝜄𝜌𝜄\iota^{\rho}=-\iota. Ainsi E𝐸E est muni de la forme {\mathbb{Q}}-linéaire alternée

<x,y>=TrE/(xριy).formulae-sequenceabsent𝑥𝑦𝑇subscript𝑟𝐸superscript𝑥𝜌𝜄𝑦<x,y>=Tr_{E/{\mathbb{Q}}}(x^{\rho}\iota y).

On peut alors fixer un isomorphisme symplectique (E,<,>)(2g,ψg)similar-to-or-equals𝐸superscript2𝑔subscript𝜓𝑔(E,<\ ,\ >)\simeq({\mathbb{Q}}^{2g},\psi_{g}).

Soit RE:=ResE/𝔾m,Eassignsubscript𝑅𝐸subscriptRes𝐸subscript𝔾𝑚𝐸R_{E}:={\rm Res}_{E/{\mathbb{Q}}}{\mathbb{G}}_{m,E}. L’espace des caractères X(RE)superscript𝑋subscript𝑅𝐸X^{*}(R_{E}) s’écrit alors

X(RE)=ϕHom(E,¯)ϕ=α𝔥\𝔤𝔥α.superscript𝑋subscript𝑅𝐸subscriptdirect-sumitalic-ϕHom𝐸¯italic-ϕsubscriptdirect-sum𝛼\𝔥𝔤𝔥𝛼X^{*}(R_{E})=\oplus_{\phi\in{\rm Hom}(E,\overline{{\mathbb{Q}}})}{\mathbb{Z}}\phi=\oplus_{\alpha\in\mathfrak{h}\backslash\mathfrak{g}}{\mathbb{Z}}\mathfrak{h}\alpha.

Il sera utile de l’écrire de la manière suivante qui fait intervenir le type CM ΣΣ\Sigma:

X(RE)=i=1g[αi]i=1g[αi¯]=i=1g[αi]i=1g[αi]X^{*}(R_{E})=\oplus_{i=1}^{g}{\mathbb{Z}}[\alpha_{i}]\oplus\oplus_{i=1}^{g}{\mathbb{Z}}[\overline{\alpha_{i}}]=\oplus_{i=1}^{g}{\mathbb{Z}}[\alpha_{i}]\oplus\oplus_{i=1}^{g}{\mathbb{Z}}[\alpha_{-i}]

où l’on a noté [αi]delimited-[]subscript𝛼𝑖[\alpha_{i}] l’élément 𝔥αi𝔥subscript𝛼𝑖\mathfrak{h}\alpha_{i} du type CM ΣHom(E,¯)ΣHom𝐸¯\Sigma\subset{\rm Hom}(E,\overline{{\mathbb{Q}}}) et [αi]=[αi¯]delimited-[]subscript𝛼𝑖delimited-[]¯subscript𝛼𝑖[\alpha_{-i}]=[\overline{\alpha_{i}}] l’élément 𝔥αiρ𝔥subscript𝛼𝑖𝜌\mathfrak{h}\alpha_{i}\rho de ΣρsuperscriptΣ𝜌\Sigma^{\rho}. On a une description identique pour le réseau X(RE)subscript𝑋subscript𝑅𝐸X_{*}(R_{E}) des cocaractères de REsubscript𝑅𝐸R_{E}.

Soit UEsubscript𝑈𝐸U_{E} le sous-tore de REsubscript𝑅𝐸R_{E} défini par

UE:={xRE,xxρ=1}.assignsubscript𝑈𝐸formulae-sequence𝑥subscript𝑅𝐸𝑥superscript𝑥𝜌1U_{E}:=\{x\in R_{E},xx^{\rho}=1\}.

Soit GUE𝐺subscript𝑈𝐸GU_{E} le sous-tore de REsubscript𝑅𝐸R_{E} en gendré par UEsubscript𝑈𝐸U_{E} et 𝔾m,REsubscript𝔾𝑚subscript𝑅𝐸{\mathbb{G}}_{m,{\mathbb{Q}}}\subset R_{E}. Le tore GUE𝐺subscript𝑈𝐸GU_{E} s’identifie à un tore maximal de G𝐺G.

La théorie de Deligne construit un paramètre de Hodge h:𝕊RE:𝕊tensor-productsubscript𝑅𝐸h:{\mathbb{S}}\rightarrow R_{E}\otimes{\mathbb{R}} se factorisant par GUEGtensor-product𝐺subscript𝑈𝐸subscript𝐺GU_{E}\otimes{\mathbb{R}}\subset G_{{\mathbb{R}}}.

Le module des cocaractères X(GUE)subscript𝑋𝐺subscript𝑈𝐸X_{*}(GU_{E}) de GUE𝐺subscript𝑈𝐸GU_{E} est le sous-module de X(RE)subscript𝑋subscript𝑅𝐸X_{*}(R_{E}) qui se décrit par

X(GUE)={i=1gni[αi]+ni[αi],ni+ni=nj+nj pour tout ij}.subscript𝑋𝐺subscript𝑈𝐸superscriptsubscript𝑖1𝑔subscript𝑛𝑖delimited-[]subscript𝛼𝑖subscript𝑛𝑖delimited-[]subscript𝛼𝑖subscript𝑛𝑖subscript𝑛𝑖subscript𝑛𝑗subscript𝑛𝑗 pour tout ijX_{*}(GU_{E})=\{\sum_{i=1}^{g}n_{i}[\alpha_{i}]+n_{-i}[\alpha_{-i}],\ n_{i}+n_{-i}=n_{j}+n_{-j}\mbox{ pour tout $i$, $j$}\}.

Le cocaractère μ=μh𝜇subscript𝜇\mu=\mu_{h} de GUE𝐺subscript𝑈𝐸GU_{E} associé au paramètre de Hodge est dans cette description μ=i=1g[αi]𝜇superscriptsubscript𝑖1𝑔delimited-[]subscript𝛼𝑖\mu=\sum_{i=1}^{g}[\alpha_{i}]. Si on note ei=[αi][αi]subscript𝑒𝑖delimited-[]subscript𝛼𝑖delimited-[]subscript𝛼𝑖e_{i}=[\alpha_{i}]-[\alpha_{-i}] on a

X(GUE)=μi=1gei.X_{*}(GU_{E})={\mathbb{Z}}\mu\oplus\oplus_{i=1}^{g}{\mathbb{Z}}e_{i}.

On rappelle que Esuperscript𝐸E^{\prime} désigne le corps reflex de (E,Σ)𝐸Σ(E,\Sigma) et que 𝔥superscript𝔥\mathfrak{h}^{\prime} est le sous-groupe de 𝔤𝔤\mathfrak{g} associé à Esuperscript𝐸E^{\prime} par la correspondance de Galois. Le morphisme de réciprocité

r:RERE:𝑟subscript𝑅superscript𝐸subscript𝑅𝐸r:R_{E^{\prime}}\rightarrow R_{E} (31)

se factorise par GUE𝐺subscript𝑈𝐸GU_{E}. Il se décrit au niveau des cocaractères de la manière suivante.

X(r):X(RE)=β𝔥\𝔤𝔥βX(RE):subscript𝑋𝑟subscript𝑋subscript𝑅superscript𝐸subscriptdirect-sum𝛽\superscript𝔥𝔤superscript𝔥𝛽subscript𝑋subscript𝑅𝐸X_{*}(r):X_{*}(R_{E^{\prime}})=\oplus_{\beta\in\mathfrak{h}^{\prime}\backslash\mathfrak{g}}\mathfrak{h}^{\prime}\beta\longrightarrow X_{*}(R_{E})
𝔥βi=1g𝔥αiβ=i=1g𝔥αi.β=i=1g[αi.β]maps-tosuperscript𝔥𝛽superscriptsubscript𝑖1𝑔𝔥subscript𝛼𝑖𝛽superscriptsubscript𝑖1𝑔𝔥subscript𝛼formulae-sequence𝑖𝛽superscriptsubscript𝑖1𝑔delimited-[]subscript𝛼formulae-sequence𝑖𝛽\mathfrak{h}^{\prime}\beta\mapsto\sum_{i=1}^{g}\mathfrak{h}\alpha_{i}\beta=\sum_{i=1}^{g}\mathfrak{h}\alpha_{i.\beta}=\sum_{i=1}^{g}[\alpha_{i.\beta}]

β𝛽\beta agit sur {±1,±2,,±g}plus-or-minus1plus-or-minus2plus-or-minus𝑔\{\pm 1,\pm 2,\dots,\pm g\} via la description de 𝔤𝔤\mathfrak{g} donné à la proposition 4.1.

On définit le sous-module Lμ:=X(r)(X(RE))assignsubscript𝐿𝜇subscript𝑋𝑟subscript𝑋subscriptsuperscript𝑅𝐸L_{\mu}:=X_{*}(r)(X_{*}(R^{\prime}_{E})) de X(GUE)subscript𝑋𝐺subscript𝑈𝐸X_{*}(GU_{E}). Soit Lμ:=(Lμ)X(GUE)assignsubscriptsuperscript𝐿𝜇tensor-productsubscript𝐿𝜇subscript𝑋𝐺subscript𝑈𝐸L^{\prime}_{\mu}:=(L_{\mu}\otimes{\mathbb{Q}})\cap X_{*}(GU_{E}). Alors Lμsubscriptsuperscript𝐿𝜇L^{\prime}_{\mu} est un sous-{\mathbb{Z}}-module galoisien saturé de X(GUE)subscript𝑋𝐺subscript𝑈𝐸X_{*}(GU_{E}). Le sous-tore M=MT(μ)𝑀𝑀𝑇𝜇M=MT(\mu) de GUE𝐺subscript𝑈𝐸GU_{E} associé à Lμsubscriptsuperscript𝐿𝜇L^{\prime}_{\mu} est le groupe de Mumford-Tate de μ𝜇\mu (ou de hh). Par définition M𝑀M est le plus petit {\mathbb{Q}}-sous-tore de GUE𝐺subscript𝑈𝐸GU_{E} tel que μsubscript𝜇\mu_{{\mathbb{C}}} se factorise par Msubscript𝑀M_{{\mathbb{C}}}. Le lemme suivant est alors une conséquence de l’équivalence de catégories entre la catégorie des tores algébriques et celle des {\mathbb{Z}}-modules galoisiens libres de rang fini:

Lemme 4.5

Le morphisme de réciprocité r𝑟r est à noyau connexe si et seulement si Lμ=Lμsubscript𝐿𝜇subscriptsuperscript𝐿𝜇L_{\mu}=L^{\prime}_{\mu}.

Voici un critère simple qui assure la connexité de r𝑟r.

Proposition 4.6

Si dans la suite exacte

1(/2)v𝔤𝔤011superscript2𝑣𝔤subscript𝔤011\rightarrow({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{v}\rightarrow\mathfrak{g}\rightarrow\mathfrak{g}_{0}\rightarrow 1

de la proposition 4.1 on a v=g𝑣𝑔v=g, alors Lμ=X(GUE)subscript𝐿𝜇subscript𝑋𝐺subscript𝑈𝐸L_{\mu}=X_{*}(GU_{E}) et r𝑟r est à noyau connexe.

Preuve. Dans cette situation le groupe 𝔤𝔤\mathfrak{g} contient les transpositions τk=(k,k)subscript𝜏𝑘𝑘𝑘\tau_{k}=(k,-k) pour k{1,,g}𝑘1𝑔k\in\{1,\dots,g\}. On en déduit que Lμsubscript𝐿𝜇L_{\mu} contient μμ.τk=ekformulae-sequence𝜇𝜇subscript𝜏𝑘subscript𝑒𝑘\mu-\mu.\tau_{k}=e_{k}. Donc Lμ=Lμ=X(GUE)subscript𝐿𝜇subscriptsuperscript𝐿𝜇subscript𝑋𝐺subscript𝑈𝐸L_{\mu}=L^{\prime}_{\mu}=X_{*}(GU_{E}) et r𝑟r est à noyau connexe.

Ce résultat précise un énoncé de Clozel et du premier auteur ( [6], sec. 3.2) où le cas où 𝔤=Cg𝔤subscript𝐶𝑔\mathfrak{g}=C_{g} est obtenu. Noter que ce dernier cas, appelé “Galois générique” dans [6] est le cas générique comme expliqué dans ([6], sec. 2).

Proposition 4.7

Si g3𝑔3g\leq 3 le morphisme de réciprocité r𝑟r est à noyau connexe.

Preuve. Le cas g=1𝑔1g=1 est bien connu. On a alors E=E𝐸superscript𝐸E=E^{\prime} et r𝑟r est un isomorphisme.

Dans le cas g=2𝑔2g=2, si v=2𝑣2v=2, on peut appliquer la proposition 4.6. On peut donc supposer que v=1𝑣1v=1. Le groupe 𝔤0=S2subscript𝔤0subscript𝑆2\mathfrak{g}_{0}=S_{2} est engendré par la transposition σ=(1,2)𝜎1.2\sigma=(1,2). Le choix de s𝑠s n’étant bien défini qu’à multiplication par ρ𝜌\rho près, on peut supposer que s(σ)=Id𝑠𝜎𝐼𝑑s(\sigma)=Id où que s(σ)𝑠𝜎s(\sigma) est la transposition (1,1)11(1,-1). Dans le premier cas Lμ=μ(e1+e2)=Lμsubscript𝐿𝜇direct-sum𝜇subscript𝑒1subscript𝑒2subscriptsuperscript𝐿𝜇L_{\mu}={\mathbb{Z}}\mu\oplus{\mathbb{Z}}(e_{1}+e_{2})=L^{\prime}_{\mu} et dans le second Lμ=X(GUE)subscript𝐿𝜇subscript𝑋𝐺subscript𝑈𝐸L_{\mu}=X_{*}(GU_{E}). Noter que si le type CM ΣΣ\Sigma est primitif, le résultat de Ribet ([23], 3.5) nous assure que le rang de Lμsubscript𝐿𝜇L_{\mu} est 333 donc que le premier cas n’intervient pas.

Pour g=3𝑔3g=3 on peut comme précédemment supposer que 1v<31𝑣31\leq v<3. Le cas v=2𝑣2v=2 est en fait exclu. En effet 𝔤0subscript𝔤0\mathfrak{g}_{0} est soit S3subscript𝑆3S_{3} soit le groupe alternée A3subscript𝐴3A_{3}. Dans tous les cas il contient le trois-cycle σ0=(1,2,3)subscript𝜎01.2.3\sigma_{0}=(1,2,3). Les seuls points fixes de σ0subscript𝜎0\sigma_{0} dans son action sur (/2)3superscript23({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{3} sont Id𝐼𝑑Id et ρ𝜌\rho. Comme σ0subscript𝜎0\sigma_{0} préserve (/2)vsuperscript2𝑣({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{v} on trouve que v=2𝑣2v=2 est impossible. Pour g=p𝑔𝑝g=p un nombre premier arbitraire cet argument montre que p𝑝p divise 2v2superscript2𝑣22^{v}-2.

Quand v=1𝑣1v=1, (/2)v={Id,ρ}superscript2𝑣𝐼𝑑𝜌({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{v}=\{Id,\rho\} est central dans 𝔤𝔤\mathfrak{g}. dans cette situation la suite exacte

1{Id,ρ}𝔤𝔤011𝐼𝑑𝜌𝔤subscript𝔤011\rightarrow\{Id,\rho\}\rightarrow\mathfrak{g}\rightarrow\mathfrak{g}_{0}\rightarrow 1

est scindée car ρ𝜌\rho est de signature 11-1 donc 𝔤A2g𝔤subscript𝐴2𝑔\mathfrak{g}\cap A_{2g} fournit un scindage. La sous-extension de Ecsuperscript𝐸𝑐E^{c} associée à 𝔤A2g𝔤subscript𝐴2𝑔\mathfrak{g}\cap A_{2g} est un corps quadratique imaginaire [δ]delimited-[]𝛿{\mathbb{Q}}[\sqrt{-\delta}] et intervient comme un corps reflex de E𝐸E pour un type CM de E𝐸E. Par le corollaire 2.1.2 de [7] on en déduit que le cocycle js:𝔤0(/2)g/{Id,ρ}:𝑗𝑠subscript𝔤0superscript2𝑔𝐼𝑑𝜌js:\mathfrak{g}_{0}\rightarrow({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{g}/\{Id,\rho\} de la proposition 4.1 est trivial. Il existe donc b(/2)g𝑏superscript2𝑔b\in({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{g} tel que js(σ)=bσ(b){Id,ρ}𝑗𝑠𝜎𝑏𝜎𝑏𝐼𝑑𝜌js(\sigma)=b\sigma(b)\{Id,\rho\} pour tout σ𝔤0𝜎subscript𝔤0\sigma\in\mathfrak{g}_{0}. On peut alors choisir s(σ)=bσ(b)𝑠𝜎𝑏𝜎𝑏s(\sigma)=b\sigma(b).

Si b{Id,ρ}𝑏𝐼𝑑𝜌b\in\{Id,\rho\}, s(σ)=Id𝑠𝜎𝐼𝑑s(\sigma)=Id pour tout σ𝔤0𝜎subscript𝔤0\sigma\in\mathfrak{g}_{0} alors Lμsubscript𝐿𝜇L_{\mu} est engendré par μ𝜇\mu et μρsuperscript𝜇𝜌\mu^{\rho}. On en déduit que Lμ=μ(e1+e2+e3)=Lμsubscript𝐿𝜇direct-sum𝜇subscript𝑒1subscript𝑒2subscript𝑒3subscriptsuperscript𝐿𝜇L_{\mu}={\mathbb{Z}}\mu\oplus{\mathbb{Z}}(e_{1}+e_{2}+e_{3})=L^{\prime}_{\mu}. Dans cette situation le corps reflex est [δ]delimited-[]𝛿{\mathbb{Q}}[\sqrt{-\delta}] et le type CM ΣΣ\Sigma n’est pas primitif par le résultat de Ribet ([23], 3.5).

Si b{Id,ρ}𝑏𝐼𝑑𝜌b\notin\{Id,\rho\}, (s(σ),σ)𝑠𝜎𝜎(s(\sigma),\sigma) agit sur μ𝜇\mu via l’action de b.σ1(b)formulae-sequence𝑏superscript𝜎1𝑏b.\sigma^{-1}(b). On remarque bσ01(b)𝑏superscriptsubscript𝜎01𝑏b\sigma_{0}^{-1}(b) est une permutation paire non triviale. C’est donc un produit de 222 transpositions. Donc ρbσ01(b)=(i,i)𝜌𝑏superscriptsubscript𝜎01𝑏𝑖𝑖\rho b\sigma_{0}^{-1}(b)=(i,-i) pour un i{1,2,3}𝑖1.2.3i\in\{1,2,3\} et ρbσ02(b)=ρbσ0(b)=(j,j)𝜌𝑏superscriptsubscript𝜎02𝑏𝜌𝑏subscript𝜎0𝑏𝑗𝑗\rho b\sigma_{0}^{-2}(b)=\rho b\sigma_{0}(b)=(j,-j) avec ji𝑗𝑖j\neq i. On en déduit que Lμsubscript𝐿𝜇L_{\mu} contient ei=μμ.(i,i)formulae-sequencesubscript𝑒𝑖𝜇𝜇𝑖𝑖e_{i}=\mu-\mu.(i,-i) et ejsubscript𝑒𝑗e_{j}. Comme il contient μμ.ρ=e1+e2+e3formulae-sequence𝜇𝜇𝜌subscript𝑒1subscript𝑒2subscript𝑒3\mu-\mu.\rho=e_{1}+e_{2}+e_{3}, on trouve que Lμ=X(GUE)subscript𝐿𝜇subscript𝑋𝐺subscript𝑈𝐸L_{\mu}=X_{*}(GU_{E}).

Remarque 4.8

Le lecteur intéréssé par la complexité combinatoire peut regarder la table des cas possibles donné par Dodson ([7] p.23) dans le cas g=4𝑔4g=4. On peut construire des exemples de corps CM de degré 888 et de type CM ΣΣ\Sigma tel que Lμ/Lμ/2similar-to-or-equalssubscriptsuperscript𝐿𝜇subscript𝐿𝜇2L^{\prime}_{\mu}/L_{\mu}\simeq{\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}}. Par exemple on suppose que 𝔤0(/2)2similar-to-or-equalssubscript𝔤0superscript22\mathfrak{g}_{0}\simeq({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{2} est le groupe de Klein engendré par les doubles transpositions et si on a une suite exacte scindé

1{1,ρ}𝔤𝔤0111𝜌𝔤subscript𝔤011\rightarrow\{1,\rho\}\rightarrow\mathfrak{g}\rightarrow\mathfrak{g}_{0}\rightarrow 1

tel que s(σ)=bσ(b)𝑠𝜎𝑏𝜎𝑏s(\sigma)=b\sigma(b) avec b𝑏b la transposition (1,1)11(1,-1). Un calcul simple montre que

Lμ={i=14niei+rμ|i=14ni2}subscript𝐿𝜇conditional-setsuperscriptsubscript𝑖14subscript𝑛𝑖subscript𝑒𝑖𝑟𝜇superscriptsubscript𝑖14subscript𝑛𝑖2L_{\mu}=\{\sum_{i=1}^{4}n_{i}e_{i}+r\mu|\ \sum_{i=1}^{4}n_{i}\in 2{\mathbb{Z}}\}

qui est d’indice 222 dans Lμ=X(GUE)subscriptsuperscript𝐿𝜇subscript𝑋𝐺subscript𝑈𝐸L^{\prime}_{\mu}=X_{*}(GU_{E}). En particulier r𝑟r n’est pas à noyau connexe dans ce cas.

La proposition suivante montre que l’indice de Lμsubscript𝐿𝜇L_{\mu} dans Lμsubscriptsuperscript𝐿𝜇L^{\prime}_{\mu} peut être divisible par des entiers arbitrairement grands:

Proposition 4.9

Soit p𝑝p un nombre premier impair. Il existe un corps CM E𝐸E de degré 2p2𝑝2p et un type CM sur E𝐸E tel que Lμ/Lμ/(p2)similar-to-or-equalssubscriptsuperscript𝐿𝜇subscript𝐿𝜇𝑝2L^{\prime}_{\mu}/L_{\mu}\simeq{\mathbb{Z}}/(p-2){\mathbb{Z}}.

Preuve. Soit F𝐹F un corps totalement réel qui est une extension galoisienne de {\mathbb{Q}} de groupe /p𝑝{\mathbb{Z}}/p{\mathbb{Z}}. De tels F𝐹F existent comme sous-extensions convenables de corps cyclotomiques. Soit K𝐾K un corps quadratique imaginaire et E=FK𝐸𝐹𝐾E=FK. Alors E𝐸E est un corps CM qui est Galoisien sur {\mathbb{Q}} de groupe /2×/p2𝑝{\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}}\times{\mathbb{Z}}/p{\mathbb{Z}}. Dans cette situation, pour tout type CM sur E𝐸E, on a la suite exacte scindée

1{1,ρ}𝔤/p111𝜌𝔤𝑝11\rightarrow\{1,\rho\}\rightarrow\mathfrak{g}\rightarrow{\mathbb{Z}}/p{\mathbb{Z}}\rightarrow 1

et par le lemme 4.4 le cocycle js:/p(/2)p//2:𝑗𝑠𝑝superscript2𝑝2js:{\mathbb{Z}}/p{\mathbb{Z}}\rightarrow({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{p}/{\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}} est trivial. Il existe donc a(/2)p𝑎superscript2𝑝a\in({\mathbb{Z}}/2{\mathbb{Z}})^{p} tel que s(σ)=aσ(a)𝑠𝜎𝑎𝜎𝑎s(\sigma)=a\sigma(a) pour tout σ/p𝜎𝑝\sigma\in{\mathbb{Z}}/p{\mathbb{Z}}. Après renumérotation de {1,,p}1𝑝\{1,\dots,p\}, on peut supposer que /p𝑝{\mathbb{Z}}/p{\mathbb{Z}} est engendré par le p𝑝p-cycle (1,2,,p)1.2𝑝(1,2,\dots,p). On peut par ailleurs par un choix convenable du type CM sur E𝐸E utilisant la remarque 4.2 supposer que a=(1,1)𝑎11a=(1,-1). Un calcul simple montre alors que Lμsubscript𝐿𝜇L_{\mu} est engendré par μ𝜇\mu, k=1peksuperscriptsubscript𝑘1𝑝subscript𝑒𝑘\sum_{k=1}^{p}e_{k} et les (e1+ei)subscript𝑒1subscript𝑒𝑖(e_{1}+e_{i}) avec i{2,,p}𝑖2𝑝i\in\{2,\dots,p\}. On vérifie alors que Lμsubscript𝐿𝜇L_{\mu} est de rang maximal p+1𝑝1p+1 et que X(GUE)/Lμ/(p2)similar-to-or-equalssuperscript𝑋𝐺subscript𝑈𝐸subscript𝐿𝜇𝑝2X^{*}(GU_{E})/L_{\mu}\simeq{\mathbb{Z}}/(p-2){\mathbb{Z}}.

5 Points spéciaux des variétés de Shimura.

Dans cette section on commence à aborder le problème de minoration des orbites Galoisiennes de points spéciaux dans les variétés de Shimura. On considère une donée de Shimura (G,X)𝐺𝑋(G,X). On peut sans perte de généralité supposer que G𝐺G est le groupe de Mumford-Tate générique de X𝑋X. On peut aussi supposer que K𝐾K est net. Avec ces hypothèses Γ:=KG()assignΓ𝐾𝐺\Gamma:=K\cap G({\mathbb{Q}}) agit sans points fixes sur X𝑋X. On peut aussi sans perte de généralité ne s’intéresser qu’à des points de la composante S𝑆S de ShK(G,X)subscriptSh𝐾𝐺𝑋{\rm Sh}_{K}(G,X) qui est l’image de X+×{1}superscript𝑋1X^{+}\times\{1\} dans ShK(G,X)subscriptSh𝐾𝐺𝑋{\rm Sh}_{K}(G,X) (où X+superscript𝑋X^{+} désigne une composante connexe de X𝑋X). On fixe dans la suite une représentation fidèle GGLn𝐺subscriptGL𝑛G\hookrightarrow{\rm GL}_{n}. Ceci permet de definir les modèles entiers de G𝐺G et de ses sous-groupes algébriques. On suppose également que K𝐾K est le produit K=pKp𝐾subscriptproduct𝑝subscript𝐾𝑝K=\prod_{p}K_{p}Kpsubscript𝐾𝑝K_{p} est un sous-groupe compact ouvert de G(p)𝐺subscript𝑝G({\mathbb{Q}}_{p}).

Soit (T,{h})(G,X)𝑇𝐺𝑋(T,\{h\})\subset(G,X) une donnée de Shimura spéciale telle que T𝑇T est le groupe de Mumford-Tate de hh. On note KT=KT(𝔸f)subscript𝐾𝑇𝐾𝑇subscript𝔸𝑓K_{T}=K\cap T({\mathbb{A}}_{f}). La non maximalité du sous-groupe compact ouvert KTsubscript𝐾𝑇K_{T} contribue à la taile de l’orbite sous Galois du point spécial x=(h,1)¯𝑥¯.1x=\overline{(h,1)}. Nous décrivons le résultat précis dans une première partie puis nous rappelons dans une deuxième des résultats de Clozel et du premier auteur [6] concernant l’image des morphismes de réciprocité au niveau des groupes de classes sous des hypothèses de connexité du noyau du morphisme de réciprocité.

5.1 Passage de KTmsuperscriptsubscript𝐾𝑇𝑚K_{T}^{m} à KTsubscript𝐾𝑇K_{T}

Proposition 5.1

Soit (G,X)𝐺𝑋(G,X) une donnée de Shimura. Soit K𝐾K un sous-groupe compact ouvert de G(𝔸f)𝐺subscript𝔸𝑓G({\mathbb{A}}_{f}).

Soit (T,{h})(G,X)𝑇𝐺𝑋(T,\{h\})\subset(G,X) une donnée de Shimura spéciale et L𝐿L le corps de décomposition de T𝑇T. On suppose que T𝑇T est le groupe de Mumford-Tate de hh. Soit KTmsubscriptsuperscript𝐾𝑚𝑇K^{m}_{T} le sous-groupe compact ouvert maximal de T(𝔸f)𝑇subscript𝔸𝑓T({\mathbb{A}}_{f}) et soit KT=KT(𝔸f)subscript𝐾𝑇𝐾𝑇subscript𝔸𝑓K_{T}=K\cap T({\mathbb{A}}_{f}). Soit r:RL:=ResL/𝔾m,LT:𝑟assignsubscript𝑅𝐿subscriptRes𝐿subscript𝔾𝑚𝐿𝑇r\colon R_{L}:={\rm Res}_{L/{\mathbb{Q}}}{\mathbb{G}}_{m,L}\longrightarrow T le morphisme de réciprocité et U𝑈U l’image de r((𝔸fL))𝑟superscripttensor-productsubscript𝔸𝑓𝐿r(({\mathbb{A}}_{f}\otimes L)^{*}) dans T()\T(𝔸f)/KTm\𝑇𝑇subscript𝔸𝑓subscriptsuperscript𝐾𝑚𝑇T({\mathbb{Q}})\backslash T({\mathbb{A}}_{f})/K^{m}_{T}.

On a

|Gal(¯/L)(h,1)¯|Bi(T)|KTm/KT||U|much-greater-thanGal¯𝐿¯.1superscript𝐵𝑖𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚subscript𝐾𝑇𝑈|{\rm Gal}(\overline{\mathbb{Q}}/L)\cdot\overline{(h,1)}|\gg B^{i(T)}|K_{T}^{m}/K_{T}|\cdot|U|

B𝐵B est une constante uniforme et i(T)𝑖𝑇i(T) désigne le nombre de premiers p𝑝p tels que KT,pmKT,psuperscriptsubscript𝐾𝑇𝑝𝑚subscript𝐾𝑇𝑝K_{T,p}^{m}\neq K_{T,p}.

Lemme 5.2

Soit N𝑁N le noyau du morphisme naturel

T()\T(𝔸f)/KTT()\T(𝔸f)/KTm\𝑇𝑇subscript𝔸𝑓subscript𝐾𝑇\𝑇𝑇subscript𝔸𝑓subscriptsuperscript𝐾𝑚𝑇T({\mathbb{Q}})\backslash T({\mathbb{A}}_{f})/K_{T}\longrightarrow T({\mathbb{Q}})\backslash T({\mathbb{A}}_{f})/K^{m}_{T}

Alors

|N|=c|KTm/KT|𝑁𝑐subscriptsuperscript𝐾𝑚𝑇subscript𝐾𝑇|N|=c|K^{m}_{T}/K_{T}|

c=c(x)𝑐𝑐𝑥c=c(x) est une constante uniformement bornée quand x=(h,1)¯𝑥¯.1x=\overline{(h,1)} varie parmi les points CM de S𝑆S.

  • Preuve. 

    Il est facile de voir que

    N=(T()KTm)\KTm/KT𝑁\𝑇subscriptsuperscript𝐾𝑚𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚subscript𝐾𝑇N=(T({\mathbb{Q}})\cap K^{m}_{T})\backslash K_{T}^{m}/K_{T}

    Le groupe T()KTm𝑇subscriptsuperscript𝐾𝑚𝑇T({\mathbb{Q}})\cap K^{m}_{T} est fini d’ordre borné uniformément quand x=(h,1)¯𝑥¯.1x=\overline{(h,1)} varie parmi les points CM de S𝑆S. En effet il existe un sous-groupe compact ouvert net KTnetsuperscriptsubscript𝐾𝑇𝑛𝑒𝑡K_{T}^{net} de T(𝔸f)𝑇subscript𝔸𝑓T({\mathbb{A}}_{f}) d’indice uniformément borné dans KTmsuperscriptsubscript𝐾𝑇𝑚K_{T}^{m}. Le groupe KTnetT()superscriptsubscript𝐾𝑇𝑛𝑒𝑡𝑇K_{T}^{net}\cap T({\mathbb{Q}}) est trivial car de torsion dans un sous-groupe compact ouvert net. On en déduit que |T()KTm||KTm/KTnet|𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚superscriptsubscript𝐾𝑇𝑛𝑒𝑡|T({\mathbb{Q}})\cap K_{T}^{m}|\leq|K_{T}^{m}/K_{T}^{net}| donc que T()KTm𝑇subscriptsuperscript𝐾𝑚𝑇T({\mathbb{Q}})\cap K^{m}_{T} est fini d’ordre borné uniformément.   \square

  • Preuve. 

    Sans perte de généralité, on peut supposer que le groupe compact ouvert K𝐾K est net.

    Notons d’abord qu’il suffit de montrer que |Gal(¯/L)(h,1)¯|Gal¯𝐿¯.1|{\rm Gal}(\overline{\mathbb{Q}}/L)\cdot\overline{(h,1)}| est au moins de la taille de l’image de r((𝔸fL))𝑟superscripttensor-productsubscript𝔸𝑓𝐿r(({\mathbb{A}}_{f}\otimes L)^{*}) dans T()\T(𝔸f)/KT\𝑇𝑇subscript𝔸𝑓subscript𝐾𝑇T({\mathbb{Q}})\backslash T({\mathbb{A}}_{f})/K_{T}. En effet, supposons que ce soit le cas. On constate alors que

    |Gal(¯/L)(h,1)¯||U||Θ|Gal¯𝐿¯.1𝑈Θ|{\rm Gal}(\overline{\mathbb{Q}}/L)\cdot\overline{(h,1)}|\geq|U||\Theta|

    ΘΘ\Theta est l’image de r((𝔸fL))KTm𝑟superscripttensor-productsubscript𝔸𝑓𝐿superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚r(({\mathbb{A}}_{f}\otimes L)^{*})\cap K_{T}^{m} dans KTm/KTsuperscriptsubscript𝐾𝑇𝑚subscript𝐾𝑇K_{T}^{m}/K_{T}. D’après [27], lemme 2.18 , on a

    |Θ|Bi(T)|KTm/KT|much-greater-thanΘsuperscript𝐵𝑖𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚subscript𝐾𝑇|\Theta|\gg B^{i(T)}|K_{T}^{m}/K_{T}|

    B𝐵B est une constante uniforme et i(T)𝑖𝑇i(T) est comme dans l’énoncé.

    Démontrons maintenant que |Gal(¯/L)x|Gal¯𝐿𝑥|{\rm Gal}(\overline{\mathbb{Q}}/L)\cdot x| est au moins de la taille de l’image de r((𝔸fL))𝑟superscripttensor-productsubscript𝔸𝑓𝐿r(({\mathbb{A}}_{f}\otimes L)^{*}) dans T()\T(𝔸f)/KT\𝑇𝑇subscript𝔸𝑓subscript𝐾𝑇T({\mathbb{Q}})\backslash T({\mathbb{A}}_{f})/K_{T}. L’inclusion de données de Shimura (T,{h})(G,X)𝑇𝐺𝑋(T,\{h\})\subset(G,X) induit un morphisme de variétés de Shimura:

    ShKT(T,{h})ShK(G,X)subscriptShsubscript𝐾𝑇𝑇subscriptSh𝐾𝐺𝑋{\rm Sh}_{K_{T}}(T,\{h\})\longrightarrow{\rm Sh}_{K}(G,X)

    Ce morphisme est défini sur le composé du corps reflexe de (T,{h})𝑇(T,\{h\}) et celui de (G,X)𝐺𝑋(G,X). De plus, par le lemme 2.2 de [27], ce morphisme est injectif. On en déduit que la taille de l’orbite sous Galois de x=(h,1)¯𝑥¯.1x=\overline{(h,1)} est, a une constante uniforme près, la taille de l’image de r((𝔸fL))𝑟superscripttensor-productsubscript𝔸𝑓𝐿r(({\mathbb{A}}_{f}\otimes L)^{*}) dans T()\T(𝔸f)/KT\𝑇𝑇subscript𝔸𝑓subscript𝐾𝑇T({\mathbb{Q}})\backslash T({\mathbb{A}}_{f})/K_{T}.

5.2 Morphisme de réciprocité à noyaux connexes

Si T𝑇T est un tore sur {\mathbb{Q}}, on note π(T)𝜋𝑇\pi(T) le groupe T(𝔸f)/T()𝑇subscript𝔸𝑓𝑇superscriptT(\mathbb{A}_{f})/T(\mathbb{Q})^{-} (adhérence topologique), modifiant un peu la notation de Deligne. Si (T,{h})𝑇(T,\{h\}) est une sous-donnée de Shimura de (G,X)𝐺𝑋(G,X) telle que T𝑇T est le groupe de Mumford-Tate de hh, et r:RLT:𝑟subscript𝑅𝐿𝑇r:R_{L}\rightarrow T le morphisme de réciprocité on note r𝔸f/:π(RL)π(T):subscript𝑟subscript𝔸𝑓𝜋subscript𝑅𝐿𝜋𝑇r_{{\mathbb{A}}_{f}/{\mathbb{Q}}}:\pi(R_{L})\rightarrow\pi(T) le morphisme induit.

On rappelle que l’on note hT=T()\T(𝔸f)/KTmsubscript𝑇\𝑇𝑇subscript𝔸𝑓superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚h_{T}=T({\mathbb{Q}})\backslash T({\mathbb{A}}_{f})/K_{T}^{m} le groupe de classes de T𝑇T. On dispose alors du résultat suivant ([6] thm. 3.3).

Théorème 5.3

Si (T,{h})𝑇(T,\{h\}) varie parmi les sous-données CM de (G,X)𝐺𝑋(G,X) telles que le noyau

N=ker(r:RLT)𝑁kernel:𝑟subscript𝑅𝐿𝑇N=\ker(r:R_{L}\rightarrow T) (32)

est connexe, le conoyau de r𝔸f/:π(R)π(T):subscript𝑟subscript𝔸𝑓𝜋𝑅𝜋𝑇{r_{{\mathbb{A}}_{f}/{\mathbb{Q}}}}:\pi(R)\rightarrow\pi(T) est de taille uniformément bornée.

On en déduit en particulier que le conoyau de r¯:hRLhT:¯𝑟subscriptsubscript𝑅𝐿subscript𝑇\overline{r}:h_{R_{L}}\rightarrow h_{T} est uniformément borné quand (T,{h})𝑇(T,\{h\}) varie parmi les sous-données CM telles que le noyau de r𝑟r est connexe. Dans formulation de ([6] thm 3.3) le corps reflex de (T,{h})𝑇(T,\{h\}) à la place de L𝐿L. La preuve donnée dans ce texte vaut pour L𝐿L à la place du corps reflex. Il est simple de montrer que les énoncés du théorème pour L𝐿L et pour le corps reflex sont en fait équivalents.

En combinant ce résultat avec la proposition 5.1 et le théorème 2.3 on obtient un des résultats principaux que nous avons en vue dans ce texte.

Corollaire 5.4

Soit (G,X)𝐺𝑋(G,X) une donnée de Shimura telle que G𝐺G est le groupe de Mumford-Tate générique sur X𝑋X. Soit K𝐾K un sous-groupe compact ouvert de G(𝔸f)𝐺subscript𝔸𝑓G({\mathbb{A}}_{f}). Soit d𝑑d le rang absolu de G𝐺G.

Soit (T,{h})(G,X)𝑇𝐺𝑋(T,\{h\})\subset(G,X) une sous–donnée de Shimura spéciale et L𝐿L le corps de décomposition de T𝑇T. On suppose que T𝑇T est le groupe de Mumford-Tate de hh et que le noyau du morphisme de réciprocité r:RLT:𝑟subscript𝑅𝐿𝑇r:R_{L}\rightarrow T est connexe. Alors pour tout ϵ>0italic-ϵ0\epsilon>0

|Gal(¯/L)(h,1)¯|Bi(T)|KTm/KT||hT|c(d,ϵ)Ci(T)|KTm/KT|DLλ(d)2ϵ.much-greater-thanGal¯𝐿¯.1superscript𝐵𝑖𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚subscript𝐾𝑇subscript𝑇𝑐𝑑italic-ϵsuperscript𝐶𝑖𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚subscript𝐾𝑇superscriptsubscript𝐷𝐿𝜆𝑑2italic-ϵ|{\rm Gal}(\overline{\mathbb{Q}}/L)\cdot\overline{(h,1)}|\gg B^{i(T)}|K_{T}^{m}/K_{T}|\cdot|h_{T}|\geq c(d,\epsilon)C^{i(T)}|K_{T}^{m}/K_{T}|D_{L}^{\frac{\lambda(d)}{2}-\epsilon}. (33)

C𝐶C est une constante ne dépendant que de d𝑑d et i(T)𝑖𝑇i(T) désigne le nombre de premiers p𝑝p tels que KT,pmKT,psuperscriptsubscript𝐾𝑇𝑝𝑚subscript𝐾𝑇𝑝K_{T,p}^{m}\neq K_{T,p}. La constante positive λ(d)𝜆𝑑\lambda(d) est explicitée dans la définition 3.4 et c(ϵ,d)𝑐italic-ϵ𝑑c(\epsilon,d) est une constante strictement positive ne dépendant que de d𝑑d et de ϵitalic-ϵ\epsilon.

En utilisant la proposition 4.7 et le fait que λ(2)=λ(3)=25𝜆2𝜆325\lambda(2)=\lambda(3)=\frac{2}{5}, on trouve le résultat suivant qui généralise le cas bien connu g=1𝑔1g=1.

Corollaire 5.5

Soit ϵ>0italic-ϵ0\epsilon>0. Soit x=(h,1)¯𝑥¯.1x=\overline{(h,1)} un point CM du module 𝔸gsubscript𝔸𝑔{\mathbb{A}}_{g} des variétés abéliennes principalement polarisées de dimension g=2𝑔2g=2 ou g=3𝑔3g=3 correspondant à une variété abélienne simple. Soit T=Tx𝑇subscript𝑇𝑥T=T_{x} le groupe de Mumford-Tate de hh. Alors

|Gal(¯/L)(h,1)¯|c(ϵ)Ci(T)|KTm/KT|DL15ϵ.Gal¯𝐿¯.1𝑐italic-ϵsuperscript𝐶𝑖𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚subscript𝐾𝑇superscriptsubscript𝐷𝐿15italic-ϵ|{\rm Gal}(\overline{\mathbb{Q}}/L)\cdot\overline{(h,1)}|\geq c(\epsilon)C^{i(T)}|K_{T}^{m}/K_{T}|D_{L}^{\frac{1}{5}-\epsilon}. (34)

pour une constante c(ϵ)𝑐italic-ϵc(\epsilon) ne dépendant pas de x𝑥x.

Pour g=1𝑔1g=1, on a λ(1)=1𝜆11\lambda(1)=1 et on retrouve les estimations classiques (en DL12ϵsuperscriptsubscript𝐷𝐿12italic-ϵD_{L}^{\frac{1}{2}-\epsilon}) de la taille du groupe de Picard d’un corps quadratique imaginaire. Pour obtenir des minorations de l’orbite sous Galois d’un point CM𝐶𝑀CM de 𝔸gsubscript𝔸𝑔{\mathbb{A}}_{g} on peut en général se ramener au cas des variétés abéliennes simples.

Soit (G,X)𝐺𝑋(G,X) une donnée de Shimura et (T,{h})(G,X)𝑇𝐺𝑋(T,\{h\})\subset(G,X) une sous–donnée de Shimura spéciale. On dit que T𝑇T est Galois générique si l’image I𝐼I de Gal(¯/)Gal¯{\rm Gal}(\overline{{\mathbb{Q}}}/{\mathbb{Q}}) dans Aut(X(T))Autsuperscript𝑋𝑇{\rm Aut}(X^{*}(T)) est maximale (parmi les images possibles pour un sous-tore de G𝐺G). Nous faisons référence à ([6] 2.1) pour une définition plus précise. Notons que d’après la proposition 2.1 de [6] les sous-données spéciales Galois générique de (G,X)𝐺𝑋(G,X) existent pour tout (G,X)𝐺𝑋(G,X), elles sont même génériques en un sens expliqué dans [6]. Il est montré dans [6] dans de nombreux cas que le morphisme de réciprocité est à noyau connexe pour les sous-données de Shimura (T,{h})(G,X)𝑇𝐺𝑋(T,\{h\})\subset(G,X) avec T𝑇T Galois générique. C’est par exemple le cas si G𝐺G est {\mathbb{Q}}-simple adjoint de type Blsubscript𝐵𝑙B_{l}, Clsubscript𝐶𝑙C_{l} et dans certains cas de type Dlsubscript𝐷𝑙D_{l} et Alsubscript𝐴𝑙A_{l} que le lecteur pourra consulter dans [6]. Dans tous ces cas si on fait varier le point spécial x𝑥x parmi des sous-données Galois génériques on obtient des minorations inconditionnelles pour la taille de l’ orbite sous Galois de x𝑥x de la forme donnée dans l’équation (33). Nous n’écrirons pas l’énoncé le plus général possible. Retenons seulement le résultat suivant qui concerne 𝔸gsubscript𝔸𝑔{\mathbb{A}}_{g} qui est une conséquence des résultats précédents et de la proposition 4.6.

Corollaire 5.6

Soit g𝑔g un entier. Soit A𝐴A une variété abélienne principalement polarisée de dimention g𝑔g. On suppose que End(A)=Etensor-productEnd𝐴𝐸{\rm End}(A)\otimes{\mathbb{Q}}=E est un corps CM de degré 2g2𝑔2g vérifiant les hypothèses de la proposition 4.6. Soit x𝑥x le point spécial de 𝔸gsubscript𝔸𝑔{\mathbb{A}}_{g} associé à A𝐴A. On dira que x𝑥x est “suffisamment Galois générique”. Noter que si x𝑥x est Galois générique A𝐴A a la propriété requise. En conservant les notations des énoncés précédents, quand x𝑥x varie parmi les points spéciaux suffisamment Galois générique

|Gal(¯/L)(h,1)¯|c(d,ϵ)Ci(T)|KTm/KT|DLλ(d)2ϵ.Gal¯𝐿¯.1𝑐𝑑italic-ϵsuperscript𝐶𝑖𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚subscript𝐾𝑇superscriptsubscript𝐷𝐿𝜆𝑑2italic-ϵ|{\rm Gal}(\overline{\mathbb{Q}}/L)\cdot\overline{(h,1)}|\geq c(d,\epsilon)C^{i(T)}|K_{T}^{m}/K_{T}|D_{L}^{\frac{\lambda(d)}{2}-\epsilon}. (35)

\square

6 Bornes pour le noyau de réciprocité sous GRH.

Dans cette section on améliore les bornes pour les orbites de Galois de points spéciaux données dans [30].

Théorème 6.1

Admettons l’hypothèse de Riemann généralisée pour les corps CM. Soit (G,X)𝐺𝑋(G,X) une donnée de Shimura et x=(h,1)𝑥.1x={(h,1)} un point CM de ShK(G,X)𝑆subscript𝐾𝐺𝑋Sh_{K}(G,X). Soit T𝑇T le groupe de Mumford-Tate de hh.

Soit L𝐿L le corps de décomposition de T𝑇T et DLsubscript𝐷𝐿D_{L} la valeur absolue du discriminant de L𝐿L.

On a

Gal(¯/F)(x,1)¯Bi(T)|KTm/KT|DLμmuch-greater-thanGal¯𝐹¯𝑥.1superscript𝐵𝑖𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚subscript𝐾𝑇superscriptsubscript𝐷𝐿𝜇{\rm Gal}(\overline{\mathbb{Q}}/F)\cdot\overline{(x,1)}\gg B^{i(T)}|K_{T}^{m}/K_{T}|D_{L}^{\mu}

μ>0𝜇0\mu>0 est uniforme.

  • Preuve. 

    L’apparition du facteur Bi(T)|KTm/KT|superscript𝐵𝑖𝑇superscriptsubscript𝐾𝑇𝑚subscript𝐾𝑇B^{i(T)}|K_{T}^{m}/K_{T}| a été traitée précedemment (c.f. 5.1).

    Soit, comme avant, r:RLT:𝑟subscript𝑅𝐿𝑇r\colon R_{L}\longrightarrow T le morphisme de réciprocité et r¯:hLhT:¯𝑟subscript𝐿subscript𝑇\overline{r}\colon h_{L}\longrightarrow h_{T} le morphisme induit par r𝑟r au niveau des groupes de classes de RLsubscript𝑅𝐿R_{L} et de T𝑇T respectivement. Il suffit de montrer que

    |Im(r¯)|DLμmuch-greater-than𝐼𝑚¯𝑟superscriptsubscript𝐷𝐿𝜇|Im(\overline{r})|\gg D_{L}^{\mu}

    La preuve s’inspire de [1] et de [30].

On définit, suivant [1], pour un groupe abélien H𝐻H et un entier l𝑙l, MH(l)subscript𝑀𝐻𝑙M_{H}(l) comme étant le plus petit entier A𝐴A tel que pour tout l𝑙l-uplet (g1,,gl)subscript𝑔1subscript𝑔𝑙(g_{1},\dots,g_{l}) d’éléments de H𝐻H, il existe (a1,,al)n\{0}subscript𝑎1subscript𝑎𝑙\superscript𝑛0(a_{1},\dots,a_{l})\in{\mathbb{Z}}^{n}\backslash\{0\} avec j|aj|Asubscript𝑗subscript𝑎𝑗𝐴\sum_{j}|a_{j}|\leq A vérifiant g1a1glal=1superscriptsubscript𝑔1subscript𝑎1superscriptsubscript𝑔𝑙subscript𝑎𝑙1g_{1}^{a_{1}}\cdots g_{l}^{a_{l}}=1.

Prenons l=|H|𝑙𝐻l=|H| et soit g1,,glHsubscript𝑔1subscript𝑔𝑙𝐻g_{1},\dots,g_{l}\in H. Si gi=1subscript𝑔𝑖1g_{i}=1 pour un certain i𝑖i, alors on a une relation multiplicative non-triviale en les gisubscript𝑔𝑖g_{i} avec A=1𝐴1A=1. Autrement, on a une relation de la forme gigj1=1subscript𝑔𝑖superscriptsubscript𝑔𝑗11g_{i}g_{j}^{-1}=1 pour des indices ij𝑖𝑗i\neq j. Dans tous les cas, on a une relation g1a1glal=1superscriptsubscript𝑔1subscript𝑎1superscriptsubscript𝑔𝑙subscript𝑎𝑙1g_{1}^{a_{1}}\cdots g_{l}^{a_{l}}=1 avec |ai|2subscript𝑎𝑖2\sum|a_{i}|\leq 2. On voit donc que pour l=|H|𝑙𝐻l=|H|, on a

MH(l)2.subscript𝑀𝐻𝑙2M_{H}(l)\leq 2.

Prenons maintenant H=hL/ker(r¯)𝐻subscript𝐿kernel¯𝑟H=h_{L}/\ker(\overline{r}).

On va démontrer l’estimation suivante:

MH(l)>clog(DL)log(l)+loglog(DL)subscript𝑀𝐻𝑙𝑐subscript𝐷𝐿𝑙subscript𝐷𝐿M_{H}(l)>c\frac{\log(D_{L})}{\log(l)+\log\log(D_{L})} (36)

c>0𝑐0c>0 est une constante uniforme.

Cette estimation implique celle désirée pour |H|𝐻|H|:

|H|>DLc/2log(DL)DLμ𝐻superscriptsubscript𝐷𝐿𝑐2subscript𝐷𝐿much-greater-thansuperscriptsubscript𝐷𝐿𝜇|H|>\frac{D_{L}^{c/2}}{\log(D_{L})}\gg D_{L}^{\mu}

avec μ>0𝜇0\mu>0 uniforme.

On va maintenant démontrer l’inégalité (36). Rappelons quelques notions et résultats de la section 2 de [30]. D’après la proposition 2.2 de [9] on peut supposer G𝐺G adjoint. Le morphisme de réciprocité r:RLT:𝑟subscript𝑅𝐿𝑇r\colon R_{L}\longrightarrow T induit une inclusion X(T)X(RL)superscript𝑋𝑇superscript𝑋subscript𝑅𝐿X^{*}(T)\subset X^{*}(R_{L}) et on a une base canonique de X(RL)superscript𝑋subscript𝑅𝐿X^{*}(R_{L}) donnée par énumération des éléments de Gal(L/)Gal𝐿{\rm Gal}(L/{\mathbb{Q}}). Il existe une base {\cal B} de X(T)superscript𝑋𝑇X^{*}(T) telle que les coordonnées des caractères χ𝜒\chi de {\cal B} par rapport à la base canonique de X(RL)superscript𝑋subscript𝑅𝐿X^{*}(R_{L}), sont bornées uniformément. De plus comme G𝐺G est supposé adjoint pour tout caractère χ𝜒\chi de {\cal B}, χχ¯𝜒¯𝜒\chi\overline{\chi} est le caractère trivial.

Soit l1𝑙1l\geq 1 un entier et p1,,plsubscript𝑝1subscript𝑝𝑙p_{1},\dots,p_{l}, l𝑙l premiers qui décomposent T𝑇T et a1,,alsubscript𝑎1subscript𝑎𝑙a_{1},\dots,a_{l} des entiers relatifs. Pour chaque i𝑖i, on fixe une place visubscript𝑣𝑖v_{i} de L𝐿L au déssus de pisubscript𝑝𝑖p_{i} et un idèle Pisubscript𝑃𝑖P_{i} dans (L𝔸f)superscripttensor-product𝐿subscript𝔸𝑓(L\otimes{\mathbb{A}}_{f})^{*} qui est l’uniformisante à la place visubscript𝑣𝑖v_{i} et 111 ailleurs. Considerons I=P1a1Pral(L𝔸f)𝐼superscriptsubscript𝑃1subscript𝑎1superscriptsubscript𝑃𝑟subscript𝑎𝑙superscripttensor-product𝐿subscript𝔸𝑓I=P_{1}^{a_{1}}\cdots P_{r}^{a_{l}}\subset(L\otimes{\mathbb{A}}_{f})^{*} et sa classe I¯¯𝐼\overline{I} dans hLsubscript𝐿h_{L}. Supposons que I¯¯𝐼\overline{I} soit dans le noyau de r¯¯𝑟\overline{r} i.e

r(I)=πk𝑟𝐼𝜋𝑘r(I)=\pi k

πT()𝜋𝑇\pi\in T({\mathbb{Q}}) et kKTm𝑘subscriptsuperscript𝐾𝑚𝑇k\in K^{m}_{T}. Soit πi=χi(π)Lsubscript𝜋𝑖subscript𝜒𝑖𝜋superscript𝐿\pi_{i}=\chi_{i}(\pi)\subset L^{*}. Le lemme 2.15 de [30] montre que [π1,,πr]=Lsubscript𝜋1subscript𝜋𝑟𝐿{\mathbb{Q}}[\pi_{1},\dots,\pi_{r}]=L.

Soit t𝑡t une borne uniforme sur les coordonnées des χisubscript𝜒𝑖\chi_{i}. On voit alors que πi:=(p1|a1|pl|al|)tπiOLassignsubscriptsuperscript𝜋𝑖superscriptsuperscriptsubscript𝑝1subscript𝑎1superscriptsubscript𝑝𝑙subscript𝑎𝑙𝑡subscript𝜋𝑖subscript𝑂𝐿\pi^{\prime}_{i}:=(p_{1}^{|a_{1}|}\cdots p_{l}^{|a_{l}|})^{t}\pi_{i}\in O_{L} et le fait que χiχi¯subscript𝜒𝑖¯subscript𝜒𝑖\chi_{i}\overline{\chi_{i}} est le caractère trivial implique que

|σ(πi)|(p1|a1|pl|al|)2t𝜎subscriptsuperscript𝜋𝑖superscriptsuperscriptsubscript𝑝1subscript𝑎1superscriptsubscript𝑝𝑙subscript𝑎𝑙2𝑡|\sigma(\pi^{\prime}_{i})|\leq(p_{1}^{|a_{1}|}\cdots p_{l}^{|a_{l}|})^{2t}

pour tout σGal(L/)𝜎Gal𝐿\sigma\in{\rm Gal}(L/{\mathbb{Q}}).

Soit nLsubscript𝑛𝐿n_{L} le degré de l’extension L𝐿L sur {\mathbb{Q}}. Comme L𝐿L est le corps de décomposition d’un tore de dimension d𝑑d fixé, nLsubscript𝑛𝐿n_{L} est uniformément borné. On peut choisir une base b1,,bnLsubscript𝑏1subscript𝑏subscript𝑛𝐿b_{1},\cdots,b_{n_{L}} de L𝐿L sur {\mathbb{Q}} avec bk=i=1dπini,ksubscript𝑏𝑘superscriptsubscriptproduct𝑖1𝑑superscriptsubscriptsuperscript𝜋𝑖subscript𝑛𝑖𝑘b_{k}=\prod_{i=1}^{d}{\pi^{\prime}_{i}}^{n_{i,k}} pour des entiers naturels ni,ksubscript𝑛𝑖𝑘n_{i,k} tels que ni,knLsubscript𝑛𝑖𝑘subscript𝑛𝐿n_{i,k}\leq n_{L}. Il suffit de remarquer en effet que pour tout i𝑖i, les éléments 1,πi,,πinL1subscriptsuperscript𝜋𝑖superscriptsubscriptsuperscript𝜋𝑖subscript𝑛𝐿1,\pi^{\prime}_{i},\dots,{\pi^{\prime}_{i}}^{n_{L}} sont linéairement dépendants.

Le fait que les bisubscript𝑏𝑖b_{i} sont dans OLsubscript𝑂𝐿O_{L} et que b1,,bnLsubscript𝑏1subscript𝑏subscript𝑛𝐿b_{1},\cdots,b_{n_{L}} forment une base de L𝐿L sur {\mathbb{Q}}, implique que [b1,,bnL]subscript𝑏1subscript𝑏subscript𝑛𝐿{\mathbb{Z}}[b_{1},\dots,b_{n_{L}}] est un ordre dans OLsubscript𝑂𝐿O_{L}. En particulier

|Discr([b1,,bnL])|DLDiscrsubscript𝑏1subscript𝑏subscript𝑛𝐿subscript𝐷𝐿|{\rm Discr}({\mathbb{Z}}[b_{1},\dots,b_{n_{L}}])|\geq D_{L} (37)

D’autre part, |Discr([b1,,bnL])|Discrsubscript𝑏1subscript𝑏subscript𝑛𝐿|{\rm Discr}({\mathbb{Z}}[b_{1},\dots,b_{n_{L}}])| est le déterminant de la matrice (TrL/(bibj))𝑇subscript𝑟𝐿subscript𝑏𝑖subscript𝑏𝑗\Big{(}Tr_{L/{\mathbb{Q}}}(b_{i}b_{j})\Big{)}. Par l’inégalité d’Hadamard, si b𝑏b est un majorant de tous les |TrL/(bibj)|𝑇subscript𝑟𝐿subscript𝑏𝑖subscript𝑏𝑗|Tr_{L/{\mathbb{Q}}}(b_{i}b_{j})|, alors

|Discr([b1,,bnL])|c(nL)bnLDiscrsubscript𝑏1subscript𝑏subscript𝑛𝐿𝑐subscript𝑛𝐿superscript𝑏subscript𝑛𝐿|{\rm Discr}({\mathbb{Z}}[b_{1},\dots,b_{n_{L}}])|\leq c(n_{L})b^{n_{L}}

c(nL)𝑐subscript𝑛𝐿c(n_{L}) ne dépend que de nLsubscript𝑛𝐿n_{L} (on peut prendre c(nL)=nLnL𝑐subscript𝑛𝐿superscriptsubscript𝑛𝐿subscript𝑛𝐿c(n_{L})=n_{L}^{n_{L}}).

Du fait que |σ(πi)|(p1|a1|pl|al|)2A𝜎subscriptsuperscript𝜋𝑖superscriptsuperscriptsubscript𝑝1subscript𝑎1superscriptsubscript𝑝𝑙subscript𝑎𝑙2𝐴|\sigma(\pi^{\prime}_{i})|\leq(p_{1}^{|a_{1}|}\cdots p_{l}^{|a_{l}|})^{2A}, on déduit qu’il existe un entier uniforme D𝐷D (ne dépendant que de nLsubscript𝑛𝐿n_{L}) tel que

|TrL/(bibj)|(p1|a1|pl|al|)D𝑇subscript𝑟𝐿subscript𝑏𝑖subscript𝑏𝑗superscriptsuperscriptsubscript𝑝1subscript𝑎1superscriptsubscript𝑝𝑙subscript𝑎𝑙𝐷|Tr_{L/{\mathbb{Q}}}(b_{i}b_{j})|\leq(p_{1}^{|a_{1}|}\cdots p_{l}^{|a_{l}|})^{D}

et donc, par l’inégalité d’Hadamard, après avoir remplace D𝐷D par DnL𝐷subscript𝑛𝐿Dn_{L}

|Discr[b1,,bnL]|c(nL)(p1|a1|pl|al|)DDiscrsubscript𝑏1subscript𝑏subscript𝑛𝐿𝑐subscript𝑛𝐿superscriptsuperscriptsubscript𝑝1subscript𝑎1superscriptsubscript𝑝𝑙subscript𝑎𝑙𝐷|{\rm Discr}{\mathbb{Z}}[b_{1},\dots,b_{n_{L}}]|\leq c(n_{L})(p_{1}^{|a_{1}|}\cdots p_{l}^{|a_{l}|})^{D}

Notons c=1/c(nL)𝑐1𝑐subscript𝑛𝐿c=1/c(n_{L}). L’équation (37) donne alors:

(p1|a1|pl|al|)DcDLsuperscriptsuperscriptsubscript𝑝1subscript𝑎1superscriptsubscript𝑝𝑙subscript𝑎𝑙𝐷𝑐subscript𝐷𝐿(p_{1}^{|a_{1}|}\cdots p_{l}^{|a_{l}|})^{D}\geq cD_{L}

Nous allons maintenant choisir l𝑙l et pisubscript𝑝𝑖p_{i}.

Rappelons une conséquence du théorème de Chebotarev effectif. Le lecteur pourra consulter le Lemme 2.1 de [1] pour une preuve.

Théorème 6.2

Admettons l’hypothèse de Riemann généralisée. On note πL(x)subscript𝜋𝐿𝑥\pi_{L}(x) le nombre de premiers p𝑝p totalement decomposés dans L𝐿L tels que px𝑝𝑥p\leq x. Il existe des constantes absolues (et effectivement calculables) c1>0subscript𝑐10c_{1}>0 et c2>0subscript𝑐20c_{2}>0 tels que

πL(x)c2xlog(x)subscript𝜋𝐿𝑥subscript𝑐2𝑥𝑥\pi_{L}(x)\geq c_{2}\frac{x}{\log(x)}

pour tout xc1log(DL)2(loglogDL)4x\geq c_{1}\log(D_{L})^{2}(\log\log D_{L})^{4}.

Soit maintenant l1𝑙1l\geq 1 un premier.

x=c3llog(l)+c1log(DL)2(loglogDL)4x=c_{3}l\log(l)+c_{1}\log(D_{L})^{2}(\log\log D_{L})^{4}

c3subscript𝑐3c_{3} est une constante uniforme que nous allons expliciter. Nous voulons choisir la constante c3subscript𝑐3c_{3} telle que c2xlog(x)lsubscript𝑐2𝑥𝑥𝑙c_{2}\frac{x}{\log(x)}\geq l. Notons que (si xe𝑥𝑒x\geq e)

xlog(x)c3llog(l)log(c3)+2log(l).𝑥𝑥subscript𝑐3𝑙𝑙subscript𝑐32𝑙\frac{x}{\log(x)}\geq\frac{c_{3}l\log(l)}{\log(c_{3})+2\log(l)}.

On a alors c2xlog(x)lsubscript𝑐2𝑥𝑥𝑙c_{2}\frac{x}{\log(x)}\geq l dès que c2c3log(c3)+21subscript𝑐2subscript𝑐3subscript𝑐321\frac{c_{2}c_{3}}{\log(c_{3})+2}\geq 1. On peut alors par exemple prendre c3=max(e,4c22)subscript𝑐3𝑒4superscriptsubscript𝑐22c_{3}=\max{(e,\frac{4}{{c_{2}}^{2}})}.

On peut trouver p1,,plsubscript𝑝1subscript𝑝𝑙p_{1},\dots,p_{l} décomposés dans L𝐿L et vérifiant

pix.subscript𝑝𝑖𝑥p_{i}\leq x.

Soit maintenant I𝐼I un élément comme avant. On note A=i=1l|ai|𝐴superscriptsubscript𝑖1𝑙subscript𝑎𝑖A=\sum_{i=1}^{l}|a_{i}|. Ce qui précède donne

ADlog(x)log(cDL)𝐴𝐷𝑥𝑐subscript𝐷𝐿AD\log(x)\geq\log(cD_{L})

Par ailleurs, il y a une constante uniforme c5subscript𝑐5c_{5} telle que

log(x)c5(log(l)+loglog(DL))𝑥subscript𝑐5𝑙subscript𝐷𝐿\log(x)\leq c_{5}(\log(l)+\log\log(D_{L}))

On obtient donc une borne inférieure pour A𝐴A de la forme souhaitée. Ceci achève la preuve de l’inégalité (36) et du théorème.

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