Nombre de classes des tores de multiplication complexe et bornes inférieures pour les orbites Galoisiennes de points spéciaux. 111Ullmo : Université de Paris-Sud, Bat 425, 91405, Orsay Cedex France, e-mail : ullmo@math.u-psud.fr ; Yafaev : University College London, Department of Mathematics, 25 Gordon street, WC1H OAH, London, United Kingdom, e-mail : yafaev@math.ucl.ac.uk 2000 Mathematics Subject Classification : 11G18 222To appear in Bulletin de la SMF
1 Introduction
Ce papier est motivé par la conjecture d’André-Oort dont voici l’énoncé.
Conjecture 1.1 (André-Oort)
Soit une varieté de Shimura et soit un ensemble de points spéciaux. Alors les composantes irréductibles de l’adhérence de Zariski de sont des sous-variétés spéciales de .
Cette conjecture a été récemment démontrée par Klingler et les deux auteurs [27], [14] en admettant l’hypothèse de Riemann généralisée. La strategie consistait à combiner des méthodes galoisiennes et géométriques d’Edixhoven avec des techniques ergodiques de Clozel-Ullmo. Très récemment, Jonathan Pila a mis en place une stratégie faisant intervenir des idées issues de la logique pour attaquer la conjecture d’André-Oort [19], [21]. Cette nouvelle approche a déjà permi [20] de démontrer la conjecture d’André-Oort pour des produits de courbes modulaires de manière inconditionnelle. Qu’on adopte la stratégie d’Edixhoven ou celle de Pila, un des ingrédients majeurs est une borne inférieure suffisamment forte pour la taille des orbites sous Galois des points spéciaux des variétés de Shimura.
Il est à noter que la stratégie de Pila nécessite des meilleures bornes que celles requises par la méthode d’Edixhoven. La minoration de la taille des orbites sous Galois des points spéciaux obtenue dans [27] dépend de la validité de l’hypothèse de Riemann généralisée et est insuffisante pour les applications à la méthode de Pila. Notons que l’on ne sait pas à ce jour que sur l’espace de module des variétés abéliennes principalement polarisées de dimension il n’y a qu’un nombre fini de points correspondants à des variétés abéliennes à multiplication complexe définies sur des extensions de de degré borné.
Le but principal de cet article est d’obtenir des minorations pour la taille des orbites sous Galois de point spéciaux utilisables dans la stratégie de Pila. Nous obtenons en toute généralité ces bornes sous l’hypothèse de Riemann généralisée et dans certains cas de manière inconditionnelle. Notons aussi qu’il n’est pas évident de prévoir exactement le type de bornes nécessaire pour la méthode de Pila mais nous pensons que celles que nous obtenons sont difficilement améliorables qualitativement et probablement adaptées aux applications en vue.
Un point spécial d’une variété de Shimura définit un tore algébrique sur et un corps de nombres , le corps reflex. Le corps est un corps CM. On dispose alors d’un morphisme de tores algébriques sur dit de réciprocité
Soit un tore algébrique sur . Soit le sous-groupe compact ouvert maximal de . Le groupe de classes de est par définition le groupe fini
Le morphisme de réciprocité induit au niveau des groupes de classes une application et l’orbite sous Galois du point spécial est minorée par le cardinal de l’image de . Minorer la taille de l’orbite sous Galois de revient donc à minorer le cardinal de l’image de .
La stratégie suivie dans ce papier est d’abord de minorer la taille du groupe de classes de puis de borner la taille du conoyau de . Les bornes obtenues pour la taille de sont inconditionnelles et ont la forme voulue. Nous pouvons minorer le conoyau de quand le noyau de est connexe de manière inconditionelle et obtenir les bornes voulues pour l’orbite de Galois de dans ce cas. Nous donnons des critères assurant la connexité du noyau de dans la section 4. Par exemple ce noyau est toujours connexe si est un point spécial de pour ou si est “Galois générique ” pour arbitraire.
Quand le noyau de n’est pas connexe, l’estimation du conoyau de semble être un problème sérieux de géométrie algébrique et de cohomologie galoisienne que nous n’avons pas su résoudre sans l’hypothèse de Riemann généralisée.
Précisons un peu la nature des résultats obtenus. Soit un tore algébrique sur de dimension . Soit le corps de décomposition de et la valeur absolue de son discriminant. Notre but est de donner une borne inférieure pour en fonction de . Soit le groupe de caractères de et le caractère de la représentation d’Artin correspondante de . On considère la fonction d’Artin associée que l’on dénote et son quasi-résidu dont la définition est donnée à la section 2.1.2.
On définit ensuite le quasi-discriminant de . Il est défini comme le rapport entre deux mesures de Haar sur . La proposition 3.1 donne une formule fermée qui relie au conducteur d’Artin du module Galoisien et au cardinal du groupe des composantes du modèle de Néron de type fini de sur . Shyr [25] montre la formule:
(1) |
où est la taille du ‘groupe des unités de ’, le régulateur de et le nombre de Tamagawa. Il est à noter que dans le cas du tore où est un corps de nombres, on retrouve la formule classique pour le nombre de classes de l’anneau des entiers de .
En explicitant et en évaluant les invariants arithmétiques de intervenant dans la formule de Shyr (1) on montre que
(2) |
où les constantes ne dépendent que de et sont explicites en fonction de . La forme précise du résultat est donnée dans le théorème 2.3. Une fois la formule fermée pour obtenue les résultats principaux sont une minoration de la forme voulue pour le conducteur d’Artin (proposition 3.2) et une estimation de type Brauer-Siegel pour le quasi-résidu (proposition 2.1). Il est à noter que dans le cas où est un tore de multiplication complexe le régulateur est trivial et nous obtenons une minoration de .
On applique ensuite notre formule pour au problème de minoration des orbites Galoisiennes des points spéciaux dans les variétés de Shimura.
Soit une donnée de Shimura, un sous-groupe compact ouvert de et la variété de Shimura associée. On peut sans perte de généralité supposer que est semisimple de type adjoint.
Soit un point spécial. Alors le groupe de Mumford-Tate de est un tore de multiplication complexe. Soit le sous-groupe compact ouvert de . On dispose donc d’un morphisme de réciprocité
où comme précédemment désigne le corps reflex de . L’orbite Galoisienne de a pour taille le cardinal de l’image de dans . On démontre alors dans la section 5.1 que
où désigne l’image de dans , est une constante ne dépendant que de la variété de Shimura et est le cardinal de l’ensemble des nombres premiers tels que la projection de dans n’est pas égale à .
Quand le point spécial varie dans parmi les points tels que est à noyau connexe, un résultat de Clozel et du premier auteur [6] assure que le conoyau de est uniformément borné. On obtient dans ce cas en utilisant l’équation (2) une minoration satisfaisante de sous la forme
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pour un explicite. C’est par exemple le cas pour pour un point du module des variétés abéliennes principalement polarisées correspondant à une variété abélienne simple de dimension pour ou pour un point à multiplication complexe “général du point de vue Galoisien” pour arbitraire. Les résultats principaux que nous obtenons dans cette direction sont donnés dans la section 5.2.
Un argument simple montre que le nombre de composantes connexes du noyau de est uniformément borné quand varie parmi les points spéciaux de . On en déduit que l’image de contient l’image de l’élevation à la puissance de dans pour uniformément borné.
En utilisant l’hypothèse de Riemann généralisée on montre dans la section 6 une minoration de l’orbite sous Galois de de la forme voulue
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Ce résultat est indépendant des parties précédentes.
Finalement, il est à noter que Tsimerman (voir [26]) a obtenu des résultats comparables aux notres simultanément.
2 Préliminaires
2.1 Formule de classes généralisée.
Nous rappelons dans cette partie une formule due à Ono [17] et [18] et Shyr [25] donnant le nombre de classes d’un tore algébrique sur qui généralise la formule classique de Dedekind pour le nombre de classes de l’anneau des entiers d’un corps de nombres. On définit et on estime le quasi-résidu de qui intervient dans cette formule. On énonce un des résultats principaux que nous avons en vue qui donne une minoration du produit du nombre de classes de de par le régulateur (théorème 2.3). Dans les applications à la multiplication complexe que nous avons en vue le régulateur sera toujours égal à de sorte que l’on aura dans ce cas une minoration du nombre de classes .
2.1.1 Nombre de classes des tores.
On note (resp. ) l’anneau des adèles (resp. des adèles finis) de . Soit un groupe algébrique sur . Soit un sous-groupe compact ouvert de , le nombre de classe de relativement à est défini comme le cardinal de l’ensemble fini ([22] thm. 5.1).
Si est un tore sur , et est premier on note l’unique sous-groupe compact ouvert maximal de . Alors est l’unique sous-groupe compact ouvert maximal de . Le nombre de classe de est défini comme
(5) |
On note le sous-groupe compact maximal de . Le groupe est alors fini et on note
(6) |
2.1.2 Fonction d’Artin de et estimations de .
Soit un tore algébrique sur , on note le -module libre des caractères de . Pour toute extension de on note le sous-module de formé des caractères qui sont rationnels sur . Soit un corps de décomposition de et le groupe de Galois de sur . Le groupe agit sur et on note le caractère de cette représentation.
On note la fonction d’Artin défini par le -module . On dispose d’un produit Eulérien , avec pour tout nombre premier
Dans cette somme portant sur les nombres premiers , désigne une place arbitraire de au dessus de , désigne le sous-groupe d’inertie du groupe de décomposition et est le Frobenius en .
Soit le nombre de classes de conjugaison de et les caractères des représentations irréductibles de . On suppose que est le caractère de la représentation triviale. Par la théorie des fonctions d’Artin [2] [3], si on a la décomposition alors
avec la fonction zeta de Riemann et la fonction d’Artin de . Dans cette situation
(7) |
est fini et non nul.
Soit un sous-groupe de et le caractère d’une représentation de . On note le caractère de induit de . Par définition, on a donc
désignant l’extension de à nulle en dehors de .
Soit , un système de représentants des sous-groupes cycliques de à conjugaison près. On note le caractère de la représentation triviale de . Par la théorie d’Artin, ([17] 1.5.3) il existe des entiers naturels premiers entre eux dans leur ensemble qui sont déterminés par le -module tels que
(8) |
Soit les sous-corps de correspondants à par la théorie de Galois on en déduit une isogénie ([17] thm. 1.5.1)
(9) |
On on aura besoin de l’énoncé suivant de type Brauer-Siegel concernant la taille de .
Proposition 2.1
Soit un entier et un réel positif. Soit un tore algébrique sur de dimension . Soit le corps de décomposition de et la valeur absolue du discriminant de . Il existe des constantes et (dépendants uniquement de et ) telles que
(10) |
Preuve. On déduit de l’équation (9) l’ égalité de fonctions
où l’on note la fonction zêta d’un corps de nombres . Pour tout , a un pôle simple de résidu noté . Soit l’ordre du pôle en de . On trouve que
et
Quand varie parmi les tores de dimension , il n’y a qu’un nombre fini de possibilités pour le groupe de Galois comme groupe abstrait. Quand est fixé, il n’y a qu’un nombre fini de possibilités à isomorphismes près pour comme -module. Comme les entiers ne dépendent que du -module , ils sont bornés quand parcourt l’ensemble des tores algébriques sur de dimension .
On est donc ramené au lemme suivant.
Lemme 2.2
Soit un entier et un réel positif. Soit une extension galoisiennne de de degré et soit une sous-extension de . Il existe des constantes et (ne dépendants que de et ) telles que
D’après ([16] XVI-1) lemme 1, on sait que . On a par ailleurs la relation où désigne le discriminant relatif et la norme de à . Ceci démontre la majoration du lemme.
2.1.3 Mesures de Haar sur et le quasi-discriminant .
Soit un tore algébrique sur de rang . Soit une place de et le rang de . Soit une -base de et
Pour , induit un isomorphisme . On note
et la mesure de Haar sur amalgamant et la mesure de Haar normalisée sur .
Pour fini, induit un isomorphisme . On note le pull-back par de la mesure discrète sur et la mesure de Haar sur amalgamant et la mesure de Haar normalisée sur . On obtient ainsi une mesure de Haar
(11) |
sur .
Soit une forme différentielle -rationelle non nulle de degré maximal sur . Pour tout , induit une mesure de Haar sur . On sait alors que
(12) |
définit une mesure de Haar dite de Tamagawa sur indépendante du choix de .
Il existe alors une constante positive telle que . On appelle alors le quasi-discriminant de le nombre
(13) |
2.1.4 Formule de classes d’un tore algébrique.
Soit un tore sur , Shyr [25] montre la formule de classes suivante:
(14) |
Dans cette formule est le régulateur de défini comme le covolume de l’image du réseau des unités dans ([17], p. 131) et est le nombre de Tamagawa de ( [17], 3.5).
Quand pour un corps de nombres , on vérifie que est le nombre de classes de , est le régulateur de , le nombre de racines de l’unité de , est le résidu en de la fonction zêta du corps . Soit (resp. ) le nombre de places réelles (resp. complexes à conjugaison complexe près) de et la valeur absolue du discriminant de . Alors . Comme dans cette situation , on retrouve la formule classique de la théorie des nombres:
2.1.5 Minoration du nombre de classes d’un tore algébrique.
Nous pouvons maintenant énoncer un des résultats principaux que nous avons en vue.
Théorème 2.3
Soit un entier positif. Il existe des constantes positives et telles que pour tout tore algébrique sur de dimension et tout , il existe une constante positive telle que
(15) |
Dans cette équation désigne le corps de décomposition de , désigne la valeur absolue du discriminant de et désigne le nombre de nombres premiers divisant .
Si le régulateur est trivial on obtient une minoration de . On verra que c’est le cas pour les tores associés à la multiplication complexe. La constante est explicitée dans la définition 3.4. Elle est facilement calculable pour fixé et on pourrait l’étudier quand varie. Un calcul à la main donne par exemple , , et . Un test de parité simple dans la définition de montre que pour tout , .
2.2 Modèles entiers des tores
2.2.1 Conducteurs d’Artin
Soit un nombre premier et une extension finie de . On note son anneau d’entiers, l’idéal maximal de et son corps résiduel. On note le hensélisé stricte de et le corps des fractions de . Soit une uniformisante de , on normalise la valuation de de sorte que . La valeur absolue associée est alors .
Soit une extension finie galoisienne de . On note le groupe de Galois de sur . Soit
la filtration décroissante de ramification avec le sous-groupe d’inertie et le sous-groupe d’inertie sauvage. On note .
Soit une représentation linéaire complexe de dimension finie de , le conducteur d’Artin de est défini ([24] VI-2) par
(16) |
Quand est modérément ramifié et quand est non ramifié.
2.2.2 Modèles entiers des tores
On fixe encore un nombre premier et une extension finie de . Soit un tore sur de dimension . Il existe un modèle de sur de type fini et lisse sur tel que est le sous-groupe maximal borné de . On dira que est le modèle de Néron-Raynaud de type fini de . Dans cette situation est le sous-groupe compact maximal de .
Le modèle de Néron-Raynaud défini dans [4] est un modèle lisse de sur tel que . Ce modèle est localement de type fini sur .
Les composantes de l’élément neutre de et coïncident. On note la composante de l’élément neutre de et le groupe des composantes connexes de . Alors est un schéma en groupe fini étale et est déterminé par le -module .
Soit le corps de décomposition de . Soit
alors
Le tore se plonge canoniquement dans .
Soit la fermeture schématique de dans , alors s’obtient à partir de par un procédé de lissage décrit dans [4], voir aussi ([5] section 3). Si l’extension de est modérément ramifiée par le théorème 4.2 de [8], est lisse et coïncide donc avec .
On aura besoin du résultat suivant dans la suite.
Proposition 2.4
Il existe une constante (ne dépendant que de ) telle que pour tout tore de dimension au plus sur
(17) |
Comme le modèle de Néron-Raynaud (de type fini ou non) commute au changement de base non ramifié, on peut pour calculer supposer que . Si est le corps de décomposition de , alors est le groupe d’inertie.
Soit le sous-tore déployé maximal de et le tore quotient anisotrope . D’après [5] lemme 11.2, en passant aux modèles de Néron-Raynaud de type fini sur , on obtient une suite exacte courte
Lemme 2.5
On a l’égalité .
Preuve. Comme pour un certain , est connexe et la suite exacte précédente induit une suite exacte courte
Le lemme s’obtient alors par une application du lemme du serpent.
On peut donc supposer que est anisotrope sur . Alors et par [29] cor. 2.19 on en déduit que . Comme est de dimension , et est le corps de décomposition de , agit fidèlement sur . Le nombre de sous-groupes finis de à conjugaison près est fini. Il existe donc qu’un nombre fini de possibilités pour . Ceci termine la preuve de la proposition 2.4.
2.2.3 Mesure de Haar et conducteur d’Artin
On garde les notations de la section précédente. On note la puissance extérieure maximale de l’espace des -formes différentielles sur . C’est un -module libre de rang et on choisit un générateur de . La mesure de Haar associée sur est indépendante du choix de .
Fixons un isomorphisme . Le modèle de Néron-Raynaud de type fini de est . Soit un générateur de et la mesure de Haar sur associée.
Soit le conducteur d’Artin de la représentation de . Gross et Gan ([12] sections 4-5 ) montrent qu’il existe une classe telle que
et telle que soit rationnelle sur . Par le théorème 7.3 de [12] on a
(18) |
La proposition 4.7 de [13] montre alors que
(19) |
Le résultat de Gross est en fait beaucoup plus général. Il s’applique à un groupe réductif arbitraire sur et aux modèles entiers sur donnés par la théorie de Bruhat-Tits. Dans le cas d’un tore, ces modèles coïncident avec les modèles de Néron-Raynaud de type fini. Dans les notations de [13] le motif qui apparaît est juste pour un tore de sorte que l’on a la relation .
3 Le quasi-discriminant .
Soit un tore sur de dimension . Soit le corps de décomposition de . Le but de cette partie est de donner une formule fermée pour le quasi-discriminant de et de comparer à la valeur absolue du discriminant de .
Soit le modèle de Néron-Raynaud de type fini de sur . Pour tout nombre premier , est le modèle de Néron-Raynaud de type fini de sur décrit dans la section 2.2.2. Soit le groupe des composantes de . On note le conducteur d’Artin de . Donc où est le conducteur d’Artin de .
Soit le tore de Deligne. On a une décomposition en produit direct sous la forme
(20) |
avec ([28], p. 106).
3.1 Une formule fermée pour
Le but de cette section est de montrer la formule fermée suivante pour le quasi-discriminant de .
Proposition 3.1
On a
(21) |
Preuve. Soit la puissance extérieure maximale de l’espace des -formes différentielles invariantes sur . Alors est un -module libre de rang dont on fixe un générateur .
Soit le corps de décomposition de . Fixons un isomorphisme . Soit un générateur du -module libre de rang et . D’après [12] cor. 3.7, il existe tel que est rationnel sur .
On peut fixer un représentant dans de la manière suivante. Pour tout nombre premier , on note et les différentielles invariantes sur induites par et . D’après les résultats de la section 2.2.3, il existe , vérifant , tel que
(22) |
soit rationnel sur et tel que
Comme et sont deux formes différentielles invariantes rationnelles sur on voit que est pair. En changeant en pour un convenable, on peut supposer que
On peut donc en notant choisir au signe près sous la forme
avec .
On suppose dans la suite que est ainsi normalisé. Le signe dépend de . Un calcul direct utilisant la décomposition (20) de montre que est rationnelle sur . Comme la forme différentielle est aussi rationnelle sur , on en déduit que .
Un choix normalisé de est donc
Soit la mesure de Haar sur définie dans la section 2.1.3. En utilisant la forme invariante -rationelle dans la définition de et l’équation (22), on trouve
et par définition
Un calcul simple aux places réelles utilisant la décomposition (20) de montre que
Fixons un compact de d’intérieur non vide et suffisamment régulier. Alors
Par définition du modèle de Néron-Raynaud de type fini de , pour tout premier .
3.2 Minoration de et de .
On conserve les notations de la section 3. Le but de cette partie est de montrer les minorations suivantes du conducteur d’Artin et du quasi-discriminant de .
Proposition 3.2
Soit un entier positif. Il existe de constantes , , et strictement positives telles que pour tout tore sur de dimension dont le corps de décomposition est , on a
(23) |
et
(24) |
Dans cette dernière équation désigne le nombre de nombres premiers divisant .
La minoration de est une conséquence de la minoration de , de la formule fermée pour donnée à la proposition 3.1 et de la majoration du cardinal du groupe des composantes du modèle de Néron de obtenue à la proposition 2.4. On peut prendre (avec les notations de 2.4) et .
On utilisera essentiellement le lemme élémentaire suivant.
Lemme 3.3
Soit un -vectoriel de dimension muni d’une action fidèle d’un groupe cyclique pour un entier . Soit la fonction indicatrice d’Euler. Le nombre de caractère non triviaux de intervenant dans vérifie
avec si ou et sinon. En particulier .
Preuve. Soit un générateur de . Alors est diagonalisable dans . Les valeurs propres de sont des racines -ièmes de l’unité. Soit les ordres des valeurs propres de . Comme l’action est fidèle les ne sont pas égaux à . Si est un -tuple d’entiers on note le plus petit commun multiple des . Comme est d’ordre , on a . Si admet une valeur propre d’ordre , l’irréductibilité des polynômes cyclotomiques sur montre que admet toutes les racines primitives -ième de l’unité comme valeurs propres. Comme les valeurs propres de déterminent des caractères de intervenant dans , on en déduit que
Il suffit donc de minorer le second membre de cette inégalité par
quand varie parmi les diviseurs de tels que .
On note la valuation -adique normalisée sur . Pour tout nombre premier divisant , il existe un entier tel que . En divisant les entiers convenablement, on peut supposer que pour tout divisant et pour tout , ou et qu’il existe un indice tel que . On obtient alors le résultat en remarquant que si et sont des entiers premiers entre eux dès que et que si est impair .
Définition 3.4
On définit les fonctions sur ,
et
(25) |
Lemme 3.5
Soit un tore sur de dimension , son corps de décomposition et . Soit une place de divisant un premier . On suppose l’extension locale modérément ramifiée. On note et le groupe de décomposition et le groupe d’inertie en . Soit et les conducteurs d’Artin des -modules et respectivement. Alors
(26) |
Preuve. Soit le caractère du -modules et celui de . Soit le caractère de la représentation d’Artin de . Si on note le produit scalaire hermitien canonique sur l’espace des fonctions centrales sur , alors d’après Serre ([24], VI-2),
Comme l’extension est modérément ramifiée le groupe d’inertie est cyclique d’ordre . Comme est le corps de décomposition de , agit fidèlement sur . Comme est un sous-groupe de , il agit aussi fidèlement sur . Dans cette situation est le caractère de la représentation d’augmentation de ([24], prop. 2, p. 108). Par définition est donc la somme des caractères non triviaux de .
On en déduit que est minoré par le nombre de caractères distincts non triviaux de apparaissant dans . Le résultat est alors une application du lemme 3.3 et du fait que .
Définition 3.6
Soit un entier, on note l’ordre maximal d’un sous-groupe fini de .
On peut maintenant démontrer la proposition 3.2 avec les constantes et de 3.4 et 3.6. D’après [24] VI-3, on a
Si , soit une place de au dessus de . Le groupe d’inertie agit fidèlement dans car est le corps de décomposition de . Le lemme 3.3 assure qu’il n’y a pas de sous-groupes cycliques d’ordre dans . La ramification en est donc modérée et par le lemme 3.5
Soit un nombre premier plus petit que . Comme est le corps de décomposition de , le groupe de Galois agit fidèlement dans . En particulier et une majoration simple du conducteur d’Artin utilisant la définition donne .
Comme et on obtient
Comme , on finit la preuve de la proposition 3.2 en combinant les résultats obtenus pour les différents nombres premiers .
3.3 Les invariants cohomologiques de .
On garde les notations précédentes, en particulier est un tore sur de dimension fixée . Le but de cette partie est de donner des bornes uniformes pour la taille du nombre de Tamagawa de . Les bornes que nous avons en vue seront des conséquences immédiates de l’interprétation cohomologique de cette quantité.
On utilise les notations de l’appendice de Kottwitz et Shelstad [15] concernant la dualité de Tate-Nakayama. On note donc pour tout tore sur
et le noyau de l’application naturelle . On note les groupe de cohomologie modifiés à la Tate correspondants.
3.3.1 Estimation de .
Le but de cette partie est de montrer l’estimation de suivante.
Proposition 3.7
Il existe des constantes positives , et ne dépendant que de telles que pour tout tore sur de dimension :
(28) |
D’après le résultat principal de Ono [18] on a
(29) |
On a et opère via un sous-groupe fini de . En utilisant la suite d’inflation-restriction ([24] VII-6), on vérifie que . A fixé, il n’y a, à isomophisme près, qu’un nombre fini de choix pour . On en déduit une borne uniforme pour en fonction de .
Par ailleurs, un calcul de cohomologie Galoisienne utilisant la dualité de Nakayama-Tate ([18] 2.2–2.3) montre que est un quotient de . Comme précédemment on vérifie que pour un sous-goupe de . On en déduit que est aussi uniformément borné en fonction de . Ceci termine la preuve de la proposition au vu de l’expression de dans l’équation (29).
3.4 Preuve du théorème 2.3
Il s’agit juste de collecter les résultats des parties précédentes en partant de la formule de classe de Shyr pour donnée à l’équation (14):
On remarque que car c’est un entier. On pourrait borner en fonction de mais nous n’en n’auront pas d’usages. Les minorations de (prop. 2.1), de (prop. 3.2) et de (prop. 3.7) permettent de finir la minoration de recherchée au théorème 2.3.
4 Connexité du noyau des morphismes de réciprocités.
4.1 Corps de multiplication complexe et types CM.
Soit un corps CM de degré sur . Soit son sous-corps totalement réel maximal. On note (resp. ) la clôture Galoisienne de (resp. ) et la conjugaison complexe. On pose
et on fixe un type CM de sorte que
On notera contrairement aux parties précédentes réservant la lettre pour les groupes réductifs intervenants dans la suite. Le groupe de Galois opère à droite transitivement et fidèlement sur . On indexe les éléments de par les indices et ceux de par les indices avec la convention que pour tout . Soit le centralisateur de dans . Par convention et opèrent à droite sur par permutation. Pour et tout on a et .
On dispose du résultat suivant de Dodson ([7] 1.1).
Proposition 4.1
(a) On a une suite exacte
Dans cette suite est identifié au sous-groupe de et . On a toujours car le groupe engendré par est un sous-groupe de .
(b) Le groupe muni de son action sur s’identifie à un sous-groupe de . Le groupe s’identifie à un sous-groupe de , il agit transitivement sur et il agit sur le sous-groupe de par permutation des coordonnées.
(c) On peut écrire
(30) |
où est un relévement arbitraire de . Soit la surjection canonique. Alors est un -cocycle.
On note et on pose
On rappelle que le type CM est dit primitif si il ne provient pas d’un type CM sur un sous-corps CM stricte de . Si est primitif alors
Soit
avec . Soit le sous-corps de attaché à par la correspondance de Galois. Alors est le corps reflex de , c’est un corps CM. On pose . Soit l’image de dans
Alors est un type CM primitif sur . On dit que est le dual de . Si est primitif, alors est le dual de .
Dans la description (30) de comme sous-groupe de , le fixateur de est le sous-groupe des éléments de la forme de . Soit
Alors En particulier on a
Remarque 4.2
Si on change le type CM en pour cela revient à conjuguer dans par . On change alors la section par multiplication par le cobord dans la description de comme sous-groupe de de la proposition 4.1–c.
On utilisera le résultat suivant de Dodson ([7] 2.1.2).
Proposition 4.3
Soit un corps CM de degré sur . Le cocycle de 4.1–c est trivial si et seulement si il existe un type CM, sur dont le corps reflex est de degré sur .
Remarquer que la nullité du cocycle est indépendante du choix d’un type CM au vu de la remarque précédente. Noter que dans ce cas l’image de dans est nul. La suite exacte de la proposition 4.1-a est alors scindée. Nous utiliserons la proposition précédente dans le cas suivant
Lemme 4.4
Soit un corps CM de degré contenant un corps quadratique imaginaire . Alors et le cocycle est trivial.
Dans cette situation et donc et . Soit un type CM sur et son extension à . Avec les notations précédentes . On en déduit que est le corps reflex de et que le cocycle est trivial, d’après la proposition 4.3.
4.2 Tores de multiplication complexe, le cas du groupe symplectique.
Fixons la forme bilinéaire alternée de matrice
sur et notons le groupe de similitudes symplectiques associé. On garde les notations de la section précédente concernant le corps de multiplication complexe . On peut trouver un élément tel que . Ainsi est muni de la forme -linéaire alternée
On peut alors fixer un isomorphisme symplectique .
Soit . L’espace des caractères s’écrit alors
Il sera utile de l’écrire de la manière suivante qui fait intervenir le type CM :
où l’on a noté l’élément du type CM et l’élément de . On a une description identique pour le réseau des cocaractères de .
Soit le sous-tore de défini par
Soit le sous-tore de en gendré par et . Le tore s’identifie à un tore maximal de .
La théorie de Deligne construit un paramètre de Hodge se factorisant par .
Le module des cocaractères de est le sous-module de qui se décrit par
Le cocaractère de associé au paramètre de Hodge est dans cette description . Si on note on a
On rappelle que désigne le corps reflex de et que est le sous-groupe de associé à par la correspondance de Galois. Le morphisme de réciprocité
(31) |
se factorise par . Il se décrit au niveau des cocaractères de la manière suivante.
où agit sur via la description de donné à la proposition 4.1.
On définit le sous-module de . Soit . Alors est un sous--module galoisien saturé de . Le sous-tore de associé à est le groupe de Mumford-Tate de (ou de ). Par définition est le plus petit -sous-tore de tel que se factorise par . Le lemme suivant est alors une conséquence de l’équivalence de catégories entre la catégorie des tores algébriques et celle des -modules galoisiens libres de rang fini:
Lemme 4.5
Le morphisme de réciprocité est à noyau connexe si et seulement si .
Voici un critère simple qui assure la connexité de .
Proposition 4.6
Preuve. Dans cette situation le groupe contient les transpositions pour . On en déduit que contient . Donc et est à noyau connexe.
Ce résultat précise un énoncé de Clozel et du premier auteur ( [6], sec. 3.2) où le cas où est obtenu. Noter que ce dernier cas, appelé “Galois générique” dans [6] est le cas générique comme expliqué dans ([6], sec. 2).
Proposition 4.7
Si le morphisme de réciprocité est à noyau connexe.
Preuve. Le cas est bien connu. On a alors et est un isomorphisme.
Dans le cas , si , on peut appliquer la proposition 4.6. On peut donc supposer que . Le groupe est engendré par la transposition . Le choix de n’étant bien défini qu’à multiplication par près, on peut supposer que où que est la transposition . Dans le premier cas et dans le second . Noter que si le type CM est primitif, le résultat de Ribet ([23], 3.5) nous assure que le rang de est donc que le premier cas n’intervient pas.
Pour on peut comme précédemment supposer que . Le cas est en fait exclu. En effet est soit soit le groupe alternée . Dans tous les cas il contient le trois-cycle . Les seuls points fixes de dans son action sur sont et . Comme préserve on trouve que est impossible. Pour un nombre premier arbitraire cet argument montre que divise .
Quand , est central dans . dans cette situation la suite exacte
est scindée car est de signature donc fournit un scindage. La sous-extension de associée à est un corps quadratique imaginaire et intervient comme un corps reflex de pour un type CM de . Par le corollaire 2.1.2 de [7] on en déduit que le cocycle de la proposition 4.1 est trivial. Il existe donc tel que pour tout . On peut alors choisir .
Si , pour tout alors est engendré par et . On en déduit que . Dans cette situation le corps reflex est et le type CM n’est pas primitif par le résultat de Ribet ([23], 3.5).
Si , agit sur via l’action de . On remarque est une permutation paire non triviale. C’est donc un produit de transpositions. Donc pour un et avec . On en déduit que contient et . Comme il contient , on trouve que .
Remarque 4.8
Le lecteur intéréssé par la complexité combinatoire peut regarder la table des cas possibles donné par Dodson ([7] p.23) dans le cas . On peut construire des exemples de corps CM de degré et de type CM tel que . Par exemple on suppose que est le groupe de Klein engendré par les doubles transpositions et si on a une suite exacte scindé
tel que avec la transposition . Un calcul simple montre que
qui est d’indice dans . En particulier n’est pas à noyau connexe dans ce cas.
La proposition suivante montre que l’indice de dans peut être divisible par des entiers arbitrairement grands:
Proposition 4.9
Soit un nombre premier impair. Il existe un corps CM de degré et un type CM sur tel que .
Preuve. Soit un corps totalement réel qui est une extension galoisienne de de groupe . De tels existent comme sous-extensions convenables de corps cyclotomiques. Soit un corps quadratique imaginaire et . Alors est un corps CM qui est Galoisien sur de groupe . Dans cette situation, pour tout type CM sur , on a la suite exacte scindée
et par le lemme 4.4 le cocycle est trivial. Il existe donc tel que pour tout . Après renumérotation de , on peut supposer que est engendré par le -cycle . On peut par ailleurs par un choix convenable du type CM sur utilisant la remarque 4.2 supposer que . Un calcul simple montre alors que est engendré par , et les avec . On vérifie alors que est de rang maximal et que .
5 Points spéciaux des variétés de Shimura.
Dans cette section on commence à aborder le problème de minoration des orbites Galoisiennes de points spéciaux dans les variétés de Shimura. On considère une donée de Shimura . On peut sans perte de généralité supposer que est le groupe de Mumford-Tate générique de . On peut aussi supposer que est net. Avec ces hypothèses agit sans points fixes sur . On peut aussi sans perte de généralité ne s’intéresser qu’à des points de la composante de qui est l’image de dans (où désigne une composante connexe de ). On fixe dans la suite une représentation fidèle . Ceci permet de definir les modèles entiers de et de ses sous-groupes algébriques. On suppose également que est le produit où est un sous-groupe compact ouvert de .
Soit une donnée de Shimura spéciale telle que est le groupe de Mumford-Tate de . On note . La non maximalité du sous-groupe compact ouvert contribue à la taile de l’orbite sous Galois du point spécial . Nous décrivons le résultat précis dans une première partie puis nous rappelons dans une deuxième des résultats de Clozel et du premier auteur [6] concernant l’image des morphismes de réciprocité au niveau des groupes de classes sous des hypothèses de connexité du noyau du morphisme de réciprocité.
5.1 Passage de à
Proposition 5.1
Soit une donnée de Shimura. Soit un sous-groupe compact ouvert de .
Soit une donnée de Shimura spéciale et le corps de décomposition de . On suppose que est le groupe de Mumford-Tate de . Soit le sous-groupe compact ouvert maximal de et soit . Soit le morphisme de réciprocité et l’image de dans .
On a
où est une constante uniforme et désigne le nombre de premiers tels que .
Lemme 5.2
Soit le noyau du morphisme naturel
Alors
où est une constante uniformement bornée quand varie parmi les points CM de .
-
Preuve.
Il est facile de voir que
Le groupe est fini d’ordre borné uniformément quand varie parmi les points CM de . En effet il existe un sous-groupe compact ouvert net de d’indice uniformément borné dans . Le groupe est trivial car de torsion dans un sous-groupe compact ouvert net. On en déduit que donc que est fini d’ordre borné uniformément.
-
Preuve.
Sans perte de généralité, on peut supposer que le groupe compact ouvert est net.
Notons d’abord qu’il suffit de montrer que est au moins de la taille de l’image de dans . En effet, supposons que ce soit le cas. On constate alors que
où est l’image de dans . D’après [27], lemme 2.18 , on a
où est une constante uniforme et est comme dans l’énoncé.
Démontrons maintenant que est au moins de la taille de l’image de dans . L’inclusion de données de Shimura induit un morphisme de variétés de Shimura:
Ce morphisme est défini sur le composé du corps reflexe de et celui de . De plus, par le lemme 2.2 de [27], ce morphisme est injectif. On en déduit que la taille de l’orbite sous Galois de est, a une constante uniforme près, la taille de l’image de dans .
5.2 Morphisme de réciprocité à noyaux connexes
Si est un tore sur , on note le groupe (adhérence topologique), modifiant un peu la notation de Deligne. Si est une sous-donnée de Shimura de telle que est le groupe de Mumford-Tate de , et le morphisme de réciprocité on note le morphisme induit.
On rappelle que l’on note le groupe de classes de . On dispose alors du résultat suivant ([6] thm. 3.3).
Théorème 5.3
Si varie parmi les sous-données CM de telles que le noyau
(32) |
est connexe, le conoyau de est de taille uniformément bornée.
On en déduit en particulier que le conoyau de est uniformément borné quand varie parmi les sous-données CM telles que le noyau de est connexe. Dans formulation de ([6] thm 3.3) le corps reflex de à la place de . La preuve donnée dans ce texte vaut pour à la place du corps reflex. Il est simple de montrer que les énoncés du théorème pour et pour le corps reflex sont en fait équivalents.
En combinant ce résultat avec la proposition 5.1 et le théorème 2.3 on obtient un des résultats principaux que nous avons en vue dans ce texte.
Corollaire 5.4
Soit une donnée de Shimura telle que est le groupe de Mumford-Tate générique sur . Soit un sous-groupe compact ouvert de . Soit le rang absolu de .
Soit une sous–donnée de Shimura spéciale et le corps de décomposition de . On suppose que est le groupe de Mumford-Tate de et que le noyau du morphisme de réciprocité est connexe. Alors pour tout
(33) |
où est une constante ne dépendant que de et désigne le nombre de premiers tels que . La constante positive est explicitée dans la définition 3.4 et est une constante strictement positive ne dépendant que de et de .
En utilisant la proposition 4.7 et le fait que , on trouve le résultat suivant qui généralise le cas bien connu .
Corollaire 5.5
Soit . Soit un point CM du module des variétés abéliennes principalement polarisées de dimension ou correspondant à une variété abélienne simple. Soit le groupe de Mumford-Tate de . Alors
(34) |
pour une constante ne dépendant pas de .
Pour , on a et on retrouve les estimations classiques (en ) de la taille du groupe de Picard d’un corps quadratique imaginaire. Pour obtenir des minorations de l’orbite sous Galois d’un point de on peut en général se ramener au cas des variétés abéliennes simples.
Soit une donnée de Shimura et une sous–donnée de Shimura spéciale. On dit que est Galois générique si l’image de dans est maximale (parmi les images possibles pour un sous-tore de ). Nous faisons référence à ([6] 2.1) pour une définition plus précise. Notons que d’après la proposition 2.1 de [6] les sous-données spéciales Galois générique de existent pour tout , elles sont même génériques en un sens expliqué dans [6]. Il est montré dans [6] dans de nombreux cas que le morphisme de réciprocité est à noyau connexe pour les sous-données de Shimura avec Galois générique. C’est par exemple le cas si est -simple adjoint de type , et dans certains cas de type et que le lecteur pourra consulter dans [6]. Dans tous ces cas si on fait varier le point spécial parmi des sous-données Galois génériques on obtient des minorations inconditionnelles pour la taille de l’ orbite sous Galois de de la forme donnée dans l’équation (33). Nous n’écrirons pas l’énoncé le plus général possible. Retenons seulement le résultat suivant qui concerne qui est une conséquence des résultats précédents et de la proposition 4.6.
Corollaire 5.6
Soit un entier. Soit une variété abélienne principalement polarisée de dimention . On suppose que est un corps CM de degré vérifiant les hypothèses de la proposition 4.6. Soit le point spécial de associé à . On dira que est “suffisamment Galois générique”. Noter que si est Galois générique a la propriété requise. En conservant les notations des énoncés précédents, quand varie parmi les points spéciaux suffisamment Galois générique
(35) |
6 Bornes pour le noyau de réciprocité sous GRH.
Dans cette section on améliore les bornes pour les orbites de Galois de points spéciaux données dans [30].
Théorème 6.1
Admettons l’hypothèse de Riemann généralisée pour les corps CM. Soit une donnée de Shimura et un point CM de . Soit le groupe de Mumford-Tate de .
Soit le corps de décomposition de et la valeur absolue du discriminant de .
On a
où est uniforme.
-
Preuve.
L’apparition du facteur a été traitée précedemment (c.f. 5.1).
Soit, comme avant, le morphisme de réciprocité et le morphisme induit par au niveau des groupes de classes de et de respectivement. Il suffit de montrer que
On définit, suivant [1], pour un groupe abélien et un entier , comme étant le plus petit entier tel que pour tout -uplet d’éléments de , il existe avec vérifiant .
Prenons et soit . Si pour un certain , alors on a une relation multiplicative non-triviale en les avec . Autrement, on a une relation de la forme pour des indices . Dans tous les cas, on a une relation avec . On voit donc que pour , on a
Prenons maintenant .
On va démontrer l’estimation suivante:
(36) |
où est une constante uniforme.
Cette estimation implique celle désirée pour :
avec uniforme.
On va maintenant démontrer l’inégalité (36). Rappelons quelques notions et résultats de la section 2 de [30]. D’après la proposition 2.2 de [9] on peut supposer adjoint. Le morphisme de réciprocité induit une inclusion et on a une base canonique de donnée par énumération des éléments de . Il existe une base de telle que les coordonnées des caractères de par rapport à la base canonique de , sont bornées uniformément. De plus comme est supposé adjoint pour tout caractère de , est le caractère trivial.
Soit un entier et , premiers qui décomposent et des entiers relatifs. Pour chaque , on fixe une place de au déssus de et un idèle dans qui est l’uniformisante à la place et ailleurs. Considerons et sa classe dans . Supposons que soit dans le noyau de i.e
où et . Soit . Le lemme 2.15 de [30] montre que .
Soit une borne uniforme sur les coordonnées des . On voit alors que et le fait que est le caractère trivial implique que
pour tout .
Soit le degré de l’extension sur . Comme est le corps de décomposition d’un tore de dimension fixé, est uniformément borné. On peut choisir une base de sur avec pour des entiers naturels tels que . Il suffit de remarquer en effet que pour tout , les éléments sont linéairement dépendants.
Le fait que les sont dans et que forment une base de sur , implique que est un ordre dans . En particulier
(37) |
D’autre part, est le déterminant de la matrice . Par l’inégalité d’Hadamard, si est un majorant de tous les , alors
où ne dépend que de (on peut prendre ).
Du fait que , on déduit qu’il existe un entier uniforme (ne dépendant que de ) tel que
et donc, par l’inégalité d’Hadamard, après avoir remplace par
Notons . L’équation (37) donne alors:
Nous allons maintenant choisir et .
Rappelons une conséquence du théorème de Chebotarev effectif. Le lecteur pourra consulter le Lemme 2.1 de [1] pour une preuve.
Théorème 6.2
Admettons l’hypothèse de Riemann généralisée. On note le nombre de premiers totalement decomposés dans tels que . Il existe des constantes absolues (et effectivement calculables) et tels que
pour tout .
Soit maintenant un premier.
où est une constante uniforme que nous allons expliciter. Nous voulons choisir la constante telle que . Notons que (si )
On a alors dès que . On peut alors par exemple prendre .
On peut trouver décomposés dans et vérifiant
Soit maintenant un élément comme avant. On note . Ce qui précède donne
Par ailleurs, il y a une constante uniforme telle que
On obtient donc une borne inférieure pour de la forme souhaitée. Ceci achève la preuve de l’inégalité (36) et du théorème.
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