Espaces de représentations complètement réductibles

Anne Parreau Institut Fourier, UMR 5582
BP 74
Université de Grenoble I
38402 Saint-Martin-d’Hères cedex, France
Anne.Parreau@ujf-grenoble.fr
Abstract.

We study some geometric properties of actions on nonpositively curved spaces related to complete reducibility and semisimplicity, focusing on representations of a finitely generated group ΓΓ\Gamma in the group G𝐺G of rational points of a reductive group over a local field, acting on the associated space (symmetric space or affine building). We prove that the space of completely reducible classes is the maximal Hausdorff quotient space for the conjugacy action of G𝐺G on Hom(Γ,G)HomΓ𝐺\mathrm{Hom}(\Gamma,G).

Key words and phrases:
nonpositive curvature, symmetric spaces, affine buildings, reductive groups over local fields, complete reducibility, moduli spaces
2000 Mathematics Subject Classification:
22E46; 53C35, 20E42, 51F99, 20E45, 14L30
Avec le soutien de l’ANR Repsurf : ANR-06-BLAN-0311

Introduction

Soit ΓΓ\Gamma un groupe infini, engendré par une partie finie S𝑆S. Soit X𝑋X un espace métrique CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0) propre, muni d’une action par isométries, propre et cocompacte, d’un groupe localement compact G𝐺G. Nous nous intéressons ici aux propriétés topologiques de l’action par conjugaison (au but) de G𝐺G sur l’espace R=Hom(Γ,G)RHomΓ𝐺\mathrm{R}=\mathrm{Hom}(\Gamma,G) des représentations de ΓΓ\Gamma dans G𝐺G, en lien avec les propriétés géométriques des représentations ρ𝜌\rho de RR\mathrm{R} en tant qu’actions de ΓΓ\Gamma sur X𝑋X. Notons que RR\mathrm{R} s’identifie naturellement à un fermé de l’espace GSsuperscript𝐺𝑆G^{S} des S𝑆S-uplets de G𝐺G muni de l’action de G𝐺G par conjugaison simultanée, via l’application ρ(ρ(s))sSmaps-to𝜌subscript𝜌𝑠𝑠𝑆\rho\mapsto(\rho(s))_{s\in S}.

L’espace topologique quotient R/G\mathrm{R}/_{G} est en général loin d’être séparé, ne serait-ce que parce que certaines classes ne sont pas fermées dans RR\mathrm{R}, comme par exemple, lorsque G𝐺G est le groupe linéaire sur un corps local 𝕂𝕂\mathbb{K}, celle d’une matrice triangulaire supérieure non diagonale (qui adhère à sa partie diagonale). On peut même avoir que toutes les classes de conjugaison soient fermées sans pour autant que le quotient soit séparé, comme par exemple dans le cas où (Γ=Γ\Gamma=\mathbb{Z} et) X𝑋X est le plan euclidien et G=Isom(X)𝐺Isom𝑋G={\mathrm{Isom}\>}(X) (en effet une suite de rotations d’angles tendant vers zéro adhère modulo conjugaison à toutes les translations).

Le cas qui nous intéresse au premier chef est celui où G=𝐆(𝕂)𝐺𝐆𝕂G={\bf G}(\mathbb{K}), avec 𝐆𝐆{\bf G} un groupe algébrique réductif connexe défini sur un corps local 𝕂𝕂\mathbb{K}, agissant sur X𝑋X son espace associé (espace symétrique dans le cas archimédien, ou immeuble de Bruhat-Tits dans le cas non archimédien).

Dans ce cadre algébrique, pour 𝕂=𝕂\mathbb{K}=\mathbb{R}, la théorie des actions des groupes algébriques réductifs réels permet de construire un bon quotient R//G\mathrm{R}//G à partir des orbites fermées ([Luna], [RiSl]). Richardson a démontré que dans ce cas les orbites fermées sont celles des représentations semisimples ([Ric]). La notion de représentation semisimple peut se caractériser géométriquement par la notion suivante introduite par J. P.  Serre ([Serre]), qui a un sens pour une action ρ𝜌\rho sur un espace métrique CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0) quelconque : ρ𝜌\rho est complètement réductible (cr) si, lorsque ρ𝜌\rho fixe un point α𝛼\alpha dans le bord à l’infini Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X de X𝑋X, alors il existe un point β𝛽\beta dans Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X, opposé (i.e. joint par une géodésique dans X𝑋X) à α𝛼\alpha , également fixé par ρ𝜌\rho.

Dans cet article, dans un premier temps nous étudions diverses propriétés géométriques des actions sur un espace métrique CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0) reliées à la complète réductibilité.

Une action ρR𝜌R\rho\in\mathrm{R} est dite non-parabolique si elle n’a pas de point fixe non trivial à l’infini de X𝑋X. Nous montrons (en section 2) que, dans un cadre CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0) très général, l’action de G/Z(G)𝐺𝑍𝐺G/Z(G) sur le sous-espace des représentations RnpsubscriptR𝑛𝑝\mathrm{R}_{np} non-paraboliques est propre (où Z(G)𝑍𝐺Z(G) est le centre de G𝐺G).

À une représentation ρ𝜌\rho nous associons une fonction convexe dρ:X+:subscript𝑑𝜌𝑋superscriptd_{\rho}:X\longrightarrow\mathbb{R}^{+}, définie par dρ(x)=sSd(x,ρ(s)x)2subscript𝑑𝜌𝑥subscript𝑠𝑆𝑑superscript𝑥𝜌𝑠𝑥2d_{\rho}(x)=\sqrt{\sum_{s\in S}d(x,\rho(s)x)^{2}}. Nous démontrons (section 3, prop. 18) que, dans le cas des espaces symétriques, il y a équivalence entre les propriétés naturelles suivantes pour une représentation ρR𝜌R\rho\in\mathrm{R}.

(i) ρ𝜌\rho est complètement réductible.

(ii) ρ𝜌\rho est non-parabolique dans un sous-espace convexe fermé stable de X𝑋X.

(iii) La fonction dρ:X+:subscript𝑑𝜌𝑋superscriptd_{\rho}:X\longrightarrow\mathbb{R}^{+} atteint sa borne inférieure.

La propriété (ii) a déjà été considérée (voir par exemple [Lab]), en lien avec des questions d’existence d’applications harmoniques. On peut aussi noter que la condition (iii) est équivalente à l’existence d’une application harmonique équivariante du graphe de Cayley de ΓΓ\Gamma vers X𝑋X.

L’implication (ii)\Rightarrow (iii) est valable dans un espace CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0) propre quelconque X𝑋X. L’implication (i)\Rightarrow (ii) est valable plus généralement pour G𝐺G réductif sur un corps local agissant X𝑋X son espace symétrique ou immeuble associé mais dans le cas non archimédien on n’a plus (ii)\Rightarrow(i) (donc plus (iii)\Rightarrow(i)) (voir 3.1.5).

Dans un second temps, dans le cas algébrique général (G𝐺G groupe réductif sur un corps local 𝕂𝕂\mathbb{K} quelconque), nous donnons (section 4) une démonstration du résultat suivant.

Théorème.
  1. (1)

    Toute orbite de G𝐺G dans RR\mathrm{R} contient dans son adhérence une unique orbite complètement réductible.

  2. (2)

    L’espace topologique quotient 𝒳cr=Rcr/Gsubscript𝒳𝑐𝑟subscriptR𝑐𝑟𝐺{\mathcal{X}}_{cr}=\mathrm{R}_{cr}/G de l’espace RcrsubscriptR𝑐𝑟\mathrm{R}_{cr} des représentations cr est le plus gros quotient séparé de RR\mathrm{R} sous G𝐺G.

Dans le cas où 𝕂=𝕂\mathbb{K}=\mathbb{R}, ce résultat découle de [Luna], [Ric], et [RiSl]. Pour 𝕂𝕂\mathbb{K} de caractéristique 00, on peut déduire les résultats ci-dessus de [Bre], en utilisant que les orbites complètement réductibles sont les orbites fermées (ce qui découle de [Ric] et [Bre]).

La démonstration que nous donnons ici est nouvelle, indépendante et plus directe. Elle traite de manière unifiée tous les corps locaux sans distinction de caractéristique, dont le cas nouveau de la caractéristique non nulle. Les méthodes utilisées proviennent uniquement de la géométrie en courbure négative ou nulle et des propriétés de base des groupes algébriques réductifs sur les corps locaux.

On utilise ce résultat dans [Par3], où l’on construit une compactification naturelle de 𝒳crsubscript𝒳𝑐𝑟{\mathcal{X}}_{cr}.

Remerciements. Je remercie Frédéric Paulin pour son soutien et ses commentaires, ainsi que Michel Brion et Philippe Eyssidieux pour des discussions instructives sur la théorie géométrique des invariants et sur l’application moment.

1. Notations et rappels

Dans tout cet article, on se fixe un groupe ΓΓ\Gamma infini, de type fini, discret, une partie génératrice finie S𝑆S de ΓΓ\Gamma, et G𝐺G un groupe topologique métrisable, localement compact, dénombrable à l’infini (union dénombrable de compacts), donc à base dénombrable (d’ouverts). Pour g,hG𝑔𝐺g,h\in G on note ig(h)=ghg1subscript𝑖𝑔𝑔superscript𝑔1i_{g}(h)=ghg^{-1} la conjugaison par g𝑔g. On note Z(G)𝑍𝐺Z(G) le centre de G𝐺G. On rappelle qu’une action continue de G𝐺G sur un espace topologique E𝐸E localement compact est propre si l’application G×EE×E,(g,x)(x,gx)formulae-sequence𝐺𝐸𝐸𝐸maps-to𝑔𝑥𝑥𝑔𝑥G\times E\longrightarrow E\times E,\ (g,x)\mapsto(x,gx) est propre, ou, de manière équivalente, si pour tous compacts K,L𝐾𝐿K,L de E𝐸E, l’ensemble {gG,gKL}formulae-sequence𝑔𝐺𝑔𝐾𝐿\{g\in G,\ gK\cap L\neq\emptyset\} est compact.

On note R(Γ,G)RΓ𝐺\mathrm{R}(\Gamma,G) ou RR\mathrm{R} l’espace Hom(Γ,G)HomΓ𝐺\mathrm{Hom}(\Gamma,G) des représentations ρ𝜌\rho de ΓΓ\Gamma dans G𝐺G, muni de la topologie de la convergence simple. On s’intéresse à l’action de G𝐺G par conjugaison (au but) sur RR\mathrm{R} (notée gρ=igρ𝑔𝜌subscript𝑖𝑔𝜌g\cdot\rho=i_{g}\circ\rho). On note 𝒳(Γ,G)𝒳Γ𝐺{\mathcal{X}}(\Gamma,G) ou 𝒳𝒳{\mathcal{X}} l’espace topologique quotient. L’espace RR\mathrm{R} s’identifie à un fermé de GSsuperscript𝐺𝑆G^{S}, par l’application ρ(ρ(s))sSmaps-to𝜌subscript𝜌𝑠𝑠𝑆\rho\mapsto(\rho(s))_{s\in S}, qui est un homéomorphisme G𝐺G-équivariant sur son image. En particulier, RR\mathrm{R} est métrisable, à base dénombrable, localement compact, dénombrable à l’infini, car G𝐺G l’est. Si A𝐴A est une partie G𝐺G-stable de RR\mathrm{R}, l’ensemble quotient A/G𝐴𝐺A/G sera muni de la topologie quotient, dont on rappelle qu’elle coïncide avec la topologie induite par l’inclusion dans 𝒳=R/G𝒳R𝐺{\mathcal{X}}=\mathrm{R}/G [Bou3, Ch. III, § 2, prop. 10].

1.1. Espaces métriques CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0)

Dans tout cet article, l’espace X𝑋X est un espace métrique CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0) (on renvoie par exemple à [BrHa] pour la définition et les propriétés de ces espaces) propre (c’est-à-dire dont les boules fermées sont compactes; en particulier X𝑋X est complet et localement compact), muni d’une action de G𝐺G par isométries, continue et propre. Une action de ΓΓ\Gamma sur X𝑋X désigne dorénavant une action par isométries dans G𝐺G, c’est-à-dire un élément de R=Hom(Γ,G)RHomΓ𝐺\mathrm{R}=\mathrm{Hom}(\Gamma,G). On rappelle que la propriété fondamentale des espaces métriques CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0) est que la distance d𝑑d est convexe (en restriction aux géodésiques).

1.1.1. Bord à l’infini, sous-groupes paraboliques, faisceaux

On note Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X le bord à l’infini de X𝑋X, dont on rappelle qu’il est formé des classes de rayons géodésiques asymptotes (i.e. à distance bornée). Le stabilisateur dans G𝐺G d’un point α𝛼\alpha de Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X sera noté Pαsubscript𝑃𝛼P_{\alpha} et appelé sous-groupe parabolique de G𝐺G. Deux points α𝛼\alpha et β𝛽\beta de Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X sont dits opposés s’il existe une géodésique dans X𝑋X les joignant. On note Gαβ=PαPβsubscript𝐺𝛼𝛽subscript𝑃𝛼subscript𝑃𝛽G_{\alpha\beta}=P_{\alpha}\cap P_{\beta} le sous-groupe des éléments fixant simultanément α𝛼\alpha et β𝛽\beta, et Xαβsubscript𝑋𝛼𝛽X_{\alpha\beta} la réunion des géodésiques de β𝛽\beta à α𝛼\alpha, qui est un sous-espace convexe fermé de X𝑋X (qu’on appelera faisceau). On notera Fix(ρ)subscriptFix𝜌\mathrm{Fix}_{\infty}(\rho) l’ensemble des points fixes d’une action ρR𝜌R\rho\in\mathrm{R} dans le bord à l’infini de X𝑋X.

1.1.2. Facteur translaté

Sauf indication contraire, le produit X=X1×X2𝑋subscript𝑋1subscript𝑋2X=X_{1}\times X_{2} de deux espaces métriques X1subscript𝑋1X_{1} et X2subscript𝑋2X_{2} sera toujours muni de la distance produit dX=dX12+dX22subscript𝑑𝑋superscriptsubscript𝑑subscript𝑋12superscriptsubscript𝑑subscript𝑋22d_{X}=\sqrt{d_{X_{1}}^{2}+d_{X_{2}}^{2}}. On dira que X1subscript𝑋1X_{1} est un facteur de X𝑋X si X𝑋X est isométrique à un produit X1×X2subscript𝑋1subscript𝑋2X_{1}\times X_{2}. Le bord à l’infini Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X de X𝑋X est alors le joint sphérique [BrHa, 5.13] de X1subscriptsubscript𝑋1\partial_{\infty}X_{1} et de X2subscriptsubscript𝑋2\partial_{\infty}X_{2} (pour la distance de Tits). Le facteur translaté (maximal) du G𝐺G-espace X𝑋X est le facteur (dans une décomposition en produit préservée par G𝐺G) euclidien maximal X0subscript𝑋0X_{0} sur lequel le groupe G𝐺G agit par translations. On note alors X=X0×X𝑋subscript𝑋0superscript𝑋X=X_{0}\times{}X^{\prime}. On a que G𝐺G (donc toute action) fixe point par point le bord X0subscriptsubscript𝑋0\partial_{\infty}X_{0} du facteur translaté, et préserve Xsubscriptsuperscript𝑋\partial_{\infty}X^{\prime}.

Par exemple, si α𝛼\alpha et β𝛽\beta sont deux points opposés de Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X, l’action de Gαβsubscript𝐺𝛼𝛽G_{\alpha\beta} sur Xαβsubscript𝑋𝛼𝛽X_{\alpha\beta} possède un facteur translaté non trivial naturel. Un autre exemple d’action possédant un facteur translaté non trivial est fourni par l’action du groupe G=GLn()𝐺subscriptGL𝑛G=\mathrm{GL}_{n}(\mathbb{R}) sur son espace symétrique associé X=GLn()/O(n)𝑋subscriptGL𝑛O𝑛X=\mathrm{GL}_{n}(\mathbb{R})/\mathrm{O}(n) (le facteur translaté maximal est ici la droite correspondant aux orbites du centre Z(G)=Id𝑍𝐺superscriptIdZ(G)=\mathbb{R}^{*}\mathrm{Id}).

1.2. Pour les groupes réductifs sur les corps locaux

À partir de la section 3.2, on se placera dans le cadre plus restreint des groupes G𝐺G réductifs sur les corps locaux, agissant sur X𝑋X leur espace symétrique ou immeuble affine associé, c’est-à-dire dans le cadre suivant.

1.2.1. Le corps local 𝕂𝕂\mathbb{K}.

Voir par exemple [Mar, 0.31], [Bou1]. Soit 𝕂𝕂\mathbb{K} un corps local, c’est-à-dire un corps (commutatif) localement compact non discret. On rappelle qu’un tel corps peut être muni d’une valeur absolue ||\left|\cdot\right|, essentiellement unique, et que, si 𝕂𝕂\mathbb{K} est archimédien, on a 𝕂=𝕂\mathbb{K}=\mathbb{R} ou \mathbb{C}, et sinon (cas non-archimédien) ||\left|\cdot\right| est ultramétrique (et la valuation ω=log||\omega=-\log\left|\cdot\right| associée est discrète), 𝕂𝕂\mathbb{K} est totalement discontinu, et 𝕂𝕂\mathbb{K} est ou bien (en caractéristique nulle) une extension finie du corps des nombres p𝑝p-adiques psubscript𝑝\mathbb{Q}_{p}, où p𝑝p est un nombre premier quelconque, ou bien (en caractéristique positive p𝑝p) le corps 𝔽q((T))subscript𝔽𝑞𝑇\mathbb{F}_{q}((T)) des séries formelles de Laurent à coefficients dans un corps fini 𝔽qsubscript𝔽𝑞\mathbb{F}_{q}.

1.2.2. Le groupe G𝐺G et l’espace métrique CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0) associé X𝑋X

On considère un groupe algébrique linéaire 𝐆𝐆{\bf G} connexe, réductif, défini sur 𝕂𝕂\mathbb{K} (par exemple 𝐆=GLn𝐆subscriptGL𝑛{\bf G}=\mathrm{GL}_{n}). Dans le cas où 𝕂=𝕂\mathbb{K}=\mathbb{R}, on suppose que G𝐺G est un sous-groupe fermé de 𝐆()𝐆{\bf G}(\mathbb{R}) contenant sa composante neutre 𝐆()0𝐆superscript0{\bf G}(\mathbb{R})^{0}. Si 𝕂𝕂\mathbb{K}\neq\mathbb{R}, on suppose que G=𝐆(𝕂)𝐺𝐆𝕂G={\bf G}(\mathbb{K}). On renvoie à [Borel2] pour la définition et un résumé des propriétés des groupes algébriques réductifs sur un corps quelconque.

Le groupe G𝐺G est muni de la topologie induite par celle de 𝕂𝕂\mathbb{K}. C’est un groupe topologique métrisable, localement compact, dénombrable à l’infini.

Dans le cas où le corps 𝕂𝕂\mathbb{K} est archimédien, on note X𝑋X l’espace symétrique riemannien sans facteur compact associé à G𝐺G. On renvoie à [Hel] et à [Ebe] pour les propriétés utilisés ci-dessous des groupes de Lie réels réductifs et de leurs espaces symétriques associés ([Borel1, 24.6] permet de se ramener au cas des groupes G𝐺G connexes). Rappelons que X=G/K𝑋𝐺𝐾X=G/K, où K𝐾K est un sous-groupe compact maximal de G𝐺G, et que cette variété est munie de la métrique riemannienne induite par une métrique sur G𝐺G invariante à gauche par G𝐺G et à droite par K𝐾K.

Dans le cas non archimédien, on note X𝑋X l’immeuble de Bruhat-Tits de 𝐆𝐆{\bf G} sur 𝕂𝕂\mathbb{K} [Tits, Sec. 2], qui est un immeuble affine localement compact. Pour la définition et les propriétés des immeubles affines (aussi appelés euclidiens), d’un point de vue métrique, on renvoie par exemple à [Par2], où on pourra aussi trouver une construction simple de l’immeuble de Bruhat-Tits de 𝐆=SLn𝐆subscriptSL𝑛{\bf G}=\mathrm{SL}_{n}, ou à [Rou] (voir aussi [Bro, Chap VI et Chap. V, Sec. 8]). Pour l’immeuble de Bruhat-Tits associé à un groupe réductif 𝐆𝐆{\bf G} plus général et pour ses propriétés utilisées et non démontrées ci-dessous, on renvoie pour une bonne introduction à [Rou], et à [Tits], et pour référence complète à [BrTi].

Les espaces symétriques et les immeubles euclidiens ont de nombreuses propriétés en commun. Dans ce qui suit on a choisi de traiter autant que possible les deux cas simultanément (les quelques références données ponctuellement concernent le cas non archimédien, moins connu). Le vocabulaire et les notations sont choisis par analogie avec le cas archimédien (cas des espaces symétriques), et peut donc différer de ce qu’on trouve usuellement dans la littérature sur les immeubles.

Dans tous les cas, donc, X𝑋X est un espace métrique CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0) propre, et G𝐺G agit continûment, proprement (pas nécessairement fidèlement), isométriquement, cocompactement sur X𝑋X. Les hypothèses de la section 1.1 précédente sont donc satisfaites (et on en reprendra les notations).

Notons que, dans le cas où 𝐆𝐆{\bf G} n’est pas semisimple (par exemple pour 𝐆=GLn𝐆subscriptGL𝑛{\bf G}=\mathrm{GL}_{n}), l’espace X𝑋X possède ici un facteur euclidien translaté par G𝐺G non trivial X0subscript𝑋0X_{0}, correspondant au centre de 𝐆𝐆{\bf G}.

1.2.3. Tore A𝐴A et plat standard 𝔸𝔸\mathbb{A}

Un plat d’un espace métrique CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0) désigne un sous-espace convexe fermé de X𝑋X, isométrique à un espace euclidien msuperscript𝑚\mathbb{R}^{m}. Les plats maximaux (i.e. de dimension maximale) d’un immeuble affine sont ses appartements.

On fixe une fois pour toute un plat maximal 𝔸𝔸\mathbb{A} de X𝑋X. Il lui correspond un tore déployé sur 𝕂𝕂\mathbb{K} maximal 𝐀𝐀{\bf A} de 𝐆𝐆{\bf G}, de telle manière que le tore A=𝐀(𝕂)G𝐴𝐀𝕂𝐺A={\bf A}(\mathbb{K})\cap G de G𝐺G stabilise le plat 𝔸𝔸\mathbb{A}, et agit dessus par translations (cocompactement). Par exemple, dans le cas où 𝐆=GLn𝐆subscriptGL𝑛{\bf G}=\mathrm{GL}_{n}, on prend le plat 𝔸𝔸\mathbb{A} associé au tore 𝐀=Diag𝐀Diag{\bf A}={\bf\mathrm{Diag}} des matrices diagonales.

On choisit un point x0subscript𝑥0{x_{0}} de 𝔸𝔸\mathbb{A} (dans le cas non archimédien, un point spécial). On identifiera 𝔸𝔸\mathbb{A} et son espace vectoriel sous-jacent en prenant x0subscript𝑥0{x_{0}} comme origine. On notera ν:A𝔸:𝜈𝐴𝔸\nu:A\longrightarrow\mathbb{A} le morphisme qui à a𝑎a associe le vecteur de la translation correspondante. On peut relier relier ce vecteur de translation aux caractères sur le tore A𝐴A, de la manière suivante. On note X(𝐀)=Hom(𝐀,GL1)superscript𝑋𝐀Hom𝐀subscriptGL1X^{*}({\bf A})=\mathrm{Hom}({\bf A},\mathrm{GL}_{1}) le groupe des caractères du tore 𝐀𝐀{\bf A}. On rappelle (cf [Tits, 0.2]) que tout caractère χX(𝐀)𝜒superscript𝑋𝐀\chi\in X^{*}({\bf A}) induit une forme linéaire sur 𝔸𝔸\mathbb{A}, qu’on notera également χ𝜒\chi, telle que χ(ν(a))=log|χ(a)|𝜒𝜈𝑎𝜒𝑎\chi(\nu(a))=\log\left|\chi(a)\right| pour tout a𝑎a de A𝐴A. Par exemple, pour 𝐆=GLn𝐆subscriptGL𝑛{\bf G}=\mathrm{GL}_{n}, si pour i=1,,n𝑖1𝑛i=1,\ldots,n on note εi:𝐀GL1:subscript𝜀𝑖maps-to𝐀subscriptGL1\varepsilon_{i}:{\bf A}\mapsto\mathrm{GL}_{1} le caractère Diag(a1,,an)aimaps-toDiagsubscript𝑎1subscript𝑎𝑛subscript𝑎𝑖\mathrm{Diag}(a_{1},\ldots,a_{n})\mapsto a_{i}, on peut identifier 𝔸𝔸\mathbb{A} à nsuperscript𝑛\mathbb{R}^{n} (euclidien) de telle sorte que les εisubscript𝜀𝑖\varepsilon_{i}, vus comme formes linéaires sur 𝔸𝔸\mathbb{A}, soient les coordonnées canoniques. L’action de a=Diag(a1,,an)A𝑎Diagsubscript𝑎1subscript𝑎𝑛𝐴a=\mathrm{Diag}(a_{1},\ldots,a_{n})\in A sur 𝔸=n𝔸superscript𝑛\mathbb{A}=\mathbb{R}^{n} est alors la translation de vecteur ν(a)=(log|ai|)1in𝜈𝑎subscriptsubscript𝑎𝑖1𝑖𝑛\nu(a)=(\log\left|a_{i}\right|)_{1\leq i\leq n}.

1.2.4. Racines et chambre de Weyl

Soit ΦX(𝐀)𝔸Φsuperscript𝑋𝐀superscript𝔸\Phi\subset X^{*}({\bf A})\subset\mathbb{A}^{*} le système de racines de 𝐆𝐆{\bf G} relatives au tore 𝐀𝐀{\bf A} [Borel2, 6.3]. Les murs de 𝔸𝔸\mathbb{A} sont les noyaux des racines φ𝜑\varphi de ΦΦ\Phi. Le groupe de Weyl W𝑊W est le groupe (fini) d’isométries de 𝔸𝔸\mathbb{A} engendré par les réflexions par rapport aux murs. Il fixe point par point l’intersection 𝔸0subscript𝔸0\mathbb{A}_{0} des murs de 𝔸𝔸\mathbb{A} (qui est le facteur euclidien G𝐺G-translaté maximal X0subscript𝑋0X_{0} de X𝑋X). On choisit une chambre de Weyl {\mathfrak{C}} de 𝔸𝔸\mathbb{A} (dite standard) (i.e. une composante connexe du complémentaire de la réunion des murs) et on note Φ+superscriptΦ\Phi^{+} l’ensemble des racines positives (i.e. positives sur {\mathfrak{C}}) et ΛΛ\Lambda l’ensemble de racines simples (i.e. les racines positives qui ne se décompose pas en somme non triviale de racines positives) correspondants.

Par exemple, dans le cas où 𝐆=GLn𝐆subscriptGL𝑛{\bf G}=\mathrm{GL}_{n} (avec les choix ci-dessus), l’ensemble des racines est Φ={φij=εiεj,ij}Φformulae-sequencesubscript𝜑𝑖𝑗subscript𝜀𝑖subscript𝜀𝑗𝑖𝑗\Phi=\{\varphi_{ij}=\varepsilon_{i}-\varepsilon_{j},\ i\neq j\}. On prend comme chambre de Weyl standard ¯={(x1,,xn)n|x1xn}¯conditional-setsubscript𝑥1subscript𝑥𝑛superscript𝑛subscript𝑥1subscript𝑥𝑛\overline{\mathfrak{C}}=\{(x_{1},\ldots,x_{n})\in\mathbb{R}^{n}\ |\ x_{1}\geq\cdots\geq x_{n}\}. Alors l’ensemble des racines simples est Λ={φi,i+1, 1i<n1}Λsubscript𝜑𝑖𝑖1.1𝑖𝑛1\Lambda=\{\varphi_{i,i+1},\ 1\leq i<n-1\}.

1.2.5. Sous-tores AIsubscript𝐴𝐼A_{I}, plats 𝔸Isubscript𝔸𝐼\mathbb{A}_{I} et facettes Isubscript𝐼{\mathfrak{C}}_{I} standards

Les facettes de la chambre standard {\mathfrak{C}} sont paramétrées par les parties I𝐼I de ΛΛ\Lambda, de la manière suivante. Pour une partie I𝐼I de ΛΛ\Lambda, on note 𝔸Isubscript𝔸𝐼\mathbb{A}_{I} le sous-espace vectoriel φIkerφsubscript𝜑𝐼kernel𝜑\cap_{\varphi\in I}\ker\varphi de 𝔸𝔸\mathbb{A} et Isubscript𝐼{\mathfrak{C}}_{I} la facette ouverte de {\mathfrak{C}} associée (telle que v𝔸𝑣𝔸v\in\mathbb{A} est dans Isubscript𝐼{\mathfrak{C}}_{I} si et seulement si φI,φ(v)=0formulae-sequencefor-all𝜑𝐼𝜑𝑣0\forall\varphi\in I,\ \varphi(v)=0 et φΛI,φ(v)>0formulae-sequencefor-all𝜑Λ𝐼𝜑𝑣0\forall\varphi\in\Lambda-I,\ \varphi(v)>0). On note 𝐀Isubscript𝐀𝐼{\bf A}_{I} le sous-tore de 𝐀𝐀{\bf A} formé par la composante neutre de φIkerφsubscript𝜑𝐼kernel𝜑\cap_{\varphi\in I}\ker\varphi. Le groupe AI=𝐀I(𝕂)Gsubscript𝐴𝐼subscript𝐀𝐼𝕂𝐺A_{I}={\bf A}_{I}(\mathbb{K})\cap G agit sur le plat standard 𝔸𝔸\mathbb{A} par des translations de vecteurs formant un sous-groupe cocompact de 𝔸Isubscript𝔸𝐼\mathbb{A}_{I} (cela découle par exemple de [Mar][2.4.2]). On notera v=vI+vI𝑣superscript𝑣𝐼subscript𝑣𝐼v=v^{I}+v_{I} la décomposition d’un vecteur v𝑣v de 𝔸𝔸\mathbb{A} suivant la somme directe orthogonale 𝔸=𝔸I𝔸I𝔸direct-sumsuperscript𝔸𝐼subscript𝔸𝐼\mathbb{A}=\mathbb{A}^{I}\oplus\mathbb{A}_{I}.

1.2.6. Suites I𝐼I-fondamentales

Une suite (vi)isubscriptsubscript𝑣𝑖𝑖(v_{i})_{i\in\mathbb{N}} dans ¯¯\overline{\mathfrak{C}} sera dite I𝐼I-fondamentale si viIsubscript𝑣𝑖subscript𝐼v_{i}\in{\mathfrak{C}}_{I} pour tout i𝑖i et, pour toute racine φI𝜑𝐼\varphi\notin I, on a φ(vi)+𝜑subscript𝑣𝑖\varphi(v_{i})\rightarrow{+\infty} . Une suite (ai)isubscriptsubscript𝑎𝑖𝑖(a_{i})_{i} dans A𝐴A est dite I𝐼I-fondamentale si la suite des vecteurs de translation vi=ν(ai)subscript𝑣𝑖𝜈subscript𝑎𝑖v_{i}=\nu(a_{i}) des aisubscript𝑎𝑖a_{i} l’est (i.e. pour tout φI𝜑𝐼\varphi\in I, |φ(ai)|=1𝜑subscript𝑎𝑖1\left|\varphi(a_{i})\right|=1 et, pour tout φI𝜑𝐼\varphi\notin I, |φ(ai)|1𝜑subscript𝑎𝑖1\left|\varphi(a_{i})\right|\geq 1 pour tout i𝑖i et |φ(ai)|+𝜑subscript𝑎𝑖\left|\varphi(a_{i})\right|\rightarrow{+\infty}).

1.2.7. Immeuble sphérique et facettes à l’infini de X𝑋X

Le bord à l’infini Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X de X𝑋X est une réalisation géométrique de l’immeuble sphérique combinatoire de Tits ΔΔ\Delta de 𝐆𝐆{\bf G} (voir [Rou, 11.7], [Bro, VI, 9E], [Par2]). Les facettes f𝑓f de cet immeuble (qui sont les bords des facettes des chambres de Weyl de X𝑋X) sont en bijection avec les 𝕂𝕂\mathbb{K}-sous-groupes paraboliques 𝐏fsubscript𝐏𝑓{\bf P}_{f} de 𝐆𝐆{\bf G}, et on a StabG(f)=𝐏f(𝕂)GsubscriptStab𝐺𝑓subscript𝐏𝑓𝕂𝐺\mathrm{Stab}_{G}(f)={\bf P}_{f}(\mathbb{K})\cap G (noté Pfsubscript𝑃𝑓P_{f}) [Serre, 3.1]. Le stabilisateur Pαsubscript𝑃𝛼P_{\alpha} dans G𝐺G d’un point α𝛼\alpha de Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X fixe point par point (l’adhérence de) la facette ouverte f(α)𝑓𝛼f(\alpha) de cet immeuble contenant α𝛼\alpha, en particulier Pα=Pf(α)subscript𝑃𝛼subscript𝑃𝑓𝛼P_{\alpha}=P_{f(\alpha)}. On appelera régularité de α𝛼\alpha la dimension de la facette f(α)𝑓𝛼f(\alpha). On dit qu’une facette f𝑓f domine une facette fsuperscript𝑓f^{\prime} si l’adhérence de f𝑓f contient fsuperscript𝑓f^{\prime}. L’étoile ΔfsubscriptΔ𝑓\Delta_{f} (ou link, ou immeuble résiduel) de f𝑓f, est la réunion des facettes dominant f𝑓f. Deux points α𝛼\alpha et β𝛽\beta de Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X sont opposés (cf no1.1.1) si et seulement si les facettes correspondantes de l’immeuble sphérique à l’infini sont opposées, si et seulement si les 𝕂𝕂\mathbb{K}-sous-groupes paraboliques de 𝐆𝐆{\bf G} correspondants sont opposés, c’est-à-dire que leur intersection 𝐆αβ=𝐏α𝐏βsubscript𝐆𝛼𝛽subscript𝐏𝛼subscript𝐏𝛽{\bf G}_{\alpha\beta}={\bf P}_{\alpha}\cap{\bf P}_{\beta} est un groupe réductif, qui est alors un sous-groupe de Levi de chacun d’eux [Serre, 3.1.5]. On a Gαβ=𝐆αβ(𝕂)Gsubscript𝐺𝛼𝛽subscript𝐆𝛼𝛽𝕂𝐺G_{\alpha\beta}={\bf G}_{\alpha\beta}(\mathbb{K})\cap G. Le groupe Pαsubscript𝑃𝛼P_{\alpha} agit transitivement sur l’ensemble des points opposés à α𝛼\alpha.

1.2.8. Projection sur un facteur de Levi et groupe Uαsubscript𝑈𝛼U_{\alpha}

On note 𝐔αsubscript𝐔𝛼{\bf U}_{\alpha} le radical unipotent du 𝕂𝕂\mathbb{K}-sous-groupe parabolique 𝐏αsubscript𝐏𝛼{\bf P}_{\alpha}, et Uα=𝐔α(𝕂)subscript𝑈𝛼subscript𝐔𝛼𝕂U_{\alpha}={\bf U}_{\alpha}(\mathbb{K}) qu’on appelera le radical unipotent de Pαsubscript𝑃𝛼P_{\alpha}. Si βX𝛽subscript𝑋\beta\in\partial_{\infty}X est un point opposé à α𝛼\alpha, on a une projection naturelle pαβsubscript𝑝𝛼𝛽p_{\alpha\beta} de Pαsubscript𝑃𝛼P_{\alpha} sur Gαβsubscript𝐺𝛼𝛽G_{\alpha\beta}. C’est un morphisme de noyau Uαsubscript𝑈𝛼U_{\alpha}, égal à l’identité sur Gαβsubscript𝐺𝛼𝛽G_{\alpha\beta}, qui correspond la décomposition en produit semi-direct Pα=GαβUαsubscript𝑃𝛼subscript𝐺𝛼𝛽subscript𝑈𝛼P_{\alpha}=G_{\alpha\beta}U_{\alpha}. Si βsuperscript𝛽\beta^{\prime} est un autre point opposé à α𝛼\alpha dans Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X, alors il existe g𝑔g dans Pαsubscript𝑃𝛼P_{\alpha} (qu’on peut supposer dans Uαsubscript𝑈𝛼U_{\alpha}) tel que β=gβsuperscript𝛽𝑔𝛽\beta^{\prime}=g\beta, et les projections associées sont alors conjuguées (on a pαβ=igpαβsubscript𝑝𝛼superscript𝛽subscript𝑖𝑔subscript𝑝𝛼𝛽p_{\alpha\beta^{\prime}}=i_{g}\circ p_{\alpha\beta}).

1.2.9. Sous-groupes paraboliques standards

Soit IΛ𝐼ΛI\subset\Lambda un sous-ensemble de racines simples. On note cIsubscript𝑐𝐼c_{I} ou Isubscriptsubscript𝐼\partial_{\infty}{\mathfrak{C}}_{I} (resp. cIsuperscriptsubscript𝑐𝐼c_{I}^{-}) la facette (ouverte) à l’infini de Isubscript𝐼{\mathfrak{C}}_{I} (resp. de Isubscript𝐼-{\mathfrak{C}}_{I}). On note PI+superscriptsubscript𝑃𝐼P_{I}^{+} ou PIsubscript𝑃𝐼P_{I} le sous-groupe parabolique (standard) PcIsubscript𝑃subscript𝑐𝐼P_{c_{I}}, et UI+subscriptsuperscript𝑈𝐼U^{+}_{I} ou UIsubscript𝑈𝐼U_{I} son radical unipotent. De même, on note PI=PcIsuperscriptsubscript𝑃𝐼subscript𝑃superscriptsubscript𝑐𝐼P_{I}^{-}=P_{c_{I}^{-}} et UIsubscriptsuperscript𝑈𝐼U^{-}_{I} son radical unipotent, et GI=PI+PIsubscript𝐺𝐼superscriptsubscript𝑃𝐼superscriptsubscript𝑃𝐼G_{I}=P_{I}^{+}\cap P_{I}^{-}. Le tore AIsubscript𝐴𝐼A_{I} est central dans GIsubscript𝐺𝐼G_{I}.

1.2.10. Structure des faisceaux

Si α𝛼\alpha et β𝛽\beta sont deux points opposés de Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X, il existe gG𝑔𝐺g\in G et un unique IΛ𝐼ΛI\subset\Lambda tel que gαcI𝑔𝛼subscript𝑐𝐼g\alpha\in c_{I} et gβcI𝑔𝛽superscriptsubscript𝑐𝐼g\beta\in c_{I}^{-}. Alors gPαg1=PI𝑔subscript𝑃𝛼superscript𝑔1subscript𝑃𝐼gP_{\alpha}g^{-1}=P_{I} et gPβg1=PI𝑔subscript𝑃𝛽superscript𝑔1superscriptsubscript𝑃𝐼gP_{\beta}g^{-1}=P_{I}^{-} (et gGαβg1=GI𝑔subscript𝐺𝛼𝛽superscript𝑔1subscript𝐺𝐼gG_{\alpha\beta}g^{-1}=G_{I}, etc.). On note 𝔸αβ=g1𝔸Isubscript𝔸𝛼𝛽superscript𝑔1subscript𝔸𝐼\mathbb{A}_{\alpha\beta}=g^{-1}\mathbb{A}_{I}. On a alors une décomposition naturelle en produit Xαβ=𝔸αβ×Xαβsubscript𝑋𝛼𝛽subscript𝔸𝛼𝛽superscript𝑋𝛼𝛽X_{\alpha\beta}=\mathbb{A}_{\alpha\beta}\times X^{\alpha\beta} (qui ne dépend pas du choix de g𝑔g). Le groupe Gαβsubscript𝐺𝛼𝛽G_{\alpha\beta} préserve cette décomposition et agit par translations sur 𝔸αβsubscript𝔸𝛼𝛽\mathbb{A}_{\alpha\beta}. Le bord à l’infini Sαβsubscript𝑆𝛼𝛽S_{\alpha\beta} de 𝔸αβsubscript𝔸𝛼𝛽\mathbb{A}_{\alpha\beta} est la sphère de Levi (cf [Serre]) de Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X associée au sous-groupe de Levi 𝐆αβsubscript𝐆𝛼𝛽{\bf G}_{\alpha\beta} de 𝐏αsubscript𝐏𝛼{\bf P}_{\alpha}, et f=f(α)=g1cI𝑓𝑓𝛼superscript𝑔1subscript𝑐𝐼f=f(\alpha)=g^{-1}c_{I} est un simplexe maximal de Sαβsubscript𝑆𝛼𝛽S_{\alpha\beta}. L’étoile ΔfsubscriptΔ𝑓\Delta_{f} de f𝑓f (union des facettes fermées contenant f𝑓f) est incluse dans Xαβsubscriptsubscript𝑋𝛼𝛽\partial_{\infty}X_{\alpha\beta}. Le bord à l’infini de Xαβsuperscript𝑋𝛼𝛽X^{\alpha\beta} s’identifie à (une réalisation géométrique de) ΔfsubscriptΔ𝑓\Delta_{f}.

1.2.11. Décomposition UIGIUI+subscriptsuperscript𝑈𝐼subscript𝐺𝐼subscriptsuperscript𝑈𝐼U^{-}_{I}{}G_{I}U^{+}_{I}{}

Le résultat classique suivant signifie géométriquement que, pour deux points du bord opposés α𝛼\alpha et β𝛽\beta, l’application nnβmaps-to𝑛𝑛𝛽n\mapsto n\beta est un homéomorphisme de Uαsubscript𝑈𝛼U_{\alpha} sur l’ensemble des points du bord opposés à α𝛼\alpha, qui forment un ouvert dans leur orbite.

Proposition 1.

Soit IΛ𝐼ΛI\subset\Lambda. L’application

φ:UI×GI×UI+G(u,r,n)urn:𝜑subscriptsuperscript𝑈𝐼subscript𝐺𝐼subscriptsuperscript𝑈𝐼𝐺𝑢𝑟𝑛maps-to𝑢𝑟𝑛{\varphi}\,:\begin{array}[]{ccc}{U^{-}_{I}{}\times{}G_{I}\times{}U^{+}_{I}}{}&\rightarrow&{G}\\ {(u{},r,n{})}&\mapsto&{u{}rn}{}\end{array}

est un homéomorphisme sur son image 𝒪Isubscript𝒪𝐼{\mathcal{O}}_{I}, qui est un ouvert [BoTi, 4.2].∎

1.2.12. Contraction par conjugaison

Le fait classique suivant est fondamental pour l’étude de la topologie des orbites de G𝐺G dans R=Hom(Γ,G)RHomΓ𝐺\mathrm{R}=\mathrm{Hom}(\Gamma,G).

Proposition 2.

Soit I𝐼I un sous-ensemble de racines simples.

  1. (1)

    La projection pI:PIGI:subscript𝑝𝐼subscript𝑃𝐼subscript𝐺𝐼p_{I}:P_{I}\longrightarrow G_{I} est limite de conjugaisons : plus précisément, soit a𝑎a dans AIsubscript𝐴𝐼A_{I} tel que le vecteur de translation ν(a)𝜈𝑎\nu(a) de 𝔸𝔸\mathbb{A} associé soit dans Isubscript𝐼-{\mathfrak{C}}_{I} (i.e. tel que φΛI,|φ(a)|<1formulae-sequencefor-all𝜑Λ𝐼𝜑𝑎1\forall\varphi\in\Lambda-I,\ \left|\varphi(a)\right|<1), alors, pour tout g𝑔g dans PIsubscript𝑃𝐼P_{I}, la suite aigaisuperscript𝑎𝑖𝑔superscript𝑎𝑖a^{i}ga^{-i} tend vers pI(g)subscript𝑝𝐼𝑔p_{I}(g) quand l’entier i𝑖i tend vers l’infini.

  2. (2)

    Soit ρ𝜌\rho dans RR\mathrm{R} tel que ρ(Γ)𝜌Γ\rho(\Gamma) est inclus dans PIsubscript𝑃𝐼P_{I}. La représentation ρI=pIρsubscript𝜌𝐼subscript𝑝𝐼𝜌\rho_{I}=p_{I}\circ\rho est dans l’adhérence de l’orbite AIρsubscript𝐴𝐼𝜌A_{I}\cdot\rho.

Proof.

Un tel a𝑎a existe car ν(AI)𝜈subscript𝐴𝐼\nu(A_{I}) est cocompact dans 𝔸Isubscript𝔸𝐼\mathbb{A}_{I} et Isubscript𝐼{\mathfrak{C}}_{I} est un cône convexe ouvert de 𝔸Isubscript𝔸𝐼\mathbb{A}_{I}. Alors a𝑎a centralise GIsubscript𝐺𝐼G_{I} et contracte UIsubscript𝑈𝐼U_{I} (voir par exemple la proposition 3 ci-dessous, en notant que aisuperscript𝑎𝑖a^{-i} est alors une suite I𝐼I-fondamentale, pour une preuve détaillée dans un cadre plus général ). Le second point découle immédiatement du premier. ∎

La propriété de contraction plus forte suivante permet de comprendre l’action (par conjugaison) des suites I𝐼I-fondamentales sur les ouverts UIGIUI+subscriptsuperscript𝑈𝐼subscript𝐺𝐼subscriptsuperscript𝑈𝐼U^{-}_{I}{}G_{I}U^{+}_{I}{} de G𝐺G (voir proposition 22). On note gh=ghg1𝑔𝑔superscript𝑔1g\cdot h=ghg^{-1} l’action par conjugaison de G𝐺G sur lui-même.

Proposition 3.

Soit (ai)isubscriptsubscript𝑎𝑖𝑖(a_{i})_{i\in\mathbb{N}} une suite I𝐼I-fondamentale dans A𝐴A. Pour toute suite (ni)isubscriptsubscript𝑛𝑖𝑖(n_{i})_{i} de UIsubscript𝑈𝐼U_{I} (resp. (ui)isubscriptsubscript𝑢𝑖𝑖(u_{i})_{i} de UIsuperscriptsubscript𝑈𝐼U_{I}^{-}) bornée, on a ai1ni1superscriptsubscript𝑎𝑖1subscript𝑛𝑖1a_{i}^{-1}\cdot n_{i}\rightarrow 1 (resp. aiui1subscript𝑎𝑖subscript𝑢𝑖1a_{i}\cdot u_{i}\rightarrow 1) quand i+𝑖i\longrightarrow{+\infty}.

Proof.

Notons 𝖌𝖌\bm{\mathfrak{g}} l’algèbre de Lie de 𝐆𝐆{\bf G} et 𝔤=𝖌(𝕂)𝔤𝖌𝕂{\mathfrak{g}}=\bm{\mathfrak{g}}(\mathbb{K}). Notons 𝖚Isubscript𝖚𝐼\bm{\mathfrak{u}}_{I} l’algèbre de Lie de 𝐔Isubscript𝐔𝐼{\bf U}_{I} et 𝔲I=𝖚I(𝕂)subscript𝔲𝐼subscript𝖚𝐼𝕂{\mathfrak{u}}_{I}=\bm{\mathfrak{u}}_{I}(\mathbb{K}). Il existe f:UI𝔲I:𝑓subscript𝑈𝐼subscript𝔲𝐼f:U_{I}\longrightarrow{\mathfrak{u}}_{I} un homéomorphisme A𝐴A-équivariant (i.e. f(au)=Ad(a)(f(u))𝑓𝑎𝑢Ad𝑎𝑓𝑢f(a\cdot u)=\mathrm{Ad}(a)(f(u))) [Mar, 1.3.3] (pour 𝕂=𝕂\mathbb{K}=\mathbb{R} c’est l’inverse de l’application exponentielle). On note 𝔤φsubscript𝔤𝜑{\mathfrak{g}}_{\varphi} l’ensemble des Z𝔤𝑍𝔤Z\in{\mathfrak{g}} tels que Ad(a)Z=φ(a)ZAd𝑎𝑍𝜑𝑎𝑍\mathrm{Ad}(a)Z=\varphi(a)Z pour tout a𝑎a de A𝐴A. Alors 𝔲I=φΦI+𝔤φsubscript𝔲𝐼subscriptdirect-sum𝜑subscriptsuperscriptΦ𝐼subscript𝔤𝜑{\mathfrak{u}}_{I}=\oplus_{\varphi\in\Phi^{+}_{I}}{\mathfrak{g}}_{\varphi}, où ΦI+subscriptsuperscriptΦ𝐼\Phi^{+}_{I} est l’ensemble des racines positives qui ne sont pas combinaison linéaire d’éléments de I𝐼I. Notons Zi=f(ni)subscript𝑍𝑖𝑓subscript𝑛𝑖Z_{i}=f(n_{i}) et Zi=φΦI+Ziφsubscript𝑍𝑖subscript𝜑subscriptsuperscriptΦ𝐼superscriptsubscript𝑍𝑖𝜑Z_{i}=\sum_{\varphi\in\Phi^{+}_{I}}Z_{i}^{\varphi} la décomposition de Zisubscript𝑍𝑖Z_{i} suivant la décomposition 𝔲I=φΦI+𝔤φsubscript𝔲𝐼subscriptdirect-sum𝜑subscriptsuperscriptΦ𝐼subscript𝔤𝜑{\mathfrak{u}}_{I}=\oplus_{\varphi\in\Phi^{+}_{I}}{\mathfrak{g}}_{\varphi}. Alors f(ai1ni)=Ad(ai1)Zi=φΦI+φ(ai)1Ziφ𝑓superscriptsubscript𝑎𝑖1subscript𝑛𝑖Adsuperscriptsubscript𝑎𝑖1subscript𝑍𝑖subscript𝜑subscriptsuperscriptΦ𝐼𝜑superscriptsubscript𝑎𝑖1superscriptsubscript𝑍𝑖𝜑f(a_{i}^{-1}\cdot n_{i})=\mathrm{Ad}(a_{i}^{-1})Z_{i}=\sum_{\varphi\in\Phi^{+}_{I}}\varphi(a_{i})^{-1}Z_{i}^{\varphi}. Or, pour tout φΦI+𝜑subscriptsuperscriptΦ𝐼\varphi\in\Phi^{+}_{I}, la suite (Ziφ)isubscriptsuperscriptsubscript𝑍𝑖𝜑𝑖(Z_{i}^{\varphi})_{i} est bornée, et |φ(ai)1|0𝜑superscriptsubscript𝑎𝑖10\left|\varphi(a_{i})^{-1}\right|\longrightarrow 0 (car φ𝜑\varphi est combinaison linéaire positive d’éléments de ΛIΛ𝐼\Lambda-I). On a donc que f(ai1ni)0𝑓superscriptsubscript𝑎𝑖1subscript𝑛𝑖0f(a_{i}^{-1}\cdot n_{i})\rightarrow 0 dans 𝔲Isubscript𝔲𝐼{\mathfrak{u}}_{I}, et donc que ai1ni1superscriptsubscript𝑎𝑖1subscript𝑛𝑖1a_{i}^{-1}\cdot n_{i}\rightarrow 1 dans UIsubscript𝑈𝐼U_{I}. ∎

2. Actions non-paraboliques en géométrie CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0)

Dans cette section, on se place dans le cadre général où G𝐺G est un groupe métrisable localement compact, dénombrable à l’infini, agissant sur un espace X𝑋X métrique CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0) propre (voir section 1.1 pour les notations et propriétés utilisées).

2.1. Déplacement d’une action

Définition 4.

Soit ρ:ΓG:𝜌Γ𝐺\rho:\Gamma\longrightarrow G une action de ΓΓ\Gamma sur X𝑋X. On appelle fonction de déplacement de ρ𝜌\rho (relativement à la partie génératrice S𝑆S) et on note dρsubscript𝑑𝜌d_{\rho} la fonction convexe continue de X𝑋X dans [0,+[[0,{+\infty}[

dρ:xsSd(x,ρ(s)x)2.:subscript𝑑𝜌maps-to𝑥subscript𝑠𝑆𝑑superscript𝑥𝜌𝑠𝑥2d_{\rho}:x\mapsto\sqrt{\sum_{s\in S}d(x,\rho(s)x)^{2}}.

On appelle minimum de déplacement de ρ𝜌\rho (relativement à la partie génératrice S𝑆S) et on note λ(ρ)𝜆𝜌\lambda(\rho) la borne inférieure de dρsubscript𝑑𝜌d_{\rho} sur X𝑋X, et ensemble de déplacement minimal de ρ𝜌\rho (relativement à la partie génératrice S𝑆S) le convexe fermé Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho), éventuellement vide, formé des points de X𝑋Xdρsubscript𝑑𝜌d_{\rho} atteint son minimum.

Remarques.

On peut voir dρsubscript𝑑𝜌d_{\rho}, λ(ρ)𝜆𝜌\lambda(\rho) et Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) comme une généralisation des notions analogues classiques pour une isométrie individuelle gIsom(X)𝑔Isom𝑋g\in{\mathrm{Isom}\>}(X) [BrHa, II,6.1] (et ces notions coïncident si S𝑆S est réduite à un seul élément s𝑠s et g=ρ(s)𝑔𝜌𝑠g=\rho(s)). Attention (si S𝑆S n’est pas réduite à un élément), Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) n’est a priori pas stable par ρ(Γ)𝜌Γ\rho(\Gamma). Le centralisateur Z(ρ)𝑍𝜌Z(\rho) de ρ𝜌\rho dans G𝐺G préserve Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho). On notera que la fonction λ:R+:𝜆Rsuperscript\lambda:\mathrm{R}\longrightarrow\mathbb{R}^{+} est semicontinue (supérieurement) : si ρiρsubscript𝜌𝑖𝜌{\rho_{i}}\rightarrow\rho, alors lim supλ(ρi)λ(ρ)limit-supremum𝜆subscript𝜌𝑖𝜆𝜌\limsup\lambda({\rho_{i}})\leq\lambda(\rho).

La définition donnée ici diffère légèrement de celle de [Par1] (où dρsubscript𝑑𝜌d_{\rho} est défini par dρ(x)=maxsSd(x,ρ(s)x)subscript𝑑𝜌𝑥subscript𝑠𝑆𝑑𝑥𝜌𝑠𝑥d_{\rho}(x)=\max_{s\in S}d(x,\rho(s)x)). Cela ne change pas les propriétés qu’on y utilisait, car les deux versions sont des fonctions convexes continues équivalentes. Celle-ci est meilleure, notamment car elle passe bien aux produits (voir ci-dessous), et permet de prouver, dans les espaces symétriques, que “Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) non vide” entraîne la complète réductibilité (proposition 18).

Dans le cas où l’espace X𝑋X est euclidien et le groupe G𝐺G agit par translations, la fonction de déplacement dρsubscript𝑑𝜌d_{\rho} est constante (égale à λ(ρ)𝜆𝜌\lambda(\rho)) et Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) est l’espace X𝑋X tout entier. Dans le cas où ρ𝜌\rho préserve un convexe fermé Y𝑌Y, comme la projection sur Y𝑌Y diminue dρsubscript𝑑𝜌d_{\rho}, on a λ(ρ|Y)=λ(ρ)\lambda({\rho}_{|Y})=\lambda(\rho) et Min(ρ|Y)=Min(ρ)Y\mathrm{Min}({\rho}_{|Y})=\mathrm{Min}(\rho)\cap Y. Dans le cas où ρ𝜌\rho préserve une décomposition de X𝑋X en produit X=X1×X2𝑋subscript𝑋1subscript𝑋2X=X_{1}\times{}X_{2}, on note ρ=(ρ1,ρ2)𝜌subscript𝜌1subscript𝜌2\rho=(\rho_{1},\rho_{2}), et on a dρ2=dρ12+dρ22superscriptsubscript𝑑𝜌2superscriptsubscript𝑑subscript𝜌12superscriptsubscript𝑑subscript𝜌22d_{\rho}^{2}=d_{\rho_{1}}^{2}+d_{\rho_{2}}^{2}, d’où λ(ρ)2=λ(ρ1)2+λ(ρ2)2𝜆superscript𝜌2𝜆superscriptsubscript𝜌12𝜆superscriptsubscript𝜌22\lambda(\rho)^{2}=\lambda(\rho_{1})^{2}+\lambda(\rho_{2})^{2} et Min(ρ)=Min(ρ1)×Min(ρ2)Min𝜌Minsubscript𝜌1Minsubscript𝜌2\mathrm{Min}(\rho)=\mathrm{Min}(\rho_{1})\times{}\mathrm{Min}(\rho_{2}).

2.2. Actions non-paraboliques

Les actions (de ΓΓ\Gamma sur X𝑋X) ne possédant pas de point fixe global dans le bord à l’infini Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X de X𝑋X ont des propriétés remarquables, que nous allons voir maintenant. Nous introduisons maintenant la notion de représentation non-parabolique, qui est juste une variante plus pratique de cette notion destinée à couvrir le cas où le G𝐺G-espace X𝑋X possède un facteur translaté non trivial (maximal) X0subscript𝑋0X_{0} (cf 1.1.2). On note alors X=X0×X𝑋subscript𝑋0superscript𝑋X=X_{0}\times{}X^{\prime}.

Définition 5.

On dit qu’une action ρ𝜌\rho de ΓΓ\Gamma sur X𝑋X est non-parabolique si ρ𝜌\rho n’a pas de point fixe global dans XX0subscript𝑋subscriptsubscript𝑋0\partial_{\infty}X-\partial_{\infty}X_{0} (ou, de manière équivalente, dans Xsubscriptsuperscript𝑋\partial_{\infty}X^{\prime}).

Remarquons qu’une représentation est non-parabolique si et seulement si les éléments de la partie génératrice S𝑆S n’ont pas de point fixe commun dans Xsubscriptsuperscript𝑋\partial_{\infty}X^{\prime}.

2.2.1. Liens avec l’irréductibilité et la stabilité pour les groupes réductifs.

Dans le cas où G𝐺G est GLn()subscriptGL𝑛\mathrm{GL}_{n}(\mathbb{R}) agissant sur son espace symétrique X𝑋X associé, une représentation est non-parabolique si et seulement si l’action linéaire sur nsuperscript𝑛\mathbb{R}^{n} associée est irréductible. Dans le cas où G𝐺G est un groupe réductif sur un corps local 𝕂𝕂\mathbb{K}, agissant sur son espace associé X𝑋X (espace symétrique ou immeuble de Bruhat-Tits) (cf. hypothèses et notations de la section 1.2), une représentation ρ𝜌\rho est non-parabolique si et seulement si elle est 𝐆𝐆{\bf G}-irréductible au sens de [Serre, 3.2.1], c’est-à-dire que son image ρ(Γ)𝜌Γ\rho(\Gamma) n’est incluse dans aucun 𝕂𝕂\mathbb{K}-sous-groupe parabolique propre de 𝐆𝐆{\bf G} (en particulier les représentations (d’images) Zariski-denses sont non-paraboliques). Cette notion est donc légèrement plus générale que la notion de représentation (ou S𝑆S-uplet) stable de la théorie géométrique des invariants (i.e. 𝐆ρ𝐆𝜌{\bf G}\cdot\rho fermé de Zariski et Z𝐆(ρ)/Z(𝐆)subscript𝑍𝐆𝜌𝑍𝐆Z_{\bf G}(\rho)/Z({\bf G}) fini), qui équivaut à la condition que ρ(Γ)𝜌Γ\rho(\Gamma) n’est inclus dans aucun sous-groupe parabolique (pas nécessairement défini sur 𝕂𝕂\mathbb{K}) de 𝐆𝐆{\bf G} [Ric, 4.1 et 16.7] (voir aussi par exemple [JoMi]).

2.2.2. Caractérisation via l’ensemble minimal

Si α𝛼\alpha est un point fixe à l’infini de ρ𝜌\rho, alors la fonction de déplacement dρsubscript𝑑𝜌d_{\rho} est décroissante sur tout rayon géodésique allant vers α𝛼\alpha (par convexité). Cela donne la caractérisation fondamentale suivante.

Proposition 6.

Soit ρ𝜌\rho une action de ΓΓ\Gamma sur X𝑋X. Alors sont équivalents :

  1. (1)

    L’action ρ𝜌\rho n’a pas de point fixe à l’infini.

  2. (2)

    La fonction de déplacement dρ:X+:subscript𝑑𝜌𝑋superscriptd_{\rho}:X\longrightarrow\mathbb{R}^{+} est propre.

  3. (3)

    L’ensemble minimal Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) est compact non vide.

En particulier, si G𝐺G agit proprement sur X𝑋X, le centralisateur Z(ρ)𝑍𝜌Z(\rho) de ρ𝜌\rho dans G𝐺G est alors compact. ∎

Remarque 7.

On a que ρ𝜌\rho est non-parabolique si et seulement si l’action ρsuperscript𝜌\rho^{\prime} sur Xsuperscript𝑋X^{\prime} induite est sans points fixes à l’infini, si et seulement si Min(ρ)Minsuperscript𝜌\mathrm{Min}(\rho^{\prime}) est compact non vide. Alors en particulier Min(ρ)=X0×Min(ρ)Min𝜌subscript𝑋0Minsuperscript𝜌\mathrm{Min}(\rho)=X_{0}\times\mathrm{Min}(\rho^{\prime}) est non vide, et, si G𝐺G agit proprement sur X𝑋X et Z(G)𝑍𝐺Z(G) agit cocompactement sur X0subscript𝑋0X_{0}, on a que Z(ρ)/Z(G)𝑍𝜌𝑍𝐺Z(\rho)/Z(G) est compact.

2.3. Action de G𝐺G sur l’espace des actions non-paraboliques

On note maintenant R0(Γ,G)subscriptR0Γ𝐺\mathrm{R}_{0}(\Gamma,G) ou R0subscriptR0\mathrm{R}_{0} le sous-espace de RR\mathrm{R} formé par les représentations de ΓΓ\Gamma dans G𝐺G sans point fixe à l’infini, c’est-à-dire n’ayant pas de point fixe global dans Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X. On note Rnp(Γ,G)subscriptR𝑛𝑝Γ𝐺\mathrm{R}_{np}(\Gamma,G) ou RnpsubscriptR𝑛𝑝\mathrm{R}_{np} le sous-espace de RR\mathrm{R} formé par les représentations non-paraboliques de ΓΓ\Gamma dans G𝐺G. La propriété de base suivante permet de relier la “non propreté” de l’action de G𝐺G au voisinage de ρR𝜌R\rho\in\mathrm{R} avec les points fixes à l’infini de ρ𝜌\rho.

Lemme 8.

On considère une suite (ρi)isubscriptsubscript𝜌𝑖𝑖(\rho_{i})_{i} convergeant vers ρ𝜌\rho dans RR\mathrm{R}, et une suite (gi)isubscriptsubscript𝑔𝑖𝑖(g_{i})_{i} dans G𝐺G telle que la suite des conjugués ρi=giρisubscriptsuperscript𝜌𝑖subscript𝑔𝑖subscript𝜌𝑖\rho^{\prime}_{i}=g_{i}\cdot\rho_{i} reste dans un compact de RR\mathrm{R}. Si pour un (tout) point x𝑥x de X𝑋X, la suite des points gi1xsuperscriptsubscript𝑔𝑖1𝑥g_{i}^{-1}x tend vers un point α𝛼\alpha dans le bord à l’infini de X𝑋X, alors ρ𝜌\rho fixe α𝛼\alpha.

Proof.

Pour γ𝛾\gamma dans ΓΓ\Gamma fixé, le déplacement par ρi(γ)subscript𝜌𝑖𝛾\rho_{i}(\gamma) du point xi=gi1xsubscript𝑥𝑖superscriptsubscript𝑔𝑖1𝑥x_{i}=g_{i}^{-1}x vaut d(xi,ρi(γ)xi)=d(x,ρi(γ)x)𝑑subscript𝑥𝑖subscript𝜌𝑖𝛾subscript𝑥𝑖𝑑𝑥subscriptsuperscript𝜌𝑖𝛾𝑥d(x_{i},\ \rho_{i}(\gamma)x_{i})=d(x,\ \rho^{\prime}_{i}(\gamma)x), donc est borné. Par conséquent ρi(γ)xisubscript𝜌𝑖𝛾subscript𝑥𝑖\rho_{i}(\gamma)x_{i} tend vers α𝛼\alpha. Comme ρi(γ)xisubscript𝜌𝑖𝛾subscript𝑥𝑖\rho_{i}(\gamma)x_{i} tend aussi vers ρ(γ)α𝜌𝛾𝛼\rho(\gamma)\alpha, on a que ρ(γ)α=α𝜌𝛾𝛼𝛼\rho(\gamma)\alpha=\alpha. ∎

Le résultat suivant s’en déduit directement.

Proposition 9.
  1. (1)

    L’espace R0subscriptR0\mathrm{R}_{0} est un ouvert de RR\mathrm{R}.

  2. (2)

    Si G𝐺G agit proprement sur X𝑋X, alors G𝐺G agit proprement sur R0subscriptR0\mathrm{R}_{0}.

Proof.

La première assertion est claire par compacité du bord à l’infini de X𝑋X et continuité de l’action de G𝐺G (une limite de points fixes est un point fixe pour l’action limite). Montrons que G𝐺G agit proprement sur R0subscriptR0\mathrm{R}_{0}. Commme G𝐺G et RR\mathrm{R} sont métrisables, il suffit de voir que, si on a une suite (ρi)isubscriptsubscript𝜌𝑖𝑖(\rho_{i})_{i} qui tend vers ρ𝜌\rho dans R0subscriptR0\mathrm{R}_{0} et une suite (gi)isubscriptsubscript𝑔𝑖𝑖(g_{i})_{i} dans G𝐺G telle que giρisubscript𝑔𝑖subscript𝜌𝑖g_{i}\cdot\rho_{i} tend vers ρsuperscript𝜌\rho^{\prime} dans R0subscriptR0\mathrm{R}_{0}, alors la suite (gi)isubscriptsubscript𝑔𝑖𝑖(g_{i})_{i} possède une valeur d’adhérence dans G𝐺G. Or, dans le cas contraire, pour x0Xsubscript𝑥0𝑋{x_{0}}\in X, la suite gi1x0superscriptsubscript𝑔𝑖1subscript𝑥0g_{i}^{-1}{x_{0}} n’est pas bornée dans X𝑋X (car G𝐺G agit proprement sur X𝑋X), donc, quitte à extraire, gi1x0superscriptsubscript𝑔𝑖1subscript𝑥0g_{i}^{-1}{x_{0}} tend vers α𝛼\alpha dans le bord de X𝑋X, qui est fixé par ρ𝜌\rho par le lemme 8. C’est impossible car ρ𝜌\rho n’a pas de point fixe à l’infini. ∎

Le résultat analogue suivant permet de couvrir le cas où le G𝐺G-espace X𝑋X possède un facteur translaté non trivial (l’espace R0subscriptR0\mathrm{R}_{0} est alors vide), en particulier il s’applique au cas des groupes réductifs non semisimples (cf. section 1.2).

Corollaire 10.

On suppose que le centre Z𝑍Z de G𝐺G agit trivialement sur le facteur Xsuperscript𝑋X^{\prime}. On note G=G/Zsuperscript𝐺𝐺𝑍G^{\prime}=G/Z, qui agit sur Xsuperscript𝑋X^{\prime}. On suppose que l’action de Gsuperscript𝐺G^{\prime} sur Xsuperscript𝑋X^{\prime} est propre.

  1. (1)

    L’espace RnpsubscriptR𝑛𝑝\mathrm{R}_{np} est un ouvert de RR\mathrm{R}.

  2. (2)

    Le groupe Gsuperscript𝐺G^{\prime} agit proprement sur RnpsubscriptR𝑛𝑝\mathrm{R}_{np}.

En particulier Rnp/GsubscriptR𝑛𝑝𝐺\mathrm{R}_{np}/G est séparé et localement compact.

Remarques.

1. Si l’action de G𝐺G sur X𝑋X est cocompacte, minimale (sans sous-espace convexe strict stable) (ce qui est automatique si les géodésiques de X𝑋X sont extensibles [BrHa, II,6.20]), alors Z𝑍Z agit trivialement sur Xsuperscript𝑋X^{\prime} (car Z𝑍Z agit par translations de Clifford sur X𝑋X [BrHa, II,6.16], de directions fixées par G𝐺G, i.e. dans X0subscript𝑋0X_{0}). Si de plus l’action de G𝐺G sur X𝑋X est propre, et Z𝑍Z agit cocompactement sur X0subscript𝑋0X_{0}, alors G/Z𝐺𝑍G/Z agit proprement sur Xsuperscript𝑋X^{\prime}. Les hypothèses sont donc vérifiées dans le cas des groupes réductifs agissant sur leur espace associé (cf. section 1.2).

2. Ce résultat généralise donc le résultat suivant de [Ric, proposition 11.11] : lorsque G𝐺G est un groupe de Lie réductif réel, l’action de G/Z𝐺𝑍G/Z sur le sous-espace (Gn)ssuperscriptsuperscript𝐺𝑛𝑠(G^{n})^{s} des n𝑛n-uplets stables est propre.

3. En particulier, sous les hypothèses ci-dessus, on a donc que si ρ𝜌\rho est non-parabolique, alors Gρ𝐺𝜌G\cdot\rho est fermé dans RR\mathrm{R} et Z(ρ)/Z(G)𝑍𝜌𝑍𝐺Z(\rho)/Z(G) est compact. Dans les groupes réductifs on peut montrer que cette propriété caractérise en fait les représentations non-paraboliques (en utilisant le théorème 23 et le corollaire 17) (à comparer avec la notion de représentation stable, où compact est remplacé par fini, cf 2.2.1).

Proof.

L’action de Z𝑍Z sur R(Γ,G)RΓ𝐺\mathrm{R}(\Gamma,G) est triviale, donc l’action de G𝐺G passe au quotient en une action continue de Gsuperscript𝐺G^{\prime} sur R(Γ,G)RΓ𝐺\mathrm{R}(\Gamma,G). On note μ𝜇\mu la projection canonique de G𝐺G sur Gsuperscript𝐺G^{\prime}, et μsuperscript𝜇\mu^{*} l’application continue de R(Γ,G)RΓ𝐺\mathrm{R}(\Gamma,G) dans R(Γ,G)RΓsuperscript𝐺\mathrm{R}(\Gamma,G^{\prime}) induite, qui est Gsuperscript𝐺G^{\prime}-équivariante. Par la proposition 9, on a que R0(Γ,G)subscriptR0Γsuperscript𝐺\mathrm{R}_{0}(\Gamma,G^{\prime}) est un ouvert, donc Rnp(Γ,G)=(μ)1(R0(Γ,G))subscriptR𝑛𝑝Γ𝐺superscriptsuperscript𝜇1subscriptR0Γsuperscript𝐺\mathrm{R}_{np}(\Gamma,G)=(\mu^{*})^{-1}(\mathrm{R}_{0}(\Gamma,G^{\prime})) est aussi un ouvert. De plus Gsuperscript𝐺G^{\prime} agit proprement sur R0(Γ,G)subscriptR0Γsuperscript𝐺\mathrm{R}_{0}(\Gamma,G^{\prime}), donc aussi sur Rnp(Γ,G)subscriptR𝑛𝑝Γ𝐺\mathrm{R}_{np}(\Gamma,G) [Bou3, III.29, prop. 5]. ∎

3. Représentations complètement réductibles

Dans cette section, on introduit la notion de représentation complètement réductible et on étudie des propriétés géométriques (i.e. de l’action sur l’espace métrique CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0)), naturellement reliées, dont on montre qu’elles sont en fait équivalentes dans le cas des espaces symétriques (prop. 18).

3.1. Dans le cadre général des espaces métriques CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0)

Définition 11.

On dira qu’une représentation ρ𝜌\rho (de ΓΓ\Gamma dans G𝐺G) est complètement réductible (en abrégé, cr) (dans X𝑋X) si elle satisfait la condition suivante : Si un point α𝛼\alpha dans le bord à l’infini Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X de X𝑋X est fixé par ρ𝜌\rho, alors il existe un point β𝛽\beta dans Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X, opposé à α𝛼\alpha, également fixé par ρ𝜌\rho.

En particulier, une représentation non-parabolique est complètement réductible. Cette notion a été introduite et étudiée par J. P. Serre ([Serre]) dans le cadre des groupes agissant sur des immeubles sphériques (par exemple les sous-groupes des groupes algébriques réductifs sur un corps quelconque).

3.1.1. Liens avec la semisimplicité dans les groupes réductifs

Dans le cas où G𝐺G est un groupe réductif sur un corps local agissant sur son espace CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0) associé (notations et hypothèses de la section 1.2), une représentation ρ:ΓG:𝜌Γ𝐺\rho:\Gamma\longrightarrow G est complètement réductible si et seulement si ρ(Γ)𝜌Γ\rho(\Gamma) est 𝐆𝐆{\bf G}-cr au sens de [Serre, 3.2.1]. Dans le cas où G=GLn𝕂𝐺subscriptGL𝑛𝕂G=\mathrm{GL}_{n}\mathbb{K}, une représentation est complètement réductible si et seulement si l’action linéaire sur 𝕂nsuperscript𝕂𝑛\mathbb{K}^{n} associée est semi-simple.

Si la caractéristique du corps 𝕂𝕂\mathbb{K} est nulle, alors ρ𝜌\rho est complètement réductible si et seulement si la composante neutre 𝐇=(ρ(Γ)¯Z)0𝐇superscriptsuperscript¯𝜌Γ𝑍0{\bf H}=(\overline{\rho(\Gamma)}^{Z})^{0} de l’adhérence de Zariski de ρ(Γ)𝜌Γ\rho(\Gamma) est un groupe réductif ([Serre, Proposition 4.2]). Cela correspond donc à ρ𝜌\rho semisimple (comme S𝑆S-uplet de 𝐆𝐆{\bf G}) au sens de [Ric]. Pour 𝕂=𝕂\mathbb{K}=\mathbb{R}, Richardson a introduit une notion naturelle (dépendant seulement de la structure de groupe de Lie réel de G𝐺G) de semisimplicité pour les S𝑆S-uplets dans GSsuperscript𝐺𝑆G^{S} (l’algèbre de Lie 𝔤𝔤{\mathfrak{g}} de G𝐺G est un module semisimple sous le groupe engendré), qui est équivalente à la précédente ([Ric, section 11]), donc à la complète réductibilité. En caractéristique quelconque, dans un corps algébriquement clos, Bate, Martin et Röhrle ont démontré [BMR] que la notion de complète réductibilité est équivalente à la notion de “forte réductivité” de Richardson [Ric].

3.1.2. Sous-espace stable et ensemble minimal

Une propriété d’une action ρ𝜌\rho naturellement reliée à la “réductibilité” est la suivante (correspondant à la définition “ImρIm𝜌\mathrm{Im}\rho réductif” de [Lab] dans le cadre où X𝑋X une variété riemannienne simplement connexe à courbure négative ou nulle) : ρ𝜌\rho stabilise un sous-espace convexe fermé Y𝑌Y de X𝑋X et est non-parabolique dans Y𝑌Y. On a alors la propriété suivante.

Proposition 12 (Ensemble minimal non vide).

On suppose que la représentation ρ𝜌\rho est non-parabolique dans un sous-espace (convexe fermé, stable) Y𝑌Y de X𝑋X. Alors la fonction de déplacement dρsubscript𝑑𝜌d_{\rho} atteint sa borne inférieure, autrement dit Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) est non vide.

Proof.

En effet, on a Min(ρ|Y)=Min(ρ)Y\mathrm{Min}({\rho}_{|Y})=\mathrm{Min}(\rho)\cap Y par projection orthogonale sur le convexe fermé Y𝑌Y. Cet ensemble est non vide car ρ𝜌\rho est non-parabolique dans Y𝑌Y (voir la remarque 7). ∎

3.1.3. Ensemble minimal non vide et topologie des orbites

Voici quelques “bonnes” propriétés élémentaires des actions ρ𝜌\rho telles que Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) est non vide, relativement à la topologie des orbites sous conjugaison.

Proposition 13.

Supposons que X𝑋X est quasi-homogène sous G𝐺G, i. e. que l’action de G𝐺G sur X𝑋X est cocompacte.

  1. (1)

    Pour toute représentation ρ𝜌\rho de RR\mathrm{R}, il existe une représentation ρsuperscript𝜌\rho^{\prime} dans l’adhérence de Gρ𝐺𝜌G\cdot\rho telle que Min(ρ)Minsuperscript𝜌\mathrm{Min}(\rho^{\prime}) est non vide, et λ(ρ)=λ(ρ)𝜆superscript𝜌𝜆𝜌\lambda(\rho^{\prime})=\lambda(\rho). En particulier, si l’orbite Gρ𝐺𝜌G\cdot\rho de ρ𝜌\rho est fermée, alors Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) est non vide.

  2. (2)

    Soit (ρi)isubscriptsubscript𝜌𝑖𝑖({\rho_{i}})_{i} telle que λ(ρi)𝜆subscript𝜌𝑖\lambda({\rho_{i}}) est borné. Alors il existe une sous-suite de conjugués ρikGρiksuperscriptsubscript𝜌subscript𝑖𝑘𝐺subscript𝜌subscript𝑖𝑘\rho_{i_{k}}^{\prime}\in G\cdot\rho_{i_{k}} convergeant vers ρ𝜌\rho telle que Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) n’est pas vide, et λ(ρ)=lim infλ(ρi)𝜆𝜌limit-infimum𝜆subscript𝜌𝑖\lambda(\rho)=\liminf\lambda({\rho_{i}}).

Proof.

Le premier point est un cas particulier du deuxième point, prouvons ce dernier. Soit λ=lim infλ(ρi)𝜆limit-infimum𝜆subscript𝜌𝑖\lambda=\liminf\lambda({\rho_{i}}). Quitte à extraire on peut supposer que λ(ρi)λ𝜆subscript𝜌𝑖𝜆\lambda({\rho_{i}})\rightarrow\lambda. Pour tout entier i𝑖i, soit xisubscript𝑥𝑖x_{i} un point de X𝑋X tel que λ(ρi)dρi(xi)λ(ρi)+1i𝜆subscript𝜌𝑖subscript𝑑subscript𝜌𝑖subscript𝑥𝑖𝜆subscript𝜌𝑖1𝑖\lambda({\rho_{i}})\leq d_{{\rho_{i}}}(x_{i})\leq\lambda({\rho_{i}})+\frac{1}{i}. Quitte à remplacer chaque ρisubscript𝜌𝑖{\rho_{i}} par un conjugué, on peut supposer que la suite (xi)subscript𝑥𝑖(x_{i}) est bornée (car l’action de G𝐺G sur X𝑋X est cocompacte). Quitte à extraire, on a alors que xisubscript𝑥𝑖x_{i} tend vers x𝑥x et ρisubscript𝜌𝑖{\rho_{i}} tend vers ρ𝜌\rho. Pour tout yX𝑦𝑋y\in X, on a que dρi(y)λ(ρi)subscript𝑑subscript𝜌𝑖𝑦𝜆subscript𝜌𝑖d_{{\rho_{i}}}(y)\geq\lambda({\rho_{i}}) pour tout i𝑖i, donc que dρ(y)limλ(ρi)=λsubscript𝑑𝜌𝑦𝜆subscript𝜌𝑖𝜆d_{\rho}(y)\geq\lim\lambda({\rho_{i}})=\lambda. Or dρ(x)=λsubscript𝑑𝜌𝑥𝜆d_{\rho}(x)=\lambda. On en conclut que λ(ρ)=lim infλ(ρi)𝜆𝜌limit-infimum𝜆subscript𝜌𝑖\lambda(\rho)=\liminf\lambda({\rho_{i}}) et que x𝑥x est dans Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho). ∎

3.1.4. Symétrie en un point intérieur

Dans le cas des espaces symétriques, on verra que la propriété “Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) non vide” suffit en fait à caractériser les représentations complètement réductibles (proposition 18) (ce qui n’est pas le cas dans les arbres par exemple, voir le contre-exemple ci-dessous). Nous allons maintenant en voir l’idée principale.

Dans le cas où X𝑋X est à géodésiques uniquement extensibles (i.e. tout rayon géodésique se prolonge de manière unique en une géodésique complète) (par exemple une variété de Hadamard), on peut définir l’opposé en xX𝑥𝑋x\in X de αX𝛼subscript𝑋\alpha\in\partial_{\infty}X. On dit qu’une partie Y𝑌Y de Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X est symétrique par rapport à x𝑥x, si, pour tout point α𝛼\alpha de Y𝑌Y, l’opposé β𝛽\beta de α𝛼\alpha en x𝑥x est aussi dans Y𝑌Y. On dira que X𝑋X est sans demi-bande plate, si les rayons parallèles se prolongent en géodésiques parallèles (c’est le cas des espaces symétriques ou plus largement des variétés de Hadamard analytiques) (notons qu’un analogue de cette condition est utilisé dans [Lab]). On a alors la propriété suivante.

Proposition 14 (Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) non vide implique cr).

On suppose que X𝑋X est à géodésiques uniquement extensibles et sans demi-bande plate. On suppose que Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) est non vide. Alors, pour tout point x𝑥x dans Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho), l’ensemble Fix(ρ)subscriptFix𝜌\mathrm{Fix}_{\infty}(\rho) des points fixes de ρ𝜌\rho dans Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X est symétrique par rapport à x𝑥x. En particulier, ρ𝜌\rho est cr.

Proof.

Supposons Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) non vide. Soit x𝑥x un point de Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho). Montrons que Fix(ρ)subscriptFix𝜌\mathrm{Fix}_{\infty}(\rho) est symétrique par rapport à x𝑥x. Soit α𝛼\alpha un point fixe à l’infini de ρ𝜌\rho et r𝑟r la géodésique issue de x𝑥x vers α𝛼\alpha. Pour tout s𝑠s de S𝑆S, la fonction td(r(t),ρ(s)r(t))maps-to𝑡𝑑𝑟𝑡𝜌𝑠𝑟𝑡t\mapsto d(r(t),\ \rho(s)r(t)) est décroissante sur \mathbb{R}. De plus la somme dρ(r(t))=sSd(r(t),ρ(s)r(t))2subscript𝑑𝜌𝑟𝑡subscript𝑠𝑆𝑑superscript𝑟𝑡𝜌𝑠𝑟𝑡2d_{\rho}(r(t))=\sqrt{\sum_{s\in S}d(r(t),\ \rho(s)r(t))^{2}} atteint son minimum en 00. Par conséquent, pour tout s𝑠s de S𝑆S, la fonction td(r(t),ρ(s)r(t))maps-to𝑡𝑑𝑟𝑡𝜌𝑠𝑟𝑡t\mapsto d(r(t),\ \rho(s)r(t)) est constante sur +superscript\mathbb{R}^{+}, donc sur \mathbb{R}, c’est-à-dire que ρ𝜌\rho fixe le symétrique r()𝑟r({-\infty}) en x𝑥x de α=r(+)𝛼𝑟\alpha=r({+\infty}). ∎

Remarque.

On a au passage démontré que, pour X𝑋X quelconque, si x𝑥x est dans Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) alors le cône en x𝑥x sur Fix(ρ)subscriptFix𝜌\mathrm{Fix}_{\infty}(\rho) est inclus dans Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho). Il en découle que, si Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) est non vide alors Min(ρ)=Fix(ρ)subscriptMin𝜌subscriptFix𝜌\partial_{\infty}\mathrm{Min}(\rho)=\mathrm{Fix}_{\infty}(\rho).

3.1.5. Un contre-exemple

Dans le cas général, “non-parabolique dans un sous-espace convexe fermé stable” n’entraîne pas que ρ𝜌\rho soit cr (ou que l’orbite Gρ𝐺𝜌G\cdot\rho soit fermée), comme le montre le contre-exemple simple suivant.

On considère le groupe G=SL2𝕂×SL2𝕂𝐺subscriptSL2𝕂subscriptSL2𝕂G=\mathrm{SL}_{2}\mathbb{K}\times\mathrm{SL}_{2}\mathbb{K}, pour un corps local 𝕂𝕂\mathbb{K} non archimédien, agissant sur son immeuble de Bruhat-Tits X𝑋X associé (produit de deux arbres X1subscript𝑋1X_{1} et X2subscript𝑋2X_{2}). Soit t𝕂𝑡𝕂t\in\mathbb{K} tel que |t|>1𝑡1\left|t\right|>1 et g=(g1,g2)𝑔subscript𝑔1subscript𝑔2g=(g_{1},g_{2}) dans G𝐺G, avec g1=(t00t1)subscript𝑔1matrix𝑡00superscript𝑡1g_{1}=\begin{pmatrix}t&0\\ 0&t^{-1}\end{pmatrix} et g2=(1t01)subscript𝑔2matrix1𝑡01g_{2}=\begin{pmatrix}1&t\\ 0&1\end{pmatrix}. Alors g1subscript𝑔1g_{1} translate une géodésique σ𝜎\sigma de X1subscript𝑋1X_{1} et g2subscript𝑔2g_{2} fixe un rayon géodésique r𝑟r de X2subscript𝑋2X_{2} donc g𝑔g translate une géodésique Y=σ×r(0)𝑌𝜎𝑟0Y=\sigma\times r(0) de X𝑋X. En particulier g𝑔g est non-parabolique dans le sous-espace convexe fermé Y𝑌Y. Néanmoins, g𝑔g n’est pas complètement réductible dans X𝑋X, car le point à l’infini r(+)𝑟r({+\infty}) n’a pas de point opposé fixé par g𝑔g. Et Gg𝐺𝑔G\cdot g n’est pas fermée dans G𝐺G, car son adhérence contient (g1,Id)subscript𝑔1𝐼𝑑(g_{1},Id).

3.2. Dans les groupes réductifs

On suppose désormais que G𝐺G est un groupe réductif sur un corps local 𝕂𝕂\mathbb{K}, agissant sur son espace CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0) associé X𝑋X (espace symétrique ou immeuble affine) (hypothèses et notations de la section 1.2). Les résultats de cette section découlent pour la plupart, par une simple traduction dans X𝑋X, de [Serre], sauf le point 2 de la proposition 16.

Proposition 15.

([Serre, Prop 2.7]) Si une représentation ρ𝜌\rho fixe deux points opposés α,β𝛼𝛽\alpha,\beta à l’infini de X𝑋X, alors les deux conditions suivantes sont équivalentes

(i) L’action de ρ𝜌\rho sur X𝑋X est complètement réductible.

(ii) L’action de ρ𝜌\rho sur le sous-espace stable Xαβsubscript𝑋𝛼𝛽X_{\alpha\beta} est complètement réductible. ∎

On s’intéresse maintenant au dévissage des représentations ρ𝜌\rho paraboliques via leurs projections sur des sous-groupes de Levi (voir 1.2.8) (qu’on appelera réductions de ρ𝜌\rho), qui permet de “semisimplifier” ρ𝜌\rho, comme le montre la proposition suivante.

Proposition 16.

Soit ρ𝜌\rho dans RR\mathrm{R}. Soit α𝛼\alpha un point fixe de ρ𝜌\rho dans Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X et β𝛽\beta un point de Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X opposé à α𝛼\alpha. Soit ραβ=pαβρsubscript𝜌𝛼𝛽subscript𝑝𝛼𝛽𝜌\rho_{\alpha\beta}=p_{\alpha\beta}\circ\rho.

  1. (1)

    Si ρ𝜌\rho est complètement réductible, alors elle est conjuguée à ραβsubscript𝜌𝛼𝛽\rho_{\alpha\beta} (par un élément de Uαsubscript𝑈𝛼U_{\alpha}).

  2. (2)

    On a dραβdρsubscript𝑑subscript𝜌𝛼𝛽subscript𝑑𝜌d_{\rho_{\alpha\beta}}\leq d_{\rho} sur Xαβsubscript𝑋𝛼𝛽X_{\alpha\beta} et λ(ραβ)=λ(ρ)𝜆subscript𝜌𝛼𝛽𝜆𝜌\lambda(\rho_{\alpha\beta})=\lambda(\rho).

  3. (3)

    (voir aussi [Serre, prop. 3.3]) Si ραβsubscript𝜌𝛼𝛽\rho_{\alpha\beta} fixe un point αsuperscript𝛼\alpha^{\prime} dans Xαβsubscriptsuperscript𝑋𝛼𝛽\partial_{\infty}X^{\alpha\beta}, alors ρ𝜌\rho fixe une facette f′′superscript𝑓′′f^{\prime\prime} de Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X dominant strictement la facette f(α)𝑓𝛼f(\alpha).

  4. (4)

    (voir aussi [Serre, prop. 3.3]) Si α𝛼\alpha est un point de régularité maximale dans Fix(ρ)subscriptFix𝜌\mathrm{Fix}_{\infty}(\rho), alors ραβsubscript𝜌𝛼𝛽\rho_{\alpha\beta} est non-parabolique dans le faisceau Xαβsubscript𝑋𝛼𝛽X_{\alpha\beta}.

Proof.

Le point 1 découle du fait que, en prenant βsuperscript𝛽\beta^{\prime} opposé à α𝛼\alpha fixé par ρ𝜌\rho, les projections correspondantes pαβsubscript𝑝𝛼𝛽p_{\alpha\beta} et pαβsubscript𝑝𝛼superscript𝛽p_{\alpha\beta^{\prime}} (qui fixe ρ𝜌\rho) sont conjuguées (cf. section (1.2.8)).

Pour le point 2, quitte à conjuguer on peut se ramener au cas standard où αcI𝛼subscript𝑐𝐼\alpha\in c_{I} et βcI𝛽superscriptsubscript𝑐𝐼\beta\in c_{I}^{-} pour un certain IΛ𝐼ΛI\subset\Lambda (cf section 1.2.10). La projection pαβ=pIsubscript𝑝𝛼𝛽subscript𝑝𝐼p_{\alpha\beta}=p_{I} est la limite de conjugaisons par aisuperscript𝑎𝑖a^{i} avec aAI𝑎subscript𝐴𝐼a\in A_{I} tel que ν(a)I𝜈𝑎subscript𝐼\nu(a)\in-{\mathfrak{C}}_{I} (cf prop. 2). Soit xXαβ𝑥subscript𝑋𝛼𝛽x\in X_{\alpha\beta}, et sS𝑠𝑆s\in S. Soit σ𝜎\sigma la géodésique translatée par a1superscript𝑎1a^{-1} passant par x𝑥x. Comme g=ρ(s)𝑔𝜌𝑠g=\rho(s) fixe la facette ouverte contenant α𝛼\alpha, qui est cIsubscript𝑐𝐼c_{I}, on a que g𝑔g fixe aussi σ(+)𝜎\sigma({+\infty}) (car ν(a1)I𝜈superscript𝑎1subscript𝐼\nu(a^{-1})\in{\mathfrak{C}}_{I}), donc que la distance entre les géodésiques σ𝜎\sigma et gσ𝑔𝜎g\sigma est décroissante. Donc d(x,aigaix)=d(aix,gaix)d(x,gx)𝑑𝑥superscript𝑎𝑖𝑔superscript𝑎𝑖𝑥𝑑superscript𝑎𝑖𝑥𝑔superscript𝑎𝑖𝑥𝑑𝑥𝑔𝑥d(x,a^{i}ga^{-i}x)=d(a^{-i}x,ga^{-i}x)\leq d(x,gx), et d(x,pαβ(g)x)d(x,gx)𝑑𝑥subscript𝑝𝛼𝛽𝑔𝑥𝑑𝑥𝑔𝑥d(x,p_{\alpha\beta}(g)x)\leq d(x,gx) par passage à la limite en i+𝑖i\rightarrow{+\infty}. Donc dραβ(x)dρ(x)subscript𝑑subscript𝜌𝛼𝛽𝑥subscript𝑑𝜌𝑥d_{\rho_{\alpha\beta}}(x)\leq d_{\rho}(x).

Pour la seconde partie, comme ραβsubscript𝜌𝛼𝛽\rho_{\alpha\beta} est limite de conjugués de ρ𝜌\rho, on a que λ(ρ)λ(ραβ)𝜆𝜌𝜆subscript𝜌𝛼𝛽\lambda(\rho)\leq\lambda(\rho_{\alpha\beta}) par semicontinuité de λ𝜆\lambda. Montrons que λ(ραβ)λ(ρ)𝜆subscript𝜌𝛼𝛽𝜆𝜌\lambda(\rho_{\alpha\beta})\leq\lambda(\rho). Soit ε>0𝜀0\varepsilon>0 et yX𝑦𝑋y\in X tel que dρ(y)λ(ρ)+εsubscript𝑑𝜌𝑦𝜆𝜌𝜀d_{\rho}(y)\leq\lambda(\rho)+\varepsilon. Soit βsuperscript𝛽\beta^{\prime} opposé à α𝛼\alpha tel que yXαβ𝑦subscript𝑋𝛼superscript𝛽y\in X_{\alpha\beta^{\prime}}. Par ce qui précède on a λ(ραβ)dραβ(y)dρ(y)λ(ρ)+ε𝜆subscript𝜌𝛼superscript𝛽subscript𝑑subscript𝜌𝛼superscript𝛽𝑦subscript𝑑𝜌𝑦𝜆𝜌𝜀\lambda(\rho_{\alpha\beta^{\prime}})\leq d_{\rho_{\alpha\beta^{\prime}}}(y)\leq d_{\rho}(y)\leq\lambda(\rho)+\varepsilon. Or λ(ραβ)=λ(ραβ)𝜆subscript𝜌𝛼superscript𝛽𝜆subscript𝜌𝛼𝛽\lambda(\rho_{\alpha\beta^{\prime}})=\lambda(\rho_{\alpha\beta}) car pαβsubscript𝑝𝛼𝛽p_{\alpha\beta} et pαβsubscript𝑝𝛼superscript𝛽p_{\alpha\beta^{\prime}}, donc ραβsubscript𝜌𝛼𝛽\rho_{\alpha\beta} et ραβsubscript𝜌𝛼superscript𝛽\rho_{\alpha\beta^{\prime}}, sont conjuguées. On conclut en faisant tendre ε𝜀\varepsilon vers 00.

Pour le point 3, comme le groupe Uα=kerpαβsubscript𝑈𝛼kernelsubscript𝑝𝛼𝛽U_{\alpha}=\ker p_{\alpha\beta} fixe point par point l’étoile ΔfsubscriptΔ𝑓\Delta_{f} de f=f(α)𝑓𝑓𝛼f=f(\alpha), la représentation ρ𝜌\rho coincïde avec ραβsubscript𝜌𝛼𝛽\rho_{\alpha\beta} sur ΔfsubscriptΔ𝑓\Delta_{f}. Or ραβsubscript𝜌𝛼𝛽\rho_{\alpha\beta} fixe le segment de α𝛼\alpha à αsuperscript𝛼\alpha^{\prime} (pour la distance de Tits), donc la facette fsuperscript𝑓f^{\prime} de l’étoile de f(α)𝑓𝛼f(\alpha) qui contient dans son intérieur un germe de ce segment. Le dernier point est une conséquence directe du précédent. ∎

On en déduit immédiatement la caractérisation suivante.

Corollaire 17.

Pour ρ𝜌\rho dans RR\mathrm{R}, les conditions suivantes sont équivalentes.

  1. (1)

    ρ𝜌\rho est complètement réductible.

  2. (2)

    Ou bien ρ𝜌\rho est non-parabolique dans X𝑋X, ou bien il existe α𝛼\alpha et β𝛽\beta dans Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X opposés, fixés par ρ𝜌\rho, tels que ρ𝜌\rho est non-parabolique dans le faisceau Xα,βsubscript𝑋𝛼𝛽X_{\alpha,\beta}. ∎

En particulier Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) est alors non vide.

3.3. Cas des espaces symétriques

On a maintenant obtenu l’équivalence des différentes caractérisations géométriques remarquables suivantes, dans les espaces symétriques (i.e. dans le cas des groupes réductifs réels, cf section 1.2).

Proposition 18.

On suppose que G𝐺G est un groupe réductif réel, agissant sur son espace symétrique sans facteur compact X𝑋X associé. Soit ρ:ΓG:𝜌Γ𝐺\rho:\Gamma\longrightarrow G une représentation. les conditions suivantes sont équivalentes.

  1. (1)

    ρ𝜌\rho est complètement réductible dans X𝑋X.

  2. (2)

    Ou bien ρ𝜌\rho est non-parabolique dans X𝑋X, ou bien ρ𝜌\rho fixe deux points à l’infini opposés α𝛼\alpha et β𝛽\beta, et est non-parabolique dans le faisceau Xα,βsubscript𝑋𝛼𝛽X_{\alpha,\beta}.

  3. (3)

    ρ𝜌\rho stabilise un sous-espace convexe fermé Y𝑌Y de X𝑋X, et est non-parabolique dans Y𝑌Y.

  4. (4)

    La fonction de déplacement dρ:xsSd(x,ρ(s)x)2:subscript𝑑𝜌maps-to𝑥subscript𝑠𝑆𝑑superscript𝑥𝜌𝑠𝑥2d_{\rho}:x\mapsto\sqrt{\sum_{s\in S}d(x,\rho(s)x)^{2}} atteint sa borne inférieure, autrement dit Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) est non vide.

  5. (5)

    Il existe un point x𝑥x de X𝑋X tel que Fix(ρ)subscriptFix𝜌\mathrm{Fix}_{\infty}(\rho) est symétrique par rapport à x𝑥x.

Proof.

On vient de voir que (1) équivaut à (2) dans le cadre des groupes réductifs ([Serre], cf. Corollaire 17). On a clairement que (2) implique (3), et que (5) implique (1). L’implication (3) \Rightarrow (4) est vraie dans tout espace métrique CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0) propre X𝑋X (proposition 12). L’implication (4) \Rightarrow (5) est vraie, pour tout x𝑥x de Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho), dans le cadre plus général où X𝑋X est à géodésiques uniquement extensibles et sans demi-bande plate (proposition 14). ∎

Remarque.

On peut démontrer que l’ensemble minimal Min(ρ)Min𝜌\mathrm{Min}(\rho) est ici un sous-espace totalement géodésique (car si dρsubscript𝑑𝜌d_{\rho} est constante sur un segment géodésique σ[0,1]𝜎delimited-[]0.1\sigma[0,1], alors on montre aisément que dρ(s)subscript𝑑𝜌𝑠d_{\rho(s)} aussi pour tout s𝑠s de S𝑆S) sur lequel le centralisateur Z(ρ)𝑍𝜌Z(\rho) de ρ𝜌\rho agit transitivement (car le transport parallèle le long de σ𝜎\sigma - prolongée à \mathbb{R} - est dans Z(ρ)𝑍𝜌Z(\rho)). On peut alors en déduire les propriétés suivantes, analogues aux résultats de base de la théorie de l’application moment (voir par exemple [RiSl]) : si on note \mathcal{M} le sous-ensemble des ρR𝜌R\rho\in\mathrm{R} telles que dρsubscript𝑑𝜌d_{\rho} atteint sa borne inférieure en x0subscript𝑥0{x_{0}}, alors ρ𝜌\rho est cr si et seulement si Gρ𝐺𝜌G\cdot\rho rencontre \mathcal{M}, et on a alors Gρ=Kρ𝐺𝜌𝐾𝜌\mathcal{M}\cap G\cdot\rho=K\cdot\rho, où K𝐾K est le sous-groupe compact StabG(x0)subscriptStab𝐺subscript𝑥0\mathrm{Stab}_{G}({x_{0}}).

4. Séparation et espace quotient

On se place dorénavant dans le cadre où G𝐺G est un groupe réductif sur un corps local agissant sur son espace (espace symétrique ou immeuble affine) associé (notations et hypothèses de la section 1.2). Dans cette section on montre (théorème 23) que l’espace 𝒳crsubscript𝒳𝑐𝑟{\mathcal{X}}_{cr} des classes de représentations cr est le plus gros quotient séparé de R=Hom(Γ,G)GSRHomΓ𝐺superscript𝐺𝑆\mathrm{R}=\mathrm{Hom}(\Gamma,G)\subset G^{S} sous l’action (par conjugaison) de G𝐺G.

On note RcrsubscriptR𝑐𝑟\mathrm{R}_{cr} le sous-espace formé des représentations complètement réductibles, et 𝒳cr=Rcr/Gsubscript𝒳𝑐𝑟subscriptR𝑐𝑟𝐺{\mathcal{X}}_{cr}=\mathrm{R}_{cr}/G l’espace topologique quotient. Notons que l’espace 𝒳crsubscript𝒳𝑐𝑟{\mathcal{X}}_{cr} est à base dénombrable (car RR\mathrm{R} l’est).

On dira que deux points x𝑥x et xsuperscript𝑥x^{\prime} d’un espace topologique E𝐸E sont séparés par une action continue de G𝐺G dans E𝐸E s’il existe deux voisinages V𝑉V et Vsuperscript𝑉V^{\prime} de x𝑥x et xsuperscript𝑥x^{\prime} dont les orbites GV𝐺𝑉G\cdot V et GV𝐺superscript𝑉G\cdot V^{\prime} ne se rencontrent pas. Sinon, on dira que x𝑥x et xsuperscript𝑥x^{\prime} sont G𝐺G-voisins dans E𝐸E (on notera que ce n’est pas a priori une relation d’équivalence).

4.1. Séparation des orbites cr

Nous allons ici démontrer le résultat de séparation des orbites cr suivant, qui est une variante (contenant l’essentiel) du théorème 23 (et donc connu en caractéristique nulle, voir les remarques suivant le théorème 23). On rappelle (cf. section 3.2) qu’une réduction d’une représentation ρ𝜌\rho désigne une représentation de la forme σ=pαβρ𝜎subscript𝑝𝛼𝛽𝜌\sigma=p_{\alpha\beta}\circ\rhopαβ:PαGαβ:subscript𝑝𝛼𝛽subscript𝑃𝛼subscript𝐺𝛼𝛽p_{\alpha\beta}:P_{\alpha}\longrightarrow G_{\alpha\beta} est la projection canonique associée à deux points à l’infini opposés α𝛼\alpha et β𝛽\beta avec α𝛼\alpha fixé par ρ𝜌\rho.

Théorème 19.

Soient ρ𝜌\rho et ρsuperscript𝜌\rho^{\prime} deux points G𝐺G-voisins dans RR\mathrm{R}. Alors

  1. (1)

    ρ𝜌\rho et ρsuperscript𝜌\rho^{\prime} possèdent deux réductions conjuguées dans G𝐺G.

  2. (2)

    Les adhérences de leurs orbites se rencontrent (Gρ¯Gρ¯¯𝐺𝜌¯𝐺superscript𝜌\overline{G\cdot\rho}\cap\overline{G\cdot\rho^{\prime}}\neq\emptyset).

  3. (3)

    Si de plus ρ𝜌\rho et ρsuperscript𝜌\rho^{\prime} sont cr, alors elles sont conjuguées (Gρ=Gρ𝐺𝜌𝐺superscript𝜌{G\cdot\rho}={G\cdot\rho^{\prime}}).

En particulier, l’espace topologique quotient 𝒳cr=Rcr/Gsubscript𝒳𝑐𝑟subscriptR𝑐𝑟𝐺{\mathcal{X}}_{cr}=\mathrm{R}_{cr}/G est séparé.

Pour démontrer ce théorème, on commence par le petit lemme suivant, qui montre que, comme “les parties compactes ne comptent pas”, on peut se ramener, grâce à un analogue de la décomposition de Cartan, à l’action d’une suite I𝐼I-fondamentale de A𝐴A.

Lemme 20.

On considère une action continue de G𝐺G sur un espace topologique E𝐸E à base dénombrable. Soient x,x𝑥superscript𝑥x,x^{\prime} dans E𝐸E. Les assertions suivantes sont équivalentes.

  1. (1)

    Les points x𝑥x et xsuperscript𝑥x^{\prime} sont G𝐺G-voisins dans E𝐸E.

  2. (2)

    il existe h,k𝑘h,k dans G𝐺G, une partie I𝐼I de ΛΛ\Lambda, une suite I𝐼I-fondamentale (ai)isubscriptsubscript𝑎𝑖𝑖(a_{i})_{i} de A𝐴A, et une suite (yi)isubscriptsubscript𝑦𝑖𝑖(y_{i})_{i} dans E𝐸E, tels que yiysubscript𝑦𝑖𝑦y_{i}\rightarrow y et aiyiysubscript𝑎𝑖subscript𝑦𝑖superscript𝑦a_{i}\cdot y_{i}\rightarrow y^{\prime} avec y=hx𝑦𝑥y=h\cdot x et y=kxsuperscript𝑦𝑘superscript𝑥y^{\prime}=k\cdot x^{\prime} quand i+𝑖i\rightarrow{+\infty}.

Proof.

Si x𝑥x et xsuperscript𝑥x^{\prime} sont G𝐺G-voisins, il existe une suite (xi)isubscriptsubscript𝑥𝑖𝑖(x_{i})_{i} dans E𝐸E et une suite (gi)isubscriptsubscript𝑔𝑖𝑖(g_{i})_{i} dans G𝐺G telles que xixsubscript𝑥𝑖𝑥x_{i}\rightarrow x et gixixsubscript𝑔𝑖subscript𝑥𝑖superscript𝑥g_{i}\cdot x_{i}\rightarrow x^{\prime} quand i+𝑖i\rightarrow{+\infty}. Comme ¯¯\overline{\mathfrak{C}} est un domaine fondamental pour l’action du sous-groupe compact K=StabG(x0)𝐾subscriptStab𝐺subscript𝑥0K=\mathrm{Stab}_{G}({x_{0}}) sur X𝑋X, il existe kiKsubscript𝑘𝑖𝐾k_{i}\in K tel que gix0=kivisubscript𝑔𝑖subscript𝑥0subscript𝑘𝑖subscript𝑣𝑖g_{i}{x_{0}}=k_{i}v_{i} avec visubscript𝑣𝑖v_{i} dans ¯¯\overline{\mathfrak{C}}. Soit I𝐼I l’ensemble des racines simples φ𝜑\varphi de ΛΛ\Lambda non bornées sur la suite (vi)subscript𝑣𝑖(v_{i}). La suite des projections viIsubscriptsuperscript𝑣𝐼𝑖v^{I}_{i} de visubscript𝑣𝑖v_{i} sur 𝔸Isuperscript𝔸𝐼\mathbb{A}^{I} est alors bornée. La suite des projections vi,Isubscript𝑣𝑖𝐼v_{i,I} de visubscript𝑣𝑖v_{i} sur 𝔸Isubscript𝔸𝐼\mathbb{A}_{I} est à distance bornée d’une suite ui=aix0subscript𝑢𝑖subscript𝑎𝑖subscript𝑥0u_{i}=a_{i}{x_{0}}, avec aiAIsubscript𝑎𝑖subscript𝐴𝐼a_{i}\in A_{I} (car AIsubscript𝐴𝐼A_{I} agit cocompactement sur 𝔸Isubscript𝔸𝐼\mathbb{A}_{I}). On note gi=kiaihisubscript𝑔𝑖subscript𝑘𝑖subscript𝑎𝑖subscript𝑖g_{i}=k_{i}a_{i}h_{i}. La suite (hi)isubscriptsubscript𝑖𝑖(h_{i})_{i} est bornée dans G𝐺G car la suite hix0=ai1visubscript𝑖subscript𝑥0superscriptsubscript𝑎𝑖1subscript𝑣𝑖h_{i}{x_{0}}=a_{i}^{-1}v_{i} du plat 𝔸𝔸\mathbb{A} a ses composantes dans 𝔸I𝔸Idirect-sumsuperscript𝔸𝐼subscript𝔸𝐼\mathbb{A}^{I}\oplus\mathbb{A}_{I} bornées. On a donc, quitte à extraire, que kisubscript𝑘𝑖k_{i} tend vers k1superscript𝑘1k^{-1} et hisubscript𝑖h_{i} tend vers hh dans G𝐺G, et la suite yi=hixisubscript𝑦𝑖subscript𝑖subscript𝑥𝑖y_{i}=h_{i}\cdot x_{i} convient. L’autre sens est clair. ∎

On décrit maintenant les limites de conjugués par une suite I𝐼I-fondamentale (ai)isubscriptsubscript𝑎𝑖𝑖(a_{i})_{i} de A𝐴A. La preuve repose sur la décomposition UIGIUI+subscriptsuperscript𝑈𝐼subscript𝐺𝐼subscriptsuperscript𝑈𝐼U^{-}_{I}{}G_{I}U^{+}_{I}{} (cf prop. 1).

Proposition 21 (Action d’une suite I𝐼I-fondamentale dans A𝐴A.).

Soit I𝐼I une partie de ΛΛ\Lambda et (ai)isubscriptsubscript𝑎𝑖𝑖(a_{i})_{i} une suite I𝐼I-fondamentale dans A𝐴A. Soient deux représentations ρ𝜌\rho et ρsuperscript𝜌\rho^{\prime} de RR\mathrm{R}, et une suite (ρi)isubscriptsubscript𝜌𝑖𝑖(\rho_{i})_{i} convergeant vers ρ𝜌\rho dans RR\mathrm{R}, telles que la suite des conjugués (aiρi)isubscriptsubscript𝑎𝑖subscript𝜌𝑖𝑖(a_{i}\cdot\rho_{i})_{i} tend vers ρsuperscript𝜌\rho^{\prime}. Alors

  1. (1)

    La représentation ρsuperscript𝜌\rho^{\prime} est (d’image) incluse dans le sous-groupe parabolique PI+superscriptsubscript𝑃𝐼P_{I}^{+}, et ρ𝜌\rho est (d’image) incluse dans le sous-groupe parabolique opposé PIsuperscriptsubscript𝑃𝐼P_{I}^{-}.

  2. (2)

    Les projections r𝑟r et rsuperscript𝑟r^{\prime} de ρ𝜌\rho et ρsuperscript𝜌\rho^{\prime} sur le sous-groupe de Levi commun GIsubscript𝐺𝐼G_{I} sont égales.

  3. (3)

    Soit ρ=ur𝜌𝑢𝑟\rho=u{}r la décomposition de ρ𝜌\rho suivant la décomposition PI=UIGIsuperscriptsubscript𝑃𝐼subscriptsuperscript𝑈𝐼subscript𝐺𝐼P_{I}^{-}=U^{-}_{I}G_{I} et ρ=rn\rho^{\prime}=rn{}^{\prime} la décomposition de ρsuperscript𝜌\rho^{\prime} suivant la décomposition PI+=GIUI+superscriptsubscript𝑃𝐼subscript𝐺𝐼subscriptsuperscript𝑈𝐼P_{I}^{+}=G_{I}U^{+}_{I}. Alors, à partir d’un certain rang, on a ρi=uriini\rho_{i}=u{}_{i}r_{i}n{}_{i}, pour des suites rirsubscript𝑟𝑖𝑟r_{i}\rightarrow r dans (GI)Γsuperscriptsubscript𝐺𝐼Γ(G_{I})^{\Gamma}, et uiusubscript𝑢𝑖𝑢u_{i}\rightarrow u dans (UI)Γsuperscriptsubscriptsuperscript𝑈𝐼Γ(U^{-}_{I})^{\Gamma}, et enfin n=iai1nin{}_{i}=a_{i}^{-1}\cdot n{}^{\prime}_{i}ninsubscriptsuperscript𝑛𝑖superscript𝑛n^{\prime}_{i}\rightarrow n^{\prime} dans (UI+)Γsuperscriptsubscriptsuperscript𝑈𝐼Γ(U^{+}_{I})^{\Gamma}.

Remarquons que le point 3 décrit complètement la situation. En effet, les propriétés de contraction de la conjugaison par la suite (ai)subscript𝑎𝑖(a_{i}) sur UIsubscriptsuperscript𝑈𝐼U^{-}_{I} et UI+subscriptsuperscript𝑈𝐼U^{+}_{I} (proposition 3) permettent de voir qu’on a la réciproque suivante (attention, ici ρi:ΓG:subscript𝜌𝑖Γ𝐺\rho_{i}:\Gamma\longrightarrow G n’a pas de raisons a priori d’être un morphisme).

Proposition 22.

Soient ρ=ur𝜌𝑢𝑟\rho=u{}r une représentation à valeurs dans PI=UIGIsuperscriptsubscript𝑃𝐼subscriptsuperscript𝑈𝐼subscript𝐺𝐼P_{I}^{-}=U^{-}_{I}G_{I} et ρ=rn\rho^{\prime}=rn{}^{\prime} une représentation à valeurs dans PI+=GIUI+superscriptsubscript𝑃𝐼subscript𝐺𝐼subscriptsuperscript𝑈𝐼P_{I}^{+}=G_{I}U^{+}_{I}, de même projection r𝑟r sur GIsubscript𝐺𝐼G_{I}. Pour toute suite I𝐼I-fondamentale (ai)subscript𝑎𝑖(a_{i}) de AIsubscript𝐴𝐼A_{I}, si ρi=uirinisubscript𝜌𝑖subscript𝑢𝑖subscript𝑟𝑖subscript𝑛𝑖\rho_{i}=u_{i}r_{i}n_{i} avec rirsubscript𝑟𝑖𝑟r_{i}\rightarrow r dans (GI)Γsuperscriptsubscript𝐺𝐼Γ(G_{I})^{\Gamma} et uiusubscript𝑢𝑖𝑢u_{i}\rightarrow u dans (UI)Γsuperscriptsubscriptsuperscript𝑈𝐼Γ(U^{-}_{I})^{\Gamma} quelconques, et ni=ai1nisubscript𝑛𝑖superscriptsubscript𝑎𝑖1subscriptsuperscript𝑛𝑖n_{i}=a_{i}^{-1}\cdot n^{\prime}_{i} avec ninsubscriptsuperscript𝑛𝑖superscript𝑛n^{\prime}_{i}\rightarrow n^{\prime} dans (UI+)Γsuperscriptsubscriptsuperscript𝑈𝐼Γ(U^{+}_{I})^{\Gamma} quelconque, alors on a ρiρsubscript𝜌𝑖𝜌\rho_{i}\rightarrow\rho et aiρiρsubscript𝑎𝑖subscript𝜌𝑖superscript𝜌a_{i}\cdot\rho_{i}\rightarrow\rho^{\prime}. En particulier, ρ𝜌\rho et ρsuperscript𝜌\rho^{\prime} sont A𝐴A-voisines. ∎

Preuve de la proposition 21.

Il suffit de prouver ces points “terme à terme”, c’est-à-dire pour un élément fixé γ𝛾\gamma de ΓΓ\Gamma. On note alors g=ρ(γ)𝑔𝜌𝛾g=\rho(\gamma) et g=ρ(γ)superscript𝑔superscript𝜌𝛾g^{\prime}=\rho^{\prime}(\gamma).

On commence par projeter, en utilisant une décomposition UJGJUJ+subscriptsuperscript𝑈𝐽subscript𝐺𝐽subscriptsuperscript𝑈𝐽U^{-}_{J}{}G_{J}U^{+}_{J}{}, dans un GJsubscript𝐺𝐽G_{J}, a priori plus gros que GIsubscript𝐺𝐼G_{I}, tel que PJ+superscriptsubscript𝑃𝐽P_{J}^{+} contient gsuperscript𝑔g^{\prime} et PJsuperscriptsubscript𝑃𝐽P_{J}^{-} contient g𝑔g. Puis on montre qu’en fait J=I𝐽𝐼J=I par un argument de minimalité, d’où le résultat pour le bon I𝐼I.

Existence d’une facette à l’infini fixée “commune”. On note vi=ν(ai)subscript𝑣𝑖𝜈subscript𝑎𝑖v_{i}=\nu(a_{i}) (vecteur de la translation de 𝔸𝔸\mathbb{A} réalisée par aisubscript𝑎𝑖a_{i}). Quitte à extraire, on peut supposer que visubscript𝑣𝑖v_{i} tend vers un point v𝑣v dans le bord à l’infini de la facette ¯Isubscript¯𝐼\overline{\mathfrak{C}}_{I}. Soit Lsubscript𝐿{\mathfrak{C}}_{L} la facette ouverte de Isubscript𝐼{\mathfrak{C}}_{I} contenant v𝑣v. Alors gsuperscript𝑔g^{\prime} fixe la facette à l’infini Lsubscriptsubscript𝐿\partial_{\infty}{\mathfrak{C}}_{L} (d’après le lemme 8). De même, en remplaçant visubscript𝑣𝑖v_{i} par visubscript𝑣𝑖-v_{i} qui tend vers v𝑣-v, on voit que g𝑔g fixe le bord à l’infini de la facette opposée L=Lsuperscriptsubscript𝐿subscript𝐿{\mathfrak{C}}_{L}^{-}=-{\mathfrak{C}}_{L}.

Choix de J𝐽J minimal. On suppose désormais que Jsubscript𝐽{\mathfrak{C}}_{J} est une facette maximale (pour l’inclusion) parmi les facettes de Isubscript𝐼{\mathfrak{C}}_{I} telle que gsuperscript𝑔g^{\prime} fixe Jsubscriptsubscript𝐽\partial_{\infty}{\mathfrak{C}}_{J} (c’est-à-dire gPJ+superscript𝑔superscriptsubscript𝑃𝐽g^{\prime}\in P_{J}^{+}) et g𝑔g fixe (J)subscriptsuperscriptsubscript𝐽\partial_{\infty}({\mathfrak{C}}_{J}^{-}) (c’est-à-dire gPJ𝑔superscriptsubscript𝑃𝐽g\in P_{J}^{-}).

Soit g=ur𝑔𝑢𝑟g=u{}r la décomposition de g𝑔g suivant la décomposition PJ=UJGJsuperscriptsubscript𝑃𝐽subscriptsuperscript𝑈𝐽subscript𝐺𝐽P_{J}^{-}=U^{-}_{J}G_{J} et g=rng^{\prime}=rn{}^{\prime} la décomposition de gsuperscript𝑔g^{\prime} suivant la décomposition PJ+=GJUJ+superscriptsubscript𝑃𝐽subscript𝐺𝐽subscriptsuperscript𝑈𝐽P_{J}^{+}=G_{J}U^{+}_{J}.

Projection sur GJsubscript𝐺𝐽G_{J} via la décomposition UJGJUJ+subscriptsuperscript𝑈𝐽subscript𝐺𝐽subscriptsuperscript𝑈𝐽U^{-}_{J}{}G_{J}U^{+}_{J}{}. On considère maintenant la décomposition 𝒪J=UJGJUJ+subscript𝒪𝐽subscriptsuperscript𝑈𝐽subscript𝐺𝐽subscriptsuperscript𝑈𝐽{\mathcal{O}}_{J}=U^{-}_{J}{}G_{J}U^{+}_{J}{} de la proposition 1. Comme 𝒪Jsubscript𝒪𝐽{\mathcal{O}}_{J} est un ouvert qui contient PJsuperscriptsubscript𝑃𝐽P_{J}^{-} et PJ+superscriptsubscript𝑃𝐽P_{J}^{+}, donc g𝑔g et gsuperscript𝑔g^{\prime}, les suites gisubscript𝑔𝑖g_{i} et gisubscriptsuperscript𝑔𝑖g^{\prime}_{i} sont dans 𝒪Jsubscript𝒪𝐽{\mathcal{O}}_{J} à partir d’un certain rang. On a donc les décompositions gi=uriinig_{i}=u{}_{i}r_{i}n{}_{i} et gi=uriinig^{\prime}_{i}=u{}_{i}^{\prime}r^{\prime}_{i}n{}_{i}^{\prime}, où uiu{}_{i} et uiu{}_{i}^{\prime} sont dans UJsubscriptsuperscript𝑈𝐽U^{-}_{J}{}, nin{}_{i} et nin{}_{i}^{\prime} sont dans UJ+subscriptsuperscript𝑈𝐽U^{+}_{J}{}, et risubscript𝑟𝑖r_{i} et risubscriptsuperscript𝑟𝑖r^{\prime}_{i} sont dans GJsubscript𝐺𝐽G_{J}. La décomposition UJGJUJ+subscriptsuperscript𝑈𝐽subscript𝐺𝐽subscriptsuperscript𝑈𝐽U^{-}_{J}{}G_{J}U^{+}_{J}{} étant unique, continue, et conservée par la conjugaison par aisubscript𝑎𝑖a_{i}, on a que rirsubscript𝑟𝑖𝑟r_{i}\rightarrow r et que ri=airirsubscriptsuperscript𝑟𝑖subscript𝑎𝑖subscript𝑟𝑖superscript𝑟r^{\prime}_{i}=a_{i}\cdot r_{i}\rightarrow r^{\prime}. De même, on a que uiusubscript𝑢𝑖𝑢u_{i}\rightarrow u et que ni=aininsuperscriptsubscript𝑛𝑖subscript𝑎𝑖subscript𝑛𝑖superscript𝑛n_{i}^{\prime}=a_{i}\cdot n_{i}\rightarrow n^{\prime}.

Montrons enfin que I=J𝐼𝐽I=J. Notons vi=viJ+vi,Jsubscript𝑣𝑖superscriptsubscript𝑣𝑖𝐽subscript𝑣𝑖𝐽v_{i}=v_{i}^{J}+v_{i,J} la décomposition de visubscript𝑣𝑖v_{i} suivant la somme orthogonale 𝔸=𝔸J𝔸J𝔸direct-sumsuperscript𝔸𝐽subscript𝔸𝐽\mathbb{A}=\mathbb{A}^{J}\oplus\mathbb{A}_{J}. Si JI𝐽𝐼J\neq I, alors viJsuperscriptsubscript𝑣𝑖𝐽v_{i}^{J} n’est pas borné : en effet il existe φJI𝜑𝐽𝐼\varphi\in J-I, et φ(viJ)=φ(vi)𝜑superscriptsubscript𝑣𝑖𝐽𝜑subscript𝑣𝑖\varphi(v_{i}^{J})=\varphi(v_{i}) tend vers +{+\infty}, car la suite visubscript𝑣𝑖v_{i} est I𝐼I-fondamentale. Quitte à extraire, on a donc que viJsuperscriptsubscript𝑣𝑖𝐽v_{i}^{J} tend vers un point vJsuperscript𝑣𝐽v^{J} dans le bord à l’infini de 𝔸Jsuperscript𝔸𝐽\mathbb{A}^{J}. Comme AJsubscript𝐴𝐽A_{J} agit cocompactement sur 𝔸Jsubscript𝔸𝐽\mathbb{A}_{J}, il existe biAJsubscript𝑏𝑖subscript𝐴𝐽b_{i}\in A_{J} tel que vi,Jν(bi)subscript𝑣𝑖𝐽𝜈subscript𝑏𝑖v_{i,J}-\nu(b_{i}) reste borné. Notons ai=aibi1superscriptsubscript𝑎𝑖subscript𝑎𝑖superscriptsubscript𝑏𝑖1a_{i}^{\prime}=a_{i}b_{i}^{-1}, alors aix0subscriptsuperscript𝑎𝑖subscript𝑥0a^{\prime}_{i}{x_{0}} tend encore vers v𝑣v. Comme AJsubscript𝐴𝐽A_{J} est central dans GJsubscript𝐺𝐽G_{J}, on a que ai.ri=ai.riformulae-sequencesuperscriptsubscript𝑎𝑖subscript𝑟𝑖subscript𝑎𝑖subscript𝑟𝑖a_{i}^{\prime}.r_{i}=a_{i}.r_{i}, qui converge vers rsuperscript𝑟r^{\prime}. On en déduit que rsuperscript𝑟r^{\prime} fixe vJsuperscript𝑣𝐽v^{J} (par le lemme 8). Comme φ(vJ)0𝜑superscript𝑣𝐽0\varphi(v^{J})\geq 0 pour toutes les racines φ𝜑\varphi de J𝐽J et qu’on a φ(vJ)>0𝜑superscript𝑣𝐽0\varphi(v^{J})>0 pour au moins une racine φ𝜑\varphi de J𝐽J (car vJ𝔸Jsuperscript𝑣𝐽subscript𝔸𝐽v^{J}\notin\mathbb{A}_{J}), on a que le cône +vJ𝔸Jdirect-sumsuperscriptsuperscript𝑣𝐽subscript𝔸𝐽\mathbb{R}^{+}v^{J}\oplus\mathbb{A}_{J} rencontre une facette ouverte Jsubscriptsuperscript𝐽{\mathfrak{C}}_{J^{\prime}} dominant strictement la facette Jsubscript𝐽{\mathfrak{C}}_{J}. Comme rsuperscript𝑟r^{\prime} fixe tous les points du bord à l’infini de +vJ+𝔸Jsuperscriptsuperscript𝑣𝐽subscript𝔸𝐽\mathbb{R}^{+}v^{J}+\mathbb{A}_{J}, il fixe la facette à l’infini Jsubscriptsubscriptsuperscript𝐽\partial_{\infty}{\mathfrak{C}}_{J^{\prime}}. Donc gsuperscript𝑔g^{\prime} fixe également Jsubscriptsubscriptsuperscript𝐽\partial_{\infty}{\mathfrak{C}}_{J^{\prime}} (car UJsubscript𝑈𝐽U_{J} fixe ¯subscript¯\partial_{\infty}\overline{\mathfrak{C}}). On voit de même, en remplaçant aisuperscriptsubscript𝑎𝑖a_{i}^{\prime} par (ai)1superscriptsuperscriptsubscript𝑎𝑖1(a_{i}^{\prime})^{-1} que g𝑔g fixe le bord à l’infini de la facette opposée Jsuperscriptsubscriptsuperscript𝐽{\mathfrak{C}}_{J^{\prime}}^{-} (car (ai)1x0vJsuperscriptsuperscriptsubscript𝑎𝑖1subscript𝑥0superscript𝑣𝐽(a_{i}^{\prime})^{-1}{x_{0}}\rightarrow-v^{J}). Ce qui contredit l’hypothèse “Jsubscript𝐽{\mathfrak{C}}_{J} maximale” faite ci-dessus, car Jsubscriptsuperscript𝐽{\mathfrak{C}}_{J^{\prime}} domine strictement la facette Jsubscript𝐽{\mathfrak{C}}_{J}. On a donc en fait ri=risubscriptsuperscript𝑟𝑖subscript𝑟𝑖r^{\prime}_{i}=r_{i} pour tout i𝑖i (car aiAJsubscript𝑎𝑖subscript𝐴𝐽a_{i}\in A_{J} central dans GJsubscript𝐺𝐽G_{J}), d’où r=rsuperscript𝑟𝑟r^{\prime}=r. ∎

Preuve du théorème 19.

Comme les réductions d’une représentation sont dans l’adhérence de son orbite (cf proposition 2) et qu’une représentation complètement réductible est conjuguée à toutes ses réductions (cf proposition 16, point 1), il suffit de voir le premier point. Quitte à conjuguer ρ𝜌\rho et ρsuperscript𝜌\rho^{\prime}, on peut supposer qu’il existe une suite I𝐼I-fondamentale (ai)subscript𝑎𝑖(a_{i}) dans A𝐴A et une suite ρisubscript𝜌𝑖\rho_{i} dans RR\mathrm{R} convergeant vers ρ𝜌\rho telles que aiρisubscript𝑎𝑖subscript𝜌𝑖a_{i}\cdot\rho_{i} converge vers ρsuperscript𝜌\rho^{\prime} (lemme 20). Les points (1) et (2) de la proposition 21 permettent alors de conclure. ∎

4.2. Semisimplification et plus gros quotient séparé

Soient ρ𝜌\rho et ρsuperscript𝜌\rho^{\prime} dans RR\mathrm{R}. D’après le théorème 19, ρ𝜌\rho et ρsuperscript𝜌\rho^{\prime} sont G𝐺G-voisines si et seulement si Gρ¯Gρ¯¯𝐺𝜌¯𝐺superscript𝜌\overline{G\cdot\rho}\cap\overline{G\cdot\rho^{\prime}}\neq\emptyset. On note dans ce cas ρρsimilar-to𝜌superscript𝜌\rho\sim\rho^{\prime}, et il est facile de voir que similar-to\sim est alors une relation d’équivalence. On note R//G=R/\mathrm{R}//G=\mathrm{R}/\sim l’espace topologique quotient, et p:RR//Gp:\mathrm{R}\longrightarrow\mathrm{R}//G la projection correspondante (qui passe au quotient en une application continue surjective p¯:R/GR//G\overline{p}:\mathrm{R}/G\longrightarrow\mathrm{R}//G).

Théorème 23.
  1. (1)

    Pour tout ρ𝜌\rho de RR\mathrm{R}, l’adhérence de Gρ𝐺𝜌G\cdot\rho contient une unique orbite complètement réductible.

    On note π:R𝒳cr:𝜋Rsubscript𝒳𝑐𝑟\pi:\mathrm{R}\longrightarrow{\mathcal{X}}_{cr} la projection G𝐺G-invariante associée (semisimplification).

  2. (2)

    L’application π𝜋\pi est continue et induit un homéomorphisme de R//G\mathrm{R}//G sur 𝒳crsubscript𝒳𝑐𝑟{\mathcal{X}}_{cr}. En particulier, R//G\mathrm{R}//G (resp. 𝒳crsubscript𝒳𝑐𝑟{\mathcal{X}}_{cr}) est le plus gros quotient séparé de RR\mathrm{R} sous G𝐺G (toute application continue G𝐺G-invariante f𝑓f de RR\mathrm{R} vers un espace séparé factorise à travers p𝑝p (resp. π𝜋\pi)).

Remarques.

Le point 1 est prouvé dans [Ric] pour 𝕂=𝕂\mathbb{K}=\mathbb{R}. Par ailleurs, un résultat analogue, mais en remplaçant les orbites cr par les orbites fermées, et pour des actions plus générales de groupes réductifs, est prouvé, pour 𝕂=𝕂\mathbb{K}=\mathbb{R}, dans [Luna] et [RiSl], et plus généralement, pour 𝕂𝕂\mathbb{K} de caractéristique nulle; dans [Bre, 5.4 et 5.11]. Il implique alors le résultat ci-dessus quand en utilisant que les orbites fermées sont exactement les orbites complètement réductibles ([Ric] pour 𝕂=𝕂\mathbb{K}=\mathbb{R}, et, plus généralement pour 𝕂𝕂\mathbb{K} de caractéristique nulle, on peut le déduire de [Ric] et [Bre]).

Proof.

Pour le point 1 : En projetant sur un sous-groupe de Levi correspondant à un point fixe de ρ𝜌\rho dans Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X de régularité maximale, on obtient bien une représentation complètement réductible adhérente à l’orbite de ρ𝜌\rho par la proposition 16 et le corollaire 17. L’unicité à conjugaison près découle de la séparation des orbites cr (théorème 19).

Pour le point 2, il s’agit essentiellement de montrer la continuité de π𝜋\pi. Les arguments suivants sont inspirées par des idées de Maxime Wolff [Wolff, 2.2.6]. Comme RR\mathrm{R} et 𝒳crsubscript𝒳𝑐𝑟{\mathcal{X}}_{cr} sont à base dénombrable et séparés (théorème 19), il suffit de montrer que, si ρisubscript𝜌𝑖{\rho_{i}} tend vers ρ𝜌\rho dans RR\mathrm{R}, alors, quitte à extraire, π(ρi)𝜋subscript𝜌𝑖\pi({\rho_{i}}) tend vers π(ρ)𝜋𝜌\pi(\rho). On peut tout d’abord supposer ρ𝜌\rho complètement réductible (quitte à remplacer ρ𝜌\rho par σ𝜎\sigma cr dans Gρ¯¯𝐺𝜌\overline{G\cdot\rho}, et ρisubscript𝜌𝑖{\rho_{i}} par une suite extraite et conjuguée qui converge vers σ𝜎\sigma). Si ρisubscript𝜌𝑖{\rho_{i}} n’a pas de point fixe à l’infini, et est donc complètement réductible, à partir d’un certain rang, on a que π(ρi)=Gρi𝜋subscript𝜌𝑖𝐺subscript𝜌𝑖\pi({\rho_{i}})=G\cdot{\rho_{i}} tend vers Gρ=π(ρ)𝐺𝜌𝜋𝜌G\cdot\rho=\pi(\rho) dans Rcr/GsubscriptR𝑐𝑟𝐺\mathrm{R}_{cr}/G, ce qui conclut. Sinon, quitte à extraire, il existe pour tout i𝑖i un point fixe à l’infini αisubscript𝛼𝑖\alpha_{i} de ρisubscript𝜌𝑖{\rho_{i}}, qu’on peut choisir de régularité maximale et de type constant (c’est-à-dire dans une orbite de G𝐺G fixée). Quitte à extraire, on peut supposer que αisubscript𝛼𝑖\alpha_{i} tend vers un point α𝛼\alpha de Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X, qui est alors fixé par ρ𝜌\rho. Quitte à remplacer ρisubscript𝜌𝑖{\rho_{i}} par un conjugué kiρisubscript𝑘𝑖subscript𝜌𝑖k_{i}\cdot{\rho_{i}} avec (ki)isubscriptsubscript𝑘𝑖𝑖(k_{i})_{i} une suite dans le sous-groupe compact K=StabG(x0)𝐾subscriptStab𝐺subscript𝑥0K=\mathrm{Stab}_{G}({x_{0}}) convergeant vers 1Gsubscript1𝐺1_{G}, on peut supposer que αisubscript𝛼𝑖\alpha_{i} est toujours égal à α𝛼\alpha (en prenant kisubscript𝑘𝑖k_{i} tel que kiαi=αsubscript𝑘𝑖subscript𝛼𝑖𝛼k_{i}\alpha_{i}=\alpha). Comme ρ𝜌\rho est complètement réductible, elle fixe un point β𝛽\beta de Xsubscript𝑋\partial_{\infty}X opposé à α𝛼\alpha. La composée σisubscript𝜎𝑖\sigma_{i} de ρisubscript𝜌𝑖{\rho_{i}} par la projection pαβsubscript𝑝𝛼𝛽p_{\alpha\beta} est alors une semisimplification de ρisubscript𝜌𝑖{\rho_{i}} (proposition 16 et corollaire 17), et tend vers pαβρ=ρsubscript𝑝𝛼𝛽𝜌𝜌p_{\alpha\beta}\circ\rho=\rho. On a donc que Gσi=π(ρi)𝐺subscript𝜎𝑖𝜋subscript𝜌𝑖G\cdot\sigma_{i}=\pi({\rho_{i}}) tend vers Gρ=π(ρ)𝐺𝜌𝜋𝜌G\cdot\rho=\pi(\rho) dans Rcr/GsubscriptR𝑐𝑟𝐺\mathrm{R}_{cr}/G, ce qui conclut pour la continuité de π𝜋\pi.

L’application π𝜋\pi passe alors au quotient en π¯:R//G𝒳cr\overline{\pi}:\mathrm{R}//G\longrightarrow{\mathcal{X}}_{cr} continue, et on vérifie aisément que la restriction de p¯:R/GR//G\overline{p}:\mathrm{R}/G\longrightarrow\mathrm{R}//G à 𝒳crsubscript𝒳𝑐𝑟{\mathcal{X}}_{cr} en est un inverse. ∎

On inclut pour finir quelques propriétés de R//G\mathrm{R}//G ayant un intérêt propre.

Proposition 24.

L’espace 𝒳crsubscript𝒳𝑐𝑟{\mathcal{X}}_{cr} est localement compact et dénombrable à l’infini.

Proof.

En effet l’image par π:R𝒳cr:𝜋Rsubscript𝒳𝑐𝑟\pi:\mathrm{R}\longrightarrow{\mathcal{X}}_{cr} de la trace sur RcrsubscriptR𝑐𝑟\mathrm{R}_{cr} d’une base dénombrable d’ouverts relativement compacts de RR\mathrm{R} fournit une base dénombrable d’ouverts (car la restriction de π𝜋\pi à RcrsubscriptR𝑐𝑟\mathrm{R}_{cr} est ouverte et surjective) relativement compacts (car π𝜋\pi est continue sur RR\mathrm{R}) de 𝒳crsubscript𝒳𝑐𝑟{\mathcal{X}}_{cr}. ∎

Proposition 25.

L’application “minimum de déplacement” λ:R+:𝜆Rsuperscript\lambda:\mathrm{R}\longrightarrow\mathbb{R}^{+} est continue, et passe au quotient en une fonction continue et propre sur R//G\mathrm{R}//G.

Remarque 26.

Dans un espace CAT(0)CAT0\mathrm{CAT}(0) quelconque, λ𝜆\lambda est semicontinue, mais elle n’est pas continue en général (par exemple, dans le cas du plan euclidien).

Proof.

Montrons tout d’abord que λ𝜆\lambda passe au quotient. On a λ(π(ρ))=λ(ρ)𝜆𝜋𝜌𝜆𝜌\lambda(\pi(\rho))=\lambda(\rho) par la proposition 16 (2)(car π(ρ)𝜋𝜌\pi(\rho) est une réduction de ρ𝜌\rho). Donc λ𝜆\lambda passe au quotient en une fonction R//G+\mathrm{R}//G\longrightarrow\mathbb{R}^{+} qu’on notera aussi λ𝜆\lambda.

Montrons maintenant la continuité de λ𝜆\lambda sur RR\mathrm{R} : soit (ρi)isubscriptsubscript𝜌𝑖𝑖({\rho_{i}})_{i\in\mathbb{N}} une suite dans RR\mathrm{R} telle que ρiρsubscript𝜌𝑖𝜌{\rho_{i}}\rightarrow\rho. Alors λ(ρi)𝜆subscript𝜌𝑖\lambda({\rho_{i}}) est borné. Supposons (quitte à extraire) que λ(ρi)𝜆subscript𝜌𝑖\lambda({\rho_{i}})\rightarrow\ell. On peut alors choisir une suite de conjugués ρisubscriptsuperscript𝜌𝑖\rho^{\prime}_{i} de ρisubscript𝜌𝑖\rho_{i} telle que ρiρsubscriptsuperscript𝜌𝑖superscript𝜌\rho^{\prime}_{i}\rightarrow\rho^{\prime} avec λ(ρ)=𝜆superscript𝜌\lambda(\rho^{\prime})=\ell (prop. 13, (2)). On a que π(ρi)π(ρ)𝜋subscriptsuperscript𝜌𝑖𝜋superscript𝜌\pi(\rho^{\prime}_{i})\rightarrow\pi(\rho^{\prime}) et π(ρi)π(ρ)𝜋subscript𝜌𝑖𝜋𝜌\pi(\rho_{i})\rightarrow\pi(\rho) par continuité de π𝜋\pi (thm 23), or π(ρi)=π(ρi)𝜋subscriptsuperscript𝜌𝑖𝜋subscript𝜌𝑖\pi(\rho^{\prime}_{i})=\pi({\rho_{i}}) pour tout i𝑖i, donc π(ρ)=π(ρ)𝜋𝜌𝜋superscript𝜌\pi(\rho)=\pi(\rho^{\prime}) (car 𝒳crsubscript𝒳𝑐𝑟{\mathcal{X}}_{cr} séparé). On a vu qu’alors λ(ρ)=λ(ρ)=𝜆𝜌𝜆superscript𝜌\lambda(\rho)=\lambda(\rho^{\prime})=\ell, ce qui conclut.

L’application quotient λ:R//G+\lambda:\mathrm{R}//G\longrightarrow\mathbb{R}^{+} est donc continue. Montrons qu’elle est propre. Soit D>0𝐷0D>0. Comme G𝐺G agit cocompactement sur X𝑋X, il existe C𝐶C\in\mathbb{R} tel que si λ(ρ)<D𝜆𝜌𝐷\lambda(\rho)<D alors il existe gG𝑔𝐺g\in G tel que dgρ(x0)Csubscript𝑑𝑔𝜌subscript𝑥0𝐶d_{g\cdot\rho}({x_{0}})\leq C. En particulier p(ρ)𝑝𝜌p(\rho) est alors dans l’image par p𝑝p continue du compact {ρR,dρ(x0)C}formulae-sequence𝜌Rsubscript𝑑𝜌subscript𝑥0𝐶\{\rho\in\mathrm{R},\ d_{\rho}({x_{0}})\leq C\} de RR\mathrm{R}, qui est un compact de R//G\mathrm{R}//G, ce qui conclut. ∎

References

  • [BMR] M. Bate, B. Martin, G. Röhrle, A geometric approach to complete reducibility, Invent. Math. 161 (2005), 177–218.
  • [Borel1] A. Borel, Linear algebraic groups, Graduate Texts in Math., 126. Springer-Verlag, New York, 1991.
  • [Borel2] A. Borel, Linear algebraic groups. 1966 Algebraic Groups and Discontinuous Subgroups (Proc. Sympos. Pure Math., Boulder, Colo., 1965) 3–19.
  • [BoTi] A. Borel, J. Tits, Groupes réductifs, Publ. math. I.H.É. S. 27, 1965, 55-150.
  • [Bou1] N. Bourbaki, Algèbre commutative, Chap 6. Valuations, Hermann, Paris, 1964.
  • [Bou2] N. Bourbaki, Groupes et algèbres de Lie, Hermann, Paris, 1968.
  • [Bou3] N. Bourbaki, Topologie Générale, Hermann, Paris, 1971.
  • [Bre] R. J. Bremigan, Quotients for algebraic group actions over non-algebraically closed fields, J. Reine Angew. Math. 453 (1994), 21–47.
  • [BrHa] M.R. Bridson, A. Haefliger, Metric spaces with non-positive curvature, Grund. math. Wiss. 319, Springer Verlag, 1999.
  • [Bro] K. Brown, Buildings, Springer Verlag, 1989.
  • [BrTi] F. Bruhat, J. Tits, Groupes réductifs sur un corps local, I. Données radicielles valuées, Publ. Math. I.H.E.S. 41 (1972), 5-252.
  • [Ebe] P. Eberlein, Geometry of non-positively curved manifolds, Chicago L. N. in Math., The Univ. of Chicago Press, 1996.
  • [Hel] S. Helgason, Differential geometry, Lie groups and symmetric spaces, Academic Press, 1978.
  • [JoMi] D. Johnson, J. J. Millson, Deformation spaces associated to compact hyperbolic manifolds, Discrete groups in geometry and analysis (New Haven, Conn., 1984), Progr. Math. 67, Birkhäuser (1987) 48-106.
  • [Lab] F. Labourie, Existence d’applications harmoniques tordues à valeurs dans les variétés à courbure négative, Proc. Amer. Math. Soc. 111 (1991) 877-882.
  • [LuMa] A. Lubotzky, A. R. Magid, Varieties of representations of finitely generated groups, Mem. Amer. Math. Soc. 58, 1985.
  • [Luna] D. Luna, Sur certaines opérations différentiables des groupes de Lie, Amer. J. Math. 97 (1975), 172–181.
  • [Mar] G. Margulis, Discrete subgroups of semi-simple groups, Ergeb. Math. Grenz. 17, Springer Verlag, 1991.
  • [Par1] A. Parreau, Dégénérescences de sous-groupes discrets de groupes de Lie semisimples et actions de groupes sur des immeubles affines, thèse de doctorat, Univ. Orsay, 2000.
  • [Par2] A. Parreau, Immeubles affines : construction par les normes et étude des isométries, Crystallographic groups and their generalizations (Kortrijk, 1999), 263-302, Contemp. Math., 262, Amer. Math. Soc., 2000.
  • [Par3] A. Parreau, Compactification d’espaces de représentations de groupes de type fini, prépublication, arXiv:1003.1111.
  • [Ric] R. W. Richardson, Conjugacy classes of n𝑛n-tuples in Lie algebras and algebraic groups, Duke Math. J. 57 (1988) 1-35.
  • [RiSl] R. W. Richardson, P. J. Slodowy, Minimum vectors for real reductive algebraic groups, J. London Math. Soc. 42 (1990), 409–429.
  • [Rou] G. Rousseau, Euclidean buildings, Géométries à courbure négative ou nulle, groupes discrets et rigidités (A. Parreau L. Bessières and B. Rémy, eds.), Séminaires et Congrès 18, Société mathématique de France, 2008.
  • [Serre] J.-P. Serre, Complète Reductibilite, Séminaire Bourbaki 2003-2004, Astérisque 299, Exp. No. 932, 195-217.
  • [Tits] J. Tits Reductive groups over local fields, Automorphic forms, representations and L𝐿L-functions (Proc. Sympos. Pure Math., Oregon State Univ., Corvallis, Ore., 1977), Proc. Sympos. Pure Math., XXXIII, Amer. Math. Soc., 1979, 29–69.
  • [Wolff] M. Wolff, Sur les composantes exotiques des espaces d’actions de groupes de surfaces sur le plan hyperbolique, thèse de doctorat, Univ. Grenoble 1, 2007.