Variétés presque rationnelles, leurs points rationnels et leurs dégénérescences
Cours au CIME, Septembre 2007
1 Introduction
Voici une série de résultats classiques.
Toute forme quadratique en au moins trois variables sur le corps fini ( premier) possède un zéro non trivial (Euler). Toute forme de degré en variables sur possède un zéro non trivial (Chevalley-Warning).
Toute forme quadratique en au moins trois variables sur le corps des fonctions rationnelles en une variable possède un zéro non trivial (Max Noether). Toute forme de degré en variables sur une extension finie de possède un zéro non trivial (Tsen). Ceci vaut encore sur le corps des séries formelles en une variable (Lang).
Sur un corps fini, sur un corps de fonctions d’une variable sur , sur le corps , tout espace homogène d’un groupe algébrique linéaire connexe a un point rationnel.
Toute forme de degré en variables sur le corps -adique possède un zéro non trivial sur une extension non ramifiée de (Lang).
Toute forme de degré en variables sur un corps de fonctions de deux variables sur possède un zéro non trivial (Lang).
Toute forme quadratique en variables sur un corps -adique possède un zéro non trivial (Hensel, Hasse).
Toute forme cubique en variables sur un corps -adique possède un zéro non trivial (Demjanov, Lewis).
Pour donné, pour presque tout premier , toute forme possède un zéro non trivial (Ax-Kochen).
Sur un corps -adique, tout espace homogène principal d’un groupe semi-simple simplement connexe possède un point rationnel (Kneser, Bruhat-Tits).
Sur un type donné de corps, y a-t-il une classe naturelle de variétés algébriques qui sur un tel corps ont automatiquement un point rationnel ?
Sur les corps de fonctions d’une variable sur d’une part, sur les corps finis d’autre part, des progrès décisifs ont été accomplis dans les cinq dernières années, et on peut dans une certaine mesure dire que la situation est stabilisée. La similitude apparente des résultats est trompeuse. Les résultats cités sur les corps finis s’étendent à une classe beaucoup plus large de variétés que les résultats sur un corps de fonctions d’une variable. Les techniques utilisées sur un corps fini relèvent de la cohomologie étale (ou, de la cohomologie -adique). Les techniques utilisées sur un corps de fonctions sur les complexes relèvent de la cohomologie cohérente : théorie de la déformation, théorèmes d’annulation de Kodaira et généralisations, programme du modèle minimal.
Sur les corps de fonctions de deux variables, la recherche est extrêmement active.
Dans ce rapport, qui ne contient pratiquement pas de démonstrations, j’ai essayé de présenter un instantané de la situation.
Une partie importante du texte suit un fil unifiant les travaux sur les corps de fonctions d’une variable, ceux sur les corps de fonctions de deux variables, et l’étude des variétés sur les corps -adiques. C’est l’étude des modèles projectifs réguliers au-dessus d’un anneau de valuation discrète et de leur fibre spéciale.
Certains aspects de ce texte ont fait l’objet d’exposés depuis quelques années. Je remercie Esnault, Gabber, Hassett, de Jong, Kollár, Madore, Moret-Bailly, Starr et Wittenberg pour diverses discussions.
J’engage les lecteurs à consulter le rapport récent d’O. Wittenberg [69].
2 Notations, rappels et préliminaires
Soit un corps. On note une clôture séparable de et une clôture algébrique de . Une -variété est par définition un -schéma séparé de type fini sur (non nécessairement irréductible, non nécessairement réduit). On note l’ensemble des points -rationnels d’un -schéma . Une -variété est dite intègre si elle est irréductible et réduite. On note alors son corps des fonctions. Une -variété est dite géométriquement intègre si la -variété est intègre. Une -variété géométriquement intègre possède un ouvert de Zariski non vide qui est lisse sur . Si est un corps de caractéristique zéro, une -variété intègre est géométriquement intègre si et seulement si le corps est algébriquement fermé dans le corps .
Pour la cohomologie galoisienne, et en particulier le groupe de Brauer d’un corps, le lecteur consultera Serre ([65]). En plusieurs endroits on fera libre usage de la notion de dimension cohomologique d’un corps.
En quelques endroits on fera aussi usage de certaines propriétés du groupe de Brauer d’un schéma. Le lecteur se reportera aux exposés de Grothendieck ([36]).
Lemme 2.1.
(Nishimura, Lang) Soient un corps, une -variété régulière connexe et une -variété propre. Si l’on a et s’il existe une -application rationnelle de vers , alors .
Lemme 2.2.
Soient un corps, une -variété géométriquement intègre et une -variété lisse connexe. S’il existe un -morphisme alors la -variété est géométriquement intègre.
Démonstration.
La -variété lisse est géométriquement intègre si et seulement si est irréductible. Supposons qu’elle ne le soit pas. On dispose alors du -morphisme . Le groupe de Galois de sur permute les composantes de . L’image de doit se trouver dans chaque composante de . Comme est lisse, ces composantes ne se rencontrent pas. Donc n’a qu’une seule composante. ∎
Remarque 2.3. Comme l’observe Moret-Bailly, cet énoncé est une conséquence de deux résultats généraux. Soit un -morphisme de -variétés. Si est géométriquement connexe et connexe, alors est géométriquement connexe. Par ailleurs, si est normal et géométriquement connexe, alors est géométriquement irréductible.
Obstruction élémentaire
Soient un corps, une clôture séparable de , le groupe de Galois absolu. Soit une -variété lisse géométriquement intègre. L’inclusion naturelle de groupes multiplicatifs définit une suite exacte
La classe de l’extension de modules galoisiens discrets obtenue est appelée l’obstruction élémentaire à l’existence d’un -point : si possède un -point, alors (CT-Sansuc, voir [4]). Si , alors pour toute extension finie séparable , l’application naturelle de groupes de Brauer est injective.
Construction de grands corps
Soit un corps de caractéristique zéro. Pour chaque corps contenant , donnons-nous une classe de -variétés algébriques géométriquement intègres admettant un ensemble de -variétés représentant toutes les classes de -isomorphie de la classe. Pour on suppose que le changement de corps de base envoie dans .
Pour tout corps avec supposons satisfaite la condition suivante :
(Stab) Si est un -morphisme dominant de -variétés géométriquement intègres, si appartient à et si la fibre générique de appartient à , alors appartient à .
Une construction bien connue, utilisée par Merkur’ev et Suslin (cf. [23]) permet alors de construire un plongement de corps possédant les propriétés suivantes :
(i) Le corps est algébriquement fermé dans .
(ii) Le corps est union de corps de fonctions de -variétés dans .
(iii) Toute variété dans possède un point -rationnel.
Le principe est le suivant : s’il existe un -variété dans qui ne possède pas de point rationnel, on remplace par le corps des fonctions de cette variété. Et on itère. Je renvoie à l’article de Ducros [23] pour la construction prècise, qui est reprise dans [14] et [10].
Prenons pour la classe des -variétés géométriquement intègres. Rappelons qu’un corps est dit pseudo-algébriquement clos (PAC) si toute -variété géométriquement intègre sur possède un -point. La construction ci-dessus montre que tout corps de caractéristique zéro est algébriquement fermé dans un corps pseudo-algébriquement clos.
En prenant pour la classe des -variétés birationnelles à des fibrations successives de restrictions à la Weil de variétés de Severi-Brauer, Ducros [23] montre que tout corps de caractéristique zéro est algébriquement fermé dans un corps de dimension cohomologique .
3 Schémas au-dessus d’un anneau de valuation discrète
3.1 -schémas de type (R), croisements normaux, croisements normaux stricts
Soit un anneau de valuation discrète, son corps des fractions, son corps résiduel. Soit une uniformisante de .
Dans la suite de ce texte, on dira qu’un -schéma est de type (R) s’il satisfait les conditions suivantes :
(i) Le -schéma est propre et plat sur .
(ii) Le schéma est connexe et régulier.
(iii) La fibre générique est une -variété géométriquement intègre lisse sur .
On note le corps des fonctions de , qui est aussi celui du schéma . On note la fibre spéciale de . La fibre spéciale est le -schéma associé au diviseur de Cartier de défini par l’annulation de .
Comme est régulier donc normal, on a une décomposition de diviseurs de Weil
où les sont les adhérences des points de codimension 1 de situés sur la fibre spéciale. L’anneau local de tout tel point est un anneau de valuation discrète de corps des fractions . Si l’on note la valuation sur le corps associée à un tel , alors .
Comme est régulier, les sont des diviseurs de Cartier sur . Ce sont les composantes réduites de la fibre spéciale. Ce sont des -variétés intègres mais non nécessairement géométriquement irréductibles ni (si le corps n’est pas parfait) nécessairement géométriquement réduites.
On dit que est à croisements normaux si partout localement pour la topologie étale sur l’inclusion est donnée par une équation , où les font partie d’un système régulier de paramètres et les sont des entiers naturels.
On dit que est à croisements normaux stricts si la fibre est à croisements normaux et si de plus chaque composante réduite de est une -variété (intègre) lisse. Une telle composante n’est pas nécessairement géométriquement irréductible.
On note le hensélisé de , et l’on note un hensélisé strict de . On note le corps des fractions de et le corps des fractions de . Les inclusions induisent sur les corps résiduels, où est une clôture séparable de .
On note le complété de . Si les corps et ont même caractéristique, alors il existe un corps de représentants de dans : il existe un isomorphisme .
3.2 Quand la fibre spéciale a une composante de multiplicité 1
Proposition 3.1.
Soit un -schéma de type (R). Les propriétés suivantes sont équivalentes :
-
(1)
Il existe une composante réduite dont l’ouvert de lissité est non vide et qui satisfait .
-
(2)
Il existe un ouvert lisse et surjectif sur .
-
(3)
est localement scindé pour la topologie étale.
-
(4)
.
-
(5)
.
-
(6)
.
-
(7)
.
Démonstration.
Laissée au lecteur. ∎
Dans la situation ci-dessus, on dira que a une composante de multiplicité 1. 111La terminologie adoptée dans ce texte diffère de celle de [5].
Proposition 3.2.
(a) Soient un -schéma lisse connexe fidèlement plat sur et un -schéma de type (R). S’il existe une -application rationnelle de dans , alors la fibre spéciale de a une composante de multiplicité 1.
(b) Soient et deux -schémas de type (R). Si les fibres génériques et sont -birationnellement équivalentes, alors la fibre spéciale de a une composante de multiplicité 1 si et seulement si la fibre spéciale de a une composante de multiplicité 1.
Démonstration.
Il suffit d’établir (a). L’hypothèse sur et le lemme de Hensel assurent , donc . Comme la -variété est régulière et la -variété propre, d’après le lemme 2.1 l’existence d’un -point sur implique l’existence d’un -point sur . ∎
Remarque 3.3. (Wittenberg) Soient le corps des fractions rationnelles à deux variables et la conique lisse définie par l’équation homogène . Pour tout anneau de valuation discrète de rang 1, de corps des fractions , on a , où est le corps des fractions d’un hensélisé strict de . Mais si est un morphisme propre et plat de variétés projectives lisses connexes de fibre générique , le morphisme n’est pas localement scindé pour la topologie étale.
3.3 Quand la fibre spéciale contient une sous-variété géométriquement intègre
Proposition 3.4.
(a) Soit un -schéma régulier connexe fidèlement plat sur et soit un -schéma propre. Si la fibre spéciale de contient une sous--variété géométriquement intègre, et s’il existe une -application rationnelle de dans , alors la fibre spéciale de contient une sous--variété géométriquement intègre.
(b) Soient et deux -schémas de type (R). Si les fibres génériques et sont -birationnellement équivalentes, alors la fibre spéciale contient une sous--variété géométriquement intègre si et seulement si la fibre spéciale contient une sous--variété géométriquement intègre.
Démonstration.
Il suffit de démontrer le point (a). On peut supposer la sous-variété intègre fermée. Soit l’ouvert de lissité de . Soit l’éclaté de le long de . L’image réciproque de dans est un fibré projectif sur , qui est une -variété géométriquement intègre. Soit son point générique. C’est un point régulier de codimension 1 sur . L’application rationnelle est donc définie au point . Soit son image. L’adhérence de dans est une sous--variété fermée de , munie d’une application -rationnelle dominante d’une -variété géométriquement intègre. C’est donc une -variété géométriquement intègre. ∎
Proposition 3.5.
Soit un anneau de valuation discrète de corps résiduel et soit un -schéma de type (R). Supposons les composantes réduites lisses sur . Les propriétés suivantes sont équivalentes :
-
(1)
La fibre spéciale contient une sous--variété géométriquement intègre.
-
(2)
Il existe une -variété géométriquement intègre et un -morphisme .
-
(3)
Il existe une composante réduite de qui est géométriquement intègre.
Si de plus , ces propriétés sont équivalentes aux propriétés suivantes :
-
(4)
Il existe une extension locale d’anneaux de valuation discrète telle que le corps résiduel de soit algébriquement fermé dans le corps résiduel de , et que l’on ait .
-
(5)
Si est un plongement de dans un corps pseudo-algébriquement clos dans lequel est algébriquement fermé, et si , il existe une extension finie totalement ramifiée avec .
Démonstration.
Soit comme en (2). Une telle application se factorise par au moins un morphisme pour convenable, et le lemme 2.2 montre que est alors géométriquement intègre, on a donc (3). Les autres implications entre (1), (2) et (3) sont évidentes. L’énoncé (5) implique trivialement (4), et (4) implique (5) comme l’on voit en passant aux complétés et en remplaçant dans , où est un plongement du corps résiduel dans un corps pseudo-algébriquement clos dans lequel et donc aussi est algébriquement fermé. De (4) on déduit l’existence d’un -morphisme , ce qui implique l’énoncé (2). Soit une composante comme en (3). Soit l’anneau local du point générique de sur . L’inclusion satisfait (4). ∎
Dans la situation ci-dessus, on dira que la fibre spéciale a une composante (réduite) géométriquement intègre.
Des deux propositions précédentes il résulte :
Proposition 3.6.
Soient et deux -schémas de type(R), de fibres spéciales respectives et . Supposons les composantes réduites de et lisses sur . S’il existe une application -rationnelle de vers , et si a une composante géométriquement intègre, alors a une composante géométriquement intègre.
Remarque 3.7. On trouvera dans l’article [24] de Ducros de nombreux compléments et extensions des énoncés ci-dessus.
3.4 Quand la fibre spéciale a une composante géométriquement intègre de multiplicité 1
Proposition 3.8.
Soit un anneau de valuation discrète de corps résiduel et soit un -schéma de type (R). Les propriétés suivantes sont équivalentes :
-
(1)
Il existe une composante réduite qui est géométriquement intègre et pour laquelle .
-
(2)
Il existe un ouvert non vide lisse, surjectif sur et à fibres géométriquement intègres.
Pour de caractéristique zéro, ces propriétés sont équivalentes aux propriétés suivantes :
-
(3)
Il existe une extension non ramifiée d’anneaux de valuation discrète telle que soit algébriquement fermé dans le corps résiduel de et que .
-
(4)
Si est un plongement de dans un corps pseudo-algébriquement clos dans lequel est algébriquement fermé, et si , on a .
L’existence d’une composante comme en (1) est une condition nécessaire pour l’existence d’un -point sur .
Démonstration.
L’équivalence de (1) et (2) est claire. L’équivalence de (3) et (4) est aussi claire. Pour l’équivalence entre (1) et (2) d’une part et (3) et (4) d’autre part, et pour la démonstration de la dernière assertion, voir [13], fin de l’argument p. 745. ∎
Dans la situation ci-dessus, on dira que a une composante géométriquement intègre de multiplicité 1.
Proposition 3.9.
Supposons de caractéristique zéro.
(a) Soit un -schéma connexe lisse et surjectif sur , à fibres géométriquement intègres. Soit un -schéma de type (R). S’il existe une application -rationnelle de vers , alors il existe un ouvert tel que le morphisme induit soit lisse et surjectif.
(b) Soient et deux -schémas de type (R). Si les fibres génériques et sont -birationnellement équivalentes, alors la fibre spéciale a une composante géométriquement intègre de multiplicité 1 si et seulement si la fibre spéciale a une composante géométriquement intègre de multiplicité 1.
Démonstration.
Question 3.10.
Soit un corps de caractéristique zéro, un corps de type fini sur , une -variété projective, lisse, géométriquement intègre. Supposons que pour tout anneau de valuation discrète de rang un contenant et de corps des fractions il existe un -modèle de type (R) de dont la fibre spéciale contient une composante géométriquement intègre de multiplicité 1. Existe-t-il un -morphisme de -variétés projectives, lisses, géométriquement intègres satisfaisant les propriétés suivantes :
(a) le corps des fonctions de est ;
(b) la fibre générique de est -isomorphe à ;
(c) il existe un ouvert tel que le morphisme induit soit lisse surjectif (fidèlement plat) et à fibres géométriquement intègres.
On comparera cette question avec la remarque 3.2.
Remarque 3.11. On exhibe facilement un morphisme de -variétés projectives, lisses, géométriquement intègres, de fibre générique une quadrique de dimension 2, tel que la fibre en tout point de codimension 1 de soit géométriquement intègre sans que pour autant l’hypothèse dans la question ci-dessus soit satisfaite (désingulariser l’exemple de la remarque 13.1).
3.5 Un exemple : quadriques
Discutons le cas des modèles de quadriques de dimension au moins 1. Supposons . Soit la valuation de . Une quadrique lisse dans () peut être définie par une forme quadratique diagonale sur .
Considérons le cas des coniques. En chassant les dénominateurs et en poussant les carrés dans les variables, on voit que l’équation définissant la quadrique dans peut s’écrire
avec et ou . Cette équation définit un modèle régulier , et la fibre spéciale est à croisements normaux.
Si , alors la fibre spéciale est une conique lisse, en particulier géométriquement intègre, et est à croisements normaux stricts.
Si , la fibre spéciale possède un -point rationnel évident, , donné par .
Si et si la classe de dans est un carré, la fibre spéciale se décompose sous la forme
avec chaque . Dans ce cas est à croisements normaux stricts.
Si et si la classe de dans n’est pas un carré, alors la fibre spéciale est intègre, mais se décompose sur une extension quadratique de en deux droites conjuguées se rencontrant en , donc n’est pas lisse, n’est pas à croisements normaux stricts. Si l’on éclate le point rationnel singulier sur , on obtient un modèle dont la fibre spéciale se décompose sous la forme
où est le diviseur exceptionnel introduit par l’éclatement. La -courbe est intègre, elle se décompose sur une extension quadratique de en la somme de deux droites conjuguées ne se rencontrant pas, et rencontrant transversalement. Donc est lisse, et est à croisements normaux stricts.
En résumé, pour toute conique lisse sur , on a les propriétés suivantes.
(a) Il existe un modèle régulier avec à croisements normaux dont au moins une composante a multiplicité 1 et admet un ouvert non vide lisse sur , mais n’est pas nécessairement géométriquement intègre.
(b) Il existe un modèle régulier avec à croisements normaux dont la fibre spéciale contient une sous--variété géométriquement intègre.
(c) Il existe un modèle régulier avec à croisements normaux stricts dont une composante est géométriquement intègre (mais pas nécessairement de multiplicité 1). D’après les paragraphes 3.2 et 3.3 les propriétés (a) et (b) valent pour tout -modèle de type (R) et la propriété (c) vaut pour tout -modèle dont la fibre spéciale est à croisements normaux stricts.
Considérons le cas des quadriques de dimension au moins 3. On peut définir une telle quadrique dans ( par une équation
avec . Dans , cette équation définit un modèle intègre, normal et propre sur . La fibre spéciale est géométriquement intègre (et en particulier de multiplicité 1). D’après le paragraphe 3.4 cette propriété vaut alors pour tout -modèle de type (R).
4 Groupe de Brauer des schémas au-dessus d’un anneau de valuation discrète
Pour les démonstrations des résultats énoncés dans ce paragraphe, le lecteur se reportera aux exposés de Grothendieck [36].
Dans cette section, la cohomologie employée est la cohomologie étale, qui sur un corps est la cohomologie galoisienne du corps (c’estt-à-dire de son groupe de Galois absolu).
Soit un anneau de valuation discrète de corps des fractions et de corps résiduel parfait. On dispose alors d’une application résidu
envoyant le groupe de Brauer de dans le groupe des caractères du groupe de Galois absolu de . Plus précisément, on a une suite exacte
La flèche de droite est surjective sur la torsion première à la caractéristique de .
Lorsque est hensélien, la flèche naturelle est un isomorphisme. Si de plus est de dimension cohomologique , alors et .
Soit un homomorphisme local d’anneaux de valuation discrète à corps résiduels parfaits. Soit l’inclusion de corps de fractions correspondante. Soit l’indice de ramification de sur , c’est-à-dire la valuation dans de l’image d’une uniformisante de . Soit l’inclusion des corps résiduels. On a alors le diagramme commutatif suivant :
Soit la fermeture algébrique de dans . Le noyau de
s’identifie au noyau de
Soit un anneau de valuation discrète de corps des fractions de corps résiduel un corps de caractéristique zéro. Soit un -schéma de type (R). Soit la fibre générique. Soit la décomposition de la fibre spéciale en diviseurs intègres. Soit la fermeture algébrique de dans .
Comme les schémas intègres et sont réguliers, les applications de restriction sont injectives. On dispose alors du diagramme commutatif de suites exactes
et de la suite exacte qui s’en déduit
Proposition 4.1.
Soit un anneau de valuation discrète hensélien à corps résiduel de caractéristique zéro et de dimension cohomologique au plus 1. Soit un -schéma de type (R), de fibre générique . Avec les notations ci-dessus, les deux propriétés suivantes sont équivalentes :
(i) L’application est injective.
(ii) L’application est injective.
En particulier, si la fibre spéciale possède une composante géométriquement intègre de multiplicité 1, ou plus généralement si le pgcd des entiers est égal à 1, alors est injective, et il en est donc de même de et de .
Je renvoie à [15] pour une discussion du cas où le corps résiduel est fini.
5 Corps
Théorème 5.1.
(Tsen, 1933) Soit un corps algébriquement clos et un corps de fonctions d’une variable sur . Soit une hypersurface de degré . Si l’on a , alors .
On notera que l’on ne fait aucune hypothèse sur , qui peut être réductible.
Le cas des coniques () avait été établi par Max Noether par une méthode géométrique.
Soit un entier. On dit qu’un corps possède la propriété si toute forme à coefficients dans , de degré en variables a un zéro non trivial sur . On dit qu’un corps possède la propriété si pour toute famille finie de formes de degrés respectifs avec il existe un zéro commun non trivial sur .
La propriété implique la propriété ci-dessus pour un système de formes lorsque tous les degrés sont égaux (Artin, Lang, Nagata). On ne sait pas si en général implique (voir [63]).
Un corps est algébriquement clos si et seulement si il est . Le théorème de Tsen dit qu’un corps de fonctions d’une variable sur un corps algébriquement clos est un corps . Dans sa thèse, suivant des suggestions d’E. Artin, S. Lang généralisa le théorème de Tsen. Son résultat, pour lequel on trouve quelques antécédents dans les textes des géomètres algébristes italiens, fut complété par Nagata. Le résultat général est le suivant.
Théorème 5.2.
(Lang, Nagata) [54] Soit un corps . Toute extension algébrique de est un corps . Le corps des fractions rationnelles en une variable est . De façon générale, toute extension de degré de transcendance de est un corps .
Lang établit aussi le théorème suivant.
Théorème 5.3.
(Lang) [54] Soit un anneau de valuation discrète hensélien de corps des fractions et de corps résiduel . Soit le complété de . Supposons séparable sur . Si est algébriquement clos, alors est un corps .
En particulier l’extension maximale non ramifiée du corps -adique est un corps .
Dans la situation considérée au paragraphe 3 (voir la Proposition 3.1), si l’on suppose le corps résiduel de parfait, ce théorème assure que la fibre spéciale d’une hypersurface de degré dans avec possède une composante de multiplicité 1.
Théorème 5.4.
(Greenberg)[35] Si est un corps alors est un corps .
Ce théorème ne s’étend pas dans une situation d’inégale caractéristique : les corps -adiques ne sont pas (Terjanian). Ils ne sont en fait pour aucun (Arkhipov et Karatsuba).
Le théorème de Tsen est souvent mis en parallèle avec l’énoncé suivant, qui implique que les corps finis sont des corps .
Théorème 5.5.
(Chevalley, Warning, 1935) Soit un corps fini de caractéristique . Soit une hypersurface de degré . Si l’on a , alors . Plus précisément, le cardinal de est congru à 1 modulo .
On montra plus tard (Ax (1964), Katz (1971)) que si le cardinal de est alors le cardinal de est congru à 1 modulo .
Le cas des coniques avait été établi par Euler [29], dans un article où il établit aussi la formule de multiplication pour les sommes de quatre carrés. La combinaison de ces deux résultats lui permit de montrer que tout rationnel positif est une somme de quatre carrés de rationnels.
Comme pour le théorème de Tsen, le théorème de Chevalley-Warning ne fait aucune hypothèse sur . On peut voir là l’origine de la conjecture suivante.
Conjecture 5.6.
(Ax) [2] Soient un corps et une hypersurface de degré . Si l’on a , alors il existe une sous--variété qui est géométriquement irréductible.
Si est parfait, dans la conclusion on peut remplacer « géométriquement irréductible » par « géométriquement intègre ». Mais comme l’exemple de la forme irréductible sur le corps le montre, ceci ne vaut pas sur corps non parfait.
Le cas a été discuté plus haut. Le cas est facile. Le cas fut établi par Denef, Jarden et Lewis dans [22]. Dans le même article, les auteurs établissent la conjecture lorsque contient un corps algébriquement clos. La démonstration de ce résultat utilise la théorie des corps hilbertiens.
En caractéristique nulle, la conjecture d’Ax est maintenant un théorème de Kollár (Théorème 7.10 ci-après).
Les corps finis, les corps de fonctions d’une variable, le corps sont des corps de dimension au sens de Serre ([65], II.3.1) : le groupe de Brauer de toute extension finie de est trivial. De fait, tout corps est de dimension . On sait (Ax) que la réciproque est fausse (pour des références et d’autres résultats dans cette direction, voir [14]).
Tout espace homogène d’un groupe algébrique linéaire connexe sur un corps parfait de dimension a un point rationnel (Steinberg, Springer, voir [65]).
Les corps finis et le corps ont des groupes de Galois isomorphes au groupe . Tout espace homogène d’une variété abélienne sur un corps fini possède un point rationnel (Lang) mais ceci n’est pas vrai sur , comme le montre l’exemple de la courbe de genre 1 donnée dans par l’équation homogène .
6 -équivalence et équivalence rationnelle sur les zéro-cycles
Soient un corps et une -variété. Deux -points de sont élémentairement -liés s’il existe un -morphisme d’un ouvert de tel que les deux points soient dans l’image de . La relation d’équivalence sur engendrée par cette relation est appelée la -équivalence [59]. Pour de caractéristique zéro, l’ensemble est un invariant -birationnel des -variétés projectives, lisses, géométriquement intègres [16].
Soit une -variété algébrique. On note le groupe abélien libre sur les points fermés de . C’est le groupe des zéro-cycles de . Le groupe de Chow (de degré zéro), noté , est le quotient du groupe par le sous-groupe engendré par les zéro-cycles de la forme , où est un -morphisme propre d’une -courbe normale intègre, est une fonction rationnelle sur et est son diviseur.
Si est propre, l’application linéaire envoyant un point fermé sur son degré passe au quotient par l’équivalence rationnelle ci-dessus définie. On note le noyau de l’application , et on l’appelle le groupe de Chow réduit de .
Le groupe de Chow réduit est un invariant -birationnel des -variétés projectives, lisses, géométriquement intègres.
Pour propre, l’application évidente induit une application
dont l’image tombe dans l’ensemble des classes de cycles de degré 1.
7 Autour du théorème de Tsen : Variétés rationnellement connexes
Dans le programme de classification de Mori est apparue au début des années 1990 la notion de variété rationnellement connexe. Les travaux fondateurs résultent d’une collaboration entre Kollár, Miyaoka et Mori; certains des résultats sont dus à Campana. Un rôle-clé y est joué par la théorie des déformations, plus précisément par l’étude infinitésimale des schémas , cas particulier des schémas de Hilbert. On consultera les livres [46] et [21], ainsi que les articles [1] et le récent rapport [67].
Tout fibré vectoriel sur la droite projective est isomorphe à une somme directe de fibrés de rang 1, donc de la forme . Soit un corps algébriquement clos. Soit une -variété algébrique projective, lisse, connexe, de dimension . Soit son fibré tangent. On dit que est séparablement rationnellement connexe (SRC) s’il existe un morphisme très libre, c’est-à-dire tel que dans une (donc dans toute) décomposition du fibré vectoriel
on ait pour tout .
On dit qu’une variété projective lisse et connexe est rationnellement connexe (RC) si, pour tout corps algébriquement clos contenant , par un couple général de points de il passe une courbe de genre zéro, i.e. il existe un -morphisme dont l’image contient les deux points.
On dit qu’une variété projective lisse et connexe est rationnellement connexe par chaînes (RCC) si, pour tout corps algébriquement clos contenant , tout couple général de points de est lié par une chaîne de courbes de genre zéro. Cette dernière propriété est équivalente à la condition que tout couple de points de est lié par une chaîne de courbes de genre zéro. En d’autres termes, l’ensemble est réduit à un élément.
Au lieu de faire les hypothèses ci-dessus pour tout corps algébriquement clos contenant , il suffit de les faire pour un tel corps non dénombrable.
Toute variété RC est clairement RCC.
Théorème 7.1.
(Kollár-Miyaoka-Mori) Toute variété SRC est RC donc RCC. En caractéristique zéro, ces trois propriétés sont équivalentes, et elles impliquent :
Pour tout corps algébriquement clos contenant et tout ensemble fini de points il existe un morphisme très libre tels que tous les soient dans l’image de .
En dimension 1, une variété est RC si et seulement si elle est une courbe lisse de genre zéro. En dimension 2, une variété est SRC si et seulement si elle est rationnelle, i.e. birationnelle à un espace projectif. Une variété projective et lisse unirationnelle est RC. Une variété projective et lisse séparablement unirationnelle est SRC. Sur algébriquement clos, le groupe de Chow réduit d’une variété RCC est clairement trivial.
Si est un corps quelconque, une -variété est dite rationnellement connexe resp. rationnellement connexe par chaînes, respectivement séparablement rationnellement connexe si elle est géométriquement intègre et si elle est RC, resp. RCC, resp. SRC, après passage à un corps algébriquement clos contenant .
Les compactifications lisses d’espaces homogènes de groupes algébriques linéaires connexes sont des variétés RC.
En dimension 2, on dispose d’une classification -birationnelle des -surfaces SRC, c’est-à-dire des -surfaces projectives, lisses (géométriquement) rationnelles (Enriques, Manin, Iskovskikh, Mori) : toute telle surface est -birationnelle à une -surface de del Pezzo ou à une -surface fibrée en coniques au-dessus d’une conique lisse. Une surface de del Pezzo est une surface projective et lisse dont le fibré anticanonique est ample. Le degré d’une telle surface est l’entier . Il satisfait .
Le groupe de Chow réduit d’une variété RCC sur un corps quelconque est clairement un groupe de torsion. On peut montrer (Prop. 11.1) qu’il est annulé par un entier .
Une variété de Fano est une variété projective lisse dont fibré anticanonique est ample. Si est une intersection complète lisse connexe définie par des formes de degrés respectifs , alors est de Fano si et seulement si . On reconnaît là la condition .
Théorème 7.2.
(Campana, Kollár-Miyaoka-Mori) Une variété de Fano est rationnellement connexe par chaînes.
Le théorème suivant peut donc être vu comme une généralisation du théorème de Tsen.
Théorème 7.3.
Ce théorème implique le résultat suivant.
Théorème 7.4.
Soit un corps algébriquement clos de caractéristique zéro. Soit un morphisme dominant de -variétés projectives et lisses, à fibre générique géométriquement intègre. Si est rationnellement connexe et si la fibre générique est une variété rationnellement connexe, alors est une variété rationnellement connexe.
Le théorème 7.3 a aussi le corollaire suivant, connu des experts.
Théorème 7.5.
Soit un anneau de valuation discrète hensélien équicaractéristique de corps résiduel algébriquement clos, de corps des fractions . Soit une -variété séparablement rationnellement connexe. Alors .
Démonstration.
Soit le complété de et le corps des fractions de . Comme est lisse, est dense dans pour la topologie définie par la valuation de ([5], Chap. 3.6, Cor. 10 p. 82). Il suffit donc d’établir le théorème en remplaçant par et par . L’anneau admet alors un corps de représentants isomorphe à , on peut donc identifier et .
Les lettres et étant désormais libres, notons maintenant le hensélisé de en et le corps des fractions de . Le corps est le complété de .
Soit l’adhérence schématique de . C’est un schéma intègre projectif et plat sur . La -algèbre est la limite inductive filtrante de ses -sous-algèbres de type fini. Il existe donc une -algèbre de type fini intègre et un -schéma projectif et plat tel que . En particulier la fibre générique de est une variété séparablement rationnellement connexe. Il existe un ouvert non vide , qu’on peut prendre lisse sur , tel que toutes les fibres du morphisme au-dessus de sont des variétés séparablement rationnellement connexes (Kollár, Miyaoka, Mori, voir [46] IV.3.11).
Notons le point correspondant à . Munissons de la topologie définie par la valuation de . L’ensemble est dense dans ([5], Chap. 3.6, Cor. 10 p. 82). Pour tout entier l’application naturelle a ses fibres ouvertes dans . On peut donc trouver dans un point qui soit dans et donc dans et qui ait même image que dans . On peut donc pour tout trouver un -schéma projectif à fibre générique séparablement rationnellement connexe, tel que (noter que l’on a .) Le corps des fractions du hensélisé de en est l’union de corps de fonctions de -courbes. Le théorème 7.3 assure donc . Comme est projectif, on a donc , donc . On a donc pour tout entier . Par un théorème de Greenberg ([35], Thm. 1) ceci implique . On a donc . ∎
On ne connaît pas de démonstration de ce théorème qui ne passe pas par le cas global .
Le théorème 7.3 admet un théorème « réciproque » :
Théorème 7.6.
(Graber-Harris-Mazur-Starr)[33] Soit . Soit une variété lisse sur de dimension au moins 2. Soit un morphisme projectif et lisse à fibre générique géométriquement intègre. Si la restriction de à toute courbe admet une section, alors il existe une -variété géométriquement intègre et rationnellement connexe et un -morphisme de dans la fibre générique de .
Les variétés rationnellement connexes sont donc en quelque sorte caractérisées par le fait d’avoir automatiquement un point sur le corps des fonctions d’une courbe sur les complexes.
La classe des variétés rationnellement connexes semble être la classe la plus large de variétés projectives lisses à laquelle on peut étendre le théorème de Tsen.
Un exemple explicite de surface d’Enriques sur sans -point a été construit par Lafon [53]. Un modèle affine, avec variables est défini par le système
[Dans la classification des surfaces, les surfaces d’Enriques sont en quelque sorte les plus proches des surfaces rationnelles, une telle surface satisfait en particulier et .]
En caractéristique zéro, le théorème 7.5 est équivalent à l’assertion suivante :
Théorème 7.7.
Soit un anneau de valuation discrète de corps résiduel de caractéristique zéro et soit un -schéma intègre propre régulier. Si la fibre générique est une variété SRC, alors la fibre spéciale possède une composante de multiplicité 1.
Comme indiqué ci-dessus, le théorème ci-dessus ne vaut déjà plus si la fibre générique est une surface d’Enriques.
Remarque 7.8. On ne sait pas si l’analogue de ce théorème vaut dans le cas d’inégale caractéristique. Par exemple, si est une variété rationnellement connexe sur le corps -adique , a-t-elle un point dans une extension non ramifiée de ? C’est vrai en dimension 1 ou 2. En effet l’extension maximale non ramifiée de est un corps (théorème de Lang) et par inspection de la classification -birationnelle des -surfaces rationnelles, on montre (Manin, l’auteur) que toute -surface rationnelle (projective et lisse) sur un corps qui est possède un point -rationnel.
Motivé par la conjecture 5.6 (Ax), par les énoncés des théorèmes de Tsen et de Chevalley-Warning, et par plusieurs résultats qui seront discutés plus bas, on peut, suivant Kollár [49], envisager les énoncés suivants :
Suggestions 7.9.
Soit un anneau de valuation discrète de corps résiduel . Soit un -schéma régulier, propre et plat sur , à fibre générique lisse géométriquement connexe, à fibre spéciale un diviseur à croisements normaux stricts. Si est une variété séparablement rationnellement connexe, alors
(a) il existe une composante réduite de qui est géométriquement intègre sur ;
(b) mieux, il existe une -variété rationnellement connexe et un -morphisme de dans ;
(c) encore mieux, il existe une composante réduite de qui est une -variété rationnellement connexe.
Dans cette direction, on a les résultats suivants.
Théorème 7.10.
(Kollár)[49] Soit un corps de caractéristique zéro. Soit une courbe lisse sur , soit l’anneau local de en un point fermé de corps résiduel , soit un -schéma régulier, propre et plat sur , à fibre générique lisse, à fibre spéciale un diviseur à croisements normaux stricts. Si est une variété de Fano, alors il existe une composante réduite de qui est géométriquement irréductible sur .
Toute hypersurface est une dégénérescence d’une hypersurface lisse de même degré. Le résultat de Kollár établit ainsi la conjecture 5.6 (Ax) en caractéristique zéro : toute -hypersurface de degré dans avec contient une sous--variété géométriquement intègre.
Corollaire 7.11.
Soit un corps de caractéristique zéro. Il existe un corps contenant possédant les propriétés suivantes :
(i) Le corps est algébriquement fermé dans .
(ii) Le corps est union de corps de fonctions de -variétés géométriquement intègres.
(iii) Toute -variété géométriquement intègre possède un point -rationnel (le corps est « pseudo-algébriquement clos »).
(iv) Le corps est un corps .
Démonstration.
La construction du paragraphe 2 donne un corps satisfaisant les propriétés (i) à (iii). Le point (iv) est alors une application de la conjecture d’Ax. ∎
Théorème 7.12.
(Starr)[66] Soit un corps parfait contenant un corps algébriquement clos. Soit une courbe lisse sur , soit l’anneau local de en un point fermé de corps résiduel , soit un -schéma régulier, propre et plat sur , à fibre générique lisse, à fibre spéciale un diviseur à croisements normaux stricts. Si est une -variété séparablement rationnellement connexe, alors il existe une composante réduite de qui est géométriquement irréductible sur .
Le théorème suivant implique en particulier que le théorème 7.10 vaut plus généralement lorsque la fibre générique est une variété rationnellement connexe.
Théorème 7.13.
(Hogadi et Xu)[40] Soient un corps de caractéristique zéro, une -courbe lisse, l’anneau local de en un point fermé , et le corps résiduel en . Soit un -schéma propre et plat sur , de fibre générique une -variété rationnellement connexe. Alors
(a) Il existe une -variété rationnellement connexe et un -morphisme de dans la fibre de en .
(b) Si est régulier, connexe, de dimension relative au plus 3, et si la fibre spéciale est un diviseur à croisements normaux stricts, alors il existe une composante réduite de qui est une -variété rationnellement connexe.
Sous l’hypothèse supplémentaire que contient un corps algébriquement clos, le résultat (a) avait été établi antérieurement par de Jong.
Corollaire 7.14.
Soit un corps de caractéristique zéro. Il existe un corps contenant possédant les propriétés suivantes :
(i) Le corps est algébriquement fermé dans .
(ii) Le corps est union de corps de fonctions de -variétés rationnellement connexes.
(iii) Toute -variété rationnellement connexe possède un point -rationnel.
(iv) Le corps est un corps .
Démonstration.
On reprend la construction du paragraphe 2 mais à la place des -variétés géométriquement intègres on utilise les -variétés intègres -birationnelles à une -variété rationnellement connexe. La conditions (Stab) du paragraphe 2 est satisfaite grâce au théorème 7.4 (conséquence du théorème de Graber, Harris et Starr). Le corps ainsi construit satisfait les propriétés (i) à (iii). Toute hypersurface est une dégénérescence d’une hypersurface lisse de même degré. Le théorème 7.13 implique donc que le corps est un corps (voir [40], Cor. 1.5). ∎
Une variante de la démonstration du théorème 7.5 permet de généraliser la partie (a) du théorème 7.13.
Théorème 7.15.
Soit un anneau de valuation discrète, de corps des fractions et de corps résiduel de caractéristique nulle. Soit un -schéma projectif et plat sur , de fibre générique une -variété rationnellement connexe. Alors il existe une -variété rationnellement connexe et un -morphisme de dans la fibre spéciale .
Démonstration.
Pour établir le résultat, on peut remplacer par son complété. Comme la caractéristique de est nulle, ce complété est isomorphe à . On est donc réduit au cas . Soit le hensélisé de en . Soit son corps des fractions. On a et . La démonstration du théorème 7.5 montre qu’il existe un -schéma projectif et plat (non nécessairement régulier) de fibre générique une -variété rationnellement connexe, tel que , en d’autres termes, la fibre spéciale de est -isomorphe à la fibre spéciale de . D’après le théorème 7.13 (Hogadi et Xu), il existe une -variété rationnellement connexe et un -morphisme . ∎
Remarque 7.16. (Wittenberg) Soit un anneau de valuation discrète de corps des fractions et de corps résiduel de caractéristique zéro. Soit un -schéma régulier, propre et plat sur , à fibre générique lisse, à fibre spéciale un diviseur à croisements normaux stricts. Lorsque la fibre générique est une -compactification lisse d’un espace homogène d’un -groupe algébrique linéaire connexe, on peut facilement établir le théorème 7.10 et l’énoncé (a) du théorème 7.13. On remplace par . Comme rappelé au paragraphe 2, le corps est algébriquement fermé dans un corps de dimension cohomologique , corps qui est union de corps de fonctions de -variétés d’un type spécial, en particulier rationnellement connexes. Le corps limite inductive des corps a le même groupe de Galois que . Il est donc de dimension cohomologique 1, et a un -point. Ceci implique l’existence d’une -application rationnelle d’une -variété rationnellement connexe dans une composante réduite de la fibre spéciale, composante qui étant lisse doit en particulier être géométriquement intègre.
Remarque 7.17. De même que l’on ne peut espérer étendre le théorème 7.7 à d’autres classes de variétés que celle des variétés rationnellement connexes, de même il semble déraisonnable d’espérer une réponse positive à la suggestion 7.9 (a) pour d’autres classes que celle des variétés rationnellement connexes, par exemple pour les variétés projectives et lisses telles que pour , ou telles que le groupe de Chow de réduit des zéro-cycles sur tout corps algébriquement clos soit nul (voir le paragraphe suivant). Starr (communication privée) a donné un exemple de surface d’Enriques sur un corps telle que pour tout modèle de type (R) de cette surface sur l’anneau local de en , à croisements normaux stricts, aucune composante réduite ne soit géométriquement intègre.
8 Autour du théorème de Chevalley-Warning : Variétés dont le groupe de Chow géométrique est trivial
Le théorème de Chevalley-Warning a fait l’objet de plusieurs généralisations (Ax, Katz, Esnault, voir [7]).
Théorème 8.1.
(Weil, 1954) Toute surface projective lisse géométriquement rationnelle sur un corps fini possède un point rationnel.
Théorème 8.2.
(formule de Woods Hole 1964, de Lefschetz-Verdier, voir Grothendieck/Illusie SGA 5 III, Katz SGA7 XXII) Soit un corps fini de caractéristique . Soit une variété propre. Si et si pour , alors le nombre de points rationnels de est congru à 1 modulo .
En caractéristique nulle, les groupes s’annulent pour une variété de Fano, mais on ne sait pas le démontrer en caractéristique positive (sauf en dimension au plus 3, le cas de la dimension 3 étant dû à Shepherd-Barron).
H. Esnault a obtenu le résultat suivant.
Théorème 8.3.
(Esnault 2003) [25] Soit un corps fini de cardinal . Pour lisse, projective, géométriquement intègre, et un corps algébriquement clos contenant le corps , si l’on a , alors le nombre de points -rationnels de est congru à 1 modulo .
Soit un nombre premier, . Par un argument remontant à Spencer Bloch et développé par Bloch et Srinivas, l’hypothèse assure que la cohomologie -adique de est de coniveau 1, c’est-à-dire qu’elle satisfait pour tout (toute classe de cohomologie s’annule sur un ouvert de Zariski non vide). Sous cette condition, H. Esnault utilise des résultats de Deligne pour établir la congruence annoncée.
Ce théorème s’applique pour les variétés rationnellement connexes par chaînes, et en particulier pour les variétés de Fano, à la différence du théorème 8.2.
A noter que le théorème s’applique aussi pour des variétés qui ne sont pas rationnellement connexes, comme les surfaces d’Enriques et aussi certaines surfaces de type général.
Comme dans l’énoncé initial de Chevalley-Warning et dans l’énoncé du théorème de Tsen, on dispose de versions portant sur les fibres spéciales, singulières, de telles variétés.
Théorème 8.4.
(N. Fakhruddin et C.S. Rajan, 2004) [30] Soit un morphisme propre dominant de variétés lisses et géométriquement irréductibles sur un corps fini de cardinal . Soit la fibre générique, supposée géométriquement intègre. Soit une clôture algébrique du corps des fonctions . Si l’on a , alors pour tout point , le cardinal de est congru à 1 modulo . Si l’hypothèse lisse est omise mais si la fibre générique est lisse, on a pour tout .
Donc sur toute dégénérescence de variété RCC (lisse) il y a un -point. Ceci vaut aussi sur une dégénérescence d’une surface d’Enriques ou de certaines surfaces de type général.
Théorème 8.5.
(Esnault [26] [27]; Esnault et Xu [28]) Soit un anneau de valuation discrète complet de corps des fractions et de corps résiduel fini de cardinal . Soit un -schéma intègre propre et plat. Soit un nombre premier, . Supposons la fibre générique géométriquement intègre, lisse et à cohomologie -adique de coniveau 1. Soit la fibre spéciale. Alors
(i) ;
(ii) si de plus est régulier, alors .
L’hypothèse sur la cohomologie est satisfaite si , où est un corps algébriquement clos contenant , en particulier pour les variétés RCC mais aussi pour les surfaces d’Enriques et certaines surfaces de type général.
En particulier il y a un point rationnel sur la fibre spéciale. En particulier si toutes les composantes de la fibre spéciale sont lisses, alors l’une d’entre elles est géométriquement intègre sur .
Il y a des théorèmes de géométrie algébrique qui se démontrent par réduction au cas des corps finis. On part d’une variété sur un corps . Une telle variété est obtenue par changement de base à partir d’un -schéma de type fini, pour une -algèbre de type fini convenable. On réduit ensuite aux points fermés de (leurs corps résiduels sont finis) et on applique les résultats obtenus sur les corps finis.
Les théorèmes établis par H. Esnault sont de ce point de vue « trop bons » : la classe des -variétés auxquelles ses résultats s’appliquent est plus large que celle des -variétés rationnellement connexes. On ne peut donc espérer les utiliser pour établir des résultats comme le théorème 7.3 (Graber-Harris-Starr) ou le théorème 7.10 ci-dessus (Kollár) – pas plus d’ailleurs que l’on ne pouvait utiliser le théorème de Chevalley-Warning pour établir le théorème de Tsen ou la conjecture d’Ax. Un obstacle essentiel semble être le fait bien connu suivant : il existe des polynômes en une variable sur qui n’ont pas de zéro sur mais dont la réduction en tout premier sauf un nombre fini a un zéro, par exemple , avec non carrés.
Les résultats sur les corps finis peuvent néanmoins en suggérer d’autres sur les corps de fonctions d’une variable. On en trouvera un exemple récent dans [44], §9.8, Remarque 3.
9 Approximation faible pour les variétés rationnellement connexes
Suggestion 9.1.
Soit un corps de fonctions d’une variable sur un corps algébriquement clos. Pour toute variété rationnellement connexe sur , l’approximation faible vaut : pour tout ensemble fini de places de , l’application diagonale
a une image dense. Ici est le complété de en et est muni de la topologie induite par la topologie de la valuation sur .
Des arguments élémentaires ([11]) permettent d’établir l’approximation faible en tout ensemble fini de places pour les compactifications lisses d’espaces homogènes de groupes linéaires connexes, puis pour les variétés obtenues par fibrations en de telles variétés. On traite ainsi les intersections complètes lisses de deux quadriques dans pour .
Théorème 9.2.
(Hassett-Tschinkel)[37] Soit un corps de fonctions d’une variable sur un corps algébriquement clos de caractéristique zéro. Soit une -variété rationnellement connexe. Si est un ensemble fini de places de de bonne réduction pour , alors l’approximation faible vaut pour en ces places : l’application diagonale a une image dense.
Ceci généralise un résultat de Kollár, Miyaoka et Mori (cas on l’on demande une réduction fixée, sans obtenir d’approximations aux jets d’ordre supérieur).
Le cas particulier des surfaces cubiques lisses avait été traité par Madore [57].
Hassett et Tschinkel [38] ont aussi des résultats d’approximation en des places de mauvaise, mais pas trop mauvaise réduction. Mais comme ces auteurs le notent, le cas suivant est ouvert.
Question 9.3.
L’approximation faible en la place vaut-elle pour la surface cubique sur le corps ?
Lorsque le nombre de variables est suffisamment grand par rapport au degré, on a pu établir l’approximation faible en toutes les places. Voir la section 12.5 ci-dessous.
10 -équivalence sur les variétés rationnellement connexes
Soient un corps non algébriquement clos et une -variété (séparablement) rationnellement connexe. Que sait-on sur l’ensemble ?
Théorème 10.1.
(Kollár)[47] Soit un corps local usuel (localement compact) et soit une -variété séparablement rationnellement connexe. Alors la -équivalence sur est une relation ouverte. L’ensemble est fini. Dans le cas les classes de -équivalence coïncident avec les composantes connexes de .
Ce résultat est une vaste généralisation de cas particuliers antérieurement connus (surfaces fibrées en coniques, compactifications de groupes algébriques linéaires connexes, hypersurfaces cubiques lisses, intersections lisses de deux quadriques dans pour ).
Suggestion 10.2.
(Kollár) Soient un corps fini et une -variété séparablement rationnellement connexe. Alors tous les points de sont -équivalents : l’ensemble a un élément.
Swinnerton-Dyer montra qu’il en est ainsi pour les surfaces cubiques lisses. Ce résultat a été récemment étendu par J. Kollár [50] à toutes les hypersurfaces cubiques lisses sur un corps fini de cardinal au moins 8.
Théorème 10.3.
(Kollár-Szabó)[52] Soient un corps fini et une -variété séparablement rationnellement connexe. Si l’ordre de est plus grand qu’une certaine constante qui dépend seulement de la géométrie de alors est réduit à un point.
Théorème 10.4.
(Kollár-Szabó)[52] Soit un corps local non archimédien de corps résiduel le corps fini . Soit l’anneau de la valuation. Soit un -schéma régulier, intègre, projectif et plat sur , de fibre spéciale une -variété séparablement rationnellement connexe – ce qui implique que la fibre générique est SRC. Si l’ordre de est plus grand qu’une certaine constante qui dépend seulement de la géométrie de alors est réduit à un point.
Ici encore on se demande si la condition sur l’ordre du corps résiduel est nécessaire. A tout le moins, le résultat ci-dessus implique :
Théorème 10.5.
[52] Soient un corps de nombres et une -variété rationnellement connexe. Alors pour presque toute place de , notant le complété de en , on a .
Soit un anneau de valuation discrète de corps des fractions et de corps résiduel . Soit un -schéma intègre, propre et lisse. Soit la fibre générique et la fibre spéciale.
La spécialisation passe au quotient par la -équivalence (voir [55]). On a donc une application de spécialisation :
Théorème 10.6.
(Kollár) [48] Dans la situation ci-dessus, si est SRC, et si est hensélien, alors l’application de spécialisation est une bijection.
On dit qu’un corps est fertile (les anglo-saxons disent « large field ») si sur toute -variété lisse intègre avec un -point les -points sont denses pour la topologie de Zariski.
Exemples :
(a) Une extension algébrique infinie d’un corps fini (estimations de Lang–Weil).
(b) Un corps local usuel (non archimédien, à corps résiduel fini), plus généralement le corps des fractions d’un anneau de valuation discrète hensélien de corps résiduel quelconque.
(c) Le corps des réels, plus généralement un corps réel clos, plus généralement un corps dont le groupe de Galois absolu est un pro--groupe ( étant un nombre premier).
(d) Un corps pseudo-algébriquement clos.
Théorème 10.7.
(Kollár) Soient un corps fertile et une -variété séparablement rationnellement connexe.
(1) [47] Pour tout point , il existe un -morphisme très libre tel que appartienne à .
(2) [48] Si deux -points sont -équivalents, alors il existe un -morphisme tel que ces deux points soient dans l’image de .
Corollaire 10.8.
[48] Pour corps fertile et comme ci-dessus, pour tout ouvert de Zariski non vide , l’application est bijective.
On ne sait pas si les deux énoncés précédents valent sur un corps infini quelconque.
Théorème 10.9.
(Kollár) [48] Soit un corps local usuel, soit un -morphisme projectif et lisse de -variétés lisses, dont les fibres géométriques sont des variétés SRC. L’application qui à un point associe le cardinal de est semi-continue supérieurement : tout point de admet un voisinage (pour la topologie sur définie par celle du corps local ) tel que pour dans ce voisinage le cardinal de soit au plus égal à celui de .
Question 10.10.
[48] Le cardinal de est-il localement constant quand varie dans ?
Question 10.11.
Soient un corps et une -variété séparablement rationnellement connexe. Dans chacun des cas suivants :
(a) est un corps de fonctions d’une variable sur les complexes,
(b) est un corps de séries formelles en une variable,
(c) est un corps ,
(d) est un corps parfait de dimension cohomologique ,
l’ensemble a-t-il au plus un élément ?
On ne s’attend pas à une réponse positive. Cependant, pour de caractéristique nulle, sous la simple hypothèse , c’est connu dans les cas suivants :
(i) est une compactification lisse d’un groupe linéaire connexe ([16]).
(ii) est une surface fibrée en coniques de degré 4 sur la droite projective ([18]).
(iii) est une intersection lisse de deux quadriques dans et ([17], Thm. 3.27 (ii)).
(iv) Le corps est , la variété est une hypersurface cubique lisse dans avec ([58]).
On a aussi le résultat suivant, portant sur des variétés singulières :
(v) Soit un corps de caractéristique nulle tel que toute forme quadratique sur en 3 variables ait un zéro non trivial. Alors pour toute surface cubique singulière l’ensemble a au plus un élément.
Lorsque possède un point singulier -rationnel, ceci est établi dans [58], §1. Dans le cas général, on établit ce résultat en utilisant la classification des surfaces cubiques singulières. Le seul cas non couvert par les arguments donnés au §5 de [56] (voir aussi [58], Remarque 1) est le cas des surfaces de Châtelet (cas 7 p. 182 de [56]). Le résultat dans ce cas s’obtient en combinant le Théorème 8.6 (d) de [17] et les résultats de [20].
Une réponse positive à la question 10.11 pour les surfaces (projectives et lisses) géométriquement rationnelles définies sur impliquerait l’unirationalité des variétés de dimension 3 sur qui admettent une fibration en coniques sur le plan projectif. Il s’agit là d’une question largement ouverte.
Question 10.12.
Soient un corps de nombres et une -variété rationnellement connexe. Le quotient est-il fini ?
C’est connu dans les cas suivants :
(i) La variété est une compactification lisse d’un groupe linéaire connexe . L’immersion ouverte induit une bijection ([32]). La finitude dans le cas général est due à Gille [31], elle s’appuie sur des résultats antérieurs de Margulis (groupes semi-simples simplement connexes) et CT-Sansuc ([16], cas des tores algébriques).
(ii) La variété est une surface fibrée en coniques de degré 4 sur la droite projective (CT-Sansuc, cf. [18]).
(iii) La variété est une intersection lisse de deux quadriques dans et ([17]).
La question de la finitude de sur un corps de nombres est ouverte pour les compactifications lisses d’espaces homogènes de groupes linéaires connexes, même en supposant les groupes d’isotropie géométrique connexes.
On pourrait se poser la question de la finitude de pour rationnellement connexe et de type fini sur l’un quelconque des corps suivants : un corps fini, , , , .
On a par exemple la finitude dans ce cadre dans le cas (ii) ci-dessus ([18]), et c’est une question ouverte lorsque est de dimension 2, i.e. est une surface géométriquement rationnelle. Dans le cas (i), on a la finitude lorsque est un tore [16]. C’est une question largement ouverte pour un groupe linéaire quelconque.
Mais, sur chacun des corps , , , la réunion pour tout des (qui est un corps réel clos non archimédien), Kollár [48] a construit des exemples d’hypersurfaces lisses de degré 4 dans , avec arbitrairement grand, telles que soit infini.
11 Équivalence rationnelle sur les zéro-cycles des variétés rationnellement connexes
Proposition 11.1.
[9] Soient un corps et une -variété RCC. Il existe un entier tel que pour toute extension de corps on ait .
Soient un corps fini et une -variété séparablement rationnellement connexe. Du théorème de Kollár et Szabó [52] il résulte que l’on a . Mais ceci n’est qu’un cas particulier d’un théorème général en théorie du corps de classes supérieur :
Théorème 11.2.
(K. Kato et S. Saito, 1983) Soient un corps fini et une -variété projective et lisse géométriquement intègre. Soit la variété d’Albanese de (c’est une variété abélienne) et le -groupe fini commutatif dual de la torsion du groupe de Néron-Severi géométrique de . Le groupe est fini, et l’on a une suite exacte
Question 11.3.
Soient un corps et une -variété séparablement rationnellement connexe. Dans chacun des cas suivants :
(a) est un corps de fonctions d’une variable sur les complexes,
(b) est un corps de séries formelles en une variable,
(c) est un corps parfait de dimension cohomologique 1,
a-t-on ?
On ne s’attend pas à une réponse positive. Cependant, pour de caractéristique nulle, sous la simple hypothèse , il en est ainsi dans chacun des cas suivants :
(i) Compactification lisse d’espace homogène principal de groupe algébrique linéaire connexe ([16]).
(ii) Surface SRC, i.e. surface géométriquement rationnelle. La situation est ici bien meilleure que pour la -équivalence (voir la question 10.11). On établit par des méthodes de K-théorie algébrique ([8]).
(iii) Hypersurface cubique lisse dans () avec un -point, pour . Soit . Pour établir (iii), il suffit de montrer que tout -point est rationnellement équivalent au point (on applique ensuite cet énoncé sur toute extension finie de .) Soit un espace linéaire de dimension 3 contenant et . Soit la surface cubique découpée par . Si est singulière, alors et sont -équivalents sur , donc sur : voir l’énoncé (v) après la question 10.11. Si est non singulière, on a d’après le point (ii) ci-dessus. Dans tous les cas on voit que et sont rationnellement équivalents.
(iv) Intersection lisse de deux quadriques dans avec un -point, pour . Ceci résulte de l’énoncé (iii) suivant la question 10.11. Une adaptation de l’argument donné ci-dessus pour les hypersurfaces cubiques devrait donner le résultat pour .
Théorème 11.4.
(CT-Ischebeck 1981) Soit une -variété projective et lisse géométriquement intègre avec . Soit le nombre de composantes connexes de .
Le sous-groupe est le sous-groupe divisible maximal de et le quotient .
En particulier si est rationnellement connexe et , alors est fini et .
Soit un corps réel clos. Knebusch et Delfs ont montré comment l’on peut, pour toute -variété algébrique , donner une définition adéquate des « composantes connexes » de . Celles-ci sont en nombre fini. Le théorème ci-dessus vaut dans ce cadre plus large. On comparera ceci avec la remarque finale de la section 10.
Question 11.5.
Soient un corps -adique (extension finie de ) et une -variété rationnellement connexe. Le groupe est-il fini ?
Soit l’anneau de la valuation du corps local , soit le corps fini résiduel. Voici des résultats obtenus dans cette direction.
(i) Si , le groupe est fini ([8]).
(ii) Si est une intersection lisse de deux quadriques dans et , le groupe est fini ([17], [19] et [62]).
(iii) Si est un fibré en quadriques de dimension relative au moins 1 sur la droite projective, le groupe est fini ([19, 62]).
(iv) Si est une -compactification lisse d’un -groupe linéaire connexe, alors est somme d’un groupe fini et d’un groupe de torsion -primaire (d’exposant fini) ([9]).
(v) (Kollár-Szabó) [52] Si a bonne réduction SRC, i.e. s’il existe un -schéma régulier, intègre, propre et lisse de fibre spéciale SRC, alors .
(vi) (S. Saito et K. Sato) [64] Soit une -variété projective, lisse, géométriquement connexe. Supposons que possède un modèle régulier intègre, propre et plat, de fibre spéciale réduite à croisements normaux stricts. Alors le groupe est somme directe d’un groupe fini et d’un groupe divisible par tout entier premier à . Si en outre est une variété rationnellement connexe, alors est somme d’un groupe fini et d’un groupe de torsion -primaire d’exposant fini.
On s’est longtemps posé la question de savoir si pour toute variété projective lisse sur un corps -adique le sous-groupe de torsion de est fini. M. Asakura et S. Saito ont montré récemment qu’il n’en est rien (exemples : surfaces de degré suffisamment générales dans ).
Question 11.6.
Soient un corps de type fini sur le corps premier et une -variété rationnellement connexe. Le groupe est-il fini ?
C’est connu lorsque et ([8]), et lorsque est une compactification lisse d’un -tore de dimension 3 (Merkur’ev, 2008).
Mais le cas général des compactifications lisses de tores sur un corps de nombres est ouvert.
De façon générale, on se demande si pour toute variété connexe, projective et lisse sur un corps de type fini sur le corps premier, le groupe est un groupe de type fini.
12 Vers les variétés supérieurement rationnellement connexes
12.1 Deux exemples
12.1.1 Formes tordues d’hyperquadriques
D. Tao [68] a obtenu les résultats suivants. Soit un corps possédant une algèbre simple centrale de degré dont la classe dans le groupe de Brauer de est non nulle et d’exposant 2. La condition assure l’existence sur d’une involution de première espèce qu’on peut choisir orthogonale. A une telle situation est alors associée une -variété qui est une forme tordue d’une quadrique lisse dans et pour laquelle
Il y a donc une obstruction élémentaire à l’existence d’un -point, en particulier .
On peut trouver des algèbres du type requis sur l’un quelconque des corps suivants : un corps -adique, le corps des séries formelles itérées , un corps de fonctions de deux variables sur .
Sur l’un quelconque de ces corps, pour , les quadriques dans ont un point rationnel. Mais pour impair les formes tordues obtenues n’ont pas de point -rationnel.
Si l’on considère une telle forme tordue sur le corps , pour laquelle l’application n’est pas injective, il résulte de la proposition 4.1 que la fibre spéciale sur d’un modèle propre, plat, régulier de sur l’anneau de valuation discrète n’a aucune composante géométriquement intègre de multiplicité 1.
12.1.2 Une hypersurface cubique
L’hypersurface cubique diagonale de coefficients
sur le corps n’a pas de point rationnel.
La condition d’injectivité sur le groupe de Brauer est ici satisfaite, plus généralement, l’obstruction élémentaire s’annule : il en est ainsi pour toute hypersurface lisse de dimension au moins 3 (cf. [4]).
L’anneau de valuation discrète a pour corps des fractions . La -hypersurface cubique admet un modèle régulier projectif sur dont une composante réduite de la fibre sur est géométriquement intègre et de multiplicité 1 : un ouvert est donné par un ouvert du cône de d’équation homogène . Mais cette composante n’est pas rationnellement connexe, elle ne possède même pas de -point lisse. De fait, la fibre spéciale de ne saurait posséder une composante géométriquement intègre rationnellement connexe de multiplicité 1 : d’après le théorème 7.5 toute telle composante posséderait des points lisses sur , points qui seraient Zariski-denses car est fertile, et l’on pourrait relever un -point non situé sur les autres composantes en un -point de . Le même argument montre qu’aucune composante de multiplicité 1 de la fibre spéciale d’un modèle de type (R) de , à croisements normaux stricts, n’est le but d’une application rationnelle depuis une -variété rationnellement connexe.
12.2 Fibres spéciales avec une composante géométriquement intègre de multiplicité 1
Soit un anneau de valuation discrète, son corps des fractions, son corps résiduel. Soit une uniformisante de . Soit un -schéma de type (R) (voir le paragraphe 2), sa fibre générique, sa fibre spéciale. Si l’on a alors l’on a . Comme est régulier, une -section de rencontre en un -point possédant les propriétés suivantes : il est sur une unique composante réduite de , il est lisse sur cette composante, cette composante est de multiplicité 1 et géométriquement intègre. Inversement, si est hensélien, un tel point se relève en un -point de .
On voit donc qu’une condition nécessaire pour l’existence d’un -point sur est l’existence d’une composante géométriquement intègre de multiplicité 1 de la fibre spéciale . Au paragraphe 3.4 on a discuté cette propriété. Par analogie avec les suggestions 7.9 on est amené ici à s’intéresser aux propriétés suivantes d’un -schéma de type (R).
(i) La fibre spéciale contient une composante géométriquement intègre de multiplicité 1.
(ii) La fibre spéciale contient une composante géométriquement intègre de multiplicité 1 qui admet un -morphisme depuis une -variété séparablement rationnellement connexe.
(iii) La fibre spéciale contient une composante géométriquement intègre de multiplicité 1 qui est une -variété séparablement rationnellement connexe.
On laisse ici au lecteur le soin de vérifier que la propriété (ii) satisfait la même propriété d’invariance -birationnelle que la propriété (i) (cf. §3.4).
Théorème 12.1.
(CT-Kunyavskiǐ 2006) [13] Soit un anneau de valuation discrète, de corps des fractions , de corps résiduel de caractéristique zéro. Soit un -schéma régulier propre intègre de fibre générique une compactification lisse d’un espace homogène principal d’un groupe semi-simple simplement connexe, à fibre spéciale un diviseur à croisements normaux stricts. Il existe alors une composante de la fibre spéciale qui est géométriquement intègre et de multiplicité 1, et qui de plus admet un -morphisme depuis une -variété rationnellement connexe.
Démonstration.
(i) Le corps est algébriquement fermé dans .
(ii) Le corps est un corps de dimension cohomologique 1.
(iii) Le corps est limite inductive de corps de fonctions de -variétés admettant des fibrations successives (par applications rationnelles) en variétés qui sont des restrictions à la Weil de variétés de Severi-Brauer. On voit aisément que de telles variétés sont birationnelles à des variétés rationnellement connexes (on n’a pas ici besoin d’invoquer le théorème 7.4).
D’après Bruhat et Tits, tout espace homogène principal sous un groupe semi-simple simplement connexe sur le corps local , dont le corps résiduel est parfait et de dimension cohomologique 1, est trivial, i.e. possède un point -rationnel. Je renvoie ici le lecteur à [13] pour l’algèbre commutative utilisée pour terminer la démonstration. ∎
Remarque 12.2. L’assertion sur l’existence d’un -morphisme depuis une -variété rationnellement connexe ne figurait pas dans [13].
Théorème 12.3.
[10] Soit un anneau de valuation discrète de corps des fractions , de corps résiduel de caractéristique zéro. Soit une forme homogène de degré en variables. Supposons que l’hypersurface définie par dans est lisse. Soit un modèle régulier de cette hypersurface, propre et plat sur , à fibre spéciale à croisements normaux stricts. Il existe alors une composante de la fibre spéciale qui est géométriquement intègre et de multiplicité 1, et qui de plus admet un -morphisme depuis une -variété rationnellement connexe.
Démonstration.
Pour établir le résultat on peut supposer . D’après le théorème 7.14, on peut plonger dans un corps qui est union de corps de fonctions de -variétés rationnellement connexes, et qui est un corps . On remplace par et on utilise le fait que est un corps puisque est un corps (théorème 5.4). On a donc et donc . De ceci on déduit que la fibre spéciale contient une composante géométriquement intègre de multiplicité 1. On termine alors la démonstration comme dans le théorème 12.1 ci-dessus. ∎
Remarque 12.4. L’assertion sur l’existence d’un -morphisme depuis une -variété rationnellement connexe ne figurait pas dans [10]. C’est l’utilisation du théorème 7.13 (Hogadi et Xu) au lieu du théorème 7.10 (Kollár) qui permet ici de l’obtenir.
Remarque 12.5. Soit l’anneau des entiers d’un corps -adique, son corps résiduel. Soit et comme dans l’énoncé du théorème 12.3, en particulier on suppose donné un modèle à fibre spéciale à croisements normaux stricts. Supposons que le théorème 12.3 vaille encore dans ce cas d’inégale caractéristique.
On dispose alors d’une composante de qui est de multiplicité 1 et est géométriquement intègre sur le corps fini . Par les estimations de Lang-Weil, il existe un zéro-cycle de degré 1 (par rapport au corps ) de support dans le lieu lisse de cette composante et non situé sur les autres composantes. Par le lemme de Hensel, on peut relever ce zéro-cycle sur et l’on obtient que possède un zéro-cycle de degré 1. Pour un corps -adique, l’existence d’un zéro-cycle de degré 1 sur toute hypersurface lisse de degré dans , avec , est une conjecture de Kato et Kuzumaki [45], établie par ces auteurs lorsque est un nombre premier.
On dispose plus précisément d’une -application rationnelle d’une -variété séparablement rationnellement connexe sur un corps fini vers une composante lisse de multiplicité 1 de la fibre spéciale. Le théorème 8.3 (Esnault) assure l’existence d’un -point sur toute -variété séparablement rationnellement connexe, donc par le lemme 2.1 sur la composante lisse. Mais tout tel -point peut se trouver aussi sur une autre composante, donc ne pas être lisse sur , ce qui empêche de le relever en un -point de . C’est heureux. Sinon (modulo l’existence de bons modèles) serait un corps (ex-conjecture d’E. Artin). Mais les exemples fameux de Terjanian et de ses successeurs montrent que n’est pas .
Il vaudrait d’ailleurs la peine de regarder les nombreux contre-exemples à la conjecture d’Artin qui ont été construits et de vérifier qu’il existe toujours dans ces cas un zéro-cycle de degré 1. Il en est ainsi pour l’exemple initial de Terjanian sur .
12.3 Variétés rationnellement simplement connexes
Les variétés rationnellement connexes sont un analogue algébrique des espaces topologiques connexes par arcs. B. Mazur a demandé s’il y a un analogue en géométrie algébrique des espaces simplement connexes. En topologie, on demande que l’espace des lacets pointés soit connexe par arcs. A la suite d’une suggestion de Mazur, de Jong et Starr [43] proposent les définitions suivantes. Dans l’état actuel des recherches, il faut considérer ces définitions comme provisoires.
Soit une variété projective et lisse sur , équipée d’un fibré ample . Soit l’espace de Kontsevich paramétrisant les données suivantes : une courbe propre, réduite, connexe, à croisements normaux, de genre arithmétique 0, un couple ordonné de points lisses de , un morphisme de cycle image de degré , tels que de plus la situation n’ait qu’un nombre fini d’automorphismes.
On dispose alors d’un morphisme d’évaluation
La fibre générale de ce morphisme est un analogue de l’espace des chemins à points base en topologie.
La variété (projective et lisse) est dite rationnellement simplement connexe si pour suffisamment grand il existe une composante de dominant telle que la fibre générique de soit une variété rationnellement connexe.
De Jong et Starr [43] considèrent aussi l’espace
où cette fois-ci l’on fixe points lisses ordonnés sur la courbe de genre arithmétique zéro, et l’évaluation
Ils appellent fortement rationnellement simplement connexe si pour tout et tout entier suffisamment grand (fonction de ) il existe une composante de dominant telle que la fibre générique de soit une variété rationnellement connexe.
De Jong et Starr (travaux en cours) ont obtenu une série de résultats sur les intersections complètes lisses dans l’espace projectif. Pour simplifier, je cite leurs résultats pour les hypersurfaces.
Théorème 12.6.
(de Jong-Starr) [43] Une hypersurface lisse de degré dans avec
est rationnellement simplement connexe, à l’exception des quadriques dans .
Théorème 12.7.
(de Jong-Starr) [43] Une hypersurface lisse de degré dans avec
est fortement rationnellement simplement connexe.
Dans la définition ci-dessus on peut prendre .
Théorème 12.8.
(de Jong-Starr) [43] Pour , il existe un ouvert de Zariski non vide de l’espace des hypersurfaces de degré dans tel que toute hypersurface paramétrée par un point de cet espace est fortement rationnellement simplement connexe.
La suggestion suivante est une version locale d’une suggestion globale de de Jong (12.11 ci-après).
Suggestion 12.9.
Soit un anneau de valuation discrète de corps des fractions et soit son corps résiduel, supposé de caractéristique zéro. Soit un -schéma de type (R), sa fibre générique, sa fibre spéciale. Si les conditions suivantes sont satisfaites :
(i) la -variété est fortement rationnellement simplement connexe,
(ii) l’obstruction élémentaire pour s’annule,
alors la fibre spéciale contient une composante géométriquement intègre de multiplicité 1 qui admet un -morphisme depuis une -variété rationnellement connexe.
12.4 Existence d’un point rationnel sur un corps de fonctions de deux variables
Sur un corps de fonctions d’une variable sur , le théorème de Graber-Harris-Starr dit que les -variétés rationnellement connexes ont automatiquement un point -rationnel (et le théorème de Graber-Harris-Starr-Mazur dit que ce sont essentiellement les seules).
On peut se demander s’il existe une classe de variétés qui ont la propriété que lorsqu’elles sont définies sur un corps de fonctions de deux variables sur , elles ont automatiquement un -point.
Voici deux familles de variétés pour lesquelles ceci est connu.
Le théorème de Tsen-Lang implique que toute hypersurface de degré dans avec possède un -point.
Soit un -groupe semi-simple simplement connexe, un espace homogène principal de et une -compactification lisse de . La conjecture II de Serre pour le corps affirme que et donc aussi ont un -point. Ceci est connu lorsque n’a pas de facteur de type (Merkur’ev-Suslin, Suslin, Bayer-Parimala, P. Gille). Pour avoir l’énoncé dans tous les cas il reste à traiter le cas déployé. La résolution de ce dernier cas a été récemment annoncée par de Jong et Starr, leur démonstration utilise les techniques de variétés rationnellement simplement connexes.
Suggestion 12.11.
(de Jong) Soit le corps de fonctions d’une surface sur le corps des complexes. Soit une -variété fortement rationnellement simplement connexe. Supposons l’application de restriction injective. Alors possède un point -rationnel.
Remarque 12.12. L’exemple 12.1.1 montre la nécessité de la condition non géométrique portant sur le groupe de Brauer. Des conditions supplémentaires de même nature pourraient être nécessaires. Par exemple on peut demander que pour toute extension finie (ou non) de corps l’application soit injective. De façon encore plus générale, on peut demander que pour toute extension finie (ou non) de corps il n’y ait pas d’obstruction élémentaire à l’existence d’un -point sur (voir [4]).
Pour une -variété intersection complète lisse de dimension au moins 3 dans un espace projectif , l’obstruction élémentaire s’annule. Il en est de même pour une -variété projective et lisse géométriquement connexe qui contient un ouvert qui est un espace homogène principal d’un groupe semi-simple simplement connexe. Pour ces résultats, voir [4].
Remarque 12.13. Dans [4] on s’intéresse aux compactifications lisses d’espaces homogènes de groupes linéaires connexes sur un corps de fonctions de deux variables, lorsque les stabilisateurs géométriques sont connexes (et qu’il n’y a pas de facteur ). On montre que dans ce cas l’obstruction élémentaire à l’existence d’un point rationnel est la seule obstruction.
Pour une hypersurface cubique lisse de dimension au moins 3 sur un corps , l’obstruction élémentaire s’annule. Sur l’exemple 12.1.2 on voit donc que l’obstruction élémentaire est loin de contrôler l’existence d’un point rationnel pour les variétés rationnellement connexes sur un corps de fonctions de deux variables sur les complexes.
Remarque 12.14. De Jong et Starr ont un travail en préparation sur les variétés rationnellement simplement connexes où ils montrent que certains espaces homogènes projectifs sur un corps de fonctions de deux variables sur ont automatiquement un point rationnel. Cela leur permet de donner une nouvelle démonstration (la troisième !) du théorème de de Jong [41] qu’indice et exposant coïncident pour les algèbres simples centrales sur un tel corps.
12.5 Approximation faible en toutes les places d’un corps de fonctions d’une variable
Rappelons que c’est une question ouverte (9.1) de savoir si toute variété rationnellement connexe sur un corps de fonctions d’une variable satisfait l’approximation faible en toute place.
Théorème 12.15.
(Hassett-Tschinkel)[39] Soit un corps de fonctions d’une variable sur un corps algébriquement clos de caractéristique zéro. Il existe une fonction satisfaisant la propriété suivante. Pour toute hypersurface lisse de degré dans avec , l’approximation faible vaut en tout ensemble fini de places de .
Pour , convient.
Un travail en cours sur les variétés rationnellement simplement connexes (de Jong-Starr [43], appendice de Hassett) donne et, si l’hypersurface est « générale », .
Théorème 12.16.
(Hassett) Soit le corps des fonctions d’une courbe. Si est une variété fortement rationnellement simplement connexe, alors elle satisfait l’approximation faible par rapport à tout ensemble fini de places de .
12.6 -équivalence et équivalence rationnelle
Dans la recherche de la bonne définition de variétés « supérieurement » rationnellement connexes, on peut aussi penser à des conditions de trivialité de et de sur les corps « de dimension 2 », comme les corps -adiques, les corps de fonctions de deux variables sur les complexes, les corps de séries formelles itérées .
12.6.1 Groupes semi-simples simplement connexes
Si est un corps -adique, ou si est un corps de fonctions de deux variables sur les complexes, ou si , et si est un groupe semi-simple simplement connexe sans facteur de type , on sait établir et (voir [12]). Pour une compactification lisse d’un tel , ceci implique .
12.6.2 Hypersurfaces cubiques lisses
Proposition 12.17.
(Madore) [58] Soit un corps -adique ou un corps . Soit une hypersurface cubique lisse. Pour , on a et .
Soit un corps -adique. Pour , on sait donner des exemples avec et d’ordre plus grand que 1. On ignore ce qui se passe pour .
Par exemple, qu’en est-il pour l’hypersurface cubique d’équation :
dans ?
Supposons mod , et soit non cube. Qu’en est-il pour l’hypersurface
dans ?
Sur le corps , en utilisant la théorie de l’intersection sur un modèle au-dessus de , Madore [58] a montré que pour l’hypersurface cubique lisse d’équation
on a
12.6.3 Intersections lisses de deux quadriques
Soit un corps -adique, et soit , avec , une intersection complète lisse de deux quadriques possédant un -point. Si , alors ([17]) et donc (ceci vaut aussi pour un corps ). L’ensemble fini peut être non trivial pour . Les cas et sont ouverts. Le groupe est nul si et est non dyadique ([62]). Le groupe fini peut être non trivial pour . Les cas et ( dyadique) sont ouverts.
Soient , dans satisfaisant et pour . Soit l’intersection complète lisse de deux quadriques donnée par le système
Que valent et ?
12.6.4 Fibrés en quadriques sur la droite projective
Soit un corps -adique, et soit une -variété géométriquement intègre, projective et lisse sur , fibrée en quadriques de dimension sur la droite projective . Si et , alors ([62]). Dans le cas , Parimala et Suresh [62] ont un exemple intéressant avec . Dans cet exemple, un élément non nul de est détecté par la mauvaise réduction de de façon subtile, le groupe de Brauer de ne permet pas de détecter cet élément.
13 Surjectivité arithmétique et surjectivité
géométrique
Mis à part bien sûr le théorème d’Ax et Kochen, les énoncés de ce paragraphe sont établis dans des notes non publiées de l’auteur. Le lecteur ne devrait pas avoir de difficulté à reconstituer les démonstrations.
13.1 Morphismes définis sur un corps de nombres et applications induites sur les points locaux
On s’intéresse dans la suite à la situation suivante.
(*) On est sur un corps de nombres , et sont deux -variétés lisses géométriquement intègres, la -variété est projective, on a un -morphisme projectif de fibre générique géométriquement intègre. On note l’ouvert de lissité du morphisme .
On demande quels sont les liens entre la géométrie du morphisme et les propriétés de surjectivité des applications induites pour presque toute place , ou déjà pour une infinité de places du corps de nombres .
Les théorèmes 13.1 et 13.3 ci-après jouent un rôle central dans l’étude du principe de Hasse pour les variétés algébriques sur un corps de nombres.
Théorème 13.1.
Sous les hypothèses (*), si est une courbe et si l’application induite est surjective (ce qui équivaut à : est localement scindé pour la topologie étale sur ), alors il existe une infinité de places de pour lesquelles l’application induite est surjective.
Démonstration.
Pour chaque point fermé de à fibre non lisse on choisit une composante de multiplicité 1 de . L’existence d’une telle composante est garantie par l’hypothèse que la fibration est localement scindée pour la topologie étale sur . Soit le corps résiduel de en . Soit la clôture intégrale de dans le corps des fonctions de . Soit une extension finie galoisienne de dans laquelle se plongent toutes les extensions . La fibration satisfait alors les hypothèses du théorème 13.3 ci-après. En combinant ce théorème et le théorème de Tchebotarev, qui garantit l’existence d’une infinité de places de décomposées dans , on conclut. Cette démonstration montre que l’ensemble infini de places cherché contient un ensemble de places de de densité positive. ∎
Remarques 13.2.
(1) L’hypothèse que l’application est localement scindée pour la topologie étale sur est en particulier satisfaite si après extension finie convenable de la fibration admet une section. D’après le théorème 7.3 (Graber, Harris et Starr), c’est le cas si la fibre générique est une variété rationnellement connexe.
(2) Le théorème ne s’étend pas à de dimension supérieure, comme l’on voit en considérant une fibration en coniques sur dont le lieu de ramification est une courbe lisse et dont le revêtement double associé est donné par une courbe géométriquement intègre. On peut par exemple prendre pour une courbe elliptique d’équation affine et une famille de coniques d’équation générique
En utilisant le théorème de Lang-Weil, on établit le théorème suivant.
Théorème 13.3.
Sous les hypothèses (*), s’il existe un ouvert tel que le morphisme induit soit lisse, surjectif, à fibres géométriquement intègres, alors pour presque toute place de , l’application induite est surjective.
Remarque 13.4. Il ne suffit pas d’avoir la propriété en codimension 1 sur , comme le montre l’exemple suivant. Prendre non carré et donnée par
Pour une infinité de , la flèche n’est pas surjective : pour , non carré dans , et un point avec , et in et carré dans , la fibre en n’a pas de -point.
Le célèbre théorème d’Ax et Kochen [3] peut se formuler de la façon suivante.
Théorème 13.5.
(Ax et Kochen) Fixons des entiers et . Soit la dimension de l’espace des formes homogènes de degré en variables. Soit la forme universelle de degré en -variables. Soit le fermé défini par l’annulation de cette forme. Soit la projection sur le premier facteur. Sur tout corps de nombres , pour presque toute place de , la projection induite est surjective.
Remarque 13.6. En combinant le théorème 13.3 et le théorème 12.3, on établit un énoncé du type Ax-Kochen pour la restriction de au-dessus d’une droite de (passant par un point à fibre lisse).
Si l’on pouvait répondre par l’affirmative à la question 3.10, la combinaison du théorème 12.3 et du théorème 13.3 donnerait une nouvelle démonstration du théorème d’Ax et Kochen.
Sans répondre à la question 3.10, Jan Denef a tout récemment (juin 2008) obtenu une nouvelle démonstration du théorème d’Ax et Kochen, en établissant une conjecture générale de [10].
On s’intéresse aux réciproques des énoncés ci-dessus.
Théorème 13.7.
Plaçons-nous sous les hypothèses (*), avec une courbe.
(i) Si pour une infinité de places l’application est surjective, alors pour tout point il existe une composante de multiplicité 1 de .
(ii) Si pour toute extension finie , pour une infinité de places de , l’application est surjective, alors l’application induite est surjective : le morphisme est localement scindé pour la topologie étale sur .
Théorème 13.8.
Plaçons-nous sous les hypothèses (*), avec une courbe. Supposons que pour presque toute place de l’application est surjective.
Alors :
(a) L’application induite est surjective : le morphisme est localement scindé pour la topologie étale sur .
(b) Toute fibre connexe de est géométriquement connexe.
(c) Si est un point fermé de , de corps résiduel et la fibre s’écrit avec chaque diviseur intègre, de corps des fonctions , la flèche
obtenue par somme des applications est injective.
Remarque 13.9.
Le théorème 13.8 est le meilleur possible, comme le montre l’exemple suivant. Soit un corps de nombres, avec . Soit un modèle projectif de la situation affine suivante :
la flèche de projection sur étant donnée par la coordonnée . Alors
a) La fibre de en ne contient aucune composante géométriquement intègre de multiplicité 1.
b) Pour toute extension finie , pour presque toute place de , l’application est surjective.
Tout le problème est qu’un polynôme en une variable sur un corps de nombres peut avoir une solution partout localement sans en avoir sur le corps de nombres, dès qu’il est réductible. Ainsi on ne peut pas partir du théorème d’Ax et Kochen pour en déduire le théorème 12.3 sur la réduction des formes lisses de degré en variables.
13.2 Quelques autres questions
Diverses questions connexes ont été discutées dans la littérature.
Soient un corps de nombres et un -morphisme propre de -variétés lisses géométriquement intègres, étant une courbe.
Question 1. Si sur toute extension finie l’application est surjective (à un nombre fini de points près), le morphisme admet-il une section ?
Question 2. Si sur tout complété le -morphisme a une section, le morphisme admet-il une section ?
En dimension relative 1, pour les courbes relatives de genre zéro, la réponse à ces deux questions est oui pour (Schinzel, Salberger, Serre). Ceci utilise l’injection qui s’établit en considérant la suite exacte de localisation pour le groupe de Brauer sur la droite projective. La réponse est non pour une courbe de genre 1 : on utilise une courbe elliptique avec un élément de 2-torsion dans son groupe de Tate-Shafarevich représenté par une algèbre de quaternions sur le corps de fonctions (voir [61]).
En dimension relative 1, pour les courbes relatives de genre 1 et , la question 1 est ouverte. La question 2 a une réponse négative (prendre avec une courbe de genre 1 qui est un contre-exemple au principe de Hasse).
Pour les familles de quadriques de dimension relative au-dessus de la réponse aux deux questions ci-dessus est négative, et ce pour tout tel .
Soit un corps de nombres totalement imaginaire. Pour les familles de quadriques de dimension relative au-dessus de , la réponse aux deux questions est négative pour . (Pour , on conjecture qu’il y a toujours une section.)
Pour justifier ces réponses négatives, partons d’un couple de formes quadratiques sur le corps de nombres tel que sur tout complété de l’une des deux formes ait un zéro non trivial (donc et sont au moins égaux à 2) mais que pour chacune de ces formes il existe un complété sur lequel la forme n’a pas de zéro non trivial.
Un théorème d’Amer et de Brumer (see the references in [17]) garantit que sur toute extension de , la forme quadratique sur le corps admet un zéro non trivial sur si et seulement si le système
admet un zéro non trivial dans .
La forme sur le corps a alors un zéro sur chaque mais n’en a pas sur . Ceci donne les réponses négatives à la question 2, et les réponses négatives à la question 1 résultent du principe de Hasse pour les formes quadratiques sur un corps de nombres.
Références
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Jean-Louis Colliot-Thélène
Mathématiques, Bâtiment 425
Université Paris-Sud
F-91405 Orsay FRANCE
jlct à math.u-psud.fr