Théorie ergodique des fractions rationnelles sur un corps ultramétrique

Charles Favre and Juan Rivera-Letelier Charles Favre
CNRS et Institut de Mathématiques de Jussieu
Équipe Géométrie et Dynamique
Case 7012, 2 place Jussieu
F-75251 Paris Cedex 05
France
and Unidade Mista CNRS-IMPA
Dona Castorina 110
Rio de Janeiro
22460-320
Brazil.
favre@math.jussieu.fr Juan Rivera-Letelier
Facultad de Matemáticas
Campus San Joaquín
P. Universidad Católica de Chile
Avenida Vicuña Mackenna 4860
Santiago
Chile
riveraletelier@mat.puc.cl
(Date: 1er mars 2024)
Résumé.

On donne les premiers éléments pour l’étude des propriétés ergodiques d’une fraction rationnelle à coefficients dans un corps algébriquement clos et complet pour une norme non archimédienne. En particulier, pour une telle fraction rationnelle R𝑅R on montre l’existence d’une mesure naturelle ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} représentant la distribution asymptotique des préimages itérées de chaque point non exceptionnel de R𝑅R. On montre que cette mesure est (exponentiellement) mélangeante, et qu’elle satisfait au théorème limite central. De plus, on donne une estimation de l’entropie métrique de cette mesure, et de l’entropie topologique de R𝑅R, qui permettent de caractériser les fractions rationnelles d’entropie topologique nulle.

Abstract. We make the first steps towards an understanding of the ergodic properties of a rational map defined over a complete algebraically closed non-archimedean field. For such a rational map R𝑅R, we construct a natural invariant probability measure ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} which reprensents the asymptotic distribution of preimages of non-exceptional point. We show that this measure is exponentially mixing, and satisfies the central limit theorem. We prove some general bounds on the metric entropy of ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R}, and on the topological entropy of R𝑅R. We finally prove that rational maps with vanishing topological entropy have potential good reduction.

2000 Mathematics Subject Classification:
Primary: 37F10, Secondary: 11S85, 37E25
Les deux auteurs ont été financé partiellement par le projet ECOS-Sud No. C07E01, ainsi que par le projet ANR-Berko.
† Remercie chaleureusement le project FONDECYT N 7050221 de la CONICYT, Chile, qui a permis son séjour à l’Universidad Católica del Norte.
‡ Partiellement soutenu par les projets FONDECYT N 1040683 et Research Network on Low Dimensional Dynamics, PBCT ACT-17, de la CONICYT, Chile, et par le project MeceSup UCN 0202.

1. Introduction

Cet article est dédié à l’étude des propriétés ergodiques d’une fraction rationnelle à coefficients dans un corps K𝐾K algébriquement clos et complet par rapport à une norme ultramétrique |||\cdot|. Plus précisement, on étudie l’action d’une telle fraction rationnelle sur l’espace analytique de Berkovich 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}, associé à la droite projective K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}. Cet article précise et complète la note [FR1].

La dynamique des fractions rationnelles à coefficients dans un corps ultramétrique apparaît naturellement dans plusieurs contextes. Un travail récent de Kiwi [K] relie l’espace des modules des polynômes cubiques complexes à la dynamique de certaines fractions rationnelles sur le corps ultramétrique des séries de Puiseux. Une deuxième source d’exemples provient de questions arithmétiques. À une fraction rationnelle R𝑅R à coefficients algébriques sur {\mathbb{Q}} est associée une fonction réelle sur une clôture algébrique ¯¯\overline{{\mathbb{Q}}} de {\mathbb{Q}}, appelée hauteur dynamique. On montre que cette hauteur est complètement déterminée par la dynamique de R𝑅R en chacune des complétions de ¯¯\overline{{\mathbb{Q}}}, y compris les complétions p𝑝p-adiques de ce corps, pour chaque nombre premier p𝑝p. On est donc naturellement amené à regarder l’action de R𝑅R sur ces corps non archimédiens. Nous renvoyons à [Ben, BH, BR1, CL, CLT, FR2, ST] pour une analyse de ces hauteurs s’appuyant sur la dynamique des fractions rationnelles à coefficients dans un corps ultramétrique. On pourra consulter le livre récent de Silverman [Sil2] pour d’autres exemples et références.

Dans cet article, on s’intéresse principalement aux propriétés ergodiques d’une fraction rationnelle agissant sur l’espace analytique de Berkovich 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} associé à K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}, voir [Ber1], ou [BR2, E, R6] pour une approche élémentaire. Dans le cas complexe l’entropie topologique est égale au logarithme du degré de la fraction rationnelle, et il existe une unique mesure d’entropie maximale [Gr, Lj, Man]. De plus cette mesure possède des propriétés remarquables d’équidistribution: elle décrit la distribution asymptotique des préimages itérées d’un point non exceptionnel, ainsi que la distribution asymptotique des points périodiques [Br, To, FLM, Lj]. Le développement récent d’une théorie du potentiel dans un cadre non archimédien [BR2, FJ, Th], analogue à la théorie du potentiel complexe, a permis la construction d’une mesure analogue lorsque le corps de base est ultramétrique. Notre but est ici de décrire les propriétés générales de cette mesure, et d’en tirer quelques conclusions sur l’entropie topologique des fractions rationnelles en question.

1.1. Dynamique sur la droite projective de Berkovich

Dans toute la suite, (K,||)(K,|\cdot|) désigne un corps métrisé non archimédien, que l’on suppose complet et algébriquement clos. Pour la plupart des résultats, nous ne ferons aucune hypothèse sur la caractéristique de K𝐾K, ni sur la caractéristique résiduelle de K𝐾K.

L’espace projectif standard K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} muni de la métrique sphérique est tout à la fois totalement discontinu et non localement compact. Ces deux faits cumulés rendent délicate toute théorie de la mesure, et plus généralement toute analyse sur K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}. C’est pour cette raison qu’il est plus naturel de considérer l’action des fractions rationnelles sur la droite projective de Berkovich 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}. Cet espace peut être construit de plusieurs manières différentes. Il s’identifie par exemple à l’arbre réel obtenu par complétion de l’espace des boules de K𝐾K, par rapport à une métrique adéquate.

Refer to caption
Un ouvert pour la topologiecompacte: le bord est finiet constitué de deux pts.Une boule ouverte pour la métriqueinfini.sphérique. Le bord est de cardinal
Figure 1. Deux topologies sur un arbre

On a un plongement naturel de K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} dans 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}, associant à zK1𝑧subscriptsuperscript1𝐾z\in{\mathbb{P}^{1}_{K}} la boule de centre z𝑧z et de rayon nul. On notera Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}} le complémentaire de K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} dans 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}. L’espace 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} possède deux topologies naturelles: une métrisable provenant de la métrique sphérique, qui n’est pas localement compacte, et une autre plus grossière et compacte, qui n’est pas métrisable en général, voir Figure 1. Cette dernière topologie est adaptée pour la théorie de la mesure.

L’action d’une fraction rationnelle R𝑅R sur K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} s’étend de façon naturelle en une action continue sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}. En particulier, à chaque point 𝒮𝒮{\mathcal{S}} de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} on peut associer de façon naturelle un degré local degR(𝒮)subscriptdegree𝑅𝒮\deg_{R}({\mathcal{S}}), qui coïncide avec le degré local usuel lorsque 𝒮K1𝒮subscriptsuperscript1𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathbb{P}^{1}_{K}}. De façon analogue au cas complexe, lorsque R𝑅R est de degré au moins deux on décompose 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} en deux ensembles disjoints et totalement invariants: l’ensemble de Fatou FRsubscript𝐹𝑅F_{R}, et l’ensemble de Julia JRsubscript𝐽𝑅J_{R}. Le premier est l’ouvert des points où la dynamique est «  régulière  »; le second est un compact sur lequel la dynamique est «  chaotique   », voir [R2, R7].

1.2. La mesure d’équilibre et ses propriétés d’équidistribution

Pour chaque 𝒮𝖯K1𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}} on note [𝒮]delimited-[]𝒮[{\mathcal{S}}] la masse de Dirac en 𝒮𝒮{\mathcal{S}}. Chaque fraction rationnelle R𝑅R induit une action continue Rsuperscript𝑅R^{*} sur les mesures boréliennes et positives, telle que pour chaque 𝒮𝖯K1𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}}, on ait

R[𝒮]=𝒮R1(𝒮)degR(𝒮)[𝒮].superscript𝑅delimited-[]𝒮subscriptsuperscript𝒮superscript𝑅1𝒮subscriptdegree𝑅superscript𝒮delimited-[]superscript𝒮R^{*}[{\mathcal{S}}]=\sum_{{\mathcal{S}}^{\prime}\in R^{-1}({\mathcal{S}})}\deg_{R}({\mathcal{S}}^{\prime})[{\mathcal{S}}^{\prime}]\leavevmode\nobreak\ .

Voir §2.2 pour plus de précisions.

Rappelons qu’un point zK1𝑧subscriptsuperscript1𝐾z\in{\mathbb{P}^{1}_{K}} est exceptionnel pour R𝑅R si l’ensemble de ses préimages itérées est fini. Une fraction rationnelle admet au plus deux points exceptionnels, sauf dans le cas où la caractéristique de K𝐾K est strictement positive et R𝑅R est conjuguée à un itéré de l’automorphisme de Frobenius. Dans ce dernier cas l’ensemble exceptionnel est infini dénombrable.

Théorème A.

Soit R𝑅R une fraction rationnelle à coefficients dans K𝐾K et de degré au moins 2. Alors il existe une mesure de probabilité ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} définie sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}, telle que pour toute mesure de probabilité ρ𝜌\rho définie sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}, on ait convergence

limn+deg(R)nRnρ=ρR,\lim_{n\to+\infty}\deg(R)^{-n}R^{n*}\rho=\rho_{R}\leavevmode\nobreak\ , (1.1)

si et seulement si ρ𝜌\rho ne charge pas l’ensemble exceptionnel de R𝑅R. En particulier la mesure ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} est caractérisée comme l’unique mesure de probabilité ρ𝜌\rho ne chargeant pas l’ensemble exceptionnel et telle que  Rρ=deg(R)ρsuperscript𝑅𝜌degree𝑅𝜌R^{*}\rho=\deg(R)\rho.

De plus, la mesure ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} est mélangeante, ne charge aucun point de K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}, et son support topologique est égal à l’ensemble de Julia de R𝑅R.

On appellera ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} la mesure d’équilibre de R𝑅R. Nous donnerons une version quantitative du fait que ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} ne charge pas les points de K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} en estimant la masse des boules en fonction de leur diamètre, voir la Proposition 3.3. Par contre, cette mesure peut charger un point de K=𝖯K1K1subscript𝐾subscriptsuperscript𝖯1𝐾subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{H}_{K}}={\mathsf{P}^{1}_{K}}\setminus{\mathbb{P}^{1}_{K}}, voir le Théorème E ci-dessous.

On montrera que la mesure d’équilibre est exponentiellement mélangeante et satisfait au théorème limite central par rapport aux observables de classe 𝒞1superscript𝒞1{\mathcal{C}}^{1}, voir les Propositions 3.5 et 3.6 du §3.3. Dans le cas complexe le mélange exponentiel a été montré dans [FS1, FS2, H], et le théorème limite central dans [DPU]. On utilise ici les méthodes de la théorie du potentiel développées dans [CLB, DS3, FS1, FS2].

Lorsque la mesure ρ=[𝒮]𝜌delimited-[]𝒮\rho=[{\mathcal{S}}] est la masse de Dirac située en un point non exceptionnel 𝒮𝒮{\mathcal{S}} dans 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}, pour tout entier positif n𝑛n on a,

Rn[𝒮]=𝒮Rn(𝒮)degRn(𝒮)[𝒮].superscript𝑅𝑛delimited-[]𝒮subscriptsuperscript𝒮superscript𝑅𝑛𝒮subscriptdegreesuperscript𝑅𝑛superscript𝒮delimited-[]superscript𝒮R^{n*}[{\mathcal{S}}]=\sum_{{\mathcal{S}}^{\prime}\in R^{-n}({\mathcal{S}})}\deg_{R^{n}}({\mathcal{S}}^{\prime})[{\mathcal{S}}^{\prime}]\leavevmode\nobreak\ .

Le Théorème A montre alors que la mesure ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} décrit la distribution asymptotique des préimages itérées de tout point non exceptionnel. Dans le cas arithmétique cette propriété est une conséquence de l’équidistribution des points de petite hauteur montrée dans [BR1, CL, FR3], et on a de plus des estimations quantitatives de la convergence [FR3]. La propriété analogue dans le cas complexe a été montrée dans [Br, FLM, Lj].

Dans le cas complexe la mesure d’équilibre décrit la distribution asymptotique de suites plus générales de points, voir [Lj] et aussi [To]. Lorsque le corps de base K𝐾K est de caractéristique nulle, nous obtenons l’analogue non archimédien.

Théorème B.

Supposons que la caratéristique du corps K𝐾K soit nulle, et soit R𝑅R une fraction rationnelle à coefficients dans K𝐾K de degré au moins 2. Pour toute fraction rationnelle non constante SK(z)𝑆𝐾𝑧S\in K(z) et pour tout entier n0𝑛0n\geq 0 tel que RnSsuperscript𝑅𝑛𝑆R^{n}\neq S, notons [Rn=S]delimited-[]superscript𝑅𝑛𝑆[R^{n}=S] la mesure supportée sur l’ensemble fini {zK1,Rn(z)=S(z)}formulae-sequence𝑧subscriptsuperscript1𝐾superscript𝑅𝑛𝑧𝑆𝑧\{z\in{\mathbb{P}^{1}_{K}},\,R^{n}(z)=S(z)\}, et dont la masse en z𝑧z est égal à la multiplicité de z𝑧z comme solution de Rn=Ssuperscript𝑅𝑛𝑆R^{n}=S. Alors, on a

limn+deg(R)n[Rn=S]=ρR.\lim_{n\to+\infty}\deg(R)^{-n}[R^{n}=S]=\rho_{R}\leavevmode\nobreak\ . (1.2)

Lorsque S(z)=z𝑆𝑧𝑧S(z)=z la mesure [Rn=S]delimited-[]superscript𝑅𝑛𝑆[R^{n}=S] est supportée sur les points périodiques de période n𝑛n dans K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}, chargeant chaque point selon sa multiplicité comme point périodique. Le Théorème B montre alors que la mesure ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} décrit la distribution asymptotique des points périodiques dans K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}. Lorsque le corps de base est de caractéristique p>0𝑝0p>0, cette dernière propriété n’est pas vérifiée en général. Par exemple, si l’on pose P0(z)=z+zpsubscript𝑃0𝑧𝑧superscript𝑧𝑝P_{0}(z)=z+z^{p}, alors pour tout entier positif n𝑛n on a P0pn(z)=z+zppnsuperscriptsubscript𝑃0superscript𝑝𝑛𝑧𝑧superscript𝑧superscript𝑝superscript𝑝𝑛P_{0}^{p^{n}}(z)=z+z^{p^{p^{n}}}, d’où [P0n=S]=ppn[0]+[]delimited-[]superscriptsubscript𝑃0𝑛𝑆superscript𝑝superscript𝑝𝑛delimited-[]0delimited-[][P_{0}^{n}=S]=p^{p^{n}}[0]+[\infty] et ppn[P0pn=S][0]superscript𝑝superscript𝑝𝑛delimited-[]superscriptsubscript𝑃0superscript𝑝𝑛𝑆delimited-[]0p^{-p^{n}}[P_{0}^{p^{n}}=S]\to[0] lorsque n+𝑛n\to+\infty. Or la mesure ρP0subscript𝜌subscript𝑃0\rho_{P_{0}} ne charge pas 00 par le Théorème A. Il serait intéressant de décrire toutes les fractions rationnelles R𝑅R et S𝑆S pour lesquelles deg(R)n[Rn=S]\deg(R)^{-n}[R^{n}=S] ne converge pas vers la mesure d’équilibre lorsque n+𝑛n\to+\infty.

Notons que pour S(z)=z𝑆𝑧𝑧S(z)=z seuls les points périodiques dans K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} interviennent dans (1.2). En réalité, l’équation (1.2) ne peut être valide si l’on prend en compte tous les points périodiques de R𝑅R dans 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}, car en général R𝑅R en admet une infinité non dénombrable (c’est le cas si K𝐾K est de caractéristique mixte et R𝑅R admet un point périodique indifférent, voir [R3, Proposition 5.8]). On peut cependant formuler la question suivante.

Question 1.

Les points périodiques répulsifs sont-ils équidistribués asymptotiquement par rapport à la mesure d’équilibre?

Enfin dans le cas où R𝑅R est définie sur un corps de nombres, Szpiro-Tucker [ST] ont démontré une version plus forte de (1.2) qui permet entre autres d’estimer l’exposant de Lyapunov de R𝑅R par rapport à la mesure ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} :

deg(R)nzK1,Rn(z)=zlog|R|(z)log|R|dρR.\deg(R)^{-n}\!\!\!\!\!\sum_{z\in{\mathbb{P}^{1}_{K}},\ R^{n}(z)=z}\!\!\!\!\!\!\log|R^{\prime}|(z)\to\int\log|R^{\prime}|\,d\rho_{R}\leavevmode\nobreak\ .

1.3. Entropie

Pour étudier l’entropie topologique nous introduisons le nombre

degtop(R):=max{#(R1(z)),zK1},assignsubscriptdegtop𝑅#superscript𝑅1𝑧𝑧subscriptsuperscript1𝐾\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R):=\max\{\#(R^{-1}(z)),\,z\in{\mathbb{P}^{1}_{K}}\}\leavevmode\nobreak\ ,

qu’on appellera le degré topologique de R𝑅R. Lorsque la caractéristique de K𝐾K est nulle, cet entier est égal à deg(R)degree𝑅\deg(R). Lorsque la caractéristique de K𝐾K est p>1𝑝1p>1, alors on peut écrire R𝑅R de façon unique comme R(z)=Q(zq)𝑅𝑧𝑄superscript𝑧𝑞R(z)=Q(z^{q}), où Q𝑄Q est une fraction rationnelle séparable et q1𝑞1q\geq 1 est une puissance de p𝑝p. Dans ce cas on a degtop(R)=deg(Q)subscriptdegtop𝑅degree𝑄\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R)=\deg(Q). Dans tous les cas deg(R)/degtop(R)degree𝑅subscriptdegtop𝑅\deg(R)/\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R) est un entier, égal au degré local de R𝑅R en chaque point de K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}, avec un nombre fini d’exceptions.

Dans le cas complexe, l’entropie topologique d’une fraction rationnelle est égale au logarithme de son degré, et il existe une unique mesure d’entropie maximale [Gr, Lj, Man]. La situation dans le cas non archimédien est nettement plus compliquée. Par exemple, pour chaque entier d5𝑑5d\geq 5 et chaque aK𝑎𝐾a\in K satisfaisant |a|(0,1)𝑎0.1|a|\in(0,1), la fraction rationnelle

R0(z)=zd21+(az)d,subscript𝑅0𝑧superscript𝑧𝑑21superscript𝑎𝑧𝑑R_{0}(z)=\frac{z^{d-2}}{1+(az)^{d}}\leavevmode\nobreak\ ,

satisfait,

0<hρR0(R0)<htop(R0)=log2<logd=logdegtop(R0),0subscriptsubscript𝜌subscript𝑅0subscript𝑅0subscripttopsubscript𝑅02𝑑subscriptdegtopsubscript𝑅00<h_{\rho_{R_{0}}}(R_{0})<h_{\mathrm{top}}\,(R_{0})=\log 2<\log d=\log\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R_{0})\leavevmode\nobreak\ , (1.3)

hρR0(R0)subscriptsubscript𝜌subscript𝑅0subscript𝑅0h_{\rho_{R_{0}}}(R_{0}) est l’entropie métrique de la mesure ρR0subscript𝜌subscript𝑅0\rho_{R_{0}}, et htop(R0)subscripttopsubscript𝑅0h_{\mathrm{top}}\,(R_{0}) est l’entropie topologique de R0subscript𝑅0R_{0}. Et ceci reste même valable dans un voisinage ouvert de R0subscript𝑅0R_{0} dans l’espace des fractions rationnelles de degré d𝑑d, voir §5.2.

Théorème C.

Soit R𝑅R une fraction rationnelle à coefficients dans K𝐾K et de degré au moins deux. Alors on a

htop(R)=htop(R|JR), et 0hρR(R)htop(R)logdegtop(R).formulae-sequencesubscripttop𝑅subscripttopevaluated-at𝑅subscript𝐽𝑅 et 0subscriptsubscript𝜌𝑅𝑅subscripttop𝑅subscriptdegtop𝑅h_{\mathrm{top}}\,(R)=h_{\mathrm{top}}\,(R|_{J_{R}}),\text{ et }0\leq h_{\rho_{R}}(R)\leq h_{\mathrm{top}}\,(R)\leq\log\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R)\leavevmode\nobreak\ . (1.4)

Nous donnerons aussi une estimation de l’entropie métrique de la mesure d’équilibre en termes de la fonction degré local. Pour cela on définit le degré moyen de R𝑅R par

deg¯(R):=exp[𝖯K1logdegR(𝒮)dρR(𝒮)].assign¯deg𝑅subscriptsubscriptsuperscript𝖯1𝐾subscriptdegree𝑅𝒮𝑑subscript𝜌𝑅𝒮\underline{\mathrm{deg}}\,(R):=\exp\left[\int_{{\mathsf{P}^{1}_{K}}}\log\deg_{R}({\mathcal{S}})\,d\rho_{R}({\mathcal{S}})\right]\leavevmode\nobreak\ .
Théorème D.

On a

hρR(R)log(deg(R)deg¯(R)).subscriptsubscript𝜌𝑅𝑅degree𝑅¯deg𝑅h_{\rho_{R}}(R)\geq\log\left(\frac{\deg(R)}{\underline{\mathrm{deg}}\,(R)}\right)\leavevmode\nobreak\ . (1.5)

Si de plus ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} ne charge pas Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}, alors on a

hρR(R)=htop(R)=logdegtop(R)>0.subscriptsubscript𝜌𝑅𝑅subscripttop𝑅subscriptdegtop𝑅0h_{\rho_{R}}(R)=h_{\mathrm{top}}\,(R)=\log\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R)>0\leavevmode\nobreak\ .

On obtient l’estimation (1.5) comme une conséquence de la formule de Rokhlin, et par conséquent l’égalité est équivalente à l’existence d’une partition génératrice d’entropie finie associée à R𝑅R, voir [P, PU]. Dans la Section 5.3 nous décrirons un exemple où R𝑅R n’est pas localement injective sur un sous-ensemble non dénombrable de son ensemble de Julia, ce qui rend extrèmement délicat la construction d’une telle partition. Malgré cela, nous posons la question suivante.

Question 2.

Pour toute fraction rationnelle, a-t’on égalité dans (1.5)?

On verra sur des exemples que les difficultés dans les calculs d’entropie sont toutes liées au fait que la fraction rationnelle n’est pas séparable ou possède une réduction non séparable. Lorsque ces phénomènes sont absents (par exemple lorsque la caractéristique résiduelle est nulle), il est possible de faire une analyse plus fine, de préciser le Théorème C, et de répondre par l’affirmative à la question précédente. Cette étude sera détaillée dans [FR3].

L’estimation (1.5) permet aussi de caractériser les fractions rationnelles d’entropie topologique nulle. Rappelons qu’une fraction rationnelle R:=P/Qassign𝑅𝑃𝑄R:=P/Q avec P,QK[z]𝑃𝑄𝐾delimited-[]𝑧P,Q\in K[z] a bonne réduction si les réductions P~,Q~~𝑃~𝑄\widetilde{P},\widetilde{Q} de P𝑃P et Q𝑄Q dans le corps résiduel de K𝐾K sont non nulles, et si la fraction P~/Q~~𝑃~𝑄\widetilde{P}/\widetilde{Q} a même degré que R𝑅R.

Théorème E.

Les assertions suivantes sont équivalentes:

  1. (1)

    htop(R)=0subscripttop𝑅0h_{\mathrm{top}}\,(R)=0 ;

  2. (2)

    hρR(R)=0subscriptsubscript𝜌𝑅𝑅0h_{\rho_{R}}(R)=0 ;

  3. (3)

    il existe une coordonnée dans laquelle R𝑅R a bonne réduction ;

  4. (4)

    la mesure ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} est la masse de Dirac située en un point de K|K|subscriptsuperscriptsuperscript𝐾𝐾{\mathbb{H}^{|K^{*}|}_{K}} ;

  5. (5)

    la mesure ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} charge un point de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} .

L’ensemble K|K|subscriptsuperscriptsuperscript𝐾𝐾{\mathbb{H}^{|K^{*}|}_{K}} est défini au §2 et est constitué des points de branchements de l’arbre réel 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}.

Mentionnons tout de suite le résultat suivant que nous généraliserons dans [FR3]. Une fraction rationnelle est dite modérée si le sous-ensemble {degR2}subscriptdegree𝑅2\{\deg_{R}\geq 2\} de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} est inclus dans un arbre fini. Par exemple, lorsque la caractéristique résiduelle de K𝐾K est nulle, toute fraction rationnelle est modérée. Les Théorèmes D et E, et le fait que pour un polynôme modéré l’intersection de l’ensemble de Julia avec {degR2}subscriptdegree𝑅2\{\deg_{R}\geq 2\} est finie, impliquent le résultat suivant.

Corollaire F.

Soit P𝑃P un polynôme modéré qui ne soit pas conjugué à un polynôme ayant bonne réduction. Alors hρR(R)=htop(R)=logdegtop(R)subscriptsubscript𝜌𝑅𝑅subscripttop𝑅subscriptdegtop𝑅h_{\rho_{R}}(R)=h_{\mathrm{top}}\,(R)=\log\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R).

1.4. Plan

Nous commençons en §2.1 par rappeler la définition de l’espace projectif au sens de Berkovich et nous y décrivons rapidement sa géométrie. Au §2.2, nous donnons les propriétés principales de l’action d’une fraction rationnelle sur cet espace, et au §2.3 nous rappelons les définitions des ensembles de Fatou et Julia, ainsi que certaines propriétés qui nous seront utiles par la suite. Nous indiquons alors comment construire une théorie du potentiel sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} adaptée à nos besoins (§2.4).

La Section 3 contient la construction de la mesure d’équilibre (§3.1), ainsi que la preuve du Théorème A §3.2 et du Théorème B §3.4. Nous montrons aussi les propriétés de mélange de la mesure d’équilibre (§3.3).

Nous attaquons les problèmes d’entropie au §4. On commence par quelques généralités sur l’entropie topologique dans les espaces compacts non métrisables §4.1, puis nous donnons la preuve du Théorème C §4.2, et les preuves des Théorèmes D et E et du Corollaire F §4.3.

Nous concluons cet article en explicitant quatre exemples qui nous semblent caractéristiques en §5.

1.5. Remerciements:

nous tenons à remercier les deux rapporteurs pour leur lecture extrèmement détaillée du papier et leurs suggestions pour en améliorer la rédaction.

2. Généralités

Cette partie contient un certain nombre de résultats et de faits sur la géométrie de la droite projective sur un corps normé non archimédien, ainsi que sur les propriétés de base des fractions rationnelles.

Dans le reste de cet article on fixe un corps algébriquement clos K𝐾K, muni d’une norme non archimédienne |||\cdot| pour laquelle il est complet. On note 𝒪K:={zK,|z|1}assignsubscript𝒪𝐾formulae-sequence𝑧𝐾𝑧1{\mathcal{O}_{K}}:=\{z\in K,|z|\leq 1\} l’anneau des entiers de K𝐾K, et 𝔪K:={zK,|z|<1}assignsubscript𝔪𝐾formulae-sequence𝑧𝐾𝑧1{\mathfrak{m}_{K}}:=\{z\in K,|z|<1\} son unique idéal maximal. Le corps résiduel sera noté K~:=𝒪K/𝔪Kassign~𝐾subscript𝒪𝐾subscript𝔪𝐾\widetilde{K}:={\mathcal{O}}_{K}/{\mathfrak{m}_{K}}, c’est un corps algébriquement clos.

Rappelons qu’une semi-norme multiplicative sur un anneau commutatif R𝑅R muni d’une unité est une fonction ||:R+|\cdot|:R\to{\mathbb{R}}_{+} telle que |1|=111|1|=1, |ab|=|a||b|𝑎𝑏𝑎𝑏|ab|=|a|\cdot|b|, et |a+b|max{|a|,|b|}𝑎𝑏𝑎𝑏|a+b|\leq\max\{|a|,|b|\} pour tout a,bR𝑎𝑏𝑅a,b\in R. Si {a,|a|=0}𝑎𝑎0\{a,|a|=0\} est réduit à {0}0\{0\} alors |||\cdot| est une norme non-archimédienne sur R𝑅R.

2.1. La droite projective au sens de Berkovich

Nous renvoyons à [BR2, Ber1] pour plus d’informations.

Soit 𝖠K1subscriptsuperscript𝖠1𝐾{\mathsf{A}^{1}_{K}} l’espace de toutes les semi-normes multiplicatives définies sur K[z]𝐾delimited-[]𝑧K[z], dont la restriction à K𝐾K est égale à |||\cdot|. On note de plus 𝒮subscript𝒮{\mathcal{S}}_{\infty} la fonction définie sur K[z]𝐾delimited-[]𝑧K[z], qui est constante égale à \infty sur tous les polynômes non constants de K𝐾K, et telle que pour chaque polynôme constant Pa𝑃𝑎P\equiv a on ait 𝒮(P)=|a|subscript𝒮𝑃𝑎{\mathcal{S}}_{\infty}(P)=|a|. On pose 𝖯K1=𝖠K1{𝒮}subscriptsuperscript𝖯1𝐾square-unionsubscriptsuperscript𝖠1𝐾subscript𝒮{\mathsf{P}^{1}_{K}}={\mathsf{A}^{1}_{K}}\sqcup\{{\mathcal{S}}_{\infty}\} et on munit 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} de la topologie la moins fine telle que pour chaque PK[z]𝑃𝐾delimited-[]𝑧P\in K[z] la fonction 𝒮𝒮(P)maps-to𝒮𝒮𝑃{\mathcal{S}}\mapsto{\mathcal{S}}(P) soit continue. L’espace 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} est alors compact et séquentiellement compact. On l’appelle espace analytique de Berkovich associé à K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}.

Chaque point zK𝑧𝐾z\in K induit une semi-norme, qu’on notera aussi par z𝑧z, définie par z(P)=|P(z)|𝑧𝑃𝑃𝑧z(P)=|P(z)|. On obtient ainsi un homéomorphisme de K1=K{}subscriptsuperscript1𝐾𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}=K\cup\{\infty\} sur son image. Dans la suite, on identifiera K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} avec son image dans 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}.

À chaque boule B={|zz0|r}𝐵𝑧subscript𝑧0𝑟B=\{|z-z_{0}|\leq r\} de K𝐾K correspond la semi-norme 𝒮Bsubscript𝒮𝐵{\mathcal{S}}_{B} dans 𝖠K1subscriptsuperscript𝖠1𝐾{\mathsf{A}^{1}_{K}}, définie par 𝒮B(P)=supB|P(z)|subscript𝒮𝐵𝑃subscriptsupremum𝐵𝑃𝑧{\mathcal{S}}_{B}(P)=\sup_{B}|P(z)|. Plus généralement, toute suite décroissante {Bi}i0subscriptsubscript𝐵𝑖𝑖0\{B_{i}\}_{i\geq 0} de boules de K𝐾K induit une semi-norme Plimi𝒮Bi(P)maps-to𝑃subscript𝑖subscript𝒮subscript𝐵𝑖𝑃P\mapsto\lim_{i\to\infty}{\mathcal{S}}_{B_{i}}(P). Réciproquement, toute semi-norme dans 𝖠K1subscriptsuperscript𝖠1𝐾{\mathsf{A}^{1}_{K}} est de cette forme et les points de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} se rangent donc dans l’une des quatre catégories suivantes (voir par exemple [Ber1, p.18]):

  1. i)

    les points de K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}};

  2. ii)

    les points rationnels, de la forme 𝒮Bsubscript𝒮𝐵{\mathcal{S}}_{B}, avec B={|za|r}𝐵𝑧𝑎𝑟B=\{|z-a|\leq r\} et r|K|𝑟superscript𝐾r\in|K^{*}|;

  3. iii)

    les points irrationnels, de la forme 𝒮Bsubscript𝒮𝐵{\mathcal{S}}_{B}, avec B={|za|r}𝐵𝑧𝑎𝑟B=\{|z-a|\leq r\} et r|K|𝑟superscript𝐾r\not\in|K^{*}|;

  4. iv)

    les points singuliers, associés à une suite décroissante de boules de K𝐾K dont l’intersection est vide.

Notons que tous les points de type (ii), (iii) et (iv) sont des normes qui s’étendent à K(z)𝐾𝑧K(z), alors que la semi-norme ||z0|\cdot|_{z_{0}} associée à un point z0K1subscript𝑧0subscriptsuperscript1𝐾z_{0}\in{\mathbb{P}^{1}_{K}} vérifie |zz0|z0=0subscript𝑧subscript𝑧0subscript𝑧00|z-z_{0}|_{z_{0}}=0. On notera par Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}} l’ensemble 𝖯K1K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾subscriptsuperscript1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}\setminus{\mathbb{P}^{1}_{K}}, par K|K|subscriptsuperscriptsuperscript𝐾𝐾{\mathbb{H}^{|K^{*}|}_{K}} le sous-ensemble de Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}} des points rationnels de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}, et par Kosuperscriptsubscript𝐾o{\mathbb{H}_{K}^{\mathrm{o}}} le complémentaire dans Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}} de l’ensemble de ses points singuliers. On appelle point canonique111aussi appelé point de Gauss, voir [BR2] la norme associée à la boule unité {zK,|z|1}formulae-sequence𝑧𝐾𝑧1\{z\in K,|z|\leq 1\} et on le note 𝒮cansubscript𝒮can{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}. Etant donné un point rationnel ou irrationnel 𝒮𝒮{\mathcal{S}}, on désigne par B𝒮subscript𝐵𝒮B_{\mathcal{S}} la boule de K𝐾K correspondante. Elle coïncide avec l’intersection avec K𝐾K du complémentaire dans 𝖠K1subscriptsuperscript𝖠1𝐾{\mathsf{A}^{1}_{K}} de la composante connexe non bornée de 𝖠K1𝒮subscriptsuperscript𝖠1𝐾𝒮{\mathsf{A}^{1}_{K}}\setminus{\mathcal{S}}. Lorsque zK𝑧𝐾z\in K on pose Bz={z}subscript𝐵𝑧𝑧B_{z}=\{z\}, et si z=𝑧z=\infty, on note B=Ksubscript𝐵𝐾B_{\infty}=K.

Chaque fraction rationnelle RK(z)𝑅𝐾𝑧R\in K(z) agit sur 𝖯K1K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾subscriptsuperscript1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}\setminus{\mathbb{P}^{1}_{K}}. Un point 𝒮𝒮{\mathcal{S}} dans cet espace est en effet une norme sur K[z]𝐾delimited-[]𝑧K[z], et donc induit une norme sur le corps des fractions K(z)𝐾𝑧K(z). On définit alors R(𝒮)𝑅𝒮R({\mathcal{S}}) comme la norme vérifiant R(𝒮)(P):=𝒮(PR)assign𝑅𝒮𝑃𝒮𝑃𝑅R({\mathcal{S}})(P):={\mathcal{S}}(P\circ R). Cette action s’étend continûment en une action de R𝑅R sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} qui coïncide avec l’action naturelle de R𝑅R sur K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}.

Structure d’arbre

C’est un fait fondamental que 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} possède une structure d’arbre réel, que nous allons maintenant décrire brièvement. Considérons l’ordre partiel \leq défini sur l’espace 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} par 𝒮𝒮𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}\leq{\mathcal{S}}^{\prime} si et seulement si pour tout PK[z]𝑃𝐾delimited-[]𝑧P\in K[z] on a 𝒮(P)𝒮(P)𝒮𝑃superscript𝒮𝑃{\mathcal{S}}(P)\leq{\mathcal{S}}^{\prime}(P). Lorsque 𝒮𝒮{\mathcal{S}} et 𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}^{\prime} sont non singuliers, on a 𝒮𝒮𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}\leq{\mathcal{S}}^{\prime} si et seulement si B𝒮B𝒮subscript𝐵𝒮subscript𝐵superscript𝒮B_{\mathcal{S}}\subset B_{{\mathcal{S}}^{\prime}}. On vérifie que le point 𝒮subscript𝒮{\mathcal{S}}_{\infty} est l’unique élément maximal de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} et que l’ensemble des éléments minimaux coïncide avec l’union de K𝐾K et des points singuliers.

Étant donnés 𝒮𝒮{\mathcal{S}} et 𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}^{\prime} dans 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}, on définit 𝒮𝒮𝖯K1𝒮superscript𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathcal{S}}\vee{\mathcal{S}}^{\prime}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}} par

(𝒮𝒮)(P)=inf{𝒮^(P),𝒮^𝖯K1,𝒮𝒮^,𝒮𝒮^}.({\mathcal{S}}\vee{\mathcal{S}}^{\prime})(P)=\inf\{\widehat{{\mathcal{S}}}(P),\,\widehat{{\mathcal{S}}}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}},\ {\mathcal{S}}\leq\widehat{{\mathcal{S}}},\ {\mathcal{S}}^{\prime}\leq\widehat{{\mathcal{S}}}\}.

On vérifie qu’on a 𝒮𝒮=𝒮𝒮superscript𝒮𝒮{\mathcal{S}}\vee{\mathcal{S}}^{\prime}={\mathcal{S}} si et seulement si 𝒮𝒮superscript𝒮𝒮{\mathcal{S}}^{\prime}\leq{\mathcal{S}} et que 𝒮𝒮=𝒮𝒮superscript𝒮subscript𝒮{\mathcal{S}}\vee{\mathcal{S}}^{\prime}={\mathcal{S}}_{\infty} si et seulement si 𝒮𝒮{\mathcal{S}} ou 𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}^{\prime} est égale à 𝒮subscript𝒮{\mathcal{S}}_{\infty}. Lorsque 𝒮𝒮{\mathcal{S}} et 𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}^{\prime} sont des points non singuliers dans 𝖠K1subscriptsuperscript𝖠1𝐾{\mathsf{A}^{1}_{K}}, le point 𝒮𝒮𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}\vee{\mathcal{S}}^{\prime} est la semi-norme associée à la plus petite boule de K𝐾K qui contient B𝒮subscript𝐵𝒮B_{\mathcal{S}} et B𝒮subscript𝐵superscript𝒮B_{{\mathcal{S}}^{\prime}}.

L’ordre partiel \leq définit alors une structure d’arbre dans 𝖠K1subscriptsuperscript𝖠1𝐾{\mathsf{A}^{1}_{K}} (resp. 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}) au sens suivant. Pour chaque paire de points distincts 𝒮𝒮{\mathcal{S}} et 𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}^{\prime}, l’ensemble

[𝒮,𝒮]={𝒮~,𝒮𝒮~𝒮𝒮 ou 𝒮𝒮~𝒮𝒮}.𝒮superscript𝒮~𝒮𝒮~𝒮𝒮superscript𝒮 ou superscript𝒮~𝒮𝒮superscript𝒮[{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}]=\{\widetilde{{\mathcal{S}}},\,{\mathcal{S}}\leq\widetilde{{\mathcal{S}}}\leq{\mathcal{S}}\vee{\mathcal{S}}^{\prime}\ \mbox{ ou }\ {\mathcal{S}}^{\prime}\leq\widetilde{{\mathcal{S}}}\leq{\mathcal{S}}\vee{\mathcal{S}}^{\prime}\}.

est l’unique arc topologique dans 𝖠K1subscriptsuperscript𝖠1𝐾{\mathsf{A}^{1}_{K}} (resp. 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}) ayant 𝒮𝒮{\mathcal{S}} et 𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}^{\prime} comme extrémités. Un ensemble de la forme [𝒮,𝒮]𝒮superscript𝒮[{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}] est appelé segment. On dira qu’un point 𝒮𝒮{\mathcal{S}} est entre les points 𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}^{\prime} et 𝒮′′superscript𝒮′′{\mathcal{S}}^{\prime\prime} lorsque 𝒮[𝒮,𝒮′′]𝒮superscript𝒮superscript𝒮′′{\mathcal{S}}\in[{\mathcal{S}}^{\prime},{\mathcal{S}}^{\prime\prime}]. Dans ce cas on a [𝒮,𝒮′′]=[𝒮,𝒮][𝒮,𝒮′′]superscript𝒮superscript𝒮′′superscript𝒮𝒮𝒮superscript𝒮′′[{\mathcal{S}}^{\prime},{\mathcal{S}}^{\prime\prime}]=[{\mathcal{S}}^{\prime},{\mathcal{S}}]\cup[{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime\prime}]. Notons que pour chaque triplet de points 𝒮𝒮{\mathcal{S}}, 𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}^{\prime} et 𝒮′′superscript𝒮′′{\mathcal{S}}^{\prime\prime} il existe un unique point qui est entre 𝒮𝒮{\mathcal{S}} et 𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}^{\prime}, entre 𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}^{\prime} et 𝒮′′superscript𝒮′′{\mathcal{S}}^{\prime\prime} et entre 𝒮′′superscript𝒮′′{\mathcal{S}}^{\prime\prime} et 𝒮𝒮{\mathcal{S}}.

Métrique sphérique

Diverses fonctions définies sur K𝐾K s’étendent de manière naturelle à 𝖠K1subscriptsuperscript𝖠1𝐾{\mathsf{A}^{1}_{K}}. Ceci permet de définir une métrique sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} étendant la métrique sphérique de K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}.

Commençons par définir les fonctions |||\cdot| et diam:𝖠K1[0,+):diamsubscriptsuperscript𝖠1𝐾0\mathrm{diam}:{\mathsf{A}^{1}_{K}}\to[0,+\infty). Pour z0Ksubscript𝑧0𝐾z_{0}\in K on pose Pz0(z)=zz0K[z]subscript𝑃subscript𝑧0𝑧𝑧subscript𝑧0𝐾delimited-[]𝑧P_{z_{0}}(z)=z-z_{0}\in K[z]. Alors,

|𝒮|=𝒮(P0) et diam(𝒮)=infzK𝒮(Pz).𝒮𝒮subscript𝑃0 et diam𝒮subscriptinfimum𝑧𝐾𝒮subscript𝑃𝑧|{\mathcal{S}}|={\mathcal{S}}(P_{0})\ \mbox{ et }\ \mathrm{diam}({\mathcal{S}})=\inf_{z\in K}{\mathcal{S}}(P_{z})\leavevmode\nobreak\ .

Lorsque 𝒮𝒮{\mathcal{S}} est un point non singulier de 𝖠K1subscriptsuperscript𝖠1𝐾{\mathsf{A}^{1}_{K}}, on a

|𝒮|=supB𝒮|z| et diam(𝒮)=diam(B𝒮).𝒮subscriptsupremumsubscript𝐵𝒮𝑧 et diam𝒮diamsubscript𝐵𝒮|{\mathcal{S}}|=\sup_{B_{\mathcal{S}}}|z|\ \mbox{ et }\ \mathrm{diam}({\mathcal{S}})=\mathrm{diam}(B_{\mathcal{S}})\leavevmode\nobreak\ .

En particulier, la restriction de |||\cdot| à K𝐾K coïncide avec la norme de K𝐾K. La fonction |||\cdot| s’annule uniquement au point 00. Pour tout 𝒮𝖠K1𝒮subscriptsuperscript𝖠1𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathsf{A}^{1}_{K}}, on a |𝒮|diam(𝒮)𝒮diam𝒮|{\mathcal{S}}|\geq\mathrm{diam}({\mathcal{S}}) et diam(𝒮)=0diam𝒮0\mathrm{diam}({\mathcal{S}})=0 si et seulement si 𝒮K𝒮𝐾{\mathcal{S}}\in K. Enfin, la fonction |||\cdot| est continue et s’étend continûment à 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} en posant ||=+|\infty|=+\infty.

A l’aide des fonctions précédentes, on définit maintenant:

sup{𝒮,𝒮}=diam(𝒮𝒮), pour 𝒮,𝒮𝖯K1.formulae-sequencesupremum𝒮superscript𝒮diam𝒮superscript𝒮 pour 𝒮superscript𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾\sup\{{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\}=\mathrm{diam}({\mathcal{S}}\vee{\mathcal{S}}^{\prime})\leavevmode\nobreak\ ,\text{ pour }{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}}\leavevmode\nobreak\ .

Lorsque 𝒮𝒮{\mathcal{S}} et 𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}^{\prime} sont des points non singuliers de 𝖠K1subscriptsuperscript𝖠1𝐾{\mathsf{A}^{1}_{K}}, on a

sup{𝒮,𝒮}=sup{|zz|,zB𝒮,zB𝒮},\sup\{{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\}=\sup\{|z-z^{\prime}|,\,z\in B_{\mathcal{S}},z^{\prime}\in B_{{\mathcal{S}}^{\prime}}\}\leavevmode\nobreak\ ,

et en particulier pour tous z,zK𝑧superscript𝑧𝐾z,z^{\prime}\in K on a sup{z,z}=|zz|supremum𝑧superscript𝑧𝑧superscript𝑧\sup\{z,z^{\prime}\}=|z-z^{\prime}|. On vérifie aisément que

sup{,0}=|| et sup{,𝒮can}=max{1,||}.\sup\{\cdot,0\}=|\cdot|\mbox{ et }\sup\{\cdot,{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}\}=\max\{1,|\cdot|\}\leavevmode\nobreak\ .

La métrique sphérique222aussi appelée «  small model metrics   » dans [BR2] d𝖯K1subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}} sur K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} est définie, pour z,wK𝑧𝑤𝐾z,w\in K, par

d𝖯K1(z,w)=2|zw|max{1,|z|}×max{1,|w|},subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝑧𝑤2𝑧𝑤1𝑧1𝑤\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}(z,w)=\frac{2|z-w|}{\max\{1,|z|\}\times\max\{1,|w|\}}\leavevmode\nobreak\ ,

et d𝖯K1(z,)=2max{1,|z|}1\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}(z,\infty)=2\max\{1,|z|\}^{-1}. On étend naturellement cette métrique à 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} en posant, pour 𝒮,𝒮𝖠K1𝒮superscript𝒮subscriptsuperscript𝖠1𝐾{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\in{\mathsf{A}^{1}_{K}} :

d𝖯K1(𝒮,𝒮)=2sup{𝒮,𝒮}max{1,|𝒮|}×max{1,|𝒮|}diam(𝒮)max{1,|𝒮|}2diam(𝒮)max{1,|𝒮|}2,\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime})=\frac{2\sup\{{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\}}{\max\{1,|{\mathcal{S}}|\}\times\max\{1,|{\mathcal{S}}^{\prime}|\}}-\frac{\mathrm{diam}({\mathcal{S}})}{\max\{1,|{\mathcal{S}}|\}^{2}}-\frac{\mathrm{diam}({\mathcal{S}}^{\prime})}{\max\{1,|{\mathcal{S}}^{\prime}|\}^{2}}\leavevmode\nobreak\ ,

et d𝖯K1(𝒮,)=2max{1,|𝒮|}1\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},\infty)=2\max\{1,|{\mathcal{S}}|\}^{-1}. On vérifie que cette métrique est compatible avec la structure d’arbre de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} au sens que pour tous 𝒮,𝒮,𝒮′′𝖯K1𝒮superscript𝒮superscript𝒮′′subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime},{\mathcal{S}}^{\prime\prime}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}} on a d𝖯K1(𝒮,𝒮)=d𝖯K1(𝒮,𝒮′′)+d𝖯K1(𝒮′′,𝒮)subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝒮superscript𝒮subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝒮superscript𝒮′′subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscript𝒮′′superscript𝒮\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime})=\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime\prime})+\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}}^{\prime\prime},{\mathcal{S}}^{\prime}) si et seulement si 𝒮′′[𝒮,𝒮]superscript𝒮′′𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}^{\prime\prime}\in[{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}]. L’espace métrique (𝖯K1,d𝖯K1)subscriptsuperscript𝖯1𝐾subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾({\mathsf{P}^{1}_{K}},\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}) est complet, mais il n’est pas localement compact. En particulier la topologie sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} induite par cette distance ne coïncide pas avec la topologie introduite précédemment. Elle ne jouera pas de rôle dans la suite.

Introduisons maintenant quelques notations. Une boule ouverte (resp. fermée) de 𝖠K1subscriptsuperscript𝖠1𝐾{\mathsf{A}^{1}_{K}} est un ensemble de la forme {𝒮𝖯K1,sup{𝒮,a}<r}formulae-sequence𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾supremum𝒮𝑎𝑟\{{\mathcal{S}}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}},\sup\{{\mathcal{S}},a\}<r\} (resp. {𝒮𝖯K1,sup{𝒮,a}r}formulae-sequence𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾supremum𝒮𝑎𝑟\{{\mathcal{S}}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}},\sup\{{\mathcal{S}},a\}\leq r\}), où aK𝑎𝐾a\in K et r>0𝑟0r>0. On notera 𝖡(z,r)𝖡𝑧𝑟\mathsf{B}(z,r) (resp. 𝖡¯(z,r)¯𝖡𝑧𝑟\bar{\mathsf{B}}(z,r)) ces ensembles. Leurs intersections avec K𝐾K seront notées

B(z,r)=𝖡(z,r)K,B¯(z,r)=𝖡¯(z,r)K.formulae-sequence𝐵𝑧𝑟𝖡𝑧𝑟𝐾¯𝐵𝑧𝑟¯𝖡𝑧𝑟𝐾B(z,r)=\mathsf{B}(z,r)\cap K,\bar{B}(z,r)=\bar{\mathsf{B}}(z,r)\cap K.

Une boule ouverte (resp. fermée) de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} est une boule ouverte (resp. fermée) de 𝖠K1subscriptsuperscript𝖠1𝐾{\mathsf{A}^{1}_{K}} ou le complémentaire dans 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} d’une boule fermée (resp. ouverte) de 𝖠K1subscriptsuperscript𝖠1𝐾{\mathsf{A}^{1}_{K}}. Il est facile de voir que toute boule de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} est connexe.

Un affinoïde (resp. ouvert fondamental) est une réunion finie d’intersections finies (non vides) de boules fermés (resp. ouvertes). Un ouvert fondamental U𝑈U possède un nombre fini de points dans son bord. Notons enfin que les boules ouvertes (resp. les ouverts fondamentaux) de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} forment une sous-base (resp. base) de la topologie de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}.

L’espace hyperbolique Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}

Rappelons que K=𝖯K1K1subscript𝐾subscriptsuperscript𝖯1𝐾subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{H}_{K}}={\mathsf{P}^{1}_{K}}\setminus{\mathbb{P}^{1}_{K}}. C’est un ensemble connexe, donc un sous-arbre de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}. La fonction333aussi appelée «  big model metrics   »dans [BR2] dKsubscriptdsubscript𝐾\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}} définie par

dK(𝒮,𝒮)=2logsup{𝒮,𝒮}logdiam(𝒮)logdiam(𝒮),subscriptdsubscript𝐾𝒮superscript𝒮2supremum𝒮superscript𝒮diam𝒮diamsuperscript𝒮\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}({\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime})=2\log\sup\{{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\}-\log\mathrm{diam}({\mathcal{S}})-\log\mathrm{diam}({\mathcal{S}}^{\prime})\leavevmode\nobreak\ ,

est une distance sur Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}. Lorsque 𝒮𝒮𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}\leq{\mathcal{S}}^{\prime} on a dK(𝒮,𝒮)=log(diam(𝒮)/diam(𝒮))subscriptdsubscript𝐾𝒮superscript𝒮diamsuperscript𝒮diam𝒮\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}({\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime})=\log\left(\mathrm{diam}({\mathcal{S}}^{\prime})/\mathrm{diam}({\mathcal{S}})\right). L’espace métrique (K,dK)subscript𝐾subscriptdsubscript𝐾({\mathbb{H}_{K}},\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}) est complet et la métrique est à nouveau compatible avec la structure d’arbre de Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}. Notons de plus que dKsubscriptdsubscript𝐾\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}} est invariante par l’action du groupe PGL(2,K)PGL2𝐾\mathrm{PGL}(2,K) des automorphismes de K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}. De ce fait, on déduit que (K,dK)subscript𝐾subscriptdsubscript𝐾({\mathbb{H}_{K}},\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}) est isométrique à l’arbre réel de PGL(2,K)PGL2𝐾\mathrm{PGL}(2,K) décrit dans [Ti], voir [R3, §7.2]. Enfin pour pour chaque 𝒮K𝒮subscript𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathbb{H}_{K}} on a

dK(𝒮,𝒮can)=logd𝖯K1(𝒮,K1).subscriptdsubscript𝐾𝒮subscript𝒮cansubscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝒮subscriptsuperscript1𝐾\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}({\mathcal{S}},{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}})=-\log\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},{\mathbb{P}^{1}_{K}})\leavevmode\nobreak\ . (2.1)

Fixons un point base 𝒮0Ksubscript𝒮0subscript𝐾{\mathcal{S}}_{0}\in{\mathbb{H}_{K}}. Le produit de Gromov est la fonction

,𝒮0:𝖯K1×𝖯K1[0,+]:subscriptsubscript𝒮0subscriptsuperscript𝖯1𝐾subscriptsuperscript𝖯1𝐾0\langle\cdot\,,\cdot\rangle_{{\mathcal{S}}_{0}}:{\mathsf{P}^{1}_{K}}\times{\mathsf{P}^{1}_{K}}\to[0,+\infty]

définie comme suit. Étant donnés 𝒮,𝒮𝖯K1𝒮superscript𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}}, notons 𝒮′′superscript𝒮′′{\mathcal{S}}^{\prime\prime} l’unique point de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} qui est entre 𝒮𝒮{\mathcal{S}} et 𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}^{\prime}, entre 𝒮𝒮{\mathcal{S}} et 𝒮0subscript𝒮0{\mathcal{S}}_{0} et entre 𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}^{\prime} et 𝒮0subscript𝒮0{\mathcal{S}}_{0}. On pose alors

𝒮,𝒮𝒮0={dK(𝒮′′,𝒮0)si 𝒮′′K;+si 𝒮′′K1.subscript𝒮superscript𝒮subscript𝒮0casessubscriptdsubscript𝐾superscript𝒮′′subscript𝒮0si superscript𝒮′′subscript𝐾si superscript𝒮′′subscriptsuperscript1𝐾\langle{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\rangle_{{\mathcal{S}}_{0}}=\begin{cases}\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}({\mathcal{S}}^{\prime\prime},{\mathcal{S}}_{0})&\text{si }{\mathcal{S}}^{\prime\prime}\in{\mathbb{H}_{K}}\leavevmode\nobreak\ ;\\ +\infty&\text{si }{\mathcal{S}}^{\prime\prime}\in{\mathbb{P}^{1}_{K}}\leavevmode\nobreak\ .\end{cases}

On vérifie facilement que 𝒮,𝒮𝒮0=+subscript𝒮superscript𝒮subscript𝒮0\langle{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\rangle_{{\mathcal{S}}_{0}}=+\infty si et seulement si 𝒮=𝒮K1𝒮superscript𝒮subscriptsuperscript1𝐾{\mathcal{S}}={\mathcal{S}}^{\prime}\in{\mathbb{P}^{1}_{K}}; et que 𝒮,𝒮𝒮0=0subscript𝒮superscript𝒮subscript𝒮00\langle{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\rangle_{{\mathcal{S}}_{0}}=0 si et seulement si 𝒮0[𝒮,𝒮]subscript𝒮0𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}_{0}\in[{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}]. En particulier, pour tout 𝒮𝖯K1𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}} on a 𝒮,𝒮0𝒮0=0subscript𝒮subscript𝒮0subscript𝒮00\langle{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}_{0}\rangle_{{\mathcal{S}}_{0}}=0. En général, on a 𝒮,𝒮𝒮0dK(𝒮,𝒮0)subscript𝒮superscript𝒮subscript𝒮0subscriptdsubscript𝐾𝒮subscript𝒮0\langle{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\rangle_{{\mathcal{S}}_{0}}\leq\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}({\mathcal{S}},{\mathcal{S}}_{0}), avec égalité si et seulement si 𝒮[𝒮,𝒮0]𝒮superscript𝒮subscript𝒮0{\mathcal{S}}\in[{\mathcal{S}}^{\prime},{\mathcal{S}}_{0}].

2.2. Fractions rationnelles

Fixons une fraction rationnelle non constante R𝑅R à coefficients dans K𝐾K. On vérifie que l’image de tout ouvert fondamental est encore un ouvert fondamental. Une preuve est donnée dans [R2, Proposition 2.6].

Degré topologique

Le degré topologique degtop(R)subscriptdegtop𝑅\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R) de R𝑅R est par définition l’entier

degtop(R):=max𝒮K1#(R1(𝒮)).assignsubscriptdegtop𝑅subscript𝒮subscriptsuperscript1𝐾#superscript𝑅1𝒮\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R):=\max_{{\mathcal{S}}\in{\mathbb{P}^{1}_{K}}}\#(R^{-1}({\mathcal{S}}))\leavevmode\nobreak\ .

Lorsque la caractéristique de K𝐾K est nulle, cet entier est égal à deg(R)degree𝑅\deg(R). Lorsque la caractéristique de K𝐾K est p>1𝑝1p>1, on peut alors écrire R𝑅R de façon unique comme R(z)=Q(zq)𝑅𝑧𝑄superscript𝑧𝑞R(z)=Q(z^{q}), où Q𝑄Q est une fraction rationnelle séparable et q1𝑞1q\geq 1 est une puissance de p𝑝p. Dans ce cas on a degtop(R)=deg(Q)subscriptdegtop𝑅degree𝑄\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R)=\deg(Q). Notons que dans tous les cas degtop(R)subscriptdegtop𝑅\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R) divise deg(R)degree𝑅\deg(R).

On vérifie de plus que lorsque deg(R)>1degree𝑅1\deg(R)>1, on a degtop(R)=1subscriptdegtop𝑅1\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R)=1 si et seulement si la caractéristique de K𝐾K est p>1𝑝1p>1, et R𝑅R est conjuguée à un itéré de l’automorphisme de Frobenius, c’est-à-dire R(z)=zq𝑅𝑧superscript𝑧𝑞R(z)=z^{q} avec q𝑞q est une puissance de p𝑝p pour un choix convenable de coordonnées.

Degré local

On définit le degré local de R𝑅R en un point z0K1subscript𝑧0subscriptsuperscript1𝐾z_{0}\in{\mathbb{P}^{1}_{K}} comme suit. Quitte à faire un changement de coordonnées, on peut supposer que {z0,R(z0)}subscript𝑧0𝑅subscript𝑧0\infty\notin\{z_{0},R(z_{0})\}. Dans ce cas, on écrit R(z0+h)=R(z0)+ahk+𝒪(hk+1)𝑅subscript𝑧0𝑅subscript𝑧0𝑎superscript𝑘𝒪superscript𝑘1R(z_{0}+h)=R(z_{0})+ah^{k}+\mathcal{O}(h^{k+1}) avec a0𝑎0a\neq 0, et on pose degR(z0):=kassignsubscriptdegree𝑅subscript𝑧0𝑘\deg_{R}(z_{0}):=k. C’est un nombre entier strictement positif. On vérifie facilement que degRR=degRR×degRsubscriptdegree𝑅superscript𝑅subscriptdegree𝑅superscript𝑅subscriptdegreesuperscript𝑅\deg_{R\circ R^{\prime}}=\deg_{R}\circ R^{\prime}\times\deg_{R^{\prime}} pour tout couple R,RK(z)𝑅superscript𝑅𝐾𝑧R,R^{\prime}\in K(z), et donc que le degré local ne dépend pas des choix de coordonnées. On vérifie aussi que pour tout zK1𝑧subscriptsuperscript1𝐾z\in{\mathbb{P}^{1}_{K}} on a R(w)=zdegR(w)=deg(R)subscript𝑅𝑤𝑧subscriptdegree𝑅𝑤degree𝑅\sum_{R(w)=z}\deg_{R}(w)=\deg(R). On vérifie sans difficulté que le degré local de R𝑅R en chaque point de K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} est égal à l’entier deg(R)/degtop(R)degree𝑅subscriptdegtop𝑅\deg(R)/\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R), avec au plus un nombre fini d’exceptions.

La proposition suivante permet d’étendre la définition du degré local à 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}. Une définition géométrique est donnée en [R2, §2]. On donne ici une approche plus algébrique qui a l’avantage de se généraliser en toute dimension.

Proposition-Définition 2.1.

La fonction degré local degRsubscriptdegree𝑅\deg_{R} s’étend de manière unique en une fonction définie sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} et à valeurs dans les entiers strictement positifs, vérifiant la propriété suivante :

  • (*)

    pour tout ouvert fondamental V𝑉V, toute composante connexe U𝑈U de R1(V)superscript𝑅1𝑉R^{-1}(V) et tout 𝒮0Vsubscript𝒮0𝑉{\mathcal{S}}_{0}\in V, l’entier

    R(𝒮)=𝒮0,𝒮UdegR(𝒮),subscriptformulae-sequence𝑅𝒮subscript𝒮0𝒮𝑈subscriptdegree𝑅𝒮\sum_{R({\mathcal{S}})={\mathcal{S}}_{0},{\mathcal{S}}\in U}\deg_{R}({\mathcal{S}})\leavevmode\nobreak\ ,

    est indépendant du choix du point 𝒮0Vsubscript𝒮0𝑉{\mathcal{S}}_{0}\in V.

On en déduit facilement le résultat suivant :

Proposition 2.2.

La fonction degRsubscriptdegree𝑅\deg_{R} est semi-continue supérieurement et prend ses valeurs dans [deg(R)/degtop(R),,deg(R)]degree𝑅subscriptdegtop𝑅degree𝑅[\deg(R)/\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R),\ldots,\deg(R)]. De plus, pour tout 𝒮𝖯K1𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}} on a,

#(R1(𝒮))degtop(R), et R(𝒮)=𝒮degR(𝒮)=deg(R).formulae-sequence#superscript𝑅1𝒮subscriptdegtop𝑅 et subscript𝑅superscript𝒮𝒮subscriptdegree𝑅superscript𝒮degree𝑅\#(R^{-1}({\mathcal{S}}))\leq\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R)\leavevmode\nobreak\ ,\text{ et }\sum_{R({\mathcal{S}}^{\prime})={\mathcal{S}}}\deg_{R}({\mathcal{S}}^{\prime})=\deg(R)\leavevmode\nobreak\ . (2.2)

Enfin, pour tout couple de fractions rationnelles R,R𝑅superscript𝑅R,R^{\prime} non nulles, on a degRR=degRR×degRsubscriptdegree𝑅superscript𝑅subscriptdegree𝑅superscript𝑅subscriptdegreesuperscript𝑅\deg_{R\circ R^{\prime}}=\deg_{R}\circ R^{\prime}\times\deg_{R^{\prime}}.

Lorsque 𝒮𝒮{\mathcal{S}} est un point rationnel de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}, on peut calculer degR(𝒮)subscriptdegree𝑅𝒮\deg_{R}({\mathcal{S}}) de la manière suivante. Quitte à faire un changement de coordonnées à la source et au but, on peut supposer que 𝒮=R(𝒮)=𝒮can𝒮𝑅𝒮subscript𝒮can{\mathcal{S}}=R({\mathcal{S}})={\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}. Ce qui signifie que l’on peut écrire R=P/Q𝑅𝑃𝑄R=P/Q avec deux polynômes P,Q𝒪K[z]𝑃𝑄subscript𝒪𝐾delimited-[]𝑧P,Q\in{\mathcal{O}_{K}}[z] dont les réduction P~,Q~~𝑃~𝑄\widetilde{P},\widetilde{Q} sont non nulles, et telles que la fraction rationnelle R~:=P~/Q~assign~𝑅~𝑃~𝑄\widetilde{R}:=\widetilde{P}/\widetilde{Q} soit non constante. Le degré local en 𝒮cansubscript𝒮can{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}} est alors le degré de R~~𝑅\widetilde{R}.

Démonstration de la Proposition-Définition 2.1.

Notons tout d’abord que R1{𝒮}superscript𝑅1𝒮R^{-1}\{{\mathcal{S}}\} est un ensemble fini de cardinal dabsent𝑑\leq d pour tout 𝒮𝖯K1𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}}. Pour 𝒮K1𝒮subscriptsuperscript1𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathbb{P}^{1}_{K}}, c’est clair. Sinon 𝒮K𝒮subscript𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathbb{H}_{K}} définit une norme sur K(z)𝐾𝑧K(z), et donc sur le sous-corps RK(z):={ϕR,ϕK(z)}assignsuperscript𝑅𝐾𝑧italic-ϕ𝑅italic-ϕ𝐾𝑧R^{*}K(z):=\{\phi\circ R,\,\phi\in K(z)\} de K(z)𝐾𝑧K(z). Le corps K(z)𝐾𝑧K(z) est une extension finie de degré au plus d𝑑d de RK(z)superscript𝑅𝐾𝑧R^{*}K(z). Donc 𝒮|RK(z)evaluated-at𝒮superscript𝑅𝐾𝑧{\mathcal{S}}|_{R^{*}K(z)} admet au plus d𝑑d extensions à K(z)𝐾𝑧K(z), voir [ZS]. Ceci est exactement dire que 𝒮𝒮{\mathcal{S}} possède au plus d𝑑d préimages.

On montre maintenant facilement l’unicité de la fonction degRsubscriptdegree𝑅\deg_{R}. Soit 𝒮𝖯K1𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}} et fixons U𝑈U un ouvert fondamental contenant 𝒮𝒮{\mathcal{S}}, tel que R:UR(U):𝑅𝑈𝑅𝑈R:U\to R(U) soit propre et R1{R(𝒮)}U={𝒮}superscript𝑅1𝑅𝒮𝑈𝒮R^{-1}\{R({\mathcal{S}})\}\cap U=\{{\mathcal{S}}\}. Un tel ouvert existe toujours car R(𝒮)𝑅𝒮R({\mathcal{S}}) admet un nombre fini de préimages. On applique maintenant la relation (*) pour tout point z0R(U)K1subscript𝑧0𝑅𝑈subscriptsuperscript1𝐾z_{0}\in R(U)\cap{\mathbb{P}^{1}_{K}}, et l’on obtient degR(𝒮)=zU,R(z)=z0degR(z)subscriptdegree𝑅𝒮subscriptformulae-sequence𝑧𝑈𝑅𝑧subscript𝑧0subscriptdegree𝑅𝑧\deg_{R}({\mathcal{S}})=\sum_{z\in U,\,R(z)=z_{0}}\deg_{R}(z), ce qui détermine degRsubscriptdegree𝑅\deg_{R} de manière unique.

Pour tout z𝖯K1𝑧subscriptsuperscript𝖯1𝐾z\in{\mathsf{P}^{1}_{K}}, notons 𝒪zsubscript𝒪𝑧{\mathcal{O}}_{z} l’anneau des germes de fonctions analytiques en z𝑧z, et 𝔪zsubscript𝔪𝑧{\mathfrak{m}}_{z} l’idéal des fonctions qui s’annulent en z𝑧z. Lorsque zK1𝑧subscriptsuperscript1𝐾z\in{\mathbb{P}^{1}_{K}}, 𝒪zsubscript𝒪𝑧{\mathcal{O}}_{z} est un anneau local d’idéal maximal 𝔪zsubscript𝔪𝑧{\mathfrak{m}}_{z}; sinon 𝒪zsubscript𝒪𝑧{\mathcal{O}}_{z} est un corps et 𝔪z=(0)subscript𝔪𝑧0{\mathfrak{m}}_{z}=(0). Dans tous les cas, on note κ(z)𝜅𝑧\kappa(z) le corps 𝒪z/𝔪zsubscript𝒪𝑧subscript𝔪𝑧{\mathcal{O}}_{z}/{\mathfrak{m}}_{z}.

L’application analytique R𝑅R est finie [Ber2, 3.1.10], donc pour tout z𝖯K1𝑧subscriptsuperscript𝖯1𝐾z\in{\mathsf{P}^{1}_{K}} l’anneau 𝒪zsubscript𝒪𝑧{\mathcal{O}}_{z} est un module de type fini sur 𝒪R(z)subscript𝒪𝑅𝑧{\mathcal{O}}_{R(z)} [Ber2, 3.1.6]. On définit alors

degR(z)=dimκ(R(z))(𝒪z/𝔪R(z)𝒪z).subscriptdegree𝑅𝑧subscriptdimension𝜅𝑅𝑧subscript𝒪𝑧subscript𝔪𝑅𝑧subscript𝒪𝑧\deg_{R}(z)=\dim_{\kappa(R(z))}({\mathcal{O}}_{z}/{\mathfrak{m}}_{R(z)}{\mathcal{O}}_{z})\leavevmode\nobreak\ .

C’est le nombre minimal de générateurs de 𝒪zsubscript𝒪𝑧{\mathcal{O}}_{z} vu comme 𝒪R(z)subscript𝒪𝑅𝑧{\mathcal{O}}_{R(z)}-module [Mat, Theorem 2.3].

Pour vérifier tout d’abord que la fonction ainsi définie coïncide bien avec le degré local sur K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}, il suffit de traiter le cas où z=0=R(z)𝑧0𝑅𝑧z=0=R(z). Par un changement adéquat de coordonnées analytiques, on peut supposer R(z)=azk+O(zk+1)𝑅𝑧𝑎superscript𝑧𝑘𝑂superscript𝑧𝑘1R(z)=az^{k}+O(z^{k+1}) avec a0𝑎0a\neq 0 et k1𝑘1k\geq 1, et on veut montrer degR(0)=ksubscriptdegree𝑅0𝑘\deg_{R}(0)=k. Lorsque la caractéristique de K𝐾K ne divise pas k𝑘k, alors on peut se ramener à R(z)=zk𝑅𝑧superscript𝑧𝑘R(z)=z^{k}. Sinon la situation est plus compliquée mais dans de bonnes coordonnées, on peut toujours écrire R(z)=azk+j>kajzj𝑅𝑧𝑎superscript𝑧𝑘subscript𝑗𝑘subscript𝑎𝑗superscript𝑧𝑗R(z)=az^{k}+\sum_{j>k}a_{j}z^{j} avec |aj|0subscript𝑎𝑗0|a_{j}|\to 0, max{|a|,|aj|}=1𝑎subscript𝑎𝑗1\max\{|a|,|a_{j}|\}=1. Il faut montrer que l’anneau de série convergente K{z}𝐾𝑧K\{z\} est un module libre sur K{R(z)}𝐾𝑅𝑧K\{R(z)\} de rang k𝑘k. Pour cela, on montre qu’il est engendré par la famille libre 1,z,,zk11𝑧superscript𝑧𝑘11,z,...,z^{k-1}. Le fait que cette famille soit libre est facile. Pour conclure, il suffit de trouver des fiK{z}subscript𝑓𝑖𝐾𝑧f_{i}\in K\{z\} tels que zk=f0R++zk1fk1Rsuperscript𝑧𝑘subscript𝑓0𝑅superscript𝑧𝑘1subscript𝑓𝑘1𝑅z^{k}=f_{0}\circ R+...+z^{k-1}f_{k-1}\circ R, ce qui se fait classiquement en résolvant l’équation successivement modulo znsuperscript𝑧𝑛z^{n} avec n𝑛n croissant.

Pour vérifier (*), on remarque que sous les hypothèses de l’énoncé, l’application analytique entre courbes analytiques R:UV:𝑅𝑈𝑉R:U\to V est fermée (au sens de Berkovich) et non localement constante, et donc plate par [Ber2, 3.2.9]. On regarde maintenant le faisceau R𝒪Usubscript𝑅subscript𝒪𝑈R_{*}{\mathcal{O}}_{U}, dont la fibre en wV𝑤𝑉w\in V est donnée par (R𝒪U)wzR1(w)U𝒪zsimilar-to-or-equalssubscriptsubscript𝑅subscript𝒪𝑈𝑤subscriptdirect-sum𝑧superscript𝑅1𝑤𝑈subscript𝒪𝑧(R_{*}{\mathcal{O}}_{U})_{w}\simeq\oplus_{z\in R^{-1}(w)\cap U}{\mathcal{O}}_{z}. Comme R𝑅R est plat, (R𝒪U)wsubscriptsubscript𝑅subscript𝒪𝑈𝑤(R_{*}{\mathcal{O}}_{U})_{w} est libre sur 𝒪wsubscript𝒪𝑤{\mathcal{O}}_{w}. Or le faisceau R𝒪Usubscript𝑅subscript𝒪𝑈R_{*}{\mathcal{O}}_{U} est cohérent [BGR, 9.4.4/3][Ber2, 1.3.4], donc est lui-même localement libre. Il est en particulier de rang constant444le rang d’un faisceau {\mathcal{F}} en z𝑧z est égal à dimκ(z)z/𝔪zzsubscriptdimension𝜅𝑧subscript𝑧subscript𝔪𝑧subscript𝑧\dim_{\kappa(z)}{\mathcal{F}}_{z}/{\mathfrak{m}}_{z}{\mathcal{F}}_{z}, ce qui implique (*). ∎

Action sur les mesures positives

Rappelons que pour toute fonction f:𝖯K1𝖯K1:𝑓subscriptsuperscript𝖯1𝐾subscriptsuperscript𝖯1𝐾f:{\mathsf{P}^{1}_{K}}\to{\mathsf{P}^{1}_{K}} continue et pour toute mesure (signée) de Radon ρ𝜌\rho sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}, on définit l’image directe fρsubscript𝑓𝜌f_{*}\rho en imposant ϕd(fρ)=(ϕf)𝑑ρitalic-ϕ𝑑subscript𝑓𝜌italic-ϕ𝑓differential-d𝜌\int\phi\,d(f_{*}\rho)=\int(\phi\circ f)\,d\rho pour toute fonction mesurable. On a alors pour tout borélien E𝐸E, (fρ)(E)=ρ(f1(E))subscript𝑓𝜌𝐸𝜌superscript𝑓1𝐸(f_{*}\rho)(E)=\rho(f^{-1}(E)). Si ρ𝜌\rho est une mesure de probabilité, alors fρsubscript𝑓𝜌f_{*}\rho l’est encore.

On définit maintenant l’action d’une fraction rationnelle par image réciproque sur les mesures de Radon de manière analogue.

Définition 2.3.

Pour toute fonction mesurable ϕ:𝖯K1:italic-ϕsubscriptsuperscript𝖯1𝐾\phi:{\mathsf{P}^{1}_{K}}\to{\mathbb{R}}, on pose

(Rϕ)(𝒮):=R(𝒮)=𝒮degR(𝒮)ϕ(𝒮),assignsubscript𝑅italic-ϕ𝒮subscript𝑅superscript𝒮𝒮subscriptdegree𝑅superscript𝒮italic-ϕsuperscript𝒮(R_{*}\phi)({\mathcal{S}}):=\sum_{R({\mathcal{S}}^{\prime})={\mathcal{S}}}\deg_{R}({\mathcal{S}}^{\prime})\phi({\mathcal{S}}^{\prime})\leavevmode\nobreak\ , (2.3)
Proposition 2.4.

Si ϕ:𝖯K1:italic-ϕsubscriptsuperscript𝖯1𝐾\phi:{\mathsf{P}^{1}_{K}}\to{\mathbb{R}} est continue, alors Rϕsubscript𝑅italic-ϕR_{*}\phi l’est aussi, et Rsubscript𝑅R_{*} définit un opérateur linéaire sur l’espace des fonctions continues, vérifiant sup|Rϕ|deg(R)×sup|ϕ|supremumsubscript𝑅italic-ϕdegree𝑅supremumitalic-ϕ\sup|R_{*}\phi|\leq\deg(R)\times\sup|\phi|.

Cet opérateur induit donc par dualité une action sur les mesures de Radon, notée Rsuperscript𝑅R^{*}, telle que pour toute fonction continue ϕ:𝖯K1:italic-ϕsubscriptsuperscript𝖯1𝐾\phi:{\mathsf{P}^{1}_{K}}\to{\mathbb{R}} et toute mesure ρ𝜌\rho définie sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}, on ait ϕd(Rρ)=(Rϕ)𝑑ρitalic-ϕ𝑑superscript𝑅𝜌subscript𝑅italic-ϕdifferential-d𝜌\int\phi\,d(R^{*}\rho)=\int(R_{*}\phi)\,d\rho.

Démonstration.

Il suffit de montrer la première assertion. Fixons ε>0𝜀0\varepsilon>0, et 𝒮𝖯K1subscript𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathcal{S}}_{*}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}}. Pour chaque 𝒮R1(S)𝒮superscript𝑅1subscript𝑆{\mathcal{S}}\in R^{-1}(S_{*}) choisissons un voisinage U𝒮subscript𝑈𝒮U_{{\mathcal{S}}} de 𝒮𝒮{\mathcal{S}} tel que supU𝒮|ϕϕ(𝒮)|εsubscriptsupremumsubscript𝑈𝒮italic-ϕitalic-ϕ𝒮𝜀\sup_{U_{\mathcal{S}}}|\phi-\phi({\mathcal{S}})|\leq\varepsilon. Choisissons de plus un voisinage Usubscript𝑈U_{*} de 𝒮subscript𝒮{\mathcal{S}}_{*} tel que R1(U)𝒮R1(U)U𝒮superscript𝑅1subscript𝑈subscript𝒮superscript𝑅1subscript𝑈subscript𝑈𝒮R^{-1}(U_{*})\subset\bigcup_{{\mathcal{S}}\in R^{-1}(U_{*})}U_{\mathcal{S}} et l’application restreinte R:U𝒮U:𝑅subscript𝑈𝒮subscript𝑈R:U_{\mathcal{S}}\to U_{*} est de degré degR(𝒮)subscriptdegree𝑅𝒮\deg_{R}({\mathcal{S}}). On obtient alors

supU|RϕRϕ(𝒮)|𝒮R1{𝒮}degR(𝒮)×εdeg(R)×ε.subscriptsupremumsubscript𝑈subscript𝑅italic-ϕsubscript𝑅italic-ϕsubscript𝒮subscript𝒮superscriptsubscript𝑅1subscript𝒮subscriptdegree𝑅𝒮𝜀degree𝑅𝜀\sup_{U_{*}}|R_{*}\phi-R_{*}\phi({\mathcal{S}}_{*})|\leq\sum_{{\mathcal{S}}\in R_{*}^{-1}\{{\mathcal{S}}_{*}\}}\deg_{R}({\mathcal{S}})\times\varepsilon\leq\deg(R)\times\varepsilon\leavevmode\nobreak\ .

Indiquons sans preuve quelques propriétés de ces actions:

Proposition 2.5.

Pour toute fraction rationnelle et pour toute mesure de Radon, on a RRρ=dρsubscript𝑅superscript𝑅𝜌𝑑𝜌R_{*}R^{*}\rho=d\rho. Pour tout couple de fractions rationnelles R1,R2subscript𝑅1subscript𝑅2R_{1},R_{2}, on a: (R1R2)=(R1)(R2)subscriptsubscript𝑅1subscript𝑅2subscriptsubscript𝑅1subscriptsubscript𝑅2(R_{1}\circ R_{2})_{*}=(R_{1})_{*}\circ(R_{2})_{*}, et (R1R2)=(R2)(R1)superscriptsubscript𝑅1subscript𝑅2superscriptsubscript𝑅2superscriptsubscript𝑅1(R_{1}\circ R_{2})^{*}=(R_{2})^{*}\circ(R_{1})^{*}.

Proposition 2.6.

Si ρ𝜌\rho est une mesure de probabilité, alors Rρsuperscript𝑅𝜌R^{*}\rho est une mesure positive de masse deg(R)degree𝑅\deg(R) dont le support topologique est égal à la préimage par R𝑅R du support topologique de ρ𝜌\rho. Enfin, pour tout 𝒮𝖯K1𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}} on a

(Rρ){𝒮}=degR(𝒮)×ρ{R(𝒮)}.superscript𝑅𝜌𝒮subscriptdegree𝑅𝒮𝜌𝑅𝒮(R^{*}\rho)\{{\mathcal{S}}\}=\deg_{R}({\mathcal{S}})\times\rho\{R({\mathcal{S}})\}\leavevmode\nobreak\ .
Démonstration.

Il est clair que Rsuperscript𝑅R^{*} préserve la positivité des mesures. L’image de la fonction constante égale à 111 par Rsubscript𝑅R_{*} est la fonction constante égale à deg(R)degree𝑅\deg(R) par (2.2). Donc la masse des mesures est multipliée par deg(R)degree𝑅\deg(R) sous l’action de Rsuperscript𝑅R^{*}. Le fait que pour une mesure ρ𝜌\rho le support topologique de Rρsuperscript𝑅𝜌R^{*}\rho soit la préimage par R𝑅R du support topologique de ρ𝜌\rho, est une conséquence immédiate du fait que pour chaque fonction continue positive ϕ:𝖯K1:italic-ϕsubscriptsuperscript𝖯1𝐾\phi:{\mathsf{P}^{1}_{K}}\to{\mathbb{R}} le support de la fonction Rϕsubscript𝑅italic-ϕR_{*}\phi est égal à l’image par R𝑅R du support de ϕitalic-ϕ\phi.

Pour montrer la dernière égalité, soient ε>0𝜀0\varepsilon>0 un réel positif et Vsuperscript𝑉V^{\prime} un ouvert fondamental contenant R(𝒮)𝑅𝒮R({\mathcal{S}}) tel que |ρ{R(𝒮)}ρ(V)|ε𝜌𝑅𝒮𝜌superscript𝑉𝜀|\rho\{R({\mathcal{S}})\}-\rho(V^{\prime})|\leq\varepsilon, et tel que la composante connexe V𝑉V de R1(V)superscript𝑅1superscript𝑉R^{-1}(V^{\prime}) contenant 𝒮𝒮{\mathcal{S}} vérifie |(Rρ){𝒮}(Rρ)(V)|εsuperscript𝑅𝜌𝒮superscript𝑅𝜌𝑉𝜀|(R^{*}\rho)\{{\mathcal{S}}\}-(R^{*}\rho)(V)|\leq\varepsilon et R1{R(𝒮)}V={𝒮}superscript𝑅1𝑅𝒮𝑉𝒮R^{-1}\{R({\mathcal{S}})\}\cap V=\{{\mathcal{S}}\}. En particulier, pour tout 𝒮0Vsuperscriptsubscript𝒮0superscript𝑉{\mathcal{S}}_{0}^{\prime}\in V^{\prime} on a 𝒮0R1(𝒮0)Vdeg(𝒮0)=degR(𝒮)subscriptsubscript𝒮0superscript𝑅1superscriptsubscript𝒮0𝑉degreesubscript𝒮0subscriptdegree𝑅𝒮\sum_{{\mathcal{S}}_{0}\in R^{-1}({\mathcal{S}}_{0}^{\prime})\cap V}\deg({\mathcal{S}}_{0})=\deg_{R}({\mathcal{S}}) (Proposition-Définition 2.1).

Comme 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} est un espace normal, il existe une fonction continue ϕitalic-ϕ\phi à valeurs dans [0,1]delimited-[]0.1[0,1] supportée dans V𝑉V et telle que ϕ(𝒮)=1italic-ϕ𝒮1\phi({\mathcal{S}})=1. Alors la fonction Rϕsubscript𝑅italic-ϕR_{*}\phi est à valeurs dans [0,degR(𝒮)]0subscriptdegree𝑅𝒮[0,\deg_{R}({\mathcal{S}})], étant nulle en dehors de Vsuperscript𝑉V^{\prime} et égale à degR(𝒮)subscriptdegree𝑅𝒮\deg_{R}({\mathcal{S}}) en R(𝒮)𝑅𝒮R({\mathcal{S}}). on a donc

|degR(𝒮)ρ{R(𝒮)}(Rϕ)𝑑ρ|degR(𝒮)×ε, et |(Rρ){𝒮}ϕd(Rρ)|ε.formulae-sequencesubscriptdegree𝑅𝒮𝜌𝑅𝒮subscript𝑅italic-ϕdifferential-d𝜌subscriptdegree𝑅𝒮𝜀 et superscript𝑅𝜌𝒮italic-ϕ𝑑superscript𝑅𝜌𝜀|\deg_{R}({\mathcal{S}})\,\rho\{R({\mathcal{S}})\}-\int(R_{*}\phi)\,d\rho|\leq\deg_{R}({\mathcal{S}})\times\varepsilon\leavevmode\nobreak\ ,\text{ et }|(R^{*}\rho)\{{\mathcal{S}}\}-\int\phi\,d(R^{*}\rho)|\leq\varepsilon\leavevmode\nobreak\ .

On tire alors de l’égalité (Rϕ)𝑑ρ=ϕd(Rρ)subscript𝑅italic-ϕdifferential-d𝜌italic-ϕ𝑑superscript𝑅𝜌\int(R_{*}\phi)\,d\rho=\int\phi\,d(R^{*}\rho), que

|(Rρ){𝒮}degR(𝒮)ρ{R(𝒮)}|(degR(𝒮)+1)×ε.superscript𝑅𝜌𝒮subscriptdegree𝑅𝒮𝜌𝑅𝒮subscriptdegree𝑅𝒮1𝜀|(R^{*}\rho)\{{\mathcal{S}}\}-\deg_{R}({\mathcal{S}})\,\rho\{R({\mathcal{S}})\}|\leq(\deg_{R}({\mathcal{S}})+1)\times\varepsilon.

On conclut en faisant ε0𝜀0\varepsilon\to 0. ∎

2.3. Théorie de Fatou et Julia

Fixons une fraction rationnelle R𝑅R à coefficients dans K𝐾K et de degré au moins 2. Dans le cas complexe, il est plus commode de définir en premier lieu l’ensemble de Fatou à l’aide de propriétés d’équicontinuité. Dans le cas non archimédien il est plus convenable de procéder de manière légèrement différente. On va donc tout d’abord rappeler quelques faits concernant les points exceptionnels.

Définition 2.7.

Soit RK(z)𝑅𝐾𝑧R\in K(z) une fraction rationnelle de degré au moins 2. Un point zK1𝑧subscriptsuperscript1𝐾z\in{\mathbb{P}^{1}_{K}} est dit exceptionnel si l’ensemble n0Rn{z}subscript𝑛0superscript𝑅𝑛𝑧\bigcup_{n\geq 0}R^{-n}\{z\} est fini. On note ERK1subscript𝐸𝑅subscriptsuperscript1𝐾E_{R}\subset{\mathbb{P}^{1}_{K}} l’ensemble des points exceptionnels.

Lorsque degtop(R)=1subscriptdegtop𝑅1\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R)=1 la caractéristique de K𝐾K est strictement positive et R𝑅R est conjuguée à un itéré de l’automorphisme de Frobenius. L’ensemble exceptionnel est alors infini dénombrable et, après un changement de coordonnées convenable, il est égal à 1(K¯)superscript1¯𝐾\mathbb{P}^{1}(\bar{K})K¯¯𝐾\bar{K} est la fermeture algébrique dans K𝐾K du corps premier de K𝐾K.

Lorsque degtop(R)>1subscriptdegtop𝑅1\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R)>1 on montre que l’ensemble exceptionnel contient au plus deux éléments. Dans le cas où il contient deux points, R𝑅R est conjuguée à z±deg(R)K(z)superscript𝑧plus-or-minusdegree𝑅𝐾𝑧z^{\pm\deg(R)}\in K(z). Dans le cas où l’ensemble exceptionnel contient un seul élément, la fraction rationnelle R𝑅R est un polynôme dans toute coordonnée telle que \infty est l’unique point exceptionnel de R𝑅R.

Définition 2.8.

Soit RK(z)𝑅𝐾𝑧R\in K(z) une fraction rationnelle de degré au moins 2. L’ensemble de Julia de R𝑅R, noté JRsubscript𝐽𝑅J_{R}, est l’ensemble des points 𝒮𝖯K1𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}} tels que pour tout voisinage U𝑈U de 𝒮𝒮{\mathcal{S}} contenu dans 𝖯K1ERsubscriptsuperscript𝖯1𝐾subscript𝐸𝑅{\mathsf{P}^{1}_{K}}\setminus E_{R}, on a n0Rn(U)=𝖯K1ERsubscript𝑛0superscript𝑅𝑛𝑈subscriptsuperscript𝖯1𝐾subscript𝐸𝑅\bigcup_{n\geq 0}R^{n}(U)={\mathsf{P}^{1}_{K}}\setminus E_{R}. Le complémentaire de l’ensemble de Julia est l’ensemble de Fatou, noté FRsubscript𝐹𝑅F_{R}.

Rappelons qu’un ensemble J𝐽J est dit totalement invariant si R1(J)Jsuperscript𝑅1𝐽𝐽R^{-1}(J)\subset J. Les propriétés suivantes sont démontrées dans [R7].

Proposition 2.9.

L’ensemble de Julia JRsubscript𝐽𝑅J_{R} est compact, non vide, totalement invariant, et pour tout n1𝑛1n\geq 1 on a JRn=JRsubscript𝐽superscript𝑅𝑛subscript𝐽𝑅J_{R^{n}}=J_{R}. De plus JRsubscript𝐽𝑅J_{R} est caractérisé comme le plus petit sous-ensemble compact non vide de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} qui est disjoint de l’ensemble exceptionnel de R𝑅R et qui est totalement invariant par R𝑅R. De même, FRsubscript𝐹𝑅F_{R} est un ouvert totalement invariant dont l’intersection avec K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} est non vide.

Bonne réduction

Un exemple important d’applications rationnelles a été mis en exergue par Morton et Silverman [MS].

Définition 2.10.

Une fraction rationnelle RK(z)𝑅𝐾𝑧R\in K(z) est dite avoir bonne réduction, si on peut l’écrire R=P/Q𝑅𝑃𝑄R=P/Q avec deux polynômes P,Q𝒪K[z]𝑃𝑄subscript𝒪𝐾delimited-[]𝑧P,Q\in{\mathcal{O}}_{K}[z], dont les réductions P~,Q~K~[ζ]~𝑃~𝑄~𝐾delimited-[]𝜁\widetilde{P},\widetilde{Q}\in\widetilde{K}[\zeta] sont non nulles et telles que R~:=P~/Q~K~(ζ)assign~𝑅~𝑃~𝑄~𝐾𝜁\widetilde{R}:=\widetilde{P}/\widetilde{Q}\in\widetilde{K}(\zeta) ait même degré que R𝑅R.

On montre alors la proposition suivante.

Proposition 2.11 ([R4], Théorème 4).

Si R𝑅R a bonne réduction, le point 𝒮canK|K|subscript𝒮cansubscriptsuperscriptsuperscript𝐾𝐾{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}\in{\mathbb{H}^{|K^{*}|}_{K}} est totalement invariant, et JR={𝒮can}subscript𝐽𝑅subscript𝒮canJ_{R}=\{{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}\}.

Réciproquement, si 𝒮K𝒮subscript𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathbb{H}_{K}} est tel que l’ensemble n0Rn(𝒮)subscript𝑛0superscript𝑅𝑛𝒮\bigcup_{n\geq 0}R^{-n}({\mathcal{S}}) est fini, alors 𝒮K|K|𝒮subscriptsuperscriptsuperscript𝐾𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathbb{H}^{|K^{*}|}_{K}} et ce point est totalement invariant. En conjuguant R𝑅R par un automorphisme de Möbius adéquat, on peut de plus supposer que 𝒮=𝒮can𝒮subscript𝒮can{\mathcal{S}}={\mathcal{S}_{\mathrm{can}}} et dans ce cas R𝑅R a bonne réduction.

On utilisera le lemme suivant dans la preuve du Théorème E.

Lemme 2.12.

Pour une fraction rationnelle R𝑅R de degré au moins deux, il y a deux cas : soit R𝑅R est conjuguée à une fraction rationnelle ayant bonne réduction, soit il existe un entier positif n𝑛n tel que pour tout 𝒮JR𝒮subscript𝐽𝑅{\mathcal{S}}\in J_{R} on ait

degRn(𝒮)<deg(R)n.\deg_{R^{n}}({\mathcal{S}})<\deg(R)^{n}\leavevmode\nobreak\ .
Démonstration.

Si l’ensemble exceptionnel possède au moins deux points, alors R𝑅R est conjuguée à une fraction rationnelle ayant bonne réduction. Lorsque l’ensemble exceptionnel possède un unique élément, après un changement de coordonnées on se ramène au cas où R𝑅R est un polynôme de la forme

R(z)=ρ(zD+aD1zD1++a0),𝑅𝑧𝜌superscript𝑧𝐷subscript𝑎𝐷1superscript𝑧𝐷1subscript𝑎0R(z)=\rho(z^{D}+a_{D-1}z^{D-1}+\ldots+a_{0})\leavevmode\nobreak\ ,

avec |ρ|1𝜌1|\rho|\geq 1, D2𝐷2D\geq 2, max{|aj|,j{0,,D1}}=1subscript𝑎𝑗𝑗0𝐷11\max\{|a_{j}|,\,j\in\{0,\ldots,D-1\}\}=1, voir [R1, Proposition 6.7]. Lorsque |ρ|=1𝜌1|\rho|=1 la fraction rationnelle R𝑅R a bonne réduction, et lorsque |ρ|>1𝜌1|\rho|>1 on vérifie que JRsubscript𝐽𝑅J_{R} est contenu dans la réunion des boules ouvertes de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} associées aux classes résiduelles des zéros du polynôme ζD+a~D1ζD1++a~0K~[ζ]superscript𝜁𝐷subscript~𝑎𝐷1superscript𝜁𝐷1subscript~𝑎0~𝐾delimited-[]𝜁\zeta^{D}+\widetilde{a}_{D-1}\zeta^{D-1}+\ldots+\widetilde{a}_{0}\in\widetilde{K}[\zeta], et qu’on a degR<deg(R)subscriptdegree𝑅degree𝑅\deg_{R}<\deg(R) sur cet ensemble. L’assertion du lemme est alors vérifiée avec n=1𝑛1n=1 dans ce cas.

Supposons maintenant que l’ensemble exceptionnel de R𝑅R est vide. Il suffit de montrer alors que si pour chaque j1𝑗1j\geq 1 l’ensemble

Fj:={𝒮𝖯K1,degRj(𝒮)=deg(R)j},F_{j}:=\{{\mathcal{S}}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}},\,\deg_{R^{j}}({\mathcal{S}})=\deg(R)^{j}\}\leavevmode\nobreak\ ,

est non vide, alors R𝑅R est conjuguée à une fraction rationnelle ayant bonne réduction. Notons que Fj=F1R(F1)Rj1(F1)subscript𝐹𝑗subscript𝐹1𝑅subscript𝐹1superscript𝑅𝑗1subscript𝐹1F_{j}=F_{1}\cap R(F_{1})\cap\cdots\cap R^{j-1}(F_{1}), et que Fjsubscript𝐹𝑗F_{j} est compact et décroissant avec j𝑗j. Il découle de la démonstration de [R3, Lemme 7.4] que Fjsubscript𝐹𝑗F_{j} est connexe lorsqu’il est non vide. Par conséquent, si pour tout j1𝑗1j\geq 1 l’ensemble Fjsubscript𝐹𝑗F_{j} est non vide, alors l’ensemble

F:=j1Fj,assign𝐹subscript𝑗1subscript𝐹𝑗F:=\bigcap_{j\geq 1}F_{j}\leavevmode\nobreak\ ,

est compact, non vide et connexe. De plus il est invariant par R𝑅R. Par conséquent R𝑅R possède un point fixe 𝒮𝒮{\mathcal{S}} dans F𝐹F, voir [FJ] ou la «  propriété de point fixe  » dans [R5]. Comme par hypothèse l’ensemble exceptionnel est vide, on a 𝒮K𝒮subscript𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathbb{H}_{K}} et la Proposition 2.11 implique que R𝑅R est conjuguée à une fraction rationnelle ayant bonne réduction. ∎

Dynamique sur l’ensemble de Fatou

Comme dans le cas complexe, la dynamique dans l’ensemble de Fatou est très régulière. On en donne ici une très brève description, et on renvoie à  [R1, R2, R5, R7] pour plus de détails. Rappelons tout d’abord quelques définitions. Fixons une fraction rationnelle RK(z)𝑅𝐾𝑧R\in K(z) de degré au moins deux.

Définition 2.13.

Un point z0K1subscript𝑧0subscriptsuperscript1𝐾z_{0}\in{\mathbb{P}^{1}_{K}} fixé par R𝑅R est dit attractif (resp. répulsif, ou indifférent) si localement R(z0+h)=z0+λh+𝒪(h2)𝑅subscript𝑧0subscript𝑧0𝜆𝒪superscript2R(z_{0}+h)=z_{0}+\lambda h+\mathcal{O}(h^{2}) avec |λ|<1𝜆1|\lambda|<1 (resp. |λ|>1𝜆1|\lambda|>1, ou |λ|=1𝜆1|\lambda|=1). Un point 𝒮K𝒮subscript𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathbb{H}_{K}} fixé par R𝑅R est dit répulsif si degR(𝒮)2subscriptdegree𝑅𝒮2\deg_{R}({\mathcal{S}})\geq 2. Sinon il est dit indifférent.

On définit de même la nature d’un point périodique de période N𝑁N, c’est la nature de ce point vu comme point fixe de RNsuperscript𝑅𝑁R^{N}.

Il est facile de voir que tout point périodique attractif et que tout point périodique indifférent dans K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} appartient à l’ensemble de Fatou. Par contre, un point fixe 𝒮K𝒮subscript𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathbb{H}_{K}} indifférent peut être dans l’ensemble de Fatou ou dans l’ensemble de Julia. D’autre part, tout point périodique répulsif (dans K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} ou dans Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}) est dans l’ensemble de Julia, voir [R5, Proposition 5.1] ou [R7].

L’image par R𝑅R d’une composante connexe de l’ensemble de Fatou est aussi une composante connexe de l’ensemble de Fatou. La fraction rationnelle induit alors une action sur les composantes connexes de l’ensemble de Fatou. On dira qu’une composante connexe de l’ensemble de Fatou est errante si son orbite sous cette action est infinie, et on dira qu’elle est prépériodique si son orbite est finie.

Le bassin d’attraction d’un point périodique 𝒮0subscript𝒮0{\mathcal{S}}_{0} de période n1𝑛1n\geq 1, est par définition l’ensemble des points dans 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} qui convergent vers 𝒮0subscript𝒮0{\mathcal{S}}_{0} sous l’action de Rnsuperscript𝑅𝑛R^{n}. Lorsque 𝒮0subscript𝒮0{\mathcal{S}}_{0} est attractif, cet ensemble est ouvert et contient 𝒮0subscript𝒮0{\mathcal{S}}_{0} dans son intérieur. Dans ce cas la composante connexe du bassin d’attraction contenant 𝒮0subscript𝒮0{\mathcal{S}}_{0} sera appelée bassin d’attraction immédiat.

Le domaine de quasi-périodicité Rsubscript𝑅{\mathcal{E}}_{R} de R𝑅R est l’ensemble des points dans 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} possédant un voisinage sur lequel une sous-suite des itérées de R𝑅R converge uniformément vers l’identité. Par définition l’ensemble Rsubscript𝑅{\mathcal{E}}_{R} est ouvert et invariant par R𝑅R. De plus on montre qu’il est contenu dans l’ensemble de Fatou.

Nous aurons besoin du résultat suivant dans la démonstration du Théorème B.

Lemme 2.14.

Si la caractéristique résiduelle de K𝐾K est nulle, alors l’ensemble de quasi-périodicité d’une fraction rationnelle R𝑅R de degré au moins deux est vide.

Démonstration.

Supposons par contradiction que le domaine de quasi-périodicité ne soit pas vide. Aprés un changement de coordonée on se ramène au cas où il existe une suite d’itérés de R𝑅R qui convergent uniformément vers l’identitié sur 𝒪Ksubscript𝒪𝐾{\mathcal{O}}_{K}. Il existe alors une suite strictement croissante d’entiers {nj}j0subscriptsubscript𝑛𝑗𝑗0\{n_{j}\}_{j\geq 0} telle que pour tout j0𝑗0j\geq 0,

sup{|Rnj(z)z|,z𝒪K}<1.supremumsuperscript𝑅subscript𝑛𝑗𝑧𝑧𝑧subscript𝒪𝐾1\sup\{|R^{n_{j}}(z)-z|,z\in{\mathcal{O}}_{K}\}<1.

Notons en particulier que Rnjsuperscript𝑅subscript𝑛𝑗R^{n_{j}} induit une bijection de 𝒪Ksubscript𝒪𝐾{\mathcal{O}}_{K}. Par conséquent, pour chaque j,j0𝑗superscript𝑗0j,j^{\prime}\geq 0, on a

sup{|Rnj+nj(z)z|,z𝒪K}max{sup{|Rnj(z)z|,z𝒪K},sup{|Rnj(z)z|,z𝒪K}}.supremumsuperscript𝑅subscript𝑛superscript𝑗subscript𝑛𝑗𝑧𝑧𝑧subscript𝒪𝐾supremumsuperscript𝑅subscript𝑛𝑗𝑧𝑧𝑧subscript𝒪𝐾supremumsuperscript𝑅subscript𝑛superscript𝑗𝑧𝑧𝑧subscript𝒪𝐾\sup\{|R^{n_{j^{\prime}}+n_{j}}(z)-z|,z\in{\mathcal{O}}_{K}\}\leq\\ \max\{\sup\{|R^{n_{j}}(z)-z|,z\in{\mathcal{O}}_{K}\},\sup\{|R^{n_{j^{\prime}}}(z)-z|,z\in{\mathcal{O}}_{K}\}\}.

On conclut qu’il existe une suite d’itérés de Rn0superscript𝑅subscript𝑛0R^{n_{0}} qui converge uniformément vers l’identité sur 𝒪Ksubscript𝒪𝐾{\mathcal{O}}_{K}.

Comme le degré de Rn0superscript𝑅subscript𝑛0R^{n_{0}} est au moins deux, il existe une classe résiduelle ne contenant aucun point fixe de Rn0superscript𝑅subscript𝑛0R^{n_{0}}. Aprés un changement de coordonnée fixant 𝒪Ksubscript𝒪𝐾{\mathcal{O}}_{K}, on se ramène au cas où 𝔪Ksubscript𝔪𝐾{\mathfrak{m}_{K}} ne contient aucun point fixe de Rn0superscript𝑅subscript𝑛0R^{n_{0}}. Soit T𝑇T la fraction rationnelle donnée par T(z)=Rn0(z)z𝑇𝑧superscript𝑅subscript𝑛0𝑧𝑧T(z)=R^{n_{0}}(z)-z. Alors T𝑇T ne s’annule pas sur 𝔪Ksubscript𝔪𝐾{\mathfrak{m}_{K}}, et satisfait sup{|T(z)|,z𝔪K}<1supremum𝑇𝑧𝑧subscript𝔪𝐾1\sup\{|T(z)|,z\in{\mathfrak{m}_{K}}\}<1. Par conséquent il existe a𝔪K𝑎subscript𝔪𝐾a\in{\mathfrak{m}_{K}} tel que pour chaque z𝔪K𝑧subscript𝔪𝐾z\in{\mathfrak{m}_{K}} on a

T(z){wK,|T(w)a|<|a|}.𝑇𝑧formulae-sequence𝑤𝐾𝑇𝑤𝑎𝑎T(z)\in\{w\in K,|T(w)-a|<|a|\}.

Ceci implique que pour tout entier n1𝑛1n\geq 1 et tout z𝔪K𝑧subscript𝔪𝐾z\in{\mathfrak{m}_{K}} on a

|Rnn0(z)zna|=|T(z)+T(Rn0(z))++T(R(n1)n0(z))na|<|a|.superscript𝑅𝑛subscript𝑛0𝑧𝑧𝑛𝑎𝑇𝑧𝑇superscript𝑅subscript𝑛0𝑧𝑇superscript𝑅𝑛1subscript𝑛0𝑧𝑛𝑎𝑎|R^{nn_{0}}(z)-z-na|=|T(z)+T(R^{n_{0}}(z))+\cdots+T(R^{(n-1)n_{0}}(z))-na|<|a|.

Comme par hypothèse la caractéristique résiduelle de K𝐾K est nulle, on a |n|=1𝑛1|n|=1 et donc |Rnn0(z)z|=|a|superscript𝑅𝑛subscript𝑛0𝑧𝑧𝑎|R^{nn_{0}}(z)-z|=|a|. On obtient alors une contradiction avec le fait qu’une suite d’itérés de Rn0superscript𝑅subscript𝑛0R^{n_{0}} converge vers l’identité sur 𝔪Ksubscript𝔪𝐾{\mathfrak{m}_{K}}. ∎

Lorsque K=p𝐾subscript𝑝K={\mathbb{C}}_{p} le résultat suivant est exactement [R2, Proposition 5.6]. La démonstration donnée dans op.cit. s’applique sans changement dans ce cadre plus général.

Théorème 2.15.

Soit K𝐾K un corps de caractéristique zéro et de caractéristique résiduelle p>0𝑝0p>0, et soit R𝑅R une fraction rationnelle à coefficients dans K𝐾K de degré au moins deux. Alors pour chaque composante connexe Y𝑌Y de Rsubscript𝑅{\mathcal{E}}_{R} il existe un entier positif n𝑛n tel que Rn(Y)=Ysuperscript𝑅𝑛𝑌𝑌R^{n}(Y)=Y ainsi qu’une action continue

T:p×Y:𝑇subscript𝑝𝑌\displaystyle T:{\mathbb{Z}}_{p}\times Y \displaystyle\to Y𝑌\displaystyle Y (2.4)
(w,y)𝑤𝑦\displaystyle(w,y) maps-to\displaystyle\mapsto Tw(y),superscript𝑇𝑤𝑦\displaystyle T^{w}(y)\leavevmode\nobreak\ , (2.5)

telle que pour chaque entier positif m𝑚m on ait Tm=Rnmsuperscript𝑇𝑚superscript𝑅𝑛𝑚T^{m}=R^{nm}. Si de plus Y𝑌\infty\not\in Y, alors il existe une fonction holomorphe non constante T:YK:subscript𝑇𝑌𝐾T_{*}:Y\to K telle que pour tout w0psubscript𝑤0subscript𝑝w_{0}\in{\mathbb{Z}}_{p} la fonction holomorphe TwTw0ww0superscript𝑇𝑤superscript𝑇subscript𝑤0𝑤subscript𝑤0\frac{T^{w}-T^{w_{0}}}{w-w_{0}} converge vers Tsubscript𝑇T_{*} lorsque wp{w0}𝑤subscript𝑝subscript𝑤0w\in{\mathbb{Z}}_{p}\setminus\{w_{0}\} converge vers w0subscript𝑤0w_{0}.

Nous utiliserons la proposition suivante dans la démonstration du Théorème C.

Proposition 2.16.

Soit R𝑅R une fraction rationnelle à coefficients dans K𝐾K et de degré au moins deux, et U𝑈U une composante composante connexe de l’ensemble de Fatou U𝑈U fixée par R𝑅R. Si U𝑈U n’est pas un bassin d’attraction immédiat d’un point périodique attractif, alors R𝑅R est injective sur U𝑈U.

Lorsque K=p𝐾subscript𝑝K={\mathbb{C}}_{p} ce résultat est une conséquence immédiate du «  théorème de classification  » dans [R2]. Pour un corps de base K𝐾K quelconque, ce résultat est démontré dans l’article en préparation [R7]. En voici une esquisse de démonstration.

Esquisse de démonstration.

Si U𝑈U n’est pas un bassin d’attraction immédiat d’un point périodique attractif, la «  propriété de point fixe   » [R5, §8] implique que U𝑈U contient un point fixe indifférent 𝒮𝒮{\mathcal{S}}. On regarde alors l’ouvert connexe maximal Usuperscript𝑈U^{\prime} contenant 𝒮𝒮{\mathcal{S}} sur lequel le degré local est constant égal à 111. On montre que Usuperscript𝑈U^{\prime} est un ouvert fondamental en suivant [R3, Proposition 2.9]. On peut alors adapter [R3, Lemme 5.5] pour voir qu’il existe un ouvert fondamental U′′superscript𝑈′′U^{\prime\prime} contenant 𝒮𝒮{\mathcal{S}} et contenu dans Usuperscript𝑈U^{\prime} dont les points du bord sont périodiques répulsifs. Ceci implique l’invariance de U′′superscript𝑈′′U^{\prime\prime}, et donc le fait que U′′superscript𝑈′′U^{\prime\prime} est inclus dans l’ensemble de Fatou. Comme les points répulsifs sont dans l’ensemble de Julia, on a finalement U′′=Usuperscript𝑈′′𝑈U^{\prime\prime}=U. De la Proposition 2.1, et du fait que degR=1subscriptdegree𝑅1\deg_{R}=1 sur U𝑈U, on en déduit que R𝑅R est injective sur U𝑈U. ∎

2.4. Théorie du potentiel 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}

Plusieurs approches [BR2, FJ, Th] existent pour construire un analogue de la théorie du potentiel complexe sur la droite projective au sens de Berkovich. La plus aboutie est due à Thuillier et s’applique sur n’importe quelle courbe lisse K𝐾K-analytique. Nous ne décrirons cependant ici que les éléments qui nous seront strictement nécessaires par la suite en suivant [FJ, §7] et [FR2, §4].

Munissons 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} de la tribu des boréliens associée à sa topologie compacte. On note +superscript{\mathcal{M}}^{+} l’ensemble des mesures boréliennes positives finies, supportées dans 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}. On désigne par {\mathcal{M}} l’espace vectoriel des mesures réelles signées, différences de mesures dans +superscript{\mathcal{M}}^{+}. Toute suite de mesures de probabilité dans +superscript{\mathcal{M}}^{+} admet une sous-suite convergente pour la topologie de la convergence vague. Notons que toute mesure dans {\mathcal{M}} est de Radon et est donc représentée par une forme linéaire continue sur l’espace des fonctions continues de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} (voir par exemple [FJ, Proposition 7.14]). Enfin on montre que bien que 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} muni de la topologie compacte ne soit pas métrisable en général, le support de toute mesure dans {\mathcal{M}} est métrisable [FJ, Lemma 7.15].

Nous allons maintenant définir un espace fonctionnel 𝒫𝒫{\mathcal{P}} et un opérateur ΔΔ\Delta défini sur 𝒫𝒫{\mathcal{P}} et à valeurs dans {\mathcal{M}}. Pour cela, fixons un point base 𝒮0Ksubscript𝒮0subscript𝐾{\mathcal{S}}_{0}\in{\mathbb{H}_{K}}. Notons que pour tout 𝒮K𝒮subscript𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathbb{H}_{K}}, la fonction 𝒮𝒮,𝒮𝒮0maps-tosuperscript𝒮subscript𝒮superscript𝒮subscript𝒮0{\mathcal{S}}^{\prime}\mapsto\langle{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\rangle_{{\mathcal{S}}_{0}} est non négative et majorée par dK(𝒮,𝒮0)subscriptdsubscript𝐾𝒮subscript𝒮0\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}({\mathcal{S}},{\mathcal{S}}_{0}). Etant donnée une mesure borélienne ρ𝜌\rho\in{\mathcal{M}}, on peut donc définir g^ρ:K:subscript^𝑔𝜌subscript𝐾{\hat{g}}_{\rho}:{\mathbb{H}_{K}}\to{\mathbb{R}} par

g^ρ(𝒮):=ρ(𝖯K1)𝖯K1𝒮,𝒮𝒮0𝑑ρ(𝒮),assignsubscript^𝑔𝜌𝒮𝜌subscriptsuperscript𝖯1𝐾subscriptsubscriptsuperscript𝖯1𝐾subscript𝒮superscript𝒮subscript𝒮0differential-d𝜌superscript𝒮{\hat{g}}_{\rho}({\mathcal{S}}):=-\rho({\mathsf{P}^{1}_{K}})-\int_{\mathsf{P}^{1}_{K}}\langle{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\rangle_{{\mathcal{S}}_{0}}\,d\rho({\mathcal{S}}^{\prime}), (2.6)

et on l’appelle le potentiel de ρ𝜌\rho basé en 𝒮0subscript𝒮0{\mathcal{S}}_{0}. On a g^ρ(𝒮0)=ρ(𝖯K1)subscript^𝑔𝜌subscript𝒮0𝜌subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\hat{g}}_{\rho}({\mathcal{S}}_{0})=-\rho({\mathsf{P}^{1}_{K}}) et par construction g^[𝒮0]subscript^𝑔delimited-[]subscript𝒮0{\hat{g}}_{[{\mathcal{S}}_{0}]} est la fonction constante égale à 11-1 sur tout 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}. Plus généralement, g^[𝒮](𝒮)=1𝒮,𝒮𝒮0subscript^𝑔delimited-[]superscript𝒮𝒮1subscript𝒮superscript𝒮subscript𝒮0{\hat{g}}_{[{\mathcal{S}}^{\prime}]}({\mathcal{S}})=-1-\langle{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\rangle_{{\mathcal{S}}_{0}}.

On désigne par 𝒫𝒫{\mathcal{P}} l’ensemble de tous les potentiels. C’est un espace vectoriel qui contient toutes les fonctions définies sur Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}} et à valeurs réelles de la forme 𝒮𝒮,𝒮𝒮0maps-to𝒮subscript𝒮superscript𝒮subscript𝒮0{\mathcal{S}}\mapsto\langle{\mathcal{S}}\,,{\mathcal{S}}^{\prime}\rangle_{{\mathcal{S}}_{0}}. Il résulte de [FJ, Theorem 7.50] que l’application ρg^ρmaps-to𝜌subscript^𝑔𝜌\rho\mapsto{\hat{g}}_{\rho} induit une bijection entre {\mathcal{M}} et 𝒫𝒫{\mathcal{P}}. On peut donc poser

Δg^ρ:=ρρ(𝖯K1)×[𝒮0].assignΔsubscript^𝑔𝜌𝜌𝜌subscriptsuperscript𝖯1𝐾delimited-[]subscript𝒮0\Delta{\hat{g}}_{\rho}:=\rho-\rho({\mathsf{P}^{1}_{K}})\times[{\mathcal{S}}_{0}]\leavevmode\nobreak\ .

Ceci définit une application linéaire Δ:𝒫:Δ𝒫\Delta:{\mathcal{P}}\to{\mathcal{M}} que l’on appelle le Laplacien. On vérifie que cet opérateur ne dépend pas du choix du point base ainsi que la classe de fonctions 𝒫𝒫{\mathcal{P}}, voir [FR2, Proposition 4.1]. On a de plus Δg=0Δ𝑔0\Delta g=0 si et seulement si g𝑔g est constante.

Par construction, pour tout g𝒫𝑔𝒫g\in{\mathcal{P}} on a Δg(𝖯K1)=0Δ𝑔subscriptsuperscript𝖯1𝐾0\Delta g({\mathsf{P}^{1}_{K}})=0. Réciproquement, toute mesure vérifiant ρ(𝖯K1)=0𝜌subscriptsuperscript𝖯1𝐾0\rho({\mathsf{P}^{1}_{K}})=0 est le Laplacien d’une fonction de 𝒫𝒫{\mathcal{P}}. Dans toute la suite, on appellera potentiel d’une mesure borélienne ρ𝜌\rho toute fonction g𝒫𝑔𝒫g\in{\mathcal{P}} telle que ρ=Δg𝜌Δ𝑔\rho=\Delta g. Notons que:

Δ,𝒮𝒮0=[𝒮0][𝒮], et Δlogsup{,𝒮}=[𝒮][].formulae-sequenceΔsubscript𝒮subscript𝒮0delimited-[]subscript𝒮0delimited-[]𝒮 et Δsupremum𝒮delimited-[]𝒮delimited-[]\Delta\langle\cdot\,,{\mathcal{S}}\rangle_{{\mathcal{S}}_{0}}=[{\mathcal{S}}_{0}]-[{\mathcal{S}}]\leavevmode\nobreak\ ,\text{ et }\Delta\log\sup\{\cdot,{\mathcal{S}}\}=[{\mathcal{S}}]-[\infty]\leavevmode\nobreak\ .

De plus, pour tout potentiel g:K:𝑔subscript𝐾g:{\mathbb{H}_{K}}\to{\mathbb{R}} et toute fraction rationnelle non constante R𝑅R, on a R(Δg)=Δ(gR)superscript𝑅Δ𝑔Δ𝑔𝑅R^{*}(\Delta g)=\Delta(g\circ R) et RΔ(g)=Δ(Rg)subscript𝑅Δ𝑔Δsubscript𝑅𝑔R_{*}\Delta(g)=\Delta(R_{*}g).

Soit 𝒫+subscript𝒫{\mathcal{P}}_{+} l’ensemble des fonctions g𝒫𝑔𝒫g\in{\mathcal{P}} telles que [𝒮can]+Δgdelimited-[]subscript𝒮canΔ𝑔[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]+\Delta g soit une mesure positive. L’opérateur ΔΔ\Delta possède des propriétés de continuité remarquables sur 𝒫+subscript𝒫{\mathcal{P}}_{+} qui sont analogues aux propriétés de continuité des fonctions sous-harmoniques en analyse complexe, et que nous allons maintenant détailler.

On vérifie tout d’abord que toute fonction dans 𝒫+subscript𝒫{\mathcal{P}}_{+} est continue, convexe pour la métrique dKsubscriptdsubscript𝐾\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}} et décroissante sur tout segment [𝒮can,𝒮]subscript𝒮can𝒮[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}},{\mathcal{S}}]. Une telle fonction s’étend donc de manière unique à 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} en restant continue sur tout segment. Cette extension est semi-continue supérieurement sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} pour la topologie compacte.

Proposition 2.17 ([FJ], Theorem 7.64).

L’espace 𝒫+subscript𝒫{\mathcal{P}}_{+} est convexe et fermé pour la topologie de la convergence simple de Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}. De plus, l’opérateur induit (Δ+[𝒮can]):𝒫++:Δdelimited-[]subscript𝒮cansubscript𝒫subscript(\Delta+[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]):{\mathcal{P}}_{+}\to{\mathcal{M}}_{+} est continu si +subscript{\mathcal{M}}_{+} est muni de la topologie de la convergence vague des mesures.

Le fait suivant est un résultat de base en théorie du potentiel [, Théorème 1.6.13].

Proposition 2.18 (Lemme de Hartogs).

Soit {gn}n1subscriptsubscript𝑔𝑛𝑛1\{g_{n}\}_{n\geq 1} une suite de potentiels dans 𝒫+subscript𝒫{\mathcal{P}}_{+} telle que pour chaque n1𝑛1n\geq 1 on ait gn0subscript𝑔𝑛0g_{n}\leq 0. Alors soit cette suite converge uniformément sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} vers la fonction constante égale à -\infty; soit il existe une sous-suite {gnk}k1subscriptsubscript𝑔subscript𝑛𝑘𝑘1\{g_{n_{k}}\}_{k\geq 1} convergeant ponctuellement sur Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}} vers un potentiel g𝑔g dans 𝒫+subscript𝒫{\mathcal{P}}_{+}. Dans ce dernier cas, pour toute fonction continue φ𝜑\varphi et toute partie compacte C𝐶C de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}, on a

lim supk+(supC(gnkφ))supC(gφ).subscriptlimit-supremum𝑘subscriptsupremum𝐶subscript𝑔subscript𝑛𝑘𝜑subscriptsupremum𝐶𝑔𝜑\limsup_{k\to+\infty}\left(\sup_{C}(g_{n_{k}}-\varphi)\right)\leq\sup_{C}(g-\varphi)\leavevmode\nobreak\ .
Démonstration.

Pour chaque entier n1𝑛1n\geq 1 on pose ρn:=[𝒮can]+Δgnassignsubscript𝜌𝑛delimited-[]subscript𝒮canΔsubscript𝑔𝑛\rho_{n}:=[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]+\Delta g_{n}. C’est une mesure positive de masse 111. Quitte à extraire une sous-suite, on peut donc supposer que ρnsubscript𝜌𝑛\rho_{n} converge vers une mesure de probabilité ρ𝜌\rho lorsque n+𝑛n\to+\infty.

Supposons tout d’abord que limn+{gn(𝒮can),n1}=subscript𝑛subscript𝑔𝑛subscript𝒮can𝑛1\lim_{n\to+\infty}\{g_{n}({\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}),n\geq 1\}=-\infty. Comme gnsubscript𝑔𝑛g_{n} est décroissante sur tout segment partant de 𝒮cansubscript𝒮can{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}, on a gnsubscript𝑔𝑛g_{n}\to-\infty uniformément.

Supposons maintenant que lim¯n+{gn(𝒮can),n1}>subscriptlimit-supremum𝑛subscript𝑔𝑛subscript𝒮can𝑛1\varlimsup_{n\to+\infty}\{g_{n}({\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}),n\geq 1\}>-\infty. Quitte à remplacer {gn}n1subscriptsubscript𝑔𝑛𝑛1\{g_{n}\}_{n\geq 1} par {gngn(𝒮can)1}n1subscriptsubscript𝑔𝑛subscript𝑔𝑛subscript𝒮can1𝑛1\{g_{n}-g_{n}({\mathcal{S}_{\mathrm{can}}})-1\}_{n\geq 1} et à prendre une sous-suite, on peut supposer que pour chaque n1𝑛1n\geq 1 on a gn(𝒮can)=1subscript𝑔𝑛subscript𝒮can1g_{n}({\mathcal{S}_{\mathrm{can}}})=-1. À nouveau par décroissance des gnsubscript𝑔𝑛g_{n}, on a gn1subscript𝑔𝑛1g_{n}\leq-1 partout. Soit g^ρnsubscript^𝑔subscript𝜌𝑛\hat{g}_{\rho_{n}} définie par (2.6) lorsque le point base 𝒮0subscript𝒮0{\mathcal{S}}_{0} est égal à 𝒮cansubscript𝒮can{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}. Par construction, Δg^ρn=ΔgnΔsubscript^𝑔subscript𝜌𝑛Δsubscript𝑔𝑛\Delta\hat{g}_{\rho_{n}}=\Delta g_{n} et ces deux fonctions sont égales en 𝒮cansubscript𝒮can{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}. Elles sont donc égales partout. Par convergence dominée, on a g^ρng^ρsubscript^𝑔subscript𝜌𝑛subscript^𝑔𝜌\hat{g}_{\rho_{n}}\to\hat{g}_{\rho} ponctuellement sur Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}, et par conséquent on a gng^ρsubscript𝑔𝑛subscript^𝑔𝜌g_{n}\to\hat{g}_{\rho} ponctuellement.

Pour montrer la dernière assertion de la proposition, soit {𝒯m}m1Ksubscriptsubscript𝒯𝑚𝑚1subscript𝐾\{{\mathcal{T}}_{m}\}_{m\geq 1}\subset{\mathbb{H}_{K}} une suite croissante d’arbres fermés finis dont l’adhérence de la réunion contient le support topologique de ρ𝜌\rho, voir [FJ, Lemma 7.15]. Quitte à agrandir les 𝒯msubscript𝒯𝑚{\mathcal{T}}_{m}, on suppose que tous ces arbres contiennent 𝒮cansubscript𝒮can{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}. La suite de mesures de probabilité {ρ𝒯m}m1subscriptsubscript𝜌subscript𝒯𝑚𝑚1\{\rho_{{\mathcal{T}}_{m}}\}_{m\geq 1} converge vers ρ𝜌\rho, et gπ𝒯m𝑔subscript𝜋subscript𝒯𝑚g\circ\pi_{{\mathcal{T}}_{m}} décroit vers g𝑔g ponctuellement.

D’autre part, pour un entier m1𝑚1m\geq 1 fixé, la fonction gn|𝒯mconditionalsubscript𝑔𝑛subscript𝒯𝑚g_{n}|{\mathcal{T}}_{m} est décroissante sur 𝒯msubscript𝒯𝑚{\mathcal{T}}_{m} et converge ponctuellement vers la fonction continue g|𝒯mconditional𝑔subscript𝒯𝑚g|{\mathcal{T}}_{m} lorsque n+𝑛n\to+\infty. Par consequent la convergence est uniforme sur 𝒯msubscript𝒯𝑚{\mathcal{T}}_{m}. On en déduit que gnπ𝒯mgπ𝒯msubscript𝑔𝑛subscript𝜋subscript𝒯𝑚𝑔subscript𝜋subscript𝒯𝑚g_{n}\circ\pi_{{\mathcal{T}}_{m}}\to g\circ\pi_{{\mathcal{T}}_{m}} uniformément sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}. On a donc pour tout m1𝑚1m\geq 1

lim supn+(supC(gnφ))limn+(supC(gnπ𝒯mφ))=supC(gπ𝒯mφ).subscriptlimit-supremum𝑛subscriptsupremum𝐶subscript𝑔𝑛𝜑subscript𝑛subscriptsupremum𝐶subscript𝑔𝑛subscript𝜋subscript𝒯𝑚𝜑subscriptsupremum𝐶𝑔subscript𝜋subscript𝒯𝑚𝜑\limsup_{n\to+\infty}\left(\sup_{C}\left(g_{n}-\varphi\right)\right)\leq\lim_{n\to+\infty}\left(\sup_{C}\left(g_{n}\circ\pi_{{\mathcal{T}}_{m}}-\varphi\right)\right)=\sup_{C}\left(g\circ\pi_{{\mathcal{T}}_{m}}-\varphi\right)\leavevmode\nobreak\ .

Pour chaque m1𝑚1m\geq 1 prenons 𝒮mCsubscript𝒮𝑚𝐶{\mathcal{S}}_{m}\in C tel que

(gπ𝒯mφ)(𝒮m)=supC(gπ𝒯mφ).𝑔subscript𝜋subscript𝒯𝑚𝜑subscript𝒮𝑚subscriptsupremum𝐶𝑔subscript𝜋subscript𝒯𝑚𝜑(g\circ\pi_{{\mathcal{T}}_{m}}-\varphi)({\mathcal{S}}_{m})=\sup_{C}\,(g\circ\pi_{{\mathcal{T}}_{m}}-\varphi)\leavevmode\nobreak\ .

Quitte à extraire une sous-suite, on suppose que {𝒮m}m1subscriptsubscript𝒮𝑚𝑚1\{{\mathcal{S}}_{m}\}_{m\geq 1} converge vers un certain point 𝒮𝒮{\mathcal{S}}. Etant donné ε>0𝜀0\varepsilon>0 on choisit un ouvert fondamental U𝑈U contenant 𝒮𝒮{\mathcal{S}} tel que supU|φφ(𝒮)|εsubscriptsupremum𝑈𝜑𝜑𝒮𝜀\sup_{U}|\varphi-\varphi({\mathcal{S}})|\leq\varepsilon. Notons 𝒮0subscript𝒮0{\mathcal{S}}_{0} le point du bord de U𝑈U le plus proche de 𝒮cansubscript𝒮can{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}} (si 𝒮canUsubscript𝒮can𝑈{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}\in U, on pose 𝒮0:=𝒮canassignsubscript𝒮0subscript𝒮can{\mathcal{S}}_{0}:={\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}). Comme les fonctions g,gπ𝒯m𝑔𝑔subscript𝜋subscript𝒯𝑚g,g\circ\pi_{{\mathcal{T}}_{m}} sont décroissantes sur tout segment partant de 𝒮cansubscript𝒮can{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}, pour m1𝑚1m\geq 1 assez grand tel que gπ𝒯m(𝒮0)g(𝒮0)+ε𝑔subscript𝜋subscript𝒯𝑚subscript𝒮0𝑔subscript𝒮0𝜀g\circ\pi_{{\mathcal{T}}_{m}}({\mathcal{S}}_{0})\leq g({\mathcal{S}}_{0})+\varepsilon et 𝒮mUsubscript𝒮𝑚𝑈{\mathcal{S}}_{m}\in U, on a,

supC(gφ)supUCgφ(𝒮0)ε=g(𝒮0)φ(𝒮0)εgπ𝒯m(𝒮0)φ(𝒮0)2εgπ𝒯m(𝒮m)φ(𝒮0)2εgπ𝒯m(𝒮m)φ(𝒮m)3ε=supC(gπ𝒯mφ)3ε.subscriptsupremum𝐶𝑔𝜑subscriptsupremum𝑈𝐶𝑔𝜑subscript𝒮0𝜀𝑔subscript𝒮0𝜑subscript𝒮0𝜀𝑔subscript𝜋subscript𝒯𝑚subscript𝒮0𝜑subscript𝒮02𝜀𝑔subscript𝜋subscript𝒯𝑚subscript𝒮𝑚𝜑subscript𝒮02𝜀𝑔subscript𝜋subscript𝒯𝑚subscript𝒮𝑚𝜑subscript𝒮𝑚3𝜀subscriptsupremum𝐶𝑔subscript𝜋subscript𝒯𝑚𝜑3𝜀\sup_{C}\,(g-\varphi)\geq\sup_{U\cap C}g-\varphi({\mathcal{S}}_{0})-\varepsilon=g({\mathcal{S}}_{0})-\varphi({\mathcal{S}}_{0})-\varepsilon\geq\\ \geq g\circ\pi_{{\mathcal{T}}_{m}}({\mathcal{S}}_{0})-\varphi({\mathcal{S}}_{0})-2\varepsilon\geq g\circ\pi_{{\mathcal{T}}_{m}}({\mathcal{S}}_{m})-\varphi({\mathcal{S}}_{0})-2\varepsilon\geq\\ \geq g\circ\pi_{{\mathcal{T}}_{m}}({\mathcal{S}}_{m})-\varphi({\mathcal{S}}_{m})-3\varepsilon=\sup_{C}\,(g\circ\pi_{{\mathcal{T}}_{m}}-\varphi)-3\varepsilon\leavevmode\nobreak\ .

Donc supC(gφ)lim supm+(supC(gπ𝒯mφ))subscriptsupremum𝐶𝑔𝜑subscriptlimit-supremum𝑚subscriptsupremum𝐶𝑔subscript𝜋subscript𝒯𝑚𝜑\sup_{C}(g-\varphi)\geq\limsup_{m\to+\infty}\left(\sup_{C}\,(g\circ\pi_{{\mathcal{T}}_{m}}-\varphi)\right). Ce qui termine la preuve. ∎

3. La mesure d’équilibre

Fixons une fraction rationnelle R𝑅R de degré au moins 2.

3.1. Construction de la mesure

Proposition-Définition 3.1.

Pour tout élément 𝒮K𝒮subscript𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathbb{H}_{K}}, la suite de mesures de probabilité {deg(R)nRn[𝒮]}n0\{\deg(R)^{-n}R^{n*}[{\mathcal{S}}]\}_{n\geq 0} converge vaguement vers une mesure ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} indépendante du choix de 𝒮𝒮{\mathcal{S}}. On appellera cette mesure la mesure d’équilibre de R𝑅R.

Démonstration.

Prenons 𝒮𝒮{\mathcal{S}} un point arbitraire de Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}. La masse de la mesure R[𝒮]superscript𝑅delimited-[]𝒮R^{*}[{\mathcal{S}}] est égale au degré de R𝑅R, donc nous pouvons écrire deg(R)1R[𝒮]=[𝒮]+Δg\deg(R)^{-1}R^{*}[{\mathcal{S}}]=[{\mathcal{S}}]+\Delta g, où g:K:𝑔subscript𝐾g:{\mathbb{H}_{K}}\to{\mathbb{R}} est un potentiel. La mesure R[𝒮]superscript𝑅delimited-[]𝒮R^{*}[{\mathcal{S}}] est supportée sur le sous-ensemble fini R1(𝒮)superscript𝑅1𝒮R^{-1}({\mathcal{S}}) de Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}. L’enveloppe convexe de l’ensemble suppR[𝒮]{𝒮}suppsuperscript𝑅delimited-[]𝒮𝒮\mathrm{supp}\,R^{*}[{\mathcal{S}}]\cup\{{\mathcal{S}}\} est donc un arbre fini 𝒯𝒯{\mathcal{T}} dont les bouts sont situés dans Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}. Le potentiel g𝑔g est localement constant en dehors de 𝒯𝒯{\mathcal{T}} et est borné sur 𝒯𝒯{\mathcal{T}}, il est donc borné sur Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}} tout entier. On obtient donc pour tout entier n𝑛n :

deg(R)nRn[𝒮]=[𝒮]+Δgn, avec gn=k=0n1gRkdeg(R)k.\deg(R)^{-n}R^{n*}[{\mathcal{S}}]=[{\mathcal{S}}]+\Delta g_{n}\leavevmode\nobreak\ ,\text{ avec }g_{n}=\sum_{k=0}^{n-1}\frac{g\circ R^{k}}{\deg(R)^{k}}\leavevmode\nobreak\ .

La suite {gn}n0subscriptsubscript𝑔𝑛𝑛0\{g_{n}\}_{n\geq 0} converge uniformément sur Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}} vers une fonction continue gsubscript𝑔g_{\infty}, donc deg(R)nRn[𝒮]\deg(R)^{-n}R^{n*}[{\mathcal{S}}] converge vaguement vers une mesure ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} lorsque n+𝑛n\to+\infty.

Si l’on choisit un autre élément 𝒮Ksuperscript𝒮subscript𝐾{\mathcal{S}}^{\prime}\in{\mathbb{H}_{K}}, on peut écrire [𝒮]=[𝒮]+Δhdelimited-[]superscript𝒮delimited-[]𝒮Δ[{\mathcal{S}}^{\prime}]=[{\mathcal{S}}]+\Delta h avec h:K:subscript𝐾h:{\mathbb{H}_{K}}\to{\mathbb{R}} bornée. De l’équation

deg(R)nRn[𝒮]=deg(R)nRn[𝒮]+Δ(deg(R)nhRn),\deg(R)^{-n}R^{n*}[{\mathcal{S}}^{\prime}]=\deg(R)^{-n}R^{n*}[{\mathcal{S}}]+\Delta(\deg(R)^{-n}h\circ R^{n})\leavevmode\nobreak\ ,

on tire deg(R)nRn[𝒮]ρR\deg(R)^{-n}R^{n*}[{\mathcal{S}}^{\prime}]\to\rho_{R}. ∎

Remarque 3.2.

L’argument montre que plus généralement pour toute mesure ρ𝜌\rho vérifiant ρ=[𝒮]+Δh𝜌delimited-[]𝒮Δ\rho=[{\mathcal{S}}]+\Delta h, avec hh bornée et 𝒮K𝒮subscript𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathbb{H}_{K}}, on a deg(R)nRnρρR\deg(R)^{-n}R^{n*}\rho\to\rho_{R}. Nous verrons à la section suivante comment étendre ce type de résultat dans certains cas où la fonction hh n’est plus bornée, par exemple lorsque ρ𝜌\rho est atomique et supportée sur un point non exceptionnel dans K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}.

L’opérateur deg(R)1R\deg(R)^{-1}R^{*} est continu et préserve l’espace des mesures de probabilités. Il est donc clair que ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} est une mesure de probabilité qui vérifie l’équation d’invariance:

RρR=deg(R)ρR.superscript𝑅subscript𝜌𝑅degree𝑅subscript𝜌𝑅R^{*}\rho_{R}=\deg(R)\,\rho_{R}\leavevmode\nobreak\ . (3.1)

En particulier, c’est une mesure invariante RρR=ρRsubscript𝑅subscript𝜌𝑅subscript𝜌𝑅R_{*}\rho_{R}=\rho_{R}. L’équation d’invariance (3.1), combinée à la Proposition 2.6 donne de plus pour tous 𝒮,𝒮𝖯K1𝒮superscript𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}} tels que R(𝒮)=𝒮𝑅superscript𝒮𝒮R({\mathcal{S}}^{\prime})={\mathcal{S}}:

ρR{𝒮}=degR(𝒮)deg(R)ρR{𝒮}.subscript𝜌𝑅superscript𝒮subscriptdegree𝑅superscript𝒮degree𝑅subscript𝜌𝑅𝒮\rho_{R}\{{\mathcal{S}}^{\prime}\}=\frac{\deg_{R}({\mathcal{S}}^{\prime})}{\deg(R)}\,\rho_{R}\{{\mathcal{S}}\}\leavevmode\nobreak\ . (3.2)
Proposition 3.3.

Il existe α(0,1]\alpha\in(0,1] tel que pour chaque 𝒮K𝒮subscript𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathbb{H}_{K}}, tout potentiel g0:K:subscript𝑔0subscript𝐾g_{0}:{\mathbb{H}_{K}}\to{\mathbb{R}} satisfaisant ρR=[𝒮]+Δg0subscript𝜌𝑅delimited-[]𝒮Δsubscript𝑔0\rho_{R}=[{\mathcal{S}}]+\Delta g_{0} est Hölder d’exposant α𝛼\alpha par rapport à la distance d𝖯K1subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}. Plus précisément, on peut trouver une constante C>0𝐶0C>0 telle que pour tous 𝒮,𝒮′′Ksuperscript𝒮superscript𝒮′′subscript𝐾{\mathcal{S}}^{\prime},{\mathcal{S}}^{\prime\prime}\in{\mathbb{H}_{K}}, on ait

|g0(𝒮)g0(𝒮′′)|Cd𝖯K1(𝒮,𝒮′′)α.subscript𝑔0superscript𝒮subscript𝑔0superscript𝒮′′𝐶subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscriptsuperscript𝒮superscript𝒮′′𝛼|g_{0}({\mathcal{S}}^{\prime})-g_{0}({\mathcal{S}}^{\prime\prime})|\leq C\,\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}}^{\prime},{\mathcal{S}}^{\prime\prime})^{\alpha}\leavevmode\nobreak\ .

De plus, pour tout zK1𝑧subscriptsuperscript1𝐾z\in{\mathbb{P}^{1}_{K}} et r>0𝑟0r>0, on a

ρR(𝖡(z,r))Crα,subscript𝜌𝑅𝖡𝑧𝑟𝐶superscript𝑟𝛼\rho_{R}(\mathsf{B}(z,r))\leq C\,r^{\alpha}\leavevmode\nobreak\ ,

𝖡(z,r)𝖡𝑧𝑟\mathsf{B}(z,r) désigne l’enveloppe convexe dans 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} de la boule {wK,d𝖯K1(z,w)r}formulae-sequence𝑤𝐾subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝑧𝑤𝑟\{w\in K,\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}(z,w)\leq r\}. En particulier, ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} ne charge pas les points de K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}.

En dimension supérieure, une version de ce résultat a été démontrée dans [KS]. Notons que ce fait est classique sur le corps des complexes, et reste valable en dimension supérieure [Sib, §1.7] ou [DS2]. La preuve que nous donnons ici suit celles de [DS1, Théorème 3.7.1], et [Gu, Proposition 1.2].

Démonstration.

Soit 𝒮cansubscript𝒮can{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}} le point de K|K|subscriptsuperscriptsuperscript𝐾𝐾{\mathbb{H}^{|K^{*}|}_{K}} associé à la boule unité de K𝐾K. Pour chaque 𝒮K𝒮subscript𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathbb{H}_{K}}, tout potentiel g1subscript𝑔1g_{1} satisfaisant Δg1=[𝒮can][𝒮]Δsubscript𝑔1delimited-[]subscript𝒮candelimited-[]𝒮\Delta g_{1}=[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]-[{\mathcal{S}}] est Lipschitz car ,𝒮𝒮cansubscript𝒮subscript𝒮can\langle\cdot,{\mathcal{S}}\rangle_{{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}} l’est. On peut donc se ramener au cas 𝒮=𝒮can𝒮subscript𝒮can{\mathcal{S}}={\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}. Soit alors g:K:𝑔subscript𝐾g:{\mathbb{H}_{K}}\to{\mathbb{R}} un potentiel tel que

Δg=deg(R)1R[𝒮can][𝒮can].\Delta g=\deg(R)^{-1}R^{*}[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]-[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}].

La fonction g𝑔g est Lipschitz sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}, on peut donc trouver une constante C>0𝐶0C>0 telle que |g(z)g(w)|Cd𝖯K1(z,w)𝑔𝑧𝑔𝑤𝐶subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝑧𝑤|g(z)-g(w)|\leq C\cdot\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}(z,w) pour tous z,w𝖯K1𝑧𝑤subscriptsuperscript𝖯1𝐾z,w\in{\mathsf{P}^{1}_{K}}. D’autre part, la fonction R𝑅R est aussi Lipschitz pour une autre constante M𝑀M que l’on peut supposer strictement plus grande que deg(R)degree𝑅\deg(R), voir par exemple [KS, Theorem 10]. De ρR=limn+deg(R)nRn[𝒮can]\rho_{R}=\lim_{n\to+\infty}\deg(R)^{-n}R^{n*}[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}], on déduit que ρR=[𝒮can]+Δg0subscript𝜌𝑅delimited-[]subscript𝒮canΔsubscript𝑔0\rho_{R}=[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]+\Delta g_{0}, avec

g0=0deg(R)kgRk.g_{0}=\sum_{0}^{\infty}\deg(R)^{-k}g\circ R^{k}.

On fixe N𝑁N entier, et on procède alors aux estimations suivantes :

|g0(z)g0(w)|subscript𝑔0𝑧subscript𝑔0𝑤\displaystyle|g_{0}(z)-g_{0}(w)| \displaystyle\leq k=0N1|gRk(z)gRk(w)|deg(R)k+sup|g|k=N1deg(R)k\displaystyle\sum_{k=0}^{N-1}\frac{|g\circ R^{k}(z)-g\circ R^{k}(w)|}{\deg(R)^{k}}+\sup|g|\leavevmode\nobreak\ \sum_{k=N}^{\infty}\frac{1}{\deg(R)^{k}}
\displaystyle\leq C1d𝖯K1(z,w)(M/deg(R))N+C2deg(R)N,\displaystyle C_{1}\cdot\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}(z,w)\,(M/\deg(R))^{N}+C_{2}\cdot\deg(R)^{-N}\leavevmode\nobreak\ ,

pour des constantes C1,C2>0subscript𝐶1subscript𝐶20C_{1},C_{2}>0 indépendantes de z,w,N𝑧𝑤𝑁z,w,N. On choisit maintenant N=N(z,w)𝑁𝑁𝑧𝑤N=N(z,w) de telle sorte que MC2/C1d𝖯K1(z,w)MNC2/C1𝑀subscript𝐶2subscript𝐶1subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝑧𝑤superscript𝑀𝑁subscript𝐶2subscript𝐶1MC_{2}/C_{1}\geq\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}(z,w)\,M^{N}\geq C_{2}/C_{1}, ce qui est possible dès que d𝖯K1(z,w)MC2/C1subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝑧𝑤𝑀subscript𝐶2subscript𝐶1\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}(z,w)\leq MC_{2}/C_{1}. On en déduit qu’il existe une constante C>0𝐶0C>0, indépendante de z𝑧z et w𝑤w, telle que si l’on pose α=logdeg(R)/logM𝛼degree𝑅𝑀\alpha=\log\deg(R)/\log M, alors |g0(z)g0(w)|Cd𝖯K1(z,w)αsubscript𝑔0𝑧subscript𝑔0𝑤𝐶subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscript𝑧𝑤𝛼|g_{0}(z)-g_{0}(w)|\leq C\cdot\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}(z,w)^{\alpha}. On note enfin que ces inégalités sur K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} entraine les mêmes sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}.

Soit zK1𝑧subscriptsuperscript1𝐾z\in{\mathbb{P}^{1}_{K}} et r>0𝑟0r>0. Pour montrer l’inégalité ρR(𝖡(z,r))Crαsubscript𝜌𝑅𝖡𝑧𝑟𝐶superscript𝑟𝛼\rho_{R}(\mathsf{B}(z,r))\leq C\,r^{\alpha} on se ramène au cas r(0,12)𝑟012r\in(0,\tfrac{1}{2}). Soit 𝒮𝒮{\mathcal{S}} (resp. 𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}^{\prime}) le point de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} associé à la boule B(z,r)𝐵𝑧𝑟B(z,r) (resp. B(z,er)𝐵𝑧𝑒𝑟B(z,er)), et soit χ:K:𝜒subscript𝐾\chi:{\mathbb{H}_{K}}\to{\mathbb{R}} le potentiel constant égal à 1 sur B(z,r)𝐵𝑧𝑟B(z,r), constant égal à 0 hors de B(z,er)𝐵𝑧𝑒𝑟B(z,er), et tel que Δχ=[𝒮][𝒮]Δ𝜒delimited-[]𝒮delimited-[]superscript𝒮\Delta\chi=[{\mathcal{S}}]-[{\mathcal{S}}^{\prime}]. Alors on a

ρR(𝖡(z,r))χd(Δg0)=g0d(Δχ)=g0(𝒮)g0(𝒮)Cd𝖯K1(𝒮,𝒮)α=Crα.subscript𝜌𝑅𝖡𝑧𝑟𝜒𝑑Δsubscript𝑔0subscript𝑔0𝑑Δ𝜒subscript𝑔0𝒮subscript𝑔0superscript𝒮𝐶subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscript𝒮superscript𝒮𝛼𝐶superscript𝑟𝛼\rho_{R}(\mathsf{B}(z,r))\leq\int\chi\,d(\Delta g_{0})=\int g_{0}\,d(\Delta\chi)=g_{0}({\mathcal{S}})-g_{0}({\mathcal{S}}^{\prime})\leq C\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime})^{\alpha}=Cr^{\alpha}\leavevmode\nobreak\ .

La première égalité résulte de [FR2, Lemmes 4.4 et 4.3] car la fonction énergie est symétrique. ∎

3.2. Démonstration du Théorème A

Le fait que ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} ne charge aucun point de K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} est une conséquence de la Proposition 3.3. On montre maintenant que le fait que le support de ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} soit égal à JRsubscript𝐽𝑅J_{R} est une conséquence de (1.1). En effet, considérons une mesure de probabilité quelconque ρ𝜌\rho supportée dans JRsubscript𝐽𝑅J_{R}. Par la Proposition 2.6, le support de la mesure Rnρsuperscript𝑅absent𝑛𝜌R^{*n}\rho est contenu dans JRsubscript𝐽𝑅J_{R}. Comme l’ensemble JRsubscript𝐽𝑅J_{R} est disjoint de l’ensemble exceptionnel, et complètement invariant par R𝑅R (Proposition 2.9), la convergence (1.1) implique que le support topologique de ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} est contenu dans JRsubscript𝐽𝑅J_{R}. D’autre part, l’équation d’invariance (3.1) et la Proposition 2.6 montrent que le support topologique de ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} est complètement invariant. Comme l’ensemble de Julia est caractérisé comme le plus petit ensemble compact disjoint de l’ensemble exceptionnel qui est complètement invariant par R𝑅R (Proposition 2.9), on conclut que le support topologique de ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} est égal à JRsubscript𝐽𝑅J_{R}.

Le reste de cette démonstration est consacré à la preuve de (1.1). L’ensemble exceptionnel ERsubscript𝐸𝑅E_{R} étant totalement invariant, pour tout n1𝑛1n\geq 1 on a

deg(R)nRnρ(ER)=ρ(ER).\deg(R)^{-n}R^{n*}\rho(E_{R})=\rho(E_{R})\leavevmode\nobreak\ .

Si ρ(ER)>0𝜌subscript𝐸𝑅0\rho(E_{R})>0, on ne peut pas donc avoir limn+deg(R)nRnρ=ρR\lim_{n\to+\infty}\deg(R)^{-n}R^{n*}\rho=\rho_{R}.

Réciproquement, supposons que ρ(ER)=0𝜌subscript𝐸𝑅0\rho(E_{R})=0. On désigne par g:K:𝑔subscript𝐾g:{\mathbb{H}_{K}}\to{\mathbb{R}} le potentiel donné par (2.6), lorsque 𝒮0=𝒮cansubscript𝒮0subscript𝒮can{\mathcal{S}}_{0}={\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}, de telle sorte que Δg=ρ[𝒮can]Δ𝑔𝜌delimited-[]subscript𝒮can\Delta g=\rho-[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]. Alors pour tout n1𝑛1n\geq 1 on a

deg(R)nRnρ=deg(R)nRn[𝒮can]+Δ(deg(R)ngRn).\deg(R)^{-n}R^{n*}\rho=\deg(R)^{-n}R^{n*}[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]+\Delta(\deg(R)^{-n}g\circ R^{n})\leavevmode\nobreak\ .

Il suffit donc de montrer que deg(R)ngRn\deg(R)^{-n}g\circ R^{n} converge ponctuellement vers zéro sur Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}, lorsque n+𝑛n\to+\infty. Pour cela on va estimer les vitesses de convergence des points de Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}} vers K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}. Comme on a g0𝑔0g\leq 0, il suffit de montrer lim infn+deg(R)ngRn0\liminf_{n\to+\infty}\deg(R)^{-n}g\circ R^{n}\geq 0.

Fixons un point 𝒮𝒮{\mathcal{S}} dans Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}.

Cas 1. Le point 𝒮𝒮{\mathcal{S}} appartient au bassin d’attraction d’un point exceptionnel z0K1subscript𝑧0subscriptsuperscript1𝐾z_{0}\in{\mathbb{P}^{1}_{K}} de R𝑅R. Quitte à remplacer R𝑅R par un itéré on peut supposer z0subscript𝑧0z_{0} fixé par R𝑅R. Après un changement de coordonnées on suppose qu’il existe r0(0,1)subscript𝑟00.1r_{0}\in(0,1) tel que pour tout point 𝒮Ksuperscript𝒮subscript𝐾{\mathcal{S}}^{\prime}\in{\mathbb{H}_{K}} satisfaisant d𝖯K1(𝒮,z0)<r0subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscript𝒮subscript𝑧0subscript𝑟0\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}}^{\prime},z_{0})<r_{0} on a

d𝖯K1(R(𝒮),K1)d𝖯K1(𝒮,K1)deg(R).subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝑅superscript𝒮subscriptsuperscript1𝐾subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscriptsuperscript𝒮subscriptsuperscript1𝐾degree𝑅\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}(R({\mathcal{S}}^{\prime}),{\mathbb{P}^{1}_{K}})\geq\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}}^{\prime},{\mathbb{P}^{1}_{K}})^{\deg(R)}\leavevmode\nobreak\ .

Quitte à remplacer 𝒮𝒮{\mathcal{S}} par un point dans son orbite positive, on suppose que d𝖯K1(𝒮,z0)<r0subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝒮subscript𝑧0subscript𝑟0\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},z_{0})<r_{0}. Alors pour tout n1𝑛1n\geq 1 on a,

d𝖯K1(Rn(𝒮),K1)d𝖯K1(𝒮,K1)deg(R)n.\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}(R^{n}({\mathcal{S}}),{\mathbb{P}^{1}_{K}})\geq\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},{\mathbb{P}^{1}_{K}})^{\deg(R)^{n}}\leavevmode\nobreak\ .

Fixons ε>0𝜀0\varepsilon>0, et soit r(0,1)𝑟0.1r\in(0,1) assez petit tel que ρ(𝖡(z0,r))ε𝜌𝖡subscript𝑧0𝑟𝜀\rho(\mathsf{B}(z_{0},r))\leq\varepsilon. De (2.6) on déduit que pour tout 𝒮Ksuperscript𝒮subscript𝐾{\mathcal{S}}^{\prime}\in{\mathbb{H}_{K}} satisfaisant d𝖯K1(𝒮,z0)<rsubscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscript𝒮subscript𝑧0𝑟\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}}^{\prime},z_{0})<r on a

g(𝒮)g(𝒮)εdK(𝒮,𝒮).𝑔𝒮𝑔superscript𝒮𝜀subscriptdsubscript𝐾𝒮superscript𝒮g({\mathcal{S}})-g({\mathcal{S}}^{\prime})\geq\varepsilon\,\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}({\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}).

Comme de plus B𝒮B𝒮subscript𝐵superscript𝒮subscript𝐵𝒮B_{{\mathcal{S}}^{\prime}}\subset B_{\mathcal{S}}, par (2.1) on a,

dK(𝒮,𝒮)=logd𝖯K1(𝒮,K1)logd𝖯K1(𝒮,K1),subscriptdsubscript𝐾𝒮superscript𝒮subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝒮subscriptsuperscript1𝐾subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscript𝒮subscriptsuperscript1𝐾\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}({\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime})=\log\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},{\mathbb{P}^{1}_{K}})-\log\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}}^{\prime},{\mathbb{P}^{1}_{K}}),

d’où on obtient,

g(𝒮)εlogd𝖯K1(𝒮,z0)+(g(𝒮)εlogd𝖯K1(𝒮,z0)).𝑔superscript𝒮𝜀subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscript𝒮subscript𝑧0𝑔𝒮𝜀subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝒮subscript𝑧0g({\mathcal{S}}^{\prime})\geq\varepsilon\log\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}}^{\prime},z_{0})+\left(g({\mathcal{S}})-\varepsilon\log\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},z_{0})\right).

On a donc

lim infn+deg(R)ng(Rn(𝒮))εlogd𝖯K1(𝒮,K1).\liminf_{n\to+\infty}\deg(R)^{-n}g(R^{n}({\mathcal{S}}))\geq\varepsilon\log\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},{\mathbb{P}^{1}_{K}})\leavevmode\nobreak\ .

Cas 2. Le point 𝒮𝒮{\mathcal{S}} n’appartient pas au bassin d’attraction d’un point exceptionnel et degtop(R)>1subscriptdegtop𝑅1\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R)>1. Comme degtop(R)>1subscriptdegtop𝑅1\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R)>1, il existe au plus un nombre fini de points dans K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} dont le degré local est égal au degré de R𝑅R. Quitte à remplacer R𝑅R par un itéré on suppose que tout point de K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} dont le degré local est égal à deg(R)degree𝑅\deg(R) est exceptionnel. On s’appuie alors sur le lemme suivant.

Lemme 3.4.

Supposons que degtop(R)>1subscriptdegtop𝑅1\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R)>1. Alors, on peut trouver des constantes r>0𝑟0r>0 et C>0𝐶0C>0 tel que tout point 𝒮𝒮{\mathcal{S}} satisfaisant d𝖯K1(𝒮,ER)<rsubscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝒮subscript𝐸𝑅𝑟\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},E_{R})<r appartienne au bassin d’attraction d’un point exceptionnel, et pour tout point 𝒮𝒮{\mathcal{S}} satisfaisant d𝖯K1(𝒮,ER)rsubscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝒮subscript𝐸𝑅𝑟\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},E_{R})\geq r on ait

d𝖯K1(R(𝒮),K1)C×d𝖯K1(𝒮,K1)deg(R)1.subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝑅𝒮subscriptsuperscript1𝐾𝐶subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscript𝒮subscriptsuperscript1𝐾degree𝑅1\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}(R({\mathcal{S}}),{\mathbb{P}^{1}_{K}})\geq C\times\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},{\mathbb{P}^{1}_{K}})^{\deg(R)-1}\leavevmode\nobreak\ . (3.3)

Nous donnons une preuve de ce lemme ci-après.

En itérant la relation précédente, on en déduit pour tout entier n1𝑛1n\geq 1:

d𝖯K1(Rn(𝒮),K1)C(n)×d𝖯K1(𝒮,K1)(deg(R)1)n,subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscript𝑅𝑛𝒮subscriptsuperscript1𝐾𝐶𝑛subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscript𝒮subscriptsuperscript1𝐾superscriptdegree𝑅1𝑛\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}(R^{n}({\mathcal{S}}),{\mathbb{P}^{1}_{K}})\geq C(n)\times\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},{\mathbb{P}^{1}_{K}})^{(\deg(R)-1)^{n}}\leavevmode\nobreak\ ,

avec C(n):=C×Cdeg(R)1××C(deg(R)1)n1assign𝐶𝑛𝐶superscript𝐶degree𝑅1superscript𝐶superscriptdegree𝑅1𝑛1C(n):=C\times C^{\deg(R)-1}\times\cdots\times C^{(\deg(R)-1)^{n-1}}. De (2.1) et (2.6), on tire pour tout 𝒮Ksuperscript𝒮subscript𝐾{\mathcal{S}}^{\prime}\in{\mathbb{H}_{K}}

g(𝒮)logd𝖯K1(𝒮,K1)1.𝑔superscript𝒮subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscript𝒮subscriptsuperscript1𝐾1g({\mathcal{S}}^{\prime})\geq\log\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}}^{\prime},{\mathbb{P}^{1}_{K}})-1\leavevmode\nobreak\ .

Par conséquent

g(Rn(𝒮))logC(n)+(deg(R)1)nlogd𝖯K1(𝒮,K1)1,𝑔superscript𝑅𝑛𝒮𝐶𝑛superscriptdegree𝑅1𝑛subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝒮subscriptsuperscript1𝐾1g(R^{n}({\mathcal{S}}))\geq\log C(n)+(\deg(R)-1)^{n}\log\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},{\mathbb{P}^{1}_{K}})-1\leavevmode\nobreak\ ,

d’où lim infn+deg(R)ng(Rn(𝒮))=0\liminf_{n\to+\infty}\deg(R)^{-n}g(R^{n}({\mathcal{S}}))=0.

Cas 3. Le point 𝒮𝒮{\mathcal{S}} n’appartient pas au bassin d’attraction d’un point exceptionnel et degtop(R)=1subscriptdegtop𝑅1\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R)=1. Dans ce cas la caractéristique de K𝐾K est strictement positive, égale à un certain nombre premier p𝑝p. De plus, le degré q>1𝑞1q>1 de R𝑅R est une puissance de p𝑝p, et quitte à faire un changement de coordonnées, on peut supposer que R(z)=zq𝑅𝑧superscript𝑧𝑞R(z)=z^{q}. On note R~~𝑅\widetilde{R} la fraction rationnelle à coefficients dans le corps résiduel K~~𝐾\widetilde{K} de K𝐾K, définie par R~(ζ)=ζq~𝑅𝜁superscript𝜁𝑞\widetilde{R}(\zeta)=\zeta^{q}.

On vérifie aisément que pour tout 𝒮𝖯K1𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}} on a

dK(R(𝒮),𝒮can)=q×dK(𝒮,𝒮can).subscriptdsubscript𝐾𝑅𝒮subscript𝒮can𝑞subscriptdsubscript𝐾𝒮subscript𝒮can\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}(R({\mathcal{S}}),{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}})=q\times\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}({\mathcal{S}},{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}})\leavevmode\nobreak\ .

On a en particulier R(𝒮can)=𝒮can𝑅subscript𝒮cansubscript𝒮canR({\mathcal{S}_{\mathrm{can}}})={\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}. Le cas 𝒮=𝒮can𝒮subscript𝒮can{\mathcal{S}}={\mathcal{S}_{\mathrm{can}}} est donc immédiat, et on suppose alors que 𝒮𝖯K1{𝒮can}𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾subscript𝒮can{\mathcal{S}}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}}\setminus\{{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}\}. Considérons la partition de 𝖯K1{𝒮can}subscriptsuperscript𝖯1𝐾subscript𝒮can{\mathsf{P}^{1}_{K}}\setminus\{{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}\} en boules ouvertes de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} associées aux classes résiduelles,

𝖯K1{𝒮can}=ζK~1𝖡(ζ),subscriptsuperscript𝖯1𝐾subscript𝒮cansubscriptsquare-union𝜁subscriptsuperscript1~𝐾𝖡𝜁{\mathsf{P}^{1}_{K}}\setminus\{{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}\}=\sqcup_{\zeta\in{\mathbb{P}^{1}_{\widetilde{K}}}}{\mathsf{B}}(\zeta)\leavevmode\nobreak\ ,

de telle sorte que pour chaque ζK~1𝜁subscriptsuperscript1~𝐾\zeta\in{\mathbb{P}^{1}_{\widetilde{K}}} on ait R(𝖡(ζ))=𝖡(R~(ζ))𝑅𝖡𝜁𝖡~𝑅𝜁R({\mathsf{B}}(\zeta))={\mathsf{B}}(\widetilde{R}(\zeta)). On montre (cf. [R2, Proposition 4.32]) que pour chaque ζK~1𝜁subscriptsuperscript1~𝐾\zeta\in{\mathbb{P}^{1}_{\widetilde{K}}} périodique par R~~𝑅\widetilde{R}, la boule 𝖡(ζ)𝖡𝜁{\mathsf{B}}(\zeta) contient un point périodique par R𝑅R de même période. De plus ce point est exceptionnel pour R𝑅R et son bassin d’attraction contient la boule 𝖡(ζ)𝖡𝜁{\mathsf{B}}(\zeta). Comme par hypothèse le point 𝒮𝒮{\mathcal{S}} n’appartient pas à un bassin d’attraction d’un point exceptionnel de R𝑅R, si l’on désigne par ζ𝜁\zeta l’élément de K~1subscriptsuperscript1~𝐾{\mathbb{P}^{1}_{\widetilde{K}}} tel que la boule 𝖡(ζ)𝖡𝜁{\mathsf{B}}(\zeta) contienne le point 𝒮𝒮{\mathcal{S}}, alors l’orbite positive de ζ𝜁\zeta par R~~𝑅\widetilde{R} est infinie. On a en particulier

limn+ρ(𝖡(Rn(ζ)))=0.subscript𝑛𝜌𝖡superscript𝑅𝑛𝜁0\lim_{n\to+\infty}\rho({\mathsf{B}}(R^{n}(\zeta)))=0\leavevmode\nobreak\ .

Par (2.6) pour chaque ζK~1superscript𝜁subscriptsuperscript1~𝐾\zeta^{\prime}\in{\mathbb{P}^{1}_{\widetilde{K}}} et 𝒮𝖡(ζ)superscript𝒮𝖡superscript𝜁{\mathcal{S}}^{\prime}\in{\mathsf{B}}(\zeta^{\prime}) on a

g(𝒮)1ρ(𝖡(ζ))×dK(𝒮,𝒮can),𝑔superscript𝒮1𝜌𝖡superscript𝜁subscriptdsubscript𝐾superscript𝒮subscript𝒮cang({\mathcal{S}}^{\prime})\geq-1-\rho({\mathsf{B}}(\zeta^{\prime}))\times\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}({\mathcal{S}}^{\prime},{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}})\leavevmode\nobreak\ ,

d’où l’on déduit

lim infn+deg(R)ng(Rn(𝒮))lim infn+ρ(𝖡(R~n(ζ)))×dK(𝒮,𝒮can)=0.\liminf_{n\to+\infty}\deg(R)^{-n}g(R^{n}({\mathcal{S}}))\geq\liminf_{n\to+\infty}\rho({\mathsf{B}}(\widetilde{R}^{n}(\zeta)))\times\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}({\mathcal{S}},{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}})=0\leavevmode\nobreak\ .
Démonstration du Lemme 3.4.

L’existence de r>0𝑟0r>0 suit de la finitude de ERsubscript𝐸𝑅E_{R}. Pour montrer (3.3), par compacité il suffit de vérifier cette équation localement en tout point 𝒮𝒮{\mathcal{S}} tel que d𝖯K1(𝒮,ER)rsubscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝒮subscript𝐸𝑅𝑟\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},E_{R})\geq r. Supposons pour commencer que deg(R)=degtop(R)degree𝑅subscriptdegtop𝑅\deg(R)=\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R), c’est-à-dire que l’ensemble Crit(R)K1Crit𝑅subscriptsuperscript1𝐾\operatorname{Crit}(R)\subset{\mathbb{P}^{1}_{K}} où la dérivée de R𝑅R s’annule soit fini.

Prenons tout d’abord un point 𝒮𝒮{\mathcal{S}} qui ne soit pas dans Crit(R)Crit𝑅\operatorname{Crit}(R). Quitte à changer de coordonnées, on peut fixer un ouvert fondamental U𝑈U contenant 𝒮𝒮{\mathcal{S}} tel que

{,R1(),Crit(R)}U=.superscript𝑅1Crit𝑅𝑈\{\infty,R^{-1}(\infty),\operatorname{Crit}(R)\}\cap U=\emptyset.

Dans ce cas, Rsuperscript𝑅R^{\prime} ne s’annule pas dans UK1𝑈subscriptsuperscript1𝐾U\cap{\mathbb{P}^{1}_{K}}, et on peut donc trouver C0>0subscript𝐶00C_{0}>0 tel que |R(z)|C0superscript𝑅𝑧subscript𝐶0|R^{\prime}(z)|\geq C_{0} pour tout zUK1𝑧𝑈subscriptsuperscript1𝐾z\in U\cap{\mathbb{P}^{1}_{K}}. La fonction

D(z1,z2):=R(z1)R(z2)z1z2R(z2)assign𝐷subscript𝑧1subscript𝑧2𝑅subscript𝑧1𝑅subscript𝑧2subscript𝑧1subscript𝑧2superscript𝑅subscript𝑧2D(z_{1},z_{2}):=\frac{R(z_{1})-R(z_{2})}{z_{1}-z_{2}}-R^{\prime}(z_{2})

est analytique sur U×U𝑈𝑈U\times U et s’annule identiquement sur la diagonale. Pour un voisinage convenable V𝑉V de la diagonale, et pour tout couple (z1,z2)V(K1×K1)subscript𝑧1subscript𝑧2𝑉subscriptsuperscript1𝐾subscriptsuperscript1𝐾(z_{1},z_{2})\in V\cap({\mathbb{P}^{1}_{K}}\times{\mathbb{P}^{1}_{K}}), on a donc

|D(z1,z2)|<C0, et |R(z1)R(z2)z1z2|=|R(z2)|C0.formulae-sequence𝐷subscript𝑧1subscript𝑧2subscript𝐶0 et 𝑅subscript𝑧1𝑅subscript𝑧2subscript𝑧1subscript𝑧2superscript𝑅subscript𝑧2subscript𝐶0|D(z_{1},z_{2})|<C_{0},\text{ et }\left|\frac{R(z_{1})-R(z_{2})}{z_{1}-z_{2}}\right|=|R^{\prime}(z_{2})|\geq C_{0}\leavevmode\nobreak\ .

Prenons maintenant W𝑊W un voisinage ouvert de 𝒮𝒮{\mathcal{S}} dans 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} tel que W×WV𝑊𝑊𝑉W\times W\subset V. Alors pour tout 𝒮Wsuperscript𝒮𝑊{\mathcal{S}}^{\prime}\in W, on a d𝖯K1(R(𝒮),K1)C0×d𝖯K1(𝒮,K1)subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝑅superscript𝒮subscriptsuperscript1𝐾subscript𝐶0subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscript𝒮subscriptsuperscript1𝐾\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}(R({\mathcal{S}}^{\prime}),{\mathbb{P}^{1}_{K}})\geq C_{0}\times\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}}^{\prime},{\mathbb{P}^{1}_{K}}) ce qu’il fallait démontrer.

Si le point 𝒮𝒮{\mathcal{S}} est dans Crit(R)Crit𝑅\operatorname{Crit}(R), on se ramène au cas où 𝒮=R(𝒮)=0𝒮𝑅𝒮0{\mathcal{S}}=R({\mathcal{S}})=0 et dans une coordonnée adéquate R(z)=jkajzj𝑅𝑧subscript𝑗𝑘subscript𝑎𝑗superscript𝑧𝑗R(z)=\sum_{j\geq k}a_{j}z^{j} avec kdeg(R)1𝑘degree𝑅1k\leq\deg(R)-1, ak0subscript𝑎𝑘0a_{k}\neq 0 et 1|aj|01subscript𝑎𝑗01\geq|a_{j}|\to 0. Notons que sup|zw|τ|zjwj|=τjsubscriptsupremum𝑧𝑤𝜏superscript𝑧𝑗superscript𝑤𝑗superscript𝜏𝑗\sup_{|z-w|\leq\tau}|z^{j}-w^{j}|=\tau^{j} pour tout τ[0,1]𝜏delimited-[]0.1\tau\in[0,1], où le supremum est pris sur tout z,wB(0,1)𝑧𝑤𝐵0.1z,w\in B(0,1). Fixons N𝑁N assez grand pour que pour tout τr𝜏𝑟\tau\leq r, on ait maxj1|aj|τj=maxjN|aj|τjsubscript𝑗1subscript𝑎𝑗superscript𝜏𝑗subscript𝑗𝑁subscript𝑎𝑗superscript𝜏𝑗\max_{j\geq 1}|a_{j}|\tau^{j}=\max_{j\leq N}|a_{j}|\tau^{j}. Prenons zB(0,1)𝑧𝐵0.1z\in B(0,1) et τr𝜏𝑟\tau\leq r. Alors sup|zw|τ|R(z)R(w)|=maxjN|aj|τj|ak|τksubscriptsupremum𝑧𝑤𝜏𝑅𝑧𝑅𝑤subscript𝑗𝑁subscript𝑎𝑗superscript𝜏𝑗subscript𝑎𝑘superscript𝜏𝑘\sup_{|z-w|\leq\tau}|R(z)-R(w)|=\max_{j\leq N}|a_{j}|\tau^{j}\geq|a_{k}|\tau^{k}. L’image d’une boule par R𝑅R étant une boule on conclut donc que R(𝖡(z,τ))𝖡(R(z),|ak|τk)𝖡𝑅𝑧subscript𝑎𝑘superscript𝜏𝑘𝑅𝖡𝑧𝜏R(\mathsf{B}(z,\tau))\supset\mathsf{B}(R(z),|a_{k}|\tau^{k}), ce qui implique d𝖯K1(R(𝒮),K1)|ak|d𝖯K1(𝒮,K1)ksubscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝑅𝒮subscriptsuperscript1𝐾subscript𝑎𝑘subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscript𝒮subscriptsuperscript1𝐾𝑘\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}(R({\mathcal{S}}),{\mathbb{P}^{1}_{K}})\geq|a_{k}|\,\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},{\mathbb{P}^{1}_{K}})^{k}.

Ceci conclut la preuve de (3.3) dans le cas deg(R)=degtop(R)degree𝑅subscriptdegtop𝑅\deg(R)=\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R). Si ce n’est pas le cas, alors K𝐾K est de caractéristique positive p>0𝑝0p>0 et R𝑅R est la composée d’une fraction R0subscript𝑅0R_{0} vérifiant deg(R0)=degtop(R0)degreesubscript𝑅0subscriptdegtopsubscript𝑅0\deg(R_{0})=\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R_{0}) et d’un itéré de F(z):=zpassign𝐹𝑧superscript𝑧𝑝F(z):=z^{p}. On a vu que d𝖯K1(F(𝒮),K1)d𝖯K1(𝒮,K1)psubscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾𝐹𝒮subscriptsuperscript1𝐾subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscript𝒮subscriptsuperscript1𝐾𝑝\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}(F({\mathcal{S}}),{\mathbb{P}^{1}_{K}})\geq\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}({\mathcal{S}},{\mathbb{P}^{1}_{K}})^{p}, ce qui permet de conclure. ∎

3.3. Mélange et théorème limite central

La propriété d’équidistribution démontrée au paragraphe précédent permet de montrer l’ergodicité de la mesure d’équilibre, comme a été fait dans [FG, Lemme 4.11]. Afin d’avoir une estimation sur la vitesse de mélange nous utiliserons plutôt une méthode basée sur la notion d’énergie analogue de la preuve de Fornaess-Sibony [FS1, FS2] dans le cas complexe.

Rappelons tout d’abord quelques notions sur l’énergie des mesures. Nous renvoyons à [FR2] pour les détails. Une mesure signée ρ𝜌\rho est dite à potentiel continu s’il existe un potentiel continu g:K:𝑔subscript𝐾g:{\mathbb{H}_{K}}\to{\mathbb{R}} tel que Δg=ρρ(𝖯K1)[𝒮can]Δ𝑔𝜌𝜌subscriptsuperscript𝖯1𝐾delimited-[]subscript𝒮can\Delta g=\rho-\rho({\mathsf{P}^{1}_{K}})[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]. Si ρ,ρ𝜌superscript𝜌\rho,\rho^{\prime} sont deux mesures signées dont la mesure trace555toute mesure signée ρ𝜌\rho est différence de deux mesures positives à support disjoints, ρ=ρ1ρ2𝜌subscript𝜌1subscript𝜌2\rho=\rho_{1}-\rho_{2}, voir [Ru, §6]. La mesure trace |ρ|𝜌|\rho| est par définition la mesure positive ρ1+ρ2subscript𝜌1subscript𝜌2\rho_{1}+\rho_{2}. est à potentiel continu, on montre que la fonction logsup{𝒮,𝒮}supremum𝒮superscript𝒮\log\sup\{{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\} est intégrable pour la mesure ρρtensor-product𝜌superscript𝜌\rho\otimes\rho^{\prime} (voir [FR2, Lemme 4.3]), et on pose

(ρ,ρ):=𝖠K1×𝖠K1Diaglogsup{𝒮,𝒮}dρ(𝒮)dρ(𝒮).assign𝜌superscript𝜌subscriptsubscriptsuperscript𝖠1𝐾subscriptsuperscript𝖠1𝐾Diagsupremumtensor-product𝒮superscript𝒮𝑑𝜌𝒮𝑑superscript𝜌superscript𝒮(\rho,\rho^{\prime}):=-\int_{\mathsf{A}^{1}_{K}\times\mathsf{A}^{1}_{K}\setminus\mathrm{Diag}}\log\sup\{{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\}\ d\rho({\mathcal{S}})\otimes d\rho^{\prime}({\mathcal{S}}^{\prime})\leavevmode\nobreak\ .

Lorsque de plus ρ=Δg𝜌Δ𝑔\rho=\Delta g, on vérifie que (ρ,ρ)=𝖠K1g𝑑ρ𝜌superscript𝜌subscriptsubscriptsuperscript𝖠1𝐾𝑔differential-dsuperscript𝜌(\rho,\rho^{\prime})=-\int_{\mathsf{A}^{1}_{K}}g\,d\rho^{\prime}[FR2, Lemme 4.4]. Enfin, l’application ρ,ρ(ρ,ρ)maps-to𝜌superscript𝜌𝜌superscript𝜌\rho,\rho^{\prime}\mapsto(\rho,\rho^{\prime}) définit une forme bilinéaire symétrique sur l’espace des mesures signées dont la mesure trace est à potentiel continu et telles que ρ(𝖯K1)=ρ(𝖯K1)=0𝜌subscriptsuperscript𝖯1𝐾superscript𝜌subscriptsuperscript𝖯1𝐾0\rho({\mathsf{P}^{1}_{K}})=\rho^{\prime}({\mathsf{P}^{1}_{K}})=0. On montre que cette forme bilinéaire est définie positive, [FR2, Proposition 4.5]. On a donc l’inégalité de type Cauchy-Schwarz suivante :

(ρ,ρ)(ρ,ρ)1/2(ρ,ρ)1/2.𝜌superscript𝜌superscript𝜌𝜌12superscriptsuperscript𝜌superscript𝜌12(\rho,\rho^{\prime})\leq(\rho,\rho)^{1/2}\,(\rho^{\prime},\rho^{\prime})^{1/2}\leavevmode\nobreak\ .

D’autre part, une fonction ϕ:𝖯K1:italic-ϕsubscriptsuperscript𝖯1𝐾\phi:{\mathsf{P}^{1}_{K}}\to{\mathbb{R}} est dite de classe 𝒞1superscript𝒞1{\mathcal{C}}^{1}, si elle est localement constante hors d’un arbre fini et fermé 𝒯K𝒯subscript𝐾{\mathcal{T}}\subset{\mathbb{H}_{K}}, et si 𝒯𝒯{\mathcal{T}} est la réunion d’un nombre fini de segments sur lesquels ϕitalic-ϕ\phi est de classe 𝒞1superscript𝒞1{\mathcal{C}}^{1}, par rapport à la distance hyperbolique sur Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}. On définit alors pour chaque 𝒮K{𝒮can}𝒮subscript𝐾subscript𝒮can{\mathcal{S}}\in{\mathbb{H}_{K}}\setminus\{{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}\} le nombre ϕ(𝒮)italic-ϕ𝒮\partial\phi({\mathcal{S}}), comme la dérivée à gauche en 𝒮𝒮{\mathcal{S}} de l’application ϕitalic-ϕ\phi restreinte au segment [𝒮can,𝒮]subscript𝒮can𝒮[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}},{\mathcal{S}}] (paramétré par la distance hyperbolique à 𝒮cansubscript𝒮can{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}). Un calcul montre alors que

(Δϕ,Δϕ)=𝖯K1(ϕ)2𝑑λ,Δitalic-ϕΔitalic-ϕsubscriptsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscriptitalic-ϕ2differential-d𝜆(\Delta\phi,\Delta\phi)=\int_{{\mathsf{P}^{1}_{K}}}(\partial\phi)^{2}\,d\lambda\leavevmode\nobreak\ ,

λ𝜆\lambda est la mesure de Hausdorff 111-dimensionnelle sur chaque segment de Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}. Pour reprendre les notations de  [FR2, §5.5], on posera ϕ,ϕ:=𝖯K1(ϕ)2𝑑λassignitalic-ϕitalic-ϕsubscriptsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscriptitalic-ϕ2differential-d𝜆\langle\phi,\phi\rangle:=\int_{{\mathsf{P}^{1}_{K}}}(\partial\phi)^{2}\,d\lambda.

Rappelons finalement qu’une mesure invariante ρ𝜌\rho est mélangeante pour R𝑅R si pour tout couple de fonctions ϕ,ψ:𝖯K1:italic-ϕ𝜓subscriptsuperscript𝖯1𝐾\phi,\psi:{\mathsf{P}^{1}_{K}}\to{\mathbb{R}} de carré intégrable par rapport à ρ𝜌\rho, on a (ϕRn)ψ𝑑ρRϕ𝑑ρR×ψ𝑑ρitalic-ϕsuperscript𝑅𝑛𝜓differential-dsubscript𝜌𝑅italic-ϕdifferential-dsubscript𝜌𝑅𝜓differential-d𝜌\int(\phi\circ R^{n})\,\psi\,d\rho_{R}\to\int\phi\,d\rho_{R}\times\int\psi\,d\rho lorsque n+𝑛n\to+\infty. Une mesure mélangeante est ergodique au sens où tout sous-ensemble E𝐸E invariant est soit de mesure nulle soit de mesure totale.

Proposition 3.5.

La mesure ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} est mélangeante, et elle est exponentiellement mélangeante par rapport aux observables de classe 𝒞1superscript𝒞1{\mathcal{C}}^{1}. Plus précisément, il existe une constante C>0𝐶0C>0 telle que pour toute fonction ϕ:𝖯K1:italic-ϕsubscriptsuperscript𝖯1𝐾\phi:{\mathsf{P}^{1}_{K}}\to{\mathbb{R}} dans L(ρR)superscript𝐿subscript𝜌𝑅L^{\infty}(\rho_{R}), pour toute fonction ψ:𝖯K1:𝜓subscriptsuperscript𝖯1𝐾\psi:{\mathsf{P}^{1}_{K}}\to{\mathbb{R}} de classe 𝒞1superscript𝒞1{\mathcal{C}}^{1} sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}, et pour tout entier n0𝑛0n\geq 0 on a,

|(ϕRn)×ψdρRϕdρR×ψdρR|C×ϕL×ψ,ψ1/2×deg(R)n/2.\left|\int(\phi\circ R^{n})\times\psi\,d\rho_{R}-\int\phi\,d\rho_{R}\times\int\psi\,d\rho_{R}\right|\leq C\times\|\phi\|_{L^{\infty}}\times\langle\psi,\psi\rangle^{1/2}\times\deg(R)^{-n/2}\leavevmode\nobreak\ . (3.4)

La démonstration de cette proposition est ci-dessous. Rappelons qu’une fonction intégrable ψ:𝖯K1:𝜓subscriptsuperscript𝖯1𝐾\psi:{\mathsf{P}^{1}_{K}}\to{\mathbb{R}} de moyenne nulle ψ𝑑ρR=0𝜓differential-dsubscript𝜌𝑅0\int\psi\,d\rho_{R}=0 vérifie le théorème limite central de poids σ>0𝜎0\sigma>0, si pour tout intervalle I𝐼I de {\mathbb{R}} on a

limn+ρR{1nk=0n1ψRkI}=12πσIexp(x22σ2)𝑑x.subscript𝑛subscript𝜌𝑅1𝑛superscriptsubscript𝑘0𝑛1𝜓superscript𝑅𝑘𝐼12𝜋𝜎subscript𝐼superscript𝑥22superscript𝜎2differential-d𝑥\lim_{n\to+\infty}\rho_{R}\left\{\frac{1}{\sqrt{n}}\sum_{k=0}^{n-1}\psi\circ R^{k}\in I\right\}=\frac{1}{\sqrt{2\pi\sigma}}\int_{I}\exp\left(-\frac{x^{2}}{2\sigma^{2}}\right)\,dx\leavevmode\nobreak\ .

La décroissance exponentielle des corrélations combinée au théorème de Gordin-Liverani (voir [Go, Li]) donne facilement le résultat suivant.

Proposition 3.6.

Pour toute fonction ψ:𝖯K1:𝜓subscriptsuperscript𝖯1𝐾\psi:{\mathsf{P}^{1}_{K}}\to{\mathbb{R}} de classe 𝒞1superscript𝒞1{\mathcal{C}}^{1} telle que ψ𝑑ρR=0𝜓differential-dsubscript𝜌𝑅0\int\psi\,d\rho_{R}=0, le nombre

ψ2𝑑ρR+2n=0(ψRn)×ψ𝑑ρR,superscript𝜓2differential-dsubscript𝜌𝑅2superscriptsubscript𝑛0𝜓superscript𝑅𝑛𝜓differential-dsubscript𝜌𝑅-\int\psi^{2}\,d\rho_{R}+2\sum_{n=0}^{\infty}\int(\psi\circ R^{n})\times\psi\,d\rho_{R}\leavevmode\nobreak\ ,

est fini, positif et il est égal à 00 si et seulement si la fonction ψ𝜓\psi est un cobord, i.e., s’il existe une fonction mesurable χ𝜒\chi telle que ψ=χχR𝜓𝜒𝜒𝑅\psi=\chi-\chi\circ R. De plus, lorsque ce nombre est strictement positif, on note σ>0𝜎0\sigma>0 sa racine carrée positive, et la fonction ψ𝜓\psi vérifie le théorème limite central pour le poids σ𝜎\sigma.

Démonstration.

La preuve est maintenant classique, voir [CLB, DS3]. Notons Rsuperscript𝑅R^{*} l’opérateur de composition agissant sur L2(ρR)superscript𝐿2subscript𝜌𝑅L^{2}(\rho_{R}). L’invariance RρR=ρRsubscript𝑅subscript𝜌𝑅subscript𝜌𝑅R_{*}\rho_{R}=\rho_{R} implique l’égalité |Rψ|2𝑑ρR=|ψ|2𝑑ρRsuperscriptsuperscript𝑅𝜓2differential-dsubscript𝜌𝑅superscript𝜓2differential-dsubscript𝜌𝑅\int|R^{*}\psi|^{2}\,d\rho_{R}=\int|\psi|^{2}\,d\rho_{R} donc Rsuperscript𝑅R^{*} est une isométrie. Soit ΛΛ\Lambda l’adjoint de Rsuperscript𝑅R^{*}. L’équation d’invariance RρR=deg(R)ρRsuperscript𝑅subscript𝜌𝑅degree𝑅subscript𝜌𝑅R^{*}\rho_{R}=\deg(R)\rho_{R} montre facilement que Λ=deg(R)1R\Lambda=\deg(R)^{-1}\,R_{*}.

D’après le théorème de Gordin-Liverani [Go, Li], pour montrer qu’une fonction ψL(ρR)𝜓superscript𝐿subscript𝜌𝑅\psi\in L^{\infty}(\rho_{R}) satisfaisant ψ𝑑ρR=0𝜓differential-dsubscript𝜌𝑅0\int\psi d\rho_{R}=0 vérifie les assertions de la proposition, il suffit de vérifier n0ΛnψL1(ρR)<+subscript𝑛0subscriptnormsuperscriptΛ𝑛𝜓superscript𝐿1subscript𝜌𝑅\sum_{n\geq 0}\|\Lambda^{n}\psi\|_{L^{1}(\rho_{R})}<+\infty. Supposons alors que ψ𝜓\psi est de classe 𝒞1superscript𝒞1{\mathcal{C}}^{1} et appliquons la Proposition 3.5, en utilisant l’hypothèse ψ𝑑ρR=0𝜓differential-dsubscript𝜌𝑅0\int\psi\,d\rho_{R}=0. On obtient

|Λnψ|𝑑ρR=supϕL1Λnψ×ϕ𝑑ρR=supϕL1ψ×(ϕRn)𝑑ρRC×ψ,ψ1/2×deg(R)n/2.\int|\Lambda^{n}\psi|\,d\rho_{R}=\sup_{\|\phi\|_{L^{\infty}}\leq 1}\int\Lambda^{n}\psi\times\phi\,d\rho_{R}=\sup_{\|\phi\|_{L^{\infty}}\leq 1}\int\psi\times(\phi\circ R^{n})\,d\rho_{R}\\ \leq C\times\langle\psi,\psi\rangle^{1/2}\times\deg(R)^{-n/2}\leavevmode\nobreak\ .

On a donc bien la convergence désirée. ∎

Démonstration de la Proposition 3.5.

Quitte à remplacer ϕitalic-ϕ\phi par ϕϕ𝑑ρRitalic-ϕitalic-ϕdifferential-dsubscript𝜌𝑅\phi-\int\phi\leavevmode\nobreak\ d\rho_{R} on se ramène au cas où ϕ𝑑ρR=0italic-ϕdifferential-dsubscript𝜌𝑅0\int\phi\,d\rho_{R}=0, en utilisant ϕϕ𝑑ρRL2ϕLsubscriptnormitalic-ϕitalic-ϕdifferential-dsubscript𝜌𝑅superscript𝐿2subscriptnormitalic-ϕsuperscript𝐿\|\phi-\int\phi\,d\rho_{R}\|_{L^{\infty}}\leq 2\|\phi\|_{L^{\infty}}. On a donc les estimations:

|(ϕRn)ψ𝑑ρRϕ𝑑ρR×ψ𝑑ρR|=|(ϕRn)ψd(deg(R)nRnρR)|=deg(R)n|Rn((ϕRn)ψ)dρR|=deg(R)n|ϕRnψdρR|=deg(R)n|ψdRn(ϕρR)|=deg(R)n×(Δψ,Rn(ϕρR))deg(R)n×(Δψ,Δψ)1/2×(Rn(ϕρR),Rn(ϕρR))1/2.\left|\int(\phi\circ R^{n})\,\psi\,d\rho_{R}-\int\phi\,d\rho_{R}\times\int\psi\,d\rho_{R}\right|\\ =\left|\int(\phi\circ R^{n})\psi\,d(\deg(R)^{-n}R^{n*}\rho_{R})\right|\\ =\deg(R)^{-n}\left|\int R^{n}_{*}((\phi\circ R^{n})\psi)\,d\rho_{R}\right|=\deg(R)^{-n}\left|\int\phi R^{n}_{*}\psi\,d\rho_{R}\right|\\ =\deg(R)^{-n}\left|\int\psi\,dR^{n*}(\phi\rho_{R})\right|=\deg(R)^{-n}\times\left(\Delta\psi,\,R^{n*}(\phi\rho_{R})\right)\\ \leq\deg(R)^{-n}\times(\Delta\psi,\Delta\psi)^{1/2}\times(R^{n*}(\phi\rho_{R}),\,R^{n*}(\phi\rho_{R}))^{1/2}\leavevmode\nobreak\ .

Considérons le potentiel g:K:𝑔subscript𝐾g:{\mathbb{H}_{K}}\to{\mathbb{R}}, défini par

g(𝒮)=𝖯K1𝒮,𝒮𝒮canϕ𝑑ρR(𝒮),𝑔𝒮subscriptsubscriptsuperscript𝖯1𝐾subscript𝒮superscript𝒮subscript𝒮canitalic-ϕdifferential-dsubscript𝜌𝑅superscript𝒮g({\mathcal{S}})=-\int_{{\mathsf{P}^{1}_{K}}}\langle{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\rangle_{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}\,\phi\,d\rho_{R}({\mathcal{S}}^{\prime})\leavevmode\nobreak\ ,

de telle sorte que Δg=ϕρRΔ𝑔italic-ϕsubscript𝜌𝑅\Delta g=\phi\rho_{R}. On a alors :

|(Rn(ϕρR),Rn(ϕρR))|=|gRnd(Rn(ϕρR))|=|Rn(gRn)ϕ𝑑ρR|=deg(R)n×|gϕdρR|deg(R)n×gL×ϕLdeg(R)n×(𝖯K1𝒮,𝒮𝒮candρR(𝒮))×ϕL2.|(R^{n*}(\phi\rho_{R}),\,R^{n*}(\phi\rho_{R}))|=\left|\int g\circ R^{n}\,d(R^{n*}(\phi\rho_{R}))\right|=\left|\int R^{n}_{*}(g\circ R^{n})\phi\,d\rho_{R}\right|\\ =\deg(R)^{n}\times\left|\int g\phi\,d\rho_{R}\right|\leq\deg(R)^{n}\times\|g\|_{L^{\infty}}\times\|\phi\|_{L^{\infty}}\\ \leq\deg(R)^{n}\times\left(\int_{{\mathsf{P}^{1}_{K}}}\langle{\mathcal{S}},{\mathcal{S}}^{\prime}\rangle_{{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}}d\rho_{R}({\mathcal{S}}^{\prime})\right)\times\|\phi\|_{L^{\infty}}^{2}\leavevmode\nobreak\ .

Ceci termine la démonstration de (3.4). Il reste à montrer que la mesure ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} est mélangeante. La preuve ci-dessus montre que la convergence désirée est vérifiée lorsque ϕitalic-ϕ\phi et ψ𝜓\psi sont de classe 𝒞1superscript𝒞1{\mathcal{C}}^{1}. On remarque alors que les fonctions de classe 𝒞1superscript𝒞1{\mathcal{C}}^{1} forment une algèbre contenant les fonctions constantes. Cette algèbre est dense dans l’ensemble des fonctions continues (pour la topologie compacte) par le théorème de Stone-Weierstrass. On a donc convergence dès que ϕitalic-ϕ\phi et ψ𝜓\psi sont continues. Enfin ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} est une mesure régulière dont le support est compact et métrisable. Par conséquent l’ensemble des fonctions continues définies sur le support de ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} est dense dans L1(ρR)superscript𝐿1subscript𝜌𝑅L^{1}(\rho_{R}). Ce qui conclut la preuve. ∎

3.4. Démonstration du Théorème B

Pour chaque entier n1𝑛1n\geq 1 on pose Dn:=deg(R)n+deg(S)D_{n}:=\deg(R)^{n}+\deg(S) et on définit la fonction An:𝖯K1[,0]:subscript𝐴𝑛subscriptsuperscript𝖯1𝐾delimited-[].0A_{n}:{\mathsf{P}^{1}_{K}}\to[-\infty,0] par

An:=Rn,S𝒮can,assignsubscript𝐴𝑛subscriptsuperscript𝑅𝑛𝑆subscript𝒮canA_{n}:=-\langle R^{n},S\rangle_{{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}}\leavevmode\nobreak\ ,

de telle sorte que

expAn=sup{Rn,S}max{1,|Rn|}×max{1,|S|}subscript𝐴𝑛supremumsuperscript𝑅𝑛𝑆1superscript𝑅𝑛1𝑆\exp A_{n}=\frac{\sup\{R^{n},S\}}{\max\{1,|R^{n}|\}\times\max\{1,|S|\}}

sur 𝖯K1{Rn= ou S=}subscriptsuperscript𝖯1𝐾superscript𝑅𝑛 ou 𝑆{\mathsf{P}^{1}_{K}}\setminus\{R^{n}=\infty\text{ ou }S=\infty\}, et exp(An)12d𝖯K1(Rn,S)subscript𝐴𝑛12subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾superscript𝑅𝑛𝑆\exp(A_{n})\geq\tfrac{1}{2}\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}(R^{n},S) avec égalité sur K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}. De

An(z)=log|Rn(z)S(z)|logmax{1,|Rn(z)|}logmax{1,|S(z)|},subscript𝐴𝑛𝑧superscript𝑅𝑛𝑧𝑆𝑧1superscript𝑅𝑛𝑧1𝑆𝑧A_{n}(z)=\log|R^{n}(z)-S(z)|-\log\max\{1,|R^{n}(z)|\}-\log\max\{1,|S(z)|\},

on tire

ΔAn=[Rn=S]Rn[𝒮can]S[𝒮can].Δsubscript𝐴𝑛delimited-[]superscript𝑅𝑛𝑆superscript𝑅𝑛delimited-[]subscript𝒮cansuperscript𝑆delimited-[]subscript𝒮can\Delta A_{n}=[R^{n}=S]-R^{n*}[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]-S^{*}[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]\leavevmode\nobreak\ .

Comme dans la preuve de la Proposition-Définition 3.1 on choisit un potentiel g𝑔g tel que

Δg=(deg(R))1R[𝒮can][𝒮can],Δ𝑔superscriptdegree𝑅1superscript𝑅delimited-[]subscript𝒮candelimited-[]subscript𝒮can\Delta g=(\deg(R))^{-1}R^{*}[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]-[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}],

et pour chaque entier n1𝑛1n\geq 1 on pose

gn=k=0n1deg(R)kgRk.g_{n}=\sum_{k=0}^{n-1}\deg(R)^{-k}\,g\circ R^{k}.

D’autre part on choisit un potentiel hh tel que

Δh=(deg(S))1S[𝒮can][𝒮can],Δsuperscriptdegree𝑆1superscript𝑆delimited-[]subscript𝒮candelimited-[]subscript𝒮can\Delta h=(\deg(S))^{-1}S^{*}[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]-[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}],

et pour chaque entier n1𝑛1n\geq 1 on pose

hn:=Dn1(deg(Rn)gn+deg(S)h).assignsubscript𝑛superscriptsubscript𝐷𝑛1degreesuperscript𝑅𝑛subscript𝑔𝑛degree𝑆h_{n}:=D_{n}^{-1}(\deg(R^{n})g_{n}+\deg(S)h)\leavevmode\nobreak\ .

On vérifie alors qu’on a

Δ(hn+Dn1An)=Dn1[Rn=S][𝒮can].Δsubscript𝑛superscriptsubscript𝐷𝑛1subscript𝐴𝑛superscriptsubscript𝐷𝑛1delimited-[]superscript𝑅𝑛𝑆delimited-[]subscript𝒮can\Delta(h_{n}+D_{n}^{-1}A_{n})=D_{n}^{-1}[R^{n}=S]-[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]\leavevmode\nobreak\ .

Comme dans la preuve de la Proposition-Définition 3.1 on montre que les potentiels hnsubscript𝑛h_{n} convergent alors uniformément sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} vers

g:=k=0deg(R)kgRk.g_{\infty}:=\sum_{k=0}^{\infty}\deg(R)^{-k}\,g\circ R^{k}\leavevmode\nobreak\ .

En particulier, pour tout n1𝑛1n\geq 1 on a hn+Dn1An𝒫+subscript𝑛superscriptsubscript𝐷𝑛1subscript𝐴𝑛subscript𝒫h_{n}+D_{n}^{-1}A_{n}\in{\mathcal{P}}_{+}. Cette suite est de plus uniformément majorée car An0subscript𝐴𝑛0A_{n}\leq 0. La Proposition 2.18 implique donc qu’il existe une suite strictement croissante d’entiers positifs {nk}k1subscriptsubscript𝑛𝑘𝑘1\{n_{k}\}_{k\geq 1} telle que Dnk1Anksuperscriptsubscript𝐷subscript𝑛𝑘1subscript𝐴subscript𝑛𝑘D_{n_{k}}^{-1}A_{n_{k}} converge ponctuellement sur Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}} vers une fonction continue ψ:K(,+):𝜓subscript𝐾\psi:{\mathbb{H}_{K}}\to(-\infty,+\infty) qui est, soit la fonction constante égale à -\infty, soit un potentiel tel que g+ψ𝒫+subscript𝑔𝜓subscript𝒫g_{\infty}+\psi\in{\mathcal{P}}_{+}. Dans les deux cas la fonction ψ𝜓\psi s’étend de façon unique à 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}, en une fonction continue sur chaque segment, et semi-continue supérieurement sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}.

Pour finir la démonstration du théorème il suffit donc de montrer que ψ𝜓\psi est constante. Comme ψ𝜓\psi est continue sur chaque segment de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} et comme ψ0𝜓0\psi\leq 0 (car An0subscript𝐴𝑛0A_{n}\leq 0), il suffit de montrer ψ𝜓\psi est localement constante sur l’ensemble ouvert {ψ<0}𝜓0\{\psi<0\}. Soit U𝑈U un ouvert fondamental dont la fermeture topologique est contenue dans {ψ<0}𝜓0\{\psi<0\}. On montre tout d’abord que S(U¯)𝑆¯𝑈S(\overline{U}) est contenu dans l’ensemble de quasi-périodicité Rsubscript𝑅{\mathcal{E}}_{R} de R𝑅R. Lorsque pour chaque ε>0𝜀0\varepsilon>0 on applique le lemme de Hartogs (Proposition 2.18) à φε𝜑𝜀\varphi\equiv-\varepsilon et 𝒞:=U¯assign𝒞¯𝑈{\mathcal{C}}:=\overline{U}, on obtient que l’application Rnksuperscript𝑅subscript𝑛𝑘R^{n_{k}} converge uniformément vers S𝑆S sur U¯¯𝑈\overline{U}. Ceci implique que pour tout k𝑘k suffisament grand on a Rnk(U)=S(U)superscript𝑅subscript𝑛𝑘𝑈𝑆𝑈R^{n_{k}}(U)=S(U), et par conséquent que Rnk+1nksuperscript𝑅subscript𝑛𝑘1subscript𝑛𝑘R^{n_{k+1}-n_{k}} converge vers l’identité sur S(U)𝑆𝑈S(U). On a donc S(U)R𝑆𝑈subscript𝑅S(U)\subset{\mathcal{E}}_{R}, et en particulier Rsubscript𝑅{\mathcal{E}}_{R}\neq\emptyset.

Le Lemme 2.14 implique alors que la caractéristique résiduelle de K𝐾K est positive, égale à un nombre premier p𝑝p. Soit Y𝑌Y la composante connexe de Rsubscript𝑅{\mathcal{E}}_{R} contenant S(U)𝑆𝑈S(U). Après changement de coordonnée on suppose que Y𝑌\infty\not\in Y. Soit n1𝑛1n\geq 1 l’entier et T:p×YY:𝑇subscript𝑝𝑌𝑌T:{\mathbb{Z}}_{p}\times Y\to Y l’action donnés par le Théorème 2.15. Quitte à prendre une sous-suite on peut supposer que Rn1(U)=S(U)Ysuperscript𝑅subscript𝑛1𝑈𝑆𝑈𝑌R^{n_{1}}(U)=S(U)\subset Y, que pour chaque k1𝑘1k\geq 1 l’entier n𝑛n divise nkn1subscript𝑛𝑘subscript𝑛1n_{k}-n_{1}, et que ak:=n1(nkn1)assignsubscript𝑎𝑘superscript𝑛1subscript𝑛𝑘subscript𝑛1a_{k}:=n^{-1}(n_{k}-n_{1}) converge dans psubscript𝑝{\mathbb{Z}}_{p} vers un certain w0psubscript𝑤0subscript𝑝w_{0}\in{\mathbb{Z}}_{p} lorsque k+𝑘k\to+\infty. Comme Rnksuperscript𝑅subscript𝑛𝑘R^{n_{k}} converge uniformément vers S𝑆S sur U𝑈U, on conclut qu’on a S=Tw0Rn1𝑆superscript𝑇subscript𝑤0superscript𝑅subscript𝑛1S=T^{w_{0}}\circ R^{n_{1}} sur U𝑈U. Le Théorème 2.15 implique alors qu’on a

Rakn+n1Sakw0=(Takw0T0akw0)STS,superscript𝑅subscript𝑎𝑘𝑛subscript𝑛1𝑆subscript𝑎𝑘subscript𝑤0superscript𝑇subscript𝑎𝑘subscript𝑤0superscript𝑇0subscript𝑎𝑘subscript𝑤0𝑆subscript𝑇𝑆\frac{R^{a_{k}n+n_{1}}-S}{a_{k}-w_{0}}=\left(\frac{T^{a_{k}-w_{0}}-T^{0}}{a_{k}-w_{0}}\right)\circ S\to T_{*}\circ S,

localement uniformément sur U𝑈U lorsque n+𝑛n\to+\infty. On a donc

ψ=limk+Dnk1Ank=limk+Dnk1(log|akw0|+log|TS|)=limk+Dnk1log|akw0|𝜓subscript𝑘superscriptsubscript𝐷subscript𝑛𝑘1subscript𝐴subscript𝑛𝑘subscript𝑘superscriptsubscript𝐷subscript𝑛𝑘1subscript𝑎𝑘subscript𝑤0subscript𝑇𝑆subscript𝑘superscriptsubscript𝐷subscript𝑛𝑘1subscript𝑎𝑘subscript𝑤0\psi=\lim_{k\to+\infty}D_{n_{k}}^{-1}A_{n_{k}}=\lim_{k\to+\infty}D_{n_{k}}^{-1}\left(\log|a_{k}-w_{0}|+\log|T_{*}\circ S|\right)=\\ \lim_{k\to+\infty}D_{n_{k}}^{-1}\log|a_{k}-w_{0}|

ponctuellement sur UK𝑈subscript𝐾U\cap{\mathbb{H}_{K}}. Ceci montre que ψ𝜓\psi est localement constante sur {ψ<0}𝜓0\{\psi<0\}, et termine la démonstration.

4. Entropie

4.1. Entropie topologique dans les espaces compacts

L’espace 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} est compact mais non métrisable en général. Les définitions et propriétés de l’entropie souvent décrites dans le cadre restreint des espaces métriques (voir [W]) restent cependant valables dans notre cadre. Nous renvoyons à [Mis] pour plus de détails sur les preuves. Nous rappelons ici brièvement quelques définitions.

Soit X𝑋X un espace compact et f:XX:𝑓𝑋𝑋f:X\to X une application continue. Étant donné un recouvrement ouvert fini 𝔘𝔘{\mathfrak{U}} de X𝑋X, on note N(𝔘)𝑁𝔘N({\mathfrak{U}}) le nombre minimal d’ouverts de la famille nécessaire pour recouvrir X𝑋X. Si 𝔙𝔙{\mathfrak{V}} est un autre recouvrement ouvert fini de X𝑋X, on note

𝔘𝔙:={UV,U𝔘,V𝔙}.{\mathfrak{U}}\vee{\mathfrak{V}}:=\{U\cap V,\,U\in{\mathfrak{U}},\,V\in{\mathfrak{V}}\}.

C’est aussi un recouvrement ouvert fini de X𝑋X. L’entropie topologique de f𝑓f notée htop(f)subscripttop𝑓h_{\mathrm{top}}\,(f) est alors définie comme suit:

htop(f):=sup𝔘limn1nlogN(i=0n1fi𝔘).assignsubscripttop𝑓subscriptsupremum𝔘subscript𝑛1𝑛𝑁superscriptsubscript𝑖0𝑛1superscript𝑓𝑖𝔘h_{\mathrm{top}}\,(f):=\sup_{\mathfrak{U}}\lim_{n\to\infty}\frac{1}{n}\log N\left(\bigvee_{i=0}^{n-1}f^{-i}{\mathfrak{U}}\right)\leavevmode\nobreak\ .

Le supremum est ici pris sur tous les recouvrements ouverts finis de X𝑋X.

Si ρ𝜌\rho est une mesure de probabilité f𝑓f-invariante fρ=ρsubscript𝑓𝜌𝜌f_{*}\rho=\rho, on peut aussi définir l’entropie métrique de f𝑓f par rapport à ρ𝜌\rho. L’entropie d’une partition 𝔄𝔄{\mathfrak{A}} finie de X𝑋X par des ensembles mesurables est donnée par H(𝔄)=A𝔄ρ(A)logρ(A)𝐻𝔄subscript𝐴𝔄𝜌𝐴𝜌𝐴H({\mathfrak{A}})=-\sum_{A\in{\mathfrak{A}}}\rho(A)\log\rho(A). L’entropie de f𝑓f notée hρ(f)subscript𝜌𝑓h_{\rho}(f) est alors:

hρ(f):=sup𝔄limn1nH(𝔄n)assignsubscript𝜌𝑓subscriptsupremum𝔄subscript𝑛1𝑛𝐻subscript𝔄𝑛h_{\rho}(f):=\sup_{\mathfrak{A}}\lim_{n\to\infty}\frac{1}{n}H({\mathfrak{A}}_{n})

𝔄n=𝔄f1𝔄fn𝔄subscript𝔄𝑛𝔄superscript𝑓1𝔄superscript𝑓𝑛𝔄{\mathfrak{A}}_{n}={\mathfrak{A}}\vee f^{-1}{\mathfrak{A}}\vee\cdots\vee f^{-n}{\mathfrak{A}} et le supremum est pris sur toutes les partitions de X𝑋X finies par des ensembles mesurables.

On rappelle maintenant le principe variationnel.

Proposition 4.1 (Principe Variationnel).

Soit X𝑋X un espace topologique compact et soit f:XX:𝑓𝑋𝑋f:X\to X une application continue. Alors on a htop(f)=supρhρ(f)subscripttop𝑓subscriptsupremum𝜌subscript𝜌𝑓h_{\mathrm{top}}\,(f)=\sup_{\rho}h_{\rho}(f), où le supremum est pris sur l’ensemble de toutes les mesures de probabilité invariantes par f𝑓f.

Rappelons de plus, que l’ensemble des mesures de probabilité invariantes est un convexe compact pour la convergence vague dont les points extrémaux sont exactement les mesures ergodiques. On montre alors que toute mesure invariante ρ𝜌\rho est «   moyenne   » de mesures ergodiques (c’est la décomposition de Choquet). En particulier, htop(f)subscripttop𝑓h_{\mathrm{top}}\,(f) est aussi égal au suprémum hρ(f)subscript𝜌𝑓h_{\rho}(f) pris sur l’ensemble des mesure ergodiques. Nous renvoyons à [W] pour plus de précisions.

4.2. Démonstration du Théorème C

La démonstration du Théorème C s’appuie sur deux lemmes. On commence avec la propriété générale suivante.

Lemme 4.2.

Soit X𝑋X un espace topologique séparé et connexe, et soit 𝔘𝔘{\mathfrak{U}} un recouvrement fini de X𝑋X par des ensembles ouverts et connexes, tel que l’ensemble

𝔘:=U𝔘Uassign𝔘subscript𝑈𝔘𝑈\partial{\mathfrak{U}}:=\bigcup_{U\in{\mathfrak{U}}}\partial U

soit fini et non vide. Alors on a N(𝔘)#𝔘𝑁𝔘#𝔘N({\mathfrak{U}})\leq\#\partial{\mathfrak{U}}.

Démonstration.

Pour chaque x𝔘𝑥𝔘x\in\partial{\mathfrak{U}} on choisit un élément Uxsubscript𝑈𝑥U_{x} de 𝔘𝔘{\mathfrak{U}} contenant x𝑥x. Il suffit de montrer que pour chaque xXsuperscript𝑥𝑋x^{\prime}\in X il existe xX𝑥𝑋x\in X tel que Uxsubscript𝑈𝑥U_{x} contient xsuperscript𝑥x^{\prime}. Lorsque x𝔘superscript𝑥𝔘x^{\prime}\in\partial{\mathfrak{U}} il n’y a rien a montrer. On se ramène alors au cas où x𝔘superscript𝑥𝔘x^{\prime}\not\in\partial{\mathfrak{U}}. Notons Y𝑌Y la composante connexe de X𝔘𝑋𝔘X\setminus\partial{\mathfrak{U}} contenant xsuperscript𝑥x^{\prime}. Comme l’ensemble 𝔘𝔘\partial{\mathfrak{U}} est fini et donc fermé, on a Y𝔘𝑌𝔘\partial Y\subset\partial{\mathfrak{U}}. Du fait que X𝑋X est connexe et U𝑈\partial U est non vide, on conclut que l’ensemble Y𝑌\partial Y est non vide. Soit xY𝑥𝑌x\in\partial Y et notons que Uxsubscript𝑈𝑥U_{x} rencontre Y𝑌Y. Comme Y𝑌Y est connexe et comme Uxsubscript𝑈𝑥\partial U_{x} est disjoint de Y𝑌Y, on a xYUxsuperscript𝑥𝑌subscript𝑈𝑥x^{\prime}\in Y\subset U_{x}. ∎

Lemme 4.3.

Soit R𝑅R une fraction rationnelle de degré au moins deux à coefficients dans K𝐾K, et soit X𝑋X une partie compacte et connexe de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} invariante par R𝑅R. Alors on a

htop(R|X)logsup{#(R|X)1(𝒮)𝒮X}.subscripttopevaluated-at𝑅𝑋supremumconditional#superscriptevaluated-at𝑅𝑋1𝒮𝒮𝑋h_{\mathrm{top}}\,(R|_{X})\leq\log\sup\{\#(R|_{X})^{-1}({\mathcal{S}})\mid{\mathcal{S}}\in X\}.
Démonstration.

On pose,

D:=sup{#(R|X)1(𝒮)𝒮X}.assign𝐷supremumconditional#superscriptevaluated-at𝑅𝑋1𝒮𝒮𝑋D:=\sup\{\#(R|_{X})^{-1}({\mathcal{S}})\mid{\mathcal{S}}\in X\}.

Au vu du Lemme 4.2 il suffit de montrer que pour tout recouvrement fini 𝔘𝔘{\mathfrak{U}} de X𝑋X on a

lim supn+1nlog#(j=0n1(R|X)j𝔘)logD.subscriptlimit-supremum𝑛1𝑛#superscriptsubscript𝑗0𝑛1superscriptevaluated-at𝑅𝑋𝑗𝔘𝐷\limsup_{n\to+\infty}\frac{1}{n}\log\#\partial\left(\bigvee_{j=0}^{n-1}(R|_{X})^{-j}{\mathfrak{U}}\right)\leq\log D.

Soit 𝔘𝔘{\mathfrak{U}} un tel recouvrement. Comme les ouverts fondamentaux forment un base de la topologie de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}, on se ramène au cas où chaque élément de 𝔘𝔘{\mathfrak{U}} est l’intersection d’un ouvert fondamentaux de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} avec X𝑋X. Alors l’ensemble 𝔘𝔘\partial{\mathfrak{U}} est fini. S’il est vide, alors on a X𝔘𝑋𝔘X\in{\mathfrak{U}} et alors l’assertion est immédiate dans ce cas. On se ramène alors au cas où l’ensemble 𝔘𝔘\partial{\mathfrak{U}} n’est pas vide. L’inclusion

(j=0n1(R|X)j𝔘)j=0n1(R|X)j𝔘,superscriptsubscript𝑗0𝑛1superscriptevaluated-at𝑅𝑋𝑗𝔘superscriptsubscript𝑗0𝑛1superscriptevaluated-at𝑅𝑋𝑗𝔘\partial\left(\bigvee_{j=0}^{n-1}(R|_{X})^{-j}{\mathfrak{U}}\right)\subset\bigcup_{j=0}^{n-1}(R|_{X})^{-j}\partial{\mathfrak{U}},

implique qu’on a

(j=0n1(R|X)j𝔘)#𝔘×(1+D++Dn1)#𝔘×nDn1,superscriptsubscript𝑗0𝑛1superscriptevaluated-at𝑅𝑋𝑗𝔘#𝔘1𝐷superscript𝐷𝑛1#𝔘𝑛superscript𝐷𝑛1\partial\left(\bigvee_{j=0}^{n-1}(R|_{X})^{-j}{\mathfrak{U}}\right)\leq\#\partial{\mathfrak{U}}\times(1+D+\cdots+D^{n-1})\leq\#\partial{\mathfrak{U}}\times nD^{n-1},

d’où l’on déduit l’inégalité désirée. ∎

Démonstration du Théorème C.

L’inégalité hρR(R)htop(R)subscriptsubscript𝜌𝑅𝑅subscripttop𝑅h_{\rho_{R}}(R)\leq h_{\mathrm{top}}\,(R) est conséquence du principe variationnel (ou Proposition 4.1). L’inégalité htop(R)logdegtop(R)subscripttop𝑅subscriptdegtop𝑅h_{\mathrm{top}}\,(R)\leq\log\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R) est donnée par le Lemme 4.3 avec X=𝖯K1𝑋subscriptsuperscript𝖯1𝐾X={\mathsf{P}^{1}_{K}}.

Il reste à montrer l’égalité htop(R)=htop(R|JR)subscripttop𝑅subscripttopevaluated-at𝑅subscript𝐽𝑅h_{\mathrm{top}}\,(R)=h_{\mathrm{top}}\,(R|_{J_{R}}). Au vu du principe variationnel, il suffit de montrer que pour toute mesure de probabilité ρ𝜌\rho invariante par R𝑅R et ne chargeant pas JRsubscript𝐽𝑅J_{R}, on a hρ(R)=0subscript𝜌𝑅0h_{\rho}(R)=0. On se ramème au cas où ρ𝜌\rho est ergodique. Le théorème de récurrence de Poincaré montre le support topologique de ρ𝜌\rho est disjoint de l’ouvert des points errants. En particulier, ρ𝜌\rho ne charge pas les composantes de Fatou errantes, ou strictement prépériodiques. Comme ρ𝜌\rho est de plus ergodique, on peut trouver une composante connexe U𝑈U de FRsubscript𝐹𝑅F_{R} périodique et un entier N1𝑁1N\geq 1 tel que RN(U)=Usuperscript𝑅𝑁𝑈𝑈R^{N}(U)=U et ρ(k=0N1Rk(U))=1𝜌superscriptsubscript𝑘0𝑁1superscript𝑅𝑘𝑈1\rho\left(\bigcup_{k=0}^{N-1}R^{k}(U)\right)=1.

Si U𝑈U est le bassin d’attraction immédiat d’un point périodique attractif, alors ρ𝜌\rho charge ce point et est donc à support fini par ergodicité. Son entropie est donc nulle. Sinon, la Proposition 2.16 implique que RNsuperscript𝑅𝑁R^{N} est injective sur U𝑈U, et alors RNsuperscript𝑅𝑁R^{N} est injective sur X:=U¯assign𝑋¯𝑈X:=\overline{U}. Comme X𝑋X est un sous-ensemble compact et connexe de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} invariant par RNsuperscript𝑅𝑁R^{N}, le Lemme 4.3 appliqué à Rnsuperscript𝑅𝑛R^{n} au lieu de R𝑅R, implique que htop(Rn|X)=0subscripttopevaluated-atsuperscript𝑅𝑛𝑋0h_{\mathrm{top}}\,(R^{n}|_{X})=0. Le principe variationnel nous donne alors hρ(R)=1Nhρ|U(RN)=0subscript𝜌𝑅1𝑁subscriptevaluated-at𝜌𝑈superscript𝑅𝑁0h_{\rho}(R)=\frac{1}{N}h_{\rho|_{U}}(R^{N})=0. ∎

4.3. Preuve des Théorèmes D et E

La preuve du Théorème D s’appuie sur le lemme suivant. Rappelons que pour une mesure de probabilité ρ𝜌\rho sur 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} le Jacobien Jacρ:𝖯K1[0,+]:subscriptJac𝜌subscriptsuperscript𝖯1𝐾0\operatorname{Jac}_{\rho}:{\mathsf{P}^{1}_{K}}\to[0,+\infty] de R𝑅R pour ρ𝜌\rho est la fonction mesurable caractérisée, en dehors d’un ensemble de mesure zero, par la propriété suivante. Pour tout ensemble borélien E𝐸E sur lequel R𝑅R est injective, on a ρ(R(E))=EJacρdρ𝜌𝑅𝐸subscript𝐸subscriptJac𝜌𝑑𝜌\rho(R(E))=\int_{E}\operatorname{Jac}_{\rho}\,d\rho. Une telle fonction existe toujours dans notre cas. Nous renvoyons à [PU, §1.9] ou [P] pour plus de détails.

Lemme 4.4.
  1. 1.

    Soit E𝐸E un sous ensemble borélien de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}} et soit 𝟏Esubscript1𝐸\mathbf{1}_{E} la fonction caractéristique de E𝐸E. Alors on a,

    R𝟏E𝑑ρR=deg(R)𝟏E𝑑ρR.subscript𝑅subscript1𝐸differential-dsubscript𝜌𝑅degree𝑅subscript1𝐸differential-dsubscript𝜌𝑅\int R_{*}\mathbf{1}_{E}\,d\rho_{R}=\deg(R)\int\mathbf{1}_{E}\,d\rho_{R}\leavevmode\nobreak\ . (4.1)
  2. 2.

    On a

    JacρR(𝒮)=deg(R)/degR(𝒮).subscriptJacsubscript𝜌𝑅𝒮degree𝑅subscriptdegree𝑅𝒮\operatorname{Jac}_{\rho_{R}}({\mathcal{S}})=\deg(R)/\deg_{R}({\mathcal{S}}).
Démonstration du Lemme 4.4.

1. Nous remercions le rapporteur de nous avoir fourni la preuve suivante. Notons d’abord que l’équation RρR=deg(R)ρRsuperscript𝑅subscript𝜌𝑅degree𝑅subscript𝜌𝑅R^{*}\rho_{R}=\deg(R)\,\rho_{R} se traduit par l’égalité

Rϕ𝑑ρR=deg(R)ϕ𝑑ρRsubscript𝑅italic-ϕdifferential-dsubscript𝜌𝑅degree𝑅italic-ϕdifferential-dsubscript𝜌𝑅\int R_{*}\phi\,d\rho_{R}=\deg(R)\int\phi\,d\rho_{R} (4.2)

pour toute fonction continue ϕitalic-ϕ\phi. Par convergence dominée, on a (4.1) pour tout borélien E𝐸E tel qu’il existe une suite de fonctions continues φn:𝖯K1[0,1]:subscript𝜑𝑛subscriptsuperscript𝖯1𝐾delimited-[]0.1\varphi_{n}:{\mathsf{P}^{1}_{K}}\to[0,1] telle que φn𝟏Esubscript𝜑𝑛subscript1𝐸\varphi_{n}\to\mathbf{1}_{E} ponctuellement. Soit {\mathcal{F}} la collection de tous ces ensembles boréliens. Il est clair que {\mathcal{F}} est stable par intersection finie (prendre le produit des approximants continus), et par complémentaire (prendre 1φn1subscript𝜑𝑛1-\varphi_{n}). Il est aussi stable par intersection dénombrable par convergence monotone. On conclut en remarquant que {\mathcal{F}} contient toutes les boules fermées de 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}.

2. Soit E𝖯K1𝐸subscriptsuperscript𝖯1𝐾E\subset{\mathsf{P}^{1}_{K}} un ensemble borélien tel que R:ER(E):𝑅𝐸𝑅𝐸R:E\to R(E) soit bijective. Pour chaque k=1,,deg(R)𝑘1degree𝑅k=1,\ldots,\deg(R), notons Ek={𝒮E,degR(𝒮)=k}subscript𝐸𝑘formulae-sequence𝒮𝐸subscriptdegree𝑅𝒮𝑘E_{k}=\{{\mathcal{S}}\in E,\,\deg_{R}({\mathcal{S}})=k\}. De (4.1), on tire

deg(R)×ρR(Ek)=R𝟏Ek𝑑ρR=k×ρR(R(Ek)),degree𝑅subscript𝜌𝑅subscript𝐸𝑘subscript𝑅subscript1subscript𝐸𝑘differential-dsubscript𝜌𝑅𝑘subscript𝜌𝑅𝑅subscript𝐸𝑘\deg(R)\times\rho_{R}(E_{k})=\int R_{*}\mathbf{1}_{E_{k}}\,d\rho_{R}=k\times\rho_{R}(R(E_{k}))\leavevmode\nobreak\ ,

d’où,

ρR(R(E))=k=1deg(R)ρR(R(Ek))=Edeg(R)degR(𝒮)𝑑ρR(𝒮).subscript𝜌𝑅𝑅𝐸superscriptsubscript𝑘1degree𝑅subscript𝜌𝑅𝑅subscript𝐸𝑘subscript𝐸degree𝑅subscriptdegree𝑅𝒮differential-dsubscript𝜌𝑅𝒮\rho_{R}(R(E))=\sum_{k=1}^{\deg(R)}\rho_{R}(R(E_{k}))=\int_{E}\frac{\deg(R)}{\deg_{R}({\mathcal{S}})}\,d\rho_{R}({\mathcal{S}})\leavevmode\nobreak\ .

Démonstration du Théorème D.

La preuve de l’estimation (1.5) est une conséquence de la formule de Rokhlin [PU, §1.9] ou [P, §10] qui s’énonce sous la forme suivante:

hρR(R)log|JacρR(𝒮)|dρR(𝒮).subscriptsubscript𝜌𝑅𝑅subscriptJacsubscript𝜌𝑅𝒮𝑑subscript𝜌𝑅𝒮h_{\rho_{R}}(R)\geq\int\log|\operatorname{Jac}_{\rho_{R}}({\mathcal{S}})|\,d\rho_{R}({\mathcal{S}})\leavevmode\nobreak\ . (4.3)

Cette formule s’applique dans notre contexte car R𝑅R est à fibres finies. Il est alors clair que l’équation (1.5) découle de (4.3), de la partie 2 du Lemme 4.4, et de la définition du degré moyen.

Supposons maintenant que ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} ne charge pas Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}. Comme le degré local de R𝑅R est constant sur K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} égal à deg(R)/degtop(R)degree𝑅subscriptdegtop𝑅\deg(R)/\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R), hors d’un ensemble fini, la Proposition 3.3 implique deg¯=deg(R)/degtop(R)¯degdegree𝑅subscriptdegtop𝑅\underline{\mathrm{deg}}\,=\deg(R)/\operatorname{deg_{\mathrm{top}}}(R). Les égalités désirées découlent alors de l’estimation hρR(R)logdeg(R)deg¯(R)subscriptsubscript𝜌𝑅𝑅degree𝑅¯deg𝑅h_{\rho_{R}}(R)\geq\log\frac{\deg(R)}{\underline{\mathrm{deg}}\,(R)}. ∎

Démonstration du Théorème E.

On montre tout d’abord l’équivalence de (1), (2), (3), et (4). L’implication (1)\Rightarrow(2) est une conséquence immédiate du principe variationnel (Proposition 4.1). Pour montrer l’implication (2)\Rightarrow(3) supposons que ϕRϕ1italic-ϕ𝑅superscriptitalic-ϕ1\phi\circ R\circ\phi^{-1} n’ait bonne réduction pour aucune application de Möbius ϕitalic-ϕ\phi. Quitte à remplacer R𝑅R par un itéré assez grand on se ramène au cas où pour tout 𝒮JR𝒮subscript𝐽𝑅{\mathcal{S}}\in J_{R} on a degR(𝒮)deg(R)1subscriptdegree𝑅𝒮degree𝑅1\deg_{R}({\mathcal{S}})\leq\deg(R)-1, voir Lemme 2.12. Comme ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} est une mesure supportée dans l’ensemble de Julia, on a

logdeg¯(R)=logdegR(𝒮)dρR(𝒮)log(deg(R)1)<logdeg(R),¯deg𝑅subscriptdegree𝑅𝒮𝑑subscript𝜌𝑅𝒮degree𝑅1degree𝑅\log\underline{\mathrm{deg}}\,(R)=\int\log\deg_{R}({\mathcal{S}})\,d\rho_{R}({\mathcal{S}})\leq\log(\deg(R)-1)<\log\deg(R)\leavevmode\nobreak\ ,

et le Théorème D implique alors hρR(R)>0subscriptsubscript𝜌𝑅𝑅0h_{\rho_{R}}(R)>0. Pour montrer l’implication (3)\Rightarrow(4), notons d’abord que si R𝑅R a bonne réduction, alors le point 𝒮canKsubscript𝒮cansubscript𝐾{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}\in{\mathbb{H}_{K}} associé à la boule unité est totalement invariant. On a donc R[𝒮can]=deg(R)[𝒮can]superscript𝑅delimited-[]subscript𝒮candegree𝑅delimited-[]subscript𝒮canR^{*}[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]=\deg(R)[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}], et par définition de la mesure d’équilibre, on a ρR:=limn+deg(R)nRn[𝒮can]=[𝒮can]\rho_{R}:=\lim_{n\to+\infty}\deg(R)^{-n}R^{n*}[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]=[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]. Notons finalement que l’implication (4)\Rightarrow(1) est immédiate.

Comme l’implication (4)\Rightarrow(5) est immédiate, pour compléter la preuve du théorème il suffit de montrer l’implication (5)\Rightarrow(3). Supposons qu’il existe 𝒮𝖯K1𝒮subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathsf{P}^{1}_{K}} tel que ρR{𝒮}>0subscript𝜌𝑅𝒮0\rho_{R}\{{\mathcal{S}}\}>0. La Proposition 3.3 implique 𝒮K𝒮subscript𝐾{\mathcal{S}}\in{\mathbb{H}_{K}}. On tire de l’équation d’invariance (3.2) que pour tout point 𝒮superscript𝒮{\mathcal{S}}^{\prime} dans la grande orbite

𝒢:=n0,m0Rm(Rn{𝒮})assign𝒢subscriptformulae-sequence𝑛0𝑚0superscript𝑅𝑚superscript𝑅𝑛𝒮\mathcal{G}:=\bigcup_{n\geq 0,m\geq 0}R^{-m}(R^{n}\{{\mathcal{S}}\})

de 𝒮𝒮{\mathcal{S}}, on a ρR{𝒮}>0subscript𝜌𝑅superscript𝒮0\rho_{R}\{{\mathcal{S}}^{\prime}\}>0. La masse de ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} étant finie, quitte à remplacer 𝒮𝒮{\mathcal{S}} par un autre élément de 𝒢𝒢\mathcal{G}, on peut supposer ρR{𝒮}ρR{𝒮}subscript𝜌𝑅𝒮subscript𝜌𝑅superscript𝒮\rho_{R}\{{\mathcal{S}}\}\geq\rho_{R}\{{\mathcal{S}}^{\prime}\} pour tout point 𝒮𝒢superscript𝒮𝒢{\mathcal{S}}^{\prime}\in\mathcal{G}.

On a alors

ρR{𝒮}=degR(𝒮)deg(R)ρR{R(𝒮)}ρR{R(𝒮)}ρR{𝒮},subscript𝜌𝑅𝒮subscriptdegree𝑅𝒮degree𝑅subscript𝜌𝑅𝑅𝒮subscript𝜌𝑅𝑅𝒮subscript𝜌𝑅𝒮\rho_{R}\{{\mathcal{S}}\}=\frac{\deg_{R}({\mathcal{S}})}{\deg(R)}\,\rho_{R}\{R({\mathcal{S}})\}\leq\rho_{R}\{R({\mathcal{S}})\}\leq\rho_{R}\{{\mathcal{S}}\}\leavevmode\nobreak\ ,

d’où ρR(𝒮)=ρR(R(𝒮))subscript𝜌𝑅𝒮subscript𝜌𝑅𝑅𝒮\rho_{R}({\mathcal{S}})=\rho_{R}(R({\mathcal{S}})), degR(𝒮)=deg(R)subscriptdegree𝑅𝒮degree𝑅\deg_{R}({\mathcal{S}})=\deg(R), et R1(R(𝒮))={𝒮}superscript𝑅1𝑅𝒮𝒮R^{-1}(R({\mathcal{S}}))=\{{\mathcal{S}}\}. Par le même argument ρR(Rn(𝒮))=ρR(𝒮)subscript𝜌𝑅superscript𝑅𝑛𝒮subscript𝜌𝑅𝒮\rho_{R}(R^{n}({\mathcal{S}}))=\rho_{R}({\mathcal{S}}) pour tout n0𝑛0n\geq 0. La masse de ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} étant finie, on en déduit que la grande orbite 𝒢𝒢\mathcal{G} est finie. La Proposition 2.11 montre alors que R𝑅R est conjuguée à une fraction rationnelle ayant bonne réduction. ∎

5. Exemples

Nous donnons dans cette section quelques exemples significatifs afin d’éclairer les différences entre les contextes complexe et non archimédien.

5.1. Exemples de Lattès

Les exemples que nous allons décrire s’inspirent directement de leurs analogues complexes (voir [Mi2] pour une discussion détaillée dans ce cadre). Afin de simplifier la discussion nous supposerons que la caractéristique de K𝐾K est différente de 222 bien que ce ne soit pas strictement nécessaire. Rappelons de plus que K𝐾K est toujours supposé algébriquement clos et complet.

Soit qK𝑞𝐾q\in K satisfaisant 0<|q|<10𝑞10<|q|<1. Le quotient K/qsuperscript𝐾superscript𝑞K^{*}/q^{{\mathbb{Z}}} du groupe multiplicatif Ksuperscript𝐾K^{*} est une courbe elliptique Eqsubscript𝐸𝑞E_{q} dont le j𝑗j-invariant vérifie |j(Eq)|>1𝑗subscript𝐸𝑞1|j(E_{q})|>1. Réciproquement, toute courbe elliptique dont le j𝑗j-invariant est de module strictement plus grand que 1 peut être obtenue ainsi, voir [Sil1, II, §6, Theorem 6.1] ou [Roq, §6]. Pour chaque entier m𝑚m\in{\mathbb{Z}}, l’endomorphisme zzmmaps-to𝑧superscript𝑧𝑚z\mapsto z^{m} sur Ksuperscript𝐾K^{*} passe au quotient et induit l’endomorphisme [m]delimited-[]𝑚[m] de multiplication par m𝑚m sur Eqsubscript𝐸𝑞E_{q}.

Le quotient de Eqsubscript𝐸𝑞E_{q} par l’involution [1]delimited-[]1[-1] est isomorphe à K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}}. Par exemple si Eqsubscript𝐸𝑞E_{q} est donné par une équation de Weierstrass dans le plan y2=x3+a4x+a6superscript𝑦2superscript𝑥3subscript𝑎4𝑥subscript𝑎6y^{2}=x^{3}+a_{4}x+a_{6}, alors [1]delimited-[]1[-1] est le morphisme (x,y)(x,y)𝑥𝑦𝑥𝑦(x,y)\to(x,-y) et l’isomorphisme Eq/[1]K1subscript𝐸𝑞delimited-[]1subscriptsuperscript1𝐾E_{q}/[-1]\to{\mathbb{P}^{1}_{K}} est induit par la projection (x,y)xmaps-to𝑥𝑦𝑥(x,y)\mapsto x. Comme [m]delimited-[]𝑚[m] commute avec [1]delimited-[]1[-1], l’endomorphisme [m]delimited-[]𝑚[m] définit une fraction rationnelle Lm,qsubscript𝐿𝑚𝑞L_{m,q} sur K1subscriptsuperscript1𝐾{\mathbb{P}^{1}_{K}} de type Lattès, voir Remarque 5.2.

Pour tout t𝑡t réel, notons 𝒮(t)𝒮𝑡{\mathcal{S}}(t) le point de Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}} associé à la boule de centre 00 et de rayon exp(t)𝑡\exp(t).

Proposition 5.1.

La fraction rationnelle Lm,qsubscript𝐿𝑚𝑞L_{m,q} est de degré m2superscript𝑚2m^{2} et son ensemble de Julia Jm,qsubscript𝐽𝑚𝑞J_{m,q} est un segment fermé inclus dans Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}} et non réduit à un point. De plus, si pour tout i=0,,2m1𝑖0.2𝑚1i=0,\ldots,2m-1 et t[i2mlog|q|,i+12mlog|q|]𝑡𝑖2𝑚𝑞𝑖12𝑚𝑞t\in[-\frac{i}{2m}\log|q|,-\frac{i+1}{2m}\log|q|] on pose

L(t)={mt+i2log|q| si i est pairmti+12log|q| si i est impair𝐿𝑡cases𝑚𝑡𝑖2𝑞 si 𝑖 est pair𝑚𝑡𝑖12𝑞 si 𝑖 est impairL(t)=\begin{cases}mt+\frac{i}{2}\log|q|&\text{ si }i\text{ est pair}\\ -mt-\frac{i+1}{2}\log|q|&\text{ si }i\text{ est impair}\end{cases}

dans des coordonnées convenables, on a

Jm,q={𝒮(t),t[0,21log|q|]}subscript𝐽𝑚𝑞𝒮𝑡𝑡0superscript21𝑞J_{m,q}=\{{\mathcal{S}}(t),t\in[0,-2^{-1}\log|q|]\}

et Lm,q𝒮=𝒮Lsubscript𝐿𝑚𝑞𝒮𝒮𝐿L_{m,q}\circ{\mathcal{S}}={\mathcal{S}}\circ L sur [0,21log|q|]0superscript21𝑞[0,-2^{-1}\log|q|]. En particulier, htop(Lm,q)=logmsubscripttopsubscript𝐿𝑚𝑞𝑚h_{\mathrm{top}}\,(L_{m,q})=\log m.

Remarque 5.2.

Une fraction rationnelle RK(z)𝑅𝐾𝑧R\in K(z) est dite de Lattès s’il existe une courbe elliptique E𝐸E, un endomorphisme g:EE:𝑔𝐸𝐸g:E\to E et un morphisme fini π:EK1:𝜋𝐸subscriptsuperscript1𝐾\pi:E\to{\mathbb{P}^{1}_{K}} tel que Rπ=πg𝑅𝜋𝜋𝑔R\circ\pi=\pi\circ g. Lorsque |j(E)|1𝑗𝐸1|j(E)|\leq 1, alors R𝑅R est conjuguée à une fraction rationnelle ayant bonne réduction. Sur une courbe pour laquelle End(E)≄not-similar-to-or-equalsEnd𝐸\mathrm{End}(E)\not\simeq{\mathbb{Z}}, on peut aussi prendre pour g𝑔g un endomorphisme de degré plus grand ou égal à 2 qui n’est pas la multiplication par un entier. Dans ce cas l’invariant j(E)𝑗𝐸j(E) est un entier algébrique [Roq, §6] et par conséquent les exemples obtenus ont bonne réduction.

Remarque 5.3.

Dans le cas complexe, une application de Lattès est caractérisée par le fait que sa mesure d’équilibre est absolument continue par rapport à la mesure de Lebesgue, voir [Z, May] et aussi [BD] pour une généralisation aux dimensions supérieures. Ce type de résultat n’est pas transposable tel quel dans le cadre non archimédien. En effet une petite perturbation de Lm,qsubscript𝐿𝑚𝑞L_{m,q} ne change pas l’action sur un compact fixé de (K,dK)subscript𝐾subscriptdsubscript𝐾({\mathbb{H}_{K}},\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}), et par suite toute fraction de degré m2superscript𝑚2m^{2} suffisament proche de Lm,qsubscript𝐿𝑚𝑞L_{m,q} possède le même ensemble de Julia et la même action sur cet ensemble.

Remarque 5.4.

La loi d’addition sur une courbe elliptique est explicite. On peut ainsi obtenir facilement une formule pour les fractions Lm,qsubscript𝐿𝑚𝑞L_{m,q} avec m𝑚m petit. On trouve par exemple L2,q(T)=(T2λ)24T(T1)(Tλ)subscript𝐿2𝑞𝑇superscriptsuperscript𝑇2𝜆24𝑇𝑇1𝑇𝜆L_{2,q}(T)=\frac{(T^{2}-\lambda)^{2}}{4T(T-1)(T-\lambda)}, pour un λ{0,1}𝜆0.1\lambda\in{\mathbb{C}}\setminus\{0,1\} dépendant de q𝑞q. Nous renvoyons par exemple à [Mi1, §5].

Démonstration de la Proposition 5.1.

Notons 𝖠=𝖯K1{0,}superscript𝖠subscriptsuperscript𝖯1𝐾0\mathsf{A}^{*}={\mathsf{P}^{1}_{K}}\setminus\{0,\infty\}. C’est aussi l’espace analytique de Berkovich associé au groupe multiplicatif Ksuperscript𝐾K^{*}. Notons 𝖠superscript𝖠\mathcal{L}\subset\mathsf{A}^{*} le segment ouvert joignant 00 à \infty dans 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}. Soit G𝐺G le sous-groupe d’automorphismes de 𝖠superscript𝖠\mathsf{A}^{*} engendré par les morphismes zqzmaps-to𝑧𝑞𝑧z\mapsto qz et zz1maps-to𝑧superscript𝑧1z\mapsto z^{-1}. Le quotient 𝖠/Gsuperscript𝖠𝐺\mathsf{A}^{*}/G est isomorphe à 𝖯K1subscriptsuperscript𝖯1𝐾{\mathsf{P}^{1}_{K}}. Par ailleurs, G𝐺G préserve \mathcal{L}, et le quotient topologique de \mathcal{L} par G𝐺G est un segment JK𝐽subscript𝐾J\subset{\mathbb{H}_{K}}. On remarque maintenant que \mathcal{L} est totalement invariant par le morphisme zzmmaps-to𝑧superscript𝑧𝑚z\mapsto z^{m}, donc J𝐽J est aussi totalement invariant par Lm,qsubscript𝐿𝑚𝑞L_{m,q}. Il est facile de voir que J𝐽J ne contient pas de sous-ensemble compact strict totalement invariant, donc J𝐽J est l’ensemble de Julia de Lm,qsubscript𝐿𝑚𝑞L_{m,q} par la Proposition 2.9. La formule explicite de l’action de Lm,qsubscript𝐿𝑚𝑞L_{m,q} sur son ensemble de Julia résulte de l’action de zzmmaps-to𝑧superscript𝑧𝑚z\mapsto z^{m} sur \mathcal{L} par passage au quotient. ∎

5.2. La mesure d’équilibre n’est pas d’entropie maximale

Dans cette section on donne quelques exemples robustes de fractions rationnelles dont la mesure d’équilibre n’est pas d’entropie maximale.

Étant donné un segment I𝐼I de Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}} et une partie D𝐷D de I𝐼I, on dira qu’une application continue T:DI:𝑇𝐷𝐼T:D\to I est affine par morceaux s’il existe k1𝑘1k\geq 1 et des segments fermés I1,,Iksubscript𝐼1subscript𝐼𝑘I_{1},\ldots,I_{k} de Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}, dont la réunion est égale à D𝐷D, et tels que pour chaque j=1,,k𝑗1𝑘j=1,\ldots,k l’application T:IjI:𝑇subscript𝐼𝑗𝐼T:I_{j}\to I soit affine par rapport à la distance dKsubscriptdsubscript𝐾\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}. Si de plus DI𝐷𝐼D\subset I, k2𝑘2k\geq 2, et pour chaque j=1,,k𝑗1𝑘j=1,\ldots,k l’application T:IjI:𝑇subscript𝐼𝑗𝐼T:I_{j}\to I est bijective, alors on dira que T𝑇T est Bernoulli (voir Figure 2 pour un exemple). Dans ce cas l’entier k𝑘k et les segments I1,,Iksubscript𝐼1subscript𝐼𝑘I_{1},\ldots,I_{k} sont uniquement déterminés par T𝑇T. On appelle k𝑘k le degré topologique de T𝑇T.

Soit T:DI:𝑇𝐷𝐼T:D\to I une application affine par morceaux et Bernoulli, k𝑘k un entier et I1,,Iksubscript𝐼1subscript𝐼𝑘I_{1},\ldots,I_{k} comme ci-dessus. L’ensemble invariant maximal de T𝑇T, que l’on noter

JT:=n0Tn(I),assignsubscript𝐽𝑇subscript𝑛0superscript𝑇𝑛𝐼J_{T}:=\bigcap_{n\geq 0}T^{-n}(I),

est alors l’unique partie compacte de I𝐼I complètement invariante par T𝑇T. Notons de plus que l’entropie topologique de T|JTevaluated-at𝑇subscript𝐽𝑇T|_{J_{T}} est égale à logk𝑘\log k, et que les segments I1,,Iksubscript𝐼1subscript𝐼𝑘I_{1},\ldots,I_{k} forment une partition génératrice finie666i.e. Pour chaque suite {σ(j)}j1subscript𝜎𝑗𝑗1\{\sigma(j)\}_{j\geq 1} d’éléments de {1,,k}1𝑘\{1,\ldots,k\} l’ensemble j0TjIσ(j)subscript𝑗0superscript𝑇𝑗subscript𝐼𝜎𝑗\bigcap_{j\geq 0}T^{-j}I_{\sigma(j)} est réduit à un point pour T𝑇T. Par conséquent la formule de Rokhlin s’applique, et donne que pour toute mesure ρ𝜌\rho invariante par T𝑇T, on a

hρ(T|JT)=Jacρdρ.subscript𝜌evaluated-at𝑇subscript𝐽𝑇subscriptJac𝜌𝑑𝜌h_{\rho}(T|_{J_{T}})=\int\operatorname{Jac}_{\rho}\,d\rho\leavevmode\nobreak\ .

Nous renvoyons à nouveau à [PU, §1.9] ou [P, §10] pour plus de précisions.

Lemme 5.5.

Soit R𝑅R une fraction rationnelle à coefficients dans K𝐾K. Supposons qu’il existe un segment I𝐼I de Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}} et une partie D𝐷D de I𝐼I telle que R:DI:𝑅𝐷𝐼R:D\to I soit une application affine par morceaux et Bernoulli. Supposons de plus que, si l’on note par k𝑘k le degré topologique de cette application, alors les pentes correspondantes d1,,dksubscript𝑑1subscript𝑑𝑘d_{1},\ldots,d_{k} satisfont j=1kdj=deg(R)superscriptsubscript𝑗1𝑘subscript𝑑𝑗degree𝑅\sum_{j=1}^{k}d_{j}=\deg(R). Alors l’ensemble de Julia de R𝑅R est égal à l’ensemble invariant maximal de R:DI:𝑅𝐷𝐼R:D\to I, l’entropie topologique de R𝑅R est égale à logk𝑘\log k, et on a

hρR(R)=j=1kdjdeg(R)log(djdeg(R))htop(R),subscriptsubscript𝜌𝑅𝑅superscriptsubscript𝑗1𝑘subscript𝑑𝑗degree𝑅subscript𝑑𝑗degree𝑅subscripttop𝑅h_{\rho_{R}}(R)=\sum_{j=1}^{k}\frac{d_{j}}{\deg(R)}\log\left(\frac{d_{j}}{\deg(R)}\right)\leq h_{\mathrm{top}}\,(R)\leavevmode\nobreak\ ,

avec égalité si et seulement si d1==dksubscript𝑑1subscript𝑑𝑘d_{1}=\cdots=d_{k}.

La démonstration de ce lemme est ci-dessous. Étant donné un entier d5𝑑5d\geq 5 et aK𝑎𝐾a\in K satisfaisant |a|(0,1)𝑎0.1|a|\in(0,1), soit R0(z)=zd21+(az)dsubscript𝑅0𝑧superscript𝑧𝑑21superscript𝑎𝑧𝑑R_{0}(z)=\frac{z^{d-2}}{1+(az)^{d}}. Montrons l’inégalité (1.3). Soit 𝒮(t)𝒮𝑡{\mathcal{S}}(t) le point dans Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}} associé à la boule {zK1,log|z|t}formulae-sequence𝑧subscriptsuperscript1𝐾𝑧𝑡\{z\in{\mathbb{P}^{1}_{K}},\,\log|z|\leq t\}. On vérifie alors que pour chaque t𝑡t\in{\mathbb{R}} on a

R0(𝒮(t))={𝒮((d2)t)si tlog|a|;𝒮(dlog|a|2t)si tlog|a|.subscript𝑅0𝒮𝑡cases𝒮𝑑2𝑡si 𝑡𝑎𝒮𝑑𝑎2𝑡si 𝑡𝑎R_{0}({\mathcal{S}}(t))=\begin{cases}{\mathcal{S}}((d-2)t)&\text{si }t\leq-\log|a|\leavevmode\nobreak\ ;\\ {\mathcal{S}}(-d\log|a|-2t)&\text{si }t\geq-\log|a|\leavevmode\nobreak\ .\end{cases}

Si l’on pose I:={𝒮(t),t[0,d2log|a|]}assign𝐼𝒮𝑡𝑡0𝑑2𝑎I:=\{{\mathcal{S}}(t),\,t\in[0,-\tfrac{d}{2}\log|a|]\}, et,

I1:={𝒮(t),t[0,d2(d2)log|a|]},I2:={𝒮(t),t[d4log|a|,d2log|a|]},formulae-sequenceassignsubscript𝐼1𝒮𝑡𝑡0𝑑2𝑑2𝑎assignsubscript𝐼2𝒮𝑡𝑡𝑑4𝑎𝑑2𝑎I_{1}:=\{{\mathcal{S}}(t),\,t\in[0,-\tfrac{d}{2(d-2)}\log|a|]\}\leavevmode\nobreak\ ,\,I_{2}:=\{{\mathcal{S}}(t),\,t\in[-\tfrac{d}{4}\log|a|,-\tfrac{d}{2}\log|a|]\}\leavevmode\nobreak\ ,

alors les applications R0:I1I:subscript𝑅0subscript𝐼1𝐼R_{0}:I_{1}\to I et R0:I2I:subscript𝑅0subscript𝐼2𝐼R_{0}:I_{2}\to I sont bijectives et affines de pente d2𝑑2d-2 et 222, respectivement. L’application R0:I1I2I:subscript𝑅0subscript𝐼1subscript𝐼2𝐼R_{0}:I_{1}\cup I_{2}\to I est donc affine par morceaux et Bernoulli, et le lemme implique alors (1.3). Notons de plus que, comme l’ensemble I1I2subscript𝐼1subscript𝐼2I_{1}\cup I_{2} est borné dans Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}} par rapport à la métrique dKsubscriptdsubscript𝐾\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}, il existe un voisinage 𝒰dsubscript𝒰𝑑{\mathcal{U}}_{d} de R0subscript𝑅0R_{0} dans l’espace des fractions rationnelles de degré d𝑑d, tel que toute R𝒰d𝑅subscript𝒰𝑑R\in{\mathcal{U}}_{d} coïncide avec R0subscript𝑅0R_{0} sur I1I2subscript𝐼1subscript𝐼2I_{1}\cup I_{2}. Le lemme s’applique alors à chaque élément R𝑅R de 𝒰dsubscript𝒰𝑑{\mathcal{U}}_{d}, et on obtient (1.3) lorsqu’on remplace R0subscript𝑅0R_{0} par R𝑅R.

Plus généralement, soient k2𝑘2k\geq 2 et d1,,dk>1subscript𝑑1subscript𝑑𝑘1d_{1},\ldots,d_{k}>1 des entiers, et soient a2,,akKsubscript𝑎2subscript𝑎𝑘superscript𝐾a_{2},\ldots,a_{k}\in K^{*} tels que |ak|>>|a2|>0subscript𝑎𝑘subscript𝑎20|a_{k}|>\cdots>|a_{2}|>0. On pose δ1=d1subscript𝛿1subscript𝑑1\delta_{1}=d_{1}, tk+1=+¯subscript𝑡𝑘1¯t_{k+1}=+\infty\in\overline{{\mathbb{R}}}, et pour chaque j{2,,k}𝑗2𝑘j\in\{2,\ldots,k\}, δj=dj+dj1subscript𝛿𝑗subscript𝑑𝑗subscript𝑑𝑗1\delta_{j}=d_{j}+d_{j-1} et  tj=ln|aj|subscript𝑡𝑗subscript𝑎𝑗t_{j}=-\ln|a_{j}|. Finalement, on désigne par T::𝑇T:{\mathbb{R}}\to{\mathbb{R}} l’unique application continue égale à td1tmaps-to𝑡subscript𝑑1𝑡t\mapsto d_{1}t sur (,t2)subscript𝑡2(-\infty,t_{2}), et pour chaque j{2,,k}𝑗2𝑘j\in\{2,\ldots,k\}, affine de pente (1)jdjsuperscript1𝑗subscript𝑑𝑗(-1)^{j}d_{j} sur [tj,tj+1]subscript𝑡𝑗subscript𝑡𝑗1[t_{j},t_{j+1}]. Alors on vérifie que la fraction rationnelle

R(z):=zd1j=2k(1+(ajz)δj)(1)j,assign𝑅𝑧superscript𝑧subscript𝑑1superscriptsubscriptproduct𝑗2𝑘superscript1superscriptsubscript𝑎𝑗𝑧subscript𝛿𝑗superscript1𝑗R(z):=z^{d_{1}}\prod_{j=2}^{k}\left(1+(a_{j}z)^{\delta_{j}}\right)^{(-1)^{j}}\leavevmode\nobreak\ , (5.1)

est de degré j=1kdjsuperscriptsubscript𝑗1𝑘subscript𝑑𝑗\sum_{j=1}^{k}d_{j}, et que pour tout t𝑡t\in{\mathbb{R}} on a R(𝒮(t))=𝒮(T(t))𝑅𝒮𝑡𝒮𝑇𝑡R({\mathcal{S}}(t))={\mathcal{S}}(T(t)). Il est alors facile de voir que lorsque j=1kdj11superscriptsubscript𝑗1𝑘superscriptsubscript𝑑𝑗11\sum_{j=1}^{k}d_{j}^{-1}\leq 1, on peut choisir a2,,aksubscript𝑎2subscript𝑎𝑘a_{2},\ldots,a_{k} de telle sorte qu’il existe un intervalle compact J𝐽J de {\mathbb{R}}, pour lequel l’application R:{𝒮(t),T(t)J}{𝒮(t),tJ}:𝑅𝒮𝑡𝑇𝑡𝐽𝒮𝑡𝑡𝐽R:\{{\mathcal{S}}(t),\,T(t)\in J\}\to\{{\mathcal{S}}(t),\,t\in J\} soit Bernoulli de degré k𝑘k, avec pentes d1,,dksubscript𝑑1subscript𝑑𝑘d_{1},\ldots,d_{k}. Le lemme implique alors que l’ensemble de Julia de R𝑅R est égal à l’image par l’application 𝒮:(0,)K:𝒮0subscript𝐾{\mathcal{S}}:{\mathbb{R}}\to(0,\infty)\subset{\mathbb{H}_{K}} de l’ensemble invariant maximal de T𝑇T dans J𝐽J. Notons en particulier que l’ensemble de Julia de R𝑅R est contenu dans un segment compact de Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}, et qu’il est un segment (resp. un ensemble de Cantor) lorsque j=1kdj1=1superscriptsubscript𝑗1𝑘superscriptsubscript𝑑𝑗11\sum_{j=1}^{k}d_{j}^{-1}=1 (resp. j=1kdj1<1superscriptsubscript𝑗1𝑘superscriptsubscript𝑑𝑗11\sum_{j=1}^{k}d_{j}^{-1}<1). Notons d’autre part, que lorsque les entiers d1,,dksubscript𝑑1subscript𝑑𝑘d_{1},\ldots,d_{k} ne sont pas tous égaux, le degré de la fraction rationnelle (5.1) est au moins 555. Si de plus l’ensemble de Julia de cette fraction rationnelle est un intervalle, c’est-à-dire lorsque j=1kdj1=1superscriptsubscript𝑗1𝑘superscriptsubscript𝑑𝑗11\sum_{j=1}^{k}{d_{j}^{-1}}=1, alors le degré est au moins égal à 10.

Concrètement, notons que la fraction rationnelle R0subscript𝑅0R_{0} définie ci-dessus, est de degré d5𝑑5d\geq 5, et qu’elle est donnée par (5.1) lorsque k=2𝑘2k=2, d1=d2subscript𝑑1𝑑2d_{1}=d-2, d2=2subscript𝑑22d_{2}=2 et a2=asubscript𝑎2𝑎a_{2}=a. D’autre part, si k=3𝑘3k=3, d1=2subscript𝑑12d_{1}=2, d2=4subscript𝑑24d_{2}=4, d3=4subscript𝑑34d_{3}=4 et a2,a3Ksubscript𝑎2subscript𝑎3𝐾a_{2},a_{3}\in K vérifient 0<|a2|=|a3|2/3<10subscript𝑎2superscriptsubscript𝑎32310<|a_{2}|=|a_{3}|^{2/3}<1, alors la fraction rationnelle

R1(z)=z21+(a3z)81+(a2z)6,subscript𝑅1𝑧superscript𝑧21superscriptsubscript𝑎3𝑧81superscriptsubscript𝑎2𝑧6R_{1}(z)=z^{2}\frac{1+(a_{3}z)^{8}}{1+(a_{2}z)^{6}}\leavevmode\nobreak\ , (5.2)

est de degré 10, et si l’on note I:={𝒮(t),t[0,2log|a2|]}assign𝐼𝒮𝑡𝑡02subscript𝑎2I:=\{{\mathcal{S}}(t),\,t\in[0,-2\log|a_{2}|]\}, alors l’application R:II:𝑅𝐼𝐼R:I\to I est affine par morceaux, Bernoulli, et le lemme implique que JR1=Isubscript𝐽subscript𝑅1𝐼J_{R_{1}}=I et hρR1(R1)<htop(R1)subscriptsubscript𝜌subscript𝑅1subscript𝑅1subscripttopsubscript𝑅1h_{\rho_{R_{1}}}(R_{1})<h_{\mathrm{top}}\,(R_{1}) (voir Figure 2).

Refer to caption
11100d1=2subscript𝑑12d_{1}=23/4343/4111d2=4subscript𝑑24d_{2}=4d3=4subscript𝑑34d_{3}=4I3subscript𝐼3I_{3}I1subscript𝐼1I_{1}1/2121/2I2subscript𝐼2I_{2}
Figure 2. Action de R1subscript𝑅1R_{1} avec |a2|=|a3|2/3=e2subscript𝑎2superscriptsubscript𝑎323superscript𝑒2|a_{2}|=|a_{3}|^{2/3}=e^{-2}
Question 3.

Les exemples précédents motivent les questions suivantes. Existe-t-il un polynôme (resp. une fraction rationnelle de degré au plus 4, ou une fraction rationnelle de degré au plus 9 et d’ensemble de Julia connexe) dont la mesure d’équilibre ne soit pas d’entropie maximale ?

Démonstration du Lemme 5.5.

On peut supposer que k2𝑘2k\geq 2. Sinon J𝐽J est réduit à un point et R𝑅R a bonne réduction dans une coordonnée adéquate. Soient I1,,Iksubscript𝐼1subscript𝐼𝑘I_{1},\ldots,I_{k} les segments dans I𝐼I tels que pour chaque j=1,,k𝑗1𝑘j=1,\ldots,k l’application R:IjI:𝑅subscript𝐼𝑗𝐼R:I_{j}\to I soit bijective et affine de pente djsubscript𝑑𝑗d_{j}. Alors le degré local de R𝑅R en tout point dans l’intérieur de Ijsubscript𝐼𝑗I_{j} est au moins djsubscript𝑑𝑗d_{j}. Comme par hypothèse on a j=1kdj=deg(R)superscriptsubscript𝑗1𝑘subscript𝑑𝑗degree𝑅\sum_{j=1}^{k}d_{j}=\deg(R), on en déduit que pour chaque j=1,,k𝑗1𝑘j=1,\ldots,k le degré local de R𝑅R en chaque point de l’intérieur de Ijsubscript𝐼𝑗I_{j} est égal à djsubscript𝑑𝑗d_{j}, et que la préimage par R𝑅R de l’intérieur de I𝐼I est contenue dans I𝐼I. Comme R𝑅R est continue, on a R1(I)Isuperscript𝑅1𝐼𝐼R^{-1}(I)\subset I. La Proposition 2.9 implique alors que l’ensemble de Julia de R𝑅R est contenu dans l’ensemble invariant maximal JR|Dsubscript𝐽evaluated-at𝑅𝐷J_{R|_{D}} de R:DI:𝑅𝐷𝐼R:D\to I. Comme ce dernier ensemble est le plus petit sous-ensemble compact de I𝐼I complètement invariant par R|Devaluated-at𝑅𝐷R|_{D}, on a JR=JR|Dsubscript𝐽𝑅subscript𝐽evaluated-at𝑅𝐷J_{R}=J_{R|_{D}}. Par le Théorème C on a donc

htop(R)=htop(R|JR)=htop(R|JR|D)=logk.subscripttop𝑅subscripttopevaluated-at𝑅subscript𝐽𝑅subscripttopevaluated-at𝑅subscript𝐽evaluated-at𝑅𝐷𝑘h_{\mathrm{top}}\,(R)=h_{\mathrm{top}}\,(R|_{J_{R}})=h_{\mathrm{top}}\,(R|_{J_{R|_{D}}})=\log k\leavevmode\nobreak\ .

Comme le degré local de R𝑅R est constant égal à djsubscript𝑑𝑗d_{j} sur l’intérieur de Ijsubscript𝐼𝑗I_{j}, la partie 2 du Lemme 4.4 implique que le Jacobien JacρRsubscriptJacsubscript𝜌𝑅\operatorname{Jac}_{\rho_{R}} de la mesure ρRsubscript𝜌𝑅\rho_{R} est égal à deg(R)/djdegree𝑅subscript𝑑𝑗\deg(R)/d_{j} sur un sous-ensemble de mesure pleine de Ijsubscript𝐼𝑗I_{j}. On a alors ρR(Ij)=dj/deg(R)subscript𝜌𝑅subscript𝐼𝑗subscript𝑑𝑗degree𝑅\rho_{R}(I_{j})=d_{j}/\deg(R), et par la formule de Rokhlin,

hρR(R)=JacρRdρR=j=1kdjdeg(R)log(djdeg(R)).subscriptsubscript𝜌𝑅𝑅subscriptJacsubscript𝜌𝑅𝑑subscript𝜌𝑅superscriptsubscript𝑗1𝑘subscript𝑑𝑗degree𝑅subscript𝑑𝑗degree𝑅h_{\rho_{R}}(R)=\int\operatorname{Jac}_{\rho_{R}}\,d\rho_{R}=\sum_{j=1}^{k}\frac{d_{j}}{\deg(R)}\log\left(\frac{d_{j}}{\deg(R)}\right)\leavevmode\nobreak\ .

L’inégalité et la dernière assertion du lemme sont alors des conséquences de la convexité stricte de la fonction xxlogxmaps-to𝑥𝑥𝑥x\mapsto-x\log x. ∎

5.3. Deux exemples de polynômes en caractéristique mixte

Nous donnons enfin deux exemples de polynômes sur psubscript𝑝{\mathbb{C}}_{p} le complété de la clôture algébrique du corps psubscript𝑝{\mathbb{Q}}_{p} muni de la norme p𝑝p-adique. La particularité de ce corps est le fait que sa caractéristique est nulle, tandis que sa caractéristique résiduelle est égale à p>1𝑝1p>1. Rappelons que Kosuperscriptsubscript𝐾o{\mathbb{H}_{K}^{\mathrm{o}}} désigne l’ensemble des points non singuliers de Ksubscript𝐾{\mathbb{H}_{K}}, c’est-à-dire l’union des points rationnels et irrationnels.

Le premier exemple est extrait de [R2, Exemple 6.3].

Proposition 5.6.

Soit P(z)=p1(zpzp2)𝑃𝑧superscript𝑝1superscript𝑧𝑝superscript𝑧superscript𝑝2P(z)=p^{-1}(z^{p}-z^{p^{2}}). Alors l’ensemble de Julia de P𝑃P est inclus dans le sous-ensemble {diam=p1/(p1)}Kdiamsuperscript𝑝1𝑝1subscript𝐾\{\mathrm{diam}=p^{-1/(p-1)}\}\subset{\mathbb{H}_{K}}. De plus, il existe une application continue π:JP{1,,p}:𝜋subscript𝐽𝑃superscript1𝑝\pi:J_{P}\to\{1,\cdots,p\}^{\mathbb{N}} conjuguant P|JPevaluated-at𝑃subscript𝐽𝑃P|_{J_{P}} au décalage. La mesure d’équilibre est l’unique mesure d’entropie maximale, d’entropie égale à logp𝑝\log p. Les points de KoJPsuperscriptsubscript𝐾osubscript𝐽𝑃{\mathbb{H}_{K}^{\mathrm{o}}}\cap J_{P} sont tous prépériodiques, et les points périodiques sont tous répulsifs. En particulier, presque tout point pour la mesure d’équilibre appartient à KKosubscript𝐾superscriptsubscript𝐾o{\mathbb{H}_{K}}\setminus{\mathbb{H}_{K}^{\mathrm{o}}}.

Une légère modification du polynome précédent permet d’obtenir le résultat suivant.

Proposition 5.7.

Soit Q(z)=p1(zpzp2)+pzp2+1𝑄𝑧superscript𝑝1superscript𝑧𝑝superscript𝑧superscript𝑝2𝑝superscript𝑧superscript𝑝21Q(z)=p^{-1}(z^{p}-z^{p^{2}})+pz^{p^{2}+1}. Alors la restriction Q|JQevaluated-at𝑄subscript𝐽𝑄Q|_{J_{Q}} n’est pas localement injective (pour la topologie induite par la métrique d𝖯K1subscriptdsubscriptsuperscript𝖯1𝐾\mathrm{d}_{\mathsf{P}^{1}_{K}}) sur un ensemble non dénombrable.

Démonstration de la Proposition 5.6.

On montre que |P(z+w)P(w)|=p|z|p𝑃𝑧𝑤𝑃𝑤𝑝superscript𝑧𝑝|P(z+w)-P(w)|=p|z|^{p} pour tout p1/(p1)<|z|<1superscript𝑝1𝑝1𝑧1p^{-1/(p-1)}<|z|<1 et tout |w|1𝑤1|w|\leq 1. En particulier la préimage de toute boule fermée B{|z|1}𝐵𝑧1B\subset\{|z|\leq 1\} et de diamètre au moins p1/(p1)superscript𝑝1𝑝1p^{-1/(p-1)} est une réunion de p𝑝p boules fermées disjointes Bisubscript𝐵𝑖B_{i} avec diam(Bi)=(p1diam(B))1/p>p1/(p1)diamsubscript𝐵𝑖superscriptsuperscript𝑝1diam𝐵1𝑝superscript𝑝1𝑝1\mathrm{diam}(B_{i})=(p^{-1}\mathrm{diam}(B))^{1/p}>p^{-1/(p-1)}, et P:BiB:𝑃subscript𝐵𝑖𝐵P:B_{i}\to B est de degré p𝑝p.

En particulier, posons P1{|z|1}=B1Bpsuperscript𝑃1𝑧1subscriptsuperscript𝐵1subscriptsuperscript𝐵𝑝P^{-1}\{|z|\leq 1\}=B^{\prime}_{1}\cup\cdots\cup B^{\prime}_{p}, et notons Bi1,,iksubscriptsuperscript𝐵subscript𝑖1subscript𝑖𝑘B^{\prime}_{i_{1},\cdots,i_{k}} la composante de Pn{|z|1}superscript𝑃𝑛𝑧1P^{-n}\{|z|\leq 1\} telle que Pj(Bi1,,ik)Bijsuperscript𝑃𝑗subscriptsuperscript𝐵subscript𝑖1subscript𝑖𝑘subscriptsuperscript𝐵subscript𝑖𝑗P^{j}(B^{\prime}_{i_{1},\cdots,i_{k}})\subset B^{\prime}_{i_{j}} pour tout j𝑗j. Cette composante est une boule fermée de rayon p(1pk)/(p1)>p1/(p1)superscript𝑝1superscript𝑝𝑘𝑝1superscript𝑝1𝑝1p^{-(1-p^{-k})/(p-1)}>p^{-1/(p-1)}, et pour toute suite infinie α={ik}{1,,p}𝛼subscript𝑖𝑘superscript1𝑝\alpha=\{i_{k}\}\in\{1,\cdots,p\}^{\mathbb{N}}, la suite Bi1,,iksubscriptsuperscript𝐵subscript𝑖1subscript𝑖𝑘B^{\prime}_{i_{1},\cdots,i_{k}} est décroissante avec k𝑘k. Les normes 𝒮i1,,ikKsubscript𝒮subscript𝑖1subscript𝑖𝑘subscript𝐾{\mathcal{S}}_{i_{1},\cdots,i_{k}}\in{\mathbb{H}_{K}} associées sont donc décroissantes, et convergent vers un point 𝒮αsubscript𝒮𝛼{\mathcal{S}}_{\alpha} de KJPsubscript𝐾subscript𝐽𝑃{\mathbb{H}_{K}}\cap J_{P} tel que diam(𝒮α)=p1/(p1)diamsubscript𝒮𝛼superscript𝑝1𝑝1\mathrm{diam}({\mathcal{S}}_{\alpha})=p^{-1/(p-1)}.

Tout point hors de {|z|>1}𝑧1\{|z|>1\} est attiré par l’infini, donc on a l’inclusion JPKP:=n0Pn{|z|1}subscript𝐽𝑃subscript𝐾𝑃assignsubscript𝑛0superscript𝑃𝑛𝑧1J_{P}\subset K_{P}:=\bigcap_{n\geq 0}P^{-n}\{|z|\leq 1\}. Il vérifie de plus que JPsubscript𝐽𝑃J_{P} est égal au bord de KPsubscript𝐾𝑃K_{P}. L’application π:JP{1,,p}:𝜋subscript𝐽𝑃superscript1𝑝\pi:J_{P}\to\{1,\cdots,p\}^{\mathbb{N}} définie en envoyant 𝒮𝒮{\mathcal{S}} sur la suite (ik)subscript𝑖𝑘(i_{k}) telle que Pn(𝒮)Binsuperscript𝑃𝑛𝒮subscriptsuperscript𝐵subscript𝑖𝑛P^{n}({\mathcal{S}})\in B^{\prime}_{i_{n}} pour tout n0𝑛0n\geq 0 est alors continue et son inverse est donnée par α𝒮α𝛼subscript𝒮𝛼\alpha\to{\mathcal{S}}_{\alpha}. On conclut donc que P𝑃P est conjugué au décalage par π𝜋\pi.

Calculons maintenant l’image de la mesure d’équilibre par πsubscript𝜋\pi_{*}. On vérifie par récurrence que p2nPn[𝒮can]=(i1,,in)pn[𝒮i1,,in]superscript𝑝2𝑛superscript𝑃𝑛delimited-[]subscript𝒮cansubscriptsubscript𝑖1subscript𝑖𝑛superscript𝑝𝑛delimited-[]subscript𝒮subscript𝑖1subscript𝑖𝑛p^{-2n}P^{n*}[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]=\sum_{(i_{1},\cdots,i_{n})}p^{-n}[{\mathcal{S}}_{i_{1},\cdots,i_{n}}] pour tout entier n𝑛n. Comme p2nPn[𝒮can]ρPsuperscript𝑝2𝑛superscript𝑃𝑛delimited-[]subscript𝒮cansubscript𝜌𝑃p^{-2n}P^{n*}[{\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}]\to\rho_{P}, on voit donc que πρPsubscript𝜋subscript𝜌𝑃\pi_{*}\rho_{P} s’identifie à la mesure équilibrée sur l’espace des suites de symboles {1,,p}superscript1𝑝\{1,\cdots,p\}^{\mathbb{N}}.

Enfin on montre que 𝒮αKosubscript𝒮𝛼superscriptsubscript𝐾o{\mathcal{S}}_{\alpha}\in{\mathbb{H}_{K}^{\mathrm{o}}} si et seulement si α𝛼\alpha est prépériodique pour le décalage. Cette assertion est démontrée précisément dans [R2, Exemple 6.3]. Le fait que les points périodiques sont répulsifs résulte de A{degP=p}𝐴subscriptdegree𝑃𝑝A\subset\{\deg_{P}=p\}. ∎

Démonstration de la Proposition 5.7.

Notons que Q=P+pzp2𝑄𝑃𝑝superscript𝑧superscript𝑝2Q=P+pz^{p^{2}}. On vérifie tout d’abord que P=Q𝑃𝑄P=Q sur l’ensemble A:={|𝒮|1}{diam=p1/(p1)}assign𝐴𝒮1diamsuperscript𝑝1𝑝1A:=\{|{\mathcal{S}}|\leq 1\}\cap\{\mathrm{diam}=p^{-1/(p-1)}\}. On a vu sur l’exemple précédent que JPAsubscript𝐽𝑃𝐴J_{P}\subset A, et que les points répulsifs étaient denses dans JPsubscript𝐽𝑃J_{P}. On en déduit que donc JPJQsubscript𝐽𝑃subscript𝐽𝑄J_{P}\subset J_{Q}. Dans la suite, on notera p=K|K|subscriptsuperscript𝑝subscriptsuperscriptsuperscript𝐾𝐾{\mathbb{H}^{\mathbb{Q}}_{p}}={\mathbb{H}^{|K^{*}|}_{K}} pour K=p𝐾subscript𝑝K={\mathbb{C}}_{p}.

Lemme 5.8.

Pour tout 𝒮0JPsubscript𝒮0subscript𝐽𝑃{\mathcal{S}}_{0}\in J_{P}, et tout ε>0𝜀0\varepsilon>0, il existe un 𝒮JQp𝒮subscript𝐽𝑄subscriptsuperscript𝑝{\mathcal{S}}\in J_{Q}\cap{\mathbb{H}^{\mathbb{Q}}_{p}} tel que dK(𝒮,𝒮0)εsubscriptdsubscript𝐾𝒮subscript𝒮0𝜀\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}({\mathcal{S}},{\mathcal{S}}_{0})\leq\varepsilon et diam(𝒮)<p1/(p1)diam𝒮superscript𝑝1𝑝1\mathrm{diam}({\mathcal{S}})<p^{-1/(p-1)}.

Prenons 𝒮0subscript𝒮0{\mathcal{S}}_{0} dans JQsubscript𝐽𝑄J_{Q} et 𝒮0subscriptsuperscript𝒮0{\mathcal{S}}^{\prime}_{0} une préimage de 𝒮0subscript𝒮0{\mathcal{S}}_{0} par Q𝑄Q contenue dans {|𝒮|=1}𝒮1\{|{\mathcal{S}}|=1\}. Nous allons montrer que pour tout ε>0𝜀0\varepsilon>0, la restriction de Q𝑄Q à la boule de centre 𝒮0subscriptsuperscript𝒮0{\mathcal{S}}^{\prime}_{0} et de diamètre ε𝜀\varepsilon (pour la métrique dKsubscriptdsubscript𝐾\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}) n’est pas injective. Pour cela, on utilise le lemme précédent et on prend 𝒮1JPpsubscript𝒮1subscript𝐽𝑃subscriptsuperscript𝑝{\mathcal{S}}_{1}\in J_{P}\cap{\mathbb{H}^{\mathbb{Q}}_{p}} tel que dK(𝒮1,𝒮0)εsubscriptdsubscript𝐾subscript𝒮1subscript𝒮0𝜀\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}({\mathcal{S}}_{1},{\mathcal{S}}_{0})\leq\varepsilon, et diam(𝒮1)<p1/(p1)diamsubscript𝒮1superscript𝑝1𝑝1\mathrm{diam}({\mathcal{S}}_{1})<p^{-1/(p-1)}. Un tel point admet une préimage 𝒮1subscriptsuperscript𝒮1{\mathcal{S}}^{\prime}_{1} dont la distance à 𝒮0subscriptsuperscript𝒮0{\mathcal{S}}^{\prime}_{0} est p×εabsent𝑝𝜀\leq p\times\varepsilon. Il est facile de voir que Q𝑄Q envoie toute boule centrée en un point |z|=1𝑧1|z|=1 et de diamètre p1/(p1)superscript𝑝1𝑝1p^{-1/(p-1)} sur une boule de diamètre p1/(p1)superscript𝑝1𝑝1p^{-1/(p-1)}. On en déduit l’existence d’un point 𝒮2]𝒮0,𝒮1]{\mathcal{S}}^{\prime}_{2}\in]{\mathcal{S}}^{\prime}_{0},{\mathcal{S}}^{\prime}_{1}] de diamètre égal à p1/(p1)superscript𝑝1𝑝1p^{-1/(p-1)}.

Refer to caption
𝒮1subscript𝒮1{\mathcal{S}}_{1}𝒮1subscriptsuperscript𝒮1{\mathcal{S}}^{\prime}_{1}|z|<1𝑧1|z|<1|z|=1𝑧1|z|=1diam=p1/p1diamsuperscript𝑝1𝑝1\mathrm{diam}=p^{-1/p-1}𝒮2subscript𝒮2{\mathcal{S}}_{2}𝒮0subscript𝒮0{\mathcal{S}}_{0}𝒮0subscriptsuperscript𝒮0{\mathcal{S}}^{\prime}_{0}𝒮2subscriptsuperscript𝒮2{\mathcal{S}}^{\prime}_{2}𝒮1subscript𝒮1{\mathcal{S}}_{1}𝒮1subscriptsuperscript𝒮1{\mathcal{S}}^{\prime}_{1}Q𝑄Q𝒮2subscriptsuperscript𝒮2{\mathcal{S}}^{\prime}_{2}B1subscript𝐵1B_{1}Bpsubscriptsuperscript𝐵𝑝B^{\prime}_{p}B2subscriptsuperscript𝐵2B^{\prime}_{2}B1subscriptsuperscript𝐵1B^{\prime}_{1}𝒮2subscript𝒮2{\mathcal{S}}_{2}
Figure 3. Positions des points Sisubscript𝑆𝑖S_{i} et Sisuperscriptsubscript𝑆𝑖S_{i}^{\prime}

Notons que degP(𝒮)=1subscriptdegree𝑃𝒮1\deg_{P}({\mathcal{S}})=1 dès que diam(𝒮)<p1/(p1)diam𝒮superscript𝑝1𝑝1\mathrm{diam}({\mathcal{S}})<p^{-1/(p-1)}. Comme Q=P𝑄𝑃Q=P dans un voisinage (pour la métrique dKsubscriptdsubscript𝐾\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}) de A𝐴A, la boule ouverte B1subscript𝐵1B_{1} associée à 𝒮2subscript𝒮2{\mathcal{S}}_{2} et contenant 𝒮1subscript𝒮1{\mathcal{S}}_{1} admet p𝑝p préimages Bisubscriptsuperscript𝐵𝑖B^{\prime}_{i} dont les adhérences contiennent 𝒮2subscriptsuperscript𝒮2{\mathcal{S}}^{\prime}_{2} (voir Figure 3). La restriction de P𝑃P à chacune des Bisubscriptsuperscript𝐵𝑖B^{\prime}_{i} est injective et on en déduit donc que 𝒮1subscript𝒮1{\mathcal{S}}_{1} admet une préimage par Q𝑄Q dans chaque Bisubscriptsuperscript𝐵𝑖B^{\prime}_{i}. Chacune de ces préimages est à dKsubscriptdsubscript𝐾\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}-distance au plus ε𝜀\varepsilon de 𝒮2subscriptsuperscript𝒮2{\mathcal{S}}^{\prime}_{2} donc au plus (p+1)ε𝑝1𝜀(p+1)\varepsilon de 𝒮subscriptsuperscript𝒮{\mathcal{S}}^{\prime}_{*}. Nous avons donc montré que Q𝑄Q n’est injective sur aucune boule pour dKsubscriptdsubscript𝐾\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}} centrée en 𝒮0subscriptsuperscript𝒮0{\mathcal{S}}^{\prime}_{0}.

On en déduit que Q𝑄Q ne peut être localement injective en toute préimage de JPsubscript𝐽𝑃J_{P} par Q𝑄Q contenue dans {|𝒮|=1}𝒮1\{|{\mathcal{S}}|=1\}. L’ensemble JPsubscript𝐽𝑃J_{P} étant de type de Cantor, on en déduit la non locale injectivité de Q𝑄Q sur un ensemble non dénombrable. ∎

Démonstration du Lemme 5.8.

On traite tout d’abord le cas du point de psubscriptsuperscript𝑝{\mathbb{H}^{\mathbb{Q}}_{p}} associé à la boule centrée en 00 et de diamètre p1/(p1)superscript𝑝1𝑝1p^{-1/(p-1)}.

On remarque tout d’abord l’existence d’un point fixe z0subscript𝑧0z_{0} de module p2superscript𝑝2p^{2}. Pour voir cela, on applique [Rob, Theorem 1, p.307] en notant que pour |z|=p2𝑧superscript𝑝2|z|=p^{2}, on a |p1zp2|=|pzp2+1|>max{|p1zp|,|z|}superscript𝑝1superscript𝑧superscript𝑝2𝑝superscript𝑧superscript𝑝21superscript𝑝1superscript𝑧𝑝𝑧|p^{-1}z^{p^{2}}|=|pz^{p^{2}+1}|>\max\{|p^{-1}z^{p}|,|z|\}. Un calcul montre que |Q(z)|=|pzp2|>1superscript𝑄𝑧𝑝superscript𝑧superscript𝑝21|Q^{\prime}(z)|=|pz^{p^{2}}|>1 pour |z|=p2𝑧superscript𝑝2|z|=p^{2}, donc z0subscript𝑧0z_{0} est répulsif. En particulier il appartient à JQsubscript𝐽𝑄J_{Q}. On remarque maintenant que Q2{|z|<1}=Q{|z|<p}={|z|<pp2+1}superscript𝑄2𝑧1𝑄𝑧𝑝𝑧superscript𝑝superscript𝑝21Q^{2}\{|z|<1\}=Q\{|z|<p\}=\{|z|<p^{p^{2}+1}\}. On peut donc trouver une préimage de z0subscript𝑧0z_{0} par Q2superscript𝑄2Q^{2} dans {|z|<1}𝑧1\{|z|<1\}: on la note z1subscript𝑧1z_{1}.

Soit Bsuperscript𝐵B^{\prime} une boule fermée contenant z0subscript𝑧0z_{0} de rayon ε𝜀\varepsilon arbitrairement petit. Pour N𝑁N assez grand, QN(B)superscript𝑄𝑁superscript𝐵Q^{N}(B^{\prime}) contient JQsubscript𝐽𝑄J_{Q} car z0JQsubscript𝑧0subscript𝐽𝑄z_{0}\in J_{Q}, donc il existe une boule fermée B𝐵B de rayon εabsent𝜀\leq\varepsilon dont l’image par QNsuperscript𝑄𝑁Q^{N} est la boule de rayon p1/(p1)superscript𝑝1𝑝1p^{-1/(p-1)}. Le point de psubscriptsuperscript𝑝{\mathbb{H}^{\mathbb{Q}}_{p}} associé à B𝐵B est donc dans JQsubscript𝐽𝑄J_{Q}, et la préimage de B𝐵B par Q2superscript𝑄2Q^{2} est une boule fermée B0subscript𝐵0B_{0} de rayon comparable à ε𝜀\varepsilon dont le point de psubscriptsuperscript𝑝{\mathbb{H}^{\mathbb{Q}}_{p}} associé est aussi dans JQsubscript𝐽𝑄J_{Q}. Quitte à prendre ε𝜀\varepsilon assez petit, on peut donc s’arranger pour que B0subscript𝐵0B_{0} soit de diamètre <p1/(p1)absentsuperscript𝑝1𝑝1<p^{-1/(p-1)} et incluse dans {|z|<1}𝑧1\{|z|<1\}.

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B0subscript𝐵0B_{0}B𝐵Bz1subscript𝑧1z_{1}z0subscript𝑧0z_{0}𝒮nsubscript𝒮𝑛{\mathcal{S}}_{n}|z|<1𝑧1|z|<1𝒮subscript𝒮{\mathcal{S}}_{*}|z|=1𝑧1|z|=1diam=p1/p1diamsuperscript𝑝1𝑝1\mathrm{diam}=p^{-1/p-1}B(0,p2)𝐵0superscript𝑝2B(0,p^{2})B(0,1)=𝒮can𝐵0.1subscript𝒮canB(0,1)={\mathcal{S}_{\mathrm{can}}}
Figure 4. Preuve du Lemme 5.8

Soit Bn=B(zn,rn)subscript𝐵𝑛𝐵subscript𝑧𝑛subscript𝑟𝑛B_{n}=B(z_{n},r_{n}) une suite de boules de telle sorte que Q(Bn+1)=Bn𝑄subscript𝐵𝑛1subscript𝐵𝑛Q(B_{n+1})=B_{n} et Bn{|z|<1}subscript𝐵𝑛𝑧1B_{n}\subset\{|z|<1\}. Par récurrence, on montre que diam(Bn+1)=(diam(Bn)/p)1/p<p1/(p1)diamsubscript𝐵𝑛1superscriptdiamsubscript𝐵𝑛𝑝1𝑝superscript𝑝1𝑝1\mathrm{diam}(B_{n+1})=(\mathrm{diam}(B_{n})/p)^{1/p}<p^{-1/(p-1)} donc diam(Bn)p1/(p1)diamsubscript𝐵𝑛superscript𝑝1𝑝1\mathrm{diam}(B_{n})\to p^{-1/(p-1)}. De plus pour tout point |z|<1𝑧1|z|<1, on a |Q(z)|=p|z|p𝑄𝑧𝑝superscript𝑧𝑝|Q(z)|=p|z|^{p}, donc les centres de Bnsubscript𝐵𝑛B_{n} vérifient aussi |zn|p1/(p1)subscript𝑧𝑛superscript𝑝1𝑝1|z_{n}|\to p^{-1/(p-1)}. Si 𝒮nsubscript𝒮𝑛{\mathcal{S}}_{n} est le point de psubscriptsuperscript𝑝{\mathbb{H}^{\mathbb{Q}}_{p}} associé à Bnsubscript𝐵𝑛B_{n}, ces estimations impliquent dK(𝒮n,𝒮)0subscriptdsubscript𝐾subscript𝒮𝑛subscript𝒮0\mathrm{d}_{{\mathbb{H}_{K}}}({\mathcal{S}}_{n},{\mathcal{S}}_{*})\to 0, ce qui nous permet de conclure dans le cas 𝒮0=𝒮subscript𝒮0subscript𝒮{\mathcal{S}}_{0}={\mathcal{S}}_{*}.

Soit maintenant 𝒮0subscript𝒮0{\mathcal{S}}_{0} un point arbitraire de JPsubscript𝐽𝑃J_{P}, et ε>0𝜀0\varepsilon>0. L’ensemble Uε=JP{dp(𝒮0,)<ε}subscript𝑈𝜀subscript𝐽𝑃subscriptdsubscript𝑝subscript𝒮0𝜀U_{\varepsilon}=J_{P}\cap\{\mathrm{d}_{\mathbb{H}_{p}}({\mathcal{S}}_{0},\cdot)<\varepsilon\} définit un voisinage ouvert de 𝒮0subscript𝒮0{\mathcal{S}}_{0} dans JPsubscript𝐽𝑃J_{P}. On a vu que P𝑃P restreint à cet ensemble était conjugué au décalage, donc il existe un entier N1much-greater-than𝑁1N\gg 1 tel que PN(Uε)JPsubscript𝐽𝑃superscript𝑃𝑁subscript𝑈𝜀P^{N}(U_{\varepsilon})\supset J_{P}. Comme P=Q𝑃𝑄P=Q sur JPsubscript𝐽𝑃J_{P} et que Q𝑄Q est ouverte pour dpsubscriptdsubscript𝑝\mathrm{d}_{\mathbb{H}_{p}}, on conclut que QN{dp(,𝒮0)<ε}superscript𝑄𝑁subscriptdsubscript𝑝subscript𝒮0𝜀Q^{N}\{\mathrm{d}_{\mathbb{H}_{p}}(\cdot,{\mathcal{S}}_{0})<\varepsilon\} contient un voisinage de 𝒮subscript𝒮{\mathcal{S}}_{*} (toujours pour la métrique dpsubscriptdsubscript𝑝\mathrm{d}_{\mathbb{H}_{p}}). On peut donc trouver un point 𝒮JQsuperscript𝒮subscript𝐽𝑄{\mathcal{S}}^{\prime}\in J_{Q} dans ce voisinage de diamètre <p1/(p1)absentsuperscript𝑝1𝑝1<p^{-1/(p-1)}. Sa préimage 𝒮𝒮{\mathcal{S}} dans {dp(,𝒮0)ε}subscriptdsubscript𝑝subscript𝒮0𝜀\{\mathrm{d}_{\mathbb{H}_{p}}(\cdot,{\mathcal{S}}_{0})\leq\varepsilon\} est de diamètre <p1/(p1)absentsuperscript𝑝1𝑝1<p^{-1/(p-1)} et appartient à l’ensemble de Julia de Q𝑄Q car cet ensemble est totalement invariant. On a donc trouvé un point 𝒮JQ𝒮subscript𝐽𝑄{\mathcal{S}}\in J_{Q} tel que dp(𝒮,𝒮0)εsubscriptdsubscript𝑝𝒮subscript𝒮0𝜀\mathrm{d}_{\mathbb{H}_{p}}({\mathcal{S}},{\mathcal{S}}_{0})\leq\varepsilon et diam(𝒮)<p1/(p1)diam𝒮superscript𝑝1𝑝1\mathrm{diam}({\mathcal{S}})<p^{-1/(p-1)}. ∎

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